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Albert Grisa R, c/mlie). — ll.u-liette. éditeur. BoiELDiEU, sa vie , ses œuvres , son caractcrc, sa corretfjKmdanre (1 vol. in-18 jésus, .•i\ec j'ortrait et autographe). — Charpentier, éditeur. Adolphe Adam, sa vie, sa can'itre, sps Mémoires art'mti/jucM (1 vnl, in-18 Jésus, avec portrait et au- tographe). — Chaq)entier, éditeur. RossiNl, notes, impressions, sourcnirs, commentaires (l vol. in-8). — Claudin, éditeur. Rameau, essai sur sa vie et ses œuvres (1 vol. in-16). — Decaux, éditeur. GiusEPPE Verdi, vita aneddotica (1 vol. in-4, avec portrait, 10 eaux-fortes et autographe>). — Milan. Ricordi , éditeur. ■xr.nA/v- \ ARTHUR POUGIN. DICTIONNAIRE HISTOKIQUE ET PITTOnESQUE DU THÉÂTRE DES ARTS QL'I S'Y RATTACHE.NT. POÉTIQUE, ÎICSIQDE, DANSE, PASTOJIIME. DÉCOK, COSTUMK, MACHINERIE, ACK0BATI3ME. JEUX ASTIQUES, SPECTACLES FORAINS, DIVERT1SSEMEXT>! SCÉSIQDES, FETES PUBLIQUES, RÉJOUISSANCES POPULAIRES, CARROUSELS, COURSES, TOURNOIS, ETC., ETC., ETC. OUVRAGE JLI.l'sTIiÉ DE ^i-ÏO (;RAVI:RES et de -S UllROMOLITHIHiRAPHIKS. PARIS, LIBRAIRIE DE FIRMIN-DIDOT ET C» IJIPRIilEDRS-LJBRAIRES DE L'IXSTITUT DE FRAXCE, RUK JATOl), 56. 1885. Toua ilrolu irienii. / 1 s tùl'^'fo 3 301912 • . • • • • • • • • • * • • • • • • • • • • • • \ A M. HALANZIER-DUFRÉNOY, EX-1)IRE('TEUH DE l/OPÉRA, PRÉSIDENT DE l' A SS. Mais il s'en faut bien que ce vaste plan ait été exactement suivi et mis à exécution dans les trois gros volumes qui composent cet ouvrage. Tandis que l'abbé de Laporte y accumulait les analyses de pièces, Chamfort se bornait à lui fournir un certain nombre d'articles, souvent fort intéressants d'ailleurs, mais qui n'avaient trait qu'à la poétique théâtrale, à la marche et à la conduite du poème dramatique d'une part, et, de l'autre, à divers renseignements sur les jeux scéniques des anciens. Du théâtre moderne considéré matériellement ou artistiquement, de la représentation scénique, du jeu du comédien, rien, absolument rien! Il fallut attendre un demi-siècle pour voir deux autres écrivains, Jal et Harel, publier (1824) un ouvrage ainsi intitulé : ^Dictionnaire théâtral, ovl Douze cent trente-trois vérités sur les directeurs, régis- seurs, acteurs, actrices et employés des divers théâtres; confidences sur les procédés de l'illusion ; examen du vocabulaire dramatique ; coup d'œil sur le matériel et le inoral des spectacles, etc., etc., etc. i> Ici, nous tombons à peu près en pleine fan- taisie, et parfois dans l'inutilité. On en jugera par le premier mot qui se présente dans ce petit volume, et qui n'offre qu'un rapport assurément bien indirect avec le PLACE AU THÉÂTRE ! ix sujet choisi par les auteurs : e«ogrifî n'était pas toujours facile, et les définitions, en particulier, étaient fffifftpin lufihiMf'**, d'autant cjue, dans beaucoup de cas, je n'avais sur quoi m'appuyer, /'^ fMWaiotiH n'ayant pas même encore été ébauchées ailleurs. J'espère pourtant que j*âM rhàMki h U'H rtrmlra claires, intelligibles, même pour les personnes absolument HfMk^i^réA fin tfiéâtre, de ùtcon â l)ien faire saisir et comprendre ce que j'avais à Mon plttn f^rirnitif était fort loin de comporter l'étendue que j'ai fini par donnera cet ouvrage. J-==S>**^ A ABONNÉ. — Depuis la disparition de notre Ïliéâtre-Italien, il n'y a plus à Paris que deux théâtres qui aient des abonnés, TOpéra et la Comédie- Franc ai se ; encore, à cette dernière, ralx)nnement est-il une innovation récente, et réserve-t-on surtout aux abonnés un jour spécial de chaque semaine, le mardi. A rOpéra, certaines personnes s'abonnent soit à une loge, soit à un fauteuil d'orchestre, et retiennent cett« loge ou ce fauteuil soit pour tous les spectacles de l'année indistinctement (excepté ceux du samedi et du dimanche, qui sont en dehors de l'abonnement), soit pour un jour régulier de chaque semaine. Les abomiés des loges sont des dilettantes ; les abonnés des fauteuils d'orchestre sont généralement des amateurs d'un autre genre, qui ne viennent à l'Opéra que pour y contempler la splendeur des jupes des danseuses. Pour la plupart, ils entrent généralement dans la salle au moment précis où commence le divertissement ou le ballet, et s'empressent de partir dès que celui- ci est terminé. C'est une manière comme une autre d'encourager la musique. A la Comédie-Française, on encourage la littérature d'une autre façon. Sous le prétexte que les familles abonnées peuvent amener au spectacle de jeunes filles dont les oreilles ne sauraient sans danger entendre certaines ex- DIOnOÎÏN.URE DU THÉATUE. pressions, on se permet de porter une main indigne sur le texte de Molière ou sur celui de ^lusset, et de faire subir aux œuvres de deux écrivains qui sont, à des titres divers, la gloire et l'honneur de la scène française, des mutila- tions impies par lesquelles elles sont odieu- sement défigurées. Nous nous bornons ici à constater le fait, en souhaitant que la cause, c'est-à-dire les abonnés, en disparaisse le plus rapidement possible. Dans les théâtres des grandes villes de pro- vince, les abonnés sont génémlement assez nombreux, et la force qu'ils acquièrent par leur nombre les a souvent mis à même d'exer- cer une tyrannie intolérable. Naguère encore, dans ces villes, où les débuts d'une troupe nouvelle prenaient chaque année une impor- tance aussi ridicule qu'exagérée, les abonnés étaient véritablement omnipotents ; ils faisaient la loi à toutes les administrations théâtrales, le prenaient de haut avec le directeur, aussi bien qu'avec les infortunés artistes qui avaient le malheur de tomber sous leur coupe, et fai- saient souvent dégénérer les débuts en soirées tumultueuses, couronnées par des scandales indignes. Seuls, les abonnés prenaient voix au chapitre, se considérant comme au-dessus du public entier, s'arrogeaient le droit, de par le scrutin dont ils s'étaient fait les uniques par- 1 ABONNEMENT. - ABOYEUR. ticipante, de voter l'admisBion ou l'excInBion de tel ou tel artiste, et cela d'une façon son- yent brutale, groBsière et cruelle. Les annales des théâtres de départements sont pleines de faits indignes, véritablement inqualifiables,- dont les abomiês se rendaient à chaque iijïtaift coupables, et qui sont loin d'être à, l'honnvur de la courtoisie et de la polite^'^.ge'ns qui se prétendaient bien élevés. Tonf cela, fort heu- reuBement, tend à di^J;)âj»iCTa', et la race des abonnés ne sera •bien^OÈ'- plus qu'un souvenir. ABOîiX'^î;^'T. — C'est une sorte de contrat passé entre un particulier et une admi- nistration tbéâtrale, par lequel celles-ci assure à celui-là la jouissance, pendant un temps dé- terminé, d'un certain nombre de places fixées pour les représentations qui ont lien dans une salle de spectacle. A Paris, où l'abonnement est fort rare nu- jourd'hui, il n'entriune de la part de la direc- tion d'un théâtre aucune concession sur le prix des pinces, et assure seulement au locataire la possession de ces places pour toutes les repré- sentations d'abonnement. Il n'en est pas de même en province, oii les prix d'abonnement Clarlatana at Inira Hboyrars sont fort au-dessous des prix courants, et où, particulièrement, les officiers en garnison peu- vent jouir d'un abonnement en échange du montant d'une journée de solde par mois. Le directeur se résen-e , dans les contrats d'a- bonnement, la faculté de donner, dans le cours de son exploitation, un certain nom brede représen- tations dites (( en dehors de Tabonnement n. Il doit prendre alors la précaution de faire inscrire sur ses affiches et sur ses programmes la men- tion :J&OMnemCT/«MS^»nrfK, qui vient remplacer celle inscrite d'ordinaù% : Abonti^nenl cetirant. ABOYEUR. — Dans les foires, à la porte des baraques de saltimlranques, on trouve toujours, soit parmi ceux qui font la ijarade, soit en de- hors d'eux, un individu spécialement chargé de faire le bonime/it et d'amorcer les specta- teurs. Il fait connaître la nature du spectacle, détaille aux badauds les merveilles qui \'ont être offertes à leur admiration, et, d'une voix à la fois puissante et enrouée, les incite à fran- chir le seuil de ce paradis enchanté. C'est Va- boyejir, bien connu par la péroraison devenue classique de son discours : Entrez, Messieurs et Mesdames, ça ne coûte que dix centimes, deux sous! et l'on ne paie qu'en sortant, si Voii est content. Naguère encore, et grâce à la rt'gle- ACADÉMIE DE DAXSE. mentation tyranniqne qui pesait sa? nos théâ- tres, tous dépendants de l'autorité, certains d'entre eux, considères Benlcment comme spec- tacles, étaient t^ans, ponr affirmer eux- mêmes leur infériorité, d'avoir à leur porte un aboyeur qui les distinguait de leurs grands confrères. C'est ainsi que, sur l'ancien bou- levard du Temple, le théâtre de M™" Saqni, les Funambules, le Lazari avaient chacun un aboyeur. ACADÉMIE DE DANSE. ~ Louis XIT, qui avait, on le sait, la manie de tout réglemen- ter, voulut organiser régulièrement jusqu'à la danse, et, par lettres patentes en date de 1661, constitua une Académie royale de danse, dont ces letti'CB, qui forment un document vraiment singulier, justifiaient ainsi la création : — « Bien que l'artde la danse, disait le souverain, ait toujours été reconnu l'un des plus honnêtes et plus nécessaires à former le corps, et lui donner les premières et plus naturelles disposi- tions à tonte sorte d'exercices, et entre autres à ceux des armes, et pur conséquent l'un des plus avantageux et plus utiles à notre noblesse et autres qui ont l'honneur de nous approcher, non seulement en temps de guerre dans nos armées, mais même en temps de paix dans le divertissement de nos ballets : néanmoins il s'est, pendant les désordres et la confusion des dernières guerres, introduit dans ledit art, comme en tous les autres, un si grand nombre d'abns capables de les porter à leur ruine irré- parable, que plusieurs persoimes, pour ignorans et inhabiles qu'ils aient été en cet art de la danse, se sont ingérés de la montrer publique- ment..,. » C'est pour remédier à un incon- vénient si grave et qui sans doute aurait pu faire courir à l'État de cruels dangers, qu'était créée une Académie royale de danse, composée des artistes que voici, nommés par le roi en personne : i Savoir, François Galland, sieur du Désort, maître à danser de la reine, notre très chère épouse ; Jean R«nauld, maître à danser de notre très cher et unique frère le duc d'Or- léans; Thomas Levacher; Hilaire d'OHvet; Jean et Guillaume Rej-nal, frères; Guillamne Queru ; Nicolas de l'Oise; Jean- François Pi- quet ; Jean Grigny ; Florent Galand-Déaert ; et G uillaume Renault ; lesquels s'assembleront une fois par mois, dans tel lieu ou maison qui sera par eux choisie et prise à frais communs, pour y conférer entre eux du fait de la danse, aviser et délibérer sur les moyens de la perfectionner, et corriger les abus et défauts qui peuvent avoir été ou être ci-après introduits.... » Cette ACADÉMIE NATIONALE DE MUSIQUE. — ACCESSOIRES. acatlùmie d'un gonre original eut la vie dure, et Bon existence se prolongea pendant pins d'un BÎèclc. C'est Bculement vers 1780 qn'on la vit dJsparaStre. ACADÉMIE NATIONALE DE MUSI- QUE.—Titre officielda théâtre de l'Opéra, do Paris. Lorsqu'en 16C9 Louis XIV accorda à Pierre Perrin (dit l'abbé Perrin) l'autorisation de fonder à Paris le premier théâtre lyrique qnl ait existé en cette ville, ce Bonverain, qui avait la manie des académies, donna à cet établisse- ment dramatique le titre d'Acadcmiedea opéras; puis lorsque, trois ans plna tard, il déposséda Perrin au profit de Lully, les lettres patentes il'>li\n.'es à ce dernier modifièrent quelque peu le titre affecté au nouveau théâtre, et lui don- nèrent celui d'Académie royale de musiqne. Mais le public parisien ne voulut jamais con- sentir à employer une dénomination dont la loDgneur l'effrayait sans doute, et, dès les pre- miers jours, trouTï beaucoup plus rationnel de désigner le théâtre de Lully sous le simple nom â'Opéri. Nous en trouvons la preuve dans le I ]' Acidifie njslc Je mulqns. \ivTe de Cbappuzean, !e Thédire Françoia,' publié en 1074, et où l'auteur n'emploie pas d autre mot lorsqu'il veut parler de ce théâtre. (Voy: Oi'ÉRi.) ACCADEMIA. — Voyez Coscert. ACCESSOIRES. — Au théâtre, tontce qni ne rentre ni dans la catégorie du décor, ni dans exile du costume, fait partie des accessoires, — ACCESSOIRES (chef des). — ACCLAMATIONS. et Dieu sait s'ils sont nombreux aujourd'hui , avec les exigences de la scène moderne ! La let- tre que la jemie première cache dans son sein est un accessoire, de même que le portrait pré- cieusement conservé par l'amoureux ou la bourse dont le traître paie les services d'un as- sassin. Accessoires le papier, les plumes, l'en- crier placés sur une table, la pendule et les flambeaux qui ornent la cheminée ; accessoires tout le ser\âce d'un repas somptueux, et les pâtés de carton avec les biscuits qu'on met de- dans, et les poulets dont le découpage est si facile ; accessoires aussi le miroir dans lequel une jolie femme doit se regarder, et la lanterne qui sert à faire une recherche dans un jardin , à la nuit close, et la corbeille de mariage qu'on apporte à la signature du contrat ; accessoires encore les cartons qu'on rencontre chez le vieux notaire, et les armures qui garnissent une siille de chevaliers, et les lustres qui éclairent une salle de bal, et le gi-abat qui s'étend sur le plan- cher d'une misérable mansarde, que sais- je! • Tous ces objets, et bien d'autres encore, prennent place, loin^ciue la représentation est terminée, dans un réduit étrange qui prend le nom de « cabinet d'accessoires », sorte de pandémonium auprès duquel pâlirait la lx)uti- que du brocanteur le mieux achalandé. On conçoit d'ailleurs les proportions que doit pren- dre ce (( cabinet », où, dans un désordre appa- rent, tout est cependant soigneusement classé, mais de telle façon que seuls peuvent s'y re- connaître les employés spécialement préparés à la garde de ce trésor. Selon la nature du théâtre, ceux-ci sont d'ordinaire au nombre de deux, de quatre ou de six, placés sous les ordres d'un chef respon- sable. Ce sont eux qui sont chargés de la garde, de la conservation, de l'entretien, et aussi de la pose et de la distribution des accessoires : de la pose de ceux qui doivent trouver place sur la scène, de la distribution dô ceux que doit avoir en main tel ou tel acteur, lequel ne doit jamais avoir à s'en occuper. Les accessoires sont devenus aujourd'hui une partie si impor- tante du spectacle scénique, que leur envahis- sement est incessant. On ne sait plus où l^s mettre, le fameux cabinet devient chaque jour trop petit, on loi crée des déversoirs à droite et à gauche, jusque dans les corridors du cin- tre, jusque dans les dessous du théâtre, et en- fin on en est réduit à emmagasiner au dehors tous ceux qui ne trouvent pas leur emploi dans le spectacle courant. Pour donner une idée du nombre et de la diversité des objets qui rentrent dans la caté- gorie des accessoires, nous emprunterons au Manuel dramatique de Colson la liste de ceux qui étaient nécessaires à la représentation d'un vaudeville en un acte de Sewrin, les Habitants des Landes, joué aux Variétés en 1811 : Une pierre qu'on puisse prendre ou rouler; un petit panier à anse pour Clareinie et un pour Pier- rette; des échasses pour Rustique, Eustache, un paysan, le tabellion et le père Boucaut ; une cassette pour le père Boucaut; un parasol pour la mère Dax; une mandoline pour Zoé; un livre et une canne pour M. de Saint-Léon ; une gourde, un cou- teau de chasse, une valise, une gibecière pour Trem- blin ; des échasses pour deux paysans qui traversent le théâtre à la scène 11^; une gourde pour Eusta- che; une bourse pleine d'or pour M*"® de Saint- Léon ; des échasses pour les Landais et les Landai- ses ; un tambourin et un galoubet pour un Landais ; des castagnettes pour d'autres. On voit le rôle que jouaient les accessoires dans un simple vaudeville en un acte, sans spectacle et sans ambition scénique. Qu'on se figure ce que ce peut être dans une de ces fée- ries rutilantes telles qu'on en joue aujourd'hui ! ACCESSOIRES (Chef des). — C'est l'em- ployé supérieur qui a la surveillance et la res- ponsabilité du service des accessoires, matériel et personnel. ACCESSOIRES (Garçons d'). — Em- ployés subalternes chargés du service des ac- cessoires. ACCESSOIRES (Rôles). — On appelle rôles accessoires, ou, plus simplement, acces- soires, les rôles qui n'ont que quelques lignes à dire et dont l'importance est nulle. Une panne (Voy. ce mot) est un mauvais rôle ; un acces- soire est un rôle qui n'existe pas. ACCLAMATIONS. — Le public, au théâ- ACCOMPAGNATEUR. — ACROBATE. tre , ne se contente pas toujours d'applaudir ; lorsque le talent d'un grand artiste ou le génie d'un grand écrivain soulève en lui l'enthousias- me, il lui arrive de se répandre en acclamations spontanées et bruyantes. Le fait le plus célèbre en ce genre est celui qui signala la sixième re- présentation d'une pièce de Voltaire, Irène, pendant laquelle on couronna sur la scène le buste de l'auteur. Voltaire était présent dans une loge, et toute la saHe aussitôt, se tournant vers lui , éclata eu applaudissements et en ac- clamations* frénétiques. ACCOMPAGNATEUR. — Pans les théâ- tres Indiques importants, on trouve toujoui-s au moins un accompagnateur au piano, chargé de donner les leçons et d'apprendre aux chanteurs les rôles des opéras nouveaux, ainsi que d'ac- compagner au piano les répétitions jusqu'au moment où l'orchestre vient prendre pirt aux études. A Paris, où les accompagnateurs sont toujours des artistes fort distingués, souvent des compositeurs éinérites, ils prennent le titre de Chefs du chant. (Vov. ce mot.) ACCOMPAGNATEIUl AU CLAVECIN. — Autrefois, à l'éixxjue où rorchestre n'avait accjuis ni la puissance de sonorité ni la force d'expression qu'il possède aujourd'hui , l'usage s'était établi , surtout en Italie, de placer au milieu des symphonistes un accompagnateur au id.\eQm (nMcsfro al cemhalo), qui réglait les mouvements et soutenait paiticulièrement les récitatifs. Il n'y a pas encore bien longtemps ({u'on a renoncé, en Italie, k cet usage, qui n'a jamais prévalu en France, bien qu'on en ait eu des exemples à l'Opéra, notamment en 173(>, lors de la représentation des Génies, ou- VT&ga de M"' Duval. « M"'' Duval, dit un an- naliste, accompagna elle-même tout son opéra sur le clavessin de l'orchestre, où le public la vit avec plaisir et étonnement. » Les com- positeurs italiens avaient l'habitude de tenir eux-mêmes le clavecin d'accompagnement aux premières représentations de leurs opéras ; il en résultait parfois des incidents douloureux ou bizarres. En 1735, Pergolèse donnait à Rome un opéra nouveau, VOUmpiade, qui, malgré ses beautés, tomba lourdement; un imbécile ou un misérable eut la cruauté de lancer au compositeur, assis au clavecin, une orange qui l'atteignit à la tête; celui-ci, déjà souffrant, et désolé d'une telle humiliation, tomba bien- tôt malade, et s'en alla mourir à Naples de chagiin et d'épuisement. En 1813, à Rome encore, Rossini, donnant le Barbier de Sévittê et tenant le piano à l'orchestre, fut hué, sifflé, insulté de la façon la plus odieuse par un pu- blic inepte et sans pitié. ]\Iais Rossini n'était* pas impressionnable et sensible comme Pergo- lèse; il tint tête à l'orage, éclata de rire à la barbe de ce public, et revint le lendemain à sa place, d'où celui-ci, cette fois mieux inspiré, l'an-acha |)our le porter en triomphe. ACCOMPAGNEMENT. — Que son rôle soit tantôt secondaire, tantôt prédominant, ({u'il soit chargé de la partie chantante ou de ce qu'on pourrait appeler la partie suivante, l'orchestre, au théâtre, forme l'accompagne- ment du chant. En disant cela, nous ne faisons ni critique, ni esthétique; nous nous bornons à constater un fait pmtique. ACCORD (Prendre l').— C'est l'opération à l'aide de laquelle tous les artistes d'un orches- tre, soit au théâtre, soit au concert, s'assurent que tous leurs instruments sont d'accord entre eux et se trouvent bien au diapason. C'est gé- ncTalement la clarinette qui donne le la, sur lequel s'accorde un des premiers violons, qui le traiLsmet ensuite à chacun des musiciens suc- cessivement. Cette cjpération doit se faire loin du public, avant l'arrivée à l'orchestre. ACOUSTIQUE. — On dit de l'acoustique d'une salle de spectacle qu'elle est bonne ou qu'elle est mauvaise selon que cette salle est l)lus ou moins sonore, plus ou moins sourde. L'acoustique de l'ancienne salle de l'Opéra, rue Le Peletier, était excellente; celle de l'Opéra actuel est malheureusement loin d'avoir les mêmes qualités, malgré tous les efforts tentés en vue de corriger ses défauts ; l'acoustique de rOi>éra-Comique est généralement satisfai- sante. ACROBATE. — Ce mot servait particulière- ment, autrefois, à désigner certains faiseurs de tours d'équilibre, principalement ceux qui exer- çaient leur adresse sur une corde lâche ou ten- due. On se servit ensuite, pour caractériser spécialement ceux-ci, do l'expression danseurs de corde, dont la précision ne laisse rien à dé- sirer. Aujourd'hui, on confond sous le même nom à'acroialea les danseurs de corde, les gymnastes, les faiseurs de trapèze, tous ceux enfin qui font preuve de force oud'adresse, de quelque manière et par quelque procède que ce soit, dans les exercices d'équilibre. ACTE. — C'est la division principale d'une œuvre dramatique. Lorsque celle-ci comporte plusieurs actes, ces actes sont séparés entre eux par des entr'actes ou des intermèdes. « Les poètes grecs, a dit Chamfort, ne connoissoient point la division des poèmes en cinq actes. Il est vrai que l'action paroît de temps en temps interrompue sur le théâtre et que les acteurs, occupés hors de la scène ou gardant le silence, font plac« aux chantres du chœur, ce qui pro- duit des intermèdes ; mais non pas des actes danslcgoiit des modernes, parce que les chants du chœur se trouvent lies d'iutérét à l'action principale, avec laquelle ils ont toujours un rappott marqué, du moins dans les pièces de Sophocle ; car Euripide s'est quelquefois écarté de cette règle, et ses chœurs sont souvent de beaux morceaux de poésie qui n'ont aucun rap- port avec l'action. Si, dans les nouvelles édi- tions, leura tragédies se trouvent divisées en cinq actes, c'est aux «liteurs et aux commen- tateurs qu'il faut attribuer ces dissions, et nullement aux originaux. » Nos grands poètes tragiques, à commencer par Coraeille et Eotrou, ont divisé leurs poè- mes dramatiques en cinq actes ; Molière fit de môme pour ses comédies do mœurs ou de ciiractèros, à roxcei)tion de VEcûle des Maris, qui est on trois acte.s ; mais dans ses ccuvres fantaisistes ou ses bouffonneries il adopta sou vent cette dernière coupe, t*'moins VAmotir médecin, Amphyirion, Poureeatignac , George Dandin, h Malade imaginaire, le Médecin mal- gré lui. Quant à ses fara's, elles sont toutes en u» acte. Les genres, depuis lora, s'étant subdivisés à l'infini, on s fait et l'on fait tous les jours des pièces en un, deux, trois, quatre ou cinq actes. Toutefois, la division en deux actes, qui est de beaucoup la plus rare, semble aussi la moins heureuse. Par exception , on a écrit parfois des pièces eu plus do cinq actes, et un poète olscur, nommé Jean Hays, a publié on 1597 une tra- gédie en sept actes et un prologue, intitulée Cammale; de nos jours, M. Bouchardy a renou- velé ce procédé dans un de ses drames. Mais si les écrivains les plus féconds se sont généralement contenus dans les limites de la conpe en cinq actes, il en est qui, trouvant cette division insuffisante, ont tracé des œu\Tes qui exigeaient plusieurs journées de représen- tations. Sous ce rapport, Richard Wagner, avec sa fameuse tétralogie des Nibelungm, ne saurait passer pour un novateur. Dès ItiOl, 10 ACTE. Alexaudre Hardy faisait représenter k l'Hôtel a\'ait divisée en quatre journées de cinij act«s, de Bourgogne, sous ce titre : let GluuUg et et l'aimée suivante un autre poète, nommé Ki- loyales Amourg de TMag'ene et de diaridée, colas Orouchy, faisait imprimer la Béatitude une tragédie qui ne comportait pas moins de ou Ifs JnimitahUs Amours de Théoys et de Châ- tiait journées de cinq actes chacune ; en 1631, rile, pii-ce en dk poèmes de cinq act«8 chacun.! Puget de la Serre publiait une autre tragédie, Plus prvs de nous, il faut citer Beaumarchais, Pandunie ou la Princesse malhnireuse, qu'il dont les trois pièces fameuses : h Barbier de BïcrcEcva d'aOTobatei w Séville , le Mariage de Figaro , la Mère quoique formant chacune un tout complet, se font suite pourtant et se complètent l'une par l'autre'. Sedatne avait fait de môme en donnant le Comte ^Albert et la Suite du Comte d'Albert, imitant en cela Corneille, qui a^'ait complété le Menteur avec la Suite du Menteur. Alexan- dre Dumas divisa sou Monte Crieto en plusieurs journées, et II. Emile Augier a complété sa comédie les Effrontés en donnant ensuite le Fils de Gitioyer. Enfin Richard Wagner, on le sait, a fait représenter sous ce titre général, V Anneau du Nibeiung, une tétralogie musicale qui forme quatre opéras distincts. Certains auteurs aussi ont achevé une idée mise en œu- vre par un de leurs devanciers : ainsi ia Cal- prenWe fit représenter en 16S9 la Mort des en/ans tTHérode ou la Sutle de Marianne, qui faisait suite en effet à la Marianne de Tristan, et (îeor»e Sand dans sa comédie le Mariage de Vicforine, a, dcnne une suite au Phtlosoplte sans le savoir, de Sedaine ACTEUR - Celui qui se raoi\tre sur un SUR. Il théâtre pour remplir un rôle dans la représen- tation d'une pièce. Chez les Grecs, la profes- sion d'acteur était très honorée, et les acteurs appelés à prendre part aux grandes fêtes théâ- trales ofRctelles taicnt conaidcrcs comme des fonctionnaires publics A Rome, au contraire, il était interdit aux citoyens de monter sur un théâtre et le mctier d acteur n'étiiit exercé fjne 'iauHr , tisg^iliF de TrUtuD l'Heimlte (fconll«p« de» par des étrangers, principalement des Grecs, et par des affranchis. Un sénateur n'avait pas le droit de rendre visite à un acteur, et un simple chevalier même se fût compromis en lui par- lant dans la rue. On cite pourtant l'exemple de Cicéron, qui fut l'ami de Roscius. Néan- raoinB, tous les préjugés qui ont si longtemps pesé chez noua sur les acteurs (qui étaient ex- s par le fait même de leur profes- sion), proviennent du mépris que les Romains ont toujours paru affecter pour eux, I! n'en est plus de même aujourd'iiui , fort heureusement, et l'on a reconnu que l'acteur, comme tout autre individu, peut être un fort honnête homme, un bon citoyen et un chef de famille irréprochable ; si à ces qualités il joint le',titlent et l'intelligence, il est accueilli partout avec joie, avec honneur et considération. ACTEUR ES REPRÉSENTATIONS. 12 ACTEUR EN REPRÉSENTATIOXS. — Ijorequ'an acteur de l'un des thëàtres'de Paris va se joindre accidentellement 'à une troupe ■ de province, dans lea spectacles de laquelle il consent à se montrer, on dit qu'il est c en re- pTésentations t. Ce procédé était fort en usage autrefois et d'un effet presque certain sur le public des départements, qui, n'ayant guère la possibilité d'entendre et de connaître les ar- tistes pjirisiens, accourait en foule lorsque quelqu'un d'entre eui venait ainsi s'offrir à lui. Aujourd'hui, que les chemins de fer amènent chaque jour à Paris des milliers de provinciaux, qui se répandent chaque soir dans les théâtres de la capitale, 1' « acteur en représentations n n'a plus guère de raison d'êtie ni d'influence. Ou alors ce sont des troupes entières, qui , or- ganisées à Paris, s'en vont faire par toute la France de ^andes toumcea, pour colporter une pièce nouvelle et la faire connaître par- ACTEURS-AUTEURS. 13 tout. — La rétribution offerte naguère à l'ac- teur en représentations par les directeurs de théâtres de proWnce était de deux sortes : ou on lui oÉfrait de courir les chances de l'exploita- tion faite avec lui en lui abandonnant la moitié de la recette nette de chaque spectacle (c'est- à-dire une fois déduit le montant des frais journaliers), ou il exigeait pour chatiuc repré- sentation une somme fixe, qui variait selon la notoriété de l'aitiste et l'importance du théâtre exploité c eta t tantôt c nt tantôt de u. tro s quatre et même c n ] cent** f-acsp. ACTEl R-> \l TEl Its — 0 sait qu'Es- ch le S pi 1 \r 8t ] hdi volontiers les premiers rôles (Lins leurs tragé- dies et dans leurs comédies. Dans les temps modernes, les deux plus grands i>oi'te8 drama- tiques dont l'humanité puisse se glorilîer, Sha- kespeare et Molière, furent d'abord comédiens. Mais, en dehors de ces deux hommes de génie, un grand nombre d'acteurs plus ouTuoina célè- bres se sont distingués aussi, en divers pays, comme auteurs âramatiques, joignant ainsi la gloire de l'écrivain à celle du comédien. Iffland en Allemagne, Garrick en Angleterre, Goldoni en Italie, nous offrent des exemples sous ce rap- port. En France, à partir du dix-septième siè- cle, beaucoup d'acteurs aimes du public se sont montrés écrivains distingues ; a l'ancien théâtre du Marais, c'était Dorimond, Cheva- lier, Rosimond; à l'Hôtel de Bourgogne, au Palais-Royal, à la rue Guénégaud, sur la grande scène française illustrée par Molière, ce fut Baron, Brécourt, Champmeslé, Hautcroche, Viiliers, Dancourt, la Xoue, Raymond Poisson et son petit-fils Philippe Poisson, Raisin, Orandval, la Thuilleric, Legrand; à l'an- cienne Comédie- Italienne, c'était Dominique Biancolclli, Louis Riccoboni, son fils François, FabioSticotti,Romagnesi. Plus prcsde nous, on trouve à citer les noms de Dumaniant, de Ri- chaud-Martelli , de Collot-d'Herboia, de Fabro 14 ACTEURS DAXS LA SALLE. d'Éfelantine, de Monvel, de Picard, d'Alexan- dre Duval , de Léger. De nos jours, on sait que plnaieurs comédiens excellenta ont anssi abordé le théâtre comme auteurB, entre autres Samson, BeaDvallet, Mourose, MM. Régnier, Got, Pierre Berton, etc. — D'autre part, quel- ques chanteurs se sont distingués dans la com- position dramatique ; en première ligne il faut citer Lamette, Solié, Caveaux, qui ont écrit de nombreux opéras- comifjues, et Jélyotte, l'admirable interprtte des œ ivres de Rameau, qui a fait repreaenter aussi un opéra M Du- prcz lui-même le Lclebre t(.ni>r, a produit plu- sieurs ouvrages dramatiques. Quelques autres exemples sont encore à mentionner. M"" Flami- nia, la célèbre amoureuse de notre Comédie-Ita- lienne, a écrit une pièce pour ce théâtre ; Qui- nault, l'excellent artiste de la Comédie-Fran- çaise, a composé un opéra pour l'Académie royale de musique, et on lui doit la musique des divertissements chantés ou dansés de beau- coup de pièces de son propre théâtre ; la char- mante M"" Favart, marchant sur les brisées de son mari, a écrit aussi quelques jolies pièces pour l'aimable scène dont elle faisait )a gloire; M"" Julie Candeille, à la fois comédienne, chanteuse, virtuose, compositeur et écrivain, M"" Julie Candeille, qui appartint à la Comé- die-Française et 4 l'Opéra, fit représenter sur le premier de ces théâtres une pièce fort agréa- ble, Catherine ou la Belle Fermière, dont elle remplissait le principal rdlc et dans laquelle elle avait écrit plusieurs morceaux de musique qu'elle chantait et exécutait elle-même. Enfin, de nos jours, on sait que M. Hervé, l'un de nos plus féconds compositeurs d'opérettes, a souvent tenu un râle important dans les pièces dont il écrivait lui-même les paroles et la mu- sique. ACTEURS DAKS LA SALLE. — Dans certaines pièces d'un genre fort comique, on a employé ce procédé aujourd'hui très connu d'un acteur qui se place dans la salle et qui, à un moment donné, se met à entamer un collo- que avec les acteurs eu scène, au grand éba- hissement du public, qui le prend d'abord pour un simple spectateur. Ce moyen d'effet n'est pas d'une invention aussi récente qu'on pour- rait le croire, et nous le voyons employé dès le commencemeut du dix-huitième siècle à l'ancien Opéra-comique de la Foire, dans une pièce de d'OmeTal intitulée Arlequin traitant; en nu certain endroit de cette pièce, Arlequin, ACTEURS FORAINS — ADAPTATION. 15 dit lin chroniqueur, « faisoit le mauvais lazzi de montrer au doigt un homme assis parmi les spectateurs, qui se levoit tout en colère, et lui donnoit de ses gands par le ^nsage. La garde venait sur le théâtre , ce qui laissoit le public dans l'attente d'un événement sérieux, qui se terminoit cependant par une mauvaise plai- santerie, l'offensé n'étant autre qu'un acteur qui se faisoit connaître et faisoit rire les specta- teurs de leur bévue. y> Le Jfercure de France nous rapporte un au- tre exemple de ce jeu de théâtre. Le 12 juillet 1744, en réjouissance de la prise de Fumes, on donnait à l'Opéra-Comique un spectacle gratis, composé de la Statue animée et des Jardins de V hymen, jolie pièce de Piron : Après la représentation de la première pièce, dit le Mercure, un acteur de la troupe s'avança sur le bord du théAtre, pour annoncer aux spectateurs qu'ils ne pouvoient pas donner la seconde pièce qu'ils avoient promise , l'acteur qui devoit remplir un des rôles se trouvant indisposé ; qu'ils étoient tous fâchés de ce contre-tems. Le sieur Lécluse, acteur des plus comiques de ce même théâtre, avoit pris la précaution de se placer comme spectateur, pendant la première pièce , dans une des premières loges, en habit de jardinier, confondu avec toutes sortes de gens de tous états : toute l'assemblée se récria fort sur cette annonce de ne pas jouer la pièce promise ; le feint jardinier se lève comme les autres, et dit qu'on prétendoit que la pièce fût jouée, avec tant d'art et d'apparence de vérité, que tous les spectateurs donnèrent parfaitement dans l'illusion. L'acteur qui avoit déjà fait l'annonce proposa enfin au feint jardinier, qui étoit toujours dans la loge, de vouloir bien se charger du rôle de l'acteur malade , puisqu'il en avoit l'habit. Le défi fut accepté, le supposé jardinier quitta sa place pour passer au théâtre , et joua son rôle avec Tapplaudissement de toute l'assemblée. Depuis lors, cet effet comique a été employé bien souvent, et notamment dans deux vaude- villes célèbres il y a une quarantaine d'années, un Scandale et les Cabinets particuliers. ACTEURS FORAINS. — On désignait naguère sous ce nom, à Paris, les acteurs qui faisaient partie des troupes établies aux foires Saint-Germain et Saint-Laurent. L'expression avait pris cours tout naturellement, et n'avait aucun caractère désobligeant. Parmi ces artis- tes il en était d'ailleurs de réellement distin- gués, entre autres ceux qui appartenaient à rOpéra-Coriiique et dont quelques-uns firent plus tard la gloire de la Comédie-Française et de la Comédie-Italienne : Clairval, Laruette, Audinot, M"'' Luzy, etc. ACTION. - Au point de vue du théâtre, on peut dire que l'action se compose de l'en- semble des faits, des incidents divers qui dé- coulent du sujet, excitent l'intérêt du specta- teur et forment la trame de la pièce représentée. L'action est donc plus ou moins serrée, plus ou moins compliquée, selon la nature de l'ou- vrage. EUe peut être jusqu'à un certain point rudimentaire dans une comédie de mœurs ou de caractères ; il la faut au contraire vive et nerveuse dans une comédie d'intrigue. Dans le drame, elle est généralement rapide, émouvante et fertile en péripéties. ACTRICE. — Celle qui rempUt un rôle, sur un théâtre, dans une action scénique. Aux premiers temps de Tart dramatique, en Grèce, il n'y avait point d'actrices, et les rôles de femmes étaient tonus par des hommes. A Rome, au contraire, les femmes étaient admises sur le théâtre, et l'art moderne ne saurait se priver du concours si précieux de l'élément féminin dans les représentations théâtrales. ADAPTATION. — C'est ainsi que l'on qualifie généralement la traduction et la mise à la scène, sur un théâtre français, d'un opéra étranger. Lorsqu'il s'agit d'une œuvre de ce genre, une traduction, en effet, ne saurait être complètement exacte; outre que le rythme musical oblige souvent l'arrangeur à altérer plus ou moins le sens des vers pour se soumet- tre à sa précision, il arrive parfois que le fond même de l'action scénique subit des modifica- tions plus ou moins importantes, en raison de la différence qui existe entre les coutumes, les exigences d'un public étranger, et celles du public français. Il y a donc, en réalité, adapta- tion bien plutôt que traduction littérale. Les opéras de Weber, de Rossini, ont été ainsi IG ADMINISTRATEUR. — AÉRONAUTES. adaptés naguère par Casbil-Blaze, fort habile à | ce métier difficile, et qui a fait représenter à rOdéon, de 1825 à 1828, ses adaptations de Freùchiilz, dî'Euryanihe, à'OteJlo, de la Gazza îadra, de la Doyina del Lago, et aussi des Nozze di Figaro et du Don Giovanni de Mo- zart. (Voy. Pasticha) On appelle aussi adaptation, à l'étranger, la traduction presque littérale d'oeuvres dramati- ques françaises, que les arrangeurs tronquent pourtant d'une certaine façon pour pouvoir impunément faire passer ces œu^Tes sous leur nom, et s'en approprier le profit et la gloire en dépit des conventions internationales relatives à la propriété littéraire et aitistique. En Angleterre surtout, ce genre de piraterie lit- téraire s'exerce avec une elTronterie et une im- pudeur qui ont amené, de la part de quel- ques-uns de nos écrivains les plus fameux, des réclamations et des revendications aussi éner- giques que justifiées. ADMINISTRATEUR. — On donne, dans certains théâtres, le nom d'administrateur gé- néral à un employé supérieur, qui est parfois un associé de la direction, et à qui le dii*ect^ur délègue une partie de ses pouvoirs en lui con- fiant la haute main sur tout ou partie des ser- vices de l'entreprise. ADMINISTRATION. — On considère comme faisant partie de l'administration d'un théâtre non seulement les véritables employés supérieurs administratifs, tels que le directeur gérant, l'administrateur général, le caissier, le secrétaire de la direction, mais encore certains chefs de services artistiques, tels que les régis- seurs et les chefs d'orchestre, auxquels in- combe, en réalité, une certaine responsabilité administrative, par le fait du personnel im- portant et nombreux qui est placé sous leurs ordres immédiats et dont ils doivent assurer le fonctionnement régulier. ADMISSION. — Dans les théâtres impor- tants de la province, c'est au scrutin, et à la majorité des voix, que se décide le sort des ar- tistes qui \iennent effectuer leurs débuts au commencement de chaque année théâtrale. Ceux des spectateurs qui prennent part au scrutin votent Vadmission ou le rejet de l'artiste dont le talent est soumis à leur appréciation. AÉRONAUTES. — Nous n'avons pas à parler ici des courageux hommes de science qui ont fait de l'aérostation une étude spéciale, qui ont cherché, sans avoir pu réussir encore à le trouver, le secret de la direction des Imllons, et de ceux qui, trop souvent au péril de leur vie, comme Crocé-Spinelli , ont fait, dans le seul intérêt d'importantes recherches scientifiques, les ascensions les plus dangereuses. Nous n'a- vons à parler ni des frères Montgolfier, ni de Pilàtre des Roziers, ni de Garnerin, ni de tant d'autres. Nous voulons seulement rappeler que les ascensions aérostatiques ont été fréquem- ment l'un des éléments les plus attractifs des grandes fêtes populaires, et qu'elles ont tou- jours présenté, envisiigées même à c<î point de vue superficiel et un peu vulgaire de la curio- sité pure, un spectacle curieux et plein d'inté- rêt. Il y a une soixantaine d'années, il n'y avait pas de fête complète au fameux jardin de Ti- voli sans une ascension de ballon, de même qu'il y a vingt ans, pas une représentation de l'Hippodrome ne pouvait se terminer sans ce spectacle. Je ne parlerai* pas de Blanchard, que sa tra- versée de la Manche de Dou\Tes à Calais, à la fin du dernier siècle, fit surnommer irrespec- tueusement le a: Don Quichotte de la Manche i>, mais je l'appellerai la mort dramatique de sa femme, en 1819. Déjà, à cette époque, une simple ascension devenait un régal trop mai- gre pour les vrais amateurs ; il y fallait join- dre certains jeux dangereux, et l'infortunée M"® Blanchard fut la victime de ces exigences. Elle faisait des ascensions à Tivoli, et elle avait pris l'habitude de faire suspendre au-des- sous de sa nacelle tout un jeu de pièces d'arti- fices, de fusées, de feux de bengale, auxquelles on mettait le feu au moment de lâcher les cor- des du ballon. M"^' Blanchard s'enlève un jour dans ces conditions, mais, alors qu'elle était arrivée à une certaine hauteur, le feu prend à son ballon, et la malheureuse trouve la mort dans une chute terrible. MM. Godard frères ont fait longtemps, on AFFICHAGE. 17 se le rappelle, à Paris, des renouvelaieut chaque dimancJic. L'un â'eux faOlit être victime, un jour, de la manie d'nn ■ Anglais qu'il avait pris pour compagnon, et qui, arrivé à une très grande hauteur, se mettait en devoir de couper les cordes qui les retenaient au ballon. Il n'eut que le temps de redescendre. Il y a vingt ou vingt-cinq ans, deux aéro- nautes intrépides, M. et M™ PoitcWn, s'enle- vaient tous les dimanches à l'Hippodrome, et chaque fois lear lallon emi>ortait soit un che- val suspendu par une sangle sous la nacelle, soit un homme qui, pendant l'ascension, fiii- sait, sous cette même nacelle, les esercicea de trapèze les plus périlleux. Il y a longtemps <}u'on n'a vu se reproduire pareil spectacle. AFFICHAGE. — A Paris, l'affichage pour les théâtres se fait régulièrement chaque jour, vers onze heures du matin. Un imprimeur a\-iaé a centralisé entre ses mains le service des affiches de tous les théâtres, qu'il se charge, DICTIOKHIIBX DIT TH&ATBB. après les avoir imprimées, de faire aiBcher lui- même dans tout Fai'is. A cet effet il a, depuis une quinzaine d'années, obtenu k concession d'un grand nombre de colonnes, dites colonnes- affiches, qui ont été élevées dans tous les en- droits fréquentés de la ville, sur les boulevards, dans les grandes voies, sur les places ot carre- fours, et sur lesquelles, chaque matin, sont apposées les affiches de tons les théâtres. Ces i s'informer de ce qui se passe dans les théâtres colonnes sont éclairées le soir, afin que leaaffî- n'a qu'à s'arrêter quelques instantaderant l'une ches soient toujours lisibles, et celui qui veut { d'elles pour être renseigné sur tous les points. Il Vil sans dire que chaque théâtre a toujours snr sa façade l'affiche du spectacle du soir. AFFICHES. — Les affiches sont un mojen de publicité indispensable pour les théâtres. Dans une grande ville, où ceux-ci sont nom- breuï, où le public est d'ailleurs sollicité de tontes parts et de toutes façons, elles doivent être répanânes à profusion eur tous lee pointa de la cit4^, de manière à attirer l'attention des passants et à exciter chez tous te désir d'aller au spectacle. HES. 19 On assure que les Romains déjà faisaient us^e de l'affiche, — évidemment peinte on mannacrite. Les modernes la tiennent, dit-on j de Cosme d'Oviedo, écrivain dramatique espa* gnol qui a de peu précédé Cervantes, et qui le premier l'aurait employée. Ce qui est certain, c'est qu'on s'en servait en France dès le sei- zième siècle. Mais on pense bien qu'elle n'était pas alore ce que noos la voyons aujourd'hui, et qu'elle n'atteig^uait pas les proportions parfois ridiculement gigantesques qu'elle affecte en de certains cas. Tout d'abord, elle n'offrait au 20 AFFK pablic ni les noms des comédienB, ni ceux des auteurs ; ou se contentait d'y ioBcrire le titre de l'œuvre représentée, en l'accompagnant de quelque phrase qui faisait l'éloge de cette œu- vre. Ce n'est qu'à partir de 1617, et à l'occa- sion d'une tragédie de Théophile, Fyrame et Thitbé, représentée à l'Hôtel de Bourgogne avec un succès retentissant, que les auteurs consentirent à se laisser nommer par l'aflîcbe : « Cette pièce, dit de Léris, avec la Silvie de ïlairet. Us Bergerm de Racan et V Amarante de Gombauld, rendirent le théâtre plus célèbre, et les poètes ne firent plus de difficulté de lais- ser mettre leurs noms aux affiches des comé- diens, ce qu'on n'avoit pas encore vti. » Lorsque, à la fin du xvii'^ siècle, trois grands théâtres eurent à Paris une existence permanente, ils jugèrent à propos de distin- guer leurs affiches par une couleur à chacun d'eux particulière : « L'afficheur, dit Chap- puzeau, doit estre ponctuel à afficher de bonne heure à tous les carrefours et lieux nécessaires qui luy sont marquez. Les affiches sont rouges pour l'Hostel de Bourgogne (la Comédie-Ita- lienne), vertes pour l'Hostet de la rue Maza- rine (la Comédie-Française) , et jaunes pour l'Opéra. » ^lais elles étaient toujours muettes en ce qui concerne les noms des acteurs , et cela devait durer plus d'un siècle, les théâtres trou- vant leur intérêt à f^ir ainsi. ËfTectivement, par le fait de ce mutisme, le public pouvait toujours espérer voir jouer les meilleurs comé- diens, tandis que les jours où l'affiche aurait dû faire connaître les nonts des doubles, la re- cette eût été moins bonne. Telle est la raison de cette discrétion de l'affiche, et l'on en trouve la preuve dans une délibération des comédiens, en date du 9 décembre 1769, par laquelle ils suppliaient le maire de Paris de ne pas les obli- ger à mettre les noms des acteurs snr l'affiche, ce qu'ils considéraient comme très nuisible à leurs intérêts. Cependant, l'afficbe cherchait à piquer la cu- riosité piir d'autres détails ■ c'est encore Chap- puzeau qui nous 1 apprend a Elle entretient le lecteur de U nombreuse assemblée du lour précèdent du mente de la pièce qui doit sni vre et de U neoesaite de pour% Dir aux loges de bonne heure ■'nr tout lors qui. la pièce est nouvelle et que le grand inonde y court » Parfois même, [>our être plus piquante I affi che employait la langue des diLii\ dans la Comédie de la cotnhite pr Diogue d une pièce de Donmond qui avait pour titre fc' Âmotirg de Trapolin et qui fut représentée ixir la troupe deMademoisclle en liJCl, envoyait deux bour- geois lire au coin d'une rue cette affiche en LES COUÉOIGS'S DE MADEMOISELLE, La pièce que nous vous donnons Mérite vos atleotions : Ce pont les araoure d'Ignorance, Qu'on confond avec la Science, Et de son brave TrapoHii Qui l'aime autant que le bon vin. De cette pièce on fait estime, Tant pour la force de la rime Que pour la vigueur des bons mots Qui ne Bont pas faits pour les «oIm , Mais pour la belle connaissance Et les auditeurs d'importance. Qu'ici les uns dressent leurs pas, Que les autres n'y viennent pas. Il arrivait parfois que l'affiche, non contente de taire les noms des comédieus, restait muette THEATRE DE L'OPERA r^„_ -SBl^ll /^^ 2 M Jules BARBIER Musique de MM GOUNOD R.LEMOIKE, Ediuur,I7. -Rua TibiII>, '?aiiii AFFICHES (Bande sur l'). — AGENTS DRAMATIQUES. 23 même sur le titre de l'œuvre qui devait être représentée. Ceci peut paraître étrange : je m'explique. De tout temps il y a eu au théâtre des cabales et des coups montés d'avance pour faire tomber telle ou telle pièce. Or, pour évi- ter ces désagréments, les comédiens s'avisaient, lorsqu'ils croyaient avoir à craindre quelque esclandre, quelque manifestation d'hostilité préconçue contre une œuvre nouvelle, de don- ner la première représentation de cette œuvre à l'iraproviste , sans l'annoncer ni l'afficher. Le premier exemple que l'on connaisse de ce fait nous est offert par une pièce de Marivaux, le Prince travesti ou V Illustre Aventurier, qui fut ainsi donnée à la Comédie-Italienne le 5 fé- vrier 1724. « Elle fut jouée, dit de Léris, sans être annoncée ; manière nouvelle pour frauder les droits de la critique préméditée et de toute cabale, dont l'invention ayant paru très sen- sée, a été suivie depuis à Tégard de plusieurs pièces. y> Le fait se renouvela en effet, pour les Lacédémoniennes j de Mailhol (1754:), pour le Prix du Silence, de Boissy (1751), et pour plusieurs autres ouvrages. Aujourd'hui, raflichc est très explicite, et apprend au public tout ce qu'il a intérêt à connaître : le titre des ouvrages, les noms des auteui*s, ceux des comédiens, et aussi, pour les pièces à spectacle et à grand fmcas scénique, ceux des danseurs, des peintres décorateurs, des machinistes, sans compter Ténumération des tableaux importants, des décors à sensation et des trucs à effet. Cela est légitime d'ailleurs, et il n'est que juste de voir tous ceux qui con- courent au succès prendre leur part de ce suc- cès. Il airive même parfois que l'affiche est illus- trée, c'est-à-dire qu'elle représente, à l'aide d'un dessin plus ou moins intéressant, l'une des scènes les plus importantes ou les caractéristi- ques de l'ouvrage qu'elle annonce. AFFICHE (Bande sur l'). — Lorsque, par suite d'un accident quelconque, de l'indis- position d'un artiste ou de toute autre cause imprévue, un théâtre se voit dans l'obhgation soit de changer ou de modifier au dernier mo- ment son spectacle, de remplacer un artiste par un autre, ou même de faire relâche, et qu'il n'a plus le temps de faire imprimer et poser de nouvelles affiches, il fait placer, sur chacune- de celles qui sont sur sa façade, une bande blanche où sont indiquées, à la main, les mo- difications qui ont dû être apportées à la com- position du spectacle. C'est ce qu'on appelle : flc mettre une bande sur Taffiche. d AGENCES DES THÉÂTRES. — Depuis quelques années il s'est formé à Paris deux ou trois établissements qui ont pris le titre à^agen- ces ou offices des théâtres. Par suite d'arrange- ments et d'opérations dont nous avouons ignorer même le mécanisme, ces agences cen- tralisent chez elles un certain nombre de billets pour tous les théâtres, de telle sorte que, même lorsque ceux-ci n'en ont plus de disponibles en location, un amateur est toujours certain d'en trouver dans leurs bureaux. Mais il va sans dire que les agences ne délivrent les susdits billets qu'au prix d'une plus-value qui leur constitue un bénéfice plus ou moins considé- rable. Lorequ'il s'agit d'une pièce en vogue, cette plus-value atteint parfois des proportions fantastiques. AGENTS DES AUTEURS. — La Société des auteurs et compositeurs dramatiques est dans la nécessité de se faire représenter soit à Paris, soit dans toutes les vailles de province qui possèdent des théâtres, par un ou plusieurs fondés de pouvoir, connus généralement sous le nom d'agents des auteurs , et qui sont char- gés de contrôler les recettes des théâtres, de percevoir les droits et d'établir la répartition de ces droits selon la composition du spectacle, la nature et le nombre des pièces représentées, le nombre des auteurs participants, etc. Ces agents sont aussi chargés de tous actes, protesta- tions, mises en demeure, assignations, saisies, enfin de toutes procédures auxquelles la défense des intérêts qui leur sont confiés les mettraient dans le cas d'avoir recours. AGENTS DRAMATIQUES. — Les direc- teurs des théâtres de Paris, se trouvant au centre même des affaires, n'ont besoin d'aucun intermédiaire pour faire les leurs. Il n'en est pas de même des directeurs des théâtres de province, qui, obligés de veiller par eux-mêmes ii • aux mille Boins de lenradmimstration.ae tron- vent dans la nécessité d'établir une correapoE- dance régulière avec Paris pour lea besoins sans cesse renourelés de leur entreprise. Ceux- ci centralisent donc toutes leurs affaires entre les mains d'un agent spécial , choisi par eux , et qui se charge de satisfaire à toutes leurs AGENTS DRAMATIQUES. demandes. Si le directeur a Ixtsoîn de divers exemplaires d'une pièce de tel ou tel théûtre, du manuscrit d'un ouvrage que l'auteur n'a pas voulu faire imprimer, de la musique d'un opéra nouveau, d'un artiste en remplacement de tel sujet de sa troupe qui ne peut continuer son ser^'ice, d'un acteur en représentations pour corser dcsreccttes d'un chiffre trop faible, etc., il s'adresse k son agent. C'est aussi celui- ci qui, la campagne théâtrale terminée, s'oc- cupe du recrutement du nouveau personnel que le directeur doit réunir en mic de la cam- pagne prochaine, car les spectateurs de pro- vince, plus capricieux que ceux de Paris, n'aiment point voir deux années de suit^ les mêmes visages sur leur théâtre. En un mot, l'a- gent dramatique est le factotum et l'intermé- diaire du directeur en toutes circonstances. Ses honoraires consistent surtout dans le prélève- ment qu'il opère sur l'engagement des artistes qu'il procure «chaque directeur: ce prélèvement est ordinairement de deux 1/2 pour cent de la totalité des appointements de l'année lorsqu'il s'agit de la province, et de cinq pour cent pour les théâtres de Paris ou de l'étranger. — AGNÈS. — A GUSTO. On donne aussi aox agents dramabiqnes la qualiBcatiou de Correspondants de Utéâhe. AGNÈS. — Entre tous les types crë^ par Molière, celui d'Agnès de tÈcoU des Femmes est aasurément l'un des plus enchanteurs en même tempe que des plus caractéristiques. Ce nom est resté comme synonyme de parfaite in- 25 génnité, de candeur chaste et de pnre inno- cence, AuBsi sert-il encore à caractériser certains rôles , et quand il s'en rencontre nn qui se rap- proche de lui, dit-on aussitôt : — C'est une A GUSTO. — Locution italienne qui signi- îe : à voîmti. Dans les canevas que les ancieijis é , lll'H W.'^!^ g^r '^jj i te^J ^^^1 p ^ - -**^'-- ^K f ^ «^ ^tf ^H^^ufl^ "^ •l^^kii flH^dlH W^^Ê mBÊKimm comédiens italiens brcniiient k leur guise eu présence du' public, dans la commedia delV arle (Voj. ce mot) , les mots : a guslo , inscrits dans le cours de telle ou telle scène , indiquaient qu'ils pouvaient se livrer sans réserve à toutes les fantaisies de leur imagination. AIR. — Dans la musique dramatique, tout morceau de chant à nue seule voix, et qui n'est point en forme de couplet ou de rondeau, constitue un air. L'air d'Elvire dans le Don Juan de Mozart est un air pathétique ; ceux de Blondel dana Richard Cœur-de-Lion, de Sé- leucuB dans SlrattmUe, sont des airs dramati- ques ; ceux de Ginès dans Giralda, du tambour- major dana le Caïd sont des airs bouffes ; ceini d'Isabelle, ausecond acte du Pré aux Clercs, est nn air de bravoure. 26 AIR DE BALLET. — AIR A DANSEE. On a souvent, et avec raison, reproché anx airs d'opéras de n'être qu'une concefision faite anx exigences des chantenrs, qui, ponr faire briller leor voix dans un morceau destiné à eox seuls, faisaient interrompre volontietB l'ac- tion dramatique sans souci de la vraisemblance et de la logique scéniques. Après avoir réagi contre cette tendance fâcheuse , on donne an- jourd'hui dans un autre extrême, et Richard Wagner, par exemple, s'est avisé de supprimer complètement l'air comme il supprimait parfois les chœurs, ce moyen si puissant d'émotion. La vérité est qu'on ne devrait admettre l'air que lorsqu'il naît de la situation même et qu'il fait corps avec elle, comme on le voit dans ce- lui de Slratonice et dans celui d'AthénaïB au premier acte des Mousquetaires th la Reine. AIR (Grand). prend, dans Tout air important des chanteurs, la qua- lification de grand air. Ils disent ainsi le grand air de Nornia, le grand air des HagumoU, le gnind air de h Favorite. AIR DE BALLET. — On appelle airs de ballet tous les morceaux qui, dans un opéra, sont spt-cialement consacrés à la danse et aux divertissements. AIR DE BRAVOURE. — Cette forme particulière de l'uir théâtral, iioos vient des Italiens, à qui nous en avons aussi emprunté le nom : aria di bravura, C'ist un morceau d'agilité, de pure virtuosité vocale, uniquement destiné à mettre en relief l'Iialiileté d'un chan- teur exercé, et qu'on ne se faisait point scru- pule de placer do la façon la plus ridicule, té- moins les deux airs de folie de Luàa di La- jnemwor et de V Étoile du Nord. Userait difficile aujourd'hui de faire accepter par le public de semblables absurdités. AIR DE DAXSE. — Voyez Ain dbb.vi.let. AIRS A DANSER. — Au xvii' vi m xviW siècle, nos compositeurs, lorsqu'ils intro- duisaient dans leurs ojjéras un divertisseineut dansé, ne cherchaient pas, comme d'amres lo firent plus tard, à donner à leurs aira de bal- lets une forme plus ou moins piquante, t>rigi- nale et personnelle. Un certain nombre de AIR A DANSER. 27 coupes traditionnelles étaient adoptées alcJrs, et Ton ne sortait jamais de ce cercle un peu res- treint, dans lequel on ne rencontrait guère plus d'une quinzaine de moules invariables, qui prenaient le nom générique d'airs à danser. Nous allons en donner ici la nomenclature. La Bourrée j qui nous venait des danses po- pulaires de l'Auvergne, était à deux temps, d'un mouvement lourd et à moitié lent. Le Canaris (ou les Canaries) se rapprochait jun peu de la gigue, mais avec un rythme moins accentué et un mouvement plus lent. Il s'écrivait à 6/8. i La Chaconne ne date guère que du dix-hui- tième siècle. C'était une grande danse d'en- semble, à grands développements, qui généra- lement venait à la fin d'un opéra pour le terminer d'une façon très brillante et très mouvementée, le maître de ballet y trouvant toute latitude pour faire des gi'oupes, des mar- ches, des évolutions d'un grand eftet. Dans VU- nion de r Amour et des Arts (1773), Floquet a écrit une chaconne qui a fait courir tout Paris et qui est restée longtemps célèbre ; elle était à deux temps, bien que le rythme traditionnel de cette danse fût à trois temps. La Courante est une danse du xyii** siè- cle, ainsi nommée à cause des allées et ve- nues dont elle était remplie plus qu'aucune auti'e. C'était cependant une danse grave, d'un rythme musical assez tranquille , dont la musi- que s'écrivait à trois temps. La i^orZawe, danse originaire du Frioul, était, dit-on, la passion des gondoliers de Venise. On l'écrivait à 6/8, dans un mouvement mo- déré. On en trouve une charmante dans les Sybarites, de Rameau (1757). On connaît la Gavotte^ dont le rythme mo- déré, plein d'élégance, était aussi charmant au point de vue de la danse que de la musique. Elle était toujoui*s à deux temps. Les gavottes de Gluck sont adorables. La Gigue s'employait beaucoup moins sou- vent, et seulement pour la danse comique, à laquelle convient son mouvement à la fois lourd et rapide. Elle s'écrit à 6/8. Le Menuet, cbusin germain de la gavotte par la grâce et par l'élégance, était au con- traire d'un emploi fréquent. Gluck en a aussi composé de charmants, entre autres ceux d'Or- phée et d'Armide, qui sont de véritables bijoux. Le rythme du menuet est ternaire. Les Musettes étaient innombrables dans nos anciens opéras, et l'on assure que M"® Salle et Dumoulin « les dansaient avec autant de grâce que de volupté d. C'était une danse d'un mou- vement modéré, qui s'écrivait soit à deux temps, soit à 6/8. Dans les Fêtes de VÉté (1716), Montéclair a placé une musette exquise. La Passacaille, danse favorite du fameux Dupré, était d'un mouvement lent et majes- tueux; c'est ce qui la différenciait du menuet, dont elle se rapprochait par le rythme. Le Passepieds était au contraire une danse très vive, très rapide, à mesure ternaire, et qui, dit-on, nous venait de Bretagne. Musicale- ment, il admettait la syncope, ce qu'on ne voit ni dans le menuet ni dans la passacaille. « M'^* Prévôt, dit No verre, courait les passe- pieds avec élégance. » Campra, qui a laissé un nombre incalculable d'airs à danser, a écrit dans r Europe galante (1697) un passepieds ado- rable. Majestueuse et lente comme la passacaille , mais s'écrivant à quatre temps, la Pavane a longtemps aussi régné au théâtre, après avoir été importée^' Espagne en France. Son nom lui venait de ceci, que ceux qui la dansaient faisaient la roue l'un devant l'autre, comme les paons font avec leur queue. « Les gentils- hommes, disait un écrivain du dernier siècle, la dansoient avec la cape et l'épée, les gens de justice avec leurs longues robes, les princes avec leurs grands manteaux, et les dames avec les queues de leurs robes abaissées et traînan- tes. y> Le Rigaudon nous venait, dit-on, de Pro- vence et de lianguedoc, où il avait été inventé par un maître à danser nommé Rigaud, qui lui aurait laissé son nom. C'était une danse à deux temps, d'un mouvement modéré, et dont le rythme, d'ailleurs très varié, n'était pas sans élégance. On connaît le rigaudon fa- meux du Dardanus, de Rameau; Desmarets dans Circé (1694), Philidor dans Ernelinde (1767), en ont écrit deux fort jolis. La Sarabande, comme la pavane, était ori- ginaire d'Espagne, et, comme elle aussi, avait • • S8 AISANCE. — «A LA DEMANDE GÉNÉRALE.» un caractère grave et presque sérieux. Elle était à trois temps et d'un mouvement lent. Le Tambourin, de même que la musette, tirait son nom de l'instniment qui lui avait donné naisaauce, et nous venait de la Provence chérie du soleil. C'était un air à deux tempe, leste, gai, vif, mouvementé, qui apportait avec lui la joie et la bonne humeur. A côté du tambourin de Kamean , devenu si célèbre dans lês Fêtes dHéhé, il faut citer celui, si plein d'élégance, que Grctry écrivit dans Aspasû. Le tambourin était le pas favori do l'illustre Ca- margo. A la suite de ces différents airs à danser, nous noua bornerons à mentionner la Oaillarde, la Toccafa et les TricoteU, dont l'emploi au théâtre fut beaucoup plus rare et senlemeut accidentel. AISANCE. — L'acteur doit avoir de l'ai- sance en scène, s'y mouvoir sans apprêt et sans gène, s'y trouver enfin comme chez soi. Il doit ipMn , d'ftprta SlïUa. parler avec naturel, porter le costome avec fa- cilité, marcher, gesticuler, rire sans que rien soit forcé, que rien vienne trahir un embarras quelconque. L'expérience seule et la pratique de la scène peuvent lui donner cette aisance si difficile à acquérir, et qui est d'autant plus précieuse qu'elle doit lui enlever tout sujet d'émotion, de distraction et d'inquiétude. Mais il ne faut pas que l'aisance dégénère en aplomb; autre- ment, le comédien devient prétentieux et in- supportable. 1 A LA DEMANDE GENERALE. » ~ Il arrive souvent qu'un théâtre, au moment de lancer une pièce nouvelle dont le jont de représentation a été fixé, se trouve obligé d'en retarder l'apparition, par suite d'un accident quelconque. Il annonce alora sur ses affiches et dans les journaux que, à la demande géné- rale, il donnera encore quelques représentations de la pièce qu'il devait abandonner, — et dont les recettes sont tombées au-dessoaa du pair. Cela ne trompe peraonne, mais cela sauve les apparences. ALMANACHS DE THÉATKE. ALMANACHS DE THEATRE. tout un genre de publications, d'une extrême utilité malf^é leur apparence modeste, sans les- quelles il serait presque impossible, en France tout au moins, de reconstituer l'histoire du théâtre : ce sont les almanachs de théâtre et de musique. Depuis un siècle et demi, il s'est fait un grand nombre de ces publications, dont quelques-unes ont duré longtemps et forment II est teurs et les auteurs morts, enfin des anecdotes, des éphémérides, des articles d'histoire ou de va- riété sur l'art et les artistes soit du temps passé, soit du temps présent. Bref, ce sont des anna- les, des chroniques vivantes, dont il serait im- possible, surtout en ce qui concerne le dix-hni- tième siècle, de retrouver ailleurs les éléments. de longue88éries,extrêmementprécieH8esparIc nombre de documents qu'elles renferment et qu'on ne saurait retrouver ailleurs. Les alma- nachs ou annuaires de théâtre vous fournissent généralement la liste des théâtres existants à Paris avec leur personnel administratif et ar- tistique, la liste et l'analjse des pièces repré- sentées dans le cours de l'année, avec les noms des auteurs et des interprètes, la date de leur apparition , des notices historiques sur les ac- et qui à elles seules permettraient, au point de vue de l'art auquel elles se rattachent , de retracer l'histoire des époques écoulées. Nous ne pouvons entrer ici dans de longs détails au sujet de ces petits livres si utiles, dont l'utilité même est si bien recomiuo des travailleurs qu'on les recherche aujourd'hui avec une sorte de furie et que plusieurs, deve- nus d'une rareté excessive, sont maintenant à peu près introuvables ; mais nous allons essayer 80 ALMANACHS DE THÉÂTRE. de dresser, aussi rapidement que possible, une bibliographie de ces publications spéciales (1) : ALHANÂCHS DE THÉÂTRE. Agenda historique et chronologique des théâtres de Paris (François Parfaict). — Paris, Flahault, 1735, 1736, 1737, 3 vol. iii.32 (2). Tableau des théâtres (par l'abbé de Laporte). — Paris, Delormel, 1748-1752, 5 vol. in-12. Nouveau Calendrier historique des théâtres François et Italien, — Paris, 1750, 1 vol. in-32. Calendrier historique des théâtres de V Opéra et des Comédies Françoise et Italienne et des Foires. — Paris, Cailleau, 1751, iii-18. Altnanach historique et chronologique de tous les spectacles (par Tabbé de Laporte). — Paris, Duchesne, 1752, in-lS. Cet almanach changea de titre en 1754, à sa troisième année, pour adopter celui-ci : les Specta- cles de Paris, et il continua sa publication sans interruption jusqu'à l'année 1794 comprise, pour reparaître encore en Tan VIII, en l'an IX et en 1815. C'est la collection la plus célèbre du genre, celle qu'on désigne ordinairement sous le nom d' c Almanach Duchesne n. Extrêmement rare au- jourd'hui dans son état complet, elle comprend un ensemble de quarante-quatre années, dont quel- ques-unes sont en deux volumes. Outre l'abbé de Laporte, Ducray-Duminil et Collot-d'Herbois y ont pris part. État actuel de la musique du roi et des trois specta- cles de Paris. — Paris, Vente, 1759, 1760, 1767- 1777, en tout 13 volumes, dont les deux pre- miers in-8°, les neuf suivants in-12, et les deux derniers in- 18. Spectacles des foires et des boulevards de Paris ou (1) Le malhear, c'est que nos dépôts publics ne se sont pas encore rendu compte de cette utUité , et qu'ils sont généralement très pauvres en livres de ce genre, bien plus pauvres que certaines collections particulières bien ordonnées. C'est ainsi qu'on chercherait vainement à la Bibliothèque Nationale, à l'Arsenal, au Conserva- toire, les très riches séries d'almanachs de théâtre et de musique qui se trouvent dans deux des plus belles bi- bliothèques musicales particulières qui existent & Paris : celles de MM. Er. Thoinan et Arthur Pougin. (2) Le seul exemplaire connu de cette petite collection, qui offre le premier type d'un almanach théâtral publié en France, est en ma possession. J'en ai fait, il y a quelques années , une réimpression exacte , tirée à cent exemplaires, avec une préface historique. Calendrier historique et chronologique des théâtres forains (par Barrett , Nougaret , et peut-être Ar- nould). — Paris, 1773, 1774, 1775, 1776, 1777, 1778, 1786 et 1787, 8 voL in-18. (Les volumes de. cette collection, interrompue pendant huit an- nées, ont plusieurs fois changé de titre.) Almanach du théâtre du Palais-Royal, année 1792. — Paris, 8. d., un vol. in-18. almanach général de tous les spectacles de Paris et des provinces (par une rétmion d'écrivains). — Paris, Froullé, 1791, 1792, 2 vol. in-18. Le Petit»Almanach des grands spectacles de Paris, — Paris, Maret, 1792, un vol. in-18. Vérités à Tordre du jour ou Nouvelle Critique rai- sonnée tcmt des acteurs et actrices des théâtres de Paris que des pièces qui y ont été représentées pen- dant le cours de Vannée dernière (an VI) ; — Mel- pomène et Thalie vengées ou Nouvelle Critique, etc. (an VII) ; — la Revue des Théâtres ou suite de a Melpomène et Thalie vengées d (an VIII). — Paris, Garnier et Marchand, 3 vol. in-18. Ces trois petits volumes, qui se suivent et forment sé- rie, sont l'œuvre de Fabien Pillet, écrivain théâ- tral très instruit, dont le fils, Léon Pillet, fut, il y a quarante ans, directeur de l'Opéra. Le pre- mier. Vérités à Vordre du jour, a eu une première édition sous un titre différent : Étrennes drama- tiques, à Vusage de ceux qui fréquentent les spec- tacles, par un amateur. — Paris , Garnier, 1798, un vol. in-18. Indicateur dramatique ou A Imanach des théâtres de Paris. — Paris, Lefort, an VII, un vol. in-18. L'Année tliéàtrale ou Almanach des spectacles de Paris , pour Van VIII, rédigé par un observa- teur impartial. — Paris, Cailleau, an VIII (1800), un vol. in-18. Almanach du théâtre des Jeunes-Élèves de la rue de Thionville, — Paris, Hugelet, an IX, un vol. in-18. Année théâtrale, almanach contenant une notice sur chacun des thécltres de Paris, les acteurs, les pièces nouvelles et les débuts (par Fabien Pil- let). — Paris, Dupont et Courcier, ans IX, X, XI, XII, 4 vol. in-18. Étrennes dramatiques pour Vannée 1801. — Paris, Michel, 8. d., un vol. in-18. Le Coup de fouet ou Nouvelle Revue de tous les théâtres de Paris (attribué à Abel Rémusat par les uns , par d'autres au vaudevilliste Moreau). — Paris, Surasne, an XI (1803), un vol. in-18. L'Opinion du Parterre (par Clément Courtois, puis Lemazurier, puis Fabien Pillet). — Paris, Mar- tinet, an XI, an XIII, 1806 à 1813, 10 voL in.l8. ALMANACHS DE THÉÂTRE. 81 Annuaire dramatique ou Étrennes théâtrales (par Ragueneau de la Chesnaye et Audiffret). — Paris, M°»« Cavanagh, 1805 à 1820, 1821 / 22, 17 vol. in.32. Mémorial dramatique ou Almanach théâtral (par Varez et Charrin). — Paris, Frechet et Hocquet, 1807 à 1819, 13 vol. in-24. Almanach des spectacles de Paris pour Tan 1809. — Paris, Collin, un vol. in-24. Almanach des spectacles, par X. Y-Z (attribué par les uns à Loewe-Weimar, ce qui est absolument invraisemblable, par d'autres à Charles Malo, ce qui est plus rationnel). — Paris, Janet, s. d., 8 vol. in-32 pour les années 1818 à 1825. L'Indicateur général des spectacles de Paris, des départements de la France et des principales vil- les étrangères, par D*** et A***. — Paris, 1819, 1820 /21, 1821 / 22, 1822/23, 4 vol. in-12. Étrennes dramatiques, dédiées aux dames (pour 1820). — Paris, Marcilly, s. d., un vol. in-16. Le Musée des Théâtres. — Paris, Lefuel, s. d. (1822), un vol. in-16. Histoire critique des théâtres de Paris pendant 1821 et 1822, par Chaalons d'Argé (et Rague- neau pour le premier volume). — Paris, 1822 et 1823, 2 vol. in-8«. Almanach des spectacles (par Merville et Coupart). — Paris, Barba, 1822, 1823, 1824, 1825, 1826, 1827, 1828, 1829, 1830, 1831, 1831/34, 1835, 183G / 38, 13 vol. in-18. Année théâtrale de 1824 [1825 et 1826] (par Dé- cour). — Paris, Firmin-Didot, s. d., 3 vol. in-8°. Almanach des Coulisses, annuaire des théâtres pour 1843 (par M. L. Couailhac.) — Paris, Chamerot, s. d., un vol. in-18. Annuaire dramatique, histoire des théâtres dejmis leur fondation Jusqu'à nos jours, biographies des acteurs et actrices de Paris et d^ la banlieue, par Adolphe Bréant de Fontenay et Etienne de Champeaux. — Paris, 1845, un vol. in-18. Annuaire des lettres, des arts et rfes théâtres (rédigé par Déaddé Saint-Yves, publié par V Époque et le Constitutionnel). — Paris, Lacrampe, 1846/47, un vol. in-8°. Almanach des théâtres. Pièces nouvelles; reprises; débuts; biographies; tliéâtres de la province et de V étranger ; nouvelles dramatiques; anecdo- tes, etc. (par Léon Sari). N*> 1, octobre 1851. — Paris, Michel Lévy, 1851, in-18 (seule livraison parue). Annuaire du Théâtre, paraissant le 5 de chaque mois (par Léon Sari). — Paris janvier, février, mars 1852, in-8^ Almanach des spectacles, publié sous la direction de M. Palianti. — Paris, Brière, 1852 et 1853, 2 vol. in-8<>. Almanach des Théâtres, — Paris, Dechaume, 1852 et 1853, 2 vol. in-12 et in-18. Mystères des Théâtres, 1852, par Edmond de Gon- court, Jules de Goncourt, Cornélius HolfE. — Paris, Librairie Nouvelle, 1853, un vol. in-8^ Annuaire théâtral, dramatique et musical, illustré (par Duverger), pour 1853 et 1854. — Paris, Tresse, 2 vol. in-18. Notes pour servir à Vhistoire du théâtre et de la musique en France, par Alexis Dureau, 1860. — Paris, Claudin et Joubert, 1861, un vol. in-12. Almanach des acteurs et actrices de Paris pour 1864, par Joseph Lavergne et Moretteau. — Paris, s. d. (1864), un vol. in-16. Le Théâtre à Paris en 1868 (par Clément Bovie). — S. 1. n. d. ni nom d'éditeur, un vol. in-16. Almanach théâtral 1874, par Henri Tessier et L. Marcel. — Paris, t}^). Cliamerot, un vol. in-16. Almanach des Spectacles, continuant l'ancien Al- manach des Spectacles publié de 1752 à 1815 (par MM. P. Milliet et A. Soubies pour la pre- mière année, par M. Soubies seul pour les sui- vantes). — Paris, 1875 à 1883, 9 vol. in-18. L'Année théâtrale, nouvelles, bruits de coulisses, indiscrétions, comptes rendus, racontars, etc., par J.-Georges Duval. — Paris, Tresse, 1875 à 1877, 3 vol. in-12. Les Annales du tliéâtre et de la musique, par Edouard Noël et Edmond Stoullig. — Paris, Charpentier, 1876 à 1883, 8 vol. in-12 (1). ALMANACHS DE MUSIQUE. Almanach musical (par Luneau de Boisjermain) pour 1776, 1777, 1778, 1781, 1782, 1783 (quel- ques années formant deux parties). — Paris, in-18. Tablettes de renommée des musiciens, auteurs, com- positeurs, virtuoses , amateurs et maîtres de musi- (1) En province aussi, on prenait parfois la peine de publier un almanach de théâtre. En voici quelques exemples : Spectacle de Lille ou Calendrier historique et chronoh' gique du théâtre pour Vannée 17Gi), avec les noms des acteurs et actrices. — Lille , Lemmens, un vol. ln-18. Almanach des spectacles de Bordeaux, par Sainte«Luce, année théâtrale de Quasimodo 1792 aux Rameaux 1793. — Bordeaux, an II (1794), un vol. in-12. Statistique du théâtre du Havre, 1827 et 1828. — Le Havre, impr. Faure, 2 vol. in-82 et in-18. 32 « A L'ORCHESTRE, MESSIEURS, S'IL VOUS PLAIT. » — AMATEUR. que vocale et instrumentale. — Paris, Cailleau, • 1785, un vol. m-8°. Calendrier musical universel (par Framery). — Paris, Prault, 1788, 1789, 2 vol. in-18. Annales de la musique ou Alm Enfin, à ces serins, à ce cerf, à œs rats, il convient de join- di*o un phoque bien dressé, (jue son cornac annonçait en (îcs tenues : — « Il a le regard doux et humain, un instinct tout particulier; il est fort docile, obéit au commandement, donne la patte, salue la compagnie, caresse ceux qui rapiHîllent, et aime beaucoup la musique, » La dernière it^flexiim ne manque pas d'intérêt. Nicolet, lui aussi, montrait jmrfois des ani- maux savants. Entix) autres, à ses danseurs de conle onlinairt^s et parlants, il joignait un singe nommé Tuixio, très habile i\ cet oxerc^ice, et qui a\*ait acquis une véritable célébrité, ainsi que nous rapprend un annaliste, dans un langage irrévérencieux ^K)ur les dames du temps : Twrco, siugo tri^s habilo sur la corde et fameux à la foire, mourut, il y a twis ou quatre ans, d'une indigestion de dragées. Il ôtoit fort aimé du public, et surtout des dames. Il alloit faire la belle conver- sation avec celles qui Tappelloient. Il s'asseyoit sur Tappui des loges^et gnigeoît toutes les pastilles de ces belles, dont il et oit Tenfant gâté. Plusieurs guenons pleurèrent Turco, et une entr'autres, qui se pique de bel-esprit , lui fit cette épitaphe : (Air : /V* Tt-ioltU.) Ci>gtt le ainge à Kicolet , Qui pUiaoit à plus d^ime actrice : PiuiaMiis, montiet rotie regret ; Ci-irtt U singe à Kicolet. Il «Hoit gnoul, poli« bien £àit, De» singes c étoit le Karcisse. Ci-gtt le singe à Kîoolet. HeUs i poni^Qoi fautai qu U giase ! ANNÉE THÉÂTRALE. — La division de l'année théâtrale n'est point conforme à celle de l'année civile. Au dix-septième et au dix-huitième siècle, jusqu'à la Révolution, les théâtres, à Paris comme en province, étaient tenus de fermer leurs portes pendant trois se- maines chaque année, depuis le dimanche de la Passion jusqu'au dimanche de Quasimodo, c'est-à-dire quinze jours avant et huit jours après Pâques. L'Église, toute-puissante alors, exigeait ce chômage, et c'est là ce qu'on appe- lait la fermeture de Pâques. A part cette fer- meture, les théâtres de province jouaient toute l'année, comme ceux de Paris, mais ils profi- taient de ce moment pour procéder au renou- vellement de leur troupe et signer les engage- ments de leurs artistes pour la campagne suivante. Les théâtres de la capitale, qui se recrutaient alors en province, durent suivre naturellement cette coutume, et, des deux cô- tés, les directeui-s prirent l'habitude de con- tracter des engagements avec leurs artistes à l'époque la plus rapprochée de Pâques, époque où commençait virtuellement l'année théâtrale. Aujourd'hui, tout est bien changé ; les troupes des départements ne jouent guère plus de sept, six, quelquefois même de cinq mois de l'année, et les théâtres de Paris font presque tous une grande fermeture de deux ou trois mois pen- dant l'été ; mais l'année théâtrale continue de courir à partir de Pâques, et c'est toujours, à Paris comme en province, l'époque du renou- vellement des engagements. ANNIVERSAIRES. — Depuis longtemps déjà la Comédie-Française a établi chez elle l'ex- ceÛente coutume de célébrer, de la façon la plus honorable, l'anniversaire de la naissance des trois écrivains qui ont fait sa fortune et qui sont la gloire de la nation : Corneille, Molière et Racine. Le 6 juin, le 15 janvier et le 21 décembre sont dignement fêtés sur ce théâtre qu'on a justement appelé c la maison de Mo- lière, 1 et qui reste le premier du monde. Le spectacle choisi pour ces jours solennels se com- pose toujours d'une ou deux pièces prises dans l'œuvre du poète glorifié, et Ton y joint d'or- dinaire la première représentation d'un petit à- propos dû à un jeune écrivain, et qui retrace nn épisode de la vie du grand homme. L'Odéon, en sa qualité de « second Théâtre-Français », suit généralement l'esemple qui lui est donné par ta Comédie-Française, et l'on ne peut que regretter de voir nos deux grandes scènes lyri- ques se montrer si peu soucieuses de les imiter l'un et l'autre. Il noue semble cependant que manqne-t-il jamais de manifester bou mécon- les anniversaires de Rameau, de Grétry, de Boieldieu, d'Hérold, aéraient bien dignes d'ê- tre célébrés par elles. ANNONCE. — L'annonce n'est plusaujour- d'hui qu'un fait accidentel. Aussi !e public ne tentoment par quelques murmures lorsque, avant le commencement du spectacle on entre les deux actes d'une pièce, il voit le rideau se lever silencieusement et sans préparatifs jus- qu'il moitié de sa hauteur. Il sait alors , à n'en pouvoir douter, qu'il va voir apparaître un ré- gisseur eu habit noir, qui, après avoir fait res- pectueasement les trois saints d'usage — à droite, à gauche, en face, — va lui apprendre, r quelque fâcheuse nouvelle. C'est tantôt un artiste qui, par suite d'accident ou d'indisposition, se trouve dans l'impossibilité de jouer ou de continuer son rôle, et qu'on demande au public la permission de faire rem- placer par un de ses camarades; tantôt un chanteur pria d'un cnronement subit, et qui fait réclamer l'indulgence des spectateurs pour le cas où ses moyens viendraient à !e trahir ; tantôt enfin un accident plus grave qui met le théâtre dans l'impossibilité de donner on de AŒDË. continaer le gpectacle promis. Daiu ce deruier cas, le régissear aimoace soit qu'on délivrera au contrdle, à ceux qui y consentiront, des bil- lets pour une représentation altérienre, soit qu'on rendra l'argent aux spectateurs qui l'exi- geront. Quelquefois, le régisseur propose nn changement de spectacle, qni quelquefois est accepté. n va sans dire que ces faits sont très rares, et qne, comme nous le disions, l'annoi^ce est aujourd'hui tout à fait accidentelle. Il n'en était pas de même autrefois, oîi l'annonce était régnlière, quotidienne, et où elle consistait en ceci qne chaque soir, à la fin de la représenta- tion, l'un des acteurs de la troupe, spéciale- ment chargé de ce soin, VùraiettT, venait an- noncer au public le spectacle du lendemain. < Dans l'annonce ordinaire (car il y en avait d'extraordinaires ), écrivait Chappuzeau en 1674, l'orateur promet de loin des pièces nou- velles de divers auteurs pour tenir le monde en haleine, et faire valoir le mérite de la troupe, pour laquelle on s'empresse de travailler. L'af- fiche suit l'annonce, et est de môme nature... Cy-devant, quand l'orateur venoit annoncer, tonte l'assemblée prcstoit un très grand silence , et son compliinent court et bien tourné estoit quelquefois écouté avec autant de plaisir qu'eu avoit donné la comédie. Il produisoit chaque jour quelque trait nouveau ijui réveilloit l'au- diteur, et marquoit la fécondité de son esprit, et soit dans l'annonce, soit dans l'alTîche (1), il se montroit modeste dans les éloges que la coutume veut que l'on doçnc à l'authenr et à son ouvTage, et à la troupe qui le doit repré- senter. Quand ces éloges excèdent, on s'imagine que l'oratenr en veut faire accroire, et l'on est moins pereuiidé de ce qu'il tasche d'insinuer dans les esprits. Mais comme les modes chan- gent, toutes ces régularitez ne sont plus guère en usage ; ny dans l'annonce ny dans Tafflche il ne se fait plus de longs discours, et l'on se contente de nommer simplement à l'assemblée la pièce qui se doit représenter, n Cependant, la coutume de l'annonce, au tenr û qui était chargé tou « ït de rÉdigti l'affiche. moins mdimentaire, subsista jusqu'à la Révo- lution, et Lemaïurier, dans son Opinion du Parterre, en parle ainsi en ce qui concerne la Co- médie-Française : — « La suppression de l'an- nonce date de la même époque (1792). C'était encore nne coutume religieusement observée : entre les deux pièces, un acteur s'avançait sur le bord du théâtre. S'il était reçu [c'est-à-dire s'il était sociétaire], il s'exprimait ainsi : Mes- sieurs, noue aurons V honneur de vou$ donner demain, etc. S'il n'était encore qu'au nombre des pensionnaires, il employait la formule sui- vante : On aura Vhonneur. Cet nsage fournit au parterre nne occasion bien honorable pour Lekain de manifester l'estime qu'il accordait à ses talents. Il annonçait le spectacle, et sesen'ait de la phi-ase consacrée pour les pensionnaires, parmi lesquels il se trouvait alors : le public voulut absolument qu'il employât l'autre, et témoigna de cette manière combien sa réception définitive lui serait agréable. Aujourd'hui (1812) l'affiche remplace modestement cette annonce solennelle, et va plus loin, puisqu'on y trouve l'indication de tous les spectacles de la semaine. » (Voy. Compliment, Orateur, Parler au public.) AŒDÉ. — L'une des trois muses qui furent APARTÉ. — APOTHÉOSE. primitirement révérées sur l'Hélicon, par les anciens Grecs. Elle personnifiait le chant. APARTÉ. — L'aparté est une remarque, une réflexion qii'nn personnage se fait à lui- mÉine, lorsqu'il est yi scène avec un ou pla- sieure autres, de façon à n'être paa entendu de ceux-ci. L'aparté est indispensable au théâ- tre pour faire connaître au public les sentiments secrets qui agitent un personnaf^ et qui ne doivcTit pas ftre dévoik« à ses interlocuteurs. On a toujonra discuté sur le plus ou moins de \TaiBeniblance de ce procédé, mais ou l'a tou- <5 jours employé, parce que la nécessité en est absolue ; l'essentiel est que l'actenr charçé d'un aparté n'ait pas l'air de l'adresser au public, et que, tout en l'entendant, on voie bien qu'il se parle à lui-même. Au sujet des longues discussions anjiqnelles cet usage sccnique a donné lieu, on a souvent raconté une anecdote que l'ahbé de Laporte retrace ainsi : « La Fontaine, Boileau, Molière et d'autres beaux-esprits raisonnoient sur les aparté, que plusieurs personnes trouvent peu naturels, peu nécessaires. La Fontaine se dé- claroit contre, et s'écliauffoit beaucoup pour en prouver le peu de \T!iiscniblance. Pendant qu'il parloit avec tant de vivacité, Boilean, qui étoit à côté de lui, disoit tout haut : Le btilor de kl Fontaine, l'enlêté, rextravaguant, qve ce la Fonfainr:! etc.; et la Fontaine pour- suivoit toujours Siiris l'entendre. Tout le monde se prit à rire, et la Fontaine en demandant la cause : tf Vous déclamez, lui dit Boileau, con- « tre les aparté, et il y a une hernie que je « vous débite aux oreilles une kyi-ielle d'iuju- « res sans qne voua y ayez fait attention. » APLOMB. — Certains comédiens r npla- cent l'aisance par l'aplomb, c'est-à-dire la conscience qu'un artiste doit avoir de sa va- leur par nne suffisance qui touche de près à la vanité. Ceux-là paraissent croire que le public est trop heureux de les contempler et de les entendre, et, sans s'en douter, ils diminuent d'autant le mérite qu'ils peuvent avoir. APOTHÉOSE. — C'est ainsi qu'on apiielle, dans les féeries, le tableau final, celui où se produit le plus riche et le pins fastueux déploie- ment de mise en scène, où l'art du décorateur, du costumier, du metteur en scène se donnent APPAREIL SCÉNIQUE. — APPELEE AZOR. 46 carrière de la façon la plus complète. Les cou- lenra harmonieuses et la riche architecture d'une somptueuse décoration, l'heurens g;rou- pement d'un perEonnel nombreui, couvert de costumes étinceknts, les attitndes et les poses gracieuses des danseuses, la lumière électrique prodiguant ses feus sur cet ensemble auquel la musique ajoute sa verve et son éclat, tout cela constitue un spectacle superbe , qui , en éblouis- eant le spectateur, agit en même temps but ses nerfs et appelle forcément le eûmes C est k ce qu'on nomme au théâtre une ajx tl cose APPAREIL SCÉNIQUE. — On doit en- tendre par a appareil scéniqiie s la réunion de tous les éléments matériels qui concourent à la beauté du spectacle, et dont l'emploi in- telligent tend à frapper l'imagination du spectateur et à lui donner le sentiment de la réalité des choses qui sont offertes à sa vue. Décors, costumes, accessoires, éclairage, trucs ingénieas, tout, jusqu'au groupement harmo- nique des masses et à l'habileté de leur mise en mou ement toutasf rôle da si 11 s on théâ- trale et A part la pcrs nal te hu na ne pr se ApIsriU' opém de QuiDnBK et Lnlly. en elle-même et isolément, tout cela fait partie de cette chose insaisissable matériellement, mais dont le sens est très compréhensible, qu'on caractérise sous le nom d'appareil scénique, APPARITION. — Onappelle ainsi l'arrivée instantanée, au milieu d'une grotte, d'un bos- quet, ou de toute autre partie d'un décor, d'une forme humaine qui surgit tout k coup et s'of- fre aux regards du public. Dans un des plus jolis ballets de l'Opéra, la Source, se trouve un effet de ce genre. APPELER AZOR. — C'est un euphémisme dont on se sert parfois au théâtre pour indi- quer que des sifflets se sont &it entendre. Dans ses Mémoires, qui sont assurément ce qu'on a écrit de plus cliarmant en ce genre, le grand comédien Fleury nous fait connaître l'origine de cette locution amusante. D'après ce qu'il rapporte, nn acteur qui portait ce même nom de Fleury, mais qui n'était pas destiné à l'iOustrer de la même façon que lui, jouait le grand em- ploi tragique à la Comédie- Française vers 1 735. Ce malheureux n'avait pas le don de plaire au public, qui, comme c'était l'usage alors, le lui faisait souvent sentir par de vigoureuses bor- dées de sifBets. En revanche il avait un père, à la fois aubergiste et Cent-Snisse, qui l'aimait beaucoup et qui jura de le venger. Notre APPLAUDISSEMENTS. — APPLAUDISSBUSS GAGÉS. 47 homme mi jour endosse son costame, fourbit ooxudenoiensement son épée,' se rend an ihéft- toe en compagnie de son chien, nn diien sn- porbeqni avait reçu le nom de Tarqoin, et se plftnte dans les conlisses, tenant Tanimal en Uase et attendant le moment d*agir. Ici, il faut fausser Fleniy raconter Ini-méme les infortunés de son homonyme : On jouait IpJugénie en Aulide; Achille paraissait (Achille, c'était mon homonyme). Le parterre loi fit entendre à sa manière qu'il le reconnaissait. Flemy, en homme accoutumé , n'y fait pas autre- ment attention, mais le père se lève furieux. Dans Taotion, le chien s'échappe, il court à son jeune maître, flaire les personnages, remue joyeusement la queue , et lèche les mains du fils de Thétis. Les ■pectateors, peu touchés, n'en continuent que de plus belle. Les entrailles paternelles s'émeuvent, le Cent-Suisse ne peut se contenir ; il tire son épée..., qiiand (ïaussin s'approche de lui, retient son bras, et afec cet accent qu'on lui connaissait : c £h! Monsieur, on avait aperçu votre chien; ne comprenez-vous pas qu'on appelle Tarquin ? ]» Le pauvre père, désarmé, crut d'autant plus cela -que Fleury, emharrassé de la bête, criait du théâ- tre, aussi haut que son rôle : C'Sfflez donc, mon père, sifflez donc! 7> Et le père de se joindre au chorus général, et, par amour paternel , de siffler de toutes les forces d*im Oent-Suisse. Depuis, chaque fois que pareille tempête se dé- diaîne contre un comédien, on nomme cela, en lan- 'gage de coulisses : appeler Tarquin. Hais Fleury ajoute en note : — « Mainte- nant, cela se nomme : Appeler Azar. Tarquin était trop classique. y> L'expression est restée, et est elle-même de- venue classique dans le langage théâtral. Que d'auteurs et d'acteurs ont entendu appeler vi- goureusement Azor, qui auraient bien voulu ftre sourds pour un instant ! APPLAUDISSEMENTS. —Nous n'avons pas à faire ici la physiologie de Tapplaudisse- ment ; chacun sait en quoi il consiste, et ce que nous en pourrions dire n'apprendrait rien à personne. Les applaudissements, lorsqu'ils sont spontanés et sincères, sont la plus belle récom- pense qu'un comédien puisse ambitionner. Par malheur, l'ignoble usage de la claque, qui s'est introduit chez nous depuis plus de soixante ans, enlève à cette manifestation, si flatteuse par elle-même, la plus grande partie de son prix, le public^ même lorsqu'il est satisfitit, ré- pugnant à mêler ses battements de mains à ceux des personnages soldés pour cette besogne. Cependant, il arrive encore que le talent supé- rieur d'un grand artiste sait acquérir assez de puissance pour électriser une salle entière d» la faire éclater en applaudissements unanimes. On a vu même parfois des acteurs exciter à ce point, par leur talent, l'enthousiasme des spectateurs» que ceux-ci, ayant une fois commencé, sem- blaient ne plus pouvoir se lasser d'applaudir, ne s'arrêtaient un instant que pour recommen- cer de plus belle, et interrompaient ainsi l'ac- tion scénique par leurs bravos pendant plusieurs minutes. Dans de telles circonstances il n'est pas sans exemple de voir un comédien, juste- ment ému par la puissance d'une manifestation si spontanée, si pleine d'éclat, si véritablement honorable pom* lui, succomber à l'excès de sa joie et fondre en larmes aux yeux du public. Chez les anciens, on avait en quelque sorte réglé les applaudissements. Mais ceci rentre dans le domaine de la elaquè, et nous renvoyons le lecteur à ce mot pour lui faire connaître tout ce qui concerne les applau- dissements salariés. APPLAUDISSBUSS GAGÉS. — Tmne 48 APPLIQUES. — APPOINTEMENTS. de dédain qu'on emploie parfois pour désigner les claqueurs. (Voy. ce mot.) APPLIQUES. — Ce sont des châssis de tofle peinte, formant panneaux, que l'on ap- plique sur certains décors, pour en modifier la configuration ou l'ornement. APPOINTEMENTS. — C'est une grosse question que celle des appointements au théâ- tre. Nous nous garderons de la traiter ici au point de vue économique et pratique, ce livre n'étant pas une œuvre de critique, et nous nous bornerons à en envisager le côté histori- que, qui nous conduira d'ailleurs à certains développements indispensables. Dans l'antiquité, chez les Grecs, à l'époque des origines de leur théâtre, les honoraires des acteurs étaient souvent considémbles, et Ton peut citer particulièrement le fait relatif à Polus, l'un des plus fameux comédiens de ce temps, lequel recevait pour deux joura un talent, soit 5,560 francs de notre monnaie actuelle. A cette époque, il est vrai, les représentations théâtra- les étaient rares, elles n'avaient lieu qu'à certai- nes grandes solennités, et l'on devait s'y prépa- rer longtemps à l'avance. Plus tard, à la suite de la guerre du Péloponèse , on vit se modifier la condition des acteurs ; ceux-ci, augmentant chaque jour en nombre, formèrent des confré- ries pour l'exploitation régulière des théâtres , et, soutenus par les libéralités des villes ou des particuliers, qui leur servaient des subventions, allaient, comme aujourd'hui nos comédiens de province, donner des représentations en telle ou telle cité qui possédait un théâtre, et y pas- saient un temps déterminé, plus ou moins long selon les conditions du traité conclu. A part les premiers sujets qui faisaient partie de ces troupes nomades, on sait à peu près certaine- ment que le salaire des comédiens ordinaires ne s'élevait guère à plus de sept drachmes par représentation, soit environ six francs. Chez les Romains, oii la profession d'acteur était beaucoup moins considérée qu'en Grèce, on semble pourtant avoir rétribué largement ceux qui faisaient preuve de talent et pfeirve- naient à la réputation. M. Victor Fournel nous fournit de curieux détails à ce sujet : Nous apprenons de Macrobe , dit-il , que Roscius recevait par jour, pour lui seul , du trésor public , mille deniers romains, c'est-à-dire près de neuf cents livres. Le comédien instruit par Roscius, nous apprend Cicéron dans son plaidoyer, pouvait gagner dix-huit pistoles par jour. Et ailleurs : ce Croirez- vous, dit-il, qu'un homme aussi désintéressé que Roscius veuille s'approprier, aux dépens de son honneur, un esclave de trente pistoles , lui qui, en nous jouant depuis dix ans la comédie pour rien , s'est ainsi généreusement privé d'un gain de quinze cent mille livres ! Je n'apprécie pas trop haut le salaire que Roscius aurait reçu : on lui aurait au moins donné ce (lu'on donne à Dyonisia. » On voit par cette dernière phrase que cette fameuse comé- dienne touchait cinquante mille écus par an. Malgré ses immenses prodigalités, causées surtout par le luxe inouï de sa table, Œsopus laissa à son fils vingt mil- lions de sesterces (1), amassés uniquement dans la même profession. Jules-César donna cinq cent mille sesterces à Labérius, pour l'engager à jouer dans une pièce qu'il avait composée. Un acteur de grand ta- lent pouvait gagner sans peine cent mille sesterces par an, ce qui n'était que la cinquième ou sixième partie de ce que gagnait Roscius en moyenne. La condition des comédiens étant dans les origi- nes de notre société devenue infime, les appointe- ments des acteurs tombèrent à rien. Mais à mesure que la civilisation croissait, et que les habitants des villes, devenus plus raffinés, éprouvèrent un plus impérieux besoin du théâtre, les acteurs, se sentant plus nécessaires, cherchèrent à en profiter et à améliorer leur situation. Chappuzeau, dans son TJiéâtr e- François , nous renseigne sur la situation matérielle des comé- diens qui formaient les deux troupes existant à Paris à l'époque où il écrivait (1G74). Bien qu'il ne s'agisse pas à proprement parler d'ap- pointements, puisque ces artistes étaient en société, comme aujourd'hui encore leurs suc- cesseurs de la Comédie-Française, ces détails rentrent directement dans notre sujet : — « Entre les traits de leur politique, dit-il, celuy-cy mérite d'estre remarqué. Ils ne veu- lent point soufrir de pauvres dans leur Estât, et ils empeschent qu'aucun de leur corps ne tombe dans l'indigence. Quand l'âge ou quel- que indisposition oblige un comédien de se retirer, la personne qui entre en sa place est (1) 5,560,000 francs. APPOINTEMENTS. 49 tenue de Iny payer, sa vie durant, une pension honneste, de sorte que dès qu'un homme de mérite met le pied sur le théâtre k Paris , il peut faire fond sur une bonne rente de trois ou qua- tre mille livres tandis qu'il travaille , et d'une «omme suffisante pour vi^Te quand il veut quit- ter. Coutume très louable, qui n'a voit lieu cy devant que dans la troupe royale, et que celle que le roy a établie depuis peu veut j)rendre pour une forte base de son affermissement. Ainsi dans les troupes de Paris les places sont comme érigées en charges, qui ne sçauroient manquer; et à l'Hostel de Bourgogne, quand un acteur ou une actrice vient à mourir, la troupe fait un prësent de cent pistoles à son plus proche héritier, et luy donne dans la perte qu'il a faite une consolation plus forte que les meilleurs complimens. » Nous ignorons aujourd'hui ce que gagnaient, à l'époque où écrivait Chappuzeau , les chan- teurs de l'Opéra ; mais un document authenti- que nous renseigne pleinement sur les appointe- ments attribués à tout le ^xirsonnel de ce théâ- tre dans les commencements du dix-huitième siècle. Ce document est un JiJiai du 7iombre des personnes, tant hommes que filles, dont le Roi veut et entend qtce l'Académie royale de numque sait toujours composée, sans qu*il y puisse être augmenté ni diminué; cet état, signé du roi, est daté du « onzième janvier mil sept cent treize » ; en voici le texte : ACTEURS POUR LES ROLLES. Basses-tailles. Premier acteur, quinze cens li- ' vres, cy 1,500 f Second acteur, douze cens li- ^ 3,700 vres, cy 1,200 Troisième acteur, mille livres , cy. 1 ,000 Hautes-contre. Premier acteur, quinze cens li- vres, cy 1,500 Deuxième acteur, douze cens li- } 3,700 vres, cy 1,200 Troisième acteur, mille livres, cy. 1,000 Tailles. Premier acteur, six cens li\Te8, cy. 600 | < nQQ Second acteur, six cens livres , cy. 600 j DICTIOSNAIRE DU THEATRE. 6,100 8,400 4,800 8,400 Actrices pour les relies. Première actrice, quinze cens li- vres, cy 1,500 Deuxième actrice, douze cens li- vres, cy 1,200 Troisième actrice, mille livres, cy. 1,000 Quatrième actrice, neuf cens li- vres, cy 900 Cinquième actrice, huit cens li- vres, cy 800 Sixième actrice, sept cens livres, cy. 700 Pour les chœurs. Vingt-deux hommes; sçavoir : Vingt à quatre cens 1. cy. . . . 8,000 Et deux pages à deux cens livres chacun, cy 400 Douze filles. Sçavoir, douze à quatre cens liv. cy . . . Danseurs. Deux à mille 1. chacun, cy. . . . 2,000 Quatre à huit cens livres chacun, cy. 3,200 Quatre à six cens livres chacun, cy. 2,400 Deux à quatre cens livres chacun , cy 800 /' Danseuses. Deux à neuf cens livres chacune, cy 1,800 Quatre à cinq cens li\Tes chacune, cy 2,000 Quatre à quatre cens livres chacune, cy 1,600 Orquestre. Batteur de mesure, mille livres, cy . 1,000 Dix instrumens du petit chœur, à six cens livres chacun, cy. . . . 6,000 Douze dessus de violon à quatre cens livres chacun, cy 4,800 Huit basses à quatre cens livres chacun, cy 3,200 Deux quintes à quatre cens li\Te8 chacun, cy 800 / 21,150 Deux tailles à quatre cens livres chacun , cy 800 Trois hautes-contre à quatre cens livres chacun, cy 1,200 Huit hauts-bois, flûtes ou bassons à quatre cens 1. chacun, cy. . . 3,200 Un tymballier, cent cinquante liv. cy 150 / 4 5,400 60 APPOINTEMENTS. Maître de galle de danse , cinq cène 1. cy. . Compositeur de ballets, quinze j cens livres, cy 1,500 > Dessinateur, douze cens 1. cy. . . 1,200 ' Deuxinachiaistes, à six cens li- j vres cliacuu, cj 1,200 [ Un mattre tailleur, huit cens 1. cy. 800 ) Somme totale . 68,050 livres! C'est-à-dive beancoup moins, pour tout le personnel de l'Opéra, que ce que gagne aujourd'hui, k lui seul, un des premiers artistes de ce théâtre ! Quatre sujets seulement à 1,500 livres de traitemeut : une basse-taille, une haute-contre, une chanteuse, et nu maître de ballets ! Les temps sont bien changés. Tou- tefois, jusqu'à la fin du dix-huitième siècle, les traitements, tout en sabissant tion, ne prenaient pas les proportions fantas- tiques que nous leur voyons de nos jours. Un règlement de 1792 fixe ainsi, gratifications comprises, lea appointements de certains su- jets de l'Opéra : 9,000 livres pour les premiers sujets du cbant, 7,000 livres pour les rempla- ; 7,000 livres pour les premiei-s dan- [8, 5,000 livres ponr les remplacements; 6,000 livres pour le premier maStrc de ballets et 3,500 pour le second ; 4,000 livres pour le premier chef d'orchestre et 3,000 pour le se- cond; 4,000 livres pour le premier chef du chaut, et 2,500 ponr le second; enfin, les trai- tements des artistes de l'orchestre oscillaient de sept cents à dix-huit cents li\Tes, ceux des chœurs allaient de sept cents à quinze cents et ceux des figurants de six cents à douze cents, APPOINTEMENTS. 51 Cela n'est pas encore formidable, mais pa- tience! Le dix-neuvième siècle va s'ouvrir, et ce sera l'âge d'or des chanteurs et des comé- diens. La Russie, dont les souverains, très friands de nos artistes français, feront de grands sacrifices personnels pour les enlever au public parisien, l'Angleterre, dont le dilettantisme opulent cherchera de son côté à attirer chez elle toutes les célébrités de la scène, l'Amérique enfin, qui ne compte point lorequ'il s'agit de satisfaire ses caprices ou sa vanité, sembleront se liguer pour dépouiller la France et l'Italie de tout ce qui fait la gloire de leurs théâtres. C'est en Russie précisément que fut prononcé l'un des mots les plus caractéristiques — et les plus spirituels — de cette chasse à l'or par la- quelle les artistes répondirent tout naturelle- ment aux sollicitations dont ils étaient l'objet. Je ne sais plus quelle grande cantatrice émet- tait des prétentions encore inconnues au sujet du renouvellement de son engagement ; le di- recteur, efiPrayé des conditions qu'elle voulait lui imposer , lui dit : « Mais vous n'y songez pas ! Vous me demandez plas que ce que gagne un feld-maréchal de Sa Majesté! — Qu'à cela ne tienne, repartit la cantatrice avec beaucoup de sang-froid ; Sa Majesté peut faire chanter ses feld-maréchaux si elle le trouve agréable ! » Dès 1825, M"® Malibmn touchait à Londres jusqu'à 3,000 et 3,500 francs par représenta- tion , M"*" Pasta en recevait 1 ,500 ou 2 ,000 , et si certains artistes italiens consentaient à venir chanter chez nous à un prix beaucoup moindre, c'était uniquement dans le but de faire consacrer par la France leur renommée, et de pouvoir ensuite élever à l'étranger leurs prétentions en conséquence. On doit remarquer que les appointements des comédiens sont toujours restés, jusqu'à ces dernières années, au-dessous de ceux des chan- teurs. On donnait à cela pour raison que la voix étant un instrument fragile, qui se per- dait de bonne heure et s'usait facilement, il fallait qu'en quelques années le chanteur ga- gnât de quoi vivre honorablement sur ses vieux jours. Cela n'a pas empêché certains chanteurs de se trouver dans une situation précaire à la suite d'un accident, comme Roger, ou de la perte de leur voix, comme de plus célèbres encore. Quoi qu'il en soit, la progression était plus lente en France que partout ailleurs, bien que pourtant elle s'accentuât. En 1830, Adolphe Nourrit ne gagnait à l'Opéra que 30,000 fr. ; il est vrai que lorsque M. Duprez vint lui succéder, ses appointements furent du double. M""" Mai-s, qui était la gloire et l'honneur de la Comédie-Française, ne gagnait guère plus que Nourrit. Mais M""^ Rachel, qui tenait évi- demment de sa race certaine propension à la ra- pacité, illustra son séjour sur la première scène du monde par une guen'e incessante faite à sa caisse : engagée d'abord à raison de 4 ,000 f r. par an, en 1838, elle exigea, deux ans après, alors que son succès était assuré, 27,000 fr. d'ap- pointements fixes, 18,000 fr. de feux, et une représentation à bénéfice assurée 15,000 fr., soit en tout G 0,000 fr., tout en se réservant un congé de trois mois, qu'elle savait rendre pro- ductif. Et ce ne fut pas tout î On en vit bien d'autres par la suite. Il est \a*ai que dans le même temps M™'' Jenny Lind, la fameuse can- tatrice suédoise, recevait 5,000 fr. par soirée au théâtre de la Reine, à Londres, où elle de- vait chanter deux fois par semaine chaque an- née pendant cinq mois, ce qui lui faisait un total de 215,000 fr. pour cette saison de cinq mois. Nous voilà loin des 1,000 fr. que, quel- que vingt ans plus tard, M"^ Adelina Patti rer cevait chaque soir à notre Théâtre-Italien, et qui ont tant fait crier les Parisiens. M"^ Patti, à la vérité, a bien pris sa revanche depuis lors. Je reviens à l'Opéra pour faire connaître le chiffre des appointements alloués il y a sei^e ans, en 1866, aux quatorze principaux artistes de ce théâtre. Voici ce petit tableau : MM. Naudin 110,000 fr. Faure \ . 90,000 Gueymard 72,000 Villaret 45,000 Morère 40,000 Obin 38,000 Belval 38,000 Dumestre 36,000 Warot 32,000 j^mefl Gueymard 60,000 Marie Sasse 60,000 Marie Battu 60,000 Salvioni (danse) 30,000 Fioretti (id) 24,000 Total : 635,000 fr. 52 APPORTER UNE LETTRE. — A-PROPOS. Et depuis lors, cela n'a fait que croître et embellir. On en est à se demander où s'arrête- ront les prétentions des artistes, et ce que de- viendra le théâtre à an moment donné. Au- jourd'hui , M"* Sarah Bemhardt touche 1 ,000 f r . par soirée au Vaudeville, M"® Judic 500 fr. aux Variétés, M'^* Jeanne Granier -400 fr. à la Renaissance... Et il y a quinze ans M"® Thé- résa recevait dans un café-concert, à T Alcazar, 300 fr. par soirée I... On peut, en voyant de telles choses, trouver modeste la situation des sociétaires de la Comédie-Française, qui ne touchent guère, à part entière, que 40,000 fr. par an. Et pendant ce temps, M"® Christine Nilsson consent à recevoir, pour une campa- gne de trois mois en Amérique, une somme à^un million, tous frais payés pour elle et sa suite. n faut avouer que c'est un beau métier au- jourd'hui que celui de comédien, quand on ar- rive à la réputation. — Moins beau pourtant que celui de chanteur ! APPORTER UNE LETTRE. — Terme de dédain dont les comédiens se servent entre eux pour montrer le peu d'estime qu'ils font du talent d'un des leurs : « Il est à peine ca- pable d'apporter une lettre. » Et cela parce que, dans beaucoup de pièces, certains rôles de domestiques, mâles ou femelles, consistent en une seule entrée faite par le personnage pour apporter une lettre à son maître ou à sa maî- tresse. APPUYER. — Dans la manœuvre des décors, le mot appuyer signifie élever, faire monter un objet. Si l'on veut faire monter du dessous une ferme, un châssis, on dira au ma- chiniste : Appuyez la ferme, Appuyez le châs- sis. C'est Je contraire du mot charger ( Voy. ce mot). A-PROPOS. — C'est la qualification que l'on donne à certaines pièces, généralement de courtes dimensions, qui sont inspirées par un événement récent et qui cherchent à satisfaire la curiosité publique mise en éveil par un grand fait politique, un crime monstrueux, le gain d'une bataille, une découverte intéressante ou tout autre incident, burlesque ou curieux, qui attire l'attention générale. Ce n'est pas d'aujourd'hui que le public se montre friand de pièces de ce genre. Dès 1662, les bonnes fortunes d'un laquais-don Juan, nommé Champagne, inspiraient à un auteur du nom de Bouchet une facétie intitulée Champa- gne coiffeur, qui fut jouée avec succès. En 1 680 , à l'époque où les médecins prescrivaient pour toutes sortes de maladies l'emploi du quinquina, la Comédie-Italienne représenta une petite pièce anonyme qui avait pour titre le Remède anglais ou Arlequin prince de Quinquina. L'an- née suivante, Paris ayant été mis tout en l'air par l'apparition d'une comète, Fontenelle donna à la Comédie-Française un à-propos in- titulé la Comète. En 1683, la Comédie-Ita- lienne offrit à son public une sorte de parodie intitulée Persée cuisinier, dont le héros était le fameux chanteur Dumény, qui venait d'ob- tenir un grand succès à l'Opéra dans le Persée de Lully, et qui, avant d'aborder victorieuse- ment la scène, avait été cuisinier de M. de Foucault, intendant de Montauban. Le 24 oc- tobre 1714, Dancourt donnait à la Comédie- Française une petite comédie intitulée le Vert- Galant^ dont le souvenir n'était point consacré à Henri IV, conmie on pourrait le croire, mais qui tirait son origine d'un fait-divers qui amu- sait alors les Parisiens, et qui consistait en ceci qu'un teinturier ayant surpris sa femme en conversation amoureuse, avait fait saisir le ga- lant et s'était donné la satisfaction de le tein- dre en vert dans une de ses chaudières. Enfin, parmi les à-propos célèbres de ce temps (bien qu'on ne les qualifiât pas encore ainsi), il faut surtout citer une pièce en trois actes que Le- grand fit jouer à la Comédie-Française sous le titre de Cartotiche, et dont de Léris parle en ces termes : Et un chroni- queur disait à ce propos : Celui-ci en effet était aimable , plaisant, gai jusqu'à la folie. Il avait tout à la fois le don de plaire, de charmer et d'amuser, et son geste comme sa parole, ses attitudes comme les in- flexions de sa voix, qui était charmante, exci- taient toujours l'enthousiasme et provoquaient les applaudissements des spectateurs. Les en- fants surtout l'adoraient, et l'illusion qu'il pro- voquait en eux était telle que souvent, oubhant qu'ils étaient au spectacle-,ils lui adressaient la parole du haut de leur loge, et. Carlin répondant, il s'ensuivait entre eux et lui des colloques qu'il savait rendre pleins de grâce et qui faisaient la joie du public. Parfait honnête homme et d'une conduite irréprochable. Carlin était d'ailleurs aussi aimé et estimé comme homme qu'il était chéri et admiré comme artiste, et sa mort ins- pira les vers suivants : De Carlin pour peindre le sort Très peu de mots doivent suffire : Toute sa vie il a fait rire , Il a fait pleurer à sa mort. De la Comédie-Italienne, le type d'Arlequin passa rapidement, avec ses congénères, aux théâtres de la Foire, et tandis qu'après les auteurs itaUens, Marivaux, Boissy, Delide le faisaient parler sur son propre théâtre, Lesage, Autreau, Fuzelier, d'Omeval le présentaient au public des scènes foraines, dont il faisait aussi les délices. Puis, plus tard, les Variétés- Amusantes et le Vaudeville s'en emparèrent, et lui continuèrent ses succès. Aux Variétés- Amu- santes, il était personnifié par Lazzari, tandis qu'au Vaudeville il était représenté par La- porte, acteur habile, qui lui dut une longue et brillante carrière, et qui créa plus de cent cin- quante rôles d'Arlequin. On finit cependant par tant abuser de lui, qu'un jour il y fallut renoncer ; les Parisiens étaient las d'Arlequin, et la satiété finissait par engendrer l'ennui. Ce fut alors que notre aimable Bergamasque se réfugia dans la pantomime , d'abord au petit théâtre de M"'' Saqui, puis à celui, plus petit encore, des Funambules. Mais là il perdit sa gloire, ne trouvant plus de comédien capable de la soutenir, et, par mésaventure, rencontrant dans un acteur merveilleux, enfariné sous le masque de Pierrot, un rival qui allait devenir son maître et l'étouffer. L'immense talent de Debureau avait en effet détrôné Arlequin dans l'affection des Parisiens et l'avait fait oublier, jusqu'au jour où Debureau disparaissant, et bientôt son théâtre avec lui. Pierrot s'évanouit du même coup. Nous parlerons de celui-ci à son rang ; mais nous ne pouvions passer sous silence le gentil Arlequin, qui, malgré sa fin fâcheuse, méritait bien un souvenir. ARLEQUINADE. — Loi-sque des comé- diens italiens vinrent pour la première fois s'é- tablir à Paris, ils importèrent chez nous, sur leur théâtre, les personnages comiques de leur pays, en tête desquels se trouvait Arlequin. Cet Arlequin était presque toujours le princi- pal héros de leurs comédies, et les théâtres de la Foire, les imitant en cela, transportèrent bientôt Arlequin sur leurs scènes populaires, si bien que pendant plus d'un demi-siècle tous les personnages de la comédie italienne prirent leurs ébats sur tous nos théâtres secondaires. L'habitude était si bien prise que, même lors- que les comédiens italiens abandonnèrent les pièces de leur pays pour se vouer au genre de la comédie française, plusieurs autem*s conti- nuèrent d'employer le type d'Arlequin, entre autres Saint-Foix, Marivaux et Florian. Ce sont ARRANGEUR. — ARRONDISSEMENT THÉÂTRAL. 61 les pièces de ce genre qui prirent le nom d'Ar- îequinades. Aujourd'hui, on ne désigne ainsi que les petites pantomimes dans lesquelles seules reparaissent ces anciens personnages aimés de nos pères : Arlequin, Pierrot, Cas- sandre, Léandre, et Colombine. ARRANGEUR. — C'est le nom qu'on donne à l'écrivain dramatique qui consent à se charger des corrections et modifications à apporter à l'œuvre d'un jeune auteur, pour la mettre en état d'être produite à la scène. L'ex- périence pratique du théâtre est chose difficile à acquérir, et il arrive qu'un auteur novice, tout en faisant preuve de quahtés réelles, ne se rend pas compte de certains défauts, de cer- taines impossibilités même qui sauteront aux yeux d'un homme du métier. C'est pour cela qu'un directeur ne reçoit quelquefois sa pièce qu'à la condition qu'elle sera remaniée, sou- vent même refaite par un écrivain qu'il lui ad- joint comme collaborateur. Scribe, pour ne ci- ter que lui, Scribe, dont la pratique théâtrale était sans pareille et qui possédait un sens inné des nécessités de la scène, a fait pendant trente ans ce métier d'arrangeur, sans négliger ses propres œuvres, et il a ouvert ainsi la voie à un grand nombre d'auteurs qui , sans lui, n'au- raient peut-être pu parvenir à percer. ARRONDISSEMENT THÉÂTRAL. — Depuis 1864, la liberté de l'industrie théâtrale est redevenue complète, par l'effet d'un décret impérial, comme elle l'était à l'époque de la Révolution. Auparavant, cette industrie était réglementée de toutes façons , les plus grandes villes ne pouvaient avoir plus de deux théâtres, les autres n'en pouvaient posséder qu'un seul, et, à part les grandes villes dont nous parlons et qui avaient des troupes dramatiques séden- taires, c'est-à-dire consacrées à elles seules et ne se déplaçant pas, le territoire de la France était divisé sous ce rapport en vingt-cinq cir- conscriptions formant chacune un « arrondisse- ment théâtral, d et qui étaient exploitées simul- tanément par une, deux ou trois troupes de comédiens. On se rendra compte de ce méca- nisme un peu compliqué par cet extrait exact d'une instruction ministérielle, en date du mois de mai 1815, et qui réglait l'organisation des théâtres dans les départements : 1. — La France est divisée en vingt-cinq arron- dissements de théâtres. 2. — Chaque arrondissement comprend un ou plusieurs départements, selon que ceux-ci ont plus ou moins de villes susceptibles d* avoir des spectacles. 3. — Les arrondissements peuvent avoir deux espèces de directeurs : des directeurs de troupes stationnaires pour les villes qui ont des spectacles permanents ; des directeurs de troupes ambulantes pour desservir les communes qui ne peuvent avoir un spectacle à Tannée. 4. — Les directeurs des troupes stationnaires sont désignés par les préfets, et nommés par le ministre de l'intérieur. 5. — Les directeurs des troupes ambulantes sont choisis par le ministre, d'après les notes qui lui sont directement parvenues ou qui lui ont été re- mises par les préfets. 6. — Les seuls directeurs nommés suivant ces formalités peuvent entretenir des troupes de comé- diens. 7. — Tout particulier qui se présente pour ob- tenir une direction doit faire preuve de ses moyens pour soutenir une entreprise théâtrale. Les direc- teurs peuvent être astreints à fournir un caution- nement en immeubles. 8. — Les directions des théâtres permanents sont accordées pour une , deux , trois , ou même un plus grand nombre d'années, selon que le proposent les préfets, et que le ministre le jugera convenable. 9. — Les directions des troupes ambulantes ne peuvent être accordées que pour trois ans au plus. 10. — Dès qu'un directeur de théâtre a reçu son brevet du ministre de l'intérieur, il doit, avant d'entrer en exercice, aller prendre les ordres du ministre de la police générale, à qui il est fait part de sa nomination. 11. — Tout directeur, dans le mois de sa nomi- nation, et chaque année dans le mois qui précède l'ouverture de la campagne , doit envoyer au mi- nistre de l'intérieur le tableau de ses acteurs et ac- trices. — 11 peut avoir une troupe composée de comédie et d'opéra, ou deux troupes, l'une de comé- die et l'autre d'opéra. — 11 ne doit engager ou faire engager aucun acteur que sur le vu d'un congé délivré par le directeur dont cet artiste quitte la troupe, et avoir soin, lui ou son agent, de garder ce congé par-devers soi. 12. — 11 doit soumettre tous les ans son réper- toire général au ministre de l'intérieur. — Aucune pièce ne doit, au surplus, être portée par un direc- 62 ARRONDISSEMENT THÉÂTRAL. teur sur son répertoire, qu*avec rautorîsation du ministre de la police. 13. — Le ministre de Tintérieur assigne à cha- que théâtre le genre dans lequel il doit se ren- fermer. — Dans les villes où il n'y a qu'un seul théâtre permanent, et dans les communes desser- vies par une troupe ambulante , les directeurs peu- vent faire jouer les pièces des grands théâtres de Paris et celles des théâtres secondaires. 14. — Dans lefi villes où il y a deux théâtres (et il ne peut y en avoir davantage, excepté à Paris), le principal théâtre jouit du droit de repré- senter les pièces comprises dans le répertoire des grands théâtres de Paris. — Le second tliéâtre jouit du droit de représenter celles des théâtres secon- daires. — Les préfets peuvent, au reste, et lorsqu'ils le jugent à propos, autoriser les directeurs des principaux théâtres à donner des pièces du réper- toire des théâtres secondaires, et également , en de certains cas , permettre aux seconds théâtres de re- présenter des ouvrages du répertoire des grands théâtres. 15. — Les directeurs des troupes ambulantes soumettent leur itinéraire au ministre, qui Tarrete, après l'avoir modifié, s'il y a lieu, et l'envoie aux préfets pour que Tordre une fois établi soit main- tenu pour le temps et la durée du brevet. 16. — Les directeurs ne peuvent , en aucune ma- nière , avoir de sous-traitants ; ils sont tenus d'être eux-mômes à la tête de la troupe qui dessert l'ar- rondissement. Quand ils ont deux troupes , ils con- duisent la principale d'entre elles, et choisissent pour la seconde im régisseur dont ils font connaître le nom au ministre, et dont ils répondent. 17. — Les préfets des départements dans les- quels il y a des théâtres permanents, rendent compte tous les trois mois de la conduite des direc- teurs. — Ils rendent compte de la conduite des directeurs des troupes ambulantes à chaque séjour que celles-ci ont fait dans leurs départements. 18. — Aux mêmes époques, les préfets exigent des directeurs , et font passer au ministre de l'in- térieur l'état des recettes et dépenses des troupes permanentes et ambulantes. 19. — Les directeurs sur lesquels viennent des notes favorables, ceux qui ont fait un meilleur choix de pièces, qui ont le plus soigné les repré- sentations, qui ont enfin exactement rempli tous* leurs engagements , sont dans le cas d'obtenir des récompenses et des encouragements. — Les acteurs qui se conduisent bien, et qui font pretlve de ta- lents distingués, sont pareillement susceptibles d'obtenir des marques de satisfaction de la part du ministre. 20. — L'inexécution des conditions faites aux directeurs entraînerait la révocation de leur bre- vet. 21. — Les directeurs des troupes stationnaîres, dans les lieux où ils sont établis , et les directeurs des troupes ambulantes, dans les lieux où ils se trouvent exercer, eux ou leurs régisseurs régulière- ment reconnus, ont le droit de percevoir un cin- quième sur la recette brute des spectacles de cu- riosité , de quelque genre et sous quelque dénomi- nation qu'ils soient, défalcation faite toutefois du droit des pauvres. Au temps du carnaval, les direc- teurs jouissent, aux lieux indiqués ci-dessus, du droit de donner seuls des bals masqués. 22. — Les salles de spectacle appartenant aux communes, peuvent, sur la proposition des maires et des préfets , être abandonnées gratuitement aux directeurs. 23. — Quant aux salles appartenant à des parti- culiers , le loyer en peut être paj'é par les conmiunes à la décliarge du directeur. Les conseils municipaux prennent à ce sujet des délibérations que les pré- fets transmettent au ministre de l'intérieur, avec leur avis, pour le rapport en être fait, s'il y a lieu, et les sommes nécessaires portées au budget. 24. — En général , il doit être pris , autant que possible, des mesures pour que toutes les communes deviennent propriétaires de salles de spectacle. 25. — Dans les villes susceptibles d'avoir un théâtre , et qui n'ont pas encore de salle communale ou particulière , il doit être avisé aux moyens d'en faire construire une. 26. — Les spectacles n'étant pas au nombre des jeux publics, auxquels les fonctionnaires assistent en leur qualité, il ne doit point y avoir pour eux de places , encore moins de loges gratuites réservées aux théâtres. 27. — Les autorités ne peuvent exiger d'entrées gratuites des entrepreneurs que pour le nombre d'individus jugé indispensable au maintien de l'ordre et de la sûreté publique. 28. — Il est fait défense aux directeurs d'enga- ger, soit pour leurs spectacles, soit pour les con- certs qu'ils sont dans le cas de donner, aucun élève des écoles de chant et de déclamation du Conser- vatoire, sans l'autorisation du ministre de l'in- térieur. 29. — Les préfets , les sous-préfets et les maires sont tenus de ne souffrir, sous aucun prétexte, que les acteurs des théâtres de Paris ou des théâtres de toute autre ville , qui ont obtenu un congé de leur société ou de leurs directeurs pour voyager dans les départements , y prolongent leur séjour au delà du temps fixé par le congé. En cas de contravention. ART THÉATÏIAL. 68 les directeurs de spectacles peuvent être condamnés à verser à la caisse des pauvres le montant de la recette des représentations qui ont eu lieu après l'expiration du congé. 30. — Les préfets et les maires doivent veiller à la stricte exécution des lois , décrets et instruc- ' lions relatifs aux droits des auteurs dramatiques. 31. — L'autorité chargée de la police des spec- tacles prononce provisoirement sur toutes les con- testations, soit entre les directeurs et les acteurs, soit entre les directeurs et- les auteurs ou leurs agents qui tendraient à interrompre le cours ordi- naire des représent^itions , et la décision provisoire peut être exécutée nonobstant le recours vers l'au- torité supérieure, à laquelle il appartient de juger le fond do la question. On voit quel était le mécanisme administratif du théâtre en province. Nous ajouterons que que les femmes étaient considérées comme lé- • gaiement incapables d'exercer une direction théâtrale, et qu'elles ne pouvaient obtenir le brevet de directeur. Nous allons faire voir maintenant de quelle façon la France était divisée en ce qui concerne le théâtre , et quelles étaient les villes contenues dans chaque arron- dissement théâtral : jer Arrondissement : Douai, Dunkerque, Valen- ciennes, Cambrai. — 2^ Arrondissement : Boulo- gne, Saint-Omer, Saint-Pol, Arras. — 3" Arron- dissement : Amiens, Abbeville, Saint-Quentin. — 4* Arrondissement : Beau vais, Compiègne, Laon, Soissons. — 5® Arrondissement : Mézières, Charle- ville, Sedan, Bar-le-Duc, Verdun, Châlons-sur- Marne, Reims. — G*' An-ondissement : Metz, Nancy, Toul, Lunéville. — 7'- Arrondissement : Colmar, Épinal , Schelestadt. — 8" Arrondissemnt : Troyes, Chaumont, Langres, Auxerre, Sens, Aval- Ion , Joigny. — 9° Arrondissement : Chartres Etampes , Fontainebleau , Provins , Meaux , Melun. — 10" Arrondissement : Caen, Lisieux, Falaise, Coutances, Cherbourg, Alençon. — 11® Arrondis- sement : Rennes, Saint-Malo, Laval, le Mans. — 12® Arrondissement : Lorient, Vannes, Quimper, Morlaix, Saint-Brieuc. — 13® Arrondissement : Orléans, Blois, Tours, Saumur, Angers. — 14® Ar- rondissem^ent : Rochefort, la Rochelle, Saintes, Saint- Jean d'Angély, Niort. — 15® Arrondisse- ment : Bourges, Nevers, Moulins, Saint-Amand. — 16® Arrondissement : Dijon, Beaune, Vesoul, Gray, Besançon. — 17® Arrondissement : Châlons- sur-Saône, Mâcon, Bourg, Autun, Lons-le-Saul- nier. — 18® Arrondissement : Grenoble, Valence, Montélimart, Romans. — 19® Arrondissement .. Clermont, Riom, Saint-Etienne, Aurillac, le Puy, Montbrison. — 20® Arrondissement : Limoges, An- goulême, Périgueux, Poitiers. — 21® An'ondis- sement : Montauban, Cahors, Agen, Auch, Alby, Castres, Rodez. — 22® Arrondissement : Rayonne, Pau, Tarbes, Bagnères, Mont-de-Marsan. — 23® Arrondissement : Perpignan, Carcassonne, Nar- bonne, Béziers, Pézénas. — 24® Arrondissement : Nîmes, Alais, Beaucaire, Uzès. — 25® Arrondis- sement : Avignon, Carpentras, Arles, Tarascon. (Voy. Villes sédentaires.) ART THÉÂTRAL. — Voici un mot dont la portée est vaste, un mot qui représente et sous-entend un ensemble de qualités très di- verses, dont l'heureuse réunion peut seule per- mettre d'atteindre la perfection toute relative permise à la nature humaine. L'art théâtral est un art particulièrement complexe, très varié dans ses manifestations comme dans ses moyens, parlant tout ensemble à l'esprit, à l'imagination, à l'oreille et aux yeux, et pro- duisant par cela môme des impressions d'une rare puissance et d'une étonnante intensité. La valeur des œu\Te>s représentées, l'intelli- Gfence et le goût mis par les acteurs au service de l'interprétation de ces œu\Tes, la sûreté de leur débit ou de leur chant, le naturel et la régularité de leui*s mouvements scéniques, la science et l'exactitude du costume aussi bien que du décor, le judicieux emploi des masses et la puissance majestueuse ou pittoresque de leurs évolutions , la grâce et la noblesse appor- tées dans les manœuvTcs dansantes, la préci- sion , le nerf et la chaleur de l'exécution mu- sicale, enfin le soin et la netteté qui doivent caractériser le jeu des machines, — tout cela, et bien d'autres choses encore, tout cela con- court à rillosion de la scène et constitue l'art théâtral en\isagé dans son ensemble, sous tous ses aspects et à l'aide de tous ses éléments réu- nis. Il n'en est pas de plus puissant sur l'ima- gination de la foule, de plus actif sur l'intel- ligence des hommes éclairés , il n'en est pas de plus noble, de plus merveilleux, de plus séduisant et de plus grandiose lorsqu'il offre la réunion de toutes les qualités que nous venons d'énumérer, et qu'il se rapproche de cette con- ception de l'idéal que chacun porte en soi. 64 ARTISTE DRAMATIQUE. — ASSOCIATIONS ARTISTIQUES. ARTISTE DRAMATIQUE. — Dénomi- nation générique appliquée à tous ceux qui prennent part au jeu scénique. L'artiste qui joue la tragédie est un tragédien; celui qui joue la comédie, un comédien ; celui qui chante est un chanteur; celui qui danse, un danseur, et c'est ainsi que Ton désigne les différentes spécialités de Faction théâtrale. Mais une même dénomination rapproche tous ces artistes et s'applique à l'ensemble même de la profession : c'est celle d'artiste dramatique. ASSEMBLÉ. — Nom que l'on donne à un temps de la danse. ASSEMBLÉE. — Chappuzeau écrivait dans son Théâtre-François, en 1674, en parlant des deux troupes de comédiens réunies alors à Paris et qui étaient administrées en société : — « Les comédiens s'assemblent souvent pour diverses occasions, ou dans leur Hostel, ou quelquefois au logis d'un particulier de la troupe. Tantost c'est pour la lecture des ouvrages que les au- theurs leuraportent, tantost pour leur disposi- tion et pour en distribuer les rôles, ou pour les répétitions. Mais ce ne sont pas les seuls sujets qui obligent les comédiens de s'assembler ; ils s'assemblent encore quand ils iugent à propos de dresser un répertoire, c'est à dire une liste de vieilles pièces pour entretenir le théâtre durant les chaleurs de l'esté et les promenades de Tautonne, et n'estre pas obligez, tous les soirs qu'on représente, de délibérer à la haste et en tumulte de la pièce qu'on doit annoncer. De plus, ils s'assemblent tous les mois pour les comptes généraux. Ils s'assemblent encore quand il faut ordonner d'une pièce de machine, et avancer des deniers pour quelque occasion que ce soit, quand il faut accroître la troupe de quelque acteur ou de quelque actrice, quand il faut faire des réparations, ou pour quelques autres causes extraordinaires. i> On voit ce qu'étaient les assemblées dans une troupe de comédiens sociétaires, obligés de veiller par eux-mêmes à tous les soins de l'administration. Aujourd'hui pourtant elles sont moins fréquentes à la Comédie-Française^ où un administrateur général, nommé par le ministère , centralise entre ses mains une grande partie du travail, et où la Société délègue, pour le reste, ses pouvoirs à un Comité (Voy. ce mot) élu dans son sein. Les assemblées gé- nérales sont donc beaucoup plus rares, et n'ont lieu que pour certaines causes très importantes, comihe l'élection de nouveaux sociétaires ou . l'établissement des comptes de chaque année. On se servait aussi, jadis, du mot assemblée . pour caractériser la façon dont une salle de spectacle était garnie. « Il y a une brillante as- semblée, 3> disait-on ; ou bien : « L'assemblée est nombreuse, d ASSOCIATIONS ARTISTIQUES. — Il existe en France un certain nombre d'associa- tions se rattachant plus ou moins directement au théâtre, les unes constituées sous la forme de sociétés de secours mutuels, comme l'Asso- ciation des artistes dramatiques, celles des ar- tistes musiciens et celle des artistes de l'Opéra ; les autres, destinées à organiser et à assurer la perception des droits des auteurs, comme la Société des auteurs et compositeurs dramati- ques et celle des auteurs, compositeurs et édi- teurs de musique; d'autres enfin créées dans un seul but artistique, conmie la Société des compositeurs de musique. L'Association des artistes dramatiques et l'Association des artistes musiciens,' fondées l'une et l'autre par le grand philanthrope qui avait nom le baron Taylor, datent l'une de 1839, l'autre de 1843. La première possède au- jourd'hui environ 100,000 fr. de rentes, la se- conde près de 80,000, et à elles deux les deux sociétés servent annuellement, à leurs sociétai- res âgés ou infirmes, environ 160,000 fr. de pensions. Le nombre des sociétaires est à peu près de 4,000 pour les artistes dramatiques, de 5,000 pour les artistes musiciens, et la cotisa- tion annuelle est fixée, pour l'une comme pour l'autre, au chiffre de douze fr. par an. L'Association philanthropique des artistes du grand Opéra, fondée en 1835 sur l'initia- tive de M. Lenfant, artiste de l'orchestre de ce théâtre, et sous les auspices de MM. Taglioni et Goralli, était ouverte aussi, à l'origine, aux artistes de l'Opéra-Comique, du Théâtre-Ita- lien et de la Comédie-Française. Depuis 1852, elle est uniquement réservée aux artistes de ATELLANES. — ATHLÈTES. 65 rOpéra. La cotisation annuelle s'élève à près de 40 fr. par an, et la Société sert à ses adhé- rents, outre des secours en cas de maladie, des pensions de retraite dont une partie est réversible, en cas de mort, sur la tête de la veuve. La Société des auteurs et compositeurs dra- matiques, dont la première idée, on le sait, appartient à Beaumarchais, fut fondée plus tard sur l'initiative de Scribe et régulièrement constituée en 1829. Elle a pour objet, selon ses statuts : 1° la défense mutuelle des droits des associés râ-à-vis des administrations théâ- trales ou de tous autres en rapport d'intérêt avec les auteurs ; 2"* la perception à moindres frais des droits des auteurs vis-à-vis des admi- nistrations théâtrales à Paris et dans les dé- partements, et la mise en commun d'une partie de ces droits ; 3"* la création d'un fonds de se- cours au profit des associée, de leurs veuves, héritiei*s ou parents; 4" la création d'un fonds commun de bénéfices partageables. — C'est la Société qui agit au nom de ses àdliérents, qui débat avec chaque théâtre le chiffre de la tota- lité et de la quotité des droits à percevoir pour la représentation des œuvres dramatiques, qui signe les traitée avec les administrations théâ- trales et en poui-suit l'exécution ; qui enfin agit au nom de chacun de ses membres pour soutenir et sauvegarder ses droits, si Ixîsoin est. La Société des auteurs, compositeurs et édi- teurs de musique, corollaire et complément de la précédente, a été fondée en 1851 , et a pour objet, ainsi que le disent ses statuts : 1° la dé- fease mutuelle des droits des auteure et des com- positeur de musique, soit concurremment avec leurs éditeurs, soit sans le concours de ces der- niers, vis-à-vis des entrepreneurs d'établisse- ments publics qui exécutent les œuvres musi- cales, avec ou sans les paroles originales, tels que théâtres, concerts,- cafés chantants et tous autres établissements exploitant les productions httéraires et musicales, autres que les pièces de théiitre ; 2° la perception des droits des au- teurs et des compositeurs, vis-à-vis des susdits établissements, à Paris et dans les départe- ments, et la mise en commun d'une partie seulement de ces droits. Grâce à cette société, toute œuvre musicale quelconque exécutée en DICTIOKNAIBB DU THÊATBK. public : symphonie, cantate, mélodie, romance, chanson, morceau de danse, etc., est réguliè- rement soumise à la perception d'un droit au profit de l'auteur. Enfin, comme nous l'avons dit, la Société des compositeurs de musique, fondée en 1862, est une association purement artistique qui a pour but : 1** de former un centre permanent de réunion pour établir et entretenir entre les compositeurs de musique des relations sym- pathiques et suivies; 2° de sauvegarder les intérêts artistiques et professionnels des socié- taires ; 3° de donner une impulsion féconde à l'art musical. — La Société ou\Te chaque an- née d'intéressants concours de composition, auxquels tous les artistes français sont appelés à prendre part, qu'ils fassent ou non partie de la Société. ATELLAXES. — Les Romains donnaient ce nom à un genre de comédies qui ressem- blaient beaucoup aux pièces satiriques des Grecs, aussi bien par le choix des sujets que par les caractères des personnages, des danses et de la musique. Ces pièces, qui étaient géné- ralement comiques, semblent avoir eu pour objet de délasser et de reposer l'esprit du spec- tateur, encore sous le coup de l'attention qu'il venait d'accorder à une longue tragédie écou- tée par lui sans un moment de distraction puisque le chant du chœur même, qui remplis- sait les entr'actes, tenait à l'action. On nom- mait ces pièces atellanes, parce qu'elles avaient pris naissance à Atella, ville de la Campanie, d'où elles passèrent à Rome, et les pantomimes qui les exécutaient prenaient le nom à'afellafis. ATHLÈTES. — Les athlètes étaient, chez les Grecs d'abord, chez les Romains ensuite, des hommes qui combattaient dans les jeux publics pom* remporter les prix décernés à la force et à l'agilité. Ce nom appartenait en pro- pre à ceux qui prenaient part aux cinq genres d'exercices suivants : V la course, divisée en quatre espèces d'épreuves, selon que l'athlète parcourait le stade mie, deux ou plusieurs fois ; 2^ la lutte; 3"* le pugilat; 4" le pentathle ; 5° le payicrace, formé de la réunion de la lutte et du pugilat. La préparation à ces divers exercices 5 66 ATTITUDE. — AUDITION. était considérée comme très importante; elle s'accomplissait dans les palestres, où les athlè- tes, dont le régime était sévèrement réglé par des smTeillants spéciaux, étaient présidés dans leurs exercices par un gymnasiarque. Dans les jeux ils combattaient nus, et on les oignait d'huile avant leur entrée dans la lice. « Les athlètes qui remportaient la victoire dans une des fêtes nationales de la Grèce, a dit M. Léon Renier, recevaient les plus grands honneurs et les plus flatteuses récompenses. La gloire de l'athlète couronné rejaillissait sur sa patrie ; il était ramené en triomphe dans sa ville natale, et y rentrait par une brèche faite exprès aux murailles : cette brèche signifiait, dit Plutar- que, que les remparts sont inutiles à la patrie d'un tel citoyen. Le triomphateur fi*îinchissait le mur renveraé, dans un char tiré par quatre chevaux blancs, et était conduit au temple de la divinité protectrice de la ville où retentis- saient des chants de victoire. Les jeux qui méritaient au vainqueur une semblable ova- tion étaient appelés iselastm. Ce terme, exclu- sivement réservé dans l'origine aux jeux Olym- piques, Isthmiques, Pythiques et Xémcens, s'appliqua plus tard aux autres jeux publics, même à ceux qui avaient lieu dans l'Asie Mi- neure. Dans les républi(iues de la Grèce, les récompenses matérielles s'ajoutaient à la gloire et au respect : les vainqueure étaient générale- ment exemptés de payer les taxes, et avaient le droit de s'asseoir aux premières places dans les jeux et les spectacles. Souvent on leur éri- geait des statues dans les endroits les plus fré- quentés de la ville. A Athènes, une victoire remportée aux jeux Olympiques valait à l'athlète une récompense de 500 drachmes. A Sparte, l'athlète couronné avait le privilège de com- battre dans les batailles à côté du roi. » De la Grèce, les jeux des athlètes passèrent à Rome, où ceux-ci ne furent pas traités avec moins d'honneurs et de magnificence. ATTITUDE. — C'est l'ensemble harmo- nieux que présente le corps d'un danseur, soit dans l'instant fugitif où il est en l'air, soit dans la pose qu'il prend en terminant un pas. « AU RIDEAU ! d — Dans les théâtres qui possèdent un orchestre, le rideau d'avant-scène se lève ou s'abaisse, au commencement ou à la fin de chaque acte, sur un signal du chef d'or- chestre, qui n'a pour cela qu'à tirer le cordon d'une sonnette placé auprès de lui à cet effet. Dans les rares théâtres qui sont déix)urv'us d'orchestre, tels que la Comédie-Française, le machiniste chargé du service du rideau attend l'ordre du régisseur, qui, le moment venu, lui adresse les mots sacramentels : Au rideau! Dans tous les théâtres, d'ailleurs, on se trouve à chaque instant obligé de recourir à cette phrase célèbre, soit lorsque, un accident se présentant, on est forcé de lever le rideau ix)m' livrer passage au régisseur chargé de faire une annonce au public, soit, les soirs de première représentation, lorsqu'il s'agit, la pièce ter- minée, de venir faire connaître les noms des auteurs, soit enfin lorsque les cris énergiques des spectateurs — ou de la claque — ramènent sur la scène, à la fin d'un acte, l'acteur à succès. AUDITION. — Lorsqu'un élève, ou un artiste inconnu du public parisien, désire se faire connaître au directeur d'un de nos théâtres dans le but d'en obtenir un engagement ou la faculté de débuter, il demande une audition. Si cette audition lui est accordée, on lui fixe le joiu* et l'heure où il pourra se faire entench-e. S'il s'agit d'un chanteur, il se contente géné- ralement d'exécuter un air d'opéra ; si c'est un comédien, i{\\\ doit jouer une scène, on désigne un ou plusicura artistes du théâtre pour lui donner les répliques nécessaires. Alors, toutes les répétitions étant terminées, le directem*, les régisseurs, les chefs de service intéressés vont se placer aux fauteuils d'orchestre, et se mettent en devoir d'écouter le nouveau venu, qui, dans ces conditions défavorables, au milieu d'une obscurité presque complète, sans que rien puisse exciter son esprit et son imagination, doit donner la mesure aussi exacte que possible de son talent et de ses facultés. Quelquefois, les auditions donnent lieu à des surprises. Adolphe Adam, dans ses Mé- moires, nous en a donné un exemple : — a: M*'^ Pougaud, artiste des Variétés et fort belle peraonne, dit-il, s'étant aperçue qu'elle AUTEUR DRAMATIQUE. — AUTORITÉS THÉÂTRALES. avait de la voix , vouittt travailler pour arriver à anc position artÎBtiquc. Maesot, alors chef d'orchestre à ce théiUrc, lui donnait des leçons de chant. Lorsqu'il la crut en état d'être enten- due, il demanda une audition à l'Opéra, et, pour l'enwiurager, chanta avec elle le duo du quatrième acte des Huguenots. Meyerbeer as- sistait à cette audition. Masset E'(^chauffait pour faire briller son élève, et déployait une voix spleudide, à laquelle il n'avait jamais fait attention. Très hou musicien, excellent violo- niste, il chantait, non en chanteur, mais avec goût, et sa voix était si belle qu'on oubliait les imperfections de l'art. Il fut fort étonné do son succès, et la jiauïTe M"° Pougaud, cclipsw par son maître, fut à jwine écoutée. » Elle le fut si peu, eu effet, qu'on oublia de l'engager, taudis que M. Massot, quittant son pupitre de chef d'orchestre, déhntait peu de mois après à l'O- péra-Comique et devenait bientôt professeur de chant au Conservatoire, où il forme encore d'excellents élèves. ALTEIRDKVMVTIQIE — lo t c auq sooipcdtldetiu] Itse œ vres la scen st a te r In n a q e Autrefo 8 ilors [U les t.e rc ti e t ] u nombreux et tr s tr cl -s o ] ptla t ol n t ère a te r n ] e lu ] e f si t | e des con d s t au ur trag q ic c 1 ju n cernait qiie des tragédies. Plus tard, on baptisa du nom de vaudevillistes ceux r|ui s'oc- cupaient spt'cialement de vaudeville, et ou in- venta le mot de dramaturge pour l'appliquer à ceux qui s'adonnaient à la culture du drame. Aujourd'hui, la qualification générale d'auteur dramatique résume et réunit toutes les autres, AUTEURS ANOXYMES. — On a quel- ques exemples, assez rares, d'autcura qui ont produit des pièces au théâtre sans se faire con- naître, même des auteurs chaînés d'interpré- ter leur œuvre. Le plus curieux est celui qui se rapporte à Mari\"aux et à sa première Surprise de Vamùur, représentée à la Comédie- Italienne en 1722 (on sait que la seconde pièce qu'il donna sous ce titre fut jouée à la Comédie- Française en 1727). Le rôle principal de cet ouvrage était joué par une excellente artiste. ti7 M"" SiMa, et d'Origny rapporte à ce sujet cette anecdote : — « Quelques jours après la première représentation de cette pièce, l'au- teur alla chez 11"° Silvia, et voyant sur sa table une brochure, il lui en demanda le titre. « C'est la Surjvise de l'amour, cette pièce char- mante, dont l'auteur, en refusant de se nom- mer, est cause qu'elle n'est peut-être pas aussi bien jonce qu'elle pomTait l'être... » Marivaux prit sur-le-champ la comédie, et lut plusieurs endroits du rôle de Silvia. a Ah! Monsieur, s'écria-t-elle, vous me faites sentir toutes les liantes de mon rôle. A'ous lisez comme je sentais qu'il fallait jouer, et certainement vous êtes le diable ou l'auteur de la pièce. » AUTOMATES. — Parmi les s|x:otacle8 de toutes sortes qui fourmillent dans les foii-es, au milieu des paradistes et des baraques de saltimbanques, il est bien rare qu'on ne rencon- tre pas un ou deux montreurs d'automates. II arrive parfois que ces automati'S sont ingé- nieux, dignes d'attention, et mériteraient mieux que leur public ordinaire, étonné sans doute, mais incapable de les apprécier à leur valeur. AUTORITÉS THÉ.iTRALES ADMI- NISTRATIVES. — Lorsque les théâtres vi- vaient sous le régime administratif et n'exis- taient qu'en vertu de privilèges spi^iaux, ils relevaient de certaines autorités supérienres qui axerçaient sur eux un droit de sun-eillance et 68 AVANCES. — AVANT-SCENE. de contrôle incessant. « Pour tous les théâtres secondaires, disait un écrivain en 1824, l'au- torité, c'est le préfet de police; pour les théâ- tres royaux (ce titre était réservé aux scènes subventionnées), c'est le ministre de la maison du roi ou un premier gentilhomme de la cham- bre. Pour les théâtres de province, c'est le mi- nistre de l'intérieur. Ces divers fonctionnaires sont toujours d'accord pour les objets d'une véritable importance : quand il s'agit d'inter- dire la représentation d'un ouvTage, par exem- ple, rien de touchant et d'admirable comme l'harmonie qui règne, pour ces sortes de ques- tions, entre des pouvoirs naturellement opposes et rivaux. » Sous l'ancienne monarchie, avant la Révo- lution, un fonctionnaire élevé avait géné- ralement la surintendance des trois gi-ands théâtres : Opéra, Comédie -Française, Comé- die Italienne, ayant sous ses ordres quatre premiers gentilshommes de la chamljre exerçant l'autorité en son nom et sous sa responsa])ilité, chacun par quartier. La Révolution changea tout cela , comme bien d'autres choses ; mais quand TEmpire se fut établi, et qu'il eut, en les réglementant plus que jamais on ne l'avait fait, réduit les théâtres à un nombre inférieur à celui qui existait avant 178t), les anciens er- rements furent repris. Sous la Restauration, les grands théâtres se virent placés sous l'au- torité directe du ministre de la maison du roi, qui la faisait exercer par un surintendant. C'est à cette époque , aloi*s (jue M. de Blacas était ministre de la maison du roi et M. le duc de Duras surintendant, qu'on ht courir l'épi- graumie suivante : Blacas, Duras, Damas, hélas! Semblent d*abord un brelan d^as ; Si vous y regardez de près, Ce n'est qu'un brelan de valets ; ce qui n'était pas exact au moins pour M. de Damas, homme honnête, convaincu et modéré. Depuis que la liberté industrielle des théâ- tres a été rétablie en 1864, ces établissements sont replacés sous le droit commun et régis par les lois et règlements relatifs à la police des lieux publics. Toutefois, les théâtres sub- ventionnés de Paris, qui doivent naturellement rendre compte dé leur gestion à l'administra- tion supérieure, relèvent d'un fonctionnaire qui a le titre de commissaire du gouvernement (Voy. ce mot). AVANCES. — C'est une somme, équiva- lant généralement à un mois d'appointements, que le directeur d'un théâtre de province ac- corde à un acteur le jour de la signature de son engagement, pour lui permettre de vivre pendant le premier mois de l'exploitation, et qu'il lui retient ensuite par portions égales à la fin de chaque mois jusqu'à l'achèvement du contrat. C'est-à-dire que si l'artiste gagne 150 francs par mois, et que son engagement ait une durée de six mois, le directeur lui fera une retenue de 25 francs par mois pour rentrer dans ses avances. Parfois le directeur n'accorde que demi-avances, c'est-à-dire moitié d'un mois d'appointements. AVAXT-SCÈXE. — C'est, comme son nom l'indique, la partie la plus avancée de la scène, celle que les Romains appelaient proscenium ou pulpitum, et sur laquelle les acteurs \ien- nent se placer \)0\\v être bien ms et entendus de leurs auditeui*s. Elle fait saillie de la scène sur la salle, et comprend tout Tcspace compris entre le rideau et Torchestre, de telle sorte qu'elle reste en Mie du public lorsque le rideau est baissé. Quelques personnes prétendent que cette disposition nuit à l'illusion, en amenant les acteurs trop en avant, et en dehors de l'en- droit qu'ils sont censés occuper et que la dé- coration représente; mais ce n'est là qu'une des mille conventions auxquelles les nécessités de l'action scénique nous obligent à nous plier, et celle-ci est tellement indispensable qu'en l'acceptant on va jusqu'à l'oublier. En eflFet, les exigences impérieuses de l'acous- tique obligent les acteurs à ne point rester sur la scène proprement dite, sous peine de n'être point entendus. Le son de leur voix irait se perdre dans les coulisses, dans les frises, ou bien, dans les décors fermés, n'aurait plus de résonance en allant se heurter contre les toiles des châssis. Entre deux maux il a donc fallu choisir le moindre , et laisser aux comédiens la faculté de venir se placer en quelque sorte au AVANT-SCÈNE (loges d'). — AVOIR DES PLANCHES. «9 milieu du public, qui ne doit pas perdre une de leurs paroles. Nous ajouterons qu'en Italie, dans les théâtres lyriques, Tavant-scène pénè- tre encore bien plus profondément dans la salle que dans nos théâtres français, et que c'est là surtout ce qui fait paraître les salles italiennes bien plus sonores que les nôtres. Je ne saurais dire ce qu'il en est au point de vue réel de l'a- coustique; mais ce qui est certain, c'est que la voix du chanteur ainsi placé dans le milieu de la salle, pour ainsi dire, trouve toute son ex- pansion, toute sa puissance sonore, n'étant plus gênée par aucun des nombreux ol)Stacles qu'elle rencontre incessamment sur la scène. Il serait à souhaiter que sous ce rapport on nous vît imiter les ItaHens dans Taménage- ment scénique de nos théâtres lyri(pies. AVAXT-SCÈNE (loces d'). — On donne le nom de loges d'à van t-scùnc, ou plus simple- ment d'avant-scènes, aux loges qui, placées à l'extrémité et en dehors des ranî:!:s de loLa^s de la salle, bordent la scène de haut en bas. Pla- cées ainsi tout à fait sur le côté, ces loges sont aussi défavorables que possible pour la vue du spectacle, le spectateur ne vt^yant que l'extré- mité latérale de la scène (\m lui est opposée, et ne pouvant jamais siiisir rensenible du mouve- ment et de Taction scénicjues. ^lais comme c'est un chic d'occuper une de ces loges , et cela par tmdition, parce qu'autrefois los loges réservées au roi et à la reine étaient les deux grandes avant-scènes de droite et de gauche , et que les hauts pereonnages étaient friands de se voir placés au-dessus ou au-dessous du souverain , ces loges, toutes mauvaises qu'elles soient, sont fort recherchées, et par cette raison sont de- venues les places les plus chères dans tous les théâtres possibles. AVERTISSEUR. — Dans certains gmnds théâtres, par exemple à l'Opéra et à la Comé- die-Française, c'est un employé chargé d'aller avertir au foyer chaque acteur loi*sque le mo- ment approche de son entrée en scène. AVOIR DE L'AGRÉMENT. — Être ap- plaudi, avoir du succès. TeJ artiste a « de l'agré- ment j> dans tel rôle, dans telle pièce, qui con- viennent particulièrement à son talent. AVOIR DU CHIEN. — En argot de théâ- tre, on dit d'un artiste qu'il a du chien lors- qu'il possède cette faculté innomée que Vol- taire appelait tout artiste qui n'est pas toujours le môme, qui est dévoré d'une flamme intérieure, qui se laisse emporter par les élans d'une pas- sion soudaine et (|ui entraîne avec lui le piibhc dans les régions du plus noble idéal. L'expres- sion n'est pas relevée, étant donné surtout ce qu'elle est appelée à qualifier et à faire com- prendre ; mais nous la rapportons parce qu'elle est caractéristique dans le langage du théâtre. AVOIR DES COTELETTES. -^ Terme d'argot théâtral qui signifie : faire de Teffet, être applaudi. « J'ai eu ma petite côtelette ! » disait en rentrant dans la coulisse, tout fier de lui, un modeste comédien habitué à ne jouei que de mauvais rôles, et (pli avait trouvé l'oc- casion de se faire applaudir une fois en sa vie. — On ne se sert plus guère aujourd'hui de cette expression. AVOIR DKS ENTRAILLES. — Exprès- sion (ju'on emi)loie pour caractériser un comé- dien dcjué de Tadmirable faculté d'exprimer la passion, la tendresse, tous les nol)les mouve- ments de l'âme, de façon à faire illusion et à donner l'idée qu'il les éprouve lui-même. Cer- tains acteurs vous arrachent des larmes, vous attachent, pour ainsi dire, à leurs lèvres par la manière dont ils rendent les situations les plus pathétiques et les plus touchantes. Ceux-là ont des entrailles et sont véritablement les maîtres du public. Au siècle dernier, à Tépoque de la grande rivalité a l'Opéra de deux chanteuses célèbres, M" ' Pélissier et ^M'^*" Lemaure, chacune avait ses partisans, et W^'' Aïssé écrivait dans mie de ses lettres : « Les partis sur ^I"*^ Lemaure et W^*^ Pélissier deviennent tous les jours plus vifs... La Lemaure a ])eauc^up d'entrailles, et la Pélissier beaucoup d'art... » Cette réflexion suffit à faire juger les deux actrices, et M'^*^ Le- maure était évidemment supérieure à W^'' Pé- lissier. AVOIR DES PLANCHES. — Expression 70 AVOIR LE TRAC, LE TAFF, LE TAFFETAS. dont se servent les comédiens pour caractériser un artiste expérimenté, sûi* de lui, qui connaît son métier, en un mot à qui les planches du théâtre sont familières. Cela ne veut pas dire que cet artiste ait une valeur exceptionnelle, ni qu'il soit en possession de facultés supérieu- res ; cela indique seulement qu'il a de l'acquis, de l'expérience et des qualités pratiques. AVOIR LE TRAC, LE TAFF, LE TAF- FETAS. — Locutions d'argot théâtral qui ; signifient : éprouver une grande peur. Certains artistes, et non des moins méritants, ne sau- raient entrer en scène et se présenter devant le public sans ressentir comme une sorte d'ef- froi; d'autres, plus calmes d'ordinaire, éprou- vent ce sentiment les joura de première repré- sentation, d'autres encore lorsqu'il s'agit pour eux de paraître dans un rôle qui a été pour un de leurs confrères l'occasion d'un grand succès et pour lequel ils redoutent la comparaison. Tous ces artistes ont le trac, le taff, le taffetas. « J'ai eu un rude trac en entmnt ! » dira l'un. « Mâtin ! quel taffetas ! » s'écriera l'autre en sortant de scène. B BACCHANALES. — Voy. DIOXYSIA- QUE8. BAFOUILLER. - C'est un terme d'argot théâtral. D'un artiste qui parle trop vite et de façon à ne se plus faire comprendre , ou qui manque de mémoire et, pour ne pas rester court , articule des mots sans suite, sans liaison , et dont le sens est incompréhensible, on dit qu'il hafomlle, BAIGNOIRES. — Ce sont les petites loges sombres situées au rez-de-chaussée d'une salle de spectacle, en dessous de la première galerie, et qui entourent tout l'espace occupé par le parterre et les fauteuils d'orchestre. BAILLER AU TABLEAU. — Se disait autrefois d'un acteur qui, prenant connaissance au tableau de la distribution d'une pièce nou- velle, dissimulait son mécontentement de voir qu'il n'y était porté que pour un bout de rôle. BAILLIS. — Dans l'ancien répertoire de rOpéra-Comique, il y a soixante ou quatre- vingts ans, l'action se passait très souvent dans un village, où l'on voyait presque toujoure ap- paraître un vieux bailli , généralement sot, laid et ridicule, comme dans les Deux Petits Sa- voijarchy les 3Iéprises par ressemblance, le Diable en vacances , le Droit du Seigneur, la Fausse Paysanne, la Rosière de Salency, Alexis et Justine, Joconde, le Nouveau Sei- gneur de village, etc. Les rôles de-ce genre for- mèrent bientôt une sorte d'emploi qu'on ap- pela remploi des baillis, et qui, en réalité, rentrait dans celui des Laruettes. Cet emploi fut tenu à rOpéra-Comique par quelques acteurs dont le talent scénique était remarquable, entre autres Rosière, Vizentinî et Juliet père. BAL DE L'OPÉRA. — Bien qu'ils soient considérablement déchus de leur ancienne splendeur, les baLs de l'Opéra conservent tou- jours le privilège d'attirer la foule. Leur exis- tence date aujourd'hui de plus de cent soixante ans, et il n'est pas sans quelque intérêt d'en rappeler les origines, d'autant plus que leur renommée est européenne. Voici ce que disait à leur sujet un écrivain du dix-huitième siècle : Le nombre multiplié des bals masqués pendant le règne de Louis XIV avoit mis au commence- ment de ce siècle cet amusement à la mode. On en vit au Palais-Royal et à Sceaux où régnèrent le goût et l'opulence. L'Electeur de Bavière , le prince Emmanuel de Portugal vinrent alors en France, et ils prirent le ton qu'ils trouvèrent établi. L'un donna les plus belles fêtes à Surêne, l'autre à l'hôtel de Bretonvilliei*s. Les particuliers, effrayés de la somptuosité que ces princes avoient répandue dans ces fêtes superbes, n'osèrent plus se procurer dans leurs maisons de semblables amusemens. Ils voyoient une trop grande distance entre ce que Paris venoit d'admirer, et ce que leur fortune et la bienséance leur permettoient de faire. C'est dans ces circonstances que M. le Régent, par une ordon- nance du 31 décembre 1715, permit les bals pu- blics trois fois la semaine dans la ^alle de l'Opéra. Les directeurs firent faire une machine avec la- quelle on élevoit le parterre et l'orquestre au niveau du théfitre. La salle fut ornée de lustres et d'un cabinet d%ns le fond , de deux orquestres aux deux bouts et d'un buffet de rafraîchissement dans le milieu. Cette disposition éprouva quelques chan- gemens dans la suite. La nouveauté du spectacle, la commodité de jouir de tous les plaisirs du bal sans soins, sans préparatifs,, sans dépense , donnèrent à cet établis- sement tout le succès imaginable. Cependant, la danse, qui fut l'objet de ces bals publics, y a beaucoup perdu. On sçait qu'il n'est pas du bon air d'y danser. Les deux côtés do la salle sont occupés par quelques masques obscurs qui suivent 72 BAL DE L'OPERA. les airs que Torquestre joue ; tout le reste se heurte, se mOle, se pousse. Ce sont les saturnales de Rome, qu'on renouvelle, ou le carnaval de Venise, qu'on copie. Les étrangers qui viennent passer l'hiver à Paris s'y rendent en foule ; il est même arrivé quel- quefois qu'ils y étoient en si grand nombre que l'on disoit plaisamment : Parle-t-on françois au- jounThui au bal de F Opéra f On voit que ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il est de mauvais ton de danser au bal de l'Opéra. Cela se conçoit sans peine. Il est évident que ^ns un lieu public, où le premier venu j)eut se 'présenter masqué, la société doit se mélan- ger rapidement. Les femmes qui se respectent ne sauraient entrer dans une telle cohue, et les hommes qui les accompagnent se lx)rnent, comme elles, à jouir, du haut d'une loge, du coup d'œil et du spectacle. Au miheu du dix-huitième siècle, les bals de rOj)éra commençaient le 11 novembre, à la Saint-Martin, et se donnaient tous les diman- ches jusqu'à l'A vent, après (juoi on les rcpre- nait à la fête des Rois, et ils se continuaient une ou deux fois par semaine pendant le car- naval, jusqu'au carême. Le bal commençait à onze heures du soir pour finir à six ou sept heures du matin, et le prix d'entrée était de six livres. Dans son Histoire de V Académie royale de musique (1751), Dm-ey de Xoinville a donné de la salle du bal cette description : La nouvelle salle forme une espèce de gallerie de 98 pieds de long, compris le demi-octogone, le- quel , par le moyen des glaces dont il est orné , de- vient aux yeux un sfilon octogone parfait. Tous les lustres, les bras et les girandoles se répètent dans ces glaces, ainsi que toute la salle, dont la longueur, par ce moyen , paroît doublée , de même que le nombre des spectateurs. Les glaces des côtés et vues de profil sont placées avec art et symmétrie selon l'ordre d'une architecture conjjposite , enrichie de différentes sortes de marbre, dont tous les or- nemens sont de bronze doré. La salle ou gallerie peut être divisée en trois parties. La première contient le lieu (pie les loges occupent : la seconde un salon quarré ; et la troi- sième le salon demi-octogone dont on vient de parler. Les loges sont ornées de balustrades avec des tapis des plus riches étoffes et des plus belles couleurs sur les appuis , en conservant l'accord né- cessaire entre ces ornemens et la peinture de l'an- cien plafond qui règne au-dessus des loges. Deux buffets, un de chaque côté, séparent par le bas les loges du salon , qui a 30 pieds en quarré sur 22 d'élévation, et terminé par un plafond ingé- nieux, orné de roses dorées, enfermées dans des losanges, et entourées d'oves qui forment une espèce de bordure. Deux pilastres de relief sur leurs piédestaux marquent l'entrée du salon. On y voit un rideau réel d'une riche étoffe à fraliges d'or, re- levé en festons. Ces pilastres s'accouplent dans les angles, de môme que dix autres pilastres cannelés peints sur les trois autres faces du salon. Ils imi- tent la couleur du marbre de brèche violette , ainsi que la frise. Leur dimension est de treize pieds et demi, compris la baze et le chapiteau. Leurs pié- destaux ont cinq pieds compris les socles, l'ar- chitrave , frise et corniche trois pieds et demi. La grande corniche qui règne autour du salon est de relief. Au milieu des grandes arcades il y a un groupe de quatre figures jouant de différens instrumens. Ces arcades, où paroissent des glaces, sont ouvertes par des rideaux de velours cramoisi bordés d'or, et relevés avec des cordons qui en tombant servent à cacher les joints des glaces, en sorte ([u'elles paroissent être d'une seule ])ièce. Des festons de guirlandes et d'autres ornemens produisent le même effet. Le salon quarré et le salon octogone sont encore enrichis de vingt colonnes, avec leurs arrière-] Pias- tres de marbre bleu jaspé, ainsi que les quatre pilas- tres du salon derai-octogone. Six statues dans le goût antique représentent Mercure et Momus dans le fond , et aux côtés ([uatre Muses peintes en mar- bre blanc et de grandeur naturelle, ainsi que les autres. Ces ouvrages sont de Charles Vanloo, et peints de très bon goût. La grande arcade du fond, où commence la troisième partie de la galerie, a seize pieds de haut sur dix de large : deux Renom- mées y soutiennent les armes du roi en relief. Vingt-deux lustres de crystaux, garnis chacun de douze bougies, descendent des trois plafonds par des cordons et des houpes d'or et de soie. Trente- deux bras portant des doubles bougies sont placés dans l'entre-deux des pilastres qui soutiennent les loges. Dix girandoles de cinq bougies chacune sont placées sur les pilastres couples du grand salon, et dans le salon octogone il y a sur chacun des pilastres ime girandole à trois branches, en sorte que cette salle est éclairée par plus de trois cens bougies , sans compter les chandelles , lampions et pots à feux qui se mettent dans les coulisses et avenues du bal. Trente instrumens placés, quinze à chaque ex- trémité de la salle, composent la symphonie pour ^■p^^jM-ï^^^— piT ■ El IfàtM Ê HH tj^^^^^^^^^^^mmmJ^" l IK ^Ik-'^^'^^^^^v .^ Hniti I IT. — £< &il tniii;uc (x>iu< ultclc] , desiluC et Ernvé jn BALS (LES) AU THÉÂTRE. '5 le bal, mais pendant une demi-heure avant qu'il commencé ces instrumens s'assemblent dans le salon octogone, avec des tymballes et des trom- pettes, et donnent un concert composé de grands morceaux de symphonie des meilleurs maîtres. On peut assurer que ce bal forme un des plus beaux spectacles que Ton puisse voir, tant par le coup d'œil de la salle où il se donne que par la quantité de masques qu'il attire pendant tout le carnaval. La vogue du bal de TOpéra n'a jamais cessé un instant, et elle a eu des époques de recrudes- cence remarquables. Telle est celle qui signala le temps où Musard, musicien excentrique mais non sans talent, Musard, qu'on surnom- mait le Paganini de la danse et le Roi du qua- drille, s'installa à la tête de l'orchestre de ce bal, sous le règne de Louis-Philippe. !Musard devint alors une des célébrités de Paris, et l'on s'étouffait à l'Opéra, les nuits de bal, pour le voir diriger cet orchestre gigantesque, com- prenant 24 violons de chaciue côté, des altos et des contrebasses en proportion, où les cuivres étaient représentés par 14 cornets à pistons et 12 trombones, et avec lequel il obtenait des effets de sonorité véritablement curieux, effets qu'il augmentait encore par des excentricités telles que le fracas de plusieui-s chaises qu'on brisait en mesure k un moment donné, ou d'un pistolet qu'on faisait partir à l'attaque du ga- lop final d'un quadrille. Les danseurs, grisés par l'éclat de ces sonorités si puissantes et si étranges , mis hors d'eux par la verve et la furie que ^lusard déployait à la tête de ses musiciens, allaient alors le prendre de force sur son es- trade, le mettaient sur leurs épaules et lui fai- saient faire ainsi le tour de la salle en le portant triomphalement, tandis que tous les assistants s'égosillaient à crier sur tous les tons : Vive Musard! Un joural d'alors le dépeignait ainsi : Tantôt il se lève, regarde le plafond, mesure le public du haut de sa majesté , se gratte la tête ou se tient les côtes ; tantôt il s'asseoit, passe la main sur son front, siège de tant de génie , réceptacle de tant d'harmonie, entrepôt de tant de responsabilité. Dans certains moments, la pointe de son archet plane sur la note jusqu'à son agonie, et l'aide à mourir ; dans d'autres , l'archet semble ramasser la note par terre, et la ramener vers le pupitre. C'est un curieux spectacle, je vous assure, que celui de M. Musard conduisant son orchestre. On ne se lasse pas de l'admirer... A cette époque, les Imls de l'Opéra se don- naient régulièrement chaque samedi pendant toute la durée du carnaval , et l'on en donnait un dernier le jeudi de la mi-careme. Après ^Musard, ce fut M. Strauss qui conduisit l'or- chestre. Cela dura jusqu'en 1873, époque de l'in- cendie de la salle de la rue Le Peletier. Lors- que, deux ans api*ès, la salle du boulevard des Capucines fut inaugurée, il fut (luestion de supprimer les bals, par la crainte qu'on avait qu'ils fussent préjudicialJes à la conservation artistique du monument. On finit cependant par les autoriser de nouveau, mais au nombre de quatre seulement par hiver, et leur succès est encore tel cpie ces quatre bals pro- duisent une recette l)rute de 150 à 200,000 francs. Aujourd'hui il y a deux orchestres, l'un dans la salle même, dirigé par M. Olivier Métra ou par M. Arban, l'autre dans l'avant- foyer, à la tête duquel est placé IVI. Farbach, le fameux chef d'orchestre hongrois. BALS (LES) AU THÉÂTRE. — La mode des bals, même des bals masqués, ne date pas d'aujourd'hui, et les anciens ne dédaignaient pas plus que nous le i)laisir de la danse. Un chroniqueur du siècle dernier s'expliquait ainsi à ce sujet : On trouve l'usage des bals établi dès l'antiquité la plus reculée. On en distingue de trois sortes : les bals de cérémonie, les bals masqués et les bals publics. La danse simple fait le fond de ce specta- cle , et il est fort en usage dans les occasions solen- nelles. Les bals se multiplièrent dans la Grèce, à Rome et en Italie. On n'y paroissoit qu'avec la parure la plus recherchée. C'est dans ces occasions que les personnages les plus graves se faisoient honneur d'avoir cultivé la danse dans leur jeunesse. Socrate est loué des philosophes qui ont vécu après lui de ce qu'il dansoit comme un autre dans les bals de cérémonie d'Athènes. Platon mérita leur blâme pour avoir refusé de danser à un bal que donnoit un roi de Syracuse. Et le sévère Caton, qui avoit négligé de s'instruire dans les premières années de sa vie d'un art qui étoit devenu chez les Romains un objet sérieux , crut devoir se li\Ter à cinquante-neuf ans aux instructions d'un maître à danser de Rome. Après la destruction de l'empire , 76 les étatB qni bo formèrent de ees débris retinrent tous cette institution ancienne. Ou donna des bals de cérémonie jusqu'au terne où le génie trouva des moyens plus ingénieux de signaler la magnificËnce et le goût des souverains. Mais ces belles Inventions n'anéantirent point un usage si connu ; les bals sub- BtBtèreut et furent même conËacrés aux occasions de la plua baute cérémonie. Philippe II, roi d'Es- pagne, étant arrivé à Trente durant la tenue du concile , les Pères ordonnèrent un bal pour sa récep- tion. Les dames les plus qualifiées de la ville y fu- BALS (LES) AU THÉÂTRE. rent invitées : le cardinal de Mantoue ouvrit le bal, et tous lea Pères du concile dansèrent avec autant de modestie que do dignité. Les bals de Louis XIV furent magoiâque»; ils se ressentoient de cet air de grandeur qu'il imprimoit à tout ce qu'il ordon- ne i t. On s'ennuyoit à Rome dans les bals do céré- monie, et on s'amnsoit dans la célébration des fêtes saturnales, sous mille déguisemene différents. Voilà l'origiac des bals masqués. Les avantures que le rnasqtie servolt ou faisoit naître, les caractères di- vers de danse qu'il donnoit l'occasion d'imaginer, l'amusement des préparatifs, le cliarmc de l'exé- cution, les équivoques badines auxquelles Vino- gnito donnoit lieu firent le succès de cet amusement. Il a été extrêmement ù la mode en France pen- dant l'espace de deux cents ans. Les Grecs n'ont point eu ce genre , et les Romains ne l'ont eu que fort tard. Parmi les moyens d'amusement que ces bals procurent, ils ont des iuconvénieiis, et ils ont causé de» malbcur.?. Néron, masqué indécemment, couroit les rues de Rome et déslionoroit sans scru- pule les plus honnêtes femmes. Dans un bal mas- qué que la duchesso de Bcrry donna aux Gobclins, le roi Charles VI, qui y étoit venu masqué en sau- vage, faillit à être brûlé vif par l'imprudence du duc d'Orléans; plusieurs courtisans y périrent, et d'autres ne se sauvèrent qu'en se plongeant dans une cuve pleine d'eau qu'un heureux hazard lit rencontrer. On a TU il l'article Bals ih l'Opéra de <|uellL' façon les bals masqués prirent niiiasiiiice dans nos théâtres, au commencement du siècle der- nier. Le succès obtenu sous ce rapport par BALS (LES) AU THÉÂTRE. l'Opéra lui suscita ausaitôt des rivaux , rivaux qu'en vertu de son privil^e, de sa puisuance et de la faveur dont il était l'objet, il sut bientât réduire au silence , au moins pour uu temps. Le mt^me chroniqueur nous renaeiguo encore sur ce point : Le 26 décembre 1716 les Comédiens François 77 avoient obtenu de M, le duc d'Orléans, régent, la permiBBÏon de donner des baU publies sur leur théâtre. Cea bals devinrent si fort à la mode, que cens de l'Opéra se trouvèrent déserts , et furent fer- més les trois derniers jours du carnaval de cette année-là. Les directeurs de l'Académie rojale de musique, etfray es du préjudice que cette permission leur causeroit, si elle venoit à subsister, firent de ^^H ■M p ^^^s=^ ^^-=?=^^^^ ^^^ I^^H ^H^^^^^^^ ^^ ^S WBÊÊ 1 i i i i ^ M ^ It et™ btbià ïi( , d »prts one m QU« de Fnrisnit (XV i si fortes représcntatioDS et employèrent des in- stances si pressantes, qu'elle fut retirée en 1721. Les Comédiens Italiens a)*nnt abandonné leur tliéûtre de l'IIfltel de Bourgogne pour en ouvrir tin nouveau à la Foire de S.-Laurent, voulurent aussi, pour grossir leur recette, donner le bal deux fois par semaine , le dimanche et le mercredi ; mais les chaleurs de la saison leur firent discontinuer cette entreprise après quelques semaines. Plusieurs années après, l'Opéra- Coraiq ue , qui éloit alors sous la direction du sieur Ponleau, donna aussi pli 5 octobr rs bals. Il y en eut un la nuit du 4 au r ce théâtre , au niveau duquel on avoit plancher qui remplissoit toute la lon- gueur de la salle, qni étoit très bien décorée. L'as- semblée fut brillante, et les boutiques de la Foire furent éclairées pendant toute la nuiL Ainsi fut terminé l' Opéra-Comique de la Foire de S, -Lau- rent en 1734. Le succès de ce premier bal engagea le dii'ecteur d'en donner les années suivantes, et tous les ans à la fête du roi il y eut un bal dans la salle de l'Opéra-Comique pendant plusieurs années. 78 Tout le monde Bçait que M. Graoval, comédien du Koi, obtint i! y a sept ou huit mois la pennis- Dion de donner huit bals publics à son profit dans la salle de la Comédie-Françoise. On lui laissa la liberté de choisir les Joura qn'îl jugeroit à propos pour ces assemblées. Il donna «on premier bal le dimanche 6 mai 1763. On voit que l'Opéra avait tronvé des imita- BALS (tES) AU THEATRE. tours qui finirent par avoir raison de ses pré- tentions. Bientôt les théâtres n'eurent plus le monopole des bals, et des établissements ao fondèrent oii la danse faisait partie des diver- tissements offerts au public. En 1773, on dan- sait au Ranelagh, au bal d'Autenil, au Coljsée, an jardin des frères Ruggieri , les fameux ar- tificîetB, au Waux-hall de Ton-é, autre artifi- àazat, d'iqitta DebucooTt. çier célèbre. Pnis, avec la Révolution, les bals publics, comme les théâtres, se multiplièrent d'une façon prodigieuse, k Ces divertissemeat^, disait un annaliste, se multiplient depnis la Ré- volution. Il y en a un publiquement affiché chez M. Blanchard, rue de Saintonge ; un au Tem- ple, chez M. Desbordes; un,ruedoLancry,chez un marchand de -^in, c'est une fille qui en a l'inspection ; un hvs beau et très suivi, rue de la Tixeranderie. Et plus de 400 autres qui se noiront réciproquement, parce que ce n'e st pas le désir d'amuser le public qui guide tous lea entrepreneurs de ces bals, mais le désir de ga- gner de l'argent (1). » A l'époque de la Restauration, et surtout sons la monarchie de Juillet, il y avait encore à (1) Hinaaach général . \iec Bcn regard, Musard magni-tise tout ce qui I entoure, aiecson archet, il ramené tes égarés, contient les audacieux, avertit les distraits, rallie les traînards et maintient les fougueux. Dans ï'adiigio, dans Ywidanle, son visage est onctneus, sa bouche est riante, Eon attitude est pleine de di- gnité et de contemplation plastique. Dans Vaîlegro, son œil lance des éclairs, gos nerfs s'agitent, et tout son corps réalise la chimère du mouvement per- pétuel. Alors il ne bat plus la mesure, il la frappe H coupa redoublés, des pieds, des mains, des coudes et des genoux. Son pied fait voler lu poussière en l'air, et jette de la poudre aux yeux. Malgré ces milleries iiinocentos. Musard at- tirait beaucoup de monde à l'Opt'ra- Comique. Aujourd'hui, le goût de la danse a jiassé de nos 80 BALADIN. — BALAYER LES PLANCHES. mœurs, au moins en ce qui concerae les en- droits publics où il s'exerçait jadis. Depuis vingt ans, la multiplicité sans cesse croissante des cafés-concerts a tué les bals publics, qui ont presque tons disparu l'un api'ès l'autre, et de tous nos théâtres l'Opéra est le seul qui donne encore chaque année quelques bals mas- qués. Naguère, en protînce, sous le régime admi- nistratif des théâtres, ceoi-ci avaient seuls le droit de donner des bais masqués. Il n'en est plus de même aujourd'hui, depuis le retour de la liberté théâtrale, mais on ne danse pas plus maintenant en province qu'à Paris, — publi- quement parlant. BALADIN. — Le baladin est une variété du genre saltimbanque, et désigne un bouffon. un faiseur de tours, un sauteur, un bateleur. Sa personnalité se confond tellement avec celle de ce dernier que, afin de ne pas faire double emploi, nous renvoyons au mot BaleUtir pour ce que nous avons à en dire. BALANCIER. — C'est une longue et lourde perche que le danseur de corde tient d'ordinaire dans ses deux mains, horizontalement, et qu'il fait pencher tantôt d'nn côté, tantôt de l'autre, afin que le poids de cet énorme bâton, qu'il fait porter selon le besoin à droite ou à gauche , l'aide à se maintenir eu éqnilibre sur la corde. BALAYER LES PLANCHES. — C'est une expression dont se servent les comédiens lors- qu'ils sont apjwlés à jouer dans une petite pièce qui commence le spectacle, et qui est destiuée à faire attendre au public lu pièce de R'sistance. Ils apjwllcut cela « balayer les planches. » BALCON. — On appelle balcon la première I par conséquent, est située au premier étage. Le des galeries qui font le tour d'une salle de balcon est occupé par une série de deux ou spectacle, d'une avant-scène à l'antre, celle qui, I trois rangs de fauteuils numérotés , qui pren- nent le nom de fauteuils de balcon. Après l'or- chestre, le balcon, surtout de face, ^t la meil- leure place d'an théâtre. Il offre pour les femmes cet avantage que non seulement c'est celle d'où a TB&ATRB. l'on voit le mieux, mais encore celle où Ton est le micuz vu. II n'y a pas de balcon à l'O- pém, où les deux côtés de la salle sont entière- ment occupés par des loges; mais il est rem- placé par un i-aste . niétites avaiitafîes. BALLERINE. rapliithéâtre, qui offre lea BALLERINE. — Nom qu'on donne sou- reul Hus dskuscuges de théâtre et (jui nous vient de l'Italie, ou le mot balleritia est plus usité (jue celui de danzaln'ce. Lea ballerinea françai- ses ont toujonra joui d'une si grande renom- mée en Italie, qu'aujourd'hui encore, dans ce pays, pour indiquer, dans les troupes de ballet, l'emploi féminin le plus important, on le dôai- gue ainsi : Prima ballerina di rangofrancese. BALLET. — Un écrivain dn dix-huitième siècle, Compan, a donné nne définition aussi précise qu'excellente dn mot ballet, en le carac- térisant ainsi : s Action théâtrale qui se rc- préscnto par la danse, guidée par la musii{ue. » Le ballet, en effet, est une action scéniquc à lacjuellc concourent scuienient la danse et le geste, et que soutient constiimment la musique. Loi-s^u'il est le fruit d'une heureuse- association, r*tuvi-e intelligente d'un véritable poète et d'un niusicieninspiré, le ballet produitun spec- tiicle adorahle, véritable joie de l'esprit et des jeux, qui fait naître des sensations particulières, délicieuses, multiples, et wms analogues dans le domaine des aits. La nîverie, la grâce et la poésie, après s'être donné rendez-vous dans le cerveau du poète et du musicien, se rt-unissent pour enchanter le spectateur ; la fiction prend corps sur la scène, se matérialise en quelque sorte, sans rien ]>enlic pourtant de son carac- tè're piirticulier, et le transporte, sans qu'il eu ait conscience, pour ainsi dire, dans un monde imaginaire et merveilleux, où la fantaisie dans ce qu'elle a de plus idi^l, de plus vaporeux, de plus exquis, jieut librement se donner carrière, BALLET. 85 aidée qu'elle est de toutes les ressources que Fart humain peut lui prêter, aussi bien en ce qui concerne Tillusion des Jreux que le charme de Toreille. L'action dramatique, la beauté plastique, la poésie, la peinture, la musique et la danse, tout, — la parole exceptée, — tout concourt à cet enchantement, tout se réunit pour présenter dans un ensemble unique, in- comparable, le spectacle à la fois le plus com- plet, le plus aimable, le plus riche et le plus naturel qu'il soit donné à l'homme d'admirer. Le ballet n'a pas toujours été ce que nous le voyons aujourd'hui, où, sous l'aspect du ballet d'action, du ballet-pantomime, il a pris sa forme définitive. Les anciens n'employaient guère la danse et la pantomime que comme in- termèdes plus ou moins développés, bien que les danses hiéroglyphiques des Egyptiens, exé- cutées sur une musique de caractère, semblent devoir être rapprochées de nos ballets modernes. Mais les Grecs, qui estimaient tant la danse, et après eux les Romains, ne l'ont guère fait entrer que comme accessoire dans leurs actions dramatiques, tragédies ou comédies. Il faut arriver au seizième siècle pour trou- ver, dans les mnscaradeSj boutades, bouffonne- ries, momeries qui se dansaient alors, Tembryon du ballet moderne. Ce n'étaient encore là, tou- tefois, que des divertissements de danse, dé- pourvus de toute action. Bientôt on mêla à ces divertissements quelques vers, quelcjucs stances récitées ou chantées, et la vogue de ces sortes de jeux devint telle qu'il ne fallait qu'une cir- constance pour les tirer de l'ordinaire et leur donner une partie au moins de l'éclat dont ils étaient susceptibles. Cette circonstance se pro- duisit en 1581 , lorsque le mariage de la jeune princesse Marguerite de Lorraine, belle-sœur de Henri III, avec le duc Anne de Joyeuse, donna heu à des fêtes jusque-là sans précédent à la cour de France. C'est alors que l'itahen Baltazarini, dit Balthazar de Beau joyeulx, ima- gina et réalisa ce fameux Ballet comique de la Royne, heureux mélange de poésie, de danse et de musique accompagnées de décors et de costumes merveilleux, dont la représentation ne coûta pas moins de douze cent mille écus. Dès lors le ballet de cour était né, et, après quelques alternatives d'obscurité et d'éclat, nous le verrons briller de toute sa splendeur sous Louis XIII, et plus encore sous Louis XIV, qui en faisait lui-même « le plus bel orne- ment, » c'est-à-dire qui y dansait en personne avec une vaillance et une ardeur sans égales. Les premiers du genre furent U Triomphe de Minerve, la Délivrance de Renaud, Tancrede dans la forêt enchantée, ensuite desquels vin- rent tous les ballets fameux qui firent les déli- ces de la cour de Versailles, ballets mêlés de chant, qui nous acheminaient indirectement vers l'opéra, et dont les paroles étaient écrites par Benseràde, Molière et quelques autres, tan- dis que Lully en composait généralement la musique. C'est alors que prit naissance, entre les mains de Molière, la comédie-ballet, genre un peu hybride, il faut le dire, mais dont il nous a laissé de si heureux échantillons : les Fâ- cheux, le Sicilien, V Amour médecin, puis la Priîicesse d'Élide, les Amants magnifiques, et ces excellentes comédies qu'on joue aujourd'hui sans le secours de la danse qui les encadrait alors, le Malade ima{iinaire, Monsieur de Pour- ceau{j7iac, le Bourgeois gentilhomme, Tr^nta ans plus tard, et quelques années seulement après la mort de Lully, surgissait sur notre grande scène lyrique l'opéra-ballet, mélange de chant et de danse qui paraît avoir été fort original, et dont le premier modèle fut donné par le poète Houdard de la Motte et le musicien André Canipra dans une œuvre élégante, pimpante et charmante qui avait nom l'Europe galante. Ce genre de l'opéra-ballet, auquel on donna bien- tôt le simple nom de ballet, régna victorieuse- ment à l'Oi^éra pendant plus de soixante ans, et jusqu'après la mort de Rameau. Il reposait le spectateur des grandes émotions de la tragé- die lyrique, et on lui doit de grands succès, entre autres ceux qu'il rempoita avec le Carnaval de Venise, les Fêtes vénitiennes, les Fêtes de Tha- lie, le Ballet des Ages, Us Éléments, le Ballet des Sens, les Indes galantes, les Fêtes d'Héhé, Us Caractères de la Folie, Platée, Us Surprises de V Amour, etc., etc. Il faut arriver à l'année 1776 pour rencon- trer à l'Opéra la première manifestation du vé- ritable ballet, du ballet-pantomime, sans ad- jonction de paroles. Nous la trouvons dans Us (.'aiirîrfn du Onhilhée, \«\\v\, nw«)tii' i''^'*'^^'- l^ siuMtit'U j^vnitinv. [ thtûtn.'. lo nwaneniont âismiuiqne et U pan- »m lu «.'MtiiîHass'iit »K' lollo tuaniôrv <)w"il lui ' t>.kminK'. Elit- «.-rait loosnie à ècaMir. U djnis- fVU iiHjyWîiil'w' df ft- crvtinvr. Aussi uo wiiuaii-. [if des i.lan<*nrî ilo premitr t*nlre ijui « snc- !■« iiiUix- K* uwtw A-s ailleurs lîi' la musî^nK' | rtxWrvnt i rOwra i^'ndanc plu* d"an sircle « lî^* twlli-is d\' iv uiup*. ijui s'fS'îtivnt vvmpa'- qui t::*'nt, tu ïvur iKure, Li çioin; « la :-:r- tvn^iM i!i-v»t'.: îw ihv*rt:t»(>fc«i. Wiuifls u'i-- cino d-;^ i-* th^àirv, i»c iî* aiiiTsient '■: r--î-l:o iaJKv.'. iM\rv% >iw Ni-wrrv. lUrvîtl aiiw it Vcs- tf:; rViiI^e rt pn>T>i:aiiïs; ii"e=ih'.'C*i4jîi« adiLi:- ww {vw. ra:;\T^ Ctf t'-.-,~n: dabt-rd Pixvsrt « Ra;--:!, »ltt »v«vw. ».-f. AcVcs;?,: cr. vv i;'.'.; .v&vr-x vkt ,;: û.-. M-r*:'.. i-?W5 desiTwJ * ï:-^- ^ vsk:'^' iTvt't\-Bt.'c; i,i;;t-. r,:ji:s a;'.sK Isr^ du ;r»^::i: M * S.:Vl'juj. rrçï-i.ia. (,;::« -.c Dac- BALLET. 87 geville, cette gracieuse Dangeville dont les pieds, disait-on, faisaient tourner toutes les têtes. Puis, ce furent Boutte ville, Maltayi'e, Laval, Dupré, auquel un fanatique adressait ce madrigal : Ah ! je vois Dupré qui s'avance : Comme il développe ses bras ! Que de grâces dans tous ses pas ! C'est , ma foi , le dieu de la danse. x\vec ceux-ci, TOpéra avait M"'' Mariette, ]^iic PuYicrné, et ces deux reines de la danse, ces deiLx rivales dont les triomphes furent si éclatants et si prolongés : l'inimitable Salle, et Camargo Tenchanteresse. Ces deux dernières firent littéralement la fortune de TOpéra , et pendant vingt ans firent courir tout Paris. On célébrait leurs talents en prose et en vers, avec cette différence qu'on chantait aussi les vertus privées de M"° Salle, tandis que la Camargo se faisait un renom d'un autre genre. « De son art enchanteur, )> disait-on de la première, . Do son art enchanteur tout reconnut les loix. Dans Londres, dans Paris, tout vola sur ses traces. Elle fut sans égale, et parut à la fois Elève des Vertus et rivale des Grâces. Voltaire lui-même fît passer à la postérité la chasteté de W^'' Salle : De tous les cœurs et du sien la maîtresse, Elle allume des feux qui lui sont inconnus. De Diane c'est la prêtresse Dansant sous les traits de Vénus. Quant à M"*' Marie- Anne Cupis de Camargo, les hommages poétiques ne lui manquèrent pas non plus. Un de ses admirateurs , M. de la Paye, plaça ce quatrain au bas du portrait de la char- mante danseuse fait par le célèbre peintre Lancret : Fidelle aux loix de la cadence , Je forme au gré de l'art les pas les plus hardis. Originale dans ma danse , Je peux le disputer aux Balons, aux Blondis. Voltaire admirait Tune comme l'autre, et après avoir cité les vei"s que lui inspira seule M"® Salle, je reproduirai ceux-ci, dans lesquels il célèbre à la fois le talent des deux danseu- ses : Ah ! Camargo , que vous êtes brillante , Mais que Salle , grands dieux , est ravissante ! Que vos pas sont légers , et que les siens sont doux î Elle est inimitable , et vous êtes nouvelle. Les NjTnphes sautent comme vous , Mais les Grâces dansent comme elle. Après tous les artistes que je viens de nom- mer, il faut encore citer, parmi ceux qui por- tèrent au plus haut point l'art de la danse à l'Opéra, d'abord Lany et Hamoche, puis toute cette lignée de danseurs et de chorégraphes fameux : Vestris père et fils, dont le premier s'intitulait modestement iKè) ]E porti n'y a guère plus de trente ans que la Porte Saint-Martin a renoucé au ballet Quant à l'Opéra, il ne l'a jamais négligé et l'on sait quels aucix's il a ol tenus depu a le commencement de ce siècle, dans le genre du ballet, surtout à partir du moment où de grands artistes ne dédaignèrent pas d'écrire de char- mante musique pour les ouvrîmes de ce genre. Mchul et Berton d abord plus tard Hcrold et Schneitzhoeffcr puis Adolj lie Adam Lal>arre, et après eu\ M Léo Ddibea ont écrit des par- t tiona exqu ses pour tous ces jolis ballets qui avaient nom le Jugement de Paris, la Danso- manie, V Enfant prodigue, le Sédvcleur au vil- lage, la Sylphide, la Tempête, la Somnam- bule, la Fille mal gardée, la Belle mi bois dor- BALLET AMBULATOIRE. mani, kt FUle du Danube, le Diable à quatre, la Jolie Fille de Oand, Orfa, Oieelle, le Corsaire, JoviUt, Oraziosa, la Fonli, la Source, Coppé- lia, Sylvia... Les artistes qui jouaient et dan- saient dans cea ouvrages étaient Gardol, Ves- tris, Coralli, Petipa, Mérante, Branchu, Saint- Léon, M"""- Clotilde, Pauline, Bigottini, Noblet, Taglioni, les aœura Elssler, Carlotta Griai, Dumilàtre, Fitz-James, Plunkett, Fanny Cerrito, Rosati, Ferraria, Emnia Livry, Mou- rawieff, Fiorotti, Vernon, Bozza«ehi, Benu- grand , et tant d'autres dont les noms m'échap- pent. Aujourd'hui encore, le genre du ballet jouit à l'Opéra d'un vif éclat, bien que, ai la danse s'y trouve toujours bien représentée, l'art ei charmant et si expressif de la pantomime y semble considérablement déchu de son an- cienne supériorité. BALLET AMBULATOIRE. — Le mot détermine la chose. Un ballet ambulatoire est un ballet mobile, nn ballet marcimnt, dansé en plein air, aux sons d'une musique vigoureuse. Caatil-Blazc noua a donné d'un ballet de ce genrci exécuté à Lisbonne, une description qui n'est pas sans intérêt : Les Portugais ont inventé le ballet ambulatoire. On donne ce nom à ira sriectacle de marcliea, de danses, de machines, eséeuté euccessivemeot sur la mer, le rivage, lea promenades, les places pu- bliques. C'est une imitation de la pompe fyrrlit- nienne, décrite par Appiaa Alexandrin. La cano- nisation du cardinal Charles Borromée fut célébrée a Lisbonne par un ballet de ce genre. u richement orné, flottant eoua des oies de d e ses coule rs d s cordages de tioio, des pavillons magnifiques, portait l'image du saint, sous nu dais de brocart d'or. Il se présente dans la rade ; tous les vaisseaux du port , en superbe ap- pareil, s'avancent à sa rencontre, et lui rendent les booneura militaires; on le ramène en grande pompe, an bruit de toute l'artillerie des forts. Les cliSsses des patrons du Portugal , portées par les grands de l'État, et suivies de tous les corps reli- gieux, civila et militaires, reçurent le nouveau saint à son débarquement. La marcbe commença : quatre chars d'une grandeur extraordinaire étaient distribués sur la ligne imoiensc de la procession. Le premier représentait le palais de la Benonimée, le Bfcond la ville de Milan, le troisième le Portu- 90 BALLON (avoir du). — BARAQUE, gai, et le dernier l'Église. Autour de ces machines roulantes, des troupes de mimes et de danseurs exécutaient , au son des instrumens , les actions les plus remarquables du saint, et ceux qui étaient sur le char de la Renommée marquaient par leurs at- titudes qu'ils allaient prendre la volée , pour les ap- prendre à l'univers. Cette pompe passa du port dans la ville , sous plusieurs arcs de triomphe. Les rues étaient décorées de belles tapisseries, et jon- chées de fleurs. Sur des théâtres et des échafauds dressés sur les places publiques, on voyait une foule d'acteurs dont les danses vives s'unissaient à la symphonie la plus brillante , pour exprimer l'al- légresse publique. On étala des richesses immenses dans cette fête, et l'image du saint fut ornée de pierreries qui valaient plus d'un million. Les grandes fêtes nationales de la Révolution française, dans lesquelles la Convention sem- blait vouloir renouveler les spectacles majes- tueux de l'ancienne Grèce, ont donné dans certains de leurs divertissements l'idée du ballet ambulatoire. Dans ce nombre il faut tout par- ticulièrement citer la superbe « Fête à l'Être suprême )>, qui fut célébrée le 20 prairial an II et dont le progi-amme avait été tracé, dans le langage emphatique de l'époque, par le fameux peintre David. BALLON (AVOIR DU). — On dit d'un danseur qu'il a du ballon lorsqu'il a la faculté de s'enlever de terre avec légèreté à une gi'ande hauteur, a Observez le lallon, dit Blasis ; rien ne peut être plus délicieux que de vous voir bondir avec une élasticité gracieuse dans vos pas, touchant à peine la terre, et semblant à chaque instant sur le point de voler dans l'air. » BANDE SUR LE THEATRE. — On donne ce nom aux orchestres militaires ou aux fanfares qui paraissent sur le théâtre, dans certains opéras, et viennent mêler leui*s sono- rités mâles et puissantes à celles des grandes masses chorales et instrumentales employées déjà sur la scène et dans l'orchestre. On en trouve des exemples dans la Reine de Cliypre, Robert Bruce, les Hu{juenot8, T Africaine et bien d'autres ou^Tages. BANDES D'AIR. — Partie de la décoration scénique. Les bandes d'air sont des frises qui , dans les décors ouverts, simulent l'air en effet et arrêtent le regard du spectateur, qui , sans cela, se perdrait dans le vide du cintre. (Voy. Fhises.) BANDES DE MER. — Bandes de toile peinte, simulant des vagues et montées sur châssis , qui traversent la scène dans toute sa largeur, et présentent l'idée du rivage de la mer loraque le décor l'exige. Dans un décor important, ce procédé un peu primitif est aujourd'hui abandonné. La mer est alors représentée par une toile peinte vaste et très lâche, recouvrant la scène, et sous la- quelle on fait comir et s'agiter de petits en- fants ; ces enfants impriment ainsi à la toile un mouvement capricieux et continu, qui pro- duit l'illusion des vagues. BAXQULSTE. — C'est la qualification qu'on applique à c^îrtains directeurs de tluîâtres de province qui font (c de la banque » , c'est-à- dire une réclame effrénée et grossière qui les fait plus ressembler à un chef de saltimbanques qu'à un entreprencm* sérieux et à un artiste. BARAQL'E. — La baraque est le théâtre des l)ateleurs et des saltimbanques qui courent les foires, théâtre en Injis, naturellement, et construit de telle façon qu'il puisse se démon- ter pièce à pièce et se transporter facilement d'un endroit à un autre lorsque, la vendange étant faite d'un côté, il faut aller récolter ail- leurs. Il y a des baraques de tout genre, de grandes et de petites, de luxueuses et de minables, de belles et de laides ; il y a des bara- ques de chiens savants, de marionnettes, de pantomimes, de phénomènes, de prestidigita- teur , etc. Mais on doit remarquer (jue les ba- raques elles-mêmes se sont mises au ton de la civilisation moderne ; ceitaines d'entre elles ont aujourd'hui un luxe de construction, de décors, d'éclairage, (^ui leur enlève cette mine bon en- fant, ce caractère de naïveté qu'elles avaient naguère , et qui leur donne un aspect préten- tieux peu en rapport avec le spectacle qu'elles produisent. C'est d'ailleurs, tout naturellement, le public qui fait les frais de cette inutile somp- tuosité, et la baraque, la classique baraque à BARRIÈRES. — BASSE. deux sous, tend de jour en jour à dieparaîtrc devant la baraque à soixante-quinze centimes. BARRIÈRES. — On place chaque jour, à la porte de chatiue théâtre, des espèces de clayonnagea en bols destinés à contenir la foule qui vient faire queue, et auxquels on donne le nom de barrières. Ces larrières, dont la ki^nr permet seulement à deux personnes de s'y tenir 91 de front, assurent le bon fonctionnement du service à l'heure de l'ouverture des bureaux, en ce sens que chacun passe naturellement k son tour, et que nul ne peut matériellement entrer au théâtre avant celui derrière lequel il est placé. BAKYTON. — C'est Li voix d'homme qui, dans le chant, tient le milieu entre la voix de basse et celle de ténor, participant à la fois de l'nne et de l'autre. Elle a donné son nom à l'un des emplois les plus importants du genre lyri- que, soit dans l'opéra, soit dans l'opéra-comi- que. Font partie de cet emploi les rôles de don Juan dans Don Juan, d'Hamlet dans Hamlet, de Nevers dans Us Huguenots, d'Hidraot dans Armide, de Nelusko dans V Africaine, de Guil- laume dans Quillaume Tell, et d'autre part ceux du sénéchal dans Jean de Paris, d'Hoël dans le Pardon de Phërmel, de Sganarelle dans U Médecin malgré lui, de Pierre dans VÉfoUe du I^iyrd, de Joconde dans Joconde, etc. , etc. Les Italiens emploient le même terme que noua (bariUmo) pour caractériser cette voix et l'em- ploi auquel elle correspond. BASSE. — C'est la voix d'homme la plus grave. Elle donne son nom à deux emplois du répertoire lyrique, ceux de première basse, qu'on appelle auKBJ basse chantante, et de seconde basse, que l'on qualifie aussi de basse BASSIX. - BA8S0 GANTANTE. comique. Dans le premier de cfis deux eraptoÏB, ou dJstiugue encore certains rôlee dits de basia profonde parce qu'ils ont été écrits pour des voix exceptionnellement graves, comme l'était, par exemple , celle de Levasseur. Dans le Bar- bier de Séville, Basile est une première basse et Bartholo nne seconde basse. Dans l'emploi de première basse doivent être compris les rôles de Berti-am dans Eoberl le Diable, de Baltbazar dans la Favorite, dn cardinal dans la Juive, de Marcel dans les Huguenote, de Leporello dans Don Juan, d'OIifonr dans le Dieu et la Butilrun i-«u ïgc Ulnnt Bat/adère, de don Bclflor (laus !e Toréador, de Falstaff dans le Songe ^vne niiii d'été, etc. Dans le rcijcrtoire de l'()]iéra- Coi nique, on désignait autrefois sous le nom de basses- tablier certains rôles de basse contifine parmi les(|nols finirent surtout ceux qui furent crises juir Solié, tels qu'Érasîstrate dans SIrafonice, \v seifîueur dans la Fausse Paysanne et Dali- Ixjnr daiLs Eiiphrosine et Coradin. BASSIX. — Autrefois, dans les thè'itres de pruviuce, lorsfjue arrivait le jour d'une ropré sentation aubéuéfieed'un acteur, le bénéficiaire faisait placer au contrôle un bassin d'ai^ent destiné à recevoir les présents que pouvaient lui faire les amateurs de son talent. Il n'était pas rare, en effet, de voir certaius spectateurs, qui estimaient la personne ou qui bonoraient l'artiste, ne point se contenter de payer leur place au bureau, et placer dans le bassin soit un cadeau eu aident, soit un bijou, soit un autre objet quelconque. Cette coutume, avan- tageuse pour quelqnes-una , mais, il faut l'a- vouer, peu compatible avec le sentiment de la dignité humaine telle qne nous la comprenons aujourd'hui , a depuis lougtemps et complète- ment disparu. BASSO CANT AXTE. — C'est l'emploi qui, dans le ré|)ertoire de i'opéra itaben, répond. BATELEUR. cutnme son nom l'indique, à celni de basse chan- tante, ou première basse, dans l'opéra français. ÂBSur, dans Semiramide, Basilio, dans il Bar bière di Siviglia, suffisent à caractériser cet emploi. BATELEUR. — On désire généralement BOUS ce nom tont« nne classe de saltimbanques, faiseurs de tours, danseurs de corde, charla- tans, joueurs de farces, qui se montrent dans les foires ou sur les places publiques pour l'a- musement des badauds, qu'ils égaient et qu'ils récréent moyennant une modique rétribution. Si nous a\-ions nne distinction à Ëiire, nous dirions qu'il nous semble que le vrai bateleur est surtout celui qui se livre à des exercices du corps tels que danseur de corde, équilibriste, Le tiDubailour au clown, etc., ou celui dont l'industrie consiste à tirer parti des talents de même genre qu'il a su inculquer à. certains animaux 8a\Tint3, singes, chiens ou autres. L'histoire des bateleurs, au surplus, est loin d'être sans intérêt, car elle se rapporte ans ori- gines mêmes de notre théâtre, et c'est à ce point de \Tie que l'on peut dire qu'elle confine à l'art, auquel elle a réellement donné naissance. Les Gaulois, nos pi'rcs, ne connaissaient point le théittre, et leurs divertissements se composaient uniquement de certains jeux d'un caractère barbare, ((u'ils exécutaient entre eux, tels, par exemple, que \^ jeu du pendu (Voy. ce mot). Il n'y avait alors ni histrions, ni jon- gleurs, ni artisans Tiomades d'aucune sorte, s'en allant, comme ou le vit plus tard, de ville en ville, et faisant métier, pour gagner leur vie. U BATE de l'adresse qu'ils araienb acqnisc à certains exercices du corps. Après la conquête romaine, on vit s'élever, sur le territoire de la Gaule, des théâtres et des amphithéâtres, et les jeux s'é- tablirent de divers côtés ; mais bientôt les in- vasions des barbares et la nuit effroj^ble des premiers temps de la, monarchie franque firent disparaître tous les vestiges de ces divertisse- ments. Ce n'est qu'ensuite que l'art enfantin et grossier des bateleurs et des hLstrions prit naissance, et qu'on vit se former des troupes de gens {|ui se proposèrent d'amiiseï- le peuple par des farces qui n'étaient alors que ridicules et licencieuses , et contre la représentation des- quelles l'Église tonna en vaiu. « Ce fut éfjale- ment en \-ain, dît uu historien, que Charlema- gne renouvela contre les Irateleurs le quatre- vingt-seizième canon du concile d'Afrifiue , et que, dans son capitulaîi-e de 789, il les mît au nombre des jfDrsonnes infâmes, ausquelles il n'était permis d'intenter aucune action eu jus- tice. Les conciles de Maycnce, de Tours, de Eeims et de Chalon-sur-Saône, tenus en 813, défendirent aux évêques et à tous les ecclé- siastiques d'assister aux spectacles des lialadins (/lislriones) , soiis pleine d'être suspendus : des prt'lats, des évêques, des abbés et même des abbesses, appelaient en effet souveut auprès d'eux des bateleurs pour s'amuser de leurs fa- céties. On avait môme vu des clercs s'unir à eus pour jouer en public des obscénités (tnso- lenlias). Sous Louis le Débonnaire , des bate- leurs avaient poussé l'impudence jusqu'à se revêtir des habits des religieux et des religieuses, et à jouer les aventures iTaies ou fausses des couvents. Louis le Débonnaire défendit ces excès sous peine de bannissement. Les bateleurs furent tellement décriés, et ajoutons aussi, les désordres et les terreurs de ta société fni'ent tels aux ueuvième et dixième siècles, qu'à l'épo- que de Hugues Capet il ne paraît pas qu'ils existassent encore, ou, an moins, que leur im- portance fût aussi grande que dans les siècles précédents, !■ Ce n'est qu'au douzième siècle qu'on les vit reparaître; mais ils avaient à compter aloiB avec les troubadours , qui commençaient à créer, dans le midi de la Franco, une riche et floris- sante littérature. Bientôt tous s'unirent, et, se complétant les uns les autres, on \it les trou- badours, qui cherchaient ii donner à leurs chants, à leurs ]X)èmcs, une forme quasi drama- tlcjne, s'adjoindre les jongleurs et les baladins et les leur donner à débiter, [Wur remplacer les fai'ces improvisées et souvent immondes qui avaient coure jusqu'alore. Ménestrels, trou- Isidours, jongleurs, batcleui-s, filles de joie, se rassemblaient parfois en troupes, et visitaient les châteaux, oii les nobles, les princes, les rois même les i-étribuaient avec lai-gesse. Bien plus, 011 vit dos religieux faire une spéculation de louer des troupes de ce genre et les installer dans leurs couvents avec des tréteaux, trouvant ]>ar ce moyen l'ocaision de vendre leur vin plus cher aux curieux, quand ils ne tiraient pas des baladins une rétribution plus ou moins considérable. Enfin les églises même n'étaient pas à l'abri dw fai'ceurs et de leurs farces, et l'on y vit s'élever des ti'étoaux, sur lesquels prêtres et clercs se livraient en ])ersoiinc à mille 1 (OU ffonn cries pour divertir leurs jwirois- sieus. Ce fut au jxiiut que le concile de Béziers en 122:J, celui de Salzbourg eu 1310, crurent devoir fulminer contre de telles profanations ; leurs olijui^tions et leurs défenses restèrent toutefois sans efl^ct, et ce ne fut qu'au seizième siècle que l'autorité de l'Eglise devint assez puissante pour empêcher les bateleui's de souil- ler les lieux saints et les clercs de se joindre à eux dans leui's exercices. De tout ceci il résulte que les jongleur (Voy. ce mot) avaient remplacé les bateleurs ; car si les deux mots représentent une idée ana- logue, une nuance les st'pare pointant. Mais les Clercs de la basoche, les confréries des Sot BATI. — BÉNÉFICE. 95 et des Enfants sans souci avaient pris naissance ; notre théâtre, encore informe assurément, ten- dait néanmoins à se constituer, et les jongleurs se trouvèrent relégués au deuxième plan. A partir de cette époque, jongleui-s et bateleurs commencent à se confondre réellement, et à ye former plus qu'une seule et même catégorie de baladins. C'est à ce point qu'au quinzième siècle, les jongleurs reçurent en quelque sorte officiellement le nom de bateleurs, parce qu'ils s'exerçaient surtout à faire des tours prodigieux avec des épées ou d'autres annes, et, disait De- lamare dans son Traité de la police, publié en 1705, « ils n'en ont point d autre aujourd'hui )». En cette année 1705 était encore en vigueur un règlement de la fin du seizième siècle, par lequel il leur était défendu . Aujourd'hui, le bateleur est bien déchu de son ancienne influence et de son ancienne splendeur. BATI. — En ternies de machinerie théâtrale, on appelle hâiis les carcasses de bois, les char- pentes qui servent à établir les trucs, les chars, les gloires, les gnindes pièces d'apothéose, etc. Le bâti est en quehpie sorte le s(iuelette de cas pièces de décoration , sur lequel on dispose et l'on fixe les toiles peintes qui lui donnent sa forme, sa physionomie et son aspect décoratif. BATON DE CHEF D'ORCHESTRE. — C'est le bâton avec lequel le chef bat la mesure et en indique les mouvements à l'orchestre qu'il dirige. Beaucoup de chefs préfèrent encore au bâton trop rigide un archet, qui offre beau- coup plas de souplesse et d'élasticité. BATON DE RÉGISSEUR. — C'est un gros et lourd Mton de bois blanc, arrondi avec soin, avec lequel le régisseur chargé du service de la scène, après avoir fait faire place au théâtre, frappe, placé lui-même derrière le ri- deau, les trois coups sacramentels qui annon- cent au public que la pièce va conmiencer et qui donnent à l'orchestre le signal de l'ouver- ture ou du morceau qui précède le lever du rideau. BATTEMENT. — En termes de danse, on appelle battement le mouvement exécuté par une jambe qui est en l'air, tandis que l'autre jambe supporte le corps. On en reconnaît de trois espèces : le grand battement , le petit bat- iement et le battement sur le cou-de-pied. BATTERIE. — C'est la série des instru- ments de i)ercus8ion (jui entrent dans la com- position d'un orchestre. La batterie comprend le triangle, le tambour, la grosse ciiisse et les cymbales. Les timbales n'en font point paitie, parce que les timbales n'ont pas, comme ces instruments, une sonorité unique, et qu'elles s'accordent au ton de Torchestre. BATTEUR DE MESURE. — C'est le nom qu'on donnait jadis à l'artiste qu'on dési- gne aujourd'hui sous celui de chef d'orchestre (Voy. ce mot). « BATTRE LE JOB. — Manquer de mé- moire en scène. (Voy. Faire de la toile.) BATTU. — Nom que l'on donne à un mouvement de daiLse. BELLUAIRE. — Dompteur de bêtes fé- roces. (Voy. Dompteur.) BÉNÉFICE. — On appelle représentation à Ixinéfice, ou simplement bénéfice, un spec- tacle dont le produit , déduction faite des frais ordniaires du théîitre, est réservé, en totalité ou en partie, soit à un comédien de ce théâtre, soit à mi artiste étranger victime d'un acci- dent ou d'une grande infortune. A Paris comme en province, il n'est guère d'artiste un peu en renom qui ne spécifie dans son enga- gement qu'il jouira, à une époque approxima- tivement indiquée, d'une représentation à bé- néfice dont le produit lui sera attribué soit complètement, soit seulement pour une moitié de la recette. Pour ces représentations, on fait en sorte que le spectacle ofii^e un attrait par- ticulier, de nature à afifriandor le public, déjà 96 BENEFICE. attiré par raffection qu'il porte à un artiste dont les talents lui sont chers. Les comédiens, nombreux à Paris, et d'ailleurs toujours prêts à s'entr'aider comme à venir au secours d'un grand malheur particulier ou public, ne refu- sent jamais leur concours en semblable cir- constance, et l'on voit des artistes de cinq, six, huit théâtres différents, se réunir sur une seule scène pour donner plus d'éclat au béné- fice d'un des leurs et lui assurer ainsi un plus grand profit. Il n'y a pas beaucoup plus d'un siècle que l'usage des bénéfices s'est généralisé en France. Auparavant, le fait était exceptionnel, et ne se présentait que rarement. Je crois que le pre- mier exemple qu'on en ait remonte à 1735. En cette année, une fameuse actrice de la Comé- die-Française, M"'' Gaussin, ayant été victime d'un incendie qui avait dévoré tout ce qu'elle possédait, ses camarades donnèrent à son bé- néfice une représentation composée du Préjugé à lu mode, de la Chaussée, et de la Pupille, de Fagan. Quelques années après, en 1742, la Comédie-Italienne accorda à son tour un bénéfice à un danseur nommé Poitiers, qui, avec ses deux enfants, venait d'obtenir un grand succès à ce théâtre. L'un des faits les plus intéressants qu'on puisse signaler à ce sujet est celui-ci, (|ui a été enregistré par Tabbé de Laporte : M. Titon du Tillet ayant sçu qu'il exîstoit un descendant du gi-and Corneille , chercha à lui être utile. Comme son Age et ses infirmités ne lui per- mettoient pas de faire des démarches, il chargea quelques personnes de solliciter pour Jean- Fran- çois Corneille une représentation d'une des pièces de son oncle. On en parla à deux ou trois comédiens qui goûtèrent la proposition. Ensuite on lui dicta une lettre pour les comédiens assemblés , où il leur demandoit cette représentation. Cette lettre fut reçue avec des transports de joie, qui font beau- coup d'honneur aux comédiens. Leur délibération fut longue et tumultueuse. Chacun se disputoit l'honneur de jouer dans les pièces qu'on choisiroit. On se décida pour Rodogune et les Bourgeoises de qualité. Cette dernière comédie, en trois actes, est peut-être celle où il y a le plus d'acteurs et d'ac- trices; elle fut préférée pour cette raison. Jean- François Corneille n'avoit demandé qu^un mardi ou un jeudi pour le jour de la représentation. On lui accorda un des plus beaux jours de spectacle, le lundi. Les comédiens envoyèrent sur-le-champ im primer en gros caractères l'annonce suivante , qui , dès le jour môme , fut affichée dans les foyers et dans tout l'intérieur de leur spectacle : Le^ comédiens ordinaires du Roi y pénétrés de respect pour la mémoire du grand Corneille^ ont cru ne pouvoir en donner une preuve jtlus sensible qu'en accordant à son neveu , seul rejeton de la famille de ce grand homme j une représentation. Ils donneront lundi prochain j 10 mars 1750, à son profit, Rodo- gune , tragédie de Pierre Conieille, etc. Les comédiens firent aussi à M. Corneille une réponse très noble, très touchante et pleine de sen- timens d'admiration et de respect pour le grand Corneille. Ils invitoient son neveu à accepter pour toujours ses entrées à leur spectacle, et d'y choisir une place. Ce trait de générosité des comédiens produisit une sensation très vive dans le public. Ils firent plus : non seulement ils renoncèrent aux honoraires qui leur reviennent toutes les fois qu'ils jouent, mais ils prirent encore sur eux tous les frais de cette représentation. Beaucoup de particuliers se signa- lèrent dans cette occasion. Les uns , pour une place de G livres, en donnoient 24 ; les autres, 48; ceux- ci, 72; ceux-là, 96. Une femme de qualité, qui a caché son nom, envova dix louis à la boëte sans 7 « faire prendre un seul billet. Plusieui*s personnes qui ont des loges à Tannée , les payèrent ce jour-là au- dessus de leur prix, et les abandonnèrent. Les danseuses mêmes de la Comédie, qui ont une loge aux troisièmes, après avoir payé leurs places, les laissèrent aussi pour le public. L'affluence des spec- tateurs fut excessive. La salle eût été remplie, quand elle auroit été dix fois plus grande. On ren- voya plus de 80 carrosses , et dès trois heures il n'y avoit i)lus de billets. Cette représentation valut cinq mille francs au neveu du grand Corneille. Le 0 octobre 1754, la Comédie -Italienne donnait au I)énéfice de trois de ses artistes les plus aimés, M'"''Favart, Rochard et de Hesse, une représentation qui produisait 6,000 livres, chiffre inconnu jusqu'alors. L'année suivante, ils firent de même en faveur de Carlin, leur Arlequin, altiste chéri de tout Paris, qui avait été victime d'un accident. En 1750 encore, ils renouvelèrent ce procédé pour un autre de leurs camarades, Balletti : « Le 23 février, dit d'Ori- ■\ BERGERIE. — BIBLIOGRAPHIE THÉÂTRALE. 97 gny, les comédiens représentèrent h Seri-anle maîtresse au profit de M, Bailettî, qui eut quel- que tems auparavant la cuisae cassée d'une balle dans la pièce de Camille magicienne, où il faiaoit Lélio, un des soldats destinés à forcer k tour ayant pris par mégarde le fusil de la Bentinelle du théâtre, qui étoit sortie pour un besoin. On jugea par le produit de la recette combien le public avoit été touché de cet acci- dent. » En 17fi5, les Comédiens- Italiens don- nèrent un nouveau bénéfice, cette fois pour Philidor, l'eicellent compositeur auquel ils devaient de si nombreux succès. Enfin je signa- lerai encore, en ayant de nouveau recours à d'Origny, la représentation qu'ils donnèrent, le '12 fé\Tier 1783, au bénéfice des pauvres de Paris, cruellement éprouvés par les riguenrs d'un hiver excessif : — c Les comédiens, tou- chés de voir une multitude de malheureux manquer d'ouvrage et de pain, arrêtèrent, le 13 février, que le 21 du même mois ils donne- roient au profit des pauvres une représentation du Droit du Seigneur et de Biaise et Babel : elle attira un concours prodigieux de specta- teurs. A quatre heures il n'y avoit plus de bil- lets, et toutes les places étoient retenues ou occupées. La recette fut de U,1C2 livres; elle auroit été plus considérable si la salle avoit pu contenir lit foule qui s'est présentée pour con- courir au bénéfice de la représentation. » Aujourd'hui, les Ifénéficea ne sont plus choses accidentelles. Ils sont passés djins les mœuis théâtrales, et le public se montre toujours très friand des spectacles, d'ailleurs fort alléchants d'ordinaire, qu'on lui offre à cette occasion, BERGERIE. — Au seizième et au dix-sep- tième siècle, on a donné cette qualification à quelques pièces de théâtre du genre des pasto- rales. (Voy. ce mot.) On connaît une bergerie de Guersana, jouée à Poitiers en 15S3; une autre, de Courtin, reprësentée l'année sui- vante ; et deux encore de Bemier de la Brousse, dont l'une en vcra et en prose, et la seconde toute en quatrains. BESTIAIRES.— Les bestiaires formaient, DICnOHIfAIBI DC TBi&TBI. à Rome, une classe de gladiateurs tout à fait distincte des autres, cD qui avaient pour spé- cialité de combattre les bétes féi-ocea dans le cirque. Bien que ce métier fût loin d'être sans danger, les l»estiaîres, paraît-il, étaient considé- rés avec une sorte de mépris par les gladiateurs qui combattaient entre eux, et dont la condi- tion semblait beaucoup plus relevée à leurs yeiLX. BEUGLANT. — Ou désigne ainsi , à Paris , certains cafés-concerts de bas étage, situés dans les quartiers excentriques, et dans lesquels on « beugle B plutôt qu'on ne chante, BIBLIOGRAPHIE THÉÂTRALE. — La bibliographie théâtrale est très vaste, tn^s éten- due, et comprend un grand nombre de divi- 98 BIBLIOTHÉCAIRE. — BIBLIOTHÈQUE DU CONSERVATOIRE. sions, dont quelques-unes d'une extrême impor- tance : histoire de l'art théâtral chez les anciens et chez les modernes ; histoire littéraire du théâ- tre ; poétique et dramaturgie ; philosophie de l'art ; écrits pour ou contre le théâtre ; annales et chroniques ; architectm'e spéciale ; histoire de la musique dramatique, de la danse, de la pantomime; monographie des théâtres de di- vers pays ; historique du décor, du costume, de la mise en scène ; recherches sur Téclairage, soit en ce qui concerne la salle, soit en ce qui con- cerne la scène; législation et jurisprudence théâtrales ; relations des grandes fêtes populai- res ; courses ; équitation ; questions de propriété artistique et littéraire; droits des auteurs; taxes et impositions ; administration théâtrale ; question des privilèges et des subventions; censure administrative ; histoire des conserva- toires; querelles littéraires et musicales; bio- graphie des auteurs, compositeurs, comédiens, chantem'S, danseurs ; critique : journaux et an- nuaires de théâtre et de musique ; recherches sur les marionnettes , les acrobates , les saltim- banques ; histoire des grands jeux publics dans l'antiquité; bals, concerts, spectacles forains, p^Totechnie, etc., etc. ; on voit que la matière est abondante, et que celui (jui veut s'instruire dans une branche quelcun(|ue de Fart théâtral n'a que TembaiTas du choix. D'ailleurs, il n'est pas de pays peut-être où Ton ait autant écrit qu'en France sur ce sujet, parce (ju'il n'en est pas où l'on aime davantage, où Ton comprenne mieux le théâtre et où l'on se passionne plus pour lui. Il n'existe pourtant pas chez nous un ma- nuel de bibliographie théâtrale, et le seul moyen qu'on puisse se proposer pour acquérir les con- naissances nécessaires en une telle matière est de consulter les catalogues des grandes bibliothè- ques particulières qui ont été mises en vente. Parmi ces catalogues, ceux de Pont de Vesle, du duc de la Vallière , de Delaleu pour le dix- huitième siècle ; de Lemazurier, du baron Tay- br, de M. J. de Filippi, de M. de Soleinne pour le siècle présent, sont assurément les plus précieux ; mais celui de M. de Soleinne surtout est incomparable, et rien qu'en consultant le catalogue de cette bibliothèque théâtrale mer- veilleuse, qui n'a jamais eu sa pareille et qui vaudrait aujourd'hui plusieurs millions, on peut acquérir tout ce qu'il est nécessaire de savoir en matière de bibliographie théâtrale jusqu'à l'époque de sa pubHcation (1843). BIBLIOTHÉCAIRE. — Chaque théâtre possède, pour son usage personnel, une réunion de pièces de théâtre, imprimées ou manuscrites, qui constituent son répertoire propre. Cette réunion d'ouvrages dramatiques forme sa bi- bliothèque, dont la garde est généralement con- fiée au souffleur ou à l'un des régisseurs, qui fait ainsi fonctions de bibliothécaire. BIBLIOTHÈQUE DU CONSERVA- TOIRE. — Par sa spéciahté et par les riches- ses qu'elle renferme, la bibliothèque du Con- servatoire de musique de Paris offre un intérêt particulier et ]niissant. Elle est la première en son genre qui ait été créée en Eurojxî , et elle occui)c incontestablement le j)remier rang parmi celles du même genre qui existent au- jourd'hui à Vienne, à Bruxelles, à Londres, à ^lilan, à Bologne et à Florence. Son origine remonte à la fondation même du Conservatoire, institué par une loi de la Convention nationale du 10 thermidor an III (4 août 170.")), la- (juelle s'exprimait ainsi à ce sujet : — a Une bibliothèque est fondée dans le Conservatoire. Elle se compose d'une collection complète des partitions et ouvrages relatifs à la musique et d'une collection d'instrmuents antiques ou étrangers et de ceux à nos usages qui peuvent, par leur perfection, servir de modèles. » On voit que, dans la pensée du législateur, la biblio- thèque devait comprendre un musée instru- mental ; ce n'est qu'au bout de trois quaits de siècle que l'existence de ce musée, décrétée dès le premier jour, devint une réalité ; il en est d'ailleurs aujourd'hui, complètement indépen- dant. Quant à la bibliothèque proprement dite, elle tarda moins à naître, fort heureusement, bien qu'elle ne jouît pas, dans les commence- ments, d'une installation spéciale. On ne trou- vait point de local pour elle dans les bâtiments des Menus-Plaisirs, aménagés selon les besoins de l'école nouvelle et dont celle-ci occupe encore aujourd'hui une partie, à l'angle des rues Ber- gère et du Faubourg-Poissonnière. Il fallut cependant un jour songer à la loger, et le ^ BIBLIOTHÈQUE DU CONSERVATOIRE. 09 .16 thermidoran IX (4 août 1801), sixième an- 1 la première pierre de la bibliothèque, sur la- niversaive de la fondation du Conseiratoire, le quelle il iit aceller une plaque de bronze qui por- ininistrederintérieui'vintsolenncllementposeï I tait l'insci-iption suivante : Le JG thermidor il du CoiiMTïïtoire St m an IX de la Hépiiblique française, deuxième année du conmïat de Bonaparte, le citoyen Chaplal, ministre de Cintérieur, a posé la pre- mière pierre de la Bibliotlièqm naliotiale de musique, dont V établissement a été ordonné par lu loi du 16 tturmidor an III, La bibliothè- que était située aloi-g au second étage des bâti- ments qui donnent sur le Faubom^-Poisson- 100 BIBLIOTHEQUE DU CONSERVATOIRE. nière; elle a changé de place depuis une quinzaine d'années, efc se trouve aujourd'hui dans ceux de la rue du Conservatoire, au-dessus du musée instrumental et à deux pas de la salle des concours et concerts. (c La bibliothèque du Conservatoire, dit Lassabathie dans botl Histoire du Canservatoire, a été formée avec les ouvrages provenant du séquestre révolutionnaire : elle se composait d'abord en grande partie d'ou\Tages du siècle dernier. La collection de la chapelle de Versail- les y réunit plus tard un certain nombre d'ou- vrages du temps de Louis XIV. On fit ensuite l'acquisition d'un fonds assez considérable du copiste de l'ancien Théâtre-Italien, qui con- tenait une belle collection de la moyenne école italienne, époque un peu postérieure à Cinia- rosa et Paisiello, et qui rcnfennait des œu\Tes de Xicolini, Gencrali, Mayer, etc. L'adjonction d'une collection de chants patriotiques, l'achat d'un très grand nombre de partitions sous TEmpire et le dépôt légal avaient contribué à l'augmenter (1). A l'époque de la Restauration, on fit l'acquisition de la collection Elcr, sept volumes manuscrits, composés des (ouvres des maîtres célèbres des xv!*" et xvii'' siècles mises en partition, et d'environ soixante volumes provenant de la bibliothèque d'Andrien (dit Adrien, chanteur de l'Opém), et renfermant des omTages manuscrits ou gravés d'Azopardi, Bach, Clari, Carissimi, Durante, Handel, Jo- meUi, Marcello, Cimarosa, etc. i) Ce que Lassabathie n'indique pas, c'est le fonds extrêmement précieux provenant des anciens Menus-Plaisirs du Roi, et qui est Tune des richesses de la bibhothèque, aussi bien au point de vue de la valeur des œuvres que de la splendeur des exemplaires. Il y a là toute une série de partitions d'orchestre, de motets, de messes, d'airs à une ou plusieurs parties, du xvii*" et du xviii" siècle, des opéras, des ballets, des cantates, etc., le tout recouvert de riches reliures armoriées, admirables de travail et de conservation. Cette série absolument belle est unique en son genre, et n'a sa pareille dans aucun autre dépôt public ; c'est un véritable (1) Ceci est une erreur. Jusqu'à l'année 1834, le dé- pôt légal n'a pas fourni un seul ouvrage à la bibliothèque. trésor, qu'on a la chance, assez rare, de ren- contrer là justement où il doit être. Neuf bibliothécaires se sont succédé au Con- servatoire, depuis l'organisation de la biblio- thèque : Frédéric Eler, Langlé, l'abbé Roze, Peme, Fétis, Bottée de Toulmon, Berlioz, Félicien David et M. Weckerlin, actuellement en fonctions. Bottée de Toulmon et M. Wecker- lin surtout ont rendu des services signalés au dépôt confié à leurs soins. Ce dernier a aug- menté dans des proportions considérables la série si importante des partitions d'orchestre et celle des ou^Tages de littérature musicale ; il a créé une collection fort intéressante de portraits sjDéciaux : compositeurs, théoriciens, virtuoses chanteurs ou instinimentistes, luthiers, etc., ainsi qu'une collection d'autographes précieux; enfin c'est à lui que la bibliothèque doit de posséder aujourd'hui un catalogue complet sur cartes, succédant à l'informe catalogue en feuilles qui , seul , existait naguère. Eu 1878 , la l)ibliothèque du Conservatoire renfermait 15,000 partitions, T) à 6,000 dou- bles; environ 500 traités d'harmonie, de con- trepoint et de fugue ; 840 méthodes pour divers instruments ; une immense quantité de traités de solfège , de chant et de plain-chant ; enfin, 80,000 morceaux détachés , tant pour le chant (jue pour le piano ou divei-s autres instruments. Voilà pour la musique proprement dite. D'autre part, la bibliothèque contient 3,000 volumes de littérature musicale, avec de nombreux dou- bles ; une série de 4,000 brochures et opuscules sur l'acoustique, la musique d'église , la biogra- phie, le théâtre, la danse, etc., reliés en vo- lumes ; 4,535 li\Tets ou pièces de l'Opéra, du Théâtre-Français, des théâtres de la Foire, de l'ancienne Comédie-Italienne et de l'ancien Opéra-Comique ; enfin une collection très pré- cieuse et peut-être unique en son genre de journaux de musique français et étrangers. On peut admirer, dans les élégantes vitrines placées au milieu et tout le long de la grande salle, une réunion incomparable de partitions de provenances diverses, en exemplaires ma- gnifiques splendidement reliés aux armes de Louis XIV, Louis XV, Louis XVI, des prin- ces et princesses du sang, de M™*" de îilain- tenon, du grand Coudé, du duc d'Orléans, de BIBLIOTHÈQUE DE L'OPÉRA. 101 la comtesse du Barry et de la plupart des grandes maisons de France ; la série provenant de Marie- Antoinette et marquée à ses armes est particulièrement admirable. On ne saurait énumérer toutes les richesses qui composent ce précieux dépôt. Il suffit de , dire qu'il ofifre toutes les facilités désirables aux travailleurs qui s'occupent de la musique et du théâtre. Car la bibliothèque du Conserva- toire n'est pas ouverte seulement aux élèves de l'établissement , mais accessible à tout visiteur. En dehors des dimanches et fêtes, elle est pu- blique tous les jours, de dix heures à quatre heures. Ses vacances, qui sont celles de l'École même dont elle dépend, durent deux mois, du l*^*" août au premier lundi d'octobre. BIBLIOTHÈQUE DE L'OPÉRA. — Le théâtre de l'Opéra possède une belle et nom- breuse bibliothèque d'ouyrdges relatifs au théâ- tre et à la musique , bibliothèque qui est due aux soins de son excellent archiviste actuel, M. Charles Nuitter. Ce précieux dépôt de li- \Tes, manuscrits, estampes, portraits, etc., avait été , lors de l'inauguration de la nouvelle salle de l'Opém, installé d'une façon assez dé- fectueuse et qui en rendait l'accès impossible au public , sous les combles mêmes de l'édifice. Il était indispensable pourtant d'ou\Tir au pubhc une mine si riche de renseignements et de documents de toutes sortes, et de li\Ter à tous les travailleurs : écrivains, musiciens, dé- corateurs, costumiers, toutes les merveilles qu'elle contient. Grâce aux efforts et à la per- sévérance de M. Xuitter, ce vœu a pu être réalisé, et la bibliothèque de l'Opéra, luxueuse- ment et admirablement installée aujourd'hui dans les vastes salles réservées originairement au chef de l'État et qui sont contenues dans l'aile droite du monument, du côté de la rue Scribe, est ouverte au public, depuis le mois de mars 1882. Tout travailleur peut y être introduit sur la simple présentation d'une carte qu'il suffit, pour l'obtenir, de demander au bibliothécaire. Voici un extrait de l'arrêté du 10 décembre 1881, portant règlement des archives et de la bibliothèque de l'Opéra : Art. 1". — Les collections conservées ou for- mées au théâtre national de l'Opéra se composent : P des archives ; 2° de la bibliothèque musicale ; 3° de la bibliothèque dramatique. Art. 2. — Les archives comprennent tous les do- cuments relatifs à l'histoire et à l'administration de l'Opéra, qui font partie actuellement du dépôt où q^iiy seront réunis, ainsi que les documents re- latifs & l'hJBtDire des autres théâtres qui pourront être acqufe. A)n*?"g^lerie est réservée à l'exposition des bustes, tabletfiix,^deîislns, etc., et des maquettes de décorations. " s ^ Art. 3. — La bibliothèque miw\€ale.se compose des partitions et parties d' orchestrerez ouvrages ayant été représentés à l'Opéra depuis son diginé , ainsi que des partitions des autres ouvrages qui pourront être acquises ou données. Art. 4. — La bibliothèque dramatique est exclu- sivement composée des ouvrages , estampes , plans, etc. , relatifs à l'art théâtral et à l'histoire du théâ- tre et de la musique, ou utiles à l'étude des diffé- rentes branches de cette histoire. Art. 7. — Les archives et la bibliothèque sont ouvertes au public du 16 août au 30 juin. Elles se- ront fermées à Pâques pendant une semaine. Art. 8. — Le public y est admis tous les jours non fériés, de onze heures du matin à quatre heures du soir. A cet effet, il sera délivré une carte personnelle aux personnes qui en feront la demande au ministère. Art. 9. — Le prêt des livres ou partitions au dehors est formellement interdit. Un catalogue très complet de la bibliothè- que théâtrale a été dressé avec soin, et est mis à la disposition des travailleurs ; en voici les divisions principales : Bibliographie, Cata- logues ; — Ouvrages pour ou contre le théâtre ; — Danse, Chorégraphie, Mimique; — Criti- que dramatique et musicale ; — Théorie de la musique ; — Poétique, Dramaturgie, Histoire, Beaux-arts, Polygraphie, Art du comédien et du chanteur ; — Biographie (auteurs et com- positeurs) ; — Biographie (acteurs, chanteurs, danseurs); — Annuaires et almanachs; — Histoire générale du théâtre ; — Dictionnaires dramatiques ; — Répertoires ; — Histoire de l'Opéra ; — Histoire de la Comédie-Française ; — Enseignement; — Sociétés diverses; — Mise en scène (mobilier, costumes, machines, décorations) ; — Administration théâtrale ; — Législation ; — Propriété littéraire ; — Salles de spectacle ; — Journaux de théâtre et de 102 BIBLIOTHÈQUE DE L'OPÉRA. mus que — Piècee de théâtre — Fêtes Ce I toire des théâtres (Paris province étranger) rémonies — Histoire de la muBiqne — His j — Romans Facéties, Tableaux de i La gnuiile ulla de U B llatlièqoe de 1 OfbA. Anecdotes j — Mémoires ; — Recueils d'aira 1 Quant à la bibliothèque musicale , elle a été et de chansons, etc., etc. \ \ classée de la façon suivante : Opéras du ré- BILLET. - BILLET D'AUTEUR. 108 pertoire, de 1671 à 1882 ; — Cantates exécu- tées à rOpéra; — Musique dramatique; — Méthodes, Traités d'harmonie; — Musique religieuse et symphonique ; — Musique poli- tique (?) ; — Divers. Dès aujourd'hui, la bibliothèque de l'Opéra constitue l'un des plus précieux éléments de travail mis à la disposition des intéressés. BILLET. — On appelle billet le carton que la buraliste d'un théîitre vous déliM'e en échange de votre argent, et que le spectateur doit présenter au contrôle avant de pénétrer dans la salle. BILLET A DROIT. — Ceci est un billet qu'on pourrait appeler « à prix réduits ». Il est représenté par un coupon de papier qui spéci- fie que le porteur pourra occuper telle ou telle place moyennant une rétribution beaucoup moins élevée que celle du billet pris au bureau ; le billet indique d'une façon précise le prix qui THEATRE DU CHATELET '^ )■ ec ce i>illet il sera perçu par place 1 fr » DenAièiue , Galerie et Parlerre. J fr SO Stalles d'Orchestre et de Galerie. Jl f r » Fauleuils d'Orclicstre> de Balcon . leg^. Voar^vj, S, r Sutt^r. V»ris. LoAes de côté . 45 Billet à droit illustré, du thc>àtre du Chàtelct, 187Û. devra être perçu selon la nature des places. Certains théâtres populaires, lorsqu'ils n'ont pas un spectacle à attirer la foule ou loi-sque leur spectacle commence à s'user, font usage du billet à droit pour attirer le public par le bon marché. Ils confient des paquets de ces billets à diverses classes de commerçants : coif- feurs, restaurateurs, limonadiers, marchands de vins, etc., qui les offrent à leurs clients, et ces théâtres réalisent parfois des recettes plus fortes avec ces billets, qui offrent une réduction de 40 à 60 pour 100, qu'ils ne le feraient avec les prix ordinaires des bureaux, qui d^ailleurs restent ouverts à tout venant. Nous donnons ci-dessus la reproduction exacte d'un billet à droit. BILLET D'AUTEUR. — Ceci était na- guère une faveur accordée aux auteurs. Un rè- glement de la Comédie-Italienne, en date du 20 juillet 1781, porte : — « Les auteurs auront droit de donner des billets le jour de la repré- sentation de leurs pièces , savoir : chacun pour deux personnes à l'amphithéâtre, et deux per- sonnes aux troisièmes loges, sans distinction de grande ou de petite pièce. L'excédant du t04 ntt.t.KT IM^ PAVttrU, \)\^ HKHVtOK. TlièAlrA Nnlionnl do rOp^ra-Coniqio. F/illTl<:iIILSi)i( 1" (îALCnili :^)W '^i^*/ »»iS|»mH «U jM^lMt »!»» \Hi» il>» Irt r>M»n«» H\rtl»M^»ll»^ l»>i»w» n»l^» A d'il»* piM'^OMH»»» il n»hPll(n»» \\\\\' niMl»' ^\\ , (»vilrtn«<'»^«|M'«»n !»p|H'||»» II» ^Hft»r. H oM »'ai »l«» uu^n»», i1fin*liM»o l»*« HhMthHi» )H»»n lu» |M»n»l»' li^Qilhvi'liMMfiili' |•MnHlM^^. A ion«l«'*» »'nn«|n»'«>, A (n^o li'Hii^Mnl'^ïiod*" «iMMin'o il»' hïhlh' «'^nph' I»lll»'<«ï »|nl. »M l»ni ««i»ïniuH Iimm plnn. «liMt** Irt B»»ll»'. li'MV »l«mn»'M< \\\ |Mwft|l»ilii.^ »|i' h h»|»Im linv h\«lh* Nnn« h'|M»Mlnl»»t»H« »ni m<»««I« I» 'I»» Mll»( il»' lini^n »»n il»» Pi-n |r»'t »M» r»Mnfn'|n»in BIS. — BOBÈCHE ET GALIMAFRÉ. 105 clari nul sHl est acheté; c'est là une exigence de radministration de l'Assistance publique, qui, on le sait, prélève au profit des pauvres, un droit exorbitant d'un onzième sur la recette brute de chaque théâtre ; si cette mention n'était pas inscrite ainsi sur les billets de faveur, cette administration émettrait la prétention de pré- lever son droit même sur ces billets gratuits. BIS. — C'est le mot par lequel, au théâtre ou au concert, les spectateurs expriment leur désir de voir recommencer le morceau qui vient d'être exécuté. Autrefois le hi^ était rare, et par cela même avait une véritable saveur, étant l'indice d'un succès réel ; aujourd'hui il est de- venu banal, et un compositeur se croirait dés- honoré s'il n'obtenait pas une demi-douzaine de Ws à la première représentation d'un ou- vrage qui parfois ne va pas jusqu'à la ving- tième. Adolphe Adam le constate dans un pas- sage de ses mémoires, en parlant d'un de ses pre- miers opéras, Danihiva : — « La pièce eut un joli succès, deux morceaux furent bissés, et à cette époque ceci n'était pas à la mode comme à présent, ainsi que les rappels. C'était rare, et semblait meilleur. » On peut signaler comme un his gigantesque celui qui accueillit la première représentation à Vienne, en 1792, d'un des plus admirables ou- vrages de Cimarosa, U Matrimonio segreto. Le spectacle avait lieu devant l'empereur Léo- pold II, qui, enchanté de ce qu'il venait d'en- tendre, fit servir à souper aux chanteurs et aux musiciens, et les renvoya aussitôt après au théâtre pour lui donner incontinent une se- conde représentation de ce chef-d'œuvre, à la- quelle il ne prit pas moins de plaisir qu'à la première. On assure, à la vérité, que Louis XIV avait fait mieux encore, et qu'il eut tant de joie à entendre une comédie de Scarron, T Héri- tier ridicule, qu'il se la fit jouer trois fois de suite dans la même journée. Il est difficile que l'enthousiasme puisse aller plus loin. Les spectateurs anglais n'emploient pas le mot his pour redemander un morceau : ils se servent d'un mot français, et disent : Encore! BLANC. — Le comédien, pour que son teint ne paraisse pas blafard et livide sous l'é- clairage artificiel de la scène, est obligé de l'aviver d'une façon particulière. A cet effet, il doit s'enduire le visage d'une couche de blanc et de rouge artistement mélangés, qui rende à ses traits l'aspect naturel que leur feraient per- dre la lumière du lustre et de la rampe. Le blanc dont on se sert à cet effet est préparé d'une certaine façon , et on l'emploie soit en poudre, soit en liqueur. BOBÈCHE ET GALIMAFRÉ. — Deux célébrités en leur genre, deux types de para- distes fameux, qui naguère, pendant plus de vingt années, firent la joie du boulevard du Temple, à l'époque où le boulevard du Temple, peuplé de théâtres, de loges d'acrobates, de spectacles et de curiosités de toutes sortes, était le rendez-vous de tout le Paris frivole et désœuvré. On raconte que les deux hommes qui s'étaient affublés de ces noms singuliers avaient quitté chacun leur atelier pour embrasser la profession qui devait leur valoir une si grande popularité. L'un , Antoine Mandelot , était le fils d'un tapis- sier du faubourg Saint- Antoine; l'autre, Au- guste Guérin, était ouvrier menuisier dans le même faubourg. Tout jeunes, ils jouaient à eux deux des parades qui faisaient beaucoup rire leurs compagnons d'atelier, et c'est ce qui les amena à s'engager avec un maître acrobate du boulevard, nommé Dromale. Antoine devint Bobèche, et Guérin Galimafré. Boljèche était un garçon de taille moyenne, assez bien de sa pereonne, qui sur ses tréteaux adopta un costume composé d'une culotte jaune, de bas chinés, d'une veste rouge, d'une perruque filasse et d'un petit chapeau à cornes sur lequel était fixé un papillon. « Bobèche était un type original, a dit un chroniqueur, tenant le milieu entre Janot et Jocrisse, ces deux excellentes créations de Volanges et de Brunet. Il avait le visage assez distingué, l'air timide, mais de cette timidité narquoise qui décèle ce que l'on appelle un niais de Sologne, c'est-à-dire un gars rusé, finement bonasse et matois... Je vois encore son œil à demi fermé, son sourire caustique, sa lèvre inférieure se relevant aussitôt pour donner à sa physionomie un air candide et étonné. Il y avait un comé- 106 BOBÈCHE ET GALIMAFRÉ. dien sous cette reste ronge et sous ce chapeau gris, à cornes, surmonté d'un papillon !.., » On était alors à l'époque du premier Empire, et Bobèche, dans ses plaisanteries un peu salées, avait jusqu'à uu certain point son franc parler, la censure à ce moment ne s'occupant ^ère de ce qui ne touchait pas à la politique. Il eu profitait pour donner l'essor à sa malice, moins nMve qu'elle ne le voulait paraître, et pour mêler à ses coq-à-!'âne, à ses calem- bours les plus ahurissants, des réflexions bouFTonnes qui excitaient les gros rires de ses auditeurs. Ces plaisanteries se présentaient toujours sous forme de dialogue avec son com- père Cassandre, et elles étaient telles qu'on ne saurait les reproduire toutes. En voici pourtant un échantillon : Bobèche. — Monsieur, voua qui êtes un savant, pouvez-vouB me dire quand les médecias ae trom- pent et donnent des recettes inutiles? Cassàndrk. — Mon ami, les médecine M trom- pent quelquefois parce que les symptSmes des ma- ladies diffèrent oelon les tempéraments. Dans les fièvrea, par exemple... BonÈcnE. — Voua n'y Êtes pas, Monsieur. C'est quand ils donnent une recelte pour les maladies de cerveau des femmes que lea médct^ins se trompent; car la tête d'une femme est une tète aana cervelle. .Et encore : Bobèche. — ■ Monsieur, ai vous aviez enfermé dans lin grand itac un huissier, un tailleur, nn nsu- rjcr et un apothicaire, qui est-ce qui sortirait le premier? Cassakdbe. — J'avoue que je suis embarrassa ; car je nevoispas déraison pour que l'un sorte plus t6t que l'autre. BuDËCHE. — Je voua apprendrai ce secret, Mon- sieur, £Î vous voulez me payer une fîole de bor- Cassan'dre. — Soit. On doit tout faire pour ap- prendre ce qu'on ignore, BobSche. — Eh bien, Monsieur, le premier qui sortirait du sac, si un huissier, un tailleur, un usu- rier et uu apothicaire étaient dedans , je vous donne ma parole d'honneur que ce serait un voleur !... Bobèche devint une des célébrités de Paria, et non seulement il était chéri de sou public ordinaire, mais les plus grands salons se l'ar- rachèrent bientôt, et il n'y ai-ait pas do belle fête dans le grand monde si Bobèche n'y ve- BOIRE DU LAIT. — BOUFFES (les). naît débiter ses Bomettcs avec son compère. Quant à Galimafré, son émule et son rival, Galimafré, qui appelait la foule à l'aide d'une gigantesque crécelle, il n'était guère moins aimé que Ini. Vêtu d'un costume bas normand, coiffé d'une perruque dont les cheveux étaient coupés droit sur le front et qui ctatt couverte d'un chapeau à bombe, c'était un giund gar- çon long, maigre, efflanqué, dont les calembre- daines balourdes, qui n'étaient point pourtant sans quelque fond de raillerie, faisaient aussi le bonheur du populaire des boulevards. L'un et l'autre avaient tant de succès, surtout quand ils jouaifut ensemble, qu'ils allongeaient dé- mesurément leurs parades et que le commissaire dut s'en plaindre plus d'une fois, à cause de l'encombrement qu'elles produisaient sur le boulerard, où la circulation s'en trouvait in- terrompue. Et au milieu des amateurs habituels, des partisans ordinaires des deux pitres, on voyait souvent de fins lettrés comme Nodier, de grands comédiens comme Monvel, qui venaient les entendre et les voir avec un véritable plaisir. Lear métier de paradistes n'empêchait pas Bobèche et Galimafré d'être de bons patriotes. c En 1814, a dit un de leurs historiens, quand les tronpea alliées attaqnèrent les battes Cbau- 107 mont. Bobèche et Galimafré, postés derrière une barricade de la rue de Heaus, un fusil à la main, prouvèrent qu'à l'occasion les paillas- ses du boulevard savaient faire autre chose que des grimaces. Alors, ne voulant pas faire de parades pour les ennemis, Galimafré quitta le métier, entra comme machiniste à la Gaîté, puis à rOpéra-Comique, où, pendant trente ans, il garda le côté cour; aujourd'hui, c'est un paisible rentier de Btcnitmartre, aimé, de ses enfants, u Galimafré est nioit depuis une dou- zaine d'années. Pour Bobèche, dont la renom- mée fut immense sous la Restauration, il eut la singulière idée, un beau jour, de vouloir jouer la vraie comédie, et de se faire directeur de théâtre en province. Il n'y rinissit guère, pa- rait-il, et \'>m ne sait comment il a fini. Non seulement on a imprimé quelques-unes des parades de Bobèche et Galimafré, mais on les a rais l'un et l'auti'e à la scène, à di^^erses reprises, tcllcuicnt leurs tyi>es étaient devenus populaires, fest à ce titre qu'ils devaient oc- cuper une place dans ce Dictionnaire. BOIRI-: DU LAIT. — On dit qu'un artiste boit du lait , lorsqu'il est en scène et que son jeu excite d'une fiiçon ininterrompue les ap- plaudissements ou les rires appi-obatifs des spectateurs. BONIMENT. — C'est ainsi qu'on appelait le ]ietit discours, cent fois répété, que faisait jadis l'aboyeur à la porte des petits théâtres, pour attirer le public et lui faire l'éloge du spectacle qu'il l'engageait à venir voir. (Voy. AnOYEfR.) BOUCHE-TROU. — C'est le nom qu'on donne àcertaius rôles d'une infime importance, et qui rentrent dans la catégorie des acces- soires. On dit de l'artiste appelé à remplir ces rôles qu'il joue V« emploi des bouche-trou n. BOUFFES (LES). — C'est ainsi que na- guère, et jusqu'aux emirons de 1830, on désignait daus le monde le Théâtre -Italien, bien qu'à partir du commencement de ce siècle on y jouât concurremment le genre sérieux et le genre bouffe. Cette appellation, qui semblait exclure l'un an profit de l'autre, avait évidem- 108 BOUFFON. — BOULEVARD DU CRIME. ment deux causca -. la première, c'est que la première compagnie de chanteurs italiens qui vint se faire entendre à Paria, en 1729 , sur la scène de l'Opéra, et celle qui se produisit sur le même théâtre, en 1752, ne firent entendre que des ouvrages bouffes, tels que Baieeco e SerpiUa, la Serva padrona, il Maestro di musiea, etc.; la seconde, c'estqu'à cette époque le théâtre de la Comédie-Italienne était en plein saccès, en pleine cftlorescence, et qu'on no désignait jamais ce théâtre par son nom officiel; mais par celui-ci : les Haliens. Pour éviter la confusion, on prit donc l'habitude de dire, en parlant des chanteurs italiens de l'Opéra : les Bouffons, les Bouffes, et lorsque plus tard un théâtre italien vint s'installer définitive' ment à Paris, où il subsista régulièrement jus- qu'en 1870, on continua pendant longtemps de le désigner sous ce nom : les Bouffes. Ce n'est guère qu'à partir de 1830 que le public se décida h l'appeler de son vrai nom, et à abandonner celui que d'ailleurs les grandschan- tcnrs italiens avaient rendu si célèbre. BOUFFON. — L'histoire du bouffon de cour ne rentre pas dans le cadre de ce Dictioo- naire. Les Latins donnaient le nom de bouf- fons à certains baladins ou farcenrB qui parais- saient sur le théâtre pour y recevoir des soufSets, et qui tenaient lean joues gonflées afin que le coup fît plus de bruit et excitât da- vantage le rire des assistants. Aujourd'htii, on dit d'un comédien dont la gaieté un peu grome, nu peu chargée, est néanmoins franche et communicative, que c'est un excellent b ~ BOUFFONNERIE. — On caractérise ainsi certaines pièces empreintes d'une gaieté exces- sive et un peu grosse. En fait de bouffonneries, la Comédie- Franc aise nous offre V Avocat Pa- iMin, k Médecin malgré lui; l'Opéra-Comique, les Hemlez-roux bourgeois, Bonsoir, monaieur Panlahn ; le Palais- Royal , la Mariée du mardi gras, le Chajmau de paille tf Italie; les Bouffes- Parisiens, les Deux Aveugles, et tant d'autres, et tant d'autres! BOUI-BOUI. — C'est un terme d'ai^ théâtral jmr lequel on désignait les tout petits théâtres, lorsqu'il y avait encore à Paris des petits théâtres. Le Lazari , sur le boulevard da Temple, la petite scène du Luxembourg, vu^ Bobino, étaient des bouin-bouis. BOULEVARD DU CRIME. — C'est le sobriquet que la [xipulation parisienne avait appliqué naguère au boulevard du Temple, à l'c'jKique où les deux théâtres de l'Ambigu-Co- miqiie et de la Gaité s'y trouvaient réunis, par allusion aux mélodrames noirs qui se jouaient à ces deux théâtres et qui avaient pour h«e et pour moyens d'action tous les crimes ima- ginables : meurtres, empoisonnements, viols, adultères, incendie et le reste. Ce que les dramaturges du temps, les Hapdé, les CaignieB, les Cuvelier, les Victor Ducangc, les Guilbert de Pixérécourt, les Bouchardy et autres ont accumnlé de monstruosités et d'infamies dans leui-s conceptions sccniques est véritablement formidable. De là ce surnom de « boulevard du Crime » donné par rMllerie innocente au bou- levard du Temple, et qui lui est resté jusqu'à l'époque de sa disparition et de la destruction BOULEVARD DU TEMPLE. 109, des thé&tTee auxquels il avait jusqu'alors donné mile. BOULEVARD DU TEMPLE (Le). — Nous ne eauriona prétendre à tracer ici un his- torique complet du boulevard du Temple con- sidéré comme centre et rendez-vous des plaisirs parisiens. Pendant plus d'un siècle, ce quartier chéri de la foule a été comme une sorte de foire perpétuelle, succédant aux anciennes foires Saint-Laurent et Saint - Germain , où venaient se grouper, comme dans nu Heu d'é- lection, tous les divertissements, tous les jeux, tous les amusements qui font la joie d'une vaste capitale, aussi avide de plaisirs qu'elle se montre pleine d'âpreté au travail. Mais la mo- bilité même de cette sorte de kermesse sans fin, son renouvellement incessant, les change- ments qui s'opéraient chaque jour dans l'en- semble et dans le détail de sa physionomie si niou\'ante, si pittoresque, si vive, si animée, rendent sou histoire tout particulièrement cu- rieuse et compliquée. Les annales du boulevard du Temple, du milieu du dix-huitième au mi- lieu du dix-neuvième siècle, formeraient à elles seules un chapitre séduisant et plein d'ori- ginalité de l'histoire intime de Paris, et le su- jet est si attrayant qu'on peut s'étonner qu'au- cun écrivain jusqu'ici n'ait pris b peine de les vetriicer. Pour nous, notre ambition ne saurait aller si loin, et la place nous manquerait abso- lument pour remplir une telle tâche. Nous dcï'rons nous borner ici k quelques indicatious sommaires et générales, uniquement destinées à rappeler la physionomie si intéressante de ce qui fut pendant cent ans et plus le paradis des oisifs Parisiens et le lieu de pèleriuage de tons les étrangers. Quel lieu animé, en effet , qnel centre vivant, mouvant, grouillant, que ce boulevard du Temple, qui dut le conuucncement de sa for- tune au plus intelligent et au plus audacieux des acrobates, à Nicolet, et qui fut trapi* de mort par les conceptions fantas Torré, et les Élèves de la danse de l'Opéra, et r « Empire de Neptune », et le cabinet de figures de cire de Curtius, en passant par l' Am- bigu-Comique, le théâtre des Beaujolais, le café Turc, les Bleuettes, les Fantoccinis chinois, les Folies-Dramatiques, M""" Haqui, les Fu- nambules, pour aboutir au café de l'Épi-scié, k Mac-Mûc, au théâtre Historique et à l'Opéra- Xational. Et quelles physionomies se rappellent aussitôt à votre souvenir, en songeant à tout ce passé évanoui , physionomies diverses et bril- lantes, gloires disparues, renommées éteintes parfois , parfois pleines d'éclat encore et vivant dans l'esprit de tous : M'"^ Rose, la grande sauteuse, Turco, le singe à Nicolet, le comé- dien Audinot, M'"^ Malaga, la célèbre «: tour- neuse n. Bobèche et Galimafré, et le père Rousseau, et Gringalet, et Bambochinet, tons ces paradistes fameux ; et tous les excellents comédiens qui se sont fait un nom sur les planches de tous ces tliéâtres. M"" Adèle Du- puis, Jcnny VertF!!', Adolphe, Eugénie Sau- vage, Donal, Astruc, Person, Lucie Mabire, et Raililc, Tautiu, Stockleit, Grévin, Marty, Frénoy, Potier, Moëasard, Saint-Emcst, Fnm- cisque. Serres, Bouffé, Surville, Dubourjal Raucourt, llélinguc, Delaistre, Laferrière, Bi' gnon, Boutin, Lcliel, Chilly, Colbruu, sans compter les plus grands d'entre tous, Frédérik Lemaître, Bocage et Deburcau ! Et les chevaux de Franconi, et les acrobates de 31"* Saqui , et le grimacier du spectiicie des Associés, et les bètcs féroces de M™' veuve Nicolet, et les arlequi- BOULEVARD DU TEMPLE. 113 nades des Funambules, et les concerts du Café Turc- Quel mélnnKe, f|iie] tohu-bolui, quelles pKJ- luisi-uités, <{ucl étonimiit voisinage de gnindes et de petites choses! Et les mélodmines de Caiguiez, de Victor Dhcliu^^c, de (iuiibert de Pixérécourt, et les mimixlniiiies de Ferdinand Laloue et de Fabrice Labrousse, et lifi dntmes de Rongeniont , d'Anicet Bourgeois, d'Alexan- dre Dumas, de MM. Deunerj- et Micliel Mns- son, et les vaudevilles de Br.izier, de Stwriu, de C'iairville, des frères Cogniai-d, et les ft*rios de ilartaiuïille. et les pantomimes de Tlimphile Gautier et de M. Olianipfleury î c'est tout un côté de l'histoire intellitçente, artistique, litté- raire et JmdautUerf de Paris, dont le souvenir ae trouve confiné dans un esiNice de quelfiues mille mètres earri^. C'est vers 17G0 i|ne commenta la firande vc^uedu Ixinlevard du Teuijile, et ijue ceeoiu de Paris, jns'pralurs assez dési/rc, ooinmença à devenir un but de iironienade et un i-eiidez- vous de eurii-ux. Les deux irraiides fuires, Saint- Laurent et Saint-lleMuaiu, comuien- çaient à voir dt-cmitiv un succi-s cu de temps apri-s établir aupri-s de lui son Anibi^u-Comique, ipii n'était alors qu'un t liwitre d'enfants et de tnarionnettes, et tous deux furent bientôt entiiriêtaires di.- ménageries, paradistes ambulants et le ivr-te. En 1777, on voyait déji instalh-s à demeuR- sur le bcinlevard du Tem]ile, outre k-s deux théâtres d'AmliiLOt et de Xicolet, ipii l'un et l'aiitn; aident j'ris une grande exlens^ion, le Waux-hall de l'artiticier Torii':, le ciriuif lîoyal des fivnw Astlt-y, le rabinet d'i'lei-tri.-in! di: ('oinus, rKn]|iire d" Neptune, i-abini't de [ihysique lad'liistoip' naim-i'lle, ti' cabinet de 111 BOULEVARD DU TEMPLE. mccaiiir|UG de DnbuB, et divers autres petits Bptftacics. Enfin, dix ans plus tard, Ourtius, l'homme aux figures de cire, dont la renommcio devait être européenne, avait ouvert son musée, le spectacle des Aaaociés était fondé, le café Yon donnait des concerts très fràjuentés, et l'on voyait le cabinet géographique du « sieur » Au- bry et le (abinet de physique du « sieur » Xoel, Stars c'est à partir de l'épo^iue révolution- naire que le Iwulevard du Temple atteignit son plus haut point de splendeur et de prospériU.'. Le <|uartier s'était peu])lc, des constructions s'y cle\'aieut de tontes parts, le grand mou\e- nicut populaire se imrtait décidément de ce c6tc, et jamais fourmilière humaine ne fut semblable à celle qu'on voyait s'af^iter sur ce point de Paris de deux lieures du jour à deux heures de lu miit. Voici , à peu pK-s recons- tituc^; dans son intégralité, et avec la place exactement occuiiée par cliucun, la liste des étabiissomcnte de plaisir qui, en 17!)], Iwr- daicnt le boulevard du Temple depuis l'angle du faulwurg du Temple et l'hôtel Foulon, qui formait cet angle, jusqu'à l'endroit où ao trouve aujoui-d'hui la me d'Angouléme. TjC pR'mier théâtre, en partant du faubourg du Temple, était celui des 1 Iclassements-Comi- ([ues, qui touchait l'iiôtel Foulon, Veiuiitnt ensuite, aans interruption ; Le cabinet d'optique de Prévost; La ménagerie de M°"^ Nicolet, venre du frère de Nicolet ; Les Fantoccini chinois ; L 'Ambigu-Comique ; I^e théâtre de Sicolet Grands Danseurs du foi); Le salon de figures de cire de Curtius ; Le théâtre des Associés ; 7>e café Yon, où se donnaient des concerts ; 1^ café Goddet, où l'on faisait aussi de la miLstque ; Le thciitrc des Beaujolais ; Le café Turc; Le ciifé des Arts avec ses concerta. A tout cela se joignaient une foule de petits si>ectaclea, de bateleurs, de paradistes ambu- lants, dispersés sur la vaste étendue du boule- vard, et qui, toute la journée et toute la soirée, attiraient la foule et faisaient le bonheur des badauds, qui trouvaient cncorc là desmawhands de coco, des ]iâtissierB, des montreurs de sin- ges, dw i-hanteurs en plein vent, des faiseurs de tcau-s, des herc'ules fomins et des disuure de bonne aventure. Ou se figure aisément le brouhalm, le nniu. vement, le va-et-vient, les lionsculadw, les cx- claniiitions, les cris de juiu, d'étonnunient et d'admiration que tontcela devait occasionner. Avec l'Empire, qui rt'duisit d'une façon ri- dicule le nombre des théâti-cs et les réglementa outre mesure, le Iwulevard du Temple conserva (Miurtant non originalité. Les bateleurs de tout f;ein'e continuaient d'y avoir droit de cité, et la foule ne cessait d'aller les conteniiiler. Il en fut de même pendant les premièrcB années de la Uestauration. Souslcrè'gne de Charles X, au contraire, les parades s'éteignirent, les saltimbanques s'éloi- frnèrent, les bara(|ues disparurent, et le boule- vard du Temple devint, pendant les henres du jour, un quarticreomme un autre, aussi paisible [ju'un autre. Tont an moins reprenait-il le soir tout s■! APPBrT (iESKRAI, JIB LA PAUTIK DU BOULKVARI) ))U TKMPI.K SlTIl I-AtiUELI.B SE TRO l.«cr.~L7riQi«. ThillR-lBpCrli]. >^^ ■A iDrtS LU THÏATBX8, BI QITI FUT DÂTHUITE EN 1662. (D'aprti on dtadn eitoati en IStS.) BOULEVARDS (acteuhs des). — BOULEVARDS (théatees dbh). 115 des autres , car le epectateur qui ne trouvait plus de pince dans l'un d'eux s'eu allait paisibicment k côt*; voir s'il serait plus heureux. Ces six théâtres étaient, ensuivant le boule- vard : le cirque Olympique, les Folies- Dramati- ques, la Gaîté, les Délassements- Comiques, les Funambules et le Lazary, auxquels, en lH4tt, vint se joindre le théâtre Historique, reuiplaeé plus tiird jïar le théâtre Lyrique. Celni-ci avait été construit buf remplacuiiii;nt ihi café do l'Épi-Bcié, où pendant de lonpuea années les enfants avaient admiré Mac-Moc, le dernier saltimbanque du boulevard. Enfin, en 18G2, le second Empire, qui ne rêvait que casernes et voies stratégiques pour venir plus facilement à bout des émeutes qu'il semblait prévoir dans l'avenir, procéda à un acte de véritable vandalisme en détruisant le iMKilevard du Temi>lo, si inégal, si iiittoresque, EÎ spacieux, si niuuvementé, afin de faire place a la uouvLlle \oie qui, placée daboid sous rm\ocation du priute Eugtne, porte aujour dTiui 11. nom de boulevard Voltaire Tous les theatresdurentnaturellementdisparaitii. quel que"» unt, les plus importants Caitt cirque Olympiqui théâtre Lvrique, Folies Drami tiques furent reconstruite sur duers autres points . BRAVURA. — Autre terme italien, qui, pris artistiquement, signifie hardiesse, habileté. Les Italiens disent d'un chanteur qu'il a beau- coup de bravura lorsqu'il se joue de toutes les diflicultés, que sa virtuosité est impeccable. BREDOUILLER. — C'est un défaut grave que contractent certains acteurs, qui, en vou- lant parler trop vite, finissent par ne plus se faire entendre distinctement. BREVET. — C'est l'act M. de Nevers répliqua par cet autre sonnet, qui est aussi sur les mêmes rimes : Racine et Despréaux, l'air triste et le teint blême. Viennent demander grâce, et ne confessent rien. Il faut leur pardonner, parce qu'on est chrétien j Mais on sçait ce qu'on doit au public, à soi-même. Damon, pour rintêrêt de cette sœur qui l'aime, Doit de ces scélérats châtier le maintien ; Car il seroit blâmé de tous les gens de bien S'il ne punissoit pas leur insolence extrême. Ce fut ime furie, aux crins plus noirs que blonds, Qui leur pressa du pus de ses affreux tetous Ce sonnet qu'en secret leur cabale idolâtre. Vous en serez punis, satjriques ingrats, Non pas, en trahison, par de la mort aux rats. Mais à coups de bâton donnés en plein théâtre. On voit à quoi pouvait nieuer une cabale à cette époque. Une femme d'un esprit charmant, M'"® Deshoulières, sottement férue des préten- dus talents d'un écrivain sans valeur, se ren- dait coupable de vers exécrables qui équiva- laient à une mauvaise action ; un grand poète, Racine, éprouvait, grâce à elle, le chagrin de voir sombrer un de ses plus beaux chefs-d'œu- vre, et ce chagrin l'éloignait de la-scène pres- que pour toujours; un autre poète, Boileau, courait certains dangers en compagnie de son ami, dont on supposait qu'il avait pris la dé- fense ; et un haut personnage , plus sot encore que ceux que Molière a mis en scène, ne crai- gnait pas d'insulter et de menacer l'un et l'au- tre, pour rester vainqueur dans le débat engagé par les siens. Fort heureusement, les deux poè- tes ne coururent aucun danger réel. « M. le duc de Nevers, nous dit encore l'abbé de La- porte, se contenta des menaces contenues dans les derniers vers de son sonnet. Despréaux et Racine, qui furent, au mois d'octobre de la même année, choisis parle Roi lui-même pour écrire l'histoire de son règne, étoient assurément déjà trop bien en cour pour que personne osât en venir à des voies de fait avec eux, au risque d'encourir toute l'indignation du monarque. D'ailleurs M. le prince [de Condé] sçut pour- voir à ce que les menaces de M. le duc de Ne- vers n'eussent point de suite. Son sonnet n'eut pas plutôt paru que ce prince lui fit dire, et même en termes assez durs, qu'il vengeroit, comme faites à lui-même, les insultes qu'on s'aviseroit de faire à deux hommes d'esprit qu'il aimoit et qu'il prenoit sous sa protection. La querelle n'alla pas plus loin. » Le grand Condé ne fut pas toujours aussi heureux, en matière de cabale , qu'en cette oc- casion où sa conduite fut fort honorable. On raconte qu'un jour, au théâtre, peu de temps après la fameuse campagne où il fut obligé de lever le siège de Lérida, assistant à la représenta- tion d'une pièce dont il protégeait l'auteur et qui était outrageusement sifflée , il fit signe aux gardes de s'emparer d'un des plus enragés sif- fleurs, qu'il leur montrait du doigt. Celui-ci, qui était au parterre (à cette époque, le par- ten-e était debout), le regarda fixement et lui dit sans broncher : On ne me prend point; je m'appelle Lérida I Puis il disparut au milieu de la foule. On sait combien de cabales illustrèrent, au dix -huitième siècle, les représentations des pièces de Dorât et de Voltaire, et à quels ta- pages elles donnèrent lieu. M. Victor Fournel nous rappelle de quelle façon les choses s'or- ganisaient alors : — ce Le beau temps du café Procopo, sis juste en face de la Comédie, était 124 CAB aussi le beau temps dee cabales. C'était là que toutes lea fortea têtes Tenaient pérorer snr la pièce nouvelle, et parfois enrégimeuter des troupes pour le combat. On s'y battait pour ou contre la comédie du jour ; on y jouait par- fois ausdcsia chut« ou la réussite d'une gièce, et ce fut, dit-on, k un brelan de six que Dorât dut le triomphe de quelques-unes de ses œn- \Te3. C'était là aussi que trônait le cheTalîer de la Morlière, en attendant qu'il allât s'asseoir à son poste, au parterre de la Comédie, parmi ses séides obéissants. La Morlière fut longtemps la terreur de ce lieu, grâce auï forces dont il dis- posait. Suivant Favart, il avait à sa solde plus M" DesboollèTei, portrait peint par E. S de cent cinquante subalternes qui manœu- vraient avec un ensemble formidable, d'après ses moindres signes. Aussi était-il craint et re- cherché il la fois. La Morlière pratiquait ou- vertement le plus cynique cAflwto^c il vendait les triomphes ou les revers. Enfin l'effroi qu'il inspira devint si grand qu'on lui interdit l'en- trée du théâtre, surtout d'après lea instances de M"" Clairon, son ennemie la plus décidée. Mais ses menées furent retournées contre Ini, ihle Cliéron et gnid pu- F. vbo Scliuppcn. et sa Créole tomba en 1754, à peu près de la même manière qu'il avait fait tomber tant d'autres pièces. » A cette époque, l'Opéra ne le cédait en rien, BOUS lerapportde8caljale8,àla Comédie- Fran- çaise, et les querelles musicales du temps sont restées fameuses. Tout d'abord ce fut Bameau qui eut à pâtir du trop grand enthousiasme qu'excitait encore chez quelques-uns le sou- venir de la musique de Lully; puis, quand vinrent à l'Opéra les chanteurs bouffes italiens, le théâtre se partaf^ea en deux cam^is plus achar- nés l'un contre l'autre que ceux des Grecs et des Troyens ; et ce fut encore bien autre chose quand la rivalité de Gluck et de Picclnui eut mis aux priées les partisans et les adversaires de la musique italienne. Les cabales avaient alors pour chefs et pour soutiens Jean-Jacques Rousseau, Grîmm, le baron d'HoIljach, Suard, l'abbé Arnaud, Marmontel, l'abbé llorcllet, Cazotte et bien d'autres. Mais ceci doit former iLE. 125 dans ce Dictionnaire un chapitre à part, et je renvoie pour les détails de ces grandes batailles au mot Guerres mimcales, de même que pour la grande mêlée des classiques et des ro- mantiques, qui éclata un dcmi-siécle plus tard à la Comédie- Fmnçaise, je jiric le lect«nr de se reporter au mot Querelles littéraires. De nos jours encore, la cabale n'a pas perdu ses droits, et on l'a vue surgir en plus d'une oc- casion. Je ne parle pas de la fameuse cabale de confiseurs qui, s'il en fallait croire les Mémoi- res d'Adolphe Adam, se serait acliaru(''c contre l'un de ses plus piètres opéras, fe Fidèle Ber- ger, sous prétexte que les susdits confiseurs s'y seraient vus représentés d'une façon peu flat- teuse. Mais on sait quelle cabale s'agita à la représentation du Vautrin de Balzac, et, plus récemment encore, nous avons vu des exemples éclatante de sa puissance. Sous le second Em- pire, et la jxilitique s'en mêlant, elle fit des siennes en plus d'une rencontre. La première victime en fut George Sand, qui vit tomber tout à plat l'une de ses pièces les plus char- mantes, les Vacances de Pandolpfie, sans qu'on en voiilûtent«ndre un traître mot; M. Edmond Abont en goûta aussi, et l'on fil à l'Odéon un accueil aussi courtois à Sii Gaétanu; vint en- suite Richard Wagner, qui, pour les raisons que l'on sait, fut obligé de retirer son Tann- haiiser du répertoire de l'Opéra, après qu'on eut obstinément refusé de l'enteiidi^e i)eudaDt trois soirées consécutives ; enfin ce fut le tour de iOI. Edmond et Jules du Concourt, qui subirent, avec Henriette Maréchal, les bruyants et funestes effets de dame Cabale à la Comé- die-Française. M. Emile Augier lui-même en tàta un peu avec Us Effrontés et le Fils de Gi- hoijer; mais cette fois la fureur des cléricaux, qu'il avait contre lui, demeura plus impuis- 126 CABALE. santé qu'elle n'avait été jadis contre le Tar- iufe de Molière. Les cabales sont de divers genres. On en a vu de montées contre des comédiens, surtout lorsqu'une rivalité quelconque s'était élevée en- tre deux d'entre eux, dont chacun avait bientôt ses partisans et ses adversaires. Des cabales vio- lentes furent formées naguère à l'Oiiéra au su- jet de M"*^* Lemaure et Pélissier, à la Comé- die-Française au sujet de M"''* Clairon et Du- mesnil, de M^'" Georges et Duchesnois. En Angleterre, à ce propos, les cabales étaient fé- roces, ainsi que le prouvent les événements qui se produisirent à Londres, au théâtre de Druiy-Lane, dans la seconde moitié du dix- huitième siècle, à l'épofiue de la fameuse riva- lité qui s'était élevée entre deux grands co- médiens, Macklin et GaiTÎck. k Lors de la querelle entre Macklin et Gan'ick, dit encore M. Victor Fournel, un club qui s'iisseniblait à la taverne de Horn, dans Fleet street, épousa la cause du premier, et tous ses membres se rendirent en force au spectacle. Dès (j[ue Gar- rick parut, on ne lui laissa pas prononcer un mot; les cris : A bas! à bas! retentirent de tous côtés, et la pièce entière dut être jouée en pantomime, Garrick ayant soin de se tenir au fond du théâtre, |jOur y éviter la Pour nous, quand même le nombre des rôtisseura de cette fameuse rue ne serait pas si prodigieusement diminué, notre admiration aurait un autre objet, et si on voulait savoir absolument ce qui la fait naître, nous répondrions que c'est la partie des boule- vards où l'on voit rassemblés tant de jolis specta- cles, et où l'on entend dans des cafés superbe- ment illuminés le soir une musique instrumen- tale et vocale souvent plus que passable. Il n'y a que Paris qui, dans un petit espace, offre plusieurs divertissements variés, dont un seul ferait les délices d'une ville de province du se- cond ordre. L'objet de notre enthousiasme ne peut avoir de rival que lorsque les brillans cafés pu Palais-Royal auront aussi de la musique , ou que lors(iu'une élégante rotonde , au milieu du jardin, sera destinée à donner des concerts pu- blics. » Quelques années plus tard, alors que la loi sur la liberté des théâtres avait multiplié les spectacles de tout genre et que le boulevard du Temple jouissait de sa plus grande vogue, les cafés qui s'y trouvaient situés et où l'on faisait de la musique profitaient de cette vogue et étaient en pleine prospérité. Un annaliste théâ- tral en comptait quatre dans cet endroit privi- légié de Paris. Il y avait d'abord le café des Arts, (c boulevard du Mesnil-montant, entre le café Turc et la Galiote , » où l'on trouvait trois chanteurs, trois chanteuses, et un minuscule orchestre composé de cinq musiciens. <ï Ce café, disait l'écrivain, est un des plus Ixîaux et des plus vastes du lx)ulevard; il forme l'équerre en deux belles salles d'égale grandeur : la société y est très mélangée (1). » Il y avait encore le café National, « petit et nouvellement établi; on y fume, on y boit, on y danse tout à la fois; l'orchestre a de la précision ; on n'y chante pas. j> Après celui-ci venait le café Ton , « boulevard du Temple, entre les Associés et le café God- det. 3) Ce dernier était et resta pendant long- temps une des célébrités du boulevard. Non seulement on y chantait, mais on y jouait la comédie. Notre annaliste nous donne à son su- jet des renseignements précis, eu nous faisant d'abord connaître son i^rsonnel : ACTKURS. Messieurs Déduit (chansonnier national), premier chanteur et acteur, connu par une infinité de chansons rela- tives aux événements nationaux ; Rayer, Marlier, Landelle, Jean, Blin. Mesdames J ul lien , Lebrun , Benoît, Eugénie, Babet, Firon, Camille. {Nota.) — Tous ces sujets chantent et jouent Topera. Ils ne sont pas sans mérite. Orcuestrk. Messieurs Lacombe, premier violon; Schosbakt , second (1) Ahnanach général de tous les spectacles de Paris et , des provinces, pour 1791. CAFES-CONCERTS. ISl violou; la France, secoad violon; Armand, troi- sième (?) violon ; DeLaunay,alto ; Pousuarii, basée ; Camus, coDtre-basBe et serpeut; Bouvard, flutte; De Laîlre, cor; Philippe, haut-bois; Infréville, Lea étrangers qui v»>lii»: à Paris sont tout étonnèB à t poui la première fois : chaque soir, à aSIuence pro- a raris sont tout étonnes ae trouver cjiaque so la porte de ce café, en deliore, une aSIuence digieuse de spectateurs de tout état, dont les s'arrêtent là par curiosité, les autres pour leur s s'arrêtent là par , 8e ment. Le café oit du boule- vard une partie des scènes qui s'y passent. M. Yon a fait faire, an lieu d'ampbitiiéâtre pour l'orchestre, comme dans hs autres cafés chantaus , une espèce de petit théâtre avec des coulisses et un fond de décoration asseii agréable, oii l'on joue des opéras- comiques tout entiers, qui ne coûtent rien pour la vue que ce que l'on prend au café. Il y a réelle- ment quelques jolies pièces, et quelques acteurs qui ne sont pas dépourvus de talent. Quelques-uns ont joué la comédie en province avec une sorte de m , - =i,^a»«'*'«gs;.:___, K^^mmm mr Enfin, le quatrième des cafés du boulevard était le ca/é Goildel, « boukvard du Temple, attenant le spectacle des Beaujolais ». Celui-ci était, comme le précèdent, l'uu des favoris da public, et notre annaliste nous apprend que c la meilleure soeict<^ » venait ic plus volon- tiers à ce café qu'à tous les autres ». Lorsque, après l'étAblisscmcnt de l'empire, lea théâtres furent replacés sous le régime des privilèges et \"irent leur nombre ridiculement réduit, tous les |)etits spectacles disparurent, et avec eus les cafés chantants. Il en fut de même sous la Restauration, et il faut an'iver jusqu'aux dernières années du règne de Louia- Philippc pour voir reparaître ceux-ci, d'abord en très petit nombre et seulement comme éta- blissements d'été. C'est aux Champs-Elysées qu'où en vit alors s'installer deux, le café de l'Horloge et le café des Ambassadeurs, et, sui- vant les restrictions absurdes qui, bous le règne du monopole théâtral, étaient toujours jointes à l'autorisation d'ouverture d'un spectacle quel- conque, celles-ci n'étaient octroyées que sous la condition d'une véritable et odieuse humilia- tion infligée administratit'cment aux artistes composant le personnel : c'est-à-dire qu'une ou deux fois par soirée, comme si ces artistes avaient été de simples saltimbanques, on les obligeait à faire une quête autour des tables. Au bout de quelques années, sous le second 132 CAFES-CONCERTS. Empire, les cafés chantants commencèrent à se multiplier. On vit s'installer alors le cafù Moka, rue de la Lune ; le café du Cadran , à l'angle de cette rue et de h. rue Montmartre ; le Casino, an Pa- lais-Royal ; le café de France, sur le boulevard Bonne-Nouvelle ; le café du Cheval hlanc, der- rière le Château-d'Eau ; le café du Géant, bou- levard du Temple, à côté du passage Vendôme, et quelques autres encore. Quand, sous le second Empire, la destruc- tion sauvage de ce boulevard du Temple eut fait disparaître d'un coup les jwtits théâtres à bas pri.t qui s'y trouvaient placés, les cafés- concerts remplacèrent naturellement ceux-ci, et cela d'autant mieux que, par le fait, du décret de 1864 qui bientôt venait rendre la liberté il l'industrie théâtrale, ces établissements trou- vaient le moyen de devenir de véritables cafés-- spectacles, et entremêlaient leurs fades chanBons et leurs romances niaises de jietits vaudevilles et de petites opérettes (qu'ils prenaient dans l'ancien répertoire des théâtres parisiens ou qu'ils faisaient faire expressément pour eux. On vit alors, grâce à la facilité plus grande qui était laissée aux directeurs, se créer quel- ques établissements de ce genre dont l'impor- tance était considérable, et qui, après tout, ne manquaient point d'intérêt, d'autant plus qu'il leur arrivait de fournir à nos théâtres des sujets qu'ils avaient dégrossis et dont ceux-ci n'a- vaient plus qu'à faire ressortir l'originalité. De même qu'une actrice eu tous points i-e- marquable, M"" Agar, était sortie du café dn Cheval blanc, où elle chantait sous le nom de M"' Lalliet, de même qu'une cantatrice ad- mirable, M"" ilarie Sass, était sortie du café dn Géant [mur émcn-eiller le public du théâtre Lyrique et de l'Opéra, de même que MM. Mi- chot. Renard, Berthelier avaient passé par le café chantant avant de se produire à l'Opéra et k l'Opéra-Comique, on vit l'Eldorado et l'Al- cazar fournir à nos di\-ers théâtres des artistes comme M"" Thérésa, Judic, Théo, Baumaine, MM. Fugère, Fusier et bien d'autres, ce qui prouve que tout se tient en matière d'art, et qu'il n'est si petit milieu qui ne puisse fournir un contingent utile. D'ailleurs, les cafés-concerts d'aujourd'hui représentent, dans un certain ordre d'idées, des intérêts qui ne laissent pas que d'être respecta- bles, et ils font vivre tout un monde d'auteurs, de compositeurs, de chanteurs, de musiciens, d'employés et d'ouvriers de toutes sortes. Il est tels d'entre eux dont le budget annuel se solde par nn chiffre de quatre, cinq et six cent mille francs. Leur art n'est pas bien relevé, sans aucun doute ; mais peut-être le leur a-t-on reproché un peu trop durement, car, en somme, ils ré- pondent à un besoin réel depuis que, par la disparition de tous nos petits théâtres popu- laires, ils sont devenus l'unique distraction d'ime classe extrêmement nombreuse d'Iiabi- Blltet do rsYcnr do DJjau-Cui tants. 11 est juste de reconnaître, au surplus, qu'ils se sont autant que possible modifiés, éle- vés, améliorés. Plusieurs de ces étiiblissements, en tête des- quels nous pouvons particulièrement citer l'El- dorado, une des curiositésde Paris, sont devenus, comme nous le disions, de véritables caft-s-spee- tacles, dirigés avec un soin réel, avec un goiit qui parfois confine à l'art, et dans lesquels des artistes qui ne sont point sans talent jouent de nombreuses petites pièces musicales qu'accom- pagne un orchestre parfois e.\cellent. Les cafés- concerts ont aussi produit des auteurs et des compositeurs dont quelques-uns ensuite se sont fait jouer sur nos théâtres, et ils en font viwe un grand nombre qui n'auraient pas d'autre moyen de se montrer au public et qui n'ont pas laissé que de faire preuve de quelque talent et de quelque imagination. Or assure qu'il existe & Paris plus de cent cafés-concerts de tout genre et de tout i-ang. Il CAFE FLAMENCO. 133 est certain que dans ce nombre il en est d'infi- mes, situés dans des quartiers excentriques, ultra-populaires, et qui ont bien mérité le nom de heugîanfs qu'on leur applicpie d'ordi- naire. Au nombre de ceux qui se respectent, qui ont pris rang dans la hiérarchie spéciale et qui feont fréquentés par un public nombreux et fidèle, nous citerons l'Eldorado, Bataclan, TEden- Concert, l'Alcazar, la Scala, la Pépinière, le Concert-Parisien , le Dix-neuvième Siècle, puis les Folies- Rambuteau, la Gaîté-Rochechouart, etc., etc. Les cafés-concerts des Champs-Elysées jouissent toujours, comme par le passé, de la faveur du public ; mais ceux-là ne sont ouverts . que pendant la saison d'été. La vogue des cafés-concerts n'est plus d'ailleurs aujourd'hui circonscrite à Paris, et il n'est pres(iue pas une ville de nos départements qui n'en possède un ou plusieurs. CAFÉ FLA:MEXC0. — *Le café-concert, proprement dit, n'existe pas en Espagne, mais il y a le café flamenco, où Ton va entendre chanter les se(juidiUa.s et les malaguenas , voir danser le tango et le jaleo. L'Andalousie est la terre classique àn^ flamencos, comme elle est la contrée des meilleures ganadenas (trouj)es de taureaux), (^uant à l'origine de ce nom, ftucun dictionnaire castillan ne nous en ap- prend rien de précis. Flamemo, « des Flan- dres, » et voilà tout. Cependant les flamencos sont aussi ])eu flamands que possible : ils sont même tout l'opposé de cette race du nord, avec leui-s figures expressives au teint bruni par le sang noir qui circule dans leui's veines bien plus encore que par le soleil, avec leui-s yeux bistrés sans le secours du maquillage. Entrons dans la première salle venue, à Sé- ville, à ^Malaga ou à Madrid, salle basse de pla- fond, et enfumée par la sempiternelle cigarette. Desrangc^es de tables sur les côtés, d'autres sur le milieu, deux glaças contre chaque mur, voilà tout l'ameublement. Dans le fond , une estrade d'un mètre. de hauteur sur quatre ou cinq de large, formée de planches mal jointes, tient lieu de scène ; cinq femmes et trois hommes sur des escabeaux : c'est la troupe andalouse. Examinons d'abord le personnel féminin, c'est- à-dire \q% flamencas. Leurs cheveux, retenus en tresses sur le sonmiet delà tête, sont d'une cou- leur de jais qui semble ajouter encore au foncé du visage, de chaque côté duquel apparaît une petite mèche en forme de virgule : ce sont les ochavos; un peigne en écaille, d'une dimension inconnue chez nos mondaines, pénètre dans cette sorte de pelotte capillaire et, comme une épée dans son fourreau, ne laisse entrevoir que la coquille. Le poignard à la jarretière est une fiction, mais le peigne traditionnel n'en est pas une. Pour toilette, des rote jaunes, violettes, roses, quelquefois de satin. Les hommes portent un veston court tout noir, taillé sur le patron des toréadors. Autant les femmes respirent l'énergie, autant ceiuc-ci ont un air langoureux et des manières qui ne sont pas de leur sexe. Leur visage glabre est enciidré de deux énormes toufl^es de cheveux ramenés sur les tempes : ce sont les 2)an y toros, aussi indispensiibles à la toilette du fla- menco que le sont la roiiflaquefte au titi pari- sien, la moque au* 7iervi marseillais. Tous leurs gestes sont étudiés, compassés. De temps en temps, un jet de salive sort d'entre leurs dents, fortement chassé par la langue : ils crachent à la flamenco. Leur manière de verser à boire est spéciale, également celle de boire. Le flamenco s'évertue à être canaille; il y trouve, du reste, son compte : puros, cigarettes et manzamlla (petit vin blanc), rien ne lui manque. Les en- thousiastes sont là recrutés un peu partout. Deux de nos artistes ont une guitare, le troi- sième un bitcm : c'est le chef de la troupe. A son signal, une femme s'est levée ; les cordes des guitares grincent harmonieusement sous les doigts exercés. Elle entonne sur un air peu mélodieux; puis, s'animant insensiblement, elle atteint les notes les plus élevées, sur les- quelles elle appuie comme s'il y avait une série de points d'orgue. Tout .d'un coup, sans tran- sition ni pitié pour les oreilles non familiari- sées avec ces vocalises primitives, elle descend à des intonations de contralto, et tennine par des roucoulements gutturaux qu'elle prolonge outre mesure. Pendant qu'elle chante, le bâton du chef bat, en mesure, le plancher ; les autres femmes frappent en cadence dans leurs mains et l'excitent par des oléf clé! auxquels se mê- 184 CAFE-SPECTACLE. — CAXARIE. lent les bravos du public. Les couplets sont nombreux, et l'imagination de l'artiste peut encore en augmenter le nombre. On y trouve une poésie sauvage, qui, sans nul doute, re- monte à l'occupation de l'Espagne par les Mau- res ; car le rythme est le même que celui de certaines chansons qu'on entend dans les cafés indigènes, en Algérie et en Tunisie. Tout est passé en revue dans ces couplets; aussi plus d'un flamenco a payé d'une multa (amende) , souvent de la prison, ses libertés de langage. La monotonie n'est point à redouter dans ces soirées : les flamencos, outre la variété de leur répertoire lyrique, sont aussi des dan- seurs émérites. Il faut les voir se déhancher, plier en mesure sur leurs jambes et frapper du talon le plancher (jui n'en peut mais. Parfois ils dansent en chantant ; c'est alors que leur voix atteint le degré le plus élevé et que leurs contorsions sont plus lascives et plus mpides. A voir ainsi \cs flamencas, on dirait la danse des aimées. Le mouchoir, au surplus, est là pour compléter l'illusion, et quelquefois l'en- thousiasme du spectateur n'a plus de bornes. Un jeune peintre de grand avenir, M. Sargent, a exposé au Salon de 1882, sous le titre : El jaïeo, une danse de gitanes qui donne une idée du café flamenco ; et puisque nous venons d'é- crire ce nom de gitanes, nous dirons qu'en ef- fet, à notre avis, flamencos et flamencas sont de cette race. Nous avons d'ailleurs pour nous le témoignage de M. Emile Maison, qui a long- temps couru l'Espagne et fréquenté les plus curieux endroits. CAFÉ-SPECTACLE. — On appelait ainsi autrefois certains cafés dans lesquels on offrait au public divers spectacles ou divertissements composés de danses, de jeux gymnastiques, de prestidigitation, etc. Tant que les théâtres fu- rent soumis au régime de l'autorisation et du privilège, il était expressément interdit à ces établissements de représenter aucun ouvrage dramatique, si ce n'est à l'aide de marionnet- tes. Aujourd'hui, ces entraves n'existant plus, la plupart de nos cafés-concerts sont devenus des cafés-spectacles, et quelques-uns même de véritables théâtres, avec cette seule différence que Ton y boit et qu'on y fume. CAHIER DES CHARGES. — Lorsque l'É- tat accorde à un particulier la direction d'un des théâtres subventionnés par lui, il lui impose en même temps l'obligation de remplir certaines conditions artistiques qui sont énumérées et détaillées dans un cahier des charges soumis à la signature de ce directeur. Les conditions de ce cahier des charges sont relatives au nombre des ouvrages nouveaux que le théâtre doit re- présenter chaque année, à la proportion dans laquelle le matérielscénique doit être augmenté, à la nature et à l'importance du personnel à employer, aux traitements des artistes, etc., ete. Les directeurs de l'Opéra, de l'Opéra-Co- mique et de l'Odéon sont ainsi tenus de signer un cahier des charges lors de leur nomination. La Comédie-Française, régie en société et pla- cée sous le régime spécial du décret dit de Mos- cou, n'est pas dans le même cas. En province, les municipalités imposent aussi des cahiers des charges aux directeurs des théâtres auxquels elles accordent des subventions. CAMARADE. — C'est le nom que les comé- diens se donnent entre eux ; ils ne se traitent jamais de confrère, mais de camarade, et di- sent d'un des leurs : — C'est une bonne cama- rade, un mauvais camarade, pour indiquer la nature de son caractî*re et les relations qu'on peut avoir avec lui. te On suit la même car- rière, a dit un écrivain de théâtre, on joue dans les mêmes pièces, on assiste aux mêmes assemblées, on se voit dans les mêmes foyere, on est camarade enfin ; mais on n'est pas ami. » La réflexion est juste, et, pas plus au théâtre qu'ailleurs, l'amitié n'est commune. Il n'en est pas moins vrai que ce mot de camarade, ainsi employé, présente quelque chose d'aimable, de familier et de cordial qui est loin d'être sans grâce. CANARD. — On appelle ainsi le son étran- ge, indéterminé et quelque peu sauvage que produit une clarinette ou un hautbois lorsque, l'exécutant n'ayant pas assez serré J'anche avec ses lè\Tes, l'air vient à s'échapper par sa bou- che. CANARIE. — Voy. Airs a danser. CANEVAS. — CAPITAN (le). 135 CANEVAS. — C'est ainsi qu'on appelle le plan écrit d'un ouvrage dramatique, lorsqu'il est arrivé à maturité dans l'esprit de l'auteur qui l'a conçu. Le canevas donne la charpent<3 com- plète de l'ouvrage, divisé en actes et en scènes, avec tous les incidents et les situations qu'il comporte. Il n'y manque que le dialogue, et c'est, à proprement parler, comme un canevas tracé sur lequel il n'y a plus qu'à broder. Les anciens comédiens italiens du dix- septième et du commencement du dix-hui- tième siècle, qui ne jouaient presque jamais de pièces écrites et qui improvisaient toujoui*s leur dialogue devant le public, ne se servaient que de canevas. On piquait den-ière le décor le canevas de la pièce (]u'on devait représenter, afin que chaque acteur ]>ût se i*afraîchir la mé- moire au point de vue du sujet et des princi- paux incidents, et chacun improvisait en scène à son gré. C'était là ce qu'uu appelait la corn- média delV arfc, ])ar opposition à la commedia sosietmta, qui représentait la comédie écrite. (Voy. Commedia dell' arte.) CANTATE. — La cantate est une composi- tion musicale et scénique, mais non dramatique, généralement confiée à un seul pei*sonnage, auquel on adjoint des chœui*s. Autrefois, la cantate était une simple composition de cc>n- cert, généralement accompa«(néc par Torches- tre. Elle avait beaucoup de succès en France au dix-septième et au dix-huitième siècle, et plusieurs musiciens remarquables, entre autres Campra, Clairembault etMoiu-et, en ont laissé de charmantes. L'habitude que l'on prit plus tard de transporter et de faire entendre au concert des airs d'opéras fit perdre l'usage de la cantate. Le second Empire la fit renaître 80US une autre forme , Ixîaucoup moins artisti- que, en faisant composer sur commande et exécuter sur nos théâtres tous les ans, au 15 août, jour de la fête du souverain, des can- tates destinées à célébrer le bonheur dont le pays était inondé sous ce régime paternel. — Chaque année, les élèves compositeur qui con- courent pour le prix de Rome à l'Académie des Beaux-Arts mettent en musique une cantate qui est l'objet de ce concours. Celle-ci ne com- portait autrefois qu'un seul personnage; elle en comprend trois aujourd'hui , et la comjwsi- tîon doit renfermer au moins un air avec ré-, citatif , un duo et un trio, avec accompagne- ment d'orchestre. CANTATILLE. — Petite cantate, comme l'indique son nom, qui était fort en honneur au dix-huitième siècle. La cantatille était de proportions plus restreintes que la cantate, et ne comportait généralement que le clavecin comme accompagnement. On chantait l3eau- coup de cantatilles au Concert spirituel. CANTATRICE. — On donne le nom de cantatrice à une chanteuse expérimentée, bien douée par la nature, et qui joint à la l3eauté naturelle de la voix les qualités artistiques qu'elle doit à une l)onne éducation musicale et à un travail persévérant. CANTILÈNE. — On qualifie volontiers ainsi, dans la musi([ne dramatique, un fragment mélodique de peu d'étendue mais présentant un sens complet, et (jui se fait remarquer par un contour très net en même tomps que par un ca- ractère empreint de gracie et d'élégance. CANTONADE (Pakler a i.a). — C'est lorsqu'un acteur en scène parle à un person- nage invisible, qui est censé exister, mais qui est hors de la vue du spectateur. CAPITAN (Le). — Un des types les plus curieux et les plus fantasques de l'ancienne comédie italienne, et aussi de la comédie espa- gnole, où il avait pris naissance dans la pre- mière moitié du seizième siècle. Les Espagnols donnaient à ce iiersonnage burlesque le nom de Capitan Matamore {mafamoro, qui tue le More). C'était un être à part, à la fois loquace et solennel, parasite et vantard, hâbleur comme personne, bravache enragé, grand pourfendeur de montagnes, héros d'exploits inconnus à tout autre que lui, d'ailleurs aussi couard qu'il vou- lait paraître terrible, parlant fort, prétendant intimider tout le monde, mais baissant la tête et traînant l'oreille dès qu'il trouvait à qui parler. Les Italiens lui donnaient les noms les plus baroques et les plus retentissants : il Ca- 13U CAPITATION. — OARACTÈRE. pilano Spavenio (l'Épouvaute), Spfzzamonli- monfi (Ti-auche-inontagiie) , Spezzafer, Rodo- monte , Fracasse, MatamoroSf il Capitano Rino- ceronle, il Basilko, il Capilano Bellerofonle MarMiione, ilStffnor ScaTaiombardone, etc. Le Capital! italien eut deux types, dont le second lui fut fourni par le Capitan espagnol. « An Capitan ancien italien, dit Riccoboiii, a siic- céAé le Capitan esiiagiitil, qui s'habilloit selon la nation. Le Capitan espagnol petit à petit détruisit le Capit«n ancien italien. Dans le tenia du passage de Charles-Quint en Italie, ce per- sonnage fut introduit sur notre thcûti-c. T^n aoiiveautéemporta les suffrages du pulilic ; notre Capitan italien fut obligé de se taire, et le Ca- pitan espagnol resta le maître du chainij de lia- taille. Sou caractt^re étoit d'être fanfaron, mais quiit lu fin recevoit des coupa de bâton de l'Ar- lequin. » Les deux acteure qui ont représenté ce per- sonnage jt notre ancienne Coincdie-Italieniie sont Fahritio di Fornaris (1585) et Giuseppe Bianchi (164i>) ; mais on ne connaît pas le nom de l'artiste (jui le jouait an théâtre du Iklarais au dix-septième siècle, — car le Capitan avait fini iiar s'introduire sur notre scène. Je no sais si c'est Corneille qui le premier le natnruli»» en France, mais pei-sonne n'ignore le parti qu'il But tirer, dans l'Illusion comique, de ce type original et curieux, et par quels \"erB ronflants il le Élisait se peindre lui-même : Je te doQDe le choix de ti-ois ou quatre mort?. Je Tsia d'an coup de poing to briser comme un verre, Ou t'enfoncer tout vif au centre de la terre; Oa le fendre en dU parts, d un seul coup de reverg; Ou te jeter si liaut, au-deesus des éclaira, Que tu eoia dévoré des feui élémeataires. Clioisis donc promptement, et pense L tes aff.iires. Le Capitan, une fois introduit sur nos théâ- tres, sut s'y maintenir. On donna an Marais, en 1(137, une comédie en 5 actes et en vers de Maréchal, le Véritable Capitan Matamore , ou le Fanfaron, qui était une imitation du Jliles gloriosiis de Plante, et Scarron a écrit sons ce titre : les Boutades du Capitan Matamore, une petite comédie en un acte et en vers de huit syllabes sur la seule rime en ment (1). CAPITATIOX. — Au dix-liuitième siècle, et iusi|u'à la Révolution, on donnait chaque anm^ à l'Opéra un certain nombre de repré- sentations dites « de capitation », dont la re- cette était au profit des ncteure de ce théâtre. Voici comment s'e.'ipriniait sur ce sujet le Rè' (jlemenl pour l'Atadémie royale de musique du I*' avril 17112 ; — ti II y aura chaque année six représentations un Ijénéfice de tous les sujets de rOpéni, représentations conimes sous le nom de capitations, [laix-e qu'en effet leur pro- duit est partagé par tête, auprorala des ap- pointenicns. Les quatre premières capitations auront lieu dans le ciiurant de Tannée théâtrale, il la volontc de IVlniinistration qui les indi- quera dans diverses saisons : les deux dernières seront constamment placées le samedi de la troisième et de la quatrième semaine de carême. Pourcha(|ue capitation, les sujets désigneront les ouvrages qui devront être représentés, mais ils seront tenus de les choisir parini ceux qui ont été dei^nent bien un fils lilicr- tin amoureux d'une courtisane qui le trompe, un ptTe brusiiue et grondeur, un \'alet fripon, an ])iiraâite rampant ; mais ils ne piruissent pas avoir rassemblé, dans un seul homme, tous les traits qui forment un caractè're piirticulrer à une classe de la soijété. 1j Aulultiria est la seule oii l'auteur montre œ dessein d'une ma- nière évidente. Les Esiiaguols et les Italiens du quinzième et dn seizième siècle ont fait quelques pièces dont le titre annonce la pein- .turu d'un caractère, mais ils l'ont micment ap- profondi. Il ctoit l'ésen-é à Molière de recueil- lir tous les traits (|tii forment un jaloux, an avare, un hypocrite, de les faire i-essortir les uns parles autres, et d'en former un ensemble théâ- tral. Pour connoître la différence du théâtre ancien et du moderne, il suffit de comparer YAuMaria de Plaute et VAriire loi sont ceux de 'SI'"" Periielle dans le Tartufe, de Bélise des Femmes savantes, de M °" Jourdain dans Je Bourgeois gentilhomme , d'Ismène de la H'ere coquette, d'Arsinoé du ■Misanthrope, de M""' Abraham de T École des Bourgeois, de la baronne do ta Fausse Agnès, de M"" Drouin de la Mire jalouse,. àe M"'= Ar- gaute dans les Fausses Confidences, etc. M"" Beauval est la première qui, à la Comédie- Française, ait tenu cet emploi, dans les der- nières années et après la mort de Slolière. Jus- qu'alors le grand homme avait fait jouer les rôles de vieilles femmes p.ir des hommes tra- vestis, principalement par Hubert, qui était un de ses meilleurs comédiens. CARXAVAL, — Lo carnaval est un spec- tacle que les hommes se donnent à eux-mêmes, et dont ils sont tout ensemble les acteurs et les spectateurs. Il faut remonter au,\ premiers âges du monde et aux civilisations les plus reculées pour trouver les traces des déguisements et des mascarades qui caractcrieenb le camaTal, de telles folies n'étant, ai l'on peut dire, que l'exas- pération du plaisir, et la recherche du plaisir étant de tous les temps. Si les masques paraissent avoir été inconnus ttas Hébreux, on sait du moins qu'ils se dé- guisaient à certaines fêtes, et l'on en peut dire autant des Grecs et des Romains, lesquels se cachaient parfois le visage avec des feuilles , iVAL. 148 ou se barbouillaient avec de la suie on de la lie de Ain, On sait ce qu'étaient les grandes fê- tes païennes : pendant les saturnales, particu- lièrement, les déguisements avaient cours , les seniteura prenaient les habits de leurs maîtres, et aux fêtes de la 5Ière des dieux on se traves- tissait et l'on faisait mille extravagances, L'ap- parition du christianisme ne fit que suspendre un instant ces réjouissances populaires, qui e d« InCounille, plus tard reprirent de plus lœlle. Elles nous revini-ent de l'Orient, de Constantinoplc, où on les retrouve dès les premiers sii-cles de notre ère, et bientôt se i-eproduisircnt dans tout l'Oc- cident. Au moyen Sge, on voit la religion même prendre part aux mascarades, qui deviennent on quelque sorte hiératiques ; puis, au quator- zième siècle, après les objui^itîons des con- ciles et des papes, celles-ci se sécularisent. Le carnaval prend bientôt en Italie des propor- tions presque épiques, et l'on couuait la célé- brité des fêtes à la fois pompeuses et burlesques qu'il suscitait à Venise, h, Rome, à Naples et dans d'autres villes. La France ne resta pas en arrière, et, sans parler de Paris et de ses mas- carades populaires, la Flandre donne à toutes les fêtes de ce genre un éclat vraiment extraor- dinaire, et il l'autre extrémité du pays, !a Pro- vence agit dans le même sens. Mais ici même, dans la capitale, les réjouissances du cania- val, qui reproduisaient un peu les bacchanales de la Grèce ancienne, mettaient le populaire en 144 CARROUSEL. IkîIIc hnmeur et l'excitaient de toute façon un yilaisir. C'étaient de» déf^iscmentg de toute «orte, de» promenade» de ma»(^ue8, de» caval- cade» richement co»tumée», de» char» somptueux, et au»«i de» cortège» burles^jue» et ridicule», »an« compter la traditionnelle promenade du Ixjeuf gra», le» bal» masr|ué» et la trop fameux descente de la Courtille. Le samedi, le diman- che, le lundi et le mardi ^^ra» étaient les écialement consacré à la fête de» blanchi8»euse8, venait un peu plus tard offrir les dernier» vesti^^es. Aujourd'hui, cependant, tout cela commence à passer de mrxle, et si le carnaval n'est pjis encore mort, on [jcut dire que depuis tantôt vingt ans il est agonisant. On sait que le carnaval commence le jour de l'Epiphanie ou des Rois, pour prendre fin avec le mercre
  • On distinguait divers objets ou parties dans les carrousels : 1° la lice; c'est-à-dire le lieu où se donnait le carrousel, qui était entourée de gradins et d'amphithéâtres pour les spectateurs privilégiés; 2° le sujet, qui était d'ordinaire une représentation allégorique de quelque évé- nement pris dans la Fable ou dans l'histoire ; 3" la quadrille, nom qu'on donnait aux diffé- rents groupes de combattants, lesquels se distin- guaient par le caractère du costume et la di- DICTIOSEtAIBB on TSËATRE. CARTELI.O (TBATRI DI). vcrsité des couleurs {outre les chcvnlierB qui coiiii«)saieut ica T]Uadri]le8, nn grand nombre d'officiers de toutes sortes prenaient part aux carrousels, tels que le maître de champ et ses aides, les hêmuts, les pages, les ostiifiers,le8 parrains, les juges) ; 4" bi (omparse, nom par lequel on caractérisait l'entrée des quadrilles dans la ciiTrière au son des iustniiiiciits. Les 147 carrousels comprenaient d'ailleurs plusiein-s espèces de combats et de jeux : tout d'abord les combattants rompaient des lances, soit les uns contre les autres, soit contre la quiu- tanc on ligure de bois; puis ils couraient la bague ou les têtes, exereices <]ui consistaient soit à emporter avec mie lance, en courant à bride abattue, une bague suspendue à un fil, soit à enleici d h m nu. minière une tttt de carton ou ;i 1 1 fi ippei d un A irtl infiii ils f ii siiient la/(JH/c, jtu tii'î^riLieuvct |Ui (Xi^eait autant d'adrcfiso quedi. piccHifn puii[uelLs L-avaliers, tout en courant i ii i luteiTujrtion U-a uns après Ic^ ituti-es dc\ iiLUt fonnei tu semble des h.,urc< thcr ^npbi juls pu àt rc 1 10 u vela i e n t incLSaii nimen t Ces jeux bnllauts, qui avaant oecnix. la noblesse de Fi inco pendant plus d'un demi- aiicle disparurent presque complètement à j ai tir de Uioquc de I» vieillesse de Louis XIV. < iRTELLO (?£ Tiii i,i). — C'est ainsi ]U on desij,!!». en Italie les thiVitres lyriques de 1 remier ordre tmx qui ont acquis une ^raiide RiiomiiiLe et dont le ningest exce|>tioii- ikI Parmi ces tlii itns on doit ninger la Scaia us CASAQUE (GRANDE, PETITE). — CASSETTE. de Milan, le San Carlo de Xaples , la Fenice de Venise, la Pergola de Florence, le Cammiale de Bologne, le Begio de Turin , le Carlo Felice de Gênes, etc. On appelle aussi artisii di (primo) carteUo les chanteurs les plus renom- més, ceux qui exercent une grande influence et une grande autorité sur le public. CASAQUE (Grande, petite). — Voy. Livrée. CASCADE. — On ap^xîlle ainsi certaines plaisanteries d'un goût plus ou moins pur, que certains artistes ajoutent à leur rôle quand ils croient être bien sûrs et d'eux-mêmes et du public. La cascade procède soit par paroles, soit par jeux de scène, et généralement on ne s\y laisse entraîner que dans des pièces d'un genre comique. Certains comédiens sont des cascadeurs enragés, et se livrent, envers leui's camarades, à un genre particulier de cascades qui ne doivent piis être vues du spectateur. L'un, sans avoir Tair, passera la jamlxî à la duègne qui veut traverser la scène, puis la re- tiendra au moment où elle va choir majes- tueusement, tandis que Tautre, au Ixîau milieu d'une scène pathétique, lancera dans Toreille de la jeune première un lazzi inattendu qui obligera celle-ci à porter son mouchoir à ses lè\Tes ];K)ur étouffer un rire qui manquerait aljsolument de dignité et d'à-propos. CASPERL. — C'est le nom que porte un des bouffons les plus chers au public des théâ- tres jx)pulaires en Autriche. Par les traits principaux de son caractère, il semble se nip- procher tout à la fois du ^leueghino italien et êtise de ses projets. Il rè- gne en maître sur un théâtre de Vienne qui a même pris son nom, et c^ui s'ai)pelle aujour- d'hui Casperltheater. Ce type se concilia telle- ment la faveur publique, iinou ii\^\ié[& cusperle une pièce de monnaie dont la valeur était celle d'une place de parterre au théâtre du bouffon. L'autorité classique de Gottsched avait banni de la scène, à la fiu'du dix-huitième siècle, la figure comique de Hanswurst (Voy. ce nom), le Polichinelle allemand; Casperl le remplaça, et son influence devint si grande, que plusieurs littérateurs ont conseillé de se servir de son masque pour répandre dans le peuple des véri- tés utiles à son développement intellectuel et moral. On cite un certain la Roche qui, dans le rôle de Casperl, s'acquit une grande célé- brité à Vienne. j> CASSAXDRE. — C'était un des types et des personnages secondaires de Tancienne co- médie italienne. Le Cassandre tenait un peu du Pantalon, mais il était plus complètement, plus obstinément ridicule. C'était un vieillard toujours sot, toujours entêté, toujours berné partout et par tous. Avec Arlequin, Pierrot, Léandre et Colombine, il passa rapidement des planches de notre Comédie-Italienne sur celles des jxîtits théâtres de la Foire ; puis, plus tard, avec ces gais compagnons , il devint l'un des personnages obligés de nos pantomimes. Alors il était toujours le pcTe de Colombine, à qui il voulait faire épouser Léandre malgré elle, et devenait, avec celui-ci, la victime des mala- dresses de Pierrot et des machinations d'Arle- quin, qui finissait infailliblement par lui en- lever sa fille ou l'obliger à la lui donner. Cassandre eut uti moment de véritable for- tune à notre Comédie-Italienne, vers la fin du dix-huitième siècle, et devint le héros d'un certain nombre de pièces (|ui obtinrent un vif succès : Cassandre ocuJisie, parade de Piis et Ban-é (1780); Cassandre mécanicien, vaude- \ille de Goulard (1 78;^) ; Colombine et Cassandre le pleureur, parade-opéra, musique de Cham- pein ; etc. CASSETTE. — C'est, pour certains théâtres de petites villes de province, ce qu'on pourrait appeler la i)etite recette. Dans ces théâtres, lorsqu'arrivent neuf ou dix heures du soir et qu'un spectateur se présente encore, mais, vu l'heure avanccKî, se refuse à payer place entière, le contrôleur traite en quelque sorte à forfait avec lui et lui accorde l'entrée au théâtre moyennant une diminution plus ou moins con- sidérable sur le prix ordinaire de la plac€ qu'il doit occuper. L'argent ainsi reçu n'est point CASTELET. — CAVALCADE. 149 détaillé sur le bordereau de la recette ; il est mis dans la cassette percée d'une ouverture qui, fermée à clef avant l'ouverture des portes, a reçu tous les billets pris aux bureaux et dont la présence permet justement le contrôle du bordereau, et les petites sommes ainsi perçues après coup font l'objet d'une mention unique et spéciale au mot : cassette. CASTELET. — On désigne sous ce nom les i^etites baraques mobiles qui servent aux j exploits des Guignols et des Polichinelles, comme on en voit dans nos jardins publics. Ce mot nous vient des Italiens, qui donnent le nom de castelletto à la baraque des marion- nettes. CATASTASE. — C'était, selon certains commentateurs, l'une et l'avant-deruière des quatre parties qui formaient le poème dramati- que des anciens, celle qui amenait et préparait la catastrophe, c'est-à-dire le dénouement. Selon quelques autres, la catastase était comprise dans la catastrophe, et ceux-ci ne comptent alors que trois parties dans le poème dramati- que : laprotase, Tépithase et la catastrophe. En réalité, la catastase est la partie dans laquelle l'action scénique, indiquée dans la protase, nouée dans l'épithase , se continue, se soutient, se resserre, jusqu'au moment où la catastrophe vient la conclure et terminer l'œuvre du poète. CATASTROPHE. — C'est le nom que les anciens donnaient , dans la poésie dramatique, à l'événement qui amenait et formait le dé- nouement de l'œuvre représentée. La catas- trophe constituait donc la dernière partie de l'action dramatique. (Yoy. Protase, Épi- THASE, Catastase.) Voici comment Chamfort définit, caractérise et analyse la catastrophe : La catastrophe est ou simple ou compliquée , ce qui fait donner aussi à Taction l'une ou Tautre de ces dénominations. Dans la première, on ne sup- pose ni changement dans l'état des principaux per- sonnages, ni reconnaissance, ni dénouement pro- prement dit, l'intrigue qui règne n'étant qu'un simple passage dil trouble à la tranquillité. On en trouve quelques exemples dans les anciens tragi- ques; c'est la catastrophe la plus défectueuse, et les modernes ne l'ont point imitée. Dans la seconde, le principal personnage éprouve un changement de fortune, quelquefois au moyen d'une reconnaissance et quelquefois sans que le poète ait recours à cette situation. Ce changement s'appelle autrement péri- pétie, et les qualités qu'il doit avoir sont d'être probable et nécessaire. Pour être probable, il faut qu'il résulte de tous les effets précédents, qu'il naisse du fond même du sujet ou prenne sa source dans les incidents, et ne paraisse pas amené ou in- troduit à dessein, encore moins forcément... Il ne faut pas non plus que la catastrophe soit amenée par une simple réflexion, comme on en voit beaucoup dans les pièces anciennes et dans quelques moder- nes. Une des règles essentielles de la catastrophe , c'est qu'elle ne doit laisser aucun doute dans les esprits sur le sort d'un personnage qui a intéressé dans le cours de l'ouvrage. Il faut éviter également les discours superflus et les actions inutiles. Elle ne doit jamais laisser les personnages introduits dans les mêmes sentiments, mais les faire passer à des sentiments contraires , comme de l'amour à la haine, de la colère à la clémence. Quelquefois toute la catastrophe ou révolution consiste dans une reconnaissance ; tantôt elle en est une suite un peu éloignée, et tantôt l'effet le plus immédiat et le plus prochain, et c'est, dit-on, la plus belle espèce de catastrophe. Telle est celle d'Œdipe... C'est une helle catastrophe , quand on passe de la crainte à la pitié, de la rigueur au pardon, et qu'ensuite on retombe, par un accident nouveau, mais vraisem- blable , dans l'abîme dont on vient de sortir. Quel- quefois la catastrophe se passe sur la scène , aux yeux des spectateurs. Quelquefois elle est mise en récit. C'est la nature des choses, la bienséance et le goût du public qu'on doit consulter dans le choix de ces deux manières. CAVALCADE. — On sait ce que sont les cavalcades. Nous ne voulons dire un mot ici que de celles qui sont organisées dans un but de fête et de réjouissances publiques. La caval- cade burlesque du bœuf -gras, à Paris, a été longtemps célèbre, bien qu'elle commence à perdre de son ancien crédit. Dans certaines villes de province, on forme aussi parfois des cavalcades à Tépoque du caniaval, et en Italie, où celui-ci depuis quelques années semble trou- ver une recrudescence de vogue, on sait que le carnaval donne lieu dans quelques grandes villes, particulièrement à Rome, à Venise et à Xaples, à des cavalcades superbes, à des cor- 15U CAVATINE. — CENSURE THEATRALE. tèfîes «luestrcs mûlts de cliai-s de l'effet le plus somptueux. Lm Flandre française jouit d'une renoiiiniée très niéritt-e pour \i: Ixiu goût et le luxe qu'elle déploie dans les cavalcades merveil- leuses qu'elle orgauisc à l'occosiou de certaines fêtes locales et historiques; la fêto du géant Gajaut à Douai, celle des Incas à Yaleneieii- nes, d'autres du même genre ii Lille, à Cambrai et ailleuis sont justement célèbres, et cela de- puis plusieurs siècles. CATATIXE. — C'est le nom que les Ita- liens donnent à un air à voix seule brillant et développé, et qui, aujourd'liiii du moins, ne dif- fère pas ljeaucoup,ence qui concerne la forme, des autres airs i|u'ou entend dans un opéni. CENSURE THEATRALE. — La censure s'exerçait jadis sur les livres, et aucune œuvre littéraii-c ne pouvait être publiw sans avoir été " approuvée » [larun ou plusieurs e.vaminatenrs. La censure s'est exerc'ée aussi sur les juurnanx, et l'on se rappelle que sous la Restauration certaiuea feuilles libérales piiraissaicnt souveni avec une ou pitisieura colonnes en blanc, mon- trant la place que devaient oceuiier des arti- cles qui a\aient déplu à messieurs les censeure, £-tna fort chatouilleux de leui- natUR-l. La cen- sure enfin s'est exercée et s'exerce encore sur toutes les ttuvres dramatiques, et aucune d'el- les ne i»eut être repni'semœ sans avoir oljtenu un ialh/icit d'une commission in;stitnée au ministère de riutéricnr et baptisé'ç du nom de commission d'examen. Nous n'avons à [iurler ici que de la censure f/iéi'ilrale, qui s'est t<.>ujours exercée au nom et sous le couvert de la morale, mais qui, en n«- lilé, n'a jamais agi que dans le but de sauvc- gimler des int<.'rî'ts jtolitiijues 1res caractt'risés et qui, i«r la façon dimt elle ét;ut mise en jeu, jHirtait une atteinte tri'S rivlle et très grave à lii HUtIo de la presse. Nous croyons, [wur notre juirt, (jne le principe de la censure liréventive en matière de théâtre est un prin- ciiie tutélaire et jMir conséquent très défenda- ble, même dans un [xiys libn.'. Lorsqu'une œu- MX- scéuique jn^ul être déroulé-c tout i> coup CENSUÏIE THEATRALE. 153 devant une foule de quinze cents ou deux mille spectateurs, parmi lesquels peuvent se trouver des femmes, des adolescents, des enfants, la possibilité même d'une atteinte à la morale publique ne peut pas être permise, non plus que celle d'une diffamation personnelle, qui, dans de telles conditions, pourrait être désas- treuse pour celui qui en serait l'objet. Cî'est pourquoi , nous le répétons , le principe même de la censure théâtrale nous semble absolument admissible ; mais c'est à la condition qu'il ne s'exerce qu'au seul point de vue de la morale publique ou privée , et , nous le répétons aussi , c'est malheureusement le contraire qui a tou- jours été fait. Les censeurs, trop constamment préoccupés d'intérêts politiques et dynastiques, n'ont jamais songé qu'à ceux-là, et se sont peu souciés du reste. De là le mauvais renom, très mérité, que s'est toujours fait la censure. Sans vouloir remonter jusqu'aux Grecs et aux Romains, il faut aller loin pour trouver les origines de la censure dramatique , car elle a de beaucoup précédé l'établissement des théâtres réguliers, et s'est appesantie sur les premiers spectacles des rues, sur les jeux pu- blics des histrions et des jongleurs. Dès 789 , une ordonnance royale arrête les licences de langage et de mimique de ceux-ci ; plus tard, Philippe le Bel les bannit de sa cour, l'évêque Eudes de Sully cherche à réprimer leurs écarts, Charles VI n'accorde un privilège aux Confrè- res de la Passion qu'en les soumettant à la surveillance de trois de ses officiers (1402), Charles VII et Charles VIII mettent aussi des entraves aux jeux des Clercs de la Basoche, et c'est le premier de ces rois qui établit réelle- ment la censure, enfin Louis XII aiTête net les représentations des Enfants-sans-Souci, qui ne peuvent les reprendre que lorsque le plus fameux d'entre eux. Clément Marot, les eut remis en grâce auprès du souverain. Puis, lors- que les rois montrent plus de bienveillance à l'égard des spectacles, c'est le parlement qui fait des siennes et les persécute; ainsi sous François P', qui évite la censure aux représen- tations des mystères, ainsi sous Henri III, qui protège les comédiens italiens contre le parle- ment qui les veut chasser. Toutefois, ce n'est que dans la dernière pé- riode du règne de Louis XIV, en 1699, que la censure est organisée d'une façon sérieuse, réelle, efficace, et, à dater de ce jour jusqu'à la Révolution, elle fait sentir sa rude main à tous les théâtres. L'article 6 de la loi du 13-19 jan- vier 1791 sur la liberté des théâtres change la situation, en établissant que les officiers nmni- cipaux, sous la surveillance desquels sont pla- cés les directeurs, « ne pourront arrêter ni dé- fendre la représentation d'une pièce, sauf la responsabilité des auteurs et des comédiens ». Il va sans dire que le Consulat rétablit la cen- sure, qui continua de fonctionner pendant l'Empire et la Restauration. Supprimée en 1830, elle fut rétablie quelques années après, en 1835, supprimée de nouveau en 1848, et enfin réta- blie en 1852. Elle subsiste encore aujourd'hui, malgré un décret du 30 septembre 1870, signé par tous les membres du gouvernement dé la Défense nationale et portant que « la commis- sion d'examen des ouvrages dramatiques est et demeure supprimée )>. Une histoire anecdotique des méfaits et des béâmes de la censure serait assurément curieuse. Elle a été quelquefois esquissée. Nous nous bornerons à rappeler ici quelques faits caracté- ristiques. Voltaire eut souvent maille à partir avec la censure ; presque toutes ses pièces lui suscitè- rent des difficultés, et sans parler de Mahomet^ qui fut interdit après quelques représentations, diAhire et de V Enfant prodi/jue, auxquels on l'obligea de faire de nombreuses modifications, il ne put parvenir à faire jouer un opéra inti- tulé Samson^ dont Rameiiu avait écrit la mu- sique. Lui-même raconte ainsi cette histoire : — « Une comédie de Samson fut jouée long- temps en Italie. On en donna une traduction à Paris en 1717, par un nommé Romagnesi. On la représenta sur le théâtre français de la pré- tendue Comédie-Italienne, anciennement le palais des ducs de Bourgogne. Elle fut impri- mée et dédiée au duc d'Orléans, régent de France. Dans cette pièce sublime, Arlequin, valet de Samson, se battait contre un coq- d'Inde tandis que son maître emportait les portes de la ville de Gaza sur ses épaules. En 1732, on voulut représenter à l'Opéra de Paris une tragédie de Samson, mise en musique par 154 CERAUNOSCOPIOX. - CÉRÉMONIE. le célèbre Rameau ; mais on ne le peniiit pas. Il n'y avait ni Arlequin ni coq-d'Inde, la chose parut trop sérieuse. On était bien aise d'ailleurs de mortifier Rameau, qui avait de grands talens. Cependant on joua dans ce temps- là l'opéra de Jephté, tiré de l'Ancien Testa- ment, et la comédie de V Enfant prodigue, tirée du Nouveau. » C'était d'ailleurs souvent la religion, ou, pour mieux dire, la cagoterie qui était en jeu. On en aura une preuve par ce fait, qui se pro- duisit au moment où commençait le culte fa- meux de la bienheureuse Marie Alacoque. Ou jouait à l'ancien Opéra-Comique une pièce en trois actes de Fuzelier et Panard, intitulée le Malade par complaisance; im des personnages de ce vaudeville était une servante appelée Marie, qui, venant demander à son maître comment il désirait les œufs commandés par lui, eu recevait cette réponse : Marie, à lu co- qve. C'en fut assez ; dès le lendemain de la pre- mière représentation , ordre fut donné de sup- primer cette réponse malencontreuse, dont le danger évident avait échappé à la vigilance de messieurs les censeurs. — En 1757, Piron voit empêcher lu représentation à la Comédie-Fran- çaise d'une comédie en vei^, le Mauvais Fiai- safit, dans laquelle il avait tracé trois portraits resseml)lant trop a à trois pei*sonncs d'un rang distingué ». — La censure s'avisait même d'a- voir des prétentions littéraires, et elle les exer- çait sur de pui*s chefs-d'œuvre ; témoin ce qui arriva au Philosoplie sans le savoir, de 8edaine : a Cette comédie, dit un contemporain, devait être donnée à Fontainebleau [à la cour] , avant que d'être jouée à Paris. Sur la lecture, les ju- ges des pièces qui doivent être représentées à la cour ne Ven trouvei'ent pas digne. Le public n'a pas été de leur sentiment. » — Deux ans auparavant, en 1703, un scandale s'était pro- duit à propos d'une pièce de Dorât, qui n'était pourtant i)as un farouche révolutionnaire. Dans cette pièce, intitulée Théaghie et Char idée, l'auteur de la Déclamation avait tracé, évidem- ment sans penser à mal , le portrait d'un roi fainéant. Le malheur voulut que le public, toujom*s gouailleur, fît une application bruyante de ce portrait à l'aimable souverain qui occu- pait alore le trône de France, Louis XV le (( Bien -aimé ». Du coup, le censeur Marin, à qui Beamnarchais fit une si éclatapite renommée, fut envoyé à la Bastille ! La censure n'opéra pas moins de prodiges sous l'Empire et sous la Restauration qu'à cette époque émouvante et passionnée qui précéda de peu la Révolution. Mais comme alors elle agissait d'une façon très sommaire en défen- dant absolument la représentation des ouvra- ges qui lui déplaisaient, nous renvoyons pour ce sujet le lecteur au mot Interdiction (1). CERAUXOSCOPION. — Fragment de l'appareil scénique du théâtre des anciens. <( C'étoit, lit-on dans V Encyclopédie ^ ime ma- chine versiitile de la forme d'une guérite, d'où Jupiter lançoit la foudre, dans les pièces où ce spectacle étoit nécessaire. » CERCEAUX (8aut des). — Voy. Saut DES CERCEAUX. CÉRÉMONIE. — Dès le dix-huitième siècle, un usage assez singulier s'est introduit à la Comédie-Française : sous le titre de Céré- monie,, on a ajouté à certaines représentations du Boifn/eoi'S gentilhomme et du Malude ima- ginaire, surtout celles qui se donnent à l'épo- (1)11 ne faudrait pas croire, d'ailleur» , que la censure ne s'exerçât que sur les théâtres i)roprcment dits. Une circulaire du ministre de rintérieur, en date du 10 octo- bre 1821), preî'crivait aux dépositaires de l'autorité dans les départements des mesures nouvelles à l'éjjard des saltimbanques et spectacles de curiosités qui s'établis- saient dans les foires ; rien ne devait être offert aux re- gards ni débité publiquement sans une autorisation spé- ciale, et voici ce qu'un préfet écrivait à ce sujet aux maires de sou département : — a ... 11 faut que les objets proposés à la curiosité publique n'offrent rien de con- traire au respect dû à la religion, aux bonnes mœurs, à la majesté royale et aux convenances; l'ien qui puissv rappeler le souvenir de Bonaparte et donner une fausse direction à V opinion. Les autorités se feront donc rendre compte préalablement des explications, parades, chants, dont les spectacles forains, tels que marionnettes, ombres chinoises, etc., seraient accompagnés, afin d'exiger la suppression de ce qui pourrait s'y trouver de dangereux pour l'ordre, les mœurs et le gouvernement du roi. i> Le 10 octobre 1829, ce le gouvernement du roi i> n'en avait plus pour longtemps , et ce ne sont pourtant pas les saltimbanques qui Tout tué ! CHACONNE. — CHANGEMENT A VUE. 155 que du caraaval, une sorte d'épilogue muet consistant en un défilé complet de la troupe devant le public. Tous les artistes, sans en ex- cepter les plus grands, prennent donc part à la cérémonie, et défilent chacun à leur tour sous les yeux du spectateur, avec ce détail étrange que chacun d'eux poite le costume du rôle dans lequel il obtient d'ordinaire le plus de succès, quels que soient l'époque et le style de ce costume, qui souvent ne cadrent guère avec ceux de l'ouvrage représenté. On assure que les artistes de la Comédie se montrent toujours très empressés de paraître dans la cérémonie, le public ne manquant jamais de donner à cha- cun, lors de son apparition sur la scène, une marque flatteuse de sa satisfaction et de son estime. — L'Odéon, en sa qualité de second Théâtre -Fmnçais, s'est approprié aussi la cou- tume de la cérémonie, qu'il renouvelle plu- siem's fois par an. CHACONNE. — Voy. Airs a danser. CHALEUR. — La chaleur est une des plus grandes qualités du comédien digne de ce nom. 8'il est pénétré de rimportance du rôle qu'il a à remplir, du caractère (ju'il doit repré- senter, des sentiments (|u'il est appelé à pein- dre, si son cœur et son cerveau sont d'accord pour rendre l'idée du poète, il trouvera des ac- cents sincères, il puisera en lui-mêuie cette chaleur communicative grâce à laquelle il fera éprouver au public les impressions qu'il doit éprouver lui-même, il fera naître enfin l'émo- tion dans l'âme des spectateurs. Mais pour que la chaleur produise les effets qu'on en doit attendre, il faut qu'elle soit naturelle, sincère, qu'elle fasse en quelque sorte partie du tem- pérament du comédien. Dans le cas contraire, et si elle n'est que le fruit de l'étude et de la réflexion, elle deviendra facilement excessive, dépassera souvent le but et, par sc»n exagéra- tion même, perdra de son action. Un poète l'a dit : # Evitez cependant une chaleur factice, Qui séduit quelquefois et vit par artifice, Tous ces trépignements et de pieds et de mains, Convulsions de l'art, grimaces de pantins. Dans ces vains mouvements qu'on prend pour delà flamme, N'allez point sur la scène éparpiUcr votre âme. CHAMBRÉE. — Ce mot est quelquefois employé pour indiquer qu'une salle est bien garnie. CHAMBRIÈRE. — On désigne sous ce nom le long fouet dtmt se sert le directeur ou le régisseur d'un manège, placé toujours au centre de l'arène pendant les exercices éques- tres, pour exciter les chevaux, eutretenir leur ardeur et les empêcher de se ralentir. CHANGEMENT A VUE. — Changement de décoration (|ui s'effectue instantanément, à la vue du spectateur, et sans que le rideau d'a- vant-scène ait été baissé. Loi*sque le change- ment à vue consiste en une simple toile repré- sentant un fond de foret ou de village et qui, descendant du cintre à l'un des premiers plans de la scène, vient se substituer à un décor plus profond et d'une moins grande simplicité, il est absolument banal et ne produit sur le specta- teur qu'une impression presque négative ; il n'y a là, effectivement, qu'un procédé élémen- taire auquel l'art reste absolument étranger; loi'sque, plus tard, cette toile se relève pour faire place à une décoration plus vaste, plus riche, plus mouvementée, l'effet produit est naturellement plus considérable, mais l'art du machiniste n'a pas encore trouvé moyen de se donner carrière, puisque en réalité la pose du nouveau décor s'est opérée en dehors de la vue du spectateur, et qu'on a eu tout le temps né- cessaire pour y procéder. Mais c'est quand un décor très compliqué, très accidenté, d'une ar- chitecture toute particulière, vient succéder à un décor d'un genre aljsolument différent et aussi accidenté, aussi compliqué, aussi chargé de détails que celui qui le remplace, c'est alors 156 CHANSONNETTE. — CHANT. que la surprise est grande et que l'effet pro- duit est i-éellement puissant, parfois enchan- teur, et semble toucher au mer\^eilleux. On voit s'engouffrer dans les dessous fermes et châssis, aussitôt remplacés par d'autres fermes qui surgissent d'innombrables trappillons ; les portants qui supportent les châssis de coulisses disparaissent devant de nouveaux portants présentant des châssis nouveaux, le fond se transforme de même, les frises du décor qui s'é- vanouit font place aux frises du décor qui appa- raît, l'éclairage des herses est modifié selon les besoins de celui-ci, et en moins d'une demi- minute, au signal donné par un timbre reten- tissant, tout ce travail s'est accompli en pré- sence d'un public émerveillé et qui, malgré toute son attention, n'a pu se rendre compte d'une transformation scénique aussi imprévue, aussi rapide et aussi complète. C'est là l'un des plus beaux effets matériels qui puissent se pro- duire au théâtre. Il y a un changement à vue d'un autre genre, et dont l'effet est véritablement prodi- gieux. On l'obtient à l'aide d'un décor double, si l'on peut dire, entièrement composé de pla- ques ou volets de décoration peints des deux côtés et qui le font ressembler à un vaste jeu de patience. Généralement le décor, dans son état primitif, est d'une teinte sombre, pour aug- menter l'impression que produira le change- ment, qui donnera lieu au coutraire à une dé- coration pleine d'éclat et de lumière. Lorsque le moment est venu, que le signal est donné, tous les fils qui aboutissent à chacune des plaques du décor agissent à la fois, celles-ci se retour- nent simultanément avec une sorte d'étrange cliquetis produit par le choc de tous ces volets sur les châssis qui les supportent, et le change- ment est opéré. Il y a dans un changement de ce genre quelque chose de singulier, de fantas- tique, qui excite chez le spectateur une impres- sion difficile à décrire. CHANSONNETTE. — Il y a cinquante ou soixante ans on vit s'établir, dans quelques théâtres de Paris, principalement ceux des Variétés et du Palais-Royal, une mode par- ticulière. Une ou deux fois dans le cours de la soirée, pendant les entr'actes , un artiste venait se présenter seul devant le public et chantait une « chansonnette » , à laquelle on donnait , quelquefois la qualification de « scène comi- que ». C'était en effet là de petites scènes à un seul personnage, divisées en couplets, entre chacun desquels se trouvait parfois un frag- ment parlé. Cette mode dura pendant vingt ou vingt-cinq ans et valut de grands succès à quelques artistes, entre autres Levassor, Achard et M"*^ Déjazet. Quelques-unes des chansonnettes ainsi débitées obtinrent, grâce au talent de leurs interprètes, une vogue pro- digieuse : le Maître d'école, le Marchand dama- ges, les Modistes de la rue Vivienfie, le Trom- pette de MarengOy etc. C'est de cette façon que M^*° Déjazet popularisa quelques-unes des jolies chansons de Frédéric Bémt, parmi lesquelles il faut surtout citer la Lisette de Bèranger et le Marchand de chansons, CHANT. — Chose assez singulière, le carac- tère physiologique du chant, resté mystérieux jusqu'à ce jour, est encore à déterminer, et il en résulte que, de son côté, la définition techni- que du chant, considéré comme manifestation physique de l'être humain, est encore à trou- ver. Quelque étrange que cela puisse paraître, cela est ainsi , et nous en sommes encore au- jourd'hui, sous ce double rapport, où en était Jean- Jacques Rousseau il y a plus d'un siècle, lorsqu'il écrivait son Dictionnaire de musique. Ne pouvant dire autrement que lui, nous allons donc nous borner à citer ses propres paroles. Au point de \aie technique, Rousseau carac- térise ainsi le chant, et l'on peut voir à quel point sa définition est vague et incomplète : a Sorte de modification de la voix humaine, par laquelle on forme des sons variés apprécia- bles. 01>servons que pour donner à cette défi- nition toute l'universalité qu'elle doit avoir, il ne faut pas seulement entendre par sons ap- préciables ceux qu'on peut assigner par les notes de notre musique, et rendre par les tou- ches de notre clavier, mais tous ceux dont on peut trouver ou sentir l'unisson, et calculer les intervalles de quelque manière que ce soit. » Sous le rapport physiologique, le grand écri- vain n'est ni plus précis, ni plus satisfaisant : « Il est très difficile, dit-il, de déterminer CHANT DRAMATIQUE. — CHANTEUR DRAMATIQUE. 157 en quoi la voix qui forme la parole diffère de la voix qui forme le chant. Cette différence est sensible, mais on ne voit pas bien clairement en quoi elle consiste ; et quand on veut le cher- cher, on ne le trouve pas. M. Dodard a fait des observations anatomiques à la faveur des- quelles il croit, à la vérité, trouver dans les dif- férentes situations du larynx la cause de ces deux sortes de voix; mais je ne sais si ces observations, ou les conséquences qu'il en tire, sont bien certaines. Il semble ne manquer aux sons qui forment la parole que la pennanence pour former im véritable chant ; il paraît aussi que les diverses inflexions qu'on* donne à la voix en parlant forment des intervalles qui ne sont point harmoniques , (jui ne font pas par- tie de nos systèmes de musique, et qui, par conséquent, ne pouvant être exprimés en note, ne sont pas proprement du chant pour nous. » Tout ce que nous pouvons dire, c'est que le chant est l'expression musicale de la voix hu- maine, comme le son est l'expression musicale des instruments. CHANT DRAMATIQUE. — Toute espèce de chant qui est mêlé à l'action théâtmlc et qui en fait partie. CHANTEUR, CHANTEUSE. — Nom que l'on donne à tout artiste (pii prend part à l'exécution vocale d'une œuvre ou d'un frag- ment d'œuvre, soit au théâtre, soit au concert. CHANTEUR DRAMATIQUE. — Jean- Jacques Rousseau, qui a dit de si grandes sot- tises en matière musicale, mais qui avait un sentiment de l'art si subtil, si complet et si admirable, a caractérisé d'une façon merveil- leuse le rôle du chanteur di'amatique et les qua- lités que le spectateur intelligent est en droit d'exiger de lui. C'est au mot Acteur de son Dictionnaire de musique^ qu'il trace ce portrait du véritable chanteur dramatique : Acteur^ chanteur qui fait un rôle dans la repré- sentation d'un opéra. Outre toutes les qualités qui doivent lui être communes avec Tacteur dramati- que, il doit en avoir beaucoup de particulières pour réussir dans son art. Aussi il ne suffît pas qu'il ait un bel organe pour la parole , s'il ne Ta tout aussi beau pour le chant ; car il n'y a pas une telle liai- son entre la voix parlante et la voix chantante, que la beauté de Tune suppose toujours celle de l'autre. Si l'on pardonne à un acteur le défaut de quelque qualité qu'il a pu se flatter d'acquérir, on ne peut lui pardonner d'oser se destiner au théâtre , destitué des qualités naturelles qui y sont nécessaires, telles entre autres que la voix dans un chanteur. Mais par ce mot voix^ j'entends moins la force du timbre que l'étendue, la justesse et la flexibilité. Je pense qu'un théâtre dont l'objet est d'émouvoir le cœur par les chants doit être interdit à ces voix dures et bruyantes qui ne font qu'étourdir les oreilles; et que, quelque peu de voix que puisse avoir un acteur, s'il l'ajuste, touchante, facile, et suffisamment éten- due, il en a tout autant qu'il faut ; il saura toujours bien se faire entendre s'il sait se faire écouter. Avec une voix convenable , l'acteur doit l'avoir cultivée par l'art ; et quand sa voix n'en aurait pas besoin , il en aurait besoin lui-même pour saisir et rendre avec intelligence la partie musicale de ses rules. Rien n'est plus insupportable et plus dégoû- tant que de voir un héros , dans les transports des passions les plus vives, contraint et gêné dans son rule, peiner, et s'assujétir en écolier qui répète mal sa leçon, montrer, au lieu des combats de l'amour et de la vertu, ceux d'un mauvais chanteur avec la mesure et l'orchestre, et plus incertain sur le ton que sur le parti qu'il doit prendre. Il n'y a ni cha- leur ni grâce sans facilité, et l'acteur dont le rôle lui coûte ne le rendra jamais bien. Il ne suffit pas à l'acteur d'opéra d'être un ex- cellent chanteur, s'il n'est encore un excellent pan- tomime ; car il ne doit pas seulement faire sentir ce qu'il dit lui-même, mais aussi ce qu'il laisse dire à la symphonie. L'orchestre ne rend pas im senti- ment qui ne doive sortir de son Ame ; ses pas, ses regards, son geste, tout doit s'accorder sans cesse avec la musique, sans poin-tant qu'il paraisse y son- ger; il doit intéresser toujours, même en gardant le silence; et, quoique occupé d'un rôle difficile, s'il laisse un instant oublier le personnage pour s'occuper du chanteur, ce n'est qu'un musicien sur la scène ; il n'est plus acteur. Tel excella dans les autres parties, qui s'est fait siffler pour avoir né- gligé celle-ci. Il est impossible de mieux dire, et de faire ressortir avec plus de justesse les qualités qui doivent caractériser et distinguer le chanteur dramatique digne de ce nom. Ils sont rares, bien rares, les artistes qui possèdent ces qua- lités précieuses, indispensables à l'illusion 158 comme à riimotion ; maia quand il s'en trouve quelqu'un, le public Ini rend aï infailliblement justice qu'il est certain de creuser sa trace et de laisser un nom dans l'histoire de l'art. De tous ces chanteurs admirables qui joignaient à la beanté de la voix et an grand sentiment drama- tique ces cris do la passion , ces nobles élans de l'âme par lesquels ils savaient toucher, émou- voir, enflammer le cœur de leurs auditeurs, comnuiniquer à ceux-ci les fortes et généreuses CHANTEUSES (,i>remièkes). impressions dont ils étaient cns-mt'mes pi.nt très, aucun n'n été onblié, aucun n'a liiisst. h postérité indifférente à son souvenir. Quoi qu il puisse arriver, tous ceiL'i que l'histoire de 1 art intéresse se rappelleront toujours ces noms fameux enregistrés par elle : d'une part, Ch is'ic, Jélyotte, Lainez , Laïs, Adolphe Nourrit Du prez ; de l'autre, Marthe le Rochois, Françoise Journct, M"" Duranc}', Lcvasseur, Sophie Ar- nonld, II"" Scio, Branchu, Saint- Huljcrty, Malibran, Pasta, Conich'e Falcon, Schrœder- Devrient, Oiulia Grisi, etc., etc. Mais il serait injuste, à côt*> de ces artistes ai admirablement doués sous le rapport de la puissance drama- tique , de ne pas citer les noms de tous ces chan- teurs scéuiqties do deini-caractère,qui joignaient au talent du virtuose les ([«alités les plus char- mantes du véritable comédien : Rochard, Clair- val, Michu, Elleviou, Martiu, Gavaudan, ChoUet, M"" Favart, Laruette, Triai. Diiga- zon, Gavaudan, Saint-Aubin, Lemoiinier, Pradher, Damoreau... Il faut bien convenir qu'aujourd'hui nos chanteurs dramatiques, moins ambitieux que ceux d'autrefois, moin^ exigeants surtout envers eux-mÇmes, se con- tentent volontiersdes qualités purement vocales qu'ils peuvent acquérir, et se soucient médio- crement du suffrage qu'ils pourraient obtenir du public en ce qui concerne la puîssiince pathé- tique et la supériorité du jeu scénique. Sous ce rapport nous ne voyons guéreà citer, en France, f]ne deux fntinds artistes, dont assurément la renoinuK* ne pii'rira pas : d'une part, M. Faure, qui malheuiiiusemont a (juitté la carrière au plus fort de ses sticc't's ; de l'autre. M"" Krauss, qui, quoique étrangère à la France i>ar sa nais- •^intL Lst dc\t.ntic lune des stloires de nttre '1 tndt Mtni. h'riiie (.t d nt 11 nom rester i it nclii' 1 1 h '■t in, dt nttiL Optn ( HWTLISES (pRtMiïRFs) In dta pnncipiux Liuploi-. du i [«.rtoire hriqui. jui au suImIiïisc en pIusRurs lirancliea II y a non RulcniLnt le^ pitmuRi thanteusLS de sirand oi»i.ra et les premurct chintcusea dojxraco mijuc mais dans lo|Ki-a menu, on distingue dei\ s(rtts de premières flnnt(.u5ta leiithin tciiscs drimatiqui.a i|u\ni jualifie de f itcs thantenses et iu\ juclks m d une aii-.s] le n inde lalctiis» iiartc piejilu'iicursdesîo Kl dt cet Liniil 1 1 nt Ltt cu'es i>ar M '" > ilc n et les ( lianttu ta kaxies de grand opéra jui suit dis lolea de \(tdisation et de brii ure Poui les 1 remicies on i«ut citer C(rame tV]K!S cirï«ten''tiques les rôles d'\l ce de Robert U i>Hii&', de \aleiitnie des ^wp'Ht no/s deRithel de ht Jnnr, de Siîlika de l Africaine; pair les secondes, il faut mentionner ceux de Margue- rite des Hugtienols, d'Eudoxie de In Juive, d'Inès de VAfricaine. Il est encore une troi- sième catégorie de premières chanteuses de grand opéra : ro sont les conlralloi', pour les- quels nous citerons, entre autres, les rôles de CHANTEUSES (secondes). — CHARIOT (le) DE THE8PIS. 159 Lconor de la Favorite, de Fidès du Prophète, et d'Azucena dn Trouvère. Quant aux pruioiè- rcs chanteiisea d'opéra -comique, elles corupren- nent tous les rîties les plus importants au point de vue vocjil, tels que Dinorah du Pardon de Ploërmel, Vii^inic du Caïd, Carlo Bmsclii de la Pari du Diable, Ciimille de Ziimpa, Isabelle dn Pré aux Clercs, la reine du Songe d'une nuit d'été, Athénaïs des Mousquelaires de la Reine, etc., etc. CHANTEUSES (Secondes). — Les secon- des chanteuses d'opL'ra-coinii]ue ne forment pas, à proprement parler, un euiploi distinct, et comprennent seulement nu cerLdn noinlire de rôles d'un caractère un ]>eu indcteriniiiè, mais «lui ceiwndant demandent à être ttnn.'i avec lieaucoup de soin. Xous nous bornerons à citer parmi ces rôles ceux de la reine du Pré aux Clercs, de la n-încde la Pari dulJiahh, et de Milady de Fra ZHai-olo. CHARIOT. — Appareil de machinerie. Le chariot sert ii la mana;u\Te des nuits nui ser- vent de support et de soutien aux décorations latérales que le spectateur désigne sous lo nom de coulisses. C'est sur le chariot, placé dans le premier dessous, qu'est fixée la partie inférieure de chaque mât , celle qui passe par la costière , et c'est le mouvement d'avancé* ou de reculée qu'on imprime au chariot qui fait avancer le mât, et par cunst'queut le di-cor, sur la sct'ue, ou le fait rentrer dans la coulisse. Le chariot CHARCE — L 1 B pd t 1 f à SI nt I t. I très t 1 1 F ; n ] d 1 1 RT 1 ff 1 AI 1 d n 1 1 m t d 1 pe I 1 1 tf rt; t ^olontlers les cffits pour les itndre pins surs. C'est ainsi que jadis Tici^celin et Jîrunet, comé- diens excellents d'ailleura, se sijnt fait une grande ix>])nlarité. Le difficile en ce cas est de savoir s'airêter à temps, de ne pas franchir les limites du goût même dans cet ordre d'idées, et de ne pas tomter dans cette caricature gros- sière qui n'appartient plus à l'art à aucun titre. CHARGER. — Dans la mantcu^TC des dé- cors, le mot ckaryer exprime qu'il faut abais- ser, faire descendre nu objet. Si l'on veut faire descendre du cintre une toile de fond, un ri- deau de gaze, on dira : Chargez la toik, char- gez le rideau. C'est le contmire du mot Appuyer. (Voy, ce mot.) roule sur un mil de fer, juir le fait de deux ga- lets encastres dans un irntin ; on iicut donc le faire avancer, reculer, et demeurer li i^olonté à chaque point de la costière oii il se trouve en- gitgé, ce qui est indis]>;usable pour le jeu facile des dé-corations, pour la " plantation " des ar- bres ou autres objets isolés. C'est aussi un moyen rapide et si'u' j)onr les faire iiaraitre ou partir à vue. (Voir le desl^in au mot Dessous.) CHARIOT (Le) DE THESPIS. — On se sort souvent, dans la conversation, de cette lo- cution fifçumlive , « le cliariot de Thespis, » 160 CHARLATAN. sans en bien toujours saisir le sens et la poitco. Il faut se rappeler que Thespis, poète atliénieu contemporain de Solon, fut ie premier écrivain grec qui fît des pièces de théâtre, et le premier qui s'imagina du diriger des troupes de comé- diens. Selon les uns, il fut l'inventeur de la tragédie, ce qui est peut-être beaucoup dire, car il semble seulement s'être avisé d'intercaler au milieu des chœurs un récit dit par un chory- phée. Toujours est-il que, à l'époque de ces an^i int 1& place conmion cémenta obscurs du théâtre, Thespis s'en allait de ville en riile, juché sur un cha- riot en compagnie de ses acteurs, qui, le mas- que n'étant pas encore en usage , se barbouil- laient le visage de lie, et là, comme sur une sorte de théâtre ambulant, amusaient les pas- sants en leur adressant des apostrophes plaisan- tes ou satiriques. Telle est l'origine du thédtre antique, et tel était a le chariot de Thespis, » dont le souvenir s'est conservé jusqu'à nous. CHARLATAN. — Les cliarktans étaient CHARPENTE. — CHASSIS DE DÉCORATION. 161 des marchands de drogues et d'élixirs, des ar- racheurs de dents mns douleur, qui exerçaient leur métier à Paris dans les carrefours, sur les places publiques , ou en province, dans les foi- res, côte à côte avec les bateleurs et les saltim- banques. Ils s'adjoignaient volontiers des com- pères, des équilibristes , des acrobates, qui faisaient la parade à leur profit et à Taide des- quels ils attiraient autour d'eux les badauds dont ils recherchaient la clientèle. Dans un pe- tit ouvrage bouffe représenté naguère à rO[)éra, le Philtre, Scrilxî et Aul)cr ont mis en scène un chai'latan, le « docteur » Fontanarose, au- quel ils ont fait chanter un air devenu célèbre : Accourez tous, venez nC entendre.., (Voy. Opé- rateur.) CHARPENTE. — On appelle la charpente d'une pièce la façon dont elle est conduite, construite, dont les scènes sont enchaînées, dont les incidents sont présentés. La charpente d'une œuvre théAtrale, comme celle d'un édi- fice, doit donner en effet une idée à peu près nette de sa structure générale, de son aspect d'ensemble. Il est rare qu'une pièce bien char- pentée puisse être vraiment une mauvaise pièce, quand même elle serait écrite faiblement ; si l'idée première est heureuse, elle saura tou- jours exciter l'intérêt ou l'émotion. Au con- traire, fût-elle un chef-d'œuvre de style, elle ne produira qu'un effet médiocre, au point de vue du théâtre proprement dit, si la charpente en est défectueuse, si le plan est mal conçu, si les proportions ne sont pas exactement observées. CHARTRON. — Terme de mise en scène. Lorsque, en de certaines circonstances, un per- sonnel nombreux réuni sur le théâtre forme un large demi-cercle au fond de la scène, tandis que le devant de celle-ci est occupé par les per- sonnages qui parlent ou agissent, on dit qu'il fait le charfron. CHASSE. — Mouvement de danse qui est ordinairement précédé d'un coupé, ou d'un au- tre pas qui conduit à la deuxième position, d'où il se prend. Il s'exécute en allant de côté, soit à droite, soit à gauche. CHASSIS (Faux). — Appareil de machi- DICTIONNAIBB DU THÉATBE. nerie. Au lieu des mâts (Voy. ce mot) dont on se sert aujourd'hui pour guinder les châssis de coulisses, on employait autrefois, à chaque plan de la scène, une série d'appareils qu'on appelait /flt/a; châssis, et aussi quelquefois por- tante. Les faux châssis, qui, comme les mâts actuels, traversaient les costières, et comme eux étaient mis en mouvement par des chariots placés dans le premier dessous, formaient comme une sorte de très haut cadre de bois sur lequel étiiit fixé le châssis de coulisse, et sur un de leurs côtés portaient une série d'é- chelons allant de la Ijase au sommet, pour i)er- mettre la mananivre. Les faux châssis offmient plus de stabilité, et Téchelle dont ils étaient jiourvus présentait aussi plus de sécurité pour les machinistes que les crampons ou les clianti- f^aioles des mâts dont on se sert aujourd'hui ; la grande surface qu'ils occupaient derrière les décors permettait aussi de guinder ceux-ci à des points différents, et de les mieux attacher. Ces divers avantages ont été remplacés par d'autres : les mâts sont j)lus légers, plus faci- les à déplacer, et les coulisses sont moins en- combrées avec eux qu'avec un nombre moitié moindre de faux chîlssis. Tout cela est très important, les efforts des machinistes devant avoir surtout i)our objectif de dégager la scène le plus possible pour satisfaire aux exigences des pièces à spectacle, qui de jour en jour grou- pent un personnel seéni(iue plus nombreux. Aujourd'hui on ne se sert plus guère de faux châssis qu'à l'avant-scène , pour supporter les draperies qui forment les deux côtés du man- teau d'Arlequin. CHASSIS DE DÉCORATION. — Tenue de décoration. Les châssis sont les feuilles de décoration latérale, qu'on désigne générale- ment sous le nom de coulisses, et qui sont pla- cées de chaque côté de la scène dans le sens de sa largeur. Ces châssis sont fixés par des cram- pons à des mâts chargés de les supporter et de les maintenir dans une position verticale, et il s'en trouve un à chaque plan. Lorsque le châs- sis est en entier dans le sens de la largeur de la scène, il prend le nom de châssis géomètrah lorsqu'une de ses parties fait un retour dans un sens ou dans un autre, il est dit à brisure. n 162 CHAT. — CHEF DES CHŒURS. CHAT. — Très redontê des chantenre, le chat est un embarras soudain, momentané, de la goi^e, causé par une légère obstruction, qui vient voiler la voix et l'empêcher de sortir a\"cc sa pureté et sa limpidité ordinaires. La présence d'un chat ne laisse passa;^ qu'à une sorte de bruit inarticulé, qui vient fâcheuse- ment remplacer le son attendu et cause à tous nne désagréable surprise. CHAUFFER LA SCÈNE. — Lorsque, dans un ouvrage dnimatiquc, une scène impor- tante et qu'on ne saurait supprimer paraît cc- |>endant un peu froide, un i>eu languissante, on recommande aux acteurs qui en sont les personnages de l'animer par leur jeu , jMir leur mpuvement, d'en serrer le dialogue et d'en presser l'action, de façon à un corriger autant que possible les défiiuts et à les faire disparaî- tre aux yeux du public. C'est ce qu'on apiicllo « chauffer la scène w. CHAUSSER LE COTHURNE. — Ou &iit que le cothurne, qu'on dit avoir été inventé par Eschyle, était un genre de cbaussurca ré- servé, dans l'antiquité, aux seuls acteurs de la tragédie. De là vient qu'au siècle dernier, en Frantre, on disait d'un acteur ou d'un auteur, qui, connu seulement jusque-là dans un autre geniv, faisait une incursion dans le domaine de la tragédie, qu'il voulait « chausser le cor- thnme », L'expression a passé de mode, — conmie la tragédie elle-même. CHAUSSONS DE DANSE. — La partie du costume la plus modeste, mais la plus essen- tielle pour une danseuse, c«r elle se rapporte à l'exercice même de son ait. a La danseuse, dit M. Kuitter, s'exerce avec des chaussons de classe qui ont déjà servi. Elle portortantc de l'en- semble instrumental ou vocal, et qui, par la précision et la sûreté qu'on attend de lui , en a justjn'à un certain point la re8[>on8abi]ité. C'est en ce sens une œuvre importante et la mettre en état d'être offerte aux specta- teurs. C'est l)eaucoup sans doute de Imttre la mesure à son orchestre, de savoir l'échauffer, lui donner de l'élan quand Ixîsoin est, tout en modérant son ardeur à l'occasion, d'indiquer à chaque instrument la rentrée impoitante à faire, de maintenir dans le droit chemin des chœurs |)arfois inattentifs , de donner à chaque chan- teur le signal du départ, de parer aux défail- lances ou aux man(iues de mémoire de ceux-ci en faisant sauter à tout l'orchestre deux ou trois mesures escamotées sur la scène. Tout cela n'est rien pourtant si l'on songe aux tra- vaux préparatoires des études et des répétitions, aiLx répétitions partielles et complètes qu'il faut diriger et organiser, à la surveillance de toutes les parties de l'exécution : rôles, chœurs, orchestre, ballet, à la précision qu'il faut appor- ter dans l'indication des mouvements, à la confiance qu'il faut savoir inspirer et commu- niquer à tous, enfin à l'énorme responsabihté qui pèse, au point de vue de l'ensemble géné- ral, sur les épaules d'un chef d'orchestre. Aussi un excellent chef d'orchestre est-il chose bien rare. Sans vouloir adresser à qui que ce soit une criti(|ue qui n'aurait pas ici de raison d'être, on peut dire qu'à l'Opéra Valen- tino et Habeneck n'ont pas encore trouvé de successeur, non plus que Tilmant à l'Opém- Comique. Le meilleur chef d'orchestre de ce temps, en France, est certainement M. Charles Lamoureux; en Angleterre, M. Michael Costa est considéré en ce genre comme un artiste de premier ordre ; il en est de même en Allema- gne de M. Lé\7, qui a dirigé l'excKîution des dernières œuvres de M. Wagner ; en Autriche, lt)4 CHEF DE SERVICE. — CHŒUR. de M. Haiis Richtcr, chef d'orchestre de TO- péra impérial de Vienne ; en Italie, de M. Franco Faccio, chef d'orchestre de la Scala, de Milan ; en Belgique, de M. Dupont, chef d'orchestre du théâtre de la Monnaie, de Bnixelles. Les Italiens appellent le chef d'orchestre maestro concertatore ; les Allemands cappella- mets ter, « maître de chapelle ». CHEF^ DE SERVICE. — Les chefs de service sont nombreux dans tout établissement dramatique de quelque imjKDrtance, et chacun d'eux, investi de l'autorité nécessaire sur les artistes ou employés placés sous ses ordres, est responsable devant la direction du théâtre de la marche et de la bonne ex(''cution du service qui lui est confié. C'est dans les théâtres lyri- «lues que, par le fait de la prt'sence de la musi- que, les services sont les plus nombreux. Sont chefs de service dans un «rnind théâtre, soit artistique, soit pei*sonnel, soit matériel : les rt^isseurs, les chefs d\)R'liestix\ les chefs du chant, les chefs des chœurs, les maîtres de ballet, le chef des comparses, les chefs costu- mier et costumière, le chef machiniste, l'ins- pecteur de la SiiUe, le caissier, le maître coif- feur, le chef (raccessoires, le chef de copie. Les chefs 4k' services artistiques sont char- îrés non seulement de la direction des études et des exécutions, mais de la discipline, de la bonne tenue ft do l'exactitude de leur peraon- nel ; leur autorité a un côté administratif, au- quel nul de leurs sul>onlonnés ne peut se sous- traire; ils infligent les amendes à ceux qui les ont encounies, ils ont droit de réprimande et de rt'vocation, ils sont enfin, comme nous le disions, investis de l'autorité qui est le corol- laire naturel de la resjwnsabilité (pii pèse sur eux. CHEMINÉES DES CONTREPOIDS. — On aj>pelle ainsi des espèces de cages à claire- voie, faites en planches de sapin et disposiHïs le long des murs latéraux de la scène, dans toute la hauteur de Tédifice, afin d'assurer le libre i>arcours des contrepoids nécessaires à la manœuvre des décors, tout en garantissjuit la sécurité des personnes qui ont affaire dans les coulisses. CHERCHER L'EFFET. — L'expression se comprend de soi. On dit d'un comédien qu'il cherche Tefîet lorsqu'il ne se contente pas de ceux qui doivent naître naturellement des situations ou du dialogue de son rôle, et qu'il s'efforce, par tous les moyens possibles et même impossibles , de provoquer dans le public des impressions factices et de faire de Teffet aux dépens du bon sens et du bon goût. CHEVALIERS DU LUSTRE. — Vov. Claqueurs. CHEVROTER. — Soit pir suite d'une mauvaise émission de la voix, soit par le fait d'une fatigue et d'une* faiblesse continues de Torgane vocal, certains chanteurs en arrivent à ne plus ix)uvoir soutenir un son purement et sans (ju'on entende une sorte de petit tremblo- tement insupportable, (pii Rassemble au vagis- sement d'un chevreau. C'est ce qu'on appelle chevroter. CHIRONOMIE. — La cliironomie, au dire de Chamfort, était un «i mouvement du corps, mais surtout des mains, fort usité parmi les anciens conu'diens, par lequel, sans le secours de la parole, ils d('»signoient aux sjHîctateurs les êtres iK^nsîms, dieux ou hommes, soit (ju'il fût question d'exciter les ris à leurs dépens, soit (pi'il s'agît de les désigner en Inuine part 1». CHŒUR. — Dans l'oiKTa, dans l'oratorio, le chœur est un ni< >rceau de musique écrit gé- néralement à quatre ixirties (soprano, contralto, ténor, basse), mais qui est chanté jwr toutes les voix et, à de très rares exceptions, pres(]ue toujours accompagné par l'orchestre. Queltiues chœurs sont écrits pour les seules voix de fem- mes, comme celui des nymphes dans la Psyché de M. Ambroise Thomas ; d'autres sont écrits pour les seules voix d'hommes, comme c*elui des chasseurs dans le Freischutz de Weber ou celui des soldats dans le Faust de M. Gounod. Le chœur est une source d'eflTets toujours nou- veaux, toujours \*arié8, parfois surprenants. Haendel en a tiré un parti incomparable dans les t oratorios: Richanl Wagner Ta c()mplète- ment banni de quelques-uns de ses ojK'ras. \ CHŒUR ANTIQUE. On emploie lo mot chœur au pluriel pour désigner l'eneemble des choristes, le peraonncl qui prend part à l'exécution des chteura. On dira : a Les chœurs de tel théâtre sont vigoa- reuï, mais ne sont pas assez nomlireux. » Ou appelle chœur de s&rtie, dans le vaudeville, un petit morceau de quelques mesures chanté par tous les acteurs en scène pour accompagner la sortie d'un ou de quelques-uns d'entre eux. CHŒUR ANTIQUE. — On sait ce quê- tait le chœur dans le théâtre grec : la person- nification du peuple, un être collectif qui pre- nait une part directe à l'action, qui s'entretenait avec le personnage principal, qui parfois se divisait en deux parties a'interpellant et se ré- pondant mutuellement, qui enfin no quittait jamais la scène et se faisait entendre même pendant toute la durée des entr'actes. Le cliœuT, a dit Tissot, avait des avantages în- contestables sur ces immcDEes tlii^ùtreB, auprès dee- quela les nôtres, quant aux ]iroportions iiiatérielle.s, ressemblent tout au plus à des ihisltres d'enfants; trente mille spectateurs se plaçaient facilement dans celui d'Athènes. Le cliœur servait ii peupler cette vaste solitude de la scène, dont lo vide ef< frayant eût affligé les jeus; d'autre part, quinze ou vingt voix réunies, soutenues par les instni- mentB (1), fortifiées par l'iiiirmonie, n'étaient pas de trop pour ébranler de tempe en temps les échos de cette enceinte gigantesque, dans laquelle une voix seule, répondant toujours ù une voix seule, eût semblé comme perdue, et aurait offert trop i exactement l'image de cet emblème de la tristesse : ' vos clamantiê in daerlo. Qu'on se représente, au contraire, ce peuple com- posé d'hommes et de femmes, de vieillards uu de jeunes gens, de citoyens ou d'esclaves, de prêtres on de soldats, entrant majestueusement sur le théâ- tre, dés la première scène, pour y rester jusqu'à la dernière, précédés des joueurs de flûte ou de lyre qui règlent leurs pae, se plaçant dans un lieu moins élevé que le reste du théâtre, entre les spectateurs et les acteurs. Un héros, une princesse, un roi se présente : le chœur l'interroge ou lui répond, prend part à ses douleurs, ou conseille son infortune; la scène reste vide ; le chœur se charge de la remplir par un mélodieux intermède, et, dans ses chants, il parcourt librement le domaine des passions et de (0 "Daat rorigice, le duenr comprenait 60 v 165 la morale; quelquefois il se partage en deos grou- pes dirigés pat deux chefs qui se racontent quel- ques circonstances d'une action, ou se communi- quent leurs craintes et leurs espérances; qu'on joigne à l'excellence de la poésie que l'auteur a répandue dans les accents du chœur, aux modes touchants sur lesquels il a placé les paroles, la perfection du geste et de la pantomime des acteurs qui remplissent ce rûle collectif (car, le maître du chœur, dit le savant auteur à' Aitacluirin* , ne se bornait pas à diriger la voix de ceux qui étaient BOUS ses ordres, il devait encore leur doilner des le- çons des deux pièces de dnnse que le théâtre récla- mait alors : l'une est la danse proprement dite, l'autre est celle qui, en réglant lus mouvements et les diverses inflexions du corps, est parvenue à peindre avec plus de précision que la première les actions, les moiors et les sentiments), qu'on ras- semble tous ces objets, disons-nous, sous un même point de vue, et l'on ne se formera encore qu'une idée bien faible et bien lointaine de la grandenr, de la majesté, de l'intérêt que la présence du chœur ajoutait aux solennités du théâtre antique. Le chœur est l'origine et le père même du théâtre grec, dont il coiiBtituait d'abord l'imi- que ijersonnago ; l'étude de ses transformations est du plus grand intérêt , aussi bien au poiut de vue poétique qu'au point de vue scénique. De toutes les parties de l'art dramatique dont se composait l'héritage des anciens, c'est peut-être celle que nous avons reçue avec le moins de faveur sur la scène. Hors de la scène, il n'y en a pas, même ' pour nous, de plus intéressante ci de plus curieuse. Le chœur est l'origine, le berceau du théâtre an- cien, qui devint le père de tous les autres. Rien de ce qui s y app rt petdnn te'dif férent ; il t p d rr t d err qu Iq e ue et si f nde On chant t d 1 ; d n f t de 6a im It us du moins régul d t 1 d q n d ns les premie p n pes d t ubl m S a n et Thespis t d ui n dan I Att i raag nèrentdepla 1 tanturs,l n u d t tea , l'autre sur un chariot. Thupia fut le premier qui, barbouilla de lie , Promena par les boarge cette beureuBe folie , El, d'actaars malomËg chargeant un tomlKTcau, Amusa let passants d'un spectacle uouTeau. Jusqu'à lui, le chœur avait fonuc un personnage 166 CHORAGIE ou CHORÉGIE. principal , ou plutôt unique , occupant continuelle- ment la scène, et la remplissant par ses hymnes ou ses dithyrambes. Quelquefois seulement un des chanteurs, monté sur une table, formait avec le chœur une espèce de dialogue. Thespis s'empara de cet acteur, composa pour lui des récits, dont This- toire des héros lui fournissait la matière , le char- gea de les prononcer alternativement avec les hymnes que chantait le chœur, et d*abord le rôle de cet acteur accessoire sembla n*avoir pour but que de laisser au chœur le temps de reprendre haleine, et que de le soulager de ses perpétuels cantiques ; mais rimpulsion était donnée : Taccessoire devait bientôt l'emporter sur le principal ; les récits , d'a- bord nommés épisodes, reçurent le nom d'actes : la tragédie prit naissance ; les clianteurs furent ré- duits au second rôle, et dès lors l'histoire de ce personnage sorti des chœurs eut plus d'un trait de ressemblance avec celle de ces héros qui , sortis de la foule où ils sont nés, tournent contre elle leurs premiers efforts et ne tardent pas à l'asservir. C'est surtout à Eschyle, à son incomparable génie, qu'on doit cette importante et radiciile transformation du chœur, qui dans ses mains devint un instrument merveilleux d'expression grandiose, pathétique ou terrible. Eschyle parut, et le théâtre d'Athènes s'éleva désormais sur une base éternelle... 11 semble qu'Es- chyle, en ravissant au chœur la première place, vou- lut, pour ainsi dire, l'en dédommager en lui don- nant une grandeur, en l'environnant d'une majesté jusqu'alors inconnue. On peut assurer que tant qu'il fut acteur principal, le chœur ne produisit jamais autant d'effet que lorsque , détrôné par Es- chyle , il devint acteur secondaire ; au lieu de des- cendre, il s'éleva. Dès ce moment, il reçut une forme déterminée, un emploi fixé et marqué ; il de- vint spectateur intéressé à l'action, tantôt par la simple curiosité, comme dans Prométhée, tantôt par la crainte, comme dans les Sept Chefs, tantôt par la vengeance, comme dans les EuménideSj tantôt réunissant toutes ses voix pour chanter ses douleurs, son indignation , ou soii épouvante , tantôt décla- mant et dialoguant avec l'acteur par le seul organe de son coryphée. Dans Eschyle , le chœur n'a pas encore reçu la mission de marquer bien nettement la division des actes par des hymnes décorés du nom de strophes et d'antistrophes : Sophocle et Euripide apportèrent plus de soin et d'exactitude dans cette partie ; mais quelle que soit d'ailleurs la j^ompe de leur style et la richesse de leur poésie , c'est à peu près là le seul bienfait dont le chœur tragique leur soit redevable. Supérieurs à Eschyle par le choix des sujets, l'ordonnance des plans, la science des passions et l'imitation de la nature, ils ne purent le surpasser, l'égaler même dans la ma- gnificence, dans le grandiose de ses chœurs. L'effet du chœur des Euménides est aussi connu que le nom d'Eschyle même ; la simple lecture suffit pres- que pour en renouveler la terreur. Rien de plus touchant, de plus vrai que celui des vieillards dans la tragédie des Pei'ses. On a dit avec raison que le chœur du second acte des Sept Chefs devcuU Thèhes surpassait toutes les odes de Pindare ; c'est un morceau lyrique dont la poésie ne peut trouver de rivale que dans les livres saints. Dans le théâtre jçrec, le chœur joua un rôle aussi im|X)rtant dans la comédie que dans la trajïédie, surtout avec Aristophane. On sait même le rôle indigne que celui-ci lui fit jouer, en lançant publiciuement, par son aide, une accusation odieuse contre Socrate. Dans la sa- tire et dans la pastorale , le chœur tenait aussi sa place. !Mais nous avons fait assez voir tout le lustre, toute la gloire qu'il apporta au théâ- tre de ce peuple merveilleux, qui eut le senti- ment et le génie de tous les arts et qui fut le père de la civilisation moderne. CHORAGIE ou CHORÉGIE. — C'est ainsi que se nommait, en Grèce, la magistra- ture artistique qu'exerçait le chorège (Voy. ce mot). Elle était souvent ruineuse pour son titulaire, en raison des fniis qu'elle en- traînait; mais elle constituait une obligation, une véritable charge publiijue , à laquelle nul ne pouvait se soustmire, et (|ue tout riche Athé- nien était tenu de remplir, dût sa fortune y périr. Ceci arrivait fréquemment, et Antiphane nous l'apprend dans une de ses comédies, le Soldat : — Aussi \'int-il un moment où tout le monde chercha à s'exempter des charges ruineuses de la choragie, et où certaines tribus ne pouvaient plus trouver de chorège. CHORÉE. — CHOREGE. 167 CHORÉE. — Ce mot servait à exprimer et îï caractériser, chez les Grecs, l'art (jui com- prend la rérniion du rythme dausant et de Thar- monie, ou, pour être plus précis au point de \nie moderne, de la danse et de la musique. Nous n'avons point chez nous d'expression sem- Ji J 3 Fy," . \/' ^/• ^r^ c — ^&— Poxitifn y X -X Pe^hcni Vf v_/ O ■ Ô • Piyufiûn Q * /àuéic PaJtft'cn y n \% - K J'.uiivit P.Ut^ri^tf lu \.. -Cr /y Ô ÔA 75 //f r,%t LmM, J'mj SmJTu 30 ^ '•§ /W t^-Ai/f «t ii r 34 3J /. "> ^ T Pfjantent ;;ijij.ij^ji^-wArvi:ijjj'iJ7^]^^^ Exemples de notation oborégraphiqnc. blahle, qui, dans un seul mot, représente à notre esprit l'idée de la danse accompagnée musicalement. CHORÈGE. — On nommait ainsi à Athè- nes le magistmt (jui était chargé du détail de la représentation des pièces dramatiques. Cha- cune des tribus, qui étaient au nombre de dix, avait son chorège, et, bien que la tribu lui four- nît une somme considérable, il était presque 168 CHORÉGRAPHIE. — CHORISTIQUE. toujours obligé d'y mettre du sien. Il le faisait d'ailleurs de bonne grâce, cette magistrature conduisant celui qui en était investi aux plus hautes fonctions de la république. Te, et publia à son tour un ouvrage intitulé la Chorégraphie, ou VArt décrire la danse par caractères, figures et signes démons- iratifs (1701). Cet ouvrage contenait un grand nombre de planches, sur lesquelles se trou- vaient décrits et tracés, à l'aide de signes ca- ractéristiques, j'allais dire cabalistiques, une foule de pas de danse qu'on pouvait ainsi re- produire. Mais il est bien difficile, dans un tel ordre d'idées, d'arriver à un résultat pratique et complet. En effet, comme l'a dit Noverre, eaucoup plus chargés de matériel «[ue ces (k'rniei*s. C'est là, en effet, que se trouvent, avec les rideaux, et les l)lafonds d'air, et toutes les déconitions siqM}- rieures, l'ensemble immense des herses d'éclai- rages, des ponts volants, des échelles qui relient les corridoi*s du cintre, avec tous les treuils, les tamlxnirs, les contrepoids, les lils, les mou- fles, les crochets, enfin les objets, les engins, les instruments de toutes sortes nécessités par le service de la macliinerie et (jui font de cette partie du théâtre l'endroit le plus éton- nant, le plus étrange et le plus curieux à visiter. Dans un théâtre ordinaire bien machiné, le cintre, complètement suspendu è, )a charpente du comble, est élevé de douze mètres environ an-deB8U8 de la scène ; k l'Opéra, il se trouve à vingt mètres de hauteur, et des colonnes de fonte, soulageant la charpente, maintiennent les corridors et servent sur la scène à limiter les cases des châssis cmmagaBincs. Voici une description du cintre faite par un homme qui l'avait bien pratiqué, U. Moynet (1) : C'est dans le premier coTridar que se fait en grande partie le service du cintre (2). Du côté do tliéSlre, servant de garde-fou, vous voyez cette traverse qui va do la face au lointain, portant une ^érie de fiches eu clievillea posées obliquement avec la réguiarité d'une ligne d'infanterie. Ces fiches Kervent à retenir les poignées des rideaux, plafonds et eommandea qui mettent en mouvement les tam- . (1) Dana son livre : rEm:tr, i!a théâtre. (2) I>!a corridora du cintre sont BUperpOBéa et par- couretit toute retendue de la scOne hqf ehacun de ses tûtéï, le long de» mnrB qui en forment U limite. (3) On appelle poiynèe la réunion des fila qui serrent & enlever un rideau, uu plafond on tout autre objet. Après avoir passé sur sa poulie, chaque fil est renvoj'é ta pr^mlèn rcpr^HnlAtion. bours placés au-deHsns (3); au-dessous des fiches, contre chaque montant, un rouleau en bois est dis- a des a ^sdela tambour, et il se réunit lii aux autres HIb qui composent ta manœuvre. Le faisceau ainsi formé vient se guiudersur une cheville, en attendant le moment du service ; on dit alora qn'il est en retraite. — Une commanile est un cordage aaseï fort qui met en mouvement un t.imbonr, sur lequel est équipé soit un rideau, soit uue ferme, soit 172 CINTRE. posé pour laisser glisser une commande afin de faci- liter un mouvement qu'on veut maîtriser ou préci- piter. Ces rouleaux se trouvent du bas en haut du théâtre. A tous les plans, ils facilitent l'emploi des cordages , qui sont les principaux agents de la ma- chinerie théâtrale. Du côté du corridor bordant la cheminée de contrepoids (Voy. ce mot), une autre rangée de fiches tient en retraite toute une série de ces mas- ses de fonte, moteurs très importants dans la ma- chinerie théâtrale. Ils ont leur domicile 'ordinaire dans les deux espaces qui, de chaque côté de la scène, s'étendent en hauteur et en largeur, du sol au faîte et de la face au lointain. On fait les contrepoids en fonte et par fraction d'un poids déterminé, ce qui permet d'augmenter ou de diminuer le poids général à volonté. Chaque fraction ou « pain t> est j)ercée par le centre et fendue sur le côté de manière à s'emboîter sur une tige ; à sa partie inférieure se trouve une saillie s'a- justant parfaitement dans une concavité que tous portent à la partie supérieure afin d'empêcher tout le système de quitter la tige centrale. Pour relier les services des deux corridors [des deux côtés de la scène] , outre une communication suspendue qui se trouve dans le fond de théâtre, et qu'on nomme 2>ont du lointain , et les escaliers placés à chaque angle qui montent du troisième dessous au gril , il y a une série de ponts volants à chaque plan, superposés précisément dans l'axe des grandes rues (Voy. ce mot); ces ponts, au nombre de trois à chaque plan , vont d'un corridor à l'autre et sont suspendus , de deux mètres en deux mètres , par un étrier en cordage qui part du gril. A ces cordages sont adaptés des garde-fous solidement bandés à chaque corridor ou point d'arrivée ; ces garde-fous sont également en cordage , et c'est sur ces tremblants appuis que les machinistes du cintre s'aventurent pour raidir un fil , ou lui donner du lâche , ou débarrasser un cordage engagé dans une décoration. Les étriers des ponts volants se font à présent en fer, ainsi que les mains courantes , qui parfois même se font en bois. Une dernière disposition vient compléter toutes celles qui sont ici décrites. Pour assurer des com- munications rapides entre tous les étages des cor- ridors, des échelles verticales sont fixées de dis- tance en distance. Dans bien des cas, les escaliers, trop éloignés des manœuvres, ne suffisaient pas au service. Ces échelles sont disposées pour desservir deux ponts volants. Le second corridor ne diffère pas beaucoup du premier. Nous trouvons encore là des fils , des poi- gnées , des commandes et une rangée de tambours. f Montons au troisième étage. Ici ce sont des treuils , et au quatrième corridor quatre rangées de tam- bours. S'il n'y en a pas plus, c'est que la place manque. La raison de cet encombrement d'engins volumineux est que chaque ferme, herse ou bâti quelconque, trop lourd pour être manœu\Té à la main seulement, nécessite un tambour. Pour peu que le théâtre représente une pièce à grand specta- cle et qu'il y ait un répertoire nombreux qu'on ne peut déplacer, ces tambours sont souvent insuffisants. Montons encore plus haut , (jans la partie supé- rieure du bâtiment qu'on appelle le gril y probable- ment à cause de sa forme. Le gril est un plancher couvrant la surface de la scène en tous sens. Ce plancher, qui porte sur un simple solivage, est composé de frises ou planches transversales , allant de la cour au jardin (Voy. Côté œuR) dans toute la largeur du théâtre. Mais ces frises, au lieu d'être rapprochées les unes des autres comme dans un parquet, sont éloignées de quelques centimètres. On voit là une grande collec- tion de tamboura , de tous les diamètres et de dif- férente longueur. Sur les côtés , près des cheminées de contrepoids , une série de moufles allant de la face au lointain et devant recevoir les fils des con- trepoids se trouvent suspendus par ces moufles juste au-dessus du vide existant dans toute la hau- teur de l'édifice. Partout, sur le gril, nous voyons des chapes et leurs poulies vissées sur le plancher. Tous les jours on en ajoute d'autres suivant les be- soins, et des centaines de fils partent des tambours et de leur diamètre , allant passer chacun sur sa poulie et plongeant dans les i)rofondeurs du cintre qui sont sous nos pieds. Tous ces fils soutiennent des décors... Au-dessus du grand gril se trouve le petit gril, où vous voyez deux énormes tambours qui n'ont d'autre raison d'être là que le défaut d'espace disponible au-dessous. On voit ce qu'est le cintre, et quel rôle im- poitant il joue dans la machinerie théâtrale et dans la manœuvre des décors. Nous avons rencontré beaucoup de personnes qui, ne se rendant pas un compte exact de Tagencement d'un théâtre, croyaient que tout le travail rela- tif à cette partie du spectacle scénique se pra- tiquait dans les dessous. On voit que cette croyance est erronée. Dans tout théâtre machiné, il y a trois grands centres d'action : les dessus, les dessous, et les coulisses. Et la scène seule, où tout ce tra- vail produit son effet, est presque inaccessible aux travailleurs. CIRQUE, — On sait ce qu'étaient les jeux 1 ces, lea fêtes publiques et solennelles consacrées du cirqne chez les Romains, qui célébraient, par eux à la gloire des dieux. Le premier clr- par de grands spectacles donnés dans ces édifi- 1 '|ue construit à Rome le fut par Tarquin l'An- cien, qui, à la suite de la victoire remport^ie par lui sur lea Latins, proposa des jeux plus magnifiques que ceux qn'on avait mis jus- qu'alors. C'est donc lui qui, le premier, détcrniina une place fixe pour la célébration des jeux, et ie cirque, qu'il construisit et auquel on donna le nom de maximum, parce qu'il était 174 plus ^-astc que tons cens qui furent couBtruits par la suite, fut élevé dans la vallée située en- tre le moût Aventîn et le mont Palatin. C'est aussi à partir de cette époque que les grandes fôtes publiques, connues d'alwrd sous le nom de emaualies, furent appelées ludi eir- cetises, j'eui du cirque (de drcus, et non de Circé, comme quelques écrivains l'ont dit à tort, même dans l'antiquité) ; on les appelait CIRQUE. aussi quelquefois Ivâi Romani, jeux romains (ou de Romnlus, qui les avait établis), et ludt magni, grands jeux, parce qu'ils ae distin- gTiaient par une plus grande magnificence qne tous les autres. Ce que l'on appelait la pompe du cirque, jwtnpa ctrcen«i#, a dit M. Virlet d'Âoast, consistait en une proceEsioD et des sacrifices offerts aas dieux. Cette cérémonie précédait ordinairement les jeox, • P ^., û h^.^^ ^^ ^ ifjfl II H --^■^-' ■■' ■ ■■ , iiiiiirttT'""^^^^^ MS9 ^H ^^H L»'." ■*>■ ii>n.Sfe3aw§ ^ qui conBistaicQt en sept sortes d'exercices. Le pre- mier se composait de la lulle, de combats à l'épée et de combats avec des bûtona ou avec des piques ; le second comprenait la course à pied ; le troisième, la danse ; le quatrième , les exercices du palet ou du disque, ou bien la course avec flèches, dards et toutes sortes d'armes analogues, et qui se fai- sait aussi à pied; le cinquième se composait de courses à cheval et d'exercices de manège, ap- pelés ladaê Trq/'w, jeu de Troie, où les jeunee ^ens de. Borne venaient s'exercer; le sixième genre d'exercices se composait de courses en chat, auri- galio, soit à deux, soit à quatre chevaux; les com- battants furent d'abord divisés en deux quadrilles, puis en quatre qui portèrent le nom des couleurs dont elles étaient revêtues ; enfin le septième com- prenait les combats des gladiateurs à pied , pugna pedealria, et les coiubate contre les bêtea, venalio. Plus tard, les empereurs établirent encore dans le cirque un autre genre d'exercices, les naumachim, qui consistaient en combats navaLs. Dans les plus anciens temps de Rome , on ne donnait dans le cir- que que des coursca b. cheval ou en char, et ce ne fut que successivement que les jeux que je viens CLAQUE. li 4 d'énumérer y furent introduits. L'empereur Adrien fixa au onzième des calendes de mai les jeux du cir- que, dont jusque-là le jour avait varié suivant les caprices des empereurs ou suivant les rites religieux. Les cirques remplirent, à Rome, l'office des hippodromes et des stades des Grecs, dont ils différaient en ce sens que ceux-ci étaient ou- verts à une de leurs extrémités et que le milieu en était tout à fait libre. Le plan du cirque était de forme oblongue, et tandis qu'une de ses extrémités formait un demi-cercle, l'extrémité opposée était fermée par des Ixitiments appelés la ville {oppidum), qui contenaient les écuries et les retraites pour les chevaux et les chars. Un mur biis et étendu s'élevait en longueur dans l'arène, de façon à la diviser, comme une baiTière, en deux parties distinctes, et à ne laisser libre qu'un espace à chaque l)out. A chaque extrémité de ce mur était placée une borne autour de huiuelle tour- naient les chars. « Au centre de l'extrémité occupée par les écuries, dit M. Anthony Rich, était une belle entrée appelée porta pompœ , par laquelle passait le cortè^^e du cirque avant le commencement des courses : une autre était élevée à l'extrémité circulaire et appelée porta trmmphalis, par laquelle les vainqueurs sor- taient du cirque comme en triomphe ; une troi- sième ou\Tait sur le côti» droit, appelée paria libitifiensis, par la(iuelle on emportait les con- ducteurs tués ou blessés, et il y en avait deux autres tout près des carceres, par lesquelles on amenait les chars. Quant à ce (jui regarde l'in- térieur et l'extérieur de l'édifice, un cirque était construit sur un plan analogue à celui qu'on adoptait pour les théâtres et les amphi- théîitixîs : à l'extérieur, il se composait d'un ou plusieurs étages d'arcades, suivant l'étenduo et la grandeur de l'édifice, par lesquelles les spectiiteurs aiTivaient aux escaliers qui con- duisaient dans l'intérieur du bâtiment. L'inté- rieur était disposé en gradins partagés en ran- gées et séparés par des escaliers et des paliers. » Le monde moderne ne connaît pas les fêtes colossales du monde antique. Les cirques que l'on voit de nos jours sont donc beaucoup moins vastes que ceux que construisaient les Romains. D'autre part, comme tous les climats n'ont pas les mêmes privilèges que celui de DICTIONNAIRE DU THÉÂTRE. l'Italie, nos cirques sont couverts et clos. Parifi en possède deux fort beaux, le Cirque d'hiver (l)oulevard des Filles-du-Cah-Bire) et le Cirque d'été (Champs-Elysées), le premier pouvant contenir environ 4,000 spectateurs, le second :^,500. Un troisième, le Cirque Fernando, a été établi, il y a quelques années, à l'extrémité de la rue des Martyrs. CLAQUE. — La claque est une institution répugnante, dont l'origine est assez lointaine, quoique son introduction dans nos théâtres soit de date relativement récente. On sait en quoi elle consiste : comédiens et directeurs de théâtre, jugeant que le public n'applaudissait ni assez fréquemment, ni assez bruyamment, imaginèrent d'introduire dans nos salles de spec- tacle un petit bataillon d'applaudisseurs spé- ciaux, chargés d'exciter, d'échauffer l'enthou- siasme du public, et au Ixîsoin de le remplacer par le leur. De là la clagm, et les ctaqueurs. Mais il fallait un chef pour commander et dis- cipliner cette bande d'admirateurs à froid ; de là le c/ipf de claque. Et il fallait un intérêt à tous ces gens pour faire leur aimable métier; de là la rétribution qui leur est allouée, soit en nature, sous forme de billets d'entrée gratuits, soit sous forme d'argent. On assure (]u'à Rome, Xéron, ce saltimban- (jue couronné, chantant et jouant de la flûte dans l'amphithéâtre, et voulant être sûr d'être applaudi, on posta un certain nombre d'hom- mes chargés de cette délicate Ijesogne, et qui s'en ac(iuittèrent en conscience. Telle serait l'origine de la claque. Au dix-huitième siècle, certaines rivalités d'actrices dans nos théâtres les amenèrent à faire des sacrifices pour se procurer des succès factices : telle serait l'épo- que de son introduction parmi nous. Toute- fois, la réglementation intelligente de cet art particulier ne remonte guère au delà d'une soixantaine d'années, et c'est alors qu'il se gé- néralisa et devint ce que nous le voyons encore aujourd'hui. C'est alors aussi qu'on fit courir ce petit couplet satiriciue : Auteurs, acteurs sont peu flattés, Chez Melpomène et chez Thalie, De ces petits bravos flûtes Qui nous sont venus d'Italie. 12 178 CLAQUE (CHEF DE). Il faut , si l'on veut tous les soirs Que leur oreille se régale, Par des mains comme des battoirs Faire trembler la salle. Si encore ces maiiis étaient propres, et si leurs propriétaires se contentaient de faire leur petit métier, sans insulter, comme il arrive trop souvent, le spectateur paisible qui, agacé par ces marques d'un enthousiasme intéressé, s'avise parfois de faire entendre contre elles une protestation légitime et indignée ! CLAQUE (Chef de). — Une autorité, une puissance, prcsqiw un fonctionnaire î Le chef de claque n'est pas ce qu'un vain peuple jK^nse. Son cliapcau couvre un pei'sonnage, et il n'est guère d'homme plus influent (jue lui dans une administration théîltrale. Saint-Agnan-Choler l'a fort bien déi)eint, il y a une trentiii ne d'an- nées, en faisant connaître la nature de ses ser- vices : Le chef de claque n'est pjLs en ciïet, comme on pourrait le croire, un homme à gages : il n'est pas employé par une administration théâtrale ; non : il traite avec elle, et lui prcte son soutien moyen- nant certains avantages qu'elle lui concède en re- tour. N'arrive pas à cette dignité qui veut; pour conquérir ou plutôt pour acheter cette place im- portante, il faut de l'argent, beaucoup d'argent; il faut une fortune acijuise qui réponde du passé , du présent et de l'avenir. Car ces charges ne se donnent pas; elles s'achètent, ni plus ni moins qu*une charge de notaire ou d'a^^eut de chanp^e. Auguste, le dernier chef de cla«iue de rOi)éra, qui est mort récemment, avait payé sa place 80,000 francs. Quand on est devenu, à prix d'ar- gent, titulaire de ces hautes fonctions, il s'agit de retirer l'intérêt de son capital , et cela s'effectue au moyen des billets que l'administration accorde au contractant, proportionnellement à l'importance de la somme donnée : le nombre de ces billets est augmenté naturellement les jours de grandes solen- nités. Le chef de claque les prend et en fait tel usage qu'il lui convient, à la charjrc par lui de soutemr les pièces et les acteurs, et de contribuer, selon ses moyens , à la prospérité du théâtre. A cet effet , il établit son quartier général dans un café ou dans quelque autre lieu jmblic que connaissent les amateurs. Là, il distribue ses billets, pour un prix modéré , si le chaland veut conserver sa com- plète indépendance ; pour un prix plus modique en- core, s'il répugne à se mêler au gros de la pha- lange, et préfère applaudir en solitaire , selon le mot technique ; pour rien , s'il consent à faire par- tie de la troupe militante. Il est fort rare que le mîirché aille plus loin : cependant, quand on pré- voit un orage, il arrive que le chef de claque en- courage ses subordonnés par une distribution de ra- fraîchissements dans laquelle la chope et le petit verre jouent un grand rôle, et même par une légère gratification. Quand la troupe est complète, on s'a- chemine vers le théâtre; on entre par une porte particulière, avant l'ouverture des bureaux, et là le chef dispose ses soldats selon toutes les régies d'une stratégie plus ou moins habile ; il leur donne leurs instructions, se place au milieu d'eux, et di- rige leurs opérations en leur donnant le signal à l'aide de la voix, à l'aide du geste, à l'aide de sa canne, que, par un privilège exceptionnel, il con- serve seul au milieu du parterre désarmé. Le chef de claque est un personnage, avons- nous dit. On a et l'on doit avoir pour lui des égards. Les auteui*s le consultent non sur la valeur de leui*s ouvmges, ce qui serait trop dire, mais sur hi façon dont ils doivent être soutenus, aj)puyés par la claciue. Le chef de claïjue assiste aux répétitions générales; il prend des notes, manjue les endroits où l'eftet se produira, ceux où l'intervention des battoirs peut être utile pour sauver une situation faible, ou scabreuse, ou languissante. Il fait office de critique à sa manière, mais de critique bien- veillante, et surtout intéressée. Et comme il n'est pas infaillible, il lui arrive de commettre de lourdes sottises, et on Ta vu, par le fait d'un enthousiasme maladroit, intempestif ou excessif, soulever une salle contre lui et ses acolytes, et obtenir un résultat tout contraire à celui qu'il attendait. Le chef de claque traite parfois de puissance à puissance avec le directeur. Si celui-ci se trouve dans une situation embarrassée, qu'il ait besoin d'argent pour frapper un grand coup et solder les frais de mise en scène d'une pièce dont il lui faut escompter le succès, le chef de claque lui achètera, au prix de cent, centcin- (juante, deux cent mille fi-ancs, un certain nom- bre de représentations de cette pièce, c'est-à- dire (jue pendant ces représentations la recette entière appartient au chef de claque, qui se rem- lx)ur8e ainsi des avances faites par lui, nous n'avons pas Ixîsoin de dire à quelles conditions. CLAQUEURS. 179 Il ne nous semble pas sans intérêt de repro- duire ici le texte du traité que passait, eu 1834, la direction de Tun des théâtres de Paris, le Vaudeville, avec son chef de claque; c'est un petit document qui a son côté curieux : le voici : Entre les soussignés , MM. Arago , Bouffé , Caus- sade et Villevieille, agissant comme directeurs du théâtre du Vaudeville, en vertu du hail authenti- que qui leur a été fait de la salle et du privilège ; Et M. Emile Cochet, fabricant de masques; Il a été convenu ce qui suit : MM. les directeurs du Vaudeville concèdent et abandonnent sous toutes garanties, à partir du 1"^ octo])re 1834 jusqu'au 30 mars 1841 , exclusive- ment à M. Cochet, Ventreprise générale du succès (les pièces qui seront représentées ])endant ledit laps de temps au théâtre du Vaudeville, ensemble tous les avantages et droits attachés à ladite en- treprise, consistant, savoir : 1" Dans ses entrées gratuites et celles de deux de ses emphf/és pendant toute la durée de ladite entreprise audit théâtre ; 2<* dans la remise de quatre billets de parterre par chaque pièce qui sera repré- sentée tous les jours, et de ceux donnés par les auteurs et garantis par l'administration ; il est con- venu que le nombre de billets ne pourra être moin- dre de douze, qu'il donnera pour son compte à qui bon lui semblera ; 3*^ et dans la remise qui lui sera faite également de vingt-cinq billets de parterre et six d'amphithéâtre (pi'il pourra employer pour le succès de son entreprise de la manière et ainsi qu'il avisera. La présente concession est faite aux charges , clauses et conditions suivantes, que ledit sieur Cochet promet et s'oblige d'exécuter et d'accom- plir : 1" De faire tout ce qui dépendra de lui pour as- Jiurer It succès des jyièces nouvelles rpii seront re- présentées sur le théâtre du Vaudeville, pendant toute la durée de son entreprise ; 2*^ De se conformer en tous points aux usages établis par l'administration; en conséquence, de venir tous les jours à quatre heures de relevée au bureau de ladite administration j^owr prendre les instructions nécessaires qui lui seront données pour la soirée; 3" D'assister aux répétitions générales des nou- velles pièces pour s'entendre avec MM. les direc- teurs sur la conduite qu'il aura à tenir lors de la re- présentation desdites pièces ; 4<* De protéger les débuts des acteurs ou actrices qui seront admis par l'administration du Vaude- ville, et de soutenir ceux ou celles qui lui seront dé- signés ; 5^ De payer une amende de cinq francs, dans le cas où il ne remplirait pas les conditions exigées par le présent traité ; G** D'employer dans son service des personnes vêtues convenablemeiU ; 7<* Et enfin, de payer à MM. les directeurs du Vaudeville la somme de vingt mille francs pour toute la durée de son entreprise. De leur coté, MM. les directeurs s'obligent soli- dairement entre eux de maintenir le sieur Cochet dans ses fonctions auprès des nouveaux directeurs dans le cas où ils viendraient à céder leur direction , de ne pouvoir le changer sous aucun prétexte sans être tenus au remboursement de la somme de vingt mille francs, pourvu qu'il remplisse les conditions ci-dessus ; de lui assurer, lors des premières repré- sentations des ouvrages nouveaux en trois actes, la totalité du parterre, ou cent vingt billets pour les autres pièces en un ou deux actes, et de se conformer aux usages pour les deux représenta- tions qui suivront la première desdites pièces; de ne pouvoir exercer aucune réclamation contre lui pour raison du non-succèfi des ouvrages représen- tés sur leur théâtre, à moins qu'il ne soit prouvé (ju'il y ait faute ou mauraîj^e gestion dudit sieur Cochet, CLAQUE rus. — Soldats composant Tar- méc du général appelé le chef de clacpie. Plu- sieui*s euphémismes servent souvent à désigner les claqucui"s : on dit d'eux (jue ce sont des applaudifiseurs (logés, ce (pii se comprend de reste; on les ai>pcllc ks Romains du parterre , sans doute en souvenir de ceux que Néron em- ploya à son service, et aussi les chevaliers du lustre, en mison de la place (ju'ils occupent, ou, pour mieux dire, (piMls occupaient jadis au-dessous du lustre. Car aujourd'hui que les bancs du parterre tendent à disparaître de plus en plus pour faire place à des stalles dites d'orchestre dont le prix est trois fois plus élevé sans que les i)lacos puissent être meilleures, on est obligé de reléguer une partie des claqueurs dans les galeries supérieures du théâtre, et de ne laisser au parteiTc que le noyau solide de la troupe. endant trois jours ; en 1705, k le 17 décembre, dit un chroniqueur, les tliéâtres furent fermés à cause des prières de quarante heures pour le rétablis- sement de la Siinté de monseigneur le Dauphin, et le 20, ce prince ayant été ravi à notre amour, les sjxîctacles ne recommencèrent que le 1 2 jan- vier suivant »; en 1760, la mort de la Dïiu- phine fait ordonner une clôture de quatorze jours; l'année 1707 est désastreuse pour les théâtres, à qui la maladie et la mort de la reine font subir quatre fermetures : une de quatre jours, à partir du 2 mars, pour de premières prières de quarante heures; une seconde de quatre jours (21-24 mai), pour de nouvelles prières; une troisième, de vingt-trois jours, à partir du 24 juin , date de la mort de la sou- veraine ; enfin une quatrième, de deux jours, à cause des funérailles. L'année 1774 n'est pas moins fatale, et les théâtres, après avoir fermé quatre jours en raison de la maladie du roi , se voient tenus, au bout d'une semaine, à une clôture de trente-cinq jours occasionnée par sa mort ; en 1 7 7 5 encore, les théâtres doivent fermer cinq dimanches de suite, à cause du jubilé. On voit qu'en de certains cas, les clôtures des théâ- tres, tant accidentelles que régulières, attei- gnaient just^u'à deux mois et demi dans une année. Cet usage disparut, comme tant d'autres, avec la Révolution. La dernière clôture ];)ascale eut lieu le 31 mars l'ïi)2, une semaine plus tard (ju'à l'ordinaire , et la rentrée dut se faire le lundi 10 avril suivant. Cependant, sous la Restauration, l'autorité imposa de nouveau aux théâtres certains relâches et clôtures rc^u- liers, dont YAIman/fch des spectacles de 1826 nous donne la liste exacte que voici : Jours où les spectacles sont fermés : 21 janvier, anniversaire de Vassassinat de Louis XVI. — 13 février (anniversaire de l'assas- sinat du duc de Berry). — Toute la semaine sainte pour les théâtres royaux ; jeudi , vendredi et samedi saints, et dimanche de Pâques pour les théâtres se- condaires. — Dimanche de la Pentecôte, Toussaint, et Noël. — En 1825, il y a eu, en outre, relâche le 16 septembre, anniversaire de la mort de Louis XVI II. Après ISoO et jusqu'à 1><70, la clôture de la semaine sainte fut réduite aux trois grands joui-s ( jeudi , vendredi et Sîimedi ) pour les théâtres subventiomiés, et pour tous les autres à un seul relâche, le vendredi saint. Cet usage 8ubsist<5 encore aujourd'hui , bien que les théâ- tres ne soient plus astreints, jx'udant la se- maine sainte, à aucune clôture officielle. CLOU. — Mot passé depuis un petit nom- bre d'anntK,^s dans l'argot du théâtre, et qui indique un endroit d'une pièce sur lequel on compte particulièrement, soit au i)oint de vue artistique ou littéraire, soit surtout au point de vue de la mise en scène, pour obtenir un grand effet et exciter l'étonnement et l'en- thousiasme des spectateurs. La meute vérita- ble (jui prit ses ébats sur la scène de l'Odéon, il y a quelques années, dans les Danicheff, était un clou ; clou aussi l'éléphant qui parut au PUNCBI XU. — Ctomu mglalM, éqnilltxlita et mnldsu, d'arts Due affiche laifimt fOiâ» ie lu collecUon de M, CLOWN. — COIN DU ROI, COIN DE LA REINE. 187 Chîitelet dans les Mille et une Nuits. L'un des clous les plus solides du théâtre moderne est assurément le vaisseau fameux de V Africaine. CLOWN, — Mot anglais dont Tusage est passé dans notre langue, et qui sert à désigner un acrobate d'une gi*aude adresse, d'une grande souplesse, d'une grande agilité, ayant pour spécialité non seulement d'étonner le public par les exercices les plus surprenants, mais encore de Tégayer par les dislocations les plus bizan^cs de son corps et les lazzi les plus inco- hérents et les plus burlesques. Il n'est pas un cirque, un manège qui n'ait à son service au moins un ou deux clowns chargés de varier le spectacle entre les exercices équestres et d'ex- citer le rire et les applaudissements des specta- teurs par leui-s cabrioles étranges, leurs tours d'équilibre prodigieux et leurs plaisanteries fantasques. Les Anglais sont véritablement ex- ceptionnels en ce genre ; on cite un nommé Joa Grimaldi, qui fit naguère les beaux jours du théîitre de Covent-Garden, comme le clown le plus fameux de notre siècle , et chacun a présents à la mémoire les effets surprenants que produisirent, il y a quelques années, chez nous, aux Folies-Bergère, les frères llaulon-Lees dans leurs pantomimes burlesques, particuliè- rement dans le Fraler de village. En France, il faut surtout rapixîler le nom d'Auriol, qui, pendant plus de vingt aiLS, a charmé tous les habitués du Cirque par les tours prodigieux qu'il exécutait avec une aisance, une grâce, une élégance et un esprit merveil- leux. Avant lui, on avait applaudi pendant plusieurs années, à la Porte-Saint-Martin, un artiste extrêmement remarquable, Mazurier, dont le nom est resté presque légendaire. Mais nous disons bien artiste, car Mazurier, équili- briste étonnant, était plus et mieux qu'un simple clown : danseur comique de premier ordre, il joignait à ce talent celui d'un mime plein d'expression , excitant tour à tour le rire et les lannes, et dans un petit drame intitulé Jocko ou le Singe du Brésil, après avoir égayé toute la salle, cousu dans sa peau de singe, par les gambades et les contorsions les plus extra- ordinaires, il arrachait des pleurs de tous les yeux par le spectacle de sa mort, bien que le masque qui cou\Tait son visage ne lui laissât que le regard et le geste pour exprimer ses an- goisses et ses souffrances. Le jeu de Mazurier était si surprenant et produisit tant d'émotion dans Paris, que les Anglais voulurent aussi l'admirer ; il fut engagé pour six semaines au théâtre de Drury-Lane, au prix de dauze cents francs par soirée, presque autant que ce qu'on donnait alors à la Malibran. C'est Mazurier, croyons-nous, qui exécuta le premier l'exercice périlleux qui consistait à sauter sur le rebord des loges et des galènes, en costume de singe, et à faire ainsi à quatre pattes le tour de la salle deux ou trois fois, aux divers étages, exci- tant les cris de joie, ou de gaieté, ou de frayeur des femmes ou des enfants (1). Quelques an- nées plus tard, vers 18;i8, un clo^\ni anglais, Klischnig, qui était aussi un mime plein d'ha- bileté, renouvela les exploits de Mazurier à la Porte-Saint-Martin. COIFFEUR. — Tous les théâtres ont à leurs gages un maître coiffeur, qui, avec le se- coui-s de plusieurs aides, doit procéder chaque soir à la coiffure de tous les artistes qui pren- nent part à la représentation. C'est le maître coiffeur qui est aussi chargé de fabriquer et de fournir toutes les perruques, d'hommes ou de femmes, nécessitées pour les costumes de tel ouATage représenté, et c'est lui qui doit les po- ser, de façon que l'artiste qui s'en sert n'ait à ce sujet aucune préoccupation (2). COIN DU ROI, COIN DE LA REINE. — Lorsqu'en 1752 une troupe de chanteurs bouffes italiens vint faire connaître à l'Opéra (1) Cet artiste surprenant, qui était à la fois un acrobate merveiUeux , un danseur charmant et un mime au jeu plein d'expression, mourut à la fleur de l'âge, d'une maladie de poitrine, en 1828, ayant à peine accom- pli sa trentième année. (2) On lit dans le petit almanach intitulé If s Specta- des de Paris, pour 1700, à la liste des ce préposés et em- ployés à Tadministration de l'Opéra », la mention suivante : a Perruquier : M. Bruno; a Coëffeur : M. Desnoyers; a Coëffurier : M. DubreuU. » Étant donnés d'une part un perruquier, de l'autre un coiffeur, on se demande quels pouvaient bien être l'office et la spécialité du a coëffurier ». COLINS. — COLLABORATION (Li) AU THÉÂTRE. i 188 iiuelquea-uns des jolis chefs-d'œuvre de Técole musicale italienne, l'apparition et l'exécntioii de ces oinTages donnèrent lieu à des disputes passionnées, et le public se pnrt-agca en deux camps, dont l'un tenait i>our la, musique fran- çaise, l'autre ponr la musique italienne. Les amateurs de la première su tenaient du côté de la salle où ac trouvait la loge du roi, d'où le nom de coin du roi, taudis que leurs adversai- res se cantonnaient uucâtc opposé, au-dessotis de la loge de la reine, d'où celui de coin de la reitie, et k polémique ai-dcnte soutenue à ce sujet dans les journaus et dans nomlji'e de pam- phlets prit le nom de guerre des coins. (Voy. Guerre» iiusicalë.s.) COLINS, — Les Colins formaient, dans l'ancien répertoire de rOpéra-Comi(|ue , une classe de l'oies qui, sans constituer nn emploi à part, étiiient cependjint jusqu'à un certain point spécialisi's. C'était de jeunes amoureux villageois, naïfs et tendres, qui la plupart du temi>s s'u Pillaient Colin dans les piècus où on les voyait paraître, d'où vient qu'on leur en donnait le nom, comme, à la Comédie- Fran- çaise, on disait les Orispins ou les ^fascarilles. Hiehu fut le Colin le plus renommé de la Co- médie-Italienne. Aujourd'hui, ces rôles rentre- raient dans reniiildi des seeunds ténors, COLLABORATKUR. — L'un des auteurs d'une pièce faite [uir deux gu plusieurs éerî- vains. COLLABORATION- (La) AU THÉÂ- TRE. — Nous ne ferons ici ni l'historique ni la physiolot,'ie de la collaboration au théâtre. Cela nous mènerait trop loin. Nous nous bor- nerons à rapporter (juelques faits particuliers et curieux, <|uelques anecdotes caractéristiques touchant ce sujet intéressant. L'un des premiers, sinon le premier esemple de collaboration théâtrale que l'on connaisse en France, présente ce côté singulier qu'il s'applique à une tragédie. Le 24 mai li)75, l'Hôtel de Bourgogne donnait la première re- présentation d'une Iphiijénie due à la collabo- ration de deux écrivains, Leclerc et Coras, dont le dernier fut, on le sait, l'une des nom- breuses victimes de Boileau. Pour leur malheur. Racine avait donné son Iphigènie cinq mois aupara\*ant, ce qui fit que la leur n'obtint an- cun succès. Ils se disputèrent alors, et ce fut à qui des deux n'aurait point fait la pièce ; si bien qu'on fit courir à ce sujet l'épigramme sui\'aute, qui fnt précisément attribuée k liaciue : Entre Leclerc et son ami Coras, Tous deux auteurs rjmans de compagnie, N"a pas long teius s'ourdirent grands débats Sur le propos de leur Ijili'i/éiiie. Coras lui dit : i Lu pièce est de mon crû. » Leclerc répond : u Elle est mienne et non vCtrè. » Mais aussitùt que l'ouvrage a paru , riuK n'ont voulu l'avoir fuit l'un ni l'autre. Dans le genre sérieux et lorsqu'il s'agit d'd'uvrcs importantes, ayant une véi'itable va- leur littéraire, la collaboration est relativement rare. On en a des exemples cependant, et l'un des plus intéressants est certainement celui qni nous est offert par la Psyché de Corneille et Molière, dont un troisième collaborateur, Qui- nault, écrivit les vers destinés à la musique. Mais c'est surtout dans le genre léger, dans le vaudeville particulièrement, ([ue la collabora- tion a fait des siennes et produit des résultats parfois prodigieux. Au commencement du dix- liuitièmo siècle déjà un en voit les effets, et l'il- lustre auteur de O'il Blas et de Tvrcarei, Le- sage, fournisseur patenté des théâtres de la Foire, peut, grâce au systt'mc de la collabora- tion, dans l'espace de vingt-six ans, de 1712 à 1738, faire représenter, tant :i la Comédie-Ita- lienne qu'à rOiK'ra-Comiquc ou aux Marion- nettes, qualra-vingi-quinze pièces écrites en so- ciété avec Fuzelier et d'Omeval, quelques-unef avec Lafont, ou Piron.ou Autreau, ou Fro- maget. Nous sommes encore loin de la fécon- dité collaboratrice dont Scrilie donnera la preuves un siècle plus tard ; mais le fait vaui d'être mentionné. C'est surtout à partir de l'épofiue de la Ré volution et dt la création de nombreuses scènei consacrées an vaudev-illc, (|u'on put mesurer )f valeur de la collaboration. De nombreux duoi et trios se formèrent entre auteurs dramati ques, soit ponr compléter et nnir des tempéra ments divers, soit pour accélérer la besogne COLLABORATION (la) AU THÉÂTRE. 189 On vit alors les associations Piis, Barré et Ra- det, Désaugiers et Gentil (on disait de leura pièces que tout ce qui y était gentil était de Désaugiers), Merle et Bmzier, Ségur et Du- paty, Deschamps et Després, et bien, bien, bien d'autres. Plus tard, on eut Scribe et Mé- lesville (Scribe avait d'ailleurs cinquante colla- borateurs), de Leuven et Brunswick, Mélesville et Camaouche, Bayard et Dumanoir, Duma- noir et Clainille, Clairville et Jules Cordier, Duvert et Lauzanue, de Villeneuve et Langlé, que sais-je ? Mais la collaboration à deux ou à trois n'a rien que d'ordinaire, et n'oflFre que peu de f»its piquants. C'est lorsque la collabo- ration s'élargit qu'elle an*ive à produire des résultats singuliers. Piis, Barré et Radet se mirent en quatre en s'adjoignant Desfontaines, pour écrire quel- ques pièces de circonstance, entre autres la Vallée de Montmorency et le Retaur du ballon de Motisseaux. Le Pari était l'œuvre des trois derniers, auxquels s'étaient joints Deschamps et Després; ces cinq auteurs s'en associent cinq autres, Piis, Duault, Buhan, Bourgueil et Aubin-Desfougerais, ix)ur écrire la Fin du monde ou la Comète. Nous voyons au théâtre des Troubadours un mince vaudeville, Mon- sieur de Bièvre ou F Abus de T esprit j n'avoir pas moins de onze pères, annoncés ainsi dans le couplet final : L'ouvrage que vous avez applaudi , Citoyens, est de Dupaty. Aidé de ses amis. En voici la liste ouverte ; D'abord Luce, avec Sal verte Et Coriolis; De i)lu8 Creuzé , Gassicourt, Legouvé, Monvel fils, Longpérier... Je crois en oublier. Ah, vraiment, citoyens, c'est. C'est Alexandre et Chazet. • Ceci commence à se corser, Xous ne sommes pas au bout cependant. En 1811, lors de la mort de l'aimable chansonnier» académicien Laujon, on joua à sa mémoire un vaudeville, Laujon de retour à Vancien Caveau, auquel prirent part tous ses collègues du Caveau ; ils n'étaient pas moins de vingt-quatre : Barré, Brazier, Cadet-Gassicourt, Chazet, Coupart, Demautort, Désaugiers, Ducray-Duminil, Jouy, Desfontaines, Armand Gouffé, Jacque- hn, Francis, Longchamps, Dupaty, Moreau, Nioche de Tournay, Ouny-, Philippon de la Madelaine, Piis, Théaulon, Rougemont, Sal- verte et Radet. Vingt-quatre auteurs pour un acte de vau- deville, c'est déjà raisonnable. Quamnte-deux ans plus tard, en 1853, nous en trouvons vingt- huit pour signer une revue, les Moutons de Panurge, jouée aux Délassements-Comiques : J. Adenis, Arnault, Théodore Barrière, An- tony Béraud, Boyer, Clairville, Choler frères, Cogniard frères, Jules Cordier, Decombe- rousse, Decourcelle, Hostein, Dumanoir, Gabet frères, A. de Jallais, Judicis, Paul de Kock, de Léris, Ed. Martin, Albert Monnier, Ed. Plouvier, Ch. Potier, Salvador, Rimbaut et Samson. Enfin, une autre revue, la Tour de Babel, jouée aux Variétés en 1834:, était le fait de trente-six auteurs, parmi lesquels on comp- tait Alexandre Dumas, Mallian, Dumersan, les frères Cogniard, Dumanoir et Anicet-Bour- geois. Au point de vue des ouvmges l\Tiques, la collaboration entre poète et musicien est en quelque sorte forcée, car ce n'est jamais qu'à l'état d'exception qu'on rencontrera des com- positeurs écrivant les livTcts de leurs opéras. Si J.-J. Rousseau a fait ainsi pour le Devin de village, Mondon ville pour Daphnis et Akima- dure, Berton j^our Ponce de Léon, Lemière de Corvey pour les Deux Rivaux, Gnecco pour la Prova d'un opéra séria, Donizetti pour Bettly, M. Mermet pour Roland à Roncevaux et pour Jeanne d'Arc, M. Gounod pour sa Rédemption, M. Boito pour son Mefistofele; si Berlioz a écrit la plupart de ses poèmes dramatiques ou sym- phoniques, et Wagner tous ceux de ses opéras, se faisant ainsi leur propre collaborateur, ce ne sont là, malgré leur nombre, que des excep- tions qui confirment la règle. Mais un fait plus rare encore que celui-là, du moins aujourd'hui, c'est la collaboration entre musiciens. On en a pourtant des exem- ples. A la mort de Lully, on voit ses deux fils mettre en commun leurs minces talents pour perpétrer un mauvais opéra intitulé Zéphyre et Flore, Au dix-huitième siècle, deux musi- 190 COLLATION DES ROLES. — COLOMBINE. ciens distingiu*, Rcbel et Francœiir, qui fu- rent tous deux surintendants de la musique du roi et dont le premier fat directeur de l'Opéra, écrivirent une douzaine d'ouvrages représentés à ce théiître ; et, cliose singulière, aucun des deux n'a jamais rien produit seul. Plus tard, lorsque les gouvernements de Xapoléon I'"' et de Louis XVIII poussèrent Jusqu'à la manie l'habitude de faire représenter sur tous les tliéâ- tree des pièces de circonstance destinées à cé- lébrer tout évcnemeDt intéressant le souverain ou la dynastie : mariage, naissance, baptême, etc., on fut obligé, ces sortes d'ou^Tages devant être fabriqués très vite, d'associer ensemble plusieurs musiciens quand 11 s'ii^rissait, d'un opéra. C'est ainsi, [mur n'eu citer (|iie deux exemples, que Bayard à Jlf^thei fut l'a'uvre de Boieldicu, Chenibiui, Catel et Xicolo, et que rharamond fut i-i-nt par Hertnn, Boiel- dieu et Kreutzer. Pnrnii les collaborations vo- lontaires, on peut citer celles de Boieldieu et d'Herold {Charles de France), de Boieldieu et M^'^iail {Âiigéla), de Boieldieu et Clienibiui, {la Prisonnière), de Chenibini et Iféliul {Ejn- eure), etc. Peux faits de colIalK)ratii)n ti-ès nombreuse sont à mentionnei a I ictif det mu sicieus : le iircmier a ti-iit a un optra rc\olu tionnaire, le Congrh det Rots reprcscnte m théâtre Favai-t eu 17'J4 et dont la nnisi jne était écrite par liertou Bhsiu'! Clii.iuhni Dalayrac, Deshayes. Devienne, Gretri,, .Tadm, Kreutzer, Méhul, Solié et Triul fils; le second se rapporte à un ouvrage eu trois actes , Ui 3!ar- qttise de JîrinviVifrs, doimé à rOpér.i-Coniique en 1837, et dont le jtoème, dû à Scril)e et Oastil- lilazc, était mis en musique par Aulcr, Batton, Berton, Bliuigini, Boieldicu, ('arofaiCbenibini, Herold et Più'i'. li» collabomtion musiciile n'en reste itas moins un fait rare et, aujourd'lmi surtout, absolument exceptionnel, COLLATIOX DES ROLES. — Lorsqu'une pièce va entrer en répétition, et que la Icctm^e eu a été faite, par l'auteur ou i»ar son manda- taire, devant tous les artistes qui î-eront chargés de participer à son interj)rctation, un distribue les rôles il chacun de ceux-ci. Dès le lendemain, on procède à ce qu'on appelle la collation des rôles. C'est-à-dire qu'on lait une nouvelle lec- ture sur le manuscrit, lecture que, cette fois, chacun des artistes suit sur son rôle en ce qui le concerne, de façon à ÎJidiquer et à faire cor- riger les fautes qui auraient pu se glisser dans la copie et à établir la parfaite conformité du texte des rôles et de celui du manuscrit original. COIjOMBIXE. — C'est l'un des types de la comédie italienne. Il fut importé en France par la fille cadette du fameux Arlequin Domi- nique, Catherine Biancolelli, qui débuta avec un vif succès dans ce personnage, en 1(!83, tandis que sa sœur aînée débutait dans celui d'Isalwlle. Elle y fit preuve de tant de talent, que loi-s de la suppression de la première Comé- die-Italienne (l(itt7), comme elle avait épousé la Tliorillière, excellent acteur de la Comédie- yrançaise, on la pressa d'entrer à ce théâtre pour y tenir l'emploi des soubrettes, qui rentrait précisément dans le eanictère deCuîombiue; mais elle s'y rofiisa obstinément, et renonça au thi-àtre. De la Comérlic-Italienne, où Marivaux lui- même l'employa {dans sa seconde Surprise de tamour), le type de Colomhinc passa rapide- meut sur les théÂtrea de la Foire, et particn- lièremeut à l'Opéra-Comique, où ce i-ôle rencon- tra deiis interprètes d'nn talent exceptionnel, M'"" Maillard d'abord, pour qui Lesî^e éciivit un joli vaudeville intitulé CohmUne Arlequin, puis M'" de Liale, qui détrôna sa devancière et la fit oublier. Plus tard, le personnage sérail- lant et mutin de Colombin*. tuiigra sur les pe tites scènes de pmtoraime La devenue la fille de Cassandrt elle ctait inévitablement ccur tisée par Lcandre qn elle bernait ijoiirsumc par Pierrot, dint elle sejouiit et iimee p.u Arlequin, qu'elle payait de retour et qu'elle finissiiit toujours par épouser. COMBATS. — Il y a soixante ou qniitre- viugts ans, les théâtres dn boulevard, grands on petits, jouaient des niélodrames et des fée- ries à grand déploiement scénique, et ne jnan- . quaient pas d inscrire sur leurs affiches des mentions (^ui tiraient I ad dn public et affrian- daient ks spectateurs Les ( marelies », les c\olutioiis » lésa a nibats et lient toujours dt h partie et \oici comment le théâtre des Jeunes- Artistes annonçait une pièce iin]M>r- Uinte : « Arlequin à Maroc ou la Pyramide enchantée, folie-féerie en trois actes, sans en- tr'actes, à grand spectacle, avec des intermèdes imités du genre italien, et ornée de marches, combats, évolutions, cérémonies turques, tra- vestissements à vue, par JLJ.-B. Ha()dé, musi- que de H. Foignet fila. » Voici une indication de la pièce qui donne un échantillon d'un de ces coml)ats, et qui prouve que les petits théâ- tres ne se refusaient rien : — a La vedette tire un coup de pistolet. Aussitôt on voit un grand mouvement dans le camp. Les troupes ara- bes paraissent sur la montagne ; les troupes de Mahomet viennent occuper la plaine, l'ac- tion s'engage, la redoute fait jouer ses batte- ries, les canons de l'armée marocaine ripostent vigoureusement. Mêlée génémle ; bataille sur la montagne. Les Araljes incendient leurs tentes ; Mahomet, suivi de son peloton d'élite, poursuit les Arabes ; leur chef et trois des plus détenni- nés veulent se mesurer avec le Ohérlf et ses compagnons d'armes ; combat à huit et à toute outrance à la lueur des flambeaux et de l'in- cendie du camp, Mahomet va périr, Aricqnin lai sauve la vie par son courage et son adresse. f 192 COMBATS DE COQS. — COMÉDIE. I Le chef des Ani])e8 expire. Défaite totale des AraW. Tableau général. Désarmement sur la montagne. » Voilà ee que c'était qu'un combat à Paris, au théâtre des Jeunes- Artistes , en Tan de grâce 1804. CO^IBATS DE COQS. — On sait quelle est l'humeur l)elliqueuse des coqs, le courage et l'ardeur qu'ils déploient dans l'attaque et dans la défense, même contre un ennemi de beau- coup supi'îrieur ; entre eux ils sont impitoyables, et se livrent souvent des comhits îicharn('»s. De toute antiquité, l'homme s'est fait un plaisir cruel du siwctade de ces combats, de mettre deux cofis en présence, de les exciter et de les faire se ruer l'un sur l'autre juscpi'à ce que l'un, jmrfois tous deux, blessc^s, déchirés, pantelants, à lM>ut de forces et iierdant tout leur sang, tombassent l'un devant l'autre pour ne plus se relever. Très répandu chez les Orecs, et parti- culièrement chez les Uhodiens, l'usjige des comtots de coreux, et acharnc's au p(ânt de livrer comme enjeu non seulement tout leur argent, mais jusqu'à leurs femmes et leurs fil- les. En EurojK; même, les combats de co(js ont trouvé des amateurs et des propagateui-s ar- dents, surtout chez les Anglais, peuple cruel et froid qui a porté la lK>xe à la hauteur d'une institution et ([ui semble en vouloir faire un des éléments essentiels de la civilisation mo- derne: ici même nous trouvons un raffinement dans la cruauté, et les Anglais, afin de rendre plus «mglants et j)lus meurtriers les combats de coqs, annent les pattes de ces animaux d'é- jx'rons d'acier finement aiguisés, avec les(juels ils se font des blessures ternbles. Il est peut- être juste de dire pouitîint (jue cet amusement sauvage est aujourd'hui j)resa8 un tniité de ix)étique dramatique, nous n'insiste- rons pas sur ce point. Les premiers comiques grecs furent Eupo- lis, Cratinus et Aristophane, et les œuvres seules du dernier nous sont connues. A en ju- ger i>îir elles, la comédie n'était alors qu'une satire violente, s'attaipiant sans ménagement aux mœurs les plus pures et aux personnages les plus veitueux. La licence d'Aristophane amena les magistrats à interdire la représen- tation sur la scène de toute i)ersonne vivante. Les auteurs en furent quittes pour farder leurs conceptions scéniques, tout en leur laissimt une tmnsparence ornèrent à les imiter. Mais le génie de Plante et de Térence, (jui vinrent ensuite, nous est asaez connu ponr que nous puissions admirer commo ils le méritent ces grands écrivains. Les sièclea do barbarie qui suivirent la déca- dence de Rome furent un temps perdn pour tous les arts. En France, au quinzième siècle, le thè'itre essaie de bégayer avec les jeux des Confrères de la Passion et des Enfants-sans- COMÉDIE. 193 Souci ; mais, à paît l'admirable farce de TA- vocal Patelin, œuvTe de génie oclose au milieu de ces temps obscurs, cent ans et plus s'écou- leront avant que h. comédie véritable fasse en- tendre ses premiers essais réguliers. On assure que le Phtlus de Itonsard, traduit par lu d'Aristophane, est la première comédie en lan- gue française qui ait été représentée (1539). UolUrra, d'spréi k t&UleBii peint pu C. Cojpel Jodelle vient ensuite, qui produit en 1552 une comédie en vers de huit syllabes , Eugène ou la Rencontre. Puis on vit paraître les Gorrivaux, dont un jeune écrivain, Jean de la Taille, avait puisé le sujet daus l'Arioste, et qui est, dit-on, la première comédie en cinq actes et en prose qui ait VU le jour en France. L'auteur était fort jeune, puisqu'il mourut de la peste à vingt ans, et dans son proli^ue il s'exprimait ainsi, non sans quelque fierté : — « Il semble, Mes- DICIIONVAIRI DD THËATSE. sieurs, à vou^ voir assemblés en ce lien, que vous y soyez venus pour ouïr une comédie. Vraiment, voua ne serez point déçus de votre intention. Une comédie, pour certain ; vous y verrez non point une farce, ni une moralité. Xous ne nous amusons point eu chose ni si basse, ni si sotte, et qui ne montre qu'une pure ignorance de nos \ieux Français. Vous y verrez jouer une comédie faite au patron, à k mode et au portrait des anciens Grecs et Latins : une 194 COMÉDIE. comédie, dis-je, qui vous agréera plus que toutes (je le dis hardiment) les farces et les moralités qui furent oncques jouées en France. A.u8si avons-nous grand désir de bannir de ce royaume telles badineries et sottises, qui, comme amères épiceries, ne font «jue corrom- pre le goût de notre langue. )^ Les Corrivaux étaient joués en 1 5(52. Bientôt un autre écrivain, Jean de Larivey, se faisîiit jour et dotait notre théâtre des premières co- médies d'imagination qu'il ait entendues ; ces comédies, qui avaient pour titre le Laquais, les Esprits, les Écoliers, le Morfandu, la Veuve, furent représentées de 1 578 à 1 5><0. Nous tou- chons au moment décisif, et à l'époque bientôt glorieuse. Corneille paraît, et bien que sa pre- mière comédie, Méliie, donnée en l(î25,fût loin de faire prévoir le Menteur, elle était tel- lement supérieure à tout ce qui l'avait précé- dée qu'elle obtint un succès immense et mérita cet éloge de Fontenelle : — « Cette pièce est divine en la comparant à celles du temps. Le théâtre y est mieux entendu, le dialogue mieux tounié, les mouvements mieux conduits, et surtout il y règne un certain air assez noble , et la conversation des honnêtes gens n'y est pas mal représentée. » En même temps que Corneille paraissent Rotrou et Scudéry : mais il les laisse vit^ loin derrière lui, en donnant successivement la Veuve, la Galerie du Palais, la Suivante, la Place royaU, L'Illusion comique, et enfin ce chef- d'œuvre, le Menteur (lt)42)î Quelque? années s'écouleront enct^re, et la France étonnée veiTa surgir enfin le plus grand poète comique de tous les temps, celui qui la rend glorieuse entre toutes, et qui reste la plus pure et la plus com- plète émanation du génie national, !MolièreI Molière semble poser les dernières limites du genre de la comédie. Il est certain que jusqu'à ce jour on ne les a ni dépassées , ni même at- teintes de nouveau, a Molière, — a dit Picard, qui s'y connaissait, — porte l'art à sa perfec- tion, crée un genre , en marque la deniièVe li- mite par ses chefs-d'œu^Te, et semble ensevelir son secret avec lui. Sous la plume de cet homme divin, la comédie étend son domaine; une mo- mie élevée, une philosophie sublime, se mêlent pour la première fois aux fiots d'un comique inépuisable. Traits plaisants, pensées naïves, mots heureux, vers charmants qui naissent Sîms efforts et se gravent dans le cœur ou dans la mémoire, tout ce qui suffirait pour assurer la gloire d'im autre est son moindiv mérite. Mohère sait la nature 2>ar cœur. Sa critique est vive, mais elle est juste et vraie. Il ne décrit point le ridicule, il le met en action. Il lui suf- fit quehjuefois de ramener sous nos yeux une scène à laquelle nous n'avions pas prêté assez d'attention dans la vie : le poète semble ne se douter de rien, et c'est le spectateur (jui fait la critique. Son esprit vaste embrasse tous les temps. Une seule de ses bonnes conuKlies est l'histoire complète des ridicules de son siècle, et de ces travers qui tiennent plus profondé- ment au cceur humain et s'éternisent avec les génénitions. Dans ses farces les i>lus frivoles, on retrouve rol)sei'vateur philosophe. Toujours des ridicules, toujoure de la monde : il ne les cherche pas, ils viennent s'offrir d'eux-mêmes... Seul, il suffit pour donner à notre théâtre la prét'^minence dans l'art de la eomcxlie : et ce- pendant telle est notre richesse, «lue sans lui nous jx)urrions la disputer encore. »» Il ne faut pas, en effet, que récrasante sn- IXTiorité de ^lolière nous i*end(; injustes envere ceux qui, de près ou (h loin, (jut tenté de mar- cher sur ses tnices. Tartuffe, le Misuuthroj)e, l'Ecole des Femmes, V Avare, le llourijt'ois gen- tilhomme, les Fourberies ds Scapin , V École des Maris, le Médecin malt/ré lui, et tant d'autres, sont sans doute des modèles désesi)énints : mais bien des poètes de second et de troisième ordre ont droit à notre sympathie. Parmi ses con- tcmponiins même, et Sîins parler de Racine, (pli a fait une brillante incursion dans le genre comique avec les Plaideurs, on ne saurait ou- blier Quinault, ScaiTon, Boursault, Uauteroche, Montfleury, auxquels succède immédiat<»ment Regnard, celui qui se rapproche le plus de Mo- lière, et qui se fait une place à part dans notre théâtre, grâce au Joueur, au Distrait, aux Fo- lies amoureuses, aux Ménechmes et au Légataire universel. Viennent ensuite Dufresny, Dancourt, Lc- sage et son Tur caret. Destouches avec le Glo- rieux, le Dissipateur, le Philosophe marié ; puis la Chaussée, ^larivaux, Domt, Gresset, Piron, COMEDIE A ARIETTES. — COMEniB-BALLET. 195 la Xoue, Pavart, Sedaine, puis encore Dide- rot, et enfin Beaumarchais, qui, avec le Bar- hier de SévilU et fe Jfaiiage de Figaro, porte lu comédie d'intrigue à son plus haut point de splendeur. La fin du dis-huitième siècle voit paraître Andrieux, Collin d'Harleville, Dnina- niant, Fabrc d'É^liintine, auxquels Tiennent Ijientût 80 joindre l'icartl, Etienne, Alexandre Dnval, Pigault- Lebrun. Dana la première moi- tié du dis-neuvième, la comédie se recommande de Casimir Dclavifrne, de Scribe. d'Alexandre Dumas, et ceux-ci ont pour successeurs toute une lignée d'écrivains auixTieurs, f!eorp;e Sand, 5IM. Emile Augier, Alexandre Dumas lila, Octiivc Feuillet, Victorien Mardou... Ces deniiern noms suffisent à nous prouver iciir, de Regnud (kU IV, ijue la comédie n'est point morte en France, et qu'elle l'esté eu bonnes mains. COMÉDIE A ARIETTES. — C'est li «pialification que l'on donnait, dans leur ori- îîine, aux pièces mêlées de musique nouvelle que nous désignons aujourd'hui sous le nom d'opéras-comiquea.Acette époque, on nedounait ce nom d'opêra-comique ([u'aux parodies d'o- péms. (Voy. Oi'ÉR.v-cosiiayer à leurs aînca de l'Hôtel de Bourgogne une redevance d'un t-cu tournois pour chacune de leuns repi-ésento- tions. Leur succè'S n'en fut pas moins vif à l'Hôtel d'Ai^nt, aussi bien que dans une autre salle où ils se transférèrent quelques années plus tard, et qui était construite, dit un chro- niqueur, 1 dans un jeu de i«iulnie, au-dessus de l'égont de la \-ieille me du Temple ». Ce même thisitre fut encore, un peu plus tard, transféré rue Miehel-Io-Comte. Son succès con- tinuait d'ailleure, et ce n'est pas ici le lien de parler de différents essais, demeurés infruc- tueux, de théâtres Bucc'essivement établis sur COMEDIE-FRANÇAISE (la). divcnt pointa Oi> Www lui fut accordée, A la mort rie Molière, Lully, 04, les fff/(?«# quittaient de nouveau la France. Vers 1614, une autre troupe, U Coniici Fedeli, venait à son tour à Paris, appelcxî par la reine Marie de Mcnlicis. Celle-ci était dirigée par Giovanbattista Andreini, fils des deux artistes dont il a été question plus haut, et demeura jusque vers 1618, après quoi elle re- tourna en Italie. Elle revint en 1621, alla pas- ser en Italie l'été de 1623, fut de retour avant la fin de cette année, et s'éloigna de nouveau en 1625. Ces comédiens revinrent-ils encore en France après cette épocpie ? On ne sait trop. Mais un des leurs, nommé Nicolo Barbieri, qui semble avoir inventé le caractère de Beltrame, et qui s'était séparé d'eux, forma en Italie une troupe nouvelle avec laquelle il vint à Paris, où il fut fort bien reçu par Louis XIIT. Tous ces chefs de troupe étaient non seulement d'excellents acteurs, mais des auteurs distin- Covicllo. IJoUosfiuirdo. — Fricasso. gués : Niculu Barlneri ne démentit pas, sous ce double rapport, les stnivenirs qu'avaient laissés Fabritio di Furnaris et les deux An- dreini. Combien de temps Barbieri resta-t-il en France? Il est ditficile de le dire, aussi bien que de signaler les nombreuses compagnies de comédiens italiens qui se ' pressèrent à Paris après la mort de Richelieu et de Louis XIII, sous le ministcTe de Mazarin. Mais on ne sau- rait passer sous silence celle qui, comme les premiers Gelosi, vint s'installer au Petit-Bour- bon, en 1645. Celle-là était aussi remarciuable par le nombre que par le talent de ses artistes, et, avec la comédie, elle nous apportait, sinon l'opéra proprement dit, du moins le modèle de ces pièces à musique et k à machines » qui devaient être imitées chez nous avec tant de succès et émerveiller le public pendant plus de trente ans. Ces nouve^vux venus étaient dirigés par un COMÉDIE-ITALIENNE (la). 205 artiste nommé Giuseppe Bianchi, qui jouait le Capitan, et le meilleur d'entre eux était ce Tiberio Fiorilli, qui rendit fameux chez nous le personnage de Scaramouche. Auprès de lui on trouvait Marco Romagnesi, qui jouait les amoureux sous le nom d'Oratio ; la femme de celui-ci, qui était la fille du directeur, Brigida Guatsetto. — Mestolino Bianchi, et qui remplissuit les rôles d'amou- reuses sous celui d'Aurelia ; Domenico Loca- telli, qui faisait le personnage de Trivelin. Quant aux chanteuses, on cite surtout troLs femmes charmantes douées de voix admirables, Gabriella Locatelli, ^largarita Bcrtolazzi et Giulia Gabrielli. Pour ce qui est du machiniste- décorateur, artiste dont le rôle eu cette troupe I C'est vers la fin de 1045 que débuta cette troupe; elle quitta Paris, sans doute efiFrayée par les approches de la Fronde, vers le com- mencement de 1648, puis revint lorsque la tranquillité fut rétablie, en 1(153, avec quelques nouveaux sujets. Elle s'installa de nouveau au Petit-Bourbon, dont elle reprit possession le 10 août de cette dernière année. A partir de ce moment, et grâce surtout à son excellent Sca- ramouche, que Louis XIV affectionnait tout particulièrement et qui le faisait rire aux éclats, elle obtint d'énormes succès et jouit d'une vogue incontestée. Elle continuait néiinmoins de jouer des pièces à machines, et Loret nous le raj)pelle dans uue des gazettes de sa Jfiize historique (à la date du 23 mars 1G58) : Ceux qui font grand cas des ppectacles Qui pourroient passer pour miracles , 11 faut qu'ils aillent tout de bon En l'Hôtel du Petit-Bourbon, Où, selon l'opinion mienne, La grande troupe italienne Du seigneur Torel assisté? , Font voir de telles raretés Par le moyen de la machine, Que de Paris jusqu'à la Chine On ne peut rien voir, maintenant, Si pompeux ni si surprenant. Des ballets au nombre de quatre, Douze changements de théâtre. Des hydres, dragons et démons, Des mers , des forêts et des monts , Des décorations brillantes, Des musiques plus que charmantes, De superbes habillements, Glaii Farina. — Fraucijchina. — Mezzetin. était fort important, c'était Giacomo Torelli, peintre et mécanicien d'une valeur exception- nelle. Parmi les pièces jouées par la troupe de Giuseppe Bianchi, il faut surtout signaler la Finta Pazza (Ja Folk supposée), pièce mêlée de chants, de danses, de déclamation, de mu- sique, ornée de machines et de décorations somptueuses, qui, si elle n'amusa pas tout le monde (M™^ de Motteville entre autres, qui en parle avec quelque souci), fit néanmoins révolu- tion par le genre nouveau qu'elle importait en France. La grâce et les traits enchanteurs Des actrices et des acteurs, Flattant les yeux et les oreilles , Ne font que le quart des merveilles (Et j'en jure, foi de mortel) Que l'on voit au sus-dit hôtel. C'est en cette année 1658 que Molière, re- venant de province, arrivait à Paris dans le but de s'y fixer et de renouveler, avec plus de bonheur qu'il n'en avait eu d'abord, les exploits de l'Illustre Théâtre. Il obtient la protection de Monsieur, frère du roi , et le souverain lui accorde la faculté de partager avec les Italiens le théâtre du Petit-Bourbon ; moyennant une in- demnité de 1,500 livres payée à ceux-ci, Mo- 2u6 lîère, en effet, achètera le droit tle jouer les lundis, mardis, jeudis et samedis, tandis i|iie Bos L-onfrères italiens cim serreront leurs jours ordinaires de jeu : diinanclic, mercredi et ven- dredi. C'est alors, dit-on, que Moliéi-e t'tiidia Bérieuscment et les jiièces jouées pur les Ita- liens, et le jeu plein de tideiit, d'ardeur et de vérité de leur meilleur romique, Fiorilli-Scara- OOIIEDIE-ITALIEXXE (la). qui tlt qu'un iila(;ii plus tai-d le e viiiei au lnw du ^xirtrait di- ce Ce Scanimiiiiclie était d'iiilleiirs, p;tnii[-il, nu eouié'dieu iniuiitulilo et un artiste de race. La cour et la ville en étaient férues, et ce qui le pruuve, c'e.st rnui^rtaiiee c|ue lut donne eu toute (Rfasion le j^izetier I.uR't, qui était iik-rs le iNtite-jKimles et IWIrn du bejui monde et des entuurs ifiytiux. Ncaraiiioucheayani, quitté l'ari* pour faire uti voyatre in Italie, et le liruil ayant cmiru qu'il était mort en iniversant le Riiôiie. hiiret lui eousacn- tmite nue déplura- liouAiui^mMi/î'/ii^hrique du 1 1 octuLre 1 il.")'.!, en ftii«iui suivre i-etto ék-^'ie d'une épitaplie IKVtiquo. Puis, lii iKuivelle ayant été démentie, Lon-t, dans sre), entonne le miHle joyeux i>our ressusciter son Iu'tos iivec un liruit de nivlots s"iii)n's et reten- tissants; le nuirccati \'aut d'être ivproiluii : IViit^ et irr.iiiJi. jciinoa ci >ii.'iii. ilOLt le tem périment joycui Aime,pri-s<|U';iiilaiil qu'iiii cinpiii;. 1.1-* jicivoniiajrcs i|iii font riti'. FurBei-Tona de vos dùi.laisirs Silna prucdre c.issc ni rhubarbe ; Kc roiis .irracLei plus la barbe, ïrettei tous vos ekigrios & eac. Ko rous plombez plus l'eatomnc, HtifPiti[rnei plua votre jone, ApiKiiKei. vos cris superflus. No pestei , ne rognoncz plas, {.■omi ■ de e: X'^u-iTiiBui plus ilttine Atropos . lin-f. innutrcz par de (fniapruii»* Que vous avci rftuie ravie. Sciraniouclie ctit encore ou vie. Et cet acculent supposé On a vu ks nombrenses visites que des ciauédieus italiens de tmit ^'cnre firent ii Puris à i«iitir de r.iiiui'O 157o. Ce n'est cependant qu'au Iwnt de jnvs d'un siirle. c'wt-à-dire cd liifî", qu'ils s'y inst;illén:iit délinitivement, ot un de leui-s liistorieus le dit eviu'esst-ment : — " I! est néeessiiiiTj de savoir qu'avant l'annrâ H;iio. lii ti-oiipe (les c'iniédieiis italiens n'étoît luis stidile à Paris ; on fai.-^iit veuir ces eomù- dit-ns, on payoit li-ur voya^re, ils rcstoient à Paris ou à la suit-i' de la conr, et après quel- ques anuifs on leur donnoil nue somme pour sjitisfaiti.' aux frais de lenr irtinir. C'est un fait ijui m'a M- confirmé pur 51. lîii.'ColHmi le l'ièrc, qui le teuoit de i.'os coiné-diens d'Italie, dont les jxTcs et mères ou pareils ctoieiit aussi venus en France, et iju'Am'elia et Scummouche, en- tr'autn-B, avoieut fait iiliiDieiii-s fuis le ^■oyage. » Les Italiens étaient depuis six ans en France orsqiie, au mois de juillet l(;.'>'.i, ils retournèrent liez enx. Lenr absi'uce ne devait [ms être lon- jrue, et une aiiui-o s'i'iait à [leine écoulé* qu'ils ifvetiaient se faire apjiiaudir des Parisiens. Leur irou|>e s'était aujitnontée de qucli|ue8 Ijonncs iwrues, et la protection personnelle et irè's elFective de Louis Xl\ les cnnaja'a ù s'ina- COMÉDIE-ITALIENNE (la). 207 taller Cette fois solidement. Le roi ayant jugé [ bon, où Molière et les siens étaient restés, et il proposd> faire démolir la salle du Pcft Bour | ayant permis an grand lonnedeB"tnirrdans In Coméaic-Italknnc. reatauii iftl* U> m;n do Doinlnlqae, Ju(, Dons le fund. on Tult la veure àp Cumlnlijiie. plfumnt dcTaiit 1c touibcBU de buii (puui. (HepraLuit d'après le grjjid Alzuanacli hiatorliiiie pour J>f3, iiiMit pu Vient Landrjr.) celle dn Palais-Royal, il antoriBa en même 1 lui, à la condition qu'ils lui l'estitucraienb la temps lea Italiens à partager cette salle avec | somme de l.juO livres qu'ils avaient reçue de î SOS lui quelques auncee auparavant, plus 'iiK) li\i-e8, afin (1g paver leur part des frais d'iiiBtallatioii qu'il avait faits. Mais il les dédommafi^ biou- tôt de ce léger sacrifice en leur accordant une subvention annuelle de 15,00» li\Tes, ce qui était un gros chiffre pour riipoque. Les deux plus fameux acteurs de la troupe étaient encore à ce moment Tilwrio Fiorilli (Sciiramonche) et la Réduisante Brigida Blan- chi (Aurélia) ; ils retrouvèrent tout leur succès, bien ([Ue ni l'an ni l'autre ue fût plus de la pre- mière jeunesse, Fiorilli étant alors â},i' de Ti:; sus. et la Bianclii de 47; mais tous ort(.' si loin que lui la Icgi'retc, et en même temps la force des sauts pantomimes. A l'âge de plus de (|uatre-Tiiigt8 ans, on l'a vu donner, dans des sci'nes de théâtre, on soufflet avec le pied, avec une dextérité admirable. » La troupe italienne, à cette époijue, comprc- iinitdbc personnes, nombre indispensable, ainsi que dans sa Vie de Seammouehe nous l'apprenc Mezzetin, en les dénombrant ainsi : trois fem- mes, dont deux pour le sérieux et une pour 1« comique (c'était Brigida Blanchi, dite Aurélia. Ursula Cortezza, dite Eularia, et Patrict Adami, dite Dianiantine); un Scaramoncht napolitain (Fiorilli): un Pantalon vénitien (Turi) ; un Docteur bolonais, tV notlor Baloardt (Oostantino Lolli) ; un Trivclin (Locatelli) i enfin deux amoureux, Vakrio (Hendiiielli), e( Ottavio (Andréa Zanotti). Tons cca acteun étaient excellents, et ils enehant«'rent tellement les Parisiens, Scaramouche en tête, que pluï d'une fois, dans les cnnimcncenients, Molière eut à pâtir de leur Kucd-s. 11 en profita pool les étudier de plus pii-s, et d'ailleurs il les fré- quentait lieauc'Dup et était ave^- eux en relationi très ciirdiales. ainsi que Palaprat le constate en parlani d'un i>eiutru italien nommé Vario : — « Vario, venu de Florence à l'arls, n'y avoit [MIS été plutùt élably. (|u'il rtoit devenu grand ami, cousin, camarade et coni{x.'re de tous lei cxir-llens ai'letii's de la tre italienne de ce tenis-là ; cllu jouoit au l'alais-Iioval et avoit lee joure man|ués »ur le niênie thiNiti'e avec la troujte de Molière. Ce grand cnmédicn, et mille fois encore plus grand auteur, vivoit d'nne étroite familiarité avec leM Italiens, jiarcc quelle étoient bons acteurs et fort hunnéles gens : il y en avoit toujoui-s deux on tiiiis des meilleors à nos soujun^. ^ilolièii: en éioit souvent aussi, mais non piis aussi souvent que nous le souhai- tions, et mademoiselle Slolièi-e [sa femme] en- core moins souvent que lui. » lies Italiens demeuri-rent avec Molière au Palais-Koyaljusqn usa mort (Ii:7ît).LouiitXIV ayant alors jugé ii propos d*at«order cette salle à Lully, et de réunir la troujw de Molière à celle du Marais eu les envoyant occuper la salle de la me (îuénégaud, il di'-eida en même temps i]ue les coméKliens italiens suivraient leurs com- jjrtgnons français dîins c-ette nouvelle demeure. Puis, Iors(iu'en KiHn le roi, ne voulant plus avoir qu'tine troupe française, envoya les comé- dieua de l'IIotel de Bourgogne fondre à leur tour leur trouiw avec celle de la nie (Iuénégaud, il aceoRla leur salle aux Italiens, (.'cux-ci, dé- sonnais complètement chez eux, profitèrent de la nouvelle situation qui leur était faite jKiur COMÉDIE-ITALIENNE (la). 209 doubler le nombre de leurs représentations : ils n'avaient jamais joué jusqu'alors que trois fois par semaine ; à partir de ce moment ils jouèrent tous les jours, à l'exception du vendredi. Jus- qu'en 1097, époque où ils furent chassés de France, comme on le verra plus loin, leur suc- cès ne se démentit point, grâce au soin qu'ils prenaient de compléter et d'améliorer sans cesse leur personnel. Chaque nouveau venu créait un tjrpe ou adoptait, pour le théûtre, un nom de personnage qu'il ne quittait guère; aussi ces comédiens étaient- ils plus connus ainsi que sous leur nom véritable , que parfois le public ignorait toujours, ainsi qu'il arriva pour plu- sieurs d'entre eux, particulièrement celui qui vint ici jouer le rôle de Polichinelle. Parmi tous ces excellents comédiens, il faut surtout citer Jean Gherardi (Flautin) et son fils Eva- riste Gherardi, qui succéda à Dominique dans le rôle d'Arlequin ; Marie Biancolelli (Isabelle); Catherine Biancolelli (Colombine) ; Komagnesi (Cinthio) ; Gératon (Pierrot) ; Joseph Tortoriti (Pascariel) ; Bartolomeo Ranieri (Aurelio) ; et Jean-Baptiste Constantini (Ottavio). IVlais le plus fameux d'entre tous fut cet excellent Do- minique, le plus merveilleux Arlequin (Voy. ce mot) qu'ait connu la France, Dominique, dont la mort fut pour ses camarades un coup si funeste qu'ils restèrent un mois entier sans jouer, et qu'au bout de ce temps ils firent pla- carder dans Paris une afhche ainsi conçue : — 88. Dans l'impos- sibilité de réparer la perte que nous avons faite, nous vous offrirons tout ce que notre applica- tion et nos soins nous ont pu fournir de meil- leur. Apportez un peu d'indulgence, et soyez persuadés que nous n'obmettrons rien de tout ce qui peut contribuer à votre plaisir. )) Dominique, ce comédien merveilleux, dont la perte provoquait une manifestation si tou- chante, avait bien droit à de tels regrets. Non seulement son talent incomparable avait, plus que tout autre, contribué au succès de son théâtre, mais, dans une circonstance très déli- DICTIONNAIRE DU THÉÂTRE. cate, sa finesse et sa présence d'esprit avaient sauvé ses compagnons d'un véritable danger en leur permettant, par une sorte de transfor- mation de leur genre , de satisfaire aux goûts du public et de lui jouer des pièces françaises. On va voir en quelles circonstances. Déjà il était arrivé ce (ju'on devait prévoir. C'est que nos Italiens, accoutumés de jouer devant un public français et se livrant à leur improvisation ordinaire, faisaient de temps en temps des incursions dans le domaine de notre langue. C'était des plaisanteries , des lazzi d'un genre particulier, dans lesquels des mots français se glissaient dans des phrases itahen- nes, et amenaient une sort<î de jargon franco- italien (jui excitait le rire des sj^ectateurs. Puis un acteur parlait en italien, un autre répondait en français, une phrase commencé*e dans une langue se terminait dans l'autre, on interrom- pait le dialogue italien pour entonner une chan- son française, bref une transformatioîi se pré- parait, et l'on sentait bien (]ue petit k petit le réi)ertoire allait se modifier sensiblement, et que I)rogre8sivement les pièces italiennes finiraient par fa^re place aux pièces françaises. Mais la Comédie-Française ne voyait pas sans quelque inquiétude cette modihcation qui se j)réparait dans les allures de sa rivale, et elle songeait à entraver des empiétements qu'elle jugeait, à tort ou à raison, dangereux pour son avenir et sa prospérité. Elle adressa donc ses doléances au roi, qui voulut lui-même être juge du différend et décida qu'il entendrait le plai- doyer de l'un et de l'autre théâtre. (Chacun de ceux-ci députa, pour se défendre auprès du sou- verain, son acteur le plus fameux : ce fut Ba- ron pour la Comédie- Française, Dominique pour la Comédie-Ttaliemie. En sa qualité de plaignant. Baron parla le premier et soutint sa cause avec chaleur, énumérant toutes les rai- sons qui pouvaient justifier la réclamation qu'il était chargé de formuler et erai)écher les comé- diens italiens d'employer la langue française. Quand il eut fini , le roi donna la parole à Do- minique pour entendre sa réplique. Celui-ci, sans paraître songer à mal, s'écria tout d'a- l)ord : « Sire, comment parlerai-je ? — Parle comme tu voudras, lui répond le roi. — Il ne m'en faut pas davantage, réplique Domi- u 210 COMÉDIE-ITALIENNE (la). nique; j'ai gagné mon procès. » Louis XI Y sourit (le la finesse de l'Arlequin, et reprit : « Ma foi, ce qui est dit est dit ; je n'en revien- drai pas. » Les Comédiens-Italiens ne tardèrent pas à profiter largement de la nouvelle faveur (|u'ils tenaient du monarcjne. A partir de ce moment, ils se mirent à joner des pièces entièrement françaises, que nos auteurs, à commencer par Regnard et Dufresny, ne se firent pas prier pour écrii*e à leur intention. C'est ainsi (jue Regnard leur donna successivement h Divorce, la Des- cente de Mezzetin aux Enfers ^ Arlequin homme à bonnes fortmies , les Filles errimks, la Co- quelle, la Naissaïu^c (VAmacUs; (ju'il écrivit poui' eux avec Dufresny Ui^ Chinois, la lia- guelle de Vulcaiti, h Foire Sainl-Germain, les Momies d'Eyyple; «lUc Dufresny fit jouer seul r Opéra de campagne, V Union des deux Opéras, les Adieux des officiers, les Mal assorlis, le Dépari des comédiens italiens, Atlendez-moisous forme, etc., etc. Puis ce fut Palai)rat, et Fatou- ville, et Lenoble, et Mongin, et Delosme de Montchenay, et Brugière de Barante, et d'au- tres encore, i\\\i se firent les fournisseurs de la Comédie-Italienne ainsi transformée et dont les succès allaient toujours croissant. Pourtant une catastrophe approchait, dont on n'a jamais hicn su la cause, mais qu'un attribue à une imprudence uudacieuse de nos Itîiliens, (pli finissaient par se croire tout })er- mis. Saint-Simon, dans ses Jfémoires, rapporte ainsi l'aventure. Selon lui , les afi^-uî-s italiens s'étaient avisés « de jouer une pièce (]ui s'a]>pe- lait la Fausse Prude, où M°**' de ^laintenon fut aisément reconnue. Tout le monde y courut ; imiis après trois ou quatre représentations qu'ils donnèrent de suite parce (pie le gain les y en- gagea, ils eurent ordre de fermer leur théâtre et de vider le royaume en un mois. Cela fit grand bruit, et, si ccm comédiens y perdirent leur établissement par leur hardiesse et leur folie, celle qui les fit chasser n'y gagna pas par la licence avec laquelle ce ridicule événement donna lieu d'en parler. )> Saint-Simon, on le sait, était généralement bien informé; ici, tou- tefois, son opinion a été combattue, sans (ju'on ait, il est \Tai, fait connaître une autre cause à la détermination violente prise par Louis XIV au sujet des comédiens italiens. Voici ce que disent sur cropos de les garder à son service. Voici simplement ce qui se passa lors de la sup- pression du théâtre et de la troupe italienne. Que ce fût pjir leur faute ou par celle des circonstances, les Italiens durent d(''guerpir, et tant que ^écut Louis XIV, ils restèrent impi- t<>yablement proscrits. Mais des que ce prince fiit mort, le régent, qui, paniit-il, aimait beau- coup leur art, scuigea aux moyens de ramener à Paris une Ixmuc troupe italienne, (pii-arriva en 171 (>. , par une pièce intitulée VInganmfortunato. Ce fut un véritable événe- mentdans Paris, la recette se monta à 4,068 li- ^Tcs, et le succès fut très grand (1). Peu de (1) Les comédians italiens étaient très leligieoi. La première mention port^ sur le registre quotidien de ceui-ei était unsi conçne : * Au nom da Dion, de la joui-s après, le théâtre de l'Hôtel de Bourgogne ayant été réparé, la troupe italienne en reprit possession, le 1''^ juin, par une représentation de la Folle supi>osée. Ce|}en(Iant, ou s'était déshabitué en France du genre italien, et les nouveaux venus, malgré leurs efforts, avaient beaucoup de peine, une fois le premier élan de cmiosité passé, à fixer Yierge Mnrie, de ^aint Frai TUturmee Surpriie itlngau commencé le 18 D 212 COMÉDIÈ-ITALIEXNE (la). l'attention du public. L'abbé de Laporte, dans ses Anecdotes dramafiques, nous fait connaître ainsi la situation et nous apprend de quelle fa- çon les comédiens ramenèrent à eux les specta- teurs devenus indifférents : Lorsque les nouveaux comédiens arrivèrent à Paris, dix-neuf ans après que leurs prédéceseeurs eurent quitté leur théâtre , ils ne jouèrent , pendant quelque tems, que des pièces toutes italiennes. Mais les dames, qui d'abord avoient paru vouloir apprendre cette langue , ne l'apprirent pas , et ces- sèrent d'aller à la Comédie. Les hommes ne les trouvant point, n'y ^'inrent plus. Les Italiens sen- tant la nécessité? des pièces f rançoises , eurent re- cours pour cela à l'ancien théâtre; mais ce qui avoit fait plaisir autrefois, n'en faisoit plus alors, et ils furent plusieurs fois sur le point de retour- ner en leur pays et d'abandonner Paris pour tou- jours. Voici le discours que fit au parteiTe celui qui remplissoit alors le rôle d'Arlequin. On y voit le zèle que ces comédiens ont toujours eu pour sa- tisfaire le public , et les raisons qui rendoient leurs efforts inutiles : tf Messieurs, disoit Arlequin, on me fait jouer toutes sortes de rôles; je sens que dans beaucoup je dois vous déplaire. Le balourd de la veille n'est plus le même homme le lendemain , et parle esprit et morale. J'admire avec quelle bonté vous suppor- tez toutes ces disparates ; heureux si votre indul- gence s'étendoit jusqu'à mes camarades, et si je pouvois vous réchauffer pour nous! Deux choses vous dégoûtent , nos défauts et ceux de nos pièces. Pour ce qui nous regarde , je vous prie de songer que nous sommes des étrangers , réduits, pour vous plaire, à nous oublier nous-mêmes. Nouveau lan- gage, nouveau genre de spectacles, nouvelles mœurs. Nos pièces originales plaisent aux connois- seurs, mais les connoisseurs ne viennent point les entendre. Les dames (et sans elles tout languit), les dames, contentes de plaire dans leur langue naturelle, ne parlent ni n'entendent la nôtre : comment nous aîmeroient-elles ? Quelque difficile qu'il soit de se défaire des préjugés de l'enfance et de l'éducation , notre zèle pour votre service nous encourage , et pour peu que vous nous mettiez en état de persévérance, nous espérons devenir, non d'excellens acteurs, mais moins ridicules à vos yeux , peut-être supportables. A l'égard de nos piè- ces , je ne puis trop envier le bonheur de nos pré- décesseurs , qui vous ont attirés et amusés avec les mêmes scènes qui, remises aujourd'hui, vous en- nuient, et dont vous pouvez à j>eine soutenir la lecture. Le goût des spectacteurs est changé et I perfectionné : pourquoi celui des auteurs ne Test -il pas de même ? Vous voulez (et vous avez raison) qu'il y ait dans une comédie du jeu, de l'action, des mœurs, de l'esprit et du sentiment ; en un mot, qu'une comédie soit un ragoût délicat , où rien ne domine, où tout se fasse sentir. Plus à plaindre en- core que les auteurs , nous sommes responsables et de ce qu'ils nous font dire et de la manière dont nous le disons. J'appelle de cette rigueur à votre équité : mesurez votre indulgence sur nos efforts; nous les redoublerons tous les jours. En nous protégeant, vous vous préparez, dans nos enfans, de jeunes acteurs qui , nés parmi vous , qui , formés pour ainsi dire dans votre goût, auront peut-être un jour le bonheur de mériter vos applaudissemens. Quel que puisse être leur succès, ils n'auront jamais pour vous plus de zèle et plus de respect que leurs pères. » On voit que la situation des comédiens ita- liens était difficile. La langue italienne, fort en usage à la cour, et par conséquent dans la haute société, à réj:)oque des reines Catherine et Ma- rie de Médicis, était toml)ée en désuétude, et le public, ne la comprenant plus, ne prenait plus d'intérêt à un si)ectacle auquel elle servait de base. D'autre part, notre théâtre s'était formé , t^agnait chaque jour en importance, et les piè- ces françaises écrites vingt ou trente ans aupa- ravant ix>ur les anciens acteurs italiens n'of- raient plus aucun attrait aux spectateurs. A tout prix il fallait du nouveau, les comédiens le comprirent, et ils s'ingénièrent à découATir des auteurs qui consentissent à leur écrire des piè- ces dans lesquelles serait autant que possible conservé le caractère propre à chacun d'entre eux et aux lypea qu'ils représentiiient. La transformation offrait dos difficultés, et ne fut pas l'œuvi-e d'un jour : c'était , en réalité, une îiouvelle scène française qui se fondait, avec des acteure étrangers, et qui devait offrir une sorte de mélange de larb dos doux jxiys. Le premier essai d'une nouvelle pièce fran- çaise fut cependant très heureux , et le succès de cette pièce fut considérable, bien qu'elle fût l'aMUTe d'un débutant, Jacciues Autreau, qui n'était encore connu que comme peintre. C'était une comédie en trois actes et un prologue, le Port'à'V Anglais , accompagnée do diveitisse- ments dont la musique avait été écrite par ce compositeur charmant, Joseph Mouret, qu'on COMEDIE-ITAL'IENKE (la). 213 avait si jnBtement gumommé a le musicien des Grâces, s Le Porl-à-V Amjïaia fnt représenté le 25 avril 1718. « C'est la première pièce fran- çoisc, dit an annaliste, qui ait été jouée sur le nouveau Théâtre-Italien et la première de la composition de Autreau, Le merveilJeux succès qu'elle eut fixa à Paris ces comédiens, qui mé- ditaient leur retour eu Italie, parce que leur théâtre était devenu désert par l'épuisement de leurs pièces italiennes, plusieurs fois reprises, et dont d'ailleurs peu de personnes se sou- ciaient, faute de les entendre. » Ce premier résultat étiiit encouraf^eant. IyCS Italiens persistèrent dans leur volonté de jouer à l'avenir surtout des pièces françaises, et dans ce but attirèrent à eus les auteurs. Parmi ceux qu'ils réussirent à faire travailler pour leur théâtre, il faut mentionner Delisie', Avisse, D'Alençon, Jolly, Saint-Foix, Desportes, Fii- zelier, Gueulette, Fagan, D'Allainval, Boau- charape, et plus tard Marivaux, de Boissy, Fa- vart, Guyot de MeiTille, Chevrier et autres. Les commencements, toutefois, il faut le répé- ter, furent difficiles, et il fallut que dans les moments de crise quelques-uns même de leurs acteurs, qui avaient déjà fait leurs preuves sous ce rapport, vinssent en aide à hi maison commune en brochant à la hâte quelques pièces qui pussent renouveler l'affiche et réveiller l'attentiou des spectateurs. Trois d'entre eux surtout, Riccoboni, qui avait formé la troupe, Dominique, fils de l'ancien Arlequin, et Roma- wnesi, qui s'y étaient venus joindre, se signalè- rent de cette façon, et A'oici ce que dit un biographe de ce dernier : ^ n Romagnesi a beaucoup contribué à soutenir son théâtre, et c'est là la cause de la précipitation avec laquelle il étoit obligé de travailler, lorsque, faute de nouveautés, ce môme thwitre languissoit par la disette des s]>ectateurs. Il tâchoît d'en ramener par quelques pièces nouvelles, qu'il Jic se dou- noit jMS le temps do iierfectionner. Il composoît souvent en société avec deux ou trois amis, tels que Riccoboni et Dominique. Dans huit jours il fournissoit une pièce aux comédiens, et surtout une parodie, genre où il a presque D'ailleurs, les Italiens employaient tous les uioyens pour ramcuer à eux le (mbiic et se l'iittacher. Le 25 juillet 1721,tout en conservant leurs quartiers d'hiver à THôte! de BoHrt!;ogne, ils se transportent pour l'été dans une sidle qu'ils font construire pour eux à la foire Saint-Lau- rent, oii allinait la foule , et se mêlent ainsi au.x [tetita théîitrcs, comme ils le feront désormais chaque amiw, en expliquant, dans des couplets d'un iirologue'éerit justement ])ar Dominique, les motifs de ce déplacement : A l'IIûtcI 0m Ii\Tes, scmblî\ble à celle dont avaient joui leurs prédâ'csseurs. Telle est l'origine de la subvention dont jouit aujour- d'hui notre Opéra-Comi<[ue, successeur direct des comédiens de la rue Mauconseil. C'est alors que ceux-ci firent placer sur la façade de l'Hô- tel de Bourgogne les annes royales de France, avec cette inscription en lettres d'or : IIoTEL DES Comédiens Italiens ordinaiues DU Roi, entretenus par Sa. Majesté, RÉTABLIS A PaRIS EN L'ANNÉE MDCCXVI. A partir de ce moment, la fortune semble se fixer sur ce théâtre de Fllôtel de Bourgogne, où d'excellents acteurs, mettant leurs talents au service d'œuvres charmantes dues à des écrivains fort distingués, vont enfin ramener la foule. C'est alors que Marivaux, et Boissy, et Saint- Foix, partageant leurs faveurs entrc la (!*omédie- Française et la Comédie -Italienne (qui n'avait déjà plus guère d'italien que le nom) donnèrent à cette dernière bon nombre de pièces fines, ingénieuses, aimables, qui ré- jouissaient le pubhc et lui causaient le plus vif plaisir. De Marivaux c'était la Surprise de Va- mour, la Double Inconslance, VÉjyreuve, le Jeu de V amour et du Iiasard, les Fausses Confiden- ces; de Boissy, le Je ne sais quoi, les Talents à la mode, les Valets maîtres, le Rival favorable, les Amours anonymes ; de 8aint-Foix, la Veuve à la mode, le Sylphe, le Double Déguisement, Arle- quin au Sérail, le Derviche, etc., etc. Le réper- toire était d'ailleurs étonnamment varié, non seulement en ce qui concerne le nombre des pièces, mais encore le genre de chacune d'elles. A côté des comédies que nous venons de citer, on voyait les plaisantes parodies tantôt eu prose, tantôt en vers, de Riccoboni et de Do- minique; des comédies héroïques, coimne le Comte de Neuilly, de Boissy ; quelques canevas italiens, conmie le Combat magique; de jwtites comédies en vei*s libres, comme l'^Art et la Nattire, de Cholet ; des pièces à spectacle et à divertissements, comme les Fées rivales^ de Véronèse ; de gracieux ballets -pantomimes, comme les Filets de Vulcain, de Riccoboni fils ; de petites pièces tant en vers (^u'en prose, mais entremêlées de chants et de vaudevilles, comme les Compliments et la Revue des Théâtres y Aq Domini(jue; et jusqu'à des tragi-comédies comme la Vie est un songe, et des comédies, françaises mêlées de scènes italiennes, comme Arlequin camarade du diable, de Saint-Jorrj et Riccoboni j.)ère. On conviendra qu'il est difficile de plus faire pour les plaisirs du public : aussi ce public se montra-t-il Siitisfait, et bientôt revint-il en foule à ce théiitre dont il avait eu tant de peine à rapprendre le chemin. De tout ceci il résulte que le nom de Comé- die-Italienne appliqué à un tel théâtre n'avait plus guère de raison d'être , non plus que ceux de Gaîté et d' Ambigu-Comique, conservés au- jourd'liui par des établissements dramatiques où l'on ne joue autre chose que de noirs mélo- drames. La troupe pourtant s'était bien aug- mentée de quch^ues nouvelles recrues italiennes,, entre autres un Arleipiin, charmant, comme ses devanciers, Carlin Bertinazzi , (\m fit courir tout Paris, eiii\Té de son esprit et de sa grâce. Mais ces nouveaux acteurs jouaient le réper- toire français, comme tous leurs camarades, et bientôt le personnel s'enrichit de quelques bons comédiens français, qui, tout naturellement, devaient préparer une invasion génémle de ce théâtre de manière à en chasser peu à peu les premiers occupants. Dès 1755, nous voyous déjà six acteurs français ainsi introduits dans la j)lace : Rochard, Dehesse, Cham ville, Des- brosses, M"'* Favart et Catinon Foulquier, et la grande valeur de deux d'entre eux, leurs COMEDIE-ITALIENNE (la). 215 facnlWs particulières, vont préparer une nou- velle et radicale transformation de ce théâtre chéri du public. A ce moment, une troupe de chanteurs bouf- fes italiens, amenés à l'Opéra, venait de révo- lutionner Paris et de susciter, pendant deux années, une polémique violente entre les par- tisans et les adversaires de la musique française. Leur présence parmi nous avait eu un résultat pins utile et plus palpable. Les jolis ouvrages lyriques que ces chanteurs avaient exécutés à l'Opéra, la Serra padrona, il Giiioeatore, la Donna superba, il Maestro di mttsica, etc., avaient obtenu tant de succès et de retentisee- ment que l'on conçut le projet de les imiter sur nos théâtres, et que de cette imitation na(jiiib notre opéra-comique, Rcnrc de pièces qu'on a traité de bâtard, mais dont on n'a pu, depuis plus d'un siècle, déshabituer ni dégoii- ter les spectateurs français. C'est justement à l'Opéra -Comique de la Foire, récemment relevé par Monnet, et où l'on ne jouait alors que des vaudevilles et des parodies, que ces imitations prirent naissance par la représentation des Troqueurs, première pièce française k ariettes, dont Vadé avait écrit les paroles etd'Auvergne la musique. Le succès colossal obtenu par ce petit ou\"ra^'e enga}|;ca Monnet à en donner d'antres, et bientôt, voyant que la vogue était là, la Comédie-Ita- lienne se mit à la remorque de l'Opéra-Comi- que et entra dans la même voie. Elle y élait du reste encoura<:ée par la présence, dans son i)er- sonnel, de deux acteurs auxquels ce genre con- 216 COMÉDIE-ITALIENNE (la). venait merveilleusement, doués qu'ils étaient d'une voix channante, dont leur bonne éduca- tion musicale leur faisait tirer un excellent parti. Je veux parler de M'"' Favart et de Ro- chard, qui, tout d'abord, remplirent la salle jiendant plus de deux cents représentations avec la Servante maîtresse, traduction de la Servapadrona. ' Mais la Comédie-Italienne, qui ne se rappe- lait \m que la Comédie-Française et l'Opéra lui avaient cherché naguère des chicanes indi- gnes, voulut à son tour abuser de sa puissance envers plus faible qu'elle , et imposer silence à ce gentil Opérd-Comi(iue (^ui lui avait montré le chemin. Irritée des succès de ce dernier, elle prétendit le faire taire et, à force d'intrigues, finit par y réussir. Elle obtint, en 17('»1, la fermeture de ce théûtre, à la condition d'en l'ecueillir chez elle les débris, c'est-à-dire de donner asile à six de ses principaux artistes, (jui étaient Clairval, Audinot, Laruette, Bouret, M"*-"* Nessel et Deschamps, ^fais, comme il ar- rive toujours, ce furent les vaincus qui al>sor- bèrent les vaimiueui's, et les artistes de l'ancien Opéra-Coiiiique, Clairval et Laruette en tête, prirent le pas sur la plupart de leurs nouvciiux camanides et implantèrent d'une façon défini- tive et pres(|Ue exclusive, sur les planches de la Comédie-italienne, le genre des picK;es à ariettes, qui échangèrent plus tard cette (juali- fication contre celle d\>péras-comi(|ues. De ce jour, ce tluVitre se tiiinsfornie décidé- ment et devient une véritable scène l\Ti(iue. A M'"*" Favart et à Rochard, à Clairval et à La- ruette, viennent se joindre successivement une foule d'excellents artistes qui se feront un nom dans le geni*e nouveau et le porteront à im point de véritable perfection : Caillot, ïrial, Chenard, M""*^ Laruette, W" Trial, M>"^ Des- glands, puis Nainville, Narbonne, M'"* Duga- zon, M"'' Colombe... L'orchestre prend du corps et est augmenté selon les exigences de la situation. On fait appel aux auteurs, aux com- ix)8it2ur8, et, parmi les premiers, Favait, An- seaume, Sedaine,d'Hèle, Marmontel, parmi les seconds, Duni, Laruette, Philidor, Monsigny» Grétryet quelques autres, réunissant leur ac- tion, associant leuns efforts, créent en quelques années tout un répertoire channant, du milieu duquel surgissent de véritables chefs -d'œu\Te qui sont la gloire de Fart français. Parmi ces ou\Tage8, qui se succédaient avec rapidité et dont on peut dire que le public était affolé , il convient de citer surtout les Deux Chasseurs et la Laitière, la Fée UnjeU, les Moissonneurs, le Maréchal ferrant , Blaire h Savetier, le Bû- cheron, le Sorcier, le Médecin de V amour, U Docteur Sangrado, Rose et Cotas, les Aveux in- discrets, On ne s"" avise jamais de tout, le Déser- teur, le Tableau parlant, Lncile, les Deux Ava- res, Zémire et Azor, TAmi de la Maison, etc. C'était une ère nouvelle qui s'ou\itiit pour la Comédie-Italienne, une dernière transforma- tion qui s'opérait en elle et (|ue le public en- courageait de toutes ses forces. Au bout de quel(|ues années les dernières pièces italiennes avaient complètement disparu du répertoire, les comédies françaises elles-mêmes n'étaient presque plus qu'un souvenir, et le théâtre était à peu i^rès exclusivement consacré à la repré- sentation des pièces à ariettes et de quelques rares vaudevilles. En 1780, il ne restait plus, des anciens acteurs italiens, que le seul Carlin, et la troui}e entière était devenue française. Quelques nouveaux musiciens s'étaient fait jour, Dézèdes, Desbrosses, (îossoc, ^lartini. De Méreaux, Vachon, et on leur devait de jolis ouvrages, tels que Julie , l'Erreur d'tm mo- ment, les Trois Fermiers, Biaise et Babet, les Pécheurs, 2'oinon et Toinetle, r Amoureux de quinze ans, le Retour de Ihnlresse, etc. Bientôt la Comédie-Italienne va renoncer à la salle de l'Hôtel de Bourgogne, qu'elle occupe depuis plus de soixante ans, et se faire construire en plein l)oulevard, par l'architecte Heurtier, sur des teiTains appartenant au duc de Choiseul, un théâtre vaste, spacieux, élégant, bien amé- nagé, et qui la mettra au centre du Paris oisif et de bon ton. C'est en 178:>, le 28 avril, que se fait rinauguration de cette salle, et c'est la présence de la Comédie-Italienne en ce Heu qui fait donner à cette partie du boulevard le nom de boulevard des Italiens (1). Mais la Comédie-Italienne va voir s'élever (1) Incendié U y a une cinquantaine d'années, ce théâtre fut reconstruit à la même place. C'est celui qu'occupe aujourd'liui l'Opéra- Comique. COMEDIE-ITALIEXNE (la). 217 coDtre elle une concnrreuce redoutable. I.e 2f> janvier 1789, Léonard, coiffeur de la reine Marie- Antoinette, et Viotti, le violoniste célè- bre, inaugureut, sous le titre de théâtre de Monsieur, une nouvelle entreprise dramatique qui prendra bientôt celui de théâtre Fejdeau, et qui, après quelques tâtonnements, quelques brillants essais en divers genres, se consacrera exclusivement il l'exploitation de l'opéra-comi- que français. Une lutte directe s'établit alors entre les deux établissements rivaux, lutte qui se continue pendant une douzaine d'années et qui, à cette époque où la musique française était représentée pai' tant d'artistes admirables, nous vaut toute une longue série de cbefs- d'œu^Te. DalajTac, Berton, Boicldieu, MéhuI, Cherubini, Lesueur, puis Champein, Catel, Dclla Maria, Solié, Devienne, Jadin, et bien d'autres, deviennent les fournisseurs attitrés des deux théâtres, qui, chacun à l'afTût de ce qui se passe cliez le voisin, se jalousent telle- ment qu'ils font parfois traiter le même sujet par deux compositenrs différents. La Comédie- Italienne, qui, vers 179», abandonne enfin ce nom pour prendre celui de théâtce Favart, qu'elle échange peu après contre le titre d'O- péra-Comique national, donne successivement Paul el Virginie (KTcatKv) , Euphrotine, Ca- mille oa le Souterrain , Roméo elJulielle {lk\- layrac), Stralonice, Gnhtare ou VEscbive Per- sane, Zoraime el Zulnare, Zorfois^iï {Kreutzer), le Prisonnier, la Dot de Suzetle, Adolphe et Clara, Ariodant, Maison à vendre, le Calife de Bagdad, BénioiifM, le Délire, ilonlano et Stéphanie, î'Iralo; pendant ce temps, on joue au théâtre Feydeau les Visitandines , Lodoiska (Cherubini), la Caverne, TéUmaque, Paul et Virginie (Lesueur), Médée, les Deux Journées , 218 COMÉDIE DE MŒURS. — COMÉDIEN, COMÉDIENNE. In Famille Suisse, Roméo et Juliette (Steibelt), r Hôtellerie iwrtugaise , etc. Les efforts sont iu- cessjuita de part et d'autre, ctounante est Tê- iiergic, iiiimeuse le talent dépeusé, et pourtant la situation de chacun des deux théâtres devient chaque jour plus délicate et plus difficile, et une double catastroi>he est à craindre. C'est alors que Ton songe à une fusion de nos deux grandes* scènes musicales secondaires, et que, ce j)lan arrêté, les deux troujws se fondent en effet en une seule, (jui continue ses repri^enUi- tions dans la Sîille du théâtre Feydeau et (|ui jnx»nd le titre officiel de théâtre de rOix?ni- Coniique (isoi). Dès lors, la Coniétlie- Italienne, dont le nom, depuis longtemps déjà, était passé en quel(]ue sorte à l'état de fiction historique, a cessé com- plètement d'exister. Scîiraniouche , Pantalon, Arlequin, Pierrot, ^lezzetin, Trivelin, Cassan- dre, Isiibelle, Colombine, tous ces tyi)es char- mants, pleins de gnice et d'esi)rit, de finesse élégante et de malice joyeuse, (jui avaient en- chanté les jx*res , mais qui iK>ur les fils ne re- présentaient plus qu'un souvemr lointain s'é- teignant dans les omlnx^s d'un jnissé inconnu et disimru, t(>U8 ces êtres séduisants et mignons cèdent définitivement la ])lace à un monde n( Kl veau et i>erdent jus(]u'au nom collectif qu'ils avaient rendu si fameux, jusqu'au dra- jxîau que pendant i>lus de deux siècles ils avaient i)orté si fièrement. Les « Comâliens- luiliens ordinaii-es du Roi , entretenus jwr Sa Majesté, ^> s'évanouissent et s'effacent devant le théâtre hienuU « iuqxTial i^de TOpéra-Comi- que, et l'histoire, ouvrant un chapitre nouveau, ne connaîtra plus di'sormais que ce dernier. 11 n'en est pas moins vrai que cette brillante Comé<>rtt*e. COMÉDIE DE :iIŒURS. — m La comwlie de mœurs, a dit Picard, se projx^se de mettre sous m.»s veux les habitudes d'une certaine classe d'hommes, ou d'une condition déterminée. Elle fronde ces ridicules (pie la mode enfante et dé- truit, et mêle queUiuefois à leur peinture celle de mceurs ingénues et aimables. Ici, la pièce n'est i)a8 fondée sur un seul caractère ; elle doit présenter la réunion des diverses nuances dont chacune, prise 8éi>aR^ment, ne pourrait faire le sujet d'une comédie. Or, connue ces nuances varient à l'infini, et que le même siècle voit souvent les mœurs changer plusieurs fois dans son cours, ce champ offre au iKK^te une mois- son toujours nouvelle. » Dans le genre de la comédie de mœurs, il fîuit citer, comme échan- tillons iiarticulièrement heureux, la Petite Ville, de Picard, Jlertrand et Eaton et la Caniarcule^ rie, de Scril)e. COMÉDIE LYRIQUE. —C'est la qualifi- cation (pi'on a donnée parfois, jadis, à quel- ques pièces à ariettes, telles miklie- vau- deville aux pièces mcK'es de couplets dont le ton et le genix; se ra])[>rochaient de ceux de la coméS0, quelques années après la mort du maître, la Comédie-Française, par suite de sa jonction avec celle de THôtelde Bourgogne. Plus tard, les actem-s de la Comé- die-Italienne, lorsque, ainsi que ceux de la Co- médie-Française, ils eurent été subventionnés par le souverain , reçurent et prirent aussi ce titre de « comédiens du roi », (^ui d'ailleurs n'était pas purement honorifique. On peut dire, en effet, que les comédiens de ces deux théâ- tres étaient réellement au service du roi, car non seulement ils allaient souvent jouer à la cour lorsque le prince était à Paris, mais ils étaient fréquemment appelés auprès de lui dans les résidences d'été, soit à Versailles, soit à Fontainebleau, soit àChambord, et c'était même la plupart du temps à la cour (]u'avaiont lieu les premières représentations d'ouvrages importants, ouvrages dont le public parisien n'avait que très rarement la primeur. Au reste, outre la subvention, les comédiens (1) Nous avons dit, au mot Acteur, ce qu'était la condition morale des comédiens chez les Grecs et les Romains; voici comment la jugeait la Bruyère, au dix- septième siècle : — <( La condition des comédiens était infâme chez les Bomains et honorable chez les Grecs : qu' est-elle chez nous ? On pense d'eux comme les Ro- mains , on vit avec eux comme les Grecs. j> devaient à cette situation d'autres avantages très palpables, que Chappuzeau nous fait con- naître ainsi dans son Théâtre- Français (1 G75) : Ils sont tenus, dit-il, d'aller au Louvre quand le Roy les mande , et on leur fournit de carrosses autant qu'il en est besoin. Mais quand ils marchent à Saint-Germain, à Cambor, à Versaille, ou en d'autres lieux, outre leur pension qui court toujours, outre les carrosses, chariots et chevaux qui leur sont fournis de l'Ecurie, ils ont de gratification en commun mille écus par mois, cliacim deux escus par iour pour leur dépence , leurs gens à propor- tion , et leurs logemens par fourriers. En représen- tant la comédie , il est ordonne de chez le Roy à chacun des acteurs et des actrices , à Paris ou ail- leni*s, esté et liyver, trois pièces de bois, une bou- teille de vin, un pain, et deux bougies blanches pour le Louvre ; et à Saint-Germain un flambeau pesant deux livres; ce qui leur est apporté ponc- tuellement par les officiers de la fruiterie, sur les registres de laquelle est couchée une collation de vingt-cinq escus tous les jours que les comédiens représentent chez le Koy, estant alors commen- saux. Il faut ajouter à ces avantages qu'il n'y a guère de gens de qualité qui ne soient bien aises de régaler les comédiens qui leur ont donné quel- que lieu d'estime ; ils tirent du plaisir de leur con- versation, et sçavent qu'en cela ils plairont au Roy, qui souhaite que Von les traitte favorablement. Aussi void on les comédiens s'aprocher le plus qu'ils peuvent des princes et des grands seigneui-s, sur tout de ceux qui les entretiennent dans l'esprit du Roy , et qui , dans les occasions , sçavent les ap- puyer de leur crédit. Ce titre de lane sur nos mi- sères; elle réveille en badinant le noble sentiment dii vrai intellectuel , et, tout en égayant l'esprit par le spei-tacle de nos ridicules, elle fait luire à ses yeux quelques rayons de la loi morale. C'est mnsi que le spectateur, en contemplant des fictions qui pourtant ne sont pus sans réalité, entrevoit l'idéal sous ces légères caricatures de la vie. On peut distinguer le comique de caractère, le comique de situation , et le comique de détails. Le comique de caractère est celui qui s'attache à peindre cl ù développer an caractère principal ; il doit le montrer sous toutes ses faces, et dans tou- tes ses nuances; tl doit être lidèle ù la nature et ù la vérité. Il suppose beaucoup d'oliser^'ation , la connaissance du cccur humain , l'expérience de la vie et du commerce des hommes: il exige en outre beaucoup d'art dans la conduite de l'action, et le talent de coordonner tous les détails au caractère principal, sans sacrilici' lus personnages secondai- res. Chaque caractère représente des classes d'in- dividus; c'est un vice, un travers général, dont il est comme le ty))e; et pourtant il doit avoir son individualité, sa pli}-siononiie originale. Tartuffe re- présente tous les faux dévots, cejKindant jamais poète a-t-il créé un être pim réel et plus vivant? COMIQUES (EMPLOI DES). 221 Le comique de situation fait des hommes le jouet des événements; il montre leurs plans et leurs projets divers aux prises les uns avec les au- tres, ou déjoués par les accidents du hasard. Un exemple du comique de situation est la scène où Harpagon , au moment de conclure un prêt usuraire avec un jeune dissipateur, se trouve en présence de son fils, qui reconnaît, dans son père, l'usurier dont il vient de maudire la rapacité. Les méprises en sont une source à peu près intarissable. Ainsi une des situations les plus fertiles en comique est celle où Regnard nous montre la fureur également risible de Ménechme le campagnard , qui croit que deux friponnes veulent le duper, et d'Araminte avec sa suivante , qui se voient insultées et mépri- sées. Mais la perfection du comique consiste à met- tre le caractère en contraste avec la situation ; c'est celui dont l'effet est le plus immanquable : par exemple, lorsque l'avare veut donner à dîner, rien n'est plus plaisant que de voir le combat cju'il se livre eu lui-même, et la lésine qui retient un des cordons de sa bourse , qu'il voulait délier en vue do plaire à sa future. Au comique de détails se rapportent la vivacité des reparties, le tom* original, la manière plaisante d'envisager les choses ; il sème les mots piquants il saisit des rapports inattendus entre les objets les plus éloignés. C'est dans les détails surtout qu'é- clate la verve comique, cette rw comica que César regrettait dans Térence , et que Molière et Regnard ont souvent rencontrée. En matière de conuque théiitral, il faut tou- jours en revenir à lilolière, et à ses deux ancê- tres Plante et Térence. C'est ce (jui donne tou- jours raison à la jolie épitaphe que la Fontaine fit pour son ami : Sous ce tombeau gisent Plaute et Térence, Et cependant le seul Molière y gît. Leurs trois talens ne formoient qu'un esprit, Dont le bel art réjouissoit la France. Ils sont partis, et j'ai peu d'espérance De les revoir, malgré tous nos efforts. Pour un long tems, selon toute apparence, Térence, et Plaute, et Molière sont morts. COMIQUES (Emploi des). — Lorsqu'on dit d'un acteur qu'il joue les comiques, c'est- à-dire les rôles comiques, cet emploi n'a pas besoin d'être autrement caractérisé, le mot étant suffisamment expressif de sa nature. On doit cependant observer que l'emploi dit des comiques, bien qu'il se subdivise lui-même en premiers comiques et en seconds comiques, ne comporte pas tous les rôles comiques du genre masculin, et que cette catégorie très nombreuse de rôles amène plusieurs distinctions. Les co- miques proprement dits ne comprennent que des rôles sinon toujours jeunes, du moins aler- tes et vifs ; les rôles marqués, c'est-à-dire re- présentant des personnages plus ou moins âgés, forment une classe à part, comprenant elle- même plusieui-s subdivisions, telles que finan- ciers, grimes y pères nobles (Yoy. ces mots). Nous nous en tiendrons ici aux comiques pro- prement dits. Dans le répertoire classi(|ue, l'emploi des premiers comiques comprenait d'abord tous les rôles appartenant à ce qu'on appelait, d'après leur costume, \'à grando livrée (Yoj. Livrée), et dont les types caractéristiques sont Sganarelle du Festin de Pierre, Mascarille de l'Étourdi, Pasquin du Dissipateur , Hector du Jouêur, Labranche de Crispin rival de son maître, etc. Parmi les autres rôles de premiers comiques, on distinguait surtout Sganarelle du Médecin malgré lui, Oros-René du Dépit amoureux^ Scapin des Fourberies de Scapin, Crispin du Légataire universel, puis Figaro dans les deux chefs-d'œu\Te de Beaumarchais, Frontin de Turcaret, Pathelin de l'Avocat Pathelin, Sca- pin des Jeux de Vamour et du hasard, l'Intimé des Plaideurs, etc. Dans le répertoire moderne, on compte panni les premiers comiques Du- bouloj des Demoiselles de Saint-Cgr, Oscar dans Oscar ou le Mari qui trom}^ sa femme, Giboyer dans les Effrontés. Au nombre des seconde comiciues du grand répertoire, il faut classer les rôles de la petite livrée, tels que Covielle du Bourgeois gentil- homme, rOlive de la Fausse Agnès, la Flèche de V Avare, le marquis du Joueur, l'Olive de Guerre ouverte, puis Mascarille du Dépit amou- reux, Lubin des Fausses Confidences, Dandin des Plaideurs, Silvestre des Fourberies de Sca- pin, Jodelet des Précieuses ridicules, M. Loyal de Tartxiffe, Thomas Diafoirus du Malade imaginaire, et enfin tous les Crispins, à Texcep- tion de celui du Légataire, qui appartient aux premiers comiques. On sait combien de grands artistes se sont 222 COI itluBtrés, à la Comédie-Française, dans l'emploi des comiques : les trois Poisson, Prévîlle, Da- ziiiconrt, Dugazon, Baptist«, la Rochelle, Mi- chot, Saint-Fal, Thonanl, Monrose père, Carti- gny, Samaon, MM. Régnier, fiot, Coquelin aîné. Dans lc8 théâtres de genre, nombre d'artistes aussi se sont rendus fameux dans cet emploi : sans les vonbir citer tous, ce qui serait impos- sible, nous en nommerons cependant quelqnee- nna : Bourdais, Fusil, Talon, Volanges, Bra- net, Tiercelin, Potier, Perlet, Lamette, Trial, Dozainvillc, Nnma, Lcpeintrc aîné, Lepeintre jeune, Achard, Amal, Ijcvasaor, Sainville, Grassot, Alcide Tousez, Boutia, Geoffroy, pois MM. Bouffé, Hyacinthe, Saint-Germain, Brasseur, Paulin Ménier, Parade, Delannoy, Daubray, Berthelier, Landrol, Milher, Lhéri- ticr, Dnpuis, Lassouche, Christian, etc. On distingue parfois certains rôles comiques par la désignation de eomiqites jeunes et cmni- qîies marqués; mais cela ne sert qu'à caracté- riser la nature de tel ou tel rôle, et non l'emploi lui-même, qui, nous l'avons dit, ne comprend que deux subdivisions très nettes ; les premiers comiques et les seconds comiques. COMITÉ, — Loi-s de la fomiation des thài- tres en France, tous étaient régis par dos so- ciétés de comédiens, qui se réunissaient pour exercer leur profession et géraient eux-mêmes leurs entreprises. Peu à peu, des entrepreneurs l)ai-ticulicrB se substituèrent à c COMITÉ D'ADMINISTRATION. — COMITE DE LECTURE. 22;$ chargeant à leurs risques et périls de la direc- tion des théâtres. A Paris, les deux dernières sociétés de comédiens qui subsistèrent furent celles de la Comédie-Italienne, devenue TO- péra-Comique , qui fut dissoute aux environs de 18;^0, et de la Comédie- Française. Cette dernière est la seule qui existe aujourd'hui. Dans ces sociétés, tous les associés ne jn-e- naient pas part à l'administration générale du théâtre ; c'est-à-dire que si toas avaient leur place et leur vote dans les assem]>lées •;:énérales, la conduite journalière des affaires était délé- guée par eux à un comité pris dans leur sein et qui administrait au nom de tous. C'est ainsi que cela se passe encore de nos joui^s à la Comé- die-Française, et l'on pourni se faire une idé<; des fonctions confiées au comité de ce théâtre, par la façon dont ces fonctions étaient ré«(lées, au dernier siècle, à la Comédie-Italienne. Par le fait de la subvention qu'elle recevait, cette dernière était, comme la Cumédie-Française, placée sous la surveillance de rautorité supé- rieure; or, voici comment, dans k* Règlement pour Us ComèdienS'ItaUens ordinaires du Roi établi en 1781 par le maréchal duc de RicheHeu, gentilhomme de la chani])re, su trouvait insti- tué le comité de la Société : .Pour nous mettre à i>ort«'e de connoîtrc les alms qui pourroient se <;lisser dans radmiiiistration et police intérieure de la Société, nous onlonnons «|ue lu Société de la Comédie Italienne sera régie et administrée, dans son intérieur, par un Comité permanent, qui sera composé de onze comédiens, y compris le semainier perpétuel et le premier des deux autres semainiers en exercice. Voulons qu'à .rinstar de ce qui a été établi i)ar Sa MA.rn.STK pour les Comédiens François, au Comité seul appar- tienne le droit de faire le projet de répertoire ; de régler le temps où les pièces doivent <'tre mises à rétude ; d'entendre la lecture des pièces nouvelles, et de les recevoir s'il y a lieu ; d'examiner les piè- ces destinées pour les spectacles des Foires et des boulevards ; d'entendre le rapport des semainiers , relativement à la police de la Société, et de pro- noncer sur leur rapport ce qu'il ajjpartiendra; de juger et réprimer tout ce qui pourroit être contraire au bon ordre, et de proposer, relativement à ce que dessus, les amendes qu'il jugera nécessaires; d'examiner les sujets qui se i)résenteront jjour dé- buter, de s'informer de leur conduite, et d'en don- ner son avis aux supérieurs, qui i>rononceront dé- finitivement sur leur renvoi ou admission; de chercher à concilier les difficultés, s'il s'en élève, au sujet des comptes; de donner chaque année, huit jours avant la clôture^ du théâtre, son avis sur la distribution des fonds du séquestre, dont il pré- sentera un rôle aux sui)érieurs, pour être par eux approuvé ou réformé, s'il y a lieu; de faire les marchés, d'arrêter les comptes, de vérifier la caisse, d'ordonner les dépenses journalières, ordinaires et extraordinaires ;d'insi)ecter, juger et ordonner dans toutes les parties du spectacle ; de juger les diifé- rends qui jiourroient survenir entre les comédiens, ainsi que les contestations des directeurs et acteurs de i^rovince ; de notifier, soit aux comédiens ou au- tres personnes intéressées, les ordres qui leur se- ront adressés par les supérieurs; do veiller à ce que les compliments de clôture et de rentrée ne renferment rien que de convenable; en un mot, de régler toutes les affaires de la Comédie, générales ou particulières, de quelque nature qu'elles soient, notre intention étant que ledit Comité , assisté des Conseils ordinaires de la Ojmédie, soit désormais le représentant et le gérant de ladite Société, ex- cepté le seul cas où il s'agiroit d'aliéner ses im- meubles, ou de les engager par des emprunts, ce qui ne pourroit être fait que dans une assemblée générale. Permettons néanmoins audit Comité d'as- sembler toute la Société, quand il le jugera utile et convenable, après avt>ir obtenu notre agrément à ce sujet, auquel cas les délibérations seront prises dans l'assemblée générale, en hi manière accoutu- mée et à la i>luralité des voix. En tenant compte de la différence des temps, on voit ce que peut être et ce (pfest, aujour- d'hui encore, le rôle d'un comité dans une so- ciété de comédiens. COMITÉ D'ADMINISTRATIOX, î)p: DTKECTIOX. — Dans une entreprise théâtrale qui réunit et enf^ap:e les intérêts de deux ou plusieurs directeurs associés, chacun d'eux a naturellement voix égale au chai)itre, et les afisociés forment un comité d'administration ou de direction (jui règle, gère et dirige tous les détails de Tentreprise. COMITÉ DE LECTURE. — Autrefois, tout théâtre qui se respectait avait un comité de lecture, composé de gens de lettres, qui avait charge de lire toutes les pièces [mrsentc^es iU COMMEDIA (LA) DELL' ARTE. à la direction, et de les accepter ou de lea refu- ser, en faisant connaitre les motifs de sa déci- sion. Non seulemeut la Comédie-Française et rOdéon, mais le Gymnase, le Vaudeville, les Variétés, la Porte- Saint-Martin, avaient des comités de lecture dans lesquels on rencontrait les noms de Charles Nodier, Germain Dela- vigne, Malitoume, Ancelot, Pigault-Lebrun , Piis, Vatout, Vial, Mahérault, Barré, Viennet, Uerle, Comberousse, etc. Les théâtres lyriques, eux aussi, avaient leur comité de lecture, formé de gens de lettres et de compositeui-s. Plus tard, les théâtres se contentèrent d'avoir un lecteur chargé de prendre connaissance des manuscrits et d'en rendre compte au directeur; puis ce- Ini-ci bientôt assuma seul cette tâche, et l'on ne trouve plus aujourd'hui de comité de lecture i[u'à la Comédie- Française, (Voy. Rbceptios m: i'iÈCE.s.) COMMEDIA (_La) LELU ARTE. — La comédie de Fart C'est le nom que les Italiens, qui furent nos initiateurs en matière d'exécu- tion théâtrale , donnèrent à une forme de l'art toute particulière et qu'eux seuls paraissent avoir pratiquée, la comédie improvisée, qu'ils nom- maient ainsi, la cotnmedia deW arte, par oppo- sition à la comédie écrite ou soutenue, ]a com- media soslenula. Celle-ci n'a guère commencé qu'au quinzième siècle, avec l'Arioste, Ma- chiavel, Bibbiena, Ruzzante, l'Arétin, tandis que l'origine de la comédie de l'art, qui s'ap- pelait aussi la commedia aW improwiso, se perd dans la nuit des temps et parait avoir sa source dans les atellaiics antiques. A l'époque même où la comédie régulière prenait naissance, la comédie improvisée était déjà un art très sa- vant, très avancé, très raffiné, qui, malgré lea progrès rapides de la première, ne craignit pas d'engager la lutte avec elle, et, plus qu'elle, créa des tjiws, des caractères, que l'on vit, traçant dans l'imagination une empreinte profonde, se vulgariseï' par leur originalité puissante et bien- tôt se feire admirer de l'Europe entière. Dans un livre excellent, aussi solide par le fond que séduisant par la gnice du sujet et la façon dont il est traité, Molière et la comédie ilalienne, M. Louis Molaiid a retracé avec un rare Ixmheur les lignes physîonomiques de l'an- tienne commedia deW arie. Je ^-ais lui emprun- ter quelques détails caractéristiques ; Si cette forme de l'art, dit 1' quement produite en It;ilie, c'c»;t que Ice Italiens ont porte pluB loin 'yav tout aulre [)«u]>le le talent du mirac et de l'iictotir... Ajoutez que dans l'Italie catiioh 1110 ]a ]>rofcK)s nii l'en vouement pour les lettres grecques et latines dégéuérait aii^ément en folie ; c'était l'époque oii Philelplie le Florentin et Timotliée entamaient , à proims de In forme d'une syllabe grecque, une querelle iicliarnée, dans In- quelle le dernier jouait et perdiiil «v grande bnrlie et en mourait de cljn(;rin. Ln romiiiCTfniite Venise caricaturait le vieux ninrcliuud . tantôt magnilique, tant t t ;, I t 1 1 j I [K retm Ptl LeEpj,lf£ mat d I ]I 1 I t I I II 1 1 t resE t 1 1/ / jf 1 ] 1 1 I I t q J tdu Qa ta f l n ! ti capabi d 1 t g t t [ d N I II 1 p*) pi ant I I 1 t 1 d t 11 b t I ou de tel village, devenus, on ne sait tro|i i ui quoi , les héros de tous les bons contes qui m. tout à vingt lieues à la ronde. Si nos village ]% avuient lo génie do la comédie, ils en feraient des masiucs comme les Italiens. Eu Italie, de petites iilles comme Bergame on Iti.'ceHlia , eurent le jriMl ge de fournir les meilleurs types de In bêtite comique toujours mêlée d'un peu de malice et de ruse Tous ces personnages ramassés sur In [Ijce ]u blique, la commetUa dell' arte les mit en i-ctno et les tit servir au divertissement, non seulement du peuple, mais des cours les plus brillanteb et des plus doctes académies. C'oznme on le voit cela fur mait déjà un certain ensemble : on avait le doc leur, le capitan, niesser Pantalon, les îtmni valets fourbes ou imbéciles, Briglielle, Arlequin, Sca pin, Mezzetin, Covicllc, Pierrot, etc. Il fallut se 225 compléter par les couples amourens, autour des- quels s'agite nécesBairement toute action comique : les Horace et les Isalwllc se joignirent aux mas- ques bouffons. Les suivantes au minois éveillé, les Francischinc et les Zerbinette tirent fuce aux va- lets, et les aidèrent à tromper et à exploiter les vieillards. On fut dés lors en mesure de jouer des comédies aussi intrigué'es qu'on pouvait le souhai- ter dans le paj-a de l'imbroglio. Tels furent les principaux rôles dont In comédie de l'art se composa d'abord. Ces rôles sont fixés d'avnncc, invariables comme les masques, comme les costumes qui niqiartienticut à ebncun d'eux. Dis ju nnier^oit latLrnlIe moustache du Cap i- t m (U est assuK luil \n se livrera d'extravagan- tes f inf ironnadts La robe noire du docteur ap- paraît elle on doit h attendre a le voir appliquer dcb sentences i tort et j. tiavers et estropier du la- tin bi Brit,lLCIIe m utre sou museau pointu, pré- ) arcz 10US a le loir ourdir quelque trame perfide ; tin 1 de suite Ibncun reste hdde h son rôle. La e Niedie se joue comim, a\ec les pièces connues dun ftli [uier Cette ) (.rsislante de cluque acteur dans son per- sonnage rendait | lus facile I obligation d'improvi- ser le dialogue ce qui était comme nous l'avons dit une condition casenlielle de la comédie de 1 irt Chicun jouvait se faire un fonds plus ou 16 220 COMMEDIA (la; DELL' ARTE. moînii riche de Iraitfi confonneH à bod caractère. n \A*,n c/>mf;dienM, dinait Nicc^^lo Barbieri, étudient ^leancoup et fie muniiment la mémoire d'aoe grande provision de chose» : HcntenccH, concetti, déclara- tions d^amoiir, reproches, désespoirs et délires, afin de les avoir tout ]iréts à Toccasion , et leurs études sont en rapp<;rt avec les mrrMirs et les habi- tudes des f>ersonnages qu'ils représentent. » Ainsi Ton verra l'un des capitans les plus renommés, Francesco Andreini, publier ses Brarure^ ses bra- vacheries , divisées en plusieurs discours. L* esprit devait d'ailleurs se plier, se façonner à ce rôle perpétuel, et Ton finissait par entrer sans doute dans la j>eau de son )>crKonnagc. Cela n'efit pas suffi toutefois pour eriijx'clier la confusion de s'introduire dans la comédie, si les périin/ties n'en avaient été réglées d'avanre. I/usage n'établit donc d'écrire le sujet et le f»lan de la pièce. Ces canevas furent plus ou moins dévelo|»pés : ils se boniaient |Uirfois à un sommaire très ))p'-cis, que Ion aflicliait dans les coulisses et que les actenrH pouvaient con- sulter avant d'entrer en s(«ne. Parfois aussi, lors- que les pièces devinrent très ronipliquècK, très chargées de j>erw;nnageH et fl'inrideîits, les cane- vas entraient dans tous les détails de l'action ; la trame était tissueavec soin ; à l'acteur d'y broderies arabcs^jues d'une libre fantaisie, suivant la dispo- sition du moment et celle que ninntrait le public. Les acteurs de la vimmWa de l'art n'avaient ])a8 seulement, pour vaincre les diflicnltès de l'impro- visation, l'avantage d'une longue ])réparation, d'une préparation de toute leur \ ie. Ils possédaient d'autres ressources. Ils étaient , pour la plupart, des mimes très exercés. Les jeux 06e im bot. Mais elle est évidemment le dernier mot de Fart dra- matique. La distinction de Tantear et da déclama- teur est un procédé imparfait , qui n'a d'aatre rai- son d'exister que l'insuffisance de la nature ha- maine. L'idéal est celui que chercha à réaliser la co/umfdia delF arU, en réunissant dans la même personne le fK)ète et celui qui se charge de faire vi\Te ses fictions. La théorie contenue dans ces dernières lignes me semble un peu excessive. 11 n'en est pas moin.s \Tai que cette comédie improvisée des Italien.s dut être un art charmant, tout à la fois plein de fougue et de sveltesse, de surprises et d'inattendu. Ce (|ui est certain, c'est que pen- dant longtemps il jouit d'une vogue immense et (jue tout parait devoir justifier, et cela non seulement chez les Italiens eux-mêmes, mais [nirtout où ils jugèrent à propos de se montrer et de déployer leurs faculté's prodigieuses, leur talent véritablement inimitable et mers'eilleui. En France, paiticulièrenient, ils conquirent une grande renommée, et leur succès, qui finit par s'épuiser à la longue, fut jx^idant longtemps éclatant et indiscutable. Mais ici, nous ren- voyons le lecteur au mot Conièdie' Italienne , où il trouvera de (juoi compléter amplement les • détails qu'il vient de lire sur ce sujet (1). (1) Dana ses adonibles lettres l'critrs d* Italie, le pré- sident de Brosses, étint à Rome, parlait ainsi de la coin- media dfJV arte : — a ...On joue , comme aux Italiens à Taris, de ces i»ièces non écrites dont ils ont par tradition un cmevaH que les acteurs remplissent et dialoguent à l'impromptu; elles n'ont ni mœurs, ni caractères, ni vruiAemblance ; tout conaii^te en intrigues, en événements niuguliers, eu lazzis, eu bouffonneries, en actions plaisan- U'M. On ne peut rien voir de plus réjouissant, quand on n'est j)as prévenu, ni de plus insipide, quand on les voit pour la seconde fois. Cotte manière de jouer & l'im- I»romptu, qui rend le style très faible, rend en même tfmps l'action très vive et trèt* vi-:iie... Le geste et l'in- flexion de la voix se marient toujours avec le propos au tliéAtro ; les acteurs vont et viennent, dialoguent et agis- m-nt comme djcz eux. Cette action est tout autrement naturelle, a un tout autre air de vérité, que de voir, cominn aui Franvulu, quatre ou cinq acteiu^ rangés à la ni«' fcur une IIkuc, comme un bas-relief, au-devant du thi'Atrc, débitant leur dialogue chacun à leur tour. » COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT. — COMPLIMENT. 227 COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT. — Fonctionnaire dépendant de l'administra- tion des beaux-arts, et qui a sous sa surveil- lance les théâtres subventionnés et les entre- prises musicales qui, à Paris ou en province, reçoivent aussi une subvention du ministère. En ce qui concerne les théâtres, au nombre de quatre : Comédie-Française, Odéon, Opéra, Opéra-Comique, qui relèvent de son autorité, le commissaire du gouvernement doit veiller au bon emploi de la subvention qui leur est al- louée, tenir compte du bon état du matériel, exiger la stricte exécution des conditions du cahier des charges imposé par TEtat, adresser au ministre, dès le lendemain de la représenta- tion d'un ouvrage , un rapport sur cette repré- sentation. Si un désastre administratif se pro- duit dans un de ces théâtres, que son directeur doive être révoqué, ainsi, par exemple, que cela s'est produit à TOpéra-Coniique en 1862, c'est le commissaire du gouvernement qui est chargé des mesures à prendre et à effectuer, de l'administration provisoire du théâtre, du rè- glement des comptes, de la li(iuidation de la situation financière, etc. En un mot, le com- missaire du gouvernement est, en toutes cir- constances , le représentant et le mandataire de celui-ci auprès des théâtres qui , par le fait de la subvention qu'ils en reçoivent, sont placée sous son autorité, sa dépendance et sa protec- tion. COMMISSION DES AUTEURS. — On appelle ainsi le comité dirigeant de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, chargé de veiller, au nom de l'association, sur les in- térêts artistiques et matériels de tous ses mem- bres, et de les défendre, si besoin est, par tous les moyens en son pouvoir. COMMISSION D'EXAMEN. — C'est le nom qu'on domie à la commission instituée au ministère de l'intérieur pour prendre con- naissance, avant leur apparition devant le pu- blic, des ouvrages destinés à la représentation, et indiquer les changements ou les suppressions qu'elle croit nécessaires pour autoriser cette représentation. (Voy. Censure.) COMMOI. — Le commoi formait une des parties du chœur dans la tragédie grecque. « C'étoient, dit Chamfort, les regrets que for- moient ensemble le chœur et les acteurs. Ce nom est pris du geste qu'on faisoit d'ordinaire dans ces occasions, qui étoit de se frapper et de se meurtrir. Il y avoit des pièces qui n'étoient pas assez tragiques pour les admettre. » COMPAGNIE. — Tandis qu'en France tous les acteurs formant le ixii'sonnel scénique d'un théâtre prennent le nom de troupe, en Itahe ils reçoivent celui de compagnie. On dit «c la compagnie dramatique Bellotti-Bon », « la C()ni])agnie chantante de la Scala. » Chez nous, il n'y a que la Comédie-Française, qui, à l'é- poque de son origine, ait reçu parfois ce nom de compagnie. COMPARSE. — Le comparee est une ma- chine humaine destinée à marcher ou à s'agiter sur la scène, sous la conduite et la surveillance d'un chef spécial, sans jamais avoir à ouvrir la bouche et à prononcer une parole. Le com- parse complète ce qu'on appelle la figuration. Dans les théâtres de chant, il se mêle à l'action des choristes, prend part à leurs mouvements, mais en se gardant bien d'essayer de chanter, — il ne manquerait que cela î Dans les théâtres où l'on ne chante pas, c'est lui-même qui forme l'ensemble de la multitude, qui représente la foule tantôt des paysans, tantôt des seigneurs, tantôt des manants, tantôt des militaires, qui figure les flots mouvants du peuple, qui pousse des exclamations et des cris inarticulés, qui se précipite parfois à l'assaut d'une forteresse, tandis que d'autres fois il procède à l'enlève- ment d'une infortunée victime. Le comparse, en un mot, est le complément aussi muet que coUectif de l'action dramatique. Mais cette no- ble appellation n'est réservée qu'à ceux qui pa- raissent sur de grandes scènes, l'Opéra, la Co- médie-Française ou l'Odéon : sur les théâtres d'ordre secondaire, on leur donne la qualifica- tion plus familière de figurants. COMPLIMENT. — Au siècle dernier, alors que les théâtres, vivant, comme tout le monde, sous le régime du bon plaisir, étaient tenus de 228 COMPLIMENT, fermer chaque année leurs portes pendant trois semaines, du dimanche de la Passion au di- manche de Quasimodo (Voy. Clôture), ils établirent Tusage d'adresser au public, le jour de la clôture et le jour de la réouverture, un compliment qui n'était tout d'abord qu'une sorte de courte harangue, improvisée ou dé- bitée par l'un des acteurs de la troupe, mais (|ui prit plus tard des proportions l)eaucoup plus étendues. On commença, pour corser un peu le compliment, par mêler le chant à la prose ; puis au personnage i)rimitif on en adjoignit un autre, puis plusieurs, et enfin le compliment devint une véritable petite pièce, qui prenait souvent autant d'importiin(;e et d'étendue qu'un vaudeville ou un opéra-comique. On confiait alors le soin d'écrire le compliment à quelijue auteur aimé du public, et, dans les théâtres se- condaires, certains écrivains en renom ne dé- daignaient pas de se charger de cette besogne aimable. C'est ainsi que Yadé, Anseaume, Fa- vart, le Cousin-Jacques, en ont écrit un grand nombre, parmi lesquels on en trouve d'ingé- nieux et de charmants (1). Le compliment était destiné à rappeler au public les travaux accomplis par le théâtre dans le cours de l'année écoulée, à solliciter de nou- veau sa bienveillance, à lui promettre qu'on ferait de mieux en mieux dans l'avenir, à lui annoncer les pièces nouvelles qu'on s'apprêtait à lui présenter, les recrues que la trouiKî com))- tait s'adjoindre pour compléter et améUorer son personnel. On en vint à abuser un peu de cet usage, dont la familiarité pourtant semblait ne pas devoir être dévsagi'éable , si bien qu'un écrivain fort indulgent, d'Origny, rendant compte de la clôture et de la réouverture de la Comédie-Italienne en 1763, disait : — <^c II n'est pas besoin d'ajouter qu'il y eut des com- plimens à ces deux é|)oques ; pour gênant que soit un usage, on sait combien il est tyranni- (1) A la Comédie-Française, VoUaire n'avait pas dé- daigné d'écrire le compliment qui fut prononcé par Grandval, le 24 mars 1730 ; ily avait payé un juste tribut d'éloges à Baron et à Adrienne Lecouvreur, dont la mort récente avait plongé les amateurs dans le deuU. Fréron composa aussi quelques compliments pour la Comédie, avant d'être devenu son ennemi et précisément aussi ce- lui de Voltaire. que. » Il est \Tai qu'alors les compliments s'é- taient multipliés peut-être un peu plus que de raison. En dehors de ceux qui se prononçaient pour la clôture et la rentrée , certains théâtres avaient pris l'habitude d'en faire débiter à tout propos et hors de propos, de telle sorte, par exemple, que pas un artiste nouveau ne venait débuter sans offrir aux spectateurs son petit compliment moitié prose, moitié vers. Précisément, pour donner une idée de ce qu'étaient ces petits intermèdes d'un genre par- ticulier, je vais reproduire ici celui qui fut pro- noncé à l'ancien Opéra-Comique, le jour de son début à ce théâtre (17:U), par une jeime et habile comédienne, M'^"" Legrand, fille de l'ac- teur de la Comédie-Française, où elle-même venait de })asser cin(i années. Voici son com- pliment : Messieurs , Mon t^toile m'a destinée au théâtre ; c'est ma vie, c'est mon élément, je ne puis m'en éloigner. (Air : Xon , je ne ferai pas.) Il n'est point de plaisir, il n'est point d'avantage Qui puisse me flatter contre votre suffrage ; Tout effort ne peut rien contre un penchant si doux. C'est le sort de mon sang de s'enflammer pour vous. Il ne faut donc point s'étonner du parti que je prends aujourd'hui ; on ne doit point non plus m'en blâmer ; tous théâtres sont théâtres. ^ (Air : Je t'aimv , ma Claudine.) Par le zèle .sincère Pour le fidèle amour, Je demande et j'esj)ère De vous quelque retour. Mon cœur, j'ose le dire , N'est point accoutumé Au rigoureux martyre D'aimer sans être aimé. Voilà ce que j'ai à vous demander pour moi. A l'égard de l'Opéra-Comique, il vous prie, Mes- sieurs , de ne pas l'abandonner dans un temps où il a besoin de vous plus que jamais ; le terme qui lui est prescrit n'étant pas bien long cette année. (Air : Tant de râleur et tant de charmes.) Nos jeux ne seront pas durables; Nous n'avons que très peu de jours. Puisqu'on les a rendus si courts , Songez donc à les rendre aimables. COMPLIMENT. Je ne puis pas trop vous prier d'y vei car qu'esl-ce qu'un spectacle quand i donnez? (Aie : PIw On n'y t. t plus qu'un confus aasettililiige , L'actenr b'ci 'réveuei les m si la Foire e. Les petits tliéâtrcs, ot jusqu'aux speftactos de marionnettes, jalons de faire comme leui-w grands frères m'aient aussi leur*! compliments. Aux Minomiettcs di. Bienfait, a la Fuîrc Samt Germim de 17 i PolitliinelU, dans le langage nu jjen t ru qu ( n lui pci mctt lit et r|ai lui était finiiliei idics^ait i «en public ce jœtit cumpliini.nt iiuc 1 uztlitr Lt d'Oriioval aiaicntttrit loinintcnti n M n c le I ul iK d'Italie Puisque les comédiens de F masculins, fcmloinn et nciitrcii, se sont mis sur lu pied de vous liaraiigncr, ne trouver pus mauvais que Policliincllc, à l'exemple des f.-randti cliicDS, vienne pîaiior contre les murs de vos attentions, et les inonder du torrent de son éloquence. Si je me ]iréKento devant vous en quulité d'ora- teur des Marionnettes, ce n'est pas pour des pru- nes; c'est pour vous dire que vous devez nous piir- donner de vous étaler dnns notre petite boutique une seconde parodie d'Ah/e. En voici la raisco. Les beaux esprits se rencoulrent : ergo, l'auteur de la Comédie- Italienne et celui des Marionnettes doivent se rencontrer. Au reste. Monseigneur le public, ne compte/ pas de trouver ici l'exocotion gracieuse de notre ami Arlequin : vous compteriez sans votre liôte. Songez que nos acteurs n'ont pas les membres fort souplen, et que souvent on croi- .1 que nous som- polisBons privi- ins de la Foire ; droit dans nos lt de bois : songez a mes les plus anciens polissons, 1 légiés, les polissons les plus poli songez enfin que nous sommes pièces de n'avoir pas le sommes en droit de les farcir de billevesées, de rogatons, do fariboles. Vous allez voir dans nn moment avec quelle exactitude Conduit no» sujets , Et l'eitraTaganoe . En fournit les tr.iits. J'aurai bîeEtût répondu Lanturlu , locturlu, lanturlu. lioiisoir. Monseigneur le public. Vous auriez eu une plus belle harangue si j'étais mieux en fonds. Quand vous m'aurez rendu plus riche , je ferai tra- vailler pour moi le faiseur de harangues de notre 1res honorée voisine la Comédie-Française , et je viendrai vous débiter ma rhétorique empruntée avec le ton de Cinna et un justaucorps galonné comme un trompette. Venez donc en foule : je vous ou- vrirai mes portes si vous m'ouvrez vos poches. (Ai : PhiUi m,.) Ah 1 Messieurs , je vous i Ah : Ues9i< Le compliment se perpétua jusqu'en 1702. Il s'éteignit à cette épo(|nc, et diapanit avec tant de choses que la Révolution fit disparaître. 280 COMPOSITEUR. — CONCERT SPIRITUEL. COMPOSITEUR. — On donne ce nom à tout artiste qui écrit une composition musicale quelconque, quelle que soit la valeur ou le peu de valeur de cette composition. M. X... ou M...., auteurs de la musique de quelques chansons ineptes, se disent compositeurs, au même titre que M. Gounod, auteur de Faust, ou M. Verdi, auteur à' Aida. C'est au public à faire la diffé- rence. Le compositeur dramatique est celui qui écrit spécialement pour le théâtre, que ce soit dans le genre de l'opéra, de l'opéra-comique ou même du ballet, car ici encore il faut savoir saisir et traiter comme il convient les situations scéni- ques, et le tout ne se bonie jms à écrire de la musique de danse plus ou moins bien rythmée. Quant au musicien qui trace pour un théîitre la musii^ue de quelques minces couplets de vau- deville, d'une ronde avec ou sans refrain, celui- ci ne saurait, de quelques qualités et de quel- que goût qu'il fasse preuve d'ailleurs, se pré- valoir du titre de compositeur dramatique tant qu'il n'aura pas fait plus. COMPOSITION DU SPECTACLE. — C'était un art autrefois que la composition du spectacle, lorsque les théâtres de ^enre avaient la coutume de donner chaque jour trois ou qua- tre pièces différentes. Les spectacles alors étaient variés, et les directeurs s'ingéniaient à com- poser leui* affiche de façon à montrer successive- ment au public leurs mcilleui-s artistes dans le cours de la même soirée, en même temps (ju'ils s'efforçaient de diversifier les impressions du spectateur en lui offrant tour à tour des pièces gaies, sentimentales, dramatiques, etc. On fai- sait toujours en sorte, autant que possible, de faire partir le public sur un éclat de rire, en terminant le spectacle par une lx>uffonnerie plus ou moins complète. Depuis ^^ngt ans, on n'a plus à prendre la peine de composer un spectacle; tous les théâtres, depuis les plus grands jusqu'aux plus petits , ont pris la sin- guHère habitude de ne plus jouer que de gran- des pièces, tenant toute la soirée, et n'offrant au spectateur qu'une impression unique. Quand une pièce obtient du succès, elle reste stéréo- tyixHî sur l'affiche pendant cent, deux cents, trois cents représentations, et on épuise ce suc- cès de telle façon que la pièce ensuite n'est plus jouable à aucun prix. Lorsque, par contre» l'ouvrage sur lequel on comptait ne réussit pas, on n'a plus, comme autrefois, un répertoire vaste et varié à sa disposition qui permette de faire au moins des demi-recettes en attendant un spectacle nouveau, et l'on a vu deux ou trois échecs successifs mettre à deux doigts de sa' perte un théâtre en grande vogue et le perdre dans l'estime du public. liCs théâtres seront bien obligés de renoncer, un jour ou l'autre, a cette dangereuse façon de procéder, et la fati- gue même du public les forcera de revenir à l'ancien usage des si)ectacles coupés. COMPRIMARIA. — Dans le répertoire ' lyrique italien , les rôles accessoires de femme fonnent un emploi ({ui appartient à la compri- maria. Les rôles qui i-entrent dans cet emploi ne sont guèrc autre cîhose (^ne des coryphées importants. COMPTE-REXDU. — On appelle ainsi l'appréciation de tonte œu\Te théâtrale, qui, sous une forme ou sous une autre, se produit dans les journaux, dans les revues, dans les gazettes. Autrefois, cha(^ue journal avait un feuilleton hebdomadaire, dans lequel un écri- vain sj^ial était chargé de rendre compte de toutes les œuvres parues dans le cours de la semaine écoulée; aujourd'hui, les journaux donnent l'analyse de la pièce nouvelle le lende- main même de sa l'cprésentation. C'est de ]x\ critique à la vapeiu*, qui n'a plus de la critique (|ue le nom. (Voy. FEriLLETON.) CONCERT. — Exécution par plusieurs ar- tistes, soit chanteure, soit instrumentistes, de plusieurs morceaux de musique vocale ou ins- triunentale. Il v a des concert-s de divers ffen- res : concerts avec ou S4ins orchestre, séiinces de musique de chambre, concerts de musique militaire, récitals, etc. — Pour exprimer ce que nous entendons par concert, les Italiens em- ploient le mot accademia, CONCERT SPIRITUEL. — Concert dont le programme ne comprend que des œuvres ou des morceaux de musicpie religieuse. CONCERT (LE) SPIRITUEL. 231 CONCERT (Le) SPIRITUEL. — Autre- fois, alors que les coutumes religieuses étaient aévère'ment pratiquées en France, les quelques théâtres existant k Parla étaient tcnua de chômer à chacune des grandes fêtes de l'année, et, de plus, faisaient ane clôture de trois se- maines, qu'on appelait clôture de Pâques, de- puis le dimanche de la Passion jusqu'au lundi U o- rt m yen Ig J prt un de la Quasimodo (V y Clotlre) Pondant tout ce temps la hiute aocicté était absolument sevrée de plaisirs et c est pour rem dier a cet inconvénient ({U un musicien distingue Fran Ç018 Phihdor conçut k ptojet d un ctalili se ment d un nouvMU genre qui allierait en (jutlque sorte le culte de 1 art à celui de la re ligK n et qui offrirait à tous une distraction aussi nobk qu utile Cet établissement qm reçut de son fondateur le titre de Concert spi rituel, formait, en effet, une entreprise de con- certs religieux, dont le personnel était pris en très grande partie dans celui de l'Opéra et de la musique du roi, et qui fut inauguré en 1725. Il subsista jusqu'à la Révolution, ne cessant d'obtenir les plus grands succès, car c'était une institution artistique très brillante, très inté- ressante, dont l'existence fut pleiiiL d'etlat , et qui attirait à Pans tous les grands artistes Étrangers, désirent de se produire dans un mi- lieu si favorable et d'y faire consacrer la renom- mée qu'ils avaient acquise déjà. Le Concert 2S2 CONCERT (l. spirituel donnait Bes wjhuccs les jours où les grands théâtres étaient obligi-a de faire relâche, et pendant les trois semaines de la clôture de Pâques il en fournissait toute une série rjui étaient assurément les plus liclles de l'aniK'e. Ces séances avaient donc lieu le 2 février (Purification), le 25 mars (Annonciation), pen- dant la clôture de Pâques, les joiu^ de l'Ascen- sion, de la Pentecôte et de la Fête-T>iou, le là août (Assomption}, le 8 septembre (Xati- E) SPIRITUEL. vite), le l" novembre (Toussaint), le K dé- cembre (Conception), enfin les 24 et 25 décem- bre, veille et jour de Xoëi. Voici quelques détails historiques sur le Concert spirituel, d'après uu chroniqueur du dix -huitième siècle : Ce Concert fut établi au molB de mars de l'an- née 1725, au château des Tuilierieg, par privilège du Roi, et 60 tient duos la grande salle des Cent- Suisses. Ce prii ilège fut accordé en faveur de I nui çois Philidor, fils d'un musicien de ce nom, et or dinaire de la musique de la chapelle de S. M a condition que le Coucert dépondroit toujours de l'Opéra et que Pliilidor lui paveroit sis mille lures par an (I). Le Concert spirituel se donna pour lu première fois le dimanche do la PasBion de l'année 1726 ; c'étoit le dix-huit du mois de mars. 11 commença par une suite d'airs de violon de la Lande ; par un (I ) Toia tes théâtres et spectacles quelconques étaient k cette époque tribataires de l'Opéra. capnce du mémo auteur sun i de son Confiteboi: On joua aprcB cela un concerto de Corelli, intitulé la \biI de Aoel et le concert iinit par le Cbnlofe Domino de la Lande II dura depuis six heures du soir jnsqua huit a\cc 1 appla naïvement général do toute 1 assemblée qui fut trcs nombreuse. Joseph Mouret eut après Plùlidor la direction du Concert spirituel, conjointement avec Simart; mais le directeur de l'Opéra rentra dans ses droilB, et en confia le soin à M. Rcbc!. Enfin c'est M. Boyer, or- dinaire de la musique de la chambre du Roi et maître de musique de Monseigneur le Dauphin et des Dames de France , qui en c^t aujourd'hui le di- recteur. Il en a le privilège depuis le premier de ::^;'js*Sfc....~'" fi ,11 r A'rfBnH^B ^"Sx^M Si., l 1 ^' 'Il ■, *^^^KÎ?# '1 ^:ig55? n :M L; -v; :. M \^^' -flj i'jj ;:Viii r ,,„, ,ig^^^r^;i ^ S»k' il im- :« tFwwmÊ 1 1 r^-T::^ ^^^1 l F. i • 1 ■■1 m «■«..v «*.l'* m 1 « '^i ï, BE 1 jOa :: JJI^^ 0\ -;iSàifî 1^^^. ^^ ? è ^xw ij'' ta — - '^IS^S^Hl ,i*i ^../MMMaÉlH CONCERTS POPULAIRES. 235 novembre 1748. II s* est associé M. Capran, ordi- naire de TAcadémie royale de musique. Par les soins et Tintelligence du nouveau direc- teur et de son associé, le Concert spirituel attire un grand nombre d'auditeurs , qui ne peuvent qu'ap- plaudir au choix et au goût qui y règne. On y exé- cute de grands morceaux de simphonie , des motets et d'autres pièces des plus célèbres maîtres qui ont travaillé sur des paroles latines. Des virtuoses en- chantent et surprennent les amateurs les plus dif- ficiles et les plus délicats, par la manière hardie et sçavante dont ils jouent sur leurs instruments des sonates et des concertos. Les voix récitantes se font aussi admirer par la beauté et l'éclat de leurs sons, et encore plus par le goût infini et l'expression rai- sonnée qu'elles mettent dans leur chant. La salle où Ton donne le Concert spirituel a éhangé plusieurs fois de décoration. Il n'y avoit dans les commencements que des banquettes et quelques gradins élevés autour des murs. Deux ans après on changea cette disposition , et Ton fit une balustrade sur trois faces. La j)remicre, opposée à la tribune où sont placés les simphonistes et les autres musiciens ; la seconde étoit un pan coupé ; et la troisième alloit se joindre à la tribune, du côté du jardin des Thuilleries. Cette distribution fut encore entièrement chan- gée l'année suivante. Au lieu de six rangs de gra- dins qui s'élevoient extrêmement et dont les appuis étoient d'une hauteur incommode, et qui n'occu- poient qu'un des cotes et une partie du fond de cette salle, on fit régner des loges tout autour, avec des gradins. Lorsque le Roi vint à Paris après la campagne de 1744, il alla loger au château des Thuilleries. On fut obligé alors de détruire toutes les loges et les décorations de la salle du Concert. Le jour de la Toussaint de cette même année, comme cette salle étoit occupée , on avoit attichc (pie le concert s'exécuteroit dans celle de rOi)éra; mais M. de Vintimille, alors archevêque de Paris, fit défendre que le Concert spirituel se donnât dans ce lieu trop prophane, et il n'y eut point de Concert ce jour-là. Le 8 décembre suivant, jour de la Conception de la Vierge, il se tint dans la salle du château des Thuil- leries ; mais il n'y avoit point de loges ; seulement on y avoit dressé des banquettes , et placé des chai- ses dans le parterre. Enfin, en 1748, sous la direc- tion de M. Royer, cette salle a pris une forme toute nouvelle. Le théâtre du Concert fait voir au fond un grand ordre d'architecture, divisé par un jeu d'orgues , qui embellit le spectacle et fortifie l'ac- compagnement. M. d'Aquin, organiste du Roi, est le premier qui ait touché sçul sur cet instrument. L'orchestre est mieux coupé, et les concertans sont placés favorablement pour les voix, pour la simphonie et pour l'assemblée. Un rang de loges remplit agréablement le tour de la salle. On y en- tre par un corridor et des escaliers commodes. Ces loges sont surmontées d'une gallerie, qui les cou- ronne sans les charger. Le plain-pied est garni de bancs et de chaises, et le directeur n'a rien épar- gné pour mériter l'approbation du public, qui a fort applaudi à ce nouvel arrangement (l). Nous ne saurions rappeler ici les noms de tous les artistes fameux (]ui se sont fait enten- dre au Concert spirituel pendant les soixante- sept années que dura son existence, et qui le rendirent fameux dans l'Europe entière. Il nous suffira de dire qu'il n'est pas un virtuose célè- bre, en France ou à l'étranger, qui n'ait tenu à honneur de voir son nom figurer sur ses pro- grammes. Le Concert spirituel disparut en 1791. C0XCERT8 POPULAIRES. — C'est à M. Pasdeloup, sous la direction duquel ils se trouvent encoi'e à l'heure présente , qu'est due la fondation à Paris des Concerts populaires, qui ont tant fait pour l'éducation musicale des masses et à qui l'on doit les progrès très considérables que le goût de la musique a faits en France depuis une vingtaine d'an- nées. M. Pasdeloup, qui était alors à la tête d'une société symphonique connue sous le nom de Société des jeunes artistes du Conser- vatoire, était désireux de doter son pays d'une institution qui lui manquait encore, malgré les essais faits en ce genre, à diverses reprises, par plusieurs artistes distingués, entre autres ilanéra, Malibran et Félicien David ; il rêvait hi fondation d'une entreprise de concerts à bon marché, grâce à laquelle on pourrait mettre à la portée de tous, pour un prix modique, les gninds chefs-d'œuvre de la musicpie symphoni- que classique, dont l'audition était jusqu'aloi'S le privilège d'un petit nombre. Il lui fallait pour cela trouver une salle assez vaste pour que, malgré la modicité du prix des places, le chiffre des recettes permît de supporter, avec les dépenses d'un orchestre considérable, tous les autres frais inhérents à une telle entreprise. (1) Les Spectacles de Paris, 1754. 236 CONCORDANT. — CONCOURS. Or, on Siiit combien Paris a toujoure été pau- vre en salles de concert. M. Pasdeloup ne se rebuta pas pour cela, et, ne trouvant rien de mieux, en vint à s'installer dans un manège. Il loua la salle du Cirque d'Hiver, une fois en jX)8session de son local s'occupa de Tor^nisa- tion matérielle de ses séances, et bientôt d'im- menses affiches, placardées dans tout Paris, annonçaient l'inau^umtion des Concerts popu- laires de ynusique classique, inscrivant sous ce titre hardi les cinq grands noms de Haydn , Mozart, Beethoven, AVeber et Mendelssohn, et faisant connaître les prix des places, qui étaient fixés à 5 francs, 2 fr. 5n, 1 fr. 25 et 75 centi- mes. Le premier concert eut lieu le dimanche 27 octobre IHlîl, et le succîès (jui raccueillit, succès spontané, colossal, immense, prouva du premier coup que Tidée serait aussi profitable qu'elle était généreuse. Bien avant Thenre fixée pour l'ouverture des bureaux, la foule se pressiiit aux portes du Cirque, et la salle étjiit comble lorsque M. Pasdeloup donna le signal de l'attaque de la chevaleresque ouverture d'Oberon. Une immense salve d'applaudisse- ments éclata de tous les points de la salle lors- que le morceau fut tenniué, et l'enthousiasme ne fit que s'accroître jusqu'à la fin de la séance. De ce jour l'avenir des Concerts populaires était iissuré, et ^î. Pasdeloup, en rendant mi éclatant service à la musi(iue, en mettant les classes bourgeoise et laborieuse à même de con- naître ses plus admirables chefs-d'œuvre^ en propageait le goût d'une façon inciilculable et créait une institution qui manjucra dans l'his- toire de l'art. Presque aussitôt celle-ci portait les fruits qu'on en pouvait attendre, et des conceits populaires s'étiiblissaient successive- ment non seulement dans la plupart de nos grandes villes de France, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Marseille, Lyon, mais dans presque toutes les capitales et villes importantes des pays étrangers : Londres, Turin, Gênes, Flo- rence, Moscou, Miulrid , Birmingham, Bnixel- les, etc., et partout avec le même succès. A Paris même, M. Pasdeloup trouva de hardis émules, et plusieurs entreprises semblables se formèrent, dont deux ont su rencontrer le suc- cès : celle des concerts de l'Association artisti- que, donnés au théâtre du Châtelet sous la di- rection de M. Colonne, et celle de la Société des Nouveaux-Concerts, dont les séances, admira- blement dirigées par ^I. Charles Lamoureux, ont lieu dans la salle du théâtre du Château-d'Eau. CONCORDANT. — C'est le nom qu'on don- nait autrefois, au dix-septième et au dix-hui- tième siècle, à la voix de baryton (Voy. ce mot). CONCOURS. — Le théâtre donne lieu à différentes esi)èces de concours. Il arrive par- fois qu'un concours est ouvert, à de certaines conditions déterminées, pour la composition d'une œuvre dramatique ou lyrique. C'est ainsi (ju'en 1804 l'État ouvrit un concours pour la conii)Osition d'un opéi^a en trois actes destiné au Théâtre- Lyrique, concoui^s auquel ne pou- vaient prendre part que les compositeurs ayant obtenu le grand prix de Rome et qui n'avaient eu encore aucun ouvrage représenté. C'est M. J^artlie (jui l'emporta, et son opéra, la Fiancée cFA hydos , fut joué l'année suivante. C'est encore ainsi (lu'cn 1807 un triple concours fut ouvert ])our la composition de trois ouvra- ges destinés à l'OjK'ra, à l'O^wa- Comique et au Théâtre-Lyrique ; les va inqueursf m'eut cette fois !M^L Eugène Diaz {la Covpe du roi de Thulé), Ch. Lenepveu {le Floi'entin) et J. Phi- lipot {le JJa(//fifi(jtfe). On sait (ju'un concours (jui prend le nom de concoui^s Cressent, du nom de son fondateur, est ouvert tous les trois ans pour la composition d'un opéra qui doit être reprc'senté sur un des théâtres de Paris. La ville de Paris, de son côté, ouvre tous les deux ans un concours pour la composition d'une grande œuvre spnphoniiiue et chorale, et l'œuvre couronnée est exécutée pubhquement. Nos grands théâtres lyriques ouvrent aussi des concours pour remplir les vacances qui se produisent dans le personnel de l'orchestre ou des chœurs. Lorsqu'une place est vacante, la direction fait connaître par les journaux le jour et l'heure du concours , les concurrents se font inscrire à l'administration, et un jury chargé de juger le concours fait choix de l'ar- tiste qui lui paraît le plus capable. Le mot concours sert encore à caractériser la participation gracieuse que prend un artiste à un spectacle ou à un concert donné au profit d'un CONDUIRE L'ORCHESTRE. — CONFIDENT. 237 autre artiste ou d'une œuvre de bienfaisance. I CONDUIRE, DIRIGER I/ORCHESTRE. L'affiche dit alors que la séance iiura lieu « avec — ■ C'est l'action du chef d'orchestre, plaa^à la le concours » de tels ou tels artistes nommés, l tête de scii musiciens, et ijui, au théâtre ou au ■ "P ■■w,-- 1 ^B^ ^^m, ''gBI i ^^^ A^Ê^KÊ .l^;]^^^^^^BHH hi 1 ^te^i. z:3 ^^jjSy j concert, dirige l'exôciitiou d'une œu\Te lyriijue [ notre ancienne tragédie, le rôle que le valet et ou Bymi>honi(ine. k soui)rette remplissaient dans la corai-die, avec cette différence que ccu.x-cî sont étroitc- CONFIDEXT, CONFIDENTE. — Le ment liés à l'action, dans laquelle on les voit confident et la confidente jouent un peu, dans I pi'endre parfois une place plus im{K>rtaute que 238 CONFRÈRES DE LA PASSION. leurs maîtres, tandis que les confidents ne cons- tituent trop souvent que des rôles inutiles, qui Talanguissent et la refroidissent par leurs ré- flexions et leurs sentences superflues. Chamfort a ainsi caractérisé la valeur scénique du confi- dent : Les confidens, dans une tragédie, sont des per- sonnages surabondans, simples témoins des senti- mens et des desseins des acteurs principaux. Tout leur emploi est de s'effrayer ou de s'attendrir sur ce qu'on leur confie et ce qui arrive ; et à quelques discours près qu'ils sèment dans la pièce, plutôt pour laisser reprendre baleine aux béros que pour aucune autre utilité, ils n'ont pas plus de part à l'action que les spectateurs. Il suit de là qu'un grand nombre de confidens , dans une pièce , en sus- pend la marcbe et l'intérêt, et qu'il y jette par-là beaucoup de froideur et d'ennui. Si , comme dans plusieurs tragédies, il y a quatre personnages agis- sans, et autant de confidens et de confidentes, il y aura la moitié des scènes en pure perte pour l'ac- tion , qui n'y sera remplacée que par des plaintes plus élégiaques que dramatiques : mais il ne faut rien confondre. Il y a des personnages qui sont, pour ainsi dire, demi-confidens et demi-acteurs. Tel est Phénix dans Andromaque^ telle est Œnone dans Phèdre, Phénix, par l'autorité de gouverneur, humilie Pyrrhus même en lui faisant sentir les illu- sions de son amour ; et par le ton imposant qu'il prend avec lui, il contribue beaucoup à l'effet de la scène entière. Œnone, par une tendresse aveu- gle de nourrice , dissuade Phèdre de se dérober au crime par la mort ; et quand ce crime est fait , elle prend sur elle d'en accuser Hippolyte ; ce qui , par l'importance de l'action, la fait devenir un per- sonnage du premier ordre. Les confidens qui ne sont que des confidens, sont toujours des personnages froids, quoiqu'on bien des occasions il soit fort difficile au poëte de s'en passer. Quand , par exemple , il faut instruire le spectateur des divers mouvemens et des des- seins d'un personnage^ et que par la constitution de la pièce ce personnage ne peut ouvrir son cœur aux autres acteurs principaux, le confident alors remédie à l'inconvénient , et il sert de prétexte pour instruire le spectateur de ce qu'il faut qu'il sache. L'art consiste à construire la pièce de manière que ces confidens agissent im peu, et en leur ména- geant quelque passion personnelle qui influe sur les partis que prennent les acteurs dominans : hors de là, les scènes de confidence ne sont presque qiie des monologues déguisés , mais qui ne méritent pas tou- jours le reproche de lenteur, parce que le poëte y peut déployer dans le personnage des sentimens ou vifs ou délicats, aussi intéressans que le cours de l'action même. CONFRERES DE LA PASSION. — On peut dire des membres de la Confrérie de la Passion, si célèbre au quinzième siècle, quMls furent véritablement les pères du théâtre en France. Toutefois, les renseignements sur cette société singulière sont, aujourd'hui encore, bien confus et bien vagues, et l'on n'en sait guère plus à cette heure que ce qu'en disait, il y a cent cinquante ans, l'honnête et cons- ciencieux Beauchamps dans ses Eecherches sur J^ théâtres de France, Voici comment en par- lait cet écrivain : Quelques bourgeois de Paris choisirent le bourg de Saint-Maur, au-dessus de Vincennes , pour y re- présenter la passion de Notre-Seigneur. Le prévôt de Paris , averti de cette nouveauté , rendit son or- donnance du 3 juin 1398, par laquelle il fit défen- ses à tous les habitans de Paris , à ceux de Saint- Maur et des autres villes de sa juridiction, de re- présenter aucuns jeux de personnages , soit de vie de saints ou autrement , sans le congé du roi , à peine d'encourir son indignation et de forfaire en- vers lui. Ils se pourvurent à la Cour ; et pour se la rendre plus favorable , ils érigèrent leur société en confrairie, sous le titre de la passion de Notre Sei- gneur. Le roi voulut voir leurs spectacles ; ils en représentèrent devant lui quelques pièces, qui lui plurent, et cela leur procura des lettres patentes du 4 décembre 1402 pour leur établissement à Paris. On voit par là (jue, dès l'année 1398, c'est- à-dire avant même la fin du quatorzième siècle, ceux qui allaient devenir les confrères de la Passion avaient fait à Saint-Maur les premiers essais de leurs représentations scéuiques, et que quatre années s'écoulèrent avant qu'ils arrivas- sent à une organisation sérieuse. Nous allons maintenant les voir installer leurs jeux à l'hô- pital de la Trinité, où ils construisent un théâ- tre qui est évidemment le premier qu'ait vu la France. Beauchamps continue ainsi : Les confrères aïant obtenu ces lettres , cherchè- rent un lieu commode pour leurs représentations. Il y avoit alors deux cens ans que deux gentishom- mes allemands, frères utérins, nommés l'un Guil- laume Escuacol , l'autre Jean de la Bassée , avoient CONFRERES DE LA PASSION. 2S9 acheté deux arpens de terre hors la porte de Paria, da cfité de Saint-Denis, et y avoient fait bùtir une grande maison pour y recevoir les |ieilerlns et les panvres voïageure qui nnivoient trop tard pour en- trer dans la ville , dont en ce tems-lù les portes M fermoient. Entre autres édifices , il y avoit dans cette maison une grande sale de vingt-une toises et demi de long sur six toises de large, élevée du rez- de-ciiauBsée de trois à quatre pieds, soutenue par des arcades pour la rendre plus saine et plus com- mode aux pauvres que l'on y lecevoit. Apres la mort des fondateurs cette bonne auvre fnt totalement abandonn e les ronfreres ajant trouve cette grande sale lacante et a moitié d( trnite lu louèrent et j bltirent un tlieltre ou tls représentèrent leurs }exi\ ou spectacles auxquels ils ne donnèrent le nom m de tragidies ni de co médies mais sim] lemenl dt moralités Ce premier tlitatre subsihta pendant prts de cent cinquante ans sur le mtmc i icd trunçois I ' en confirma les pn\ ileges par t>es lettres paten tes du mois de jam ler 1518 On s ennnia de ces spectacles eineux 1 our leb i(.iiici les joueurs y mêlèrent quelques firi.cs tir e» de sujets pro fanes qu on nomma par un quuhbet \ulgaire la pou pile» IMT allusion sans doute a quelque scène ndicule jui eutrap[urt a ccnom Ce mUange de morale et de bouffonnerie déplut encore ; ce qui avoit éditic sous Cliurles VI Hcaudalien koiu , François I''. La maison de la Trinité redevint hô- pital suivant l'esprit de su preniiire fondation, jmr arrêt du Parlement du 30 juillet 1547. Les confrères de la Passion représentaient des mystères et des mimdes, tels que le Mijs- tère de la Passion, qui fut lear premier jeu, le Mystère dé sainte Geneviève, la Vie et histoire de madame sainte Jiarbe, etc. Mais, si des do- cuments précis nous font défiiut ponr constater les indécences, pour ne pas dire plus, <\m ac- compagnèrent ces premiers bégaiements de notre théâtre, U est certain pourtant que, sous leur apparence pienec, cea représeutfttions n'é- taient rien moins que morales par elles-niëmes. « Selon le génie du théâtre de ce temps-là, a dît fort justement M, Paul Lacroix, mi grand nombre de scènes du Myntère de la Passion et des mystères analogncs se traînent dans les lieux communs de l'olscénité , et le dialogue des personnages sulialtenies emprunte au lan- gage populaire mie quantité d'images licen- cieuses et de mots orduriers. n Quoi qu'il en soit, le succès obtenu par les confrères de la Passion avait donné naissance à deux autres Bociétéa dramatiques, Ie.s Clercs de la Basoche et les Enfants sans souci (Voy. ces mots), et Je peuple parisien commençait k prendre un \nf plaisir aux représentations scé- niques. Lorsque le théiitre de la Trinité eut été fei-mé par arrc't du Parlement, les confrères s'occupaient donc d'en élever un autre, et c'est encore Peauchamps qui nous renseigne sur ce point Priies de cet établissement les confrères qui avoient fait des gaina considérables, se trouvèrent en état d'acheter l'ancien hùtel des ducs do Bour- gogne , qui n'étoit plus qu'une masure. Ils y firent construire une sale, un tbéfltrc et les autres édifi- ces qu'on y voit eneorc aujourd'hui (1736). Le Parlement, par arrft du 19 novembre 1548, leur permit de s'y établir, à condition de n'y joiier que des sujets profanes, licites et honnêtes, et leur lit do très eipresses défenses d'y représenter aucune inistères de la pasaion, ni autres mistéres sacrés; ce sont \en termes de l'arrêt. Il les confirma au sur- plus dans tous leurs privilèges, et défendit à tons autres do jouer ni représenter aucune jeux dans la ville, fauxbomgs et banlieue de Paris, que bous leur nom et à leur prolit. Ce nouvel établisse mont fut confinué par les let- tres patentes de Henri II du mois de mars 1559, et par celles de Charles IX du mois de novembre 15IÎ9. Les confrères s'étant apperçùs que le privilège ex- closif de monter sur le tbéAIro ne convenoit point 240 CONGÉ. — CONSERVATOIRES. à riiabit religieux qui caractérisoit leur compagnie, loiièrent leur hôtel à une troupe de comédiens qui 86 forma dans ce tems-là. Ils s'y conservèrent seu- lement pour eux et pour leurs amis deux loges , qui étoient distinguées par des barreaux et qu'on nom- moit les loges des maîtres. A partir de ce moment Texistence des con- frères de la Passion est terminée, et Ton voit commencer celle de T Hôtel de Bourgogne, pre- mier théâtre vraiment régulier qu'ait possédé Paris. (Voy. Clercs de la Basoche, Comé- die-Françalse, Enfants sans souci.) CONGE. — Les artistes qui se sont fait un nom et dont Tinfluence et l'autorité sur le pu- blic sont considérables stipulent d'ordinaire sur leur engagement qu'ils auront droit chaque année, à une époque déterminée, à un congé d'un, deux ou trois mois. On pourrait croire que cette condition n'est imposée par eux à un directeur que dans le but de se procurer quel- que temps d'un repos (jui serait d'ailleurs fort légitime ; mais il n'en est rien. L'acteur ne se réserve ce congé que pour acquérir la faculté d'aller donner en province, en y gagnant un peu plus d'argent (ju'à Paris, quelques séries de représentations dans lesquelles il ne se mé- nage point, parce (jue ses intérêts sont en jeu. Il revient donc, au terme de son congé, beau- coup plus fatigué qu'au départ, et c'est le di- recteur qui le paie (|ui doit subir les effets de cette fatigue, lorsqu'elle se produit sous forme d'indispositions et qu'elle entrave la marche régulière du tmvail et des représentations quo- tidiennes. (Voy. Acteurs ex représenta- tion.) CONSERVATOIRES. — Les conservatoi- res sont des écoles spéciales, destinées à l'en- seignement de la musique, pour former des sujets capables soit d'enseigner eux-mêmes, soit de concourir à la bonne exécution musi- cale dans les théâtres ou dans les concerts. Les premiers conservatoires ont été fondés au dix-septième siècle en Italie, à Venise et à Naples. Cette dernière ville en a possédé simul- tanément ou successivement plusieurs, ceux des Poveridi Gesii Cristo, de SanfOnofrio, de Santa Maria di Loreio, de la Pietà dei Tur- cJnni, de San Selastiano et de San Pieiro a Majella. C'est à ces écoles merveilleuses, deve- nues justement célèbres, que l'Italie doit cette admirable d^Tiastie de chanteurs dont l'art, hélas ! n'est malheureusement plus qu'un sou- venir, et c'est d'elles aussi que sont sortis la plupart de ces grands compositeurs, de ces musiciens inspirés (jui pendant près de deux siècles ont fait sa gloire et répandu son nom par toute l'Europe. Le fondation du conservatoire de Paris, qui est aujourd'hui l'un des premiers du monde, remonte à 1794 et est due à un homme intel- ligent et honorable, Bernard Sarrette, qui du premier coup le porta à son ])lus haut point de splendeur. Cet établissement, dirigé aujour- d'hui par M. Ambroise Thomas, après l'avoir été, à la suite de Sarrette, par Perne, Cheru- bini et Aul>er, donne une instruction musicale absolument gratuite à plus de cinq cents élè- ves; sou enseignement comprend toutes les branches de l'art, et même, en dehors de la miLsi(]ue, la déclamation proi)rement dite. Cet enseignement se décompose ainsi : composition musicale, contrepoint et fugue; harmonie: accompagnement au [)iano ; solfège ; chant ; orgue ; piano ; harpe ; violon ; violoncelle ; con- trebasse ; flûte ; hautbois ; clarinette ; basson ; cor ; cornet à ])istons : trompette ; trombone ; déclamation lyrique (opéra, opéra-comique); déclamation dramatique (tragédie, comédie). En dehore des examens trimestriels destinés à faire connaître les progrès des élèves, des con- cours ont lieu chaque année pour chaque bran- che d'études , dans lesquels des premiers et se- conds prix et des accessits sont décernés aux plus méritants. Les élèves des classes de dé- clamation lyricpie et dramatique sont tenus de signer, lors de leur admission dans l'école, un engagement qui les lie envers le ministre des beaux-arts et par lequel ils se mettent à sa disposition lorsqu'à la suite des concours ils se seront \ii décerner un premier prix. Dans ce cas, en effet, ils peuvent être réclamés, à des conditions déterminées d'avance dans ce pre- mier engagement souscrit par eux ou leurs parents, par un de nos quatre théâtres subven- tionnés, l'Opéra, l'Opéra-Comique, la Comédie- Française ou rOdéon, et ils ne i)euvent se CONSERVATOIRE DE DANSE. — CONTRALTO. 241 soustraire à cette obligation. Certains élèves réfractaires se sont vu intenter un procès par le ministre des beaux-arts, et ont été condam- nés à des dommages-intt'réts considémbles. Il faut ajouter que, quand l'élève a satisfait au premier engagement qui l'attend à sa sortie du conservatoire, il reprend toute sa liberté. Plusieurs de nos villes de France ont aussi des conservatoires ou écoles de musique, dont quelques-uns, considérés comme succursales du conseiTatoire de Paris, sont placés sous la tu- telle et la surveillance de l'Etat. Parmi les plus imjwrtants de ces établissements, il faut citer les conservatoires de Lyon, Bordeaux (École Sainte-Cécile), Marseille, Lille, Nan- tes, Toulouse, Dijon, Cacn, puis ceux de Valenciennes , (timbrai, Toulon, Aix, Bou- logne-sur-Mer, Douai, Perpignan, Besançon, Alger, etc. Des conservatoires existent aussi dans la plupart des capitales et des grandes villes d'Euroj>e : à Rome, Naples, Milan, J^'lorence, Turin, Pesaro, Vienne, Berlin, Dresde, Leip- zig, Cologne, Bruxelles, Anvers, Liège, (îand, Bruges, La Haye, Londres, ^Fadrid, Saint- Pétersbourg, etc. CONSERVATOIRE DE DANSE. — C'est ainsi qu'on appelle Técole de danse annexée à l'Opéra, et dans laquelle se forment les élèves destinés à figurer j^lus tard dans les ballets de ce théâtre. Le Conservatoire de danse reçoit de jeunes garçons ou de jeunes filles, dont les pa- rents, à leur entrée dans les classes, signent pour eux un engagement de cinq années, pen- dant lesquelles l'élève appartient au service de rOpéra et ne peut s'attîicher à un autre théâ- tre. Voici quelques articles du règlement du Conservatoire de danse : Art. 18. — Le Conservatoin* de danse comprend cinq classes : l'' une classe élémentaire pour les garçons ; 2** une classe élémentaire pour les jeunes filles; S^ une classe secondaire i)0ur les femmes; 4° une classe supérieure ou de perfectionnement pour les femmes ; 5'* une classe de pantomime pour les élèves dont l'aptitude a été spécialement re- connue. Ai^t. 19. — Les leçons de danse ont lieu tous les jours, excepté les dimanches et les jeudis. DICTIONNAIRE DU THÉÂTRE. Art. 2L — Les leçons sont gratuites. L'adminis- tration fournit gratuitement chaque année aux jeunes élèves de la classe élémentaire , non classés dans le corps de ballet : 1° Aux jeunes filles : 4 paires de chaussons de danse , 2 jupes , 2 coi-sages ; 2° Aux jeunes garçons : 4 paires de chaussons de danse. Les parents ou les tuteurs des élèves sont res- ponsables des objets , et les entretiennent. Art. 26. — Ladmission d'un enfant au Conser- vatoire de dan.^e de l'Opéra constitue entre ses pa- rents ou tuteurs et l'administration un contrat d'ap- prentissage, et, en échange de l'instniction qu'il reçoit gratuitement, l'élève doit ses services à l'O- péra. Tout élève admis à suivre les cours du Conser- vatoire contracte , par le fait mémo de son admis- sion, l'engagement de tigurer pendant cinq années au moins dans les quadrilles du corps de ballet, et ne peut contracter d'engagement avec un théâtre quelconque sans autorisation du directeur de l'O- péra. Cette obligation constitue aux élèves un droit à être admis dans It^s quadrilles lorsqu'il y a des pla- ces vacantes, s'ils rcMinissent, de l'avis du comité d'examen, les conditions de taille et d'aptitude nécessaires. Art. 'M). — Il y aura cliaque année un ou deux examens , tant pour se rendre compte de la situa- tion des classes, que ])Our donner de l'avancement aux élèves et combler les vides qui auraient pu se produire. L'Opéra doit à son Conservatoire de danse, très sérieusement organisé, la supériorité qu'il a toujours conservée dans Text^'ution des Iml- lets. De cette école sont sortis nombre d'artis- tes fort distingués, qui lui ont fait par la suite le pliLS grand lionneur. CONTRALTO. — Ce mot, qui nous vient de ritalien, caractérise la plus grave des voix de femme. La voix de contralto est pour les femmes ce (|ue celle de basse est pour les hom mes ; son échelle et son étendue sont les mêmes une octave plus haut. En France, dans le grand ojnVa, on emploie parfois la voix de contralto, témoin l'admirable rôle de Fidès du Prophète. Mais son emploi est bien plus fréquent en Italie, et les opéras de Cimarosa, de Rossini , de ^lercadante, de Do- is CONTREMARQUE. — COQUETTES (grandes). et les Romains leur donnaient le nom de tes- 8era{ï). 242 nizetti, de Bellini, de Verdi, contiennent, pour la plus grande part, un rôle de contralto. CONTREMARQUE. — Carte que les con- trôleurs délivrent à chaque spectateur qui sort de la salle fK^ndant un entr'acte ou à tout autre moment de la soirée, et que celui-ci doit ren- dre pour pouvoir rentrer et aller reprendre sa SORTIE TUÉ/VTRE NATIONAL L»E LOPÉRA Sortie Contrcnuininci», place. Sans cette précaution, le premier venu l)ourrait ixîuétrer au théâtre pendant un spec- tacle sans payer sti place. Les contremarques portent nrénéralemcnt une, et même plusieurs marques, ainsi que l'indique leur nom, qui prouvent (ju'elles ont été non seulement mar- (|uée8, mais contremarquées. On en change régulièrement chaque jour de spectacle, pour éviter les imitations et les fraudes possibles. FiCS anciens faisaient usage de la contremar- que dans leurs théâtres, comme les modernes, CONTROLE. — Endroit où se tiennent; dans le vestibule d'un théâtre, les employés chargés de la vérification, — du contrôle, — des billets pris aux bureaux, et qui, en échange de ces billets, qui leur sont remis par les specta- teurs entrants, déh\Tent à ceux-ci d'autres bil- lets qui prouvent à l'ouvreuse ou au placeur auquel ils doivent être remis que le contrôle a été ofiéré. CONTROLEURS. — Employés chargés, à l'entrée d'un tliéiUre, du contrôle des InlletSy Auprès d'eux se tient toujours un commissaire délégué dans chaque théâtre par Tadministra- tion de l'assistance publique pour contrôler les contrôleurs eux-mêmes et enii)êcher qu'aucune fraude ne puisse se produire au détriment de cette administration, fjui prélève, on le sait, un onzième de la recette bnite à son jirofit. Cette ingérence d'une administration étrangère dans les opérations d'une entreprise particulière est l'un des résultats les plus étranges et les plus odieux de cet impôt initjue et exorbitant connu vulgairement sous le nom de droit des pau- \Tes. COQUETTES (Grandes). — Un des em- plois féminins dans la comédie. On jieut pres- <|ue dire que cet emi)l(>i est de création ré- (1) Autrefois, alors «pie les théâtres n'avaient pas encore adopté cette habitude néfaste de ne jouer chaque soir qu'une seule pièce interminable, et qu'Us donnaient des spectacles coupt'n , une coutume assez singulière s'é- tait introduite dans le i>ublic. Certains spectateurs al- laient passer au théâtre le commencement de la soirée , puis, après avoir vu la i)ièce qui les avait attirés, sor- taient en prenant leur contremarque et revendaient celle-ci à bas prix à un amateur qui allait ainsi voir la fin du spectacle à bon compte. Cet usage était devenu si général qu'il était recounu officiellement , ainsi que le prouve ce paragraphe d'une ordonnance de police con- cernant les théâtres (1828) : — « La vente de toute con- tremarque ne pourra avoir lieu, dans les théâtres où l'on joue plus de deux pièces, qu'après la représentation de la deuxième pièce , et dans les autres, après la repré- sentation de la première. t> Qu'on dise donc que la po- lice n'est pas toujours tutélaire ! à CORDACE. — CORRECTION (pièce reçue a). 243 cente, car dans le répertoire classique on ne donnait cette qualification de grandes coquet- tes qu'à cinq ou six rôles typiques qui ren- traient dans l'emploi des premiers rôles et qui étaient les suivants : Célimène, du Misan- thrope ^ Céliante, du PhilosopJie marié (Destou- clies), Silvia, des Jeux de T amour et du hasard (Marivaux), et M™*' deMartigues, de la Coquette corrigée (La Noue) et de V Amant hourru (Monvel), auxquels on joignait volontiei*s Elmire, de Tartuffe. Pendant longtemps les engagements de premier rôle femme, en pro- vince, portaient (juc Tartiste jouerait les rôles de coquettes que nous venons de désigner. Ce n'est guère qu'à partir des environs de 1830 et du mouvement romantique, qu'on vit surgir ce nouvel emploi, toujours assez mal défini d'ailleurs, les rôles étant de nature et d'importance très inégales. La nouvelle école employait dans ses pièces beaucoup plus de personnages que le théâtre n'en comportait précédemment ; c'est ce qui donna naissance à cette nouvelle classe de rôles, qui formèrent •comme une sorte de doublure de l'emploi des premiers rôles, et que l'on baptisa du nom de grandes coquettes et seconds rôles. Certains rôles de ce genre rentrent, par le fait, dans l'emploi des premiers rôles proprement dits : tels sont M"° de Miremont de la Camaraderie (Scribe), M™^' de Xohant du 3fari ii la campagne (Bayard), Léona de la Closerie des Genêts (Fr. Soulié), M'"'' de Lér}' d'un Caprice (Mus- set), Jacqueline du Chandelier (id.), Marianne des Caprices de Marianne (id.) , Laïs du Joueur de Flûte (M. Augier) , la Marquise d'Auljerive des Effrontés (id.). Panni les vérital)les coquet- tes, il faut classer la duchesse de la Grande Dame (Scril)e), Marceline de Diane de Lys (Al. Dumas fils) et la baronne d'Ange du Demi- Monde (id.). Après M"® Mars, qui fut une Célimène et une Elmire incomparable, il fallait arriver jusqu'à M"*® Plessy pour voir tenir ces deux rôles écrasants avec une véritable supé- riorité. Quant aux coquettes modernes, elles ont été personnifiées avec un talent bourgeois, mais d'une finesse exquise, par M"*' Allan, avec beaucoup d'esprit et d'autorité par M"® Natha- lie, avec une beauté fière et toute patricienne une élégance suprême, par M"^* Denain et Marque t. Pour M™*^ Plessy, elle était aussi par- faite, aussi accomplie dans un genre que dans l'autre. CORDACE. — L'une des trois danses théâ- trales des Grecs ; elle était réservée à la comé- die. C'était une danse burlesque, dont la liberté allait jusqu'à l'obscénité. rté le même esprit d'opini.ltrett' •lans leur conduite, et n'ont rtformé que les abus qn'it leur a été im|toBsibIe de défendre plus long- temps. L'empire de l'babitude est jilus puissant, à ce qu'il me semble, dans les coulisses que purtout ^IleuTS. Mnlgré les cloges donnés en 1787, par l'auteur de la lettre que je viens de rapporter, à l'exactitude avec laquelle on se conformait dés lors aux costumes, il ne faut pas ftrc bien vieux pour avoir vu M""* Vestris jouer Mfrope avec une robe de soie noire, une ceinture de dianianlH et de la pondre. Cela ne date i^ue de ITOO. Ou voit ce qiiV'tait encoi-e le costume an thfAtrc H y a jiri'S d'un sii-cle. On n'en doit pas savoir moins de jiri- uux efforts iutcllifients do Lekain et de II"'" ( 'lairoii, à la Comt-dic-Fran- çaiBG, de M""' Saitit-Huberty à l'Opéra, pour ftmeiier nnc réforme si désiruMo. Tandis ijne les deux ptcniicrH combattiiient ainsi par Ictti-a ac- tes des usages et des pivjtitjés i-idiciiles, SI""' Fa- vart agissait du mêuie à ia Comêdic-ltalieanc. •( Ce fnt elle, a dit un Ijiofrraphc, (jni la pre- mière observa le costume : elle osa sacrifier les agrémens de la fif,iire à la vérité de» carac- ti'res. Avant elle les actrices qui reprc-seutoicnt des soubrettes, des ijaysatinea, (jaraissoient avec de grauiis pivniers, la tête surehargce de diamaiis et nuitées jusqu'aux cotides. Dans liasiienne, elle mit un liabit de laine tel que les villageoises le portent, une chevelure plate, une simple croix d'or, les bras nuds et des sa- Ijots. Cette nouveauté déplut à quelques criti- • jues du parterre, mais un homme sensé les lit taire en disant : Messieurs, ces sabolt donne- ' roni des souliers aux comédiens. » L' a homme sensé ji, que d'aucuns aflirment être l'abbé de Voisenon, me paraît avoir été assez niais, si sa répliqae est telle qu'on la rapporte. Mais il «"en reste pas moine que M"" Favart a fait faire un grand jias & l'exactitude du costume au théùtre. Malgré tout cependant il fallut du tempe, et beaucoup, pour ijue le résultat répondit aux efforts de quei(]ue8-uii8 ; car voici ce que pou- vait encore imprimer, le 2 vendémiaire an II! (24 septembre 1704), une feuille s{)éciale à l'art dramatique, le Journal des Théâtres .- Les Colinn, ou, si vous le préférez, les aiiioHiww '■iitaffeois. continuent de se jouer do la manière que nous allons indiquer. Cheveux bien poudiv-B, une vingtaine de boucles faites avec art, une cudcnette nouée avec un plus ^ kx^ ^B fî^ <^^K w ^^ ^m '1$-*^ infS ' J^fP * jK M \ M ^ ' 3J^^ w - -„ \ 1^4 1^^^^^^ ^^^M ^^feg? grand art encore, une chemise d'une toile extraor- dinairement Une, un gilet d'un beau drap , et sur- tout bien pincé, une cointuro élégante, une culotte juste, des bas de soie blancs, des souliers très ))oin- tuB, de jolies petites rosettes ; c'est ainsi que les Colins doivent paraître sur la scène. Passuns aux Colettes. Comme l'on prétend que la décence est reléguée dans les campagnes, les Colettes doivent avoir le sein découvert. Comme on cite les villageoises pour des modèles do simplicité, les Colettes doivent se parer avec lesajustemeusqui suivent : tour-de-gorge 248 COSTUMIER (chef), COSTUMIÈRE EN CHEF. — COTÉ COUR. de Halincs brodé, cbemise à l'enfunt, et tablier en linoD, corset et jupe de taffetas, coi^ffure sem- blable à celle de nos Phryués modernes, bonntt à la dernière modo, boucles d'oreilles très recberchMu, bagues de prix au moins ù trois doigts. Nous in- sérons promplement cet arie dans notre feuilk'. alÏD que les jeune» artistes qui sont sur le point d'entrer dans la carrière dit tb^ûtre, ne soient ]>:i)^ asseï; imprudens potir s'affnbler d'un costume ii!> laine ou de bure ; cette innovation pourroit leur nuire, et, de plus, leur attirer des désagrèmens de la part de leurs camarades qui sont depuis lonL'- tems en possession d'être fort applaudis en vioUint tontes les loix de la nature et du bon sens. Aujourd'lmi , cett« question du cnatiime cul définitivement trancliùc. Depuis les efforts di.' l'école romantique, si amoureuse du ])ittore3i|Uf et de la vérité historique, on ue saurait pluf ff permettre les contresens et les anaclironisrLiL'.i ingénus qui tlorissaient jadis. Nos théâtn-s de- viennent cha([ue jour plus scnipujeux sous ce rapport, et c'est plaisir de voir les effets véri- tablement artistiques qu'on obtient même dans les circonstances les plus difficiles, gràctt à lit recherciie intelligent*! des documents. Une remanjue est à faire eu ce qui coucena' la coo]H'r!ttion niatj?rielle des comédiens à la rc- présent*itionscénique,eumatièredecoBtume. l'^ti proviuce, tout acteur est tenu d'avoir unegiir- de*robe complète : costumes antiijues, mfiveu- âge, renaissance, Louis XIII, Louis XIV, Louis XV, etc., avec lem-s accessoires, c'est- à-dire armes, armures et le reste; le comé- dien doit être ponnni de tout ofc se fournir t nn k aee propres dépens. Il n'en est pas de même à Paris, oii tout cequiestcostimiepropremtut dit, c'est-à-dire cc«tume historique ou de fan- taisie, est fourni par les directions de théâcr(.\ Seules, les toilettes de ville, élégantes ou m'- gligées, sont à la char^ de l'artiste. Il est vrai que, en ce qui touche les femmes, c'est uni- lourde dépense, et l'on a vu plus d'une actrice faire un procès à son directeur, qui voulait l'o- bliger à débourser, pour un seul costume de ville, une somme dépassant le total d'une an- née de ses appointements. COSTUMIER (Chef), COSTUMIÈRE EX CHEF. — Ces deux chefs de service sont ceux qui sont chargés, l'un poor les hommes, l'autre pour les femmes, et sous la direction artistique du dessinateur, de la confection de tons les costumes dans le théâtre où ils sont employés. Le costumier a sous ses ordres les tailleurs, la costumière les couturières nécessai- res, et tous les travau-x de l'habillement se font BOUS leurs ordres et sous leur responsabilité. Ces travaux sont singulièrement importante, et cette responsabilité n'est pas mince dans les théâtres à grand déploiement scénique, tels que l'Opéra, le Chàtelet, la Porte- Saint-Martin, où une seule pièce exige parfois mille on douze cents costumes ditférents. COTÉ COUR, COTÉ JARDIN. — Au point de me de remplacement et de la pc«e des décorations, l'emploi des mots : à droite, à gauche, doinierait lieu an tluVitrc à des éarlé leur musi- que banale, leur poésie l)orgnc. leur sentimen- talité rebattue et leur comique trivial. Quoi de plus bizarre, en effet, que de voir l'acteur s'arrêter tout à coup, sans raison aj^parente, Tamoureux à l'endroit le plus i)assionné de sa déclaration, le ])ère noble an mot le plus pathé- tique de ses exhortations paternelles, l'ingénue au bord de la plus naïve de ses naïvetés, le comique au seuil du plus l)ouffon de ses lazzi ? Quoi de plus étrange que de les voir, les uns et les autres, rester silencieux et immobiles pendant que l'orchestre joue Sii ritournelle, partir tout à coup en mesure, chanter une huitaine de vers ou soi-disant tels; puis, après quelques secondes d'un nouveau silence et d'une nouvelle immobilité, rentrer, comme ils en étaient sor- tis, dans le ton ordinaire de la parole et dans l'allure habituelle du dialogue ? » Nous ne chicanerons pas plus qu'il ne faut l'écrivain sur ce point. Nous ne lui demande- rons pas s'il est beaucoup plus naturel de voir les gens s'exprimer constamment en alexan- drins, comme dans la tragédie, en vers de toutes mesures, comme dans la comédie poé- 252 COUPON. — COURRIER DES THEATRES. tique, ou chanter sans s'arrêter, comme dans le drame lyrique. Nous ferons observer seulement que le théâtre n'est qu'un composé de conven- tions greffées les unes sur les autres, et forcé- ment acceptées par le public, dont l'unique désir est d'être ému ou diverti, quel que soit le moyen employé. Ceci dit, nous constaterons qu'il y avait dans le vaudeville plusieurs sortes de couplets. D'abord le couplet de situation, qui prenait sa raison d'être dans le fond môme de cette situa- tion et qui, loin d'arrêter la marche de l'action, la resserrait en quelque sorte et condensait une idée, un fait, un incident dans l'espace des huit vers qui lui servaient à les caractériser. Puis, le couplet de circonstatue, qui était géné- ralement un hors-d'œuvre, une inutilité, ins- piré par tel ou tel fait extérieur ne se rattachant que d'une façon très indirecte à l'action scéni- que. Il y avait ensuite le couplet de facture, sorte de long récit, de machine interminable, destiné à faire accepter par le public des expli- cations qui lui eussent paru beaucoup trop dé- veloppées en prose, et par conséquent à justifier le mot fameux de Beaumarchais : ce qui ne vaut pas la peine d'être dit, on le chante. Il y avait enfin le couplet au public, dans le CRÉER UN ROLE. — En France, on se sert du mot créer pour indiquer que tel ou tel artiste a établi tel ou tel rôle dans une pièce nouvelle. On dira dans ce sens : (c Déjazet et Achard ont créé les rôles ô^Indiana et Charte- magne, » parce que ce sont ces deux artistes qui ont joué ce vaudeville à Paris pour la pre- mière fois ; ou bien : « M. Got est le créateur du rôle de Giboyer, » parce que c'est ce grand comédien qui a joué originairement le rôle de Giboyer à la Comédie- Française ; ou bien en- core : « Mercadet est l'une des plus belles créa- tions de Geoffroy, » parce que c'est Geoiîroy qui a établi naguère le rôle de Mercadet au Gymnase. Quelques personnes, trou vent dans ces mots : créer, création, ainsi employés, une preuve d'orgueil de la part des comédiens, et de bons esprits s'y sont trompés, entre autres Rossini, (jui a écrit une lettre curieuse à ce sujet. Comme cette lettre n'a jamais été publiée en français, il ne me semble ])as sans intérêt de la traduire ici. La voici : Ca>a, 12 février 1851. • Très aimable monsieur Guidiciiii , Je suis débiteur envers vous d'une réponse ù votre billet courtois . dans lequel vous me posiez 17 258 CRÊPÉ. — CRISPIN. aoe qneetion musicale. La question toutefois est plutSt de mote que de substance , et par conBeqnent je m'en expliquerai brièvement. Je vous dirai donc que le bon chanteur, pour bien remplir sa partie , De doit Hk autre chose qu'un vaillant interprète des inspirations du matelra conipoaiteur, cherchant à les eipimer avec toute l'efficacité possible et les mettant dans toute la lumière dont elles sont susceptibles. D'antre part , les instniroentistes ne doivent être que ies exécutants soigneux de ce qu'ils trouvent écrit. En6n, le ntaetiro et le poète aont les seule véritables créateun. Quelques chan- teurs peuvent seuls se permettre quelquefois cer- tains ornements accessoires ; et à l'on veut appeler cela création, ce qui se dit en eifet, il n'eu est pas moins vrai que cette création est malheureuse, car elle gâte bien souvent les pensées du maatro et leur enlève la simplicité d'expression qu'elles de- vraient avoir. Les Français emploient l'expression : créer un rote, mais c'est iii un fraïKésiime vani- teux, qu'on applique Boulement aux chanteurs qui les premiers exécutent une partie importante dans un opéra, voulant indiquer de cette façon qu'ils se font presque le modèle à imiter ensuite par les ou- tres chanteurs qui sont appelés plus tard à remplir le m£me rSle. Mais ici même le mot a'êer semble pen approprié, puisque créer veut dire tirer derien, et que le chanteur opère sur quelque chose , c'est-à- dire sur la poésie et sur la musique, qui ne sont point sa création. Voilà tout ce que je puis vous dire , et il nie pa- raît que cela répond suffisamment it votre demande. 11 ne me reste qu'à vous saluer et à me déclarer avec toute l'estime possible * Votre bien dévoué serviteur, Gioaccliino Hoss[N"i. Roesini lui-ménie ee trompait sur la valeur de la sigaificatiûn qu'on attache en France à ces niote : crier, eréaiùnt, créaUur, en matière de théâtre. Il n'y a point là de prétention de la part des artistes, et la preuve, c'est que l'ex- preaaioQ s'applique aussi bien aux œu\Te8 qu'à ceux qui les interprètent. C'est ainsi qu'on dira indifféremment a les eréaiewrs de telle pièce >, on bien ■ les artistes qui ont joué telle pièce à la création, lorsqu'elle a été créée n, c'est-à-dire lorsque la pièce a été jouée pour ta première fois. On a adopté un mot pour éviter une péri- phrase, et voilà tout. CRÊPÉ. — Le cripé est l'un des éléments nécessaires au comédien pour /aiVe sajùjure. On appelle ainsi de petites touffes de poils ou decrins très fins, blonds ou bnius, gris ou blancs selon le besoin, frisés et préparés d'avance, que l'acteur s'applique sur le visage à l'aide d'un léger enduit gommé, afin de simuler la barbe ou les favoris qu'il doit jiortcr dans tel ou tel rôle. CRI. — Assez généralement, au inoyen âge et H l'époque de la Renaissance, les sociétés dramatiques, telles que les Confrères de la Passion, les Clercs de la Basoche, les Enfanta sans Souci, faisaient par les mes et les carre- fours, avant la représentation de leur pièce, une grande promenade qui servait à l'exhibi- tion cil costume des personnages qui devaient y prendre part. C'était ce qu'on appelait la montre (Voy. ce mot). En même temps, un ou plusieurs des participants à la montre fai- saient à haute voix une annonce du spectacle et de tous les détails qu'il comportait. C'était ce qu'on appelait le cri. CRISPIX. ^ Un des types les plus fameux de l'ancienne comédie française, bien que Mo- lière ne l'ait pas employé. C'est Scarron qui le premier l'a introduit sur la scène dans V Écolier de Sahmanquf, comédie en vers jouée sur le théâtre du Marais en 16.'i4. Crispin était un maitre fourlie, un de ces valets rusés, sans scrupules, pleins de ressources, âpres au gain, de la race des Scapin, des Atascarillo et des Gros-René. Comme eux il a\-ait son costtmie spécial, et, chose assez singulière pour un co- mique et que noua retrouvons cependant dans Scaramouclie, ce costume était entièrement noir. Un bon nombre de nos bons auteurs du second ordre ont employé le personnage de Crispin : Regnard dans le Légataire universel et les Foliée amoureuses; Dancourt dans le Chevalier à la mode; Hauteroche dans Crispin médecin et Crispin mxtsicien; Champmeslé dans Us Oriseltes; Le Sage dans Crispin rival de son maître; Montfleury dans Crispin gentilhomme, etc., etc. Une famille de comédiens célèbres a fourni à la Comi-die- Française toute nne dynastie de Crisping qui est restée fameuse dans les fastes CRITIQUE THÉÂTRALE ET MUSICALE. 251) du tliëàtre i le père, Raymond Poisson, qui fut, dit-on, l'inventeur et le créateur du rôle ; le fils, Paul Poisson, qui lui succéda ; et le petit-fils, François Poisson, (|ui continua les traditions de la race. A eux trois ils jouèrent les Crispins pendant plus d'un siècle (cent trois ans!). De Raymond Poisson un annaliste disait : — nrquoi je suppose qu'on peut comparer cette danse à la danse di- thyrambique des anciennes bacchantes; enfin, on chantait certaines chansons d'un caractère furieux et violent en l'honneur de Bacchus, et on les accompagnait de la danse que nous venons de décrire. Outre ces trois sortes de danses, il y en avait une autre appelée la danse pj/rrhique ou guerrière. Cette danse imitait les mouve- ments et les positions du corps à l'aide desquels on évitait les blessures ou les dards d'un ennemi, c'est-à-dire en se courbant, fuyant, sautant et s'arretant. Les attitudes du parti qui attaque étaient décrites, le coup de javelot, ainsi que es postures pour blesser avec Tépée. » Les Romains, moins artistes (jue les Grecs, connurent aussi la danse au théâtre, mais ne paraissent pas lui avoir fait faire de progrès. Il faut arriver ensuite jusqu'à la Renaissance et à l'enfantement du ballet moderne pour retrou- ver la danse scénique, (|ui allait alors acquérir un éclat et un développement sans précédents. Les ballets dansés à lacourde nos rois, Henri III, Henri IV, Louis XIII, Louis XIV, la portèrent à un point de splendeur inouï, et la création de notre Opéra, où elle prit aussitôt une place extrêmement importante, lui conserva toute sa supériorité. De l'Opéra elle se répandit sur les autres théâtres, la Comédie-Française, la Co- médie-Italienne, r Opéra-Comique, où, quoique dans des proportions moindres, elle trouva le moyen de briller encore. Aujourd'hui, à Paris, ce n'est guèi*e qu'à l'Opéra que la danse a con- servé son ancien éclat , bien que certains théâ- tres , entre autres l'Opéra-Comique , la Porte- Saint-Martin , le Châtelet, l'emploient d'une façon accessoire. En province, quelques théâ- tres se faisaient beaucoup remarquer sous ce rapport il y a un siècle , particulièrement ceux de Lyon et de Bordeaux. A l'étranger, un théâ- tre surtout est resté fameux depuis deux siè- cles pour sa supériorité en matière de danse, c'est celui de la Scala, de Milan, célèbre par ses grands ballets d'ensemble, et qui, comme notre Opéra, est pourvu d'une école de danse où se conservent les bonnes traditions de l'art. DANSEUR, DANSEUSE. — Celui ou celle qui se livre à Tart de la danse, lequel, na- turellement, diffère jusqu'à un certain point,, dans ses moyens et dans son but, selon qu'il est exercé par un homme ou par une femme, et aussi selon la nature et les facultés particu- lières de chacjue sifjef. Voici ce que dit Blasis sur ce point : — « Les hommes doivent danser d'une manière différente des femmes ; les temps de vigueur, et l'exécution mâle et énergique DANSEUR. DANSEUSE. 2C1 des premiers seraient d'un effet désagréable chez les dernières, qai doivent se distinguer et nous récréer par des pas brillants et par des mouvements gracieux, par des terre-à-terre élégants et par un abandon décent et voluptueus à la fois dans toutes leurs attitudes. Hommes doit les consacrer à la danse la plus s la plas noble ; si la taille est moyenne et les formes sveltes et délicates, ce sont des sujets pour le demi-caractère ou genre miste ; si la taille est au-dessous de In moyenne, la confor- mation vigoureuse, les muscles épais, ce sont ou femmes, dès que la taille est élevée, le maître des élèves pour le genre comique et les pas de caractère... A l'âge de vingt- trois ou vingt- quatre ans, un danseur doit avoir acquis tout le mécanisme de son art et posséder l'exécution la plus brillante qu'il soit possible d'atteindre. Dans la danse, le talent ne s'estime pas par le nombre des années qu'on a mis k la pratiquer, et cependant uu artiste ne devient pas un dan- seur du dernier rang parce qu'il avance en âge. A quarante ans, un danseur, s'il est d'une bonne école, et s'il a été soigneux de se maintenir, par une pratique constante, à la hauteur où il s'est élevé, peut encore être un artiste du pre- mier ordre ; nous en avons plus d'un exemple. » La France a toujours été le pays des danseurs pour les deux sexes. Nous devons dire toutefois que depuis trente ou quarante ans les danseurs mâles ont beaucoup jKrdu dans l'estime du public, qui ne les supporte plus guère et ne 262 DANSEUR (PREMIER, SECOND). — DANSEUR DE CORDE. veut plus voir que des danseuses. Notre Opéra a toujours été fertile en excellents artistes en ce genre, dont un gi-and nombre ont acquis une célébrité européenne. En suivant l'ordre chro- nologique, il faut citer surtout, pour les dan- seurs : Beauchamps, Pécourt, Blondy, Balon, Boutteville, Dumoulin, Maltaire, Laval, Dupré, Hamoche, Lany, Pitro, Yestris, Gardel, Dau- berval, Vestris fils, Noverre, Gardel cadet, Despréaux, Nivelon, Branchu,Milon, Aumer, Duport, All)ert, Mérante, Montjoie, Perrot, Mazillier, Petipa, Saint-Léon, Coralli; parmi les danseuses, on doit mentionner M"'" La Fontaine, Subligny, Dange ville, Prévost, Ca- margo. Salle, Mariette, Puvigné, Lyonnois, Lany, Vestris, Allard, Guimard, Heinel, Bi- gottini, Théodore, Saulnier, Chameroy, Clotilde, Noblet, Anatole, Montcssu, Legallois, Taglioni, Pauline Leroux, Fitzjames, Thérèse et Fanny Elssler, Dumilâtre, Carlotta Grisi, Rosati, Ferraris, Emma Livry, Beaugrand. A l'origine, l'Opéra ne possédait point de danseuses, et ce n'est que dix ans après la fon- dation de ce théâtre (qu'elles y parurent pour la première fois et y prirent droit de cité, pour y obtenir depuis lors les succès que Ton sait : — « Les demoiselles Fontaine et Subligny, très l)elles et nobles danseuses , dit l'abbé de Laporte, ont été les premières femmes qui aient dansé sur le théâtre de l'Académie royale de musique. Les rôles des femmes étoient remplis], ainsi qu'il est d'usage en Italie, par des hommes déguisés, (jui, en dansant, représentent les femmes. Ce ne fut qu'au ballet du TriompJie de V Amour (1681) que se fit ce changement. On vit danser dans ce ballet, représenté d'abord devant le roi à Saint-Geimain en Laye, M. le Dauphin et M"® la Dauphine, Mademoiselle, la prin- cesse de Conty, et d'autres princes , princesses, seigneurs et dames de la cour. Ce mélange des deux sexes fut si goûté , que lorsqu'on donna ce ballet à Paris sur le théâtre de l'Opéra, on y introduisit des danseuses, ce qui n'avoit pas encore été vu sur ce théâtre. Elles ont composé depuis la partie la plus brillante et la plus voluptueuse de l'Opéra. )> Toutefois, on pour- rait inférer de ce que dit l'abbé de Laporte que M^'® Subligny parut sur ce théâtre en même temps que M"** Fontaine, ou plutôt de la Fon- taine. Ce serait une erreur. M*'* de la Fontaine fut réellement la première danseuse qui se montra sur la scène de l'Opéra, où elle obtint un succès prodigieux, ce qui ne l'empêcha pas, — exemple peu suivi par celles qui lui ont succédé, — de prendre le voile et de faire pro- fession quelques années après. M"® Subligny lui succéda. DANSEUR (Premier, second). — Ces termes s'expliquent d'eux-mêmes, et ser^'ent à caractériser la nature et l'importance des emplois dans la danse. Toutefois, il faut dis- tinguer qu'il y a \e2)remier danseur nohïe, ou sérieux, et le second, et le pre77iier danseur co- mique, et le second. DANSEUR DE CORDE. — Homme qui marche, danse et (( voltige d sur une corde ten- due à l'aide de tréteaux. La danse de corde est fort ancienne; les Grecs la connaissaient dès l'institution chez eux des jeux scéniques, et elle fut habilement pratiquée à Rome, sous les empereurs. Le danseur de corde ordinaire, chaussé de souliers très légers, s'en fait frotter la semelle avec du blanc d'Espagne, dès qu'il monte sur la corde, pour la rendre moins lisse et l'empê- cher de glisser, puis il s'arme d'un balancier, long et lourd Imton qu'il tient des deux mains, et qui, selon qu'il en fait porter le poids d'un côté ou de l'autre, l'aide à se maintenir en équilibre. Mais ce n'est là que l'acrobate vul- gaire. On a vu des artistes de ce genre opérer de véritables prodiges, et les théâtres de nos foires, aux dix -septième et dix-huitième siè- cles, en ont montré d'étonnants. Parmi eux il faut citer Maurice Vondrebeck, qui fut direc- teur d'un de ces établissements; Laurent, qui, vers 1703, à la Foire Saint-Laurent, dansait avec des chaînes aux pieds et avec des paniers; Arms, qui parut à la Foire Saint -Germain en 1718 ; Antoni, qui fut, paraît-il, extraordinaire dans Ceci n'est rien, et le même journal va nous renseigner sur d'autres faits qui se produisaient en même temps a Rouen. Le 11) mai, jour de la réouverture du théâtre et du premier début de la nouvelle troupe (en province, chaque ar- tiste était tenu à effectuer trois débuts, dans trois rôles différents) , des scènes scandaleuses s'étaient produites, l'intervention de la garde avait été nécessaire, des arrestations avaient été opérées ; la population était très surexcitée ; aussi s'attendait-on pour le lendemain à un nouveau tumulte ; cela ne pouvait manquer : Les fautes commises dans la soirée de mardi, disait le chroniqueur, ont porté leurs fruits ; pen- dant toute la journée d'hier, il n^avait été question par tonte la ville que de la sévérité inouïe déployée contre deux hommes honorables, traînés au violon entre quatre soldats, sans qu'on ait eu égard ni à leur position bien connue , ni aux garanties qu'ils (1) Moniteur des Théâtres du 16 mai 1840. présentaient pour le cas même où des poursuites ultérieures auraient dû avoir lieu : on n'avait parlé que de citations en police municipale données, pour ce matin, à cinq ou six jeunes gens de la ville. Les têtes s'étaient montées, les partis avaient ' eu le temps de se former, et à l'agitation qui ré- gnait aux environs du théâtre longtemps avant l'heure do la représentation , aux colloques animés qui s'établissaient de toutes parts, il était facile de prévoir une soirée des plus orageuses. Aussi , la po- lice avait-elle pris ses précautions , la garde muni- cipale était au grand complet, les postes renforcés, et le parterre rempli d'agents dont la dextérité à pousser à la porte les spectateurs turbulents est depuis longtemps passée en proverbe. Au lever du rideau , chacun était à son poste et le tapage a commencé. Les sifflets se sont fait en- tendre : des voix nombreuses ont appelé le régis- seur. Alors le commissaire de police a pris la parole, d'abord pour prévenir que les interrupteurs seraient immédiatement expulsés de la salle , et puis ensuite pour apprendre au public que les règlements ne permettaient pas au régisseur de paraître sur la scène lorsqu'il était demandé par les spectateurs. Donc , le régisseur n'a pas paru , à cet instant du moins. L'entrée en scène de M*"® Hébert a ramené quelque calme ; son air a été vivement applaudi, et le premier acte s'est terminé sans autre incident que quelques bordées de sifflets distribuées à un deuxième ténor du nom de Legaigneur, engagé provisoirement pour quel([ues représentations. Au commencement du troisième acte , le régis- seur, au grand étonnement du public, qui n'a pas trop compris cette élasticité du règlement de po- lice, a paru sur la scène pour annoncer que, M"'® Hébert ne sachant pas le duo, ce morceau ne serait pas chanté. Cet incident n'était pas de nature à apaiser l'irritation ; les sifflets ont recommencé de plus belle , et c'est au miheu de ce tapage infernal que M. Grosse th a chanté les premières mesures de sa barcarolle. Il fallait une victime pour cette soirée, et notre nouveau ténor était condamné à l'avance; tous étaient là , le sifflet aux lèvres , attendant un écart pour consommer le sacrifice. Que voulez-vous que devienne un malheureux chanteur dans cette pé- nible position ? Sa poitrine se resserre , son gosier se dessèche , tous ses calculs , toutes ses combinai- sons , tous ses effets sont bouleversés , et le public , qui ne demande qu'un prétexte, trouve bien vite à satisfaire sa mauvaise humeur. Ainsi est-il advenu de M. Grosseth; chuté, sifflé, hué avec un achar- nement sans exemple , il a dû faire annoncer que de ce moment il renonçait à son engagement, mais DÉCADIER. — DÉCEXTRALISATTOX ARTISTIQUE. 207 que pourtant il consentait encore à terminer cette représentation. Ce qui s^est passé ensuite est un grand sujet de honte pour les spectateurs ; ils ont oublié toutes les convenances, et cet artiste, qui ne jouait plus que par com])laisance , et dont ils avaient déjà brisé Tavenir, ils Font abreuvé d'humiliations et maltraité sans mesure et sans pitié. Devant de sem- blables manifestations, M. Grosseth n'avait plus qu'à se retirer, il a quitté la scène et le rideau est tombé. Bientôt après, la force armée a pénétré dans le parterre et la salle a été évacuée. Alors de nombreux rassemblements se sont formes dans les mes adjacentes au théâtre ; les cris : chez Nicolo ! se sont bientôt fait entendre . et deux cents person- nes environ se sont portées vers la demeure du di- recteur (1). Il s'agissait d'un charivari. A part bon nombre de curieux et d'oisifs, cette troupe hurlante nous a paru fort misérablement composée ; nous n'y avons guère trouvé que de ces figures qui courent après toutes les occasions de trouble et de désordre. La force publique, accourue en toute liAte sur les lieux, a promptement fait évacuer la place (2). En lisant les récits de pareilles scènes, on ne sait trop ce qu'il faut le plus admirer, de l'im- bécillitc, de la grossièreté ou de la lâcheté de ceux qui en étaient les auteurs. Eh bien, cela se renouvelait tous les ans, dans la plupart de nos villes de province, en France, au dix-neu- vième siècle, chez le peuple (jui se dit avec quelque raison le plus doux et le plus police de la terre!... Tout cela n'est plus, fort heu- reusement, et, à part quelques exceptions qui se font de plus en plus rares, il n'en reste que le souvenir. En province, comme à Paris, les débuts s'effectuent généralement aujourd'hui de la façon la plus paisible, et il semble que le sifflet lui-même ait complètement disparu des coutumes naguère si bniyantes de nos scè- nes départementales. DÉCADIER. — Vov. Se>iaixikr. DÉCENTRALISATIOX ARTISTIQUE. — C'est, en France, un mot un peu vide de sens, auquel certains esprits généreux s'atta- chent avec une obstination digne d'une meil- (1) Nicole Isouiird, frère du compositeur célèbre. (2) MvniUur des Théâtres du 27 mai 1840. ieure cause. ar des pro- cèdes dont 1 effet paraîtrait barbare si la pein- ture était vue de près et sous un jour naturel. Dans son livre si curieux et si intéressant, FEnvers du Ihéâlre, Moynet a donné, au sujet du décor, des détails trt-s précis et '■ plan) ; 5. — Ferme oblique, cfitij jardin (du 1" au 2» plan); (i. — aiSesis. cflté conr (3" plan) ; 7. — Applique derrière la ferme oblique, cOté DÉCOR, DÉCORATION. 10. — F Fenne, face an public (2" plan) ; (3' plan) ; (2- plan). Le lecteur peut ainsi se rendre compte de li façon dont le décor est divisé, et de la fios t o qu'occupe chacune de ses parties. Le décor du deuxième acte du Tribiil de Zamora, opira de M. Gounod, qui illustre aussi le présent art cl pour être d'un autre ^enre, n'est pas mo i s beau(]uekprécédent;ilestrœuvi-udcM T B Lavaatrc, l'un des artistes les plus l'emurquables de ce tempe. Noua faisons maintenant un nouvel emprunt à Moynet, qui va nous faire connaître les dé- tails du travail du peintre décorateur ; Sn France, la détrempe est presque exclusive- ment employée pour le décor do tbéfitre. Grfteo an talent des artistes français, on en obtient des ré- sultats remarquables. Ses tons frais et brillants se prêtent admirablement aux exigencos de la Hccne, et sont le complément naturel des étoffes éclatantes dont on habille les personnages; bien souvent le peintre doit ajouter au charme et i la variété de conlcur que lui donna i^ riche palette des études sérieuses de perspective, d'archéologie et d'otlino- graphie. Depuis quarante ans , la [leïnturo Rcéniqiic a été en progressant. En ces derniers temps, l'in- troduction de la décoration anglaise a pu faire craindre un moment une invasion du mauvais goOt, maïs le bon sens de nos artistes a sn faire tourner au profit de l'art les procédés employés esclnsive- ment par nos voisins pour obtenir des effets exa- gérés. Les progrès de l'industrie et des sciences sont venus s'ajouter aux moyens qu'on possédait pour augmenter les effets de la scène : mi a întroânit les rideaux de gaze, les toiles métalliques, les eaux naturelles, les paillons, les cristaux factices appe- lés loghis dont le» facettes en étain brillent comme des pierres prérîenaes, les glaeos, la lumière élec- trique. Une invention qui date de quelques années à peine, est vcnui donner au feuille des arbres nne légèreté semblable u celle de la nature un grand filet, collé derrière la tôle permet de découper celle-ci , suivant tous les contours que donnent les brandies légères garnies de feuillage. Le filet sou- tient la toile ainsi découpée et demeure invisible pour le Hiicctateur. Les traces do la construction eu bois qui porte le décnr disparaissent complètement. On a obtenu an moyen de gazes lamées des eaux transparentes qui reflètent les objets environnante. On emploie au théâtre la peinture à l'huile et i l'essence quand on veut obtenir des effets transpa- rents; c'est sur le calicot que l'on peint, après loi avoir fait subir une préparation ; on réclaîre par derrière comme les stores, et l'on obtient des ef- fets analogues. La décoration théâtrale, nu moyen de tous ces auxiliaires, peut iiroduire des effet» murveilloux. Il nous reste t'i faire connaître les procédés d'exé- cution qui suivent Ic tracé dont nous avons donné la description. — Lorsque la décoration est mise & DÉCOR, DÉCORATION. 281 l'cDcre, lorsque les fennes et les châssis sont chan- tournés, on se met à l'œnTre. Pour couvrir tine aussi vaste surface, le concours de plusieurs pein- tres est nécessaire. Le premier soin est de fùre les toru, et c'est par baquets entiers qu'il faut procé- der. Une décoration pour nn grand théâtre déve- loppe en mD3-enue de mille à qninze cents métrés. Les rideaus, les plafonds sont étendns sur le par- quet de l'atelier, et c'est avec des brosses grosses comme des balais, dont elles portent le nom, qu'on procède k l'ébauche ; toutes ces brosses sont emman- chées d'une hampe assez longue pour que le pein- tre puisse travailler debout ; ce n'est que dans les petits détails d'architecture qu'on emploie des ins- trumenta plus courta et plus délicats. Dans ce cas, et lorsque la place manque, on redresse la décora- tion contre le mur et on la finit en se servant des ponts suspendus à la charpente du comble , espacés les una des antres de doux mètres, et pennetlant de peindre toutes les parties de la surface du dé- Ce dernier mode de travail s'emploie le moine possible, et seulement dans les cas d'absolue né- cessité ; il est plus long, et ne permet que des tra- vaux assez minutieux. Il est impossible de peindre ainsi le paysage et les parties pittoresques, qui doivent être traitées largement; l'emploi d'une certaine quantité de couleurs liquides ne serait pas sans inconvénient sur uoe surface verticale. La méthode la plus ordinaire est donc le travail but le sol. Les rideaux et plafonds sont tendus et broque- tés , le peintre marche sur son travail ; il fait même transporter sa palette près de lui, dans les cas où un détail important nécessite sa présence pendant quelque temps sur iin seul point; autrement, il va sans cesse du point oit il travaille à celui où sont ses couleurs. Ce manège, répété chaque fois que la broB!>e a besoin d'être remplie, est un exercice gymnastique assez fatigant. La palette du peintre de décor est en proportion avec l'art qu'il exerce : c'est une boîte de plus d'un mètre et demi , dont la surface intérieure est entourée, sur trois otites seu- lement, d'une quantité de grands godets renfer- mant la série la plus complète des matières co- lorantes que puisse donner l'industrie. L'art du décor a pris dans nos théâtres, de- pnis quelques années, une extrême importance ; tout ce qui tient à la mise en scène considérée sous tous ses aspects, à l'illusion théâtrale, à 1& vérité du rendu dans l'ordre historique, ethno- graphique ou purement poétique, est l'objet des études les plus sévères et des soins les plus DÉCORAT-EUK. constants. On peut dire que l'Opéra, boub ce rapport, marcha à la tébe de la civilisation théâtrale; mais il est saivi de près, daus la mesure dn posBible, par ceux de ses confrères qui, comme le Ghâtelet, la Porte-Saint-Martîn, ont en qnelque sorte pocr spécialité de com- pléter le spectacle intellectuel par le spectacle \-isuel, et qui même, quelquefois, sacrifient le premier an second un peu plus qu'il ne &ti-' drait. D'antres encore, tels que la Comédie-' Française et l'Opéra-Comiqae, se distinguent d'une façon particulière en ce qui concerne le décor et la mise en scène, et il n'est pas jusqu'iV des scènes minuscules, telles que la Rehais-' sance et les Nouveautés, qui ne fassent sous ce rapport de véritables prodiges. En réalité, FroDtiipkc il' it lall; , RpTÉMatuit onTnge, d'qttta te dnaln di l'art du décor semble avoir atteint chez nous son apogée, et, à moins que la découverte de procédée nouveaux n'amène avec elle la pos- sibilité de nouveaux effets, il semble difficile que l'on paisse parvenir à faire miens en ce sens que ce qne l'on feit aujourd'hui, DÉCORATEUR. — Peintre qui est chaîné d'exécuter les décors nécessaires à l'action scé- niqne. Chamfort le définit ainsi : — « Homme expérimenté dans le dessin, la peinture, la sculpture, l'architecture et la persi>ective, qui invente et qui exécute ou dispose des ou\Tages d'architecture peinte et toutes sortes de di^o- rations nécessaires au théâtre. » Nous avons, dans l'article pri-ci'ili-iil. , fait connaître, avec les qualités qui doivent distin- guer le peintre dccontear, la nature et la di- DÉCORATEUR. versité des procédés employés par lui. H ne nous reste qu'à donner les noms de cens de nos artistes qui, depuis deux siècles, se sont parti- culièrement distingués dans cet art difficile. J'avoue n'avoir aucuns renseignements sur les décorateurs des grandes pièces à machines qui attirèrent tout Paris au théâtre du Marais et rendirent ce théâtre si fameux dans la se- conde moitié du dix-septième siècle. 285 Toutefois, on peut dire que quand l'Opéra eut été fondé en France, il ne connut pins de rival sous le rapport de la richesse et de la beauté de la mise en scène, et il a conservé jusqu'à ce jour sa supériorité. Au nombre de ses décorateurs il faut citer (car les Italieus furent nos initiateurs en cet art), pour l'époque de son origine, un Italien célèbre en ce genre et qui était l'associé de Scrmiiilonl , d'aprls le poitrait de ColKin. Lully, Vigarani, (jui fit les décors de Cadmus et des Fêtes de l'Amour et de Bacchus, puis notre exceUent i»eintre Jean Bérain, à qui l'on doit ceux A'Amadis et à'ATmtde, et Jacques Rousseau, qui exécuta ceux de Proser/ntie d'après les dessins mémos de Bcraiii, Au dix-huitième siècle, un artiste vénitien fort distingué, Pietro Algîcri, fit admirer deux décors superbes dans Dardanus et dans Zorons- ire; Watteau et Boucher ne dédaignèrent pas, dit-on, de peindre quelques toiles pour notre grande scène Ijriquc. Enfin le célèbre Servandoni, qui révolutionna chez nous l'art du décor, surtout dans le (Spec- tacle en décorations qu'il ouvrît aux Tuileries vers 17;i8 et qui obtint tant de succès, se fit ap- plaudir pendant plusieurs anuws à TOiwra pour ses décors admirables ; puis ce furent Tramblin, Boofjuet, Paris, (jui se produisirent aussi à ce Ù\'M.iK. 286 DÉCORATION (ateliee de). — DÉCRET DE MOSCOU. Pendant ce temps, la Comédie-Italienne, qni prenait aussi beaucoup de soin de cette partie de sou spectacle, employait successive- ment comme décorateurs Lemaire, qui fit re- marquer surtout le beau Temple du Soleil qu'il exécuta pour la parodie de Phaèton; le fils de cet artiste, qui travailla longtemps avec lui; Gaétan Brunetti et son fils Paul BrunettI» peintres italiens qui se distinguèrent aussi à la Comédie - Française ; Pietro Algieri, nommé plus haut, qui fit un décor charmant pour 2^ Fées rivales; puis un autre Italien, Clarici, puis Piètre, Baudon, Guillet père et fils, De- leuse, Dubois. A rOpéra-Comique, c'était Boucher, Guillet père et Deleuse, dont on vient de voir les noms. Moulin. A la Comédie-Française, nous trouvons Louis Debray, Brunetti, Servandoni, Lesueur, Moreau. Plus tard , à la création du théâtre de Mon- sieur (Feydeau), on voit débuter Dcgotti père, Dussaulx, Matis. En atteignant le dix-neuvième siècle, nous trouvons toute une pléiade de décorateurs mer^Tilleux, qui ont produit sur nos grands théâtres toute une longue série de véritables chefs-d'œuvre en ce genre. C'est d'abord Degotti, qui, du théâtre Feydeau, passa bien- tôt à l'Opéra, où Cicéri lui succéda avec autant de succès; puis Isabey, Bouton, Daguerre^ Gué, Jouannis, Desfontaines, Blanchard, Du- may ; puis encore Philastre, Cambon, Thierry, Robecchi, Diéterle, Chéret, et enfin MM. Rubé, Lavastre frères. Chaperon, Nolau, Daran, Zara, Feuchères, Carjiezat, Séchan, Desple- chin, Fromont, Poisson, Nézel, Cappelli, Cor- lin, etc., etc. Tous ces excellents artistes ont porté l'art de la décoration théâtrale à un point qu'il sera difiicile assurément de surpasser. DÉCORATION (Atelier de). — Pas plus que pour leurs magasins de décors, les théâtres ne saumient avoir de place pour leurs ateliers de décoration. Ceux-ci sont donc pres- que toujours éloignés du théâtre, quelque gène qu'il en puisse résulter parfois pour le service. L'atelier de décoration de l'Opéra, qui est \Tai- meut admirable, est situé rue Richcr, où il est joint aux magasins mêmes. Situé derrière ces magasins, il forme une immense salle, qu'on pourrait comparer à une halle, si ce n'est qu'elle est merveilleusement éclairée par le haut. C'est là que les peintres de l'Opéra et leurs élèves travaillent constamment , d'un bout de l'année à l'autre, — car le matériel d'un ouvrage est à peine terminé qu'il faut aussitôt s'occuper de celui qui lui succédera. DÉCORS (MiGASiN de). — Les théâtres & grand déploiement scénique, tels que l'Opéra, le Châtelet, la Porte -Saint- Martin , dont le matériel est immense, ne sauraient avoir, dans le théâtre même , la place nécessaire pour em- magasiner leurs décors. Il leur faut donc des magasins spéciaux à cet effet, qui souvent sont fort éloignés ; l'Opéra et l'Opéra-Comique sont les seuls dont les magasins soient situés dans le centre de Paris, et ceux de l'Opéra, dans la rue Richer, sont les modèles du genre. Spacieux autant qu'on le puisse désirer, bien construits, bien organisés, merv'eilleusement aménagés pour le ser^'ice, avec cela on ne peut mieux situés pour la facilité et la célérité des trans- ports, les magasins de décors de l'Opéra ne laissent rien à souhaiter. DÉCRET DE MOSCOU. — Ce décret, fameux dans notre histoire théâtrale, a été rendu en 1812 (15 octobre) par Napoléon I"", et s'applique uniquement à la Comédie- Fran- çaise, dont il règle la sur\'eillance, l'organisa- tion, l'administration, la comptabilité, la police et la discipline. Le titre I''' a rapport à la direction et à la suiTcillance du théâtre; le titre II s'occupe de l'organisation de la So- ciété, de la division des parts, des pensions de retraite pour les sociétaires, acteurs aux ap- pointements et employés ; le titre III organise l'administration, la comptabilité, les assemblées générales ; le titre IV règle la distribution des emplois, la formation du répertoire, les dé])uts ; le titre V établit les rapports du théâtre avec les auteurs : lecture et réception des piôcM's nou- velles, droits de représentation , n'%niliiriwition des entrées; le titre VI est n^lutif à lu jM^lice intérieure du théâtre; le titn; VII n-nfcrme des dispositions générales ; enfin, !*• titre VIII DÉDIT. — DÉNOUEMENT. 2^7 concerne les élèves que le Conservatoire forme pour la Comédie-Française. Pendant trente-cinq ans, la Comédie-Fran- çaise vécut sous le régime du décret de Moscou. Une ordonnance du 29 août 1847 vint le modifier quelque peu, et une autre ordonnance, du 27 avril 1850, qui laisse subsister la plus grande partie des dispositions de ce décret, est celle qui régit aujourd'hui la Comédie. DÉDIT. — Dans tous les contrats passés entre un directeur de théâtre et un comédien, une clause spéciale stipule un dédit à payer par celle des deux parties qui manquerait à ses en- gagements et se refuserait à exécuter les con- ditions du traité jusqu'au tenue fixé par celui- ci. Ce dédit est souvent considérable, et on le voit atteindre le chiffre de ^'ingt, trente, quarante mille francs. A la Comédie-Française il est de cent mille francs pour les sociétaires, et loi-sque, il y a deux ou trois ans. M"'*" Sarah Bernhardt a quitté brusquement ce théâtre, au mépris du traité qui la liait à lui, elle a été condamnée judiciairement à payer cette somme. Pareille condamnation avait été prononcée, vera 184G, contre M"*' Plessy, lorsqu'elle était partie subrepticement pour la Russie. DÉFILÉ. — Yoy. Cortège. DÉJAZETS. — Classe de rôles de femmes, comprenant des soubrettes délurées et des tra- vestis, qui tient son nom de l'actrice fameuse qui a rendu ce nom célèbre, et rentre dans l'emploi des soubrettes. (Voy. Soubrettes.) Nous n'avons pas autre chose à dire en ce qui concerne le dénouement; notre tâche se home à rexj)liquer. DE PAK ET POUR LE PEUPLE. — Depuis plus de cent cinquante ans, tous les gouvernements qui se sont succédé en France ont eu la coutume de faire donner par les théâtres de Paris, en des jours de réjouissances publiques et ix>ur des circonstanc<îs solennelles, des représentations t/ratls dont ils payaient les frais. Ce que Louis XV et Louis XVI avaient fait à de nombreuses reprises, le gouvernement révolutionnaire le fit à son tour, et dès 17i);> • organisa sur la plupart de nos théâtres des sixictacles gratuits qui étaient d'ailleurs parti- culièrement soignés et (jui attiraient une foule énorme. Les gouvernants d'alors avaient trouvé une singulière fornmle pour caractériser ces spectacles ; ceux-ci étaient «lonnés, disaient-ils, de par et pour le peuple, et cette mention était en effet imprimée, en gros caractères, en tête des affiches qui les annonçaient. Le i)etit al- manach intitulé /en Spectacles de Paris et pu- blié en 17î)4 nous apprend que h TOix-ra a donné souvent, de par ci pour le peuple, des repré.eu près su en ce qui concerne le dialogue et le côté intime. DESSINATEUR DE COSTUMES. — C'est un art fort difficile (]ue celui de dessina- teur de costumes de théâtre, surtout lors(iu'il s'agit d'une scène très vaste, pouvant contenir juBqa'à deni et trois cents persouneg, qui doi- vent être vêtues de telles façons qne l'ensemble général soit très fondn et très harmonieux sans nuire à la richesse et à l'éclat, que les groupes ne jurent pas les uns avec les autres, que les couleurs se marient entre elles en évitant tout choc douloureux pour l'œil, tout bariolage fâ cheux enfin que les costumes souvent trts riches des comparses i.t de la figuration ne puissent nuire a 1 cff(.t necessa re q l Jt \cnt OU S. 289 produire ceux des premiers sujets. Il faut d'ail- leurs que les nuances générales des costumes se fondent dans celles des décors que las tons soient choiBiB de telle sorte que la lumière ne puisse ni les esaspeier m les assourdir et qu elle leur laisse juste 1 éclat tt ! intensité qu ils doivent avoir Cest là nous le répétons, un art diSl elle rendu plus délicat encDre aujourd hui par la recherche tns conscitncieuse que Ion fait de h % ritt li it n pie au theitre L'Opéra, qui a toujours été le modèle de nos théâtres eu ce qui concerne l'art général de la mise en scène, a toujours eu à sou service un dessinateur attitré pour les costumes. Parmi les artistes qui lui ont été attaches sous ce rap- port, on rencontre les noms de Martin, de Boquet (dont les archives de ce théâtre pos- sèdent des séries de dessins exquis), de Boucher, d'Auguste Garneray, de Fragonard, de Le- comte, de M. Lonnier. C'est aujourd'hui un artifîte fort distingué, M. Eugène Lacoste, qui remplit cet office. En ce qui concerne les au- AlCTIONHAinB DC THËATftB. très théâtres, on peut citer JIM. Thomas, Grévin , Draner, comme ayant obtenu des suc- cès mérités pour les costumes dessinés [mr eux à la Porte-Saint- Mai-tin, à l'Opéra -Comique, à la Renaissance, aux Nouveautés, etc. DESSOCS. — On appelle les dessous d'un théâtre l'espace immense, nécessaire ù la ma- nœu\Te des décora et au jeu des machines, qui s'étend en profondeur an dessous de toute la surface du plancher de la scène. Ces dessous se divisent, daus leur hauteur, en trois parties 290 DESSOUS. ou étages, qne Ton compte en partant de la Bcène ; c'est-à-dire qne le plus élevé s'appelle premier dessons, et le dernier troisième dessons. On dit même quatrième et cinquième dessous, lorsque, conmie cela se voit dans certains théâ- tres bien organisés, il se trouve, sous le plan- cher de la scène, un espace assez vaste pour y loger, selon les besoins, des planchers partiels qui forment en tout quatre et cinq étages. Dans ces théâtres, les dessous ont une profondeur considérable, car il faut que certains décors, certaines fermes y puissent tenir dans toute leur hauteur. A la Porte-Saint-Martin, par exem- ple, chacun des trois dessous n'a pas moins de 8 mètres 60 de haut. Tons les desRoas , dit Moynet dans son Envers du théâtre, répètent le plan de la scène, les trappes, les trappillons, excepté les costières, qui se trou- vent remplacées par un rail dans le premier des- sous , et dont il n*eBt plus question dans le deuxième et le troisième. Le plan étant le môme à chaque étage et les seules parties fixes étant les sablières , charpentes transversales qui sont les uniques sup- ports des trappes et trappillons , il s'ensuit que Ten- semble des dessous est une série de fermes paral- lèles, composées de montants ou poteaux et de sablières (1). Les poteaux inférieurs reposent sur des dés en pierre ou en fonte parpaing solidement fixés sur le sol , et les sablières supérieures , servent à supporter, comme je l'ai dit, les trappes et les trappillons. Ce système de fermes de charpente ne constitue pas un ensem- ble bien stable, puîsqu^on ne peut les relier par un chaînage régulier, à cause de la nécessité de laisser passer partout de grands objets, qui ne doivent rencontrer aucun obstacle. On a remédié à cet inconvénient au moyen d*une grande quantité de crochets mobiles, en fer, qu'on décroche quand une manœuvre se fait et qui maintiennent, tant bien que mal, Técartement entre les fermes; je dis tant bien que mal : les masses qui se meu- vent journellement sur les planchers, les dé- cors équipés dans le dessous qui empêchent mo- mentanément remploi des crochets, et beaucoup (1) n ne faut pas confondre ces fermes, e8]:)èces de tréteaux, avec IsM ferme* (Voy. ce mot) qui forment des parties de décorations. L'emploi de ce même mot pour caractériser deux objets CBsentiellement dififérents est une pauvreté dans le vocabulaire de la machinerie et de la décoration théâtrales. d*autres causes, tendent toujours à déverser Tensem- ble sur la salle. De là de nombreuses déviations, qui, bien souvent, arrêtent une manœuvre au mi- lieu de son développement ; de là aussi Tinclinai- son dans la direction de la salle, que prennent peu à peu les châssis, inclinaison qui les empêche souvent de se raccorder avec leurs plafonds, etc. On a essayé et on cherche de nouveau un système meilleur. La solution n^est pas encore trouvée. Le plancher du théâtre étant une chose essentielle- ment mobile , on ne peut obtenir la stabilité qu'en lui retirant sa qualité principale, la mobilité. Dans le dessous, les traverses ou sablières reçoi- vent le plancher du premier et du second dessous , planchers composés de trappes, qu'on retire à la main suivant le besoin. Les sablières sont assem- blées et boulonnées de manière à être démontées et retirées à volonté , ainsi que les poteaux qui les soutiennent. Il est des cas où Ton a besoin d'ouvrir deux ou trois plans : il faut alors pouvoir le faire en peu de temps. Les chapeaux de ferme portent à la partie su- périeure et de chaque coté une espèce de feuillure dans laquelle glissent les trappes (1). Cette feuil- lure s'abaisse vers la levée pour que la feuille du parquet descende, entraînée par son poids, de l'é- paisseur nécessaire à son passage sur le plancher. Les trappes, étant composées de fragments, s'abais- sent une à une à mesure qu^elles passent à la le- vée. Quand on les renvoie en place, on remet la trappe qui se trouve dans la feuillure agrandie au niveau du plancher supérieur, au moyen d'un le- vier très simple qui a été abaissé avant le passage. Ce mouvement de trappes se fait à la main , quand il s'agit d'entraîner la moitié d'une rue. Un crochet est fixé sous la trappe qu'on veut entraîner, un au- tre est sous celle qui doit s'enfoncer sous la levée ; quand le levier a fait sa manœuvre , un rouleau en bois, tournant librement autour d'un axe en fer, entre deux poteaux , près de la levée , sert de con- ducteur au cordage qui entraîne la trappe ; quand on veut refermer, le cordage tiré sur le rouleau , en sens inverse , ramène le tiroir à sa position primi- tive... Le second dessous diffère du premier en ce que, n'ayant pas de costières , les poteaux sont plus forts et moins nombreux. Le plancher est posé par petites parties ù claire-voie , d'un poteau à l'autre , sur des entretoises qui peuvent se démonter à l'instant selon les besoins du service. Nous apercevons les (1 ) Qa*on se figure exactement le jeu du conrerclc d*UDe boîte de dominos dans sa rainure. i DESSUS. 291 premiers treuils et les premiers tambours... Le troisième dessous est plus élevé que les deux autres ; on y pose des planchers partiels lorsqu^on a un tam- bour ou un treuil à disposer pour un changement ou une manœuvre spéciale. Le plan est le même que pour les étages supérieurs ; les grandes fermes descendent presque jusqu'en bas. Une grande quantité de treuils et de tambours occupent ces profondeurs. On y voit encore des bâtis de char- pente, destinés aux grandes machines et aux pra- ticables. Les dessous de la scène sont une des visites les plus intéressantes et les plus curieuses que Ton puisse faire dans un grand théâtre, à la condition d'être conduit par un guide sûr et expérimenté qui puisse vous expliquer chaque chose, et qui, de plus, vous épargne, par sa connaissance des lieux, une foule de chutes dé- sagréables que voas ne manqueriez pas de faire au milieu de ces poteaux, de ces fermes, de ces treuils, de ces tambours, sans compter les es- paces vides qui se rencontrent à chaque ins- tant et qui pourraient rendre ces chutes plus dangereuses encore que désagréables. Il n'est pas facile, en effet, de se mouvoir dans ce mi- lieu si accidenté, si étrange, si encombré, si plein d'obstacles de tout genre, et où il faut avoir l'œil ouvert non seulement de tous côtés, mais encore au-dessus et au-dessous de soi, pour éviter toute surprise et se garder de tout péril. Il est à croire, pourtant, qu'une réforme s'opérera sur ce point dans un temps plus ou moins rapproché, et déjà l'exemple a été donné par M. Garnier dans l'aménagement des des- sous de la nouvelle salle de l'Opéra. « D'abord, dit M. Nuitter (1), ils sont dégagés de presque tous les poteaux qui encombrent les autres théâ- tres et qui nuisent à la facilité de la circula- tion. Ce résultat a été atteint en changeant le mode de construction jusqu'ici adopté et en remplaçant le bois par le fer. On a ainsi plus de rigidité et des portées plus grandes, qui ont permis la suppression d'un grand nombre de supports. De plus, ceux qui subsistent encore sont naturellement plus élancés que s'ils étaient en bois, de sorte que ces dessous sont entière- (1) Le Nouvel Opéra, ment libres et que le service s'y fait avec une grande facilité. Quant aux nombreux engins qui garnissent ces dessous, ils sont devenus moins encombrants. Ils ont été construits en fer au lieu de bois, ce qui diminue leurs dimen- sions au moins de moitié. Les treuils, les cas- settes, les cMriots, tout cela est devenu élégant et léger d'aspect, et au lieu de l'espèce de confu- sion que présentent ordinairement les dessous d'un théâtre, on trouve au nouvel Opéra un ordre parfait et une complète sécurité. Outre ces avantages , il faut reconnaître que la cons- truction en fer des dessous et des engins fait disparaître une des grandes causes d'incendie, ce qui n'est pas à dédaigner. Il est vrai que tout cela a coûté cher, mais il ne faut pas re- gretter une dépense qui facilite singulièrement les manœuvres et qui est une garantie contre les sinistres , si fréquents dans les théâtres ordinai- res. y> Par malheur, les avantages de la réforme essayée par M. Ganiier sont compensés par de sérieux et fâcheux inconvénients. L'emploi du fer, en donnant plus de solidité au plancher du théâtre, lui enlève en même temps toute son élasticité, et rend impossible la manœuvre ra- pide des décors. C'est ainsi qu'aujourd'hui, à l'Opéra, on ne peut pas exécuter le moindre changement à vue, qu'il faut baisser impitoya- blement le rideau pour une manœuvre qui se ferait allègrement dans un théâtre de sixième ordre, sous l'œ'il du public, et que tout mou- vement de machinerie un peu compliqué est devenu inexécutable dans un théâtre qui a coûté si cher et qui dcsTait servir de modèle. Lors- qu'il fut question, il y a deux ans, du Sigurd de M. Reyer, l'un des motifs du refus de l'ou- vrage fut, dit-on, l'impossibilité du jeu de ma- chines et de décors (ju'il exigeait ; de sorte que ce qui s'est fait avec la plus grande facilité et de la façon la plus heureuse au théâtre de la Monnaie, de Bruxelles, était déclaré impossible à notre Opéra. Le lecteui' trouvera au mot Trappe tous les renseignements complémentaires sur le rôle prépondérant que jouent les dessous dans l'exer- cice de la machinerie théâtrale. DESSUS. — Les dessus d'un théâtre, mys- térieux comme les dessous, comprennent, 292 DESSUS (premier, second). — DIALOGUE. comme ceux-ci, plusienrs étages, et s'étendent sur toute la surface de la scène, de même que les dessous s'étendent sous la totalité du plan- cher. Les dessus comprennent tout Tensemble du cintre, jusqu'aux combles, et nous ren- voyons le lecteur au mot Cintre^ où il en trou- vera la description complète. DESSUS (Premier, second). — C'est le nom qu'on donne souvent, dans les chœurs, aux deux parties de femmes, les soprani (premiers dessus) et les contralii (seconds dessus), et, i>ar extension, aux artistes qui les exécutent. DÉTAILLER, DIRE LE COUPLET. — Voy. Parler le couplet. DEUS EX MACHINA. — On sait que cette expression latine est employée couram- ment, soit en littérature , soit dans la conversa- tion, pour caractériser le dénouement heureux, mais invraisemblable, d'une situation drama- tique, amené par l'inteiTention inattendue d'un personnage tout-puissant. Cela de ce que les anciens tragiques grecs, précipitant la catas- trophe (Voy. ce mot) de leurs pièces, la dé- nouaient souvent, à la satisfaction des specta- teurs, par la présence d'un dieu qui api)ai*ais- sait tout à coup dans une machine et dont la puissance venait facilement à bout des plus grandes difficultés. C'est ainsi qu'Hercule ap- paraissait soudain dans Pltilociète, de même que Diane dans Iphigénie en Tauride. Quiuault, sous ce rapport, a imité les anciens, et plu- sieurs poèmes de ses opéras en fout preuve, entre autres Bellérophon et Fersée, où l'appari- tion de Pallas et celle de Vénus amènent le dénouement. On pourrait bien dire aussi que l'exempt de Tartuffe est un Beus ex machina. DEUTÉRAGONISTE, — Nom que les Grecs donnaient à l'acteur chargé du rôle se- condaire dans la représentation d'une œu\Te dramatique. (Voy. Protagoniste.) DIALOGUE. — Le dialogue théâtral est un art difficile, qui participe tout à la fois au fond et à la forme d'une œuvre dramatique : au fond, par la façon dont il est mené., cons- truit, entendu ; à la forme, par ses quaUtés de style, par la propriété des expressions qui y sont employées, par l'esprit dont l'écrivain y peut faire preuve. Il doit être vif, serré, inté- ressant, toujours dans le sujet, et dégagé de toute espèce d'inutilité. « Le dialogue, a dit^ Chamfort, est proprement l'art de conduire l'action par les discours des personnages ; telle- ment que chacun d'eux dise précisément ce qu'il doit dire, que celui qui parle le premier dans, une scène l'entame par les choses que la passion et l'intérêt doivent offrir le plus na- turellement à son esprit, et que les acteurs lui répondent ou l'interrompent à propos, selon leur convenance piirticulière. Ainsi, le dialogue sera d'autant plus parfait, qu'en observant scrupuleusement cet ordre naturel on n'y dira rien que d'utile et qui ne soit, pour ainsi dire, un pas vers le dénouement. î> Molière, auquel il faut toujours en revenir loraqu'il s'agit de la perfection théâtrale et d'un modèle à présenter, Molière, dont le dialogue était si serré que i)as une phrase, i)as une in- cise, pas un mot parasite n'y trouvait place, y apportait pourtant une aisance, une facilité, un naturel qui jamais ne ix)urront être surpas- sés. On a observé avec raison que chez lui l'or- dre et la vérité dans le dialogue sont poités à un point qu'on ne saurait trop admirer. « Chez Molière, a-t-on dit, chacun dit orécisément ce qu'il doit dire, et ce que tout nomme eût dit à sa place s'il avait eu assez d'esprit ou de niaiserie, d'innocence ou de finesse, de colère ou d'amour, de tristesse ou de gaieté, selon le caractère que l'auteur a donné à son person- nage ou le sentiment qu'il a mis en lui. Chez Mohère le dialogue, parti d'un point, arrive au point le plus opposé, sans que la route ait fait un coude visible, sans qu'il soit ix)S8ible de trouver un point de suture. L'exemple est pris de si hau^, et si loin de toute comparaison, (lue nous n'oserions appeler l'attention ailleurs, après l'avoir portée sur cette perfection. » C'est que cette perfection est véritablement le com- ble de l'art, et que Molière est toujours le maî- tre des maîtres. Dans les ouvrages lyriques où se trouve une partie parlée (opéra-comique ou opérette) , on distingue sous le nom de dialogue ou de poème DIAPASON (PRENDRE LE). — DIMANCHE (le) AU THEATRE. 293 cette partie parlée, par opposition au chant ^ qui est la partie musicale. DIAPASON (Prendre le). — Ceci est un terme musical applicable et appliqué même aux théâtres où il n'est jamais question de musique. Toutes les voix, même parlées, n'ont pas la même intensité sonore, la même tonalité, la même étendue; il faut pourtant, au théâtre, sous peine de choquer l'oreille du public, qu'el- les se fondent en quelque sorte les unes dans les autres pour former un ensemble harmo- nieux : dans ce but, les voix sourdes s'échauf- feront un peu, les organes éclatants s'assoupli- ront, et, chacun y mettant du soin, prenant Je diapason, tous seront bientôt à l'unisson. Il arrive parfois ceci, dans un grand théâtre, comme, par exemple, la Comédie-Française : c'est qu'un ou deux artistes se trouvant en scène au commencement du spectacle, alors que leur voix n'est pas échauffée , qu'ils n'ont pu prendre encore, si l'on peut dire, le ton de la salle, le dialogue est terne, sans portée, sans éclat, et reste ainsi pendant toute la durée de la première scène. Mais vienne un nouveau personnage au verlxi sonore, à la voix bien timbrée, à l'organe clair et vibrant, aussitôt les deux autres s'échauffent par le contact, élèvent la voix pour se mettre d'accord avec lui, et en peu de temps établissent un ensem- ble parfait. Le diapason est pris alors, et pour toute la soirée. DICÉLIE. — Les Grecs donnaient ce nom à un genre de pièces théâtrales d'un caractère libre et obscène. DICTION. — Un acteur de talent, D'Han- netaire, qui vivait au dix-huitième siècle et à qui l'on doit un ouvrage intéressant publié sous ce titre : Observatimis sur Vart du comé- dien, définit ainsi la diction : — « On nomme diction chez les comédiens la récitation théâ- trale , ou la façon de dire un rôle. Un acteur passe pour avoir une bonne ou une mauvaise diction selon qu'il dit bien ou mal ce qu'il a appris par cœur ; le terme de déclamation ne s'emploie plus guère, en ce sens, qu'en mau- vaise part, même pour la tragédie. y> DICTIONNAIRE DE MUSIQUE. — Ou- vrage qui, sous forme de dictionnaire, donne la technologie complète de l'art musical, la nomenclature, la signification et l'explication de tous les termes relatifs à cet art. Sébastien de Brossard est le premier qui ait essayé de dresser cette terminologie dans son Diction- naire de musique, publié en 1703 ; Jean- Jac- ques Rousseau vint ensuite, qui donna le sien en 1767, et si ce livre est inégal, incomplet, entaché d'erreurs personnelles, il contient d'ex- cellentes parties et n'en reste pas moins le seul ouvrage de ce genre que nous possédions en- core aujourd'hui ; car le Dictionnaire de Castil- Blaze et celui des frères Escudier, publiés en 1821 et en 1857, n'en sont que d'audacieuses imitations, dans lesquelles le texte même de Rousseau est pillé et copié avec une rare désin- volture. Quant aux Dictionnaires de Meude- Monpas, de Charles Soullier, de Monreali, de Turbri, cela n'existe réellement pas, et l'on ne peut signaler que comme une aimable fantaisie le gentil Dictionnaire de la musique appliquée à Vamour de M. Albert de Lasalle. Il serait bien désirable de voir publier enfin un bon et solide Dictionnaire de musique^ mis au courant de tous les faits qui caractérisent la science et l'art modernes. DILETTANTE. — Mot italien depuis longtemps passé en usage dans la langue fran- çaise , en ce qui concerne ses rapports avec la musique. Le dilettante est un amateur qui, sans avoir reçu d'éducation musicale, affecte un véritable amour de l'art, a foimé son goût par une audition attentive des gi-ands chefs-d'œu- vre, et s'est mis en état d'en discuter et d'en apprécier la valeur sinon au point de vue tech- nique, du moins en ce qui touche l'impres- sion intelligente et la comparaison des œuvres entre elles. DIMANCHE (Le) AU THÉÂTRE. — Selon la saison, le dimanche est le jour le plus favorable aux théâtres ou le plus fâcheux pour eux. En hiver, tous sont à peu près sûrs de faire chambrée pleine, et ceux qui ont une pièce à succès sont certains de refuser du monde. La recette est tellement forcée à pareil jour, sur- 291 tont dans les tbd&ttee populaires, que ceax-ci adoptèreot pendant longtemps nne contumc barbare : certains qu'ils étaient d'emplir leur salle avec n'importe quel spectacle, ils ne jouaient jamais la pièce nonvellc, le dimanche, avant la quarantième ou cinquantième repré- sentation, de telle sorte que ceux qai sont dans l'impossibilité d'aller an théâtre dans la se- maine ne pouvaient jamais voir nue pièce dans sa nouveauté. Il n'y s pas plus de quinze ou vingii ans qu'on a renoncé à cet nsagc iniqne. Mais si le dimanche est le meilleur jour pour les théâtres dans la saison d'hiver, il devient, en revanche, le plos mauvais dans la saison d'été. Qnand lacbalcnrest suffocante, quand le thermomètre oscille entre 25 ou 35 degrés, DIONYSIAQUES. ceux qui n'ont qu'un jour de repos par semaine sont pea disposés, on le conçoit, à aller s'en- fermer dans une salle de spectacle ; la campa- gne, la promenade, les terrasses des cafés font alors aux théâtres une concurrence rictorieuse. Aussi, il y a vingt-cinq ou trente ans, alors (jue ceux-ci n'avaient pas pris encore l'habitude d'une longue clôture d'été, comme beaucoup le font aujourd'hui, certains d'entre enx, tont en affichant leur spectacle, se réservaient de jouer ou de ne pas jouer. Si le temps se met- tait tout à coup à la pluie, comme il arrive parfois à Paris, si un orage subit arrêtait les promeneurs, alore on ouvTait les portes, cer- tain qu'on était de faire au moins nne demi- salle ; mais si le soleil brillait de tous ses fcnx , si pas un nuage ne venait obecnrcir l'horizon une bande annonçant relâche était posée à quu tre heures sur l'afSche, économisant au thca tre les frais de gaz, de garde et de pompiers qui n'auraient pas été couverts par les dix on quinze personnes qu'on aurait pu voir entrer dans la salle. Pendant bien des années, deux théfttres notanmient, le Vaudeville et le Palais- Bojal, n'ont pas agi d'autre façon. Aujourd'hui, la plupart do nos théâtres fer- ment l'été; mais ils prennent leur reTOuche l'hiver, en donnant, le dimanche et les jours de fête, deui représentations par jour. (Voy. Uatinées.) DIONYSIAQUES. — Fêtes célébrées par lesGrecsenl'honneur de Dionysos ou Bacchus, et auxquelles on a donné aussi le nom de bac- elianales II Alfred Manry en a donné nuo description trts \ivante, que nous lui emprun- tons Ce (]iii fait le caractère particulier et vraiment original du culte de BacchuB, ce sont le» fêtes cé- lébrées en son honneur, les bacchanales. C'est avec un cortège de femmes ivre», de danseuro jnyeux, de mimetj grotesques, d'animaux rustiques que cette divinité apparaît, soit dans l'histoire mythologi- que, soit sur les monuments. Cette procession ou thiaie, dont il est le héros et le cbnrége, forme en quelque sorte son armée. C'est à sa tête qu'il arrive en Grèce et qu'il combat Apollon , dont le culte lui était opposé. Dans ses nombreux voyages, eu Épire,en Egypte, en SjTie, en Mésopotamie, dans l'Inde , il est toujours accompagné de cette cour bruyante et bouffunne. Oa y voit figurer les satj-reB, les lityres, les eilènea, sorte de satyres porGonni- fiés en Silène, donné par les portes au dieu i>our DIONYSOS. — DIORAMA. 295 nourricier, les bacchantes ou ménades, lenes, tliyades ou mimallones, types des femmes vouées à son culte, puis plus tard des génies tout allégori- ques : Ampélos , qui représente la vigne ; Acratus, le vin pur; Méthc, l'ivresse ; Maron, que la tradi- tion homérique fait naître de Dionysos et d'A- riadne , et qui avait , dit-on, enseigné le premier aux habitants de Chios l'usage du vin. Bientôt à cette bande bachique furent adjoints Pan, les Pans et Panisques , qui n'en étaient que des reproductions , les Naïades, les Nymphes, les Centaures, et bien d'autres personnages divins... Rien n'est plus commun que les représentations fi^nirées de Bac- chus et de son cortège. Les bas-reliefs , les vases peints nous les montrent sans cesse. Les vases nous offrent aussi toute une galerie de mystères dionysia- ques. Aussi peut-on dire que c'est à l'archéologie que l'on doit sur cette branche de la religion grec- que les dernières lumières. Les artistes multipliè- rent encore plus que les poètes ces personnifica- tions, déjà nombreuses, dans le thiase : le vin, la danse, la musique, le rire, la folle ivresse, l'a- mour quelque peu sensuel , les grâces , tous les plaisirs, enfin, qui accompagnaient les fêtes du dieu, devinrent sous le ciseau ou la pointe des artistes autant de divinités allégoriques, que l'anti- quaire nous a révélées. C'est dans les dionysiaques (]ue le théâtre prit naissance. D'abord il ne s'agissait que d'un chant, d'un d'hymne, dit par le poète lui-même. Puis on représenta de véritables pièces, pour lesquelles il fallait plusieurs acteurs; ceux-ci prirent le nom d'artistes dionysiaques, et fu- # rent payés par l'Ktat pour prendre part à ces fêtes officielles. On les fit spécialement ins- truire, et bientôt on institua des concours pour les comédiens, connue il y en avait pour les poètes. Les représentations dramatiques faisant partie du culte national , les citoyens se trou- vaient dans l'obligation d'y assister, et l'État distribuait de l'argent aux plus pauvres, pour qu'ils pussent payer leur place au théâtre. Et l'orateur encourait la peine capitale qui eût proposé, même dans les circonstances les plus critiques, d'employer aux dépenses de la guerre l'argent destiné à cet usage. Parmi les comé- diens (jui se rendirent le plus fameux dans les représentations dionysiaques , on doit rappeler les noms de Timothée, Satyros, Théodore, Mo- lon, Polos et Aristodème. DIONYSOS. — C'est le nom véritable sous lequel était adoré en Grèce le dieu que les Ro- mains révérèrent plus tard sous le nom de Bac- chus. Si ce nom de Bacchus a prévalu dans Tu- sage, si ce dieu est vulgairement et presque uni- quement considéré comme le dieu du vin, on peut cependant, en recourant à la véritable tradi- tion hellénique, modifier et compléter les idées relatives au culte dont il était l'objet. Ce culte était plus large qu'on ne le croit, et l'ivresse qui caractérisait les bacchanales, premières fêtes célébrées en son honneur, semble l'avoir un peu trop circonscrit aux yeux des modernes. En réalité, Bacchus doit être considéré comme le dieu du plaisir, et à ce titre il présidait aux arts, tout comme Apollon, et c'est à lui que les Grecs doivent l'origine de leur théâtre, enfanté par les fêtes dionysiaques. « Dieu du plaisir, nous dit à ce sujet M. Alfred Maury, Bacchus préside , comme le fils de Latone, aux arts ; on le voit parfois entouré des Muses et des Grâces, et c'est en son honneur que la tragédie, la co- médie sont établies. La tragédie n'était dans le principe qu'un chant en l'honneur du dieu, dont un bouc était le prix; la comédie, que l'hymne qu'on faisait entendre à la louange de Bacchus dans la fête bruyante qu'on célébrait pour lui. C'est ainsi que Dionysos devint le dieu des représentations scéniques, le patron des comédiens. Il s'établit des confréries dont l'occupation consistait à se transporter de ville en \ille aux dionysiaques ou fêtes de Bacchus, et à y représenter des drames pour honorer cette divinité. Nous possédons plusieurs ins- criptions grecques où mention est faite de ces acteurs, qui rapiDcllent ceux qui au moyen âge allaient célébrer les mystères, et qui sont comme l'origine de nos comédiens ambu- lants. » De tout ceci il résulte que si, d'après une légende très apocryphe, les musiciens se préva- lent du patronage de la bienheureuse chrétienne célèbre sous le nom de sainte Cécile, les comé- diens peuvent, avec beaucoup plus de droits et de raison, se placer sous celui du dieu païen que les Grecs révéraient sous le nom de Bac- chus. DIORAMA. — Le diorama est un si)ectacle 296 DIRE FAUX. très curieux, d'un genre particulier, dont on doit l'invention à deux peintres distingués, Daguerre et Bouton, qui le produisirent pour la première fois à Paris, en 1822, avec un im- naense succès. Le diorama offre la reproduction de tableaux naturels, de paysages, d'intérieurs d'édifices, peints dans de vastes proportions, et qui, par le fait d'un procédé spécial de peinture, par la position qu'occupe le spectateur à l'égard du tableau, et par la disposition , Téclat et les mo- difications successives de la lumière qui éclaire celui-ci, produisent les illusions d'optique les plus surprenantes. Tandis que dans le pano- rama la toile est cylindrique, celle du dio- rama ofïre une surface plane; le spectateur, placé dans une pièce éloignée de quinze à vingt mètres du tableau, ne voit celui-ci qu'à travers une large ouverture qui ressemble à l'a- vant-scène d'un théâtre et dont les bords, se prolongeant jusque vers le tableau, l'empê- chent de voir aucun autre objet. La pièce où se trouve le spectateur ne reçoit d'ailleurs d'au- tre Imnière que celle qui vient du tableau même, et se trouve par conséquent dans une obscurité relative , ce qui contribue à produire l'effet cherché. Au surplus, voici une description exacte des procédés mis en œuvre pour obtenir cet effet \Taiment merveilleux : Les tableaux Bont peints des deux côtés sur une toile de coton , mais de fa^'on à ce que la peinture antérieure soit transparente, c'est-à-dire soit aussi facilement que possible traversée par la lumière quand on éclaire le tableau jiar derrière. En outre, il faut que les deux peintures , quand elles repré- sentent des objets différents, se raccordent avec la plus grande exactitude. Cela fait , c'est par la ma- nière d'éclairer le tableau et de distribuer la lu- mière qu'on obtient les effets qui ont rendu célè- bre ce genre de spectacle. La partie antérieure du tableau reçoit le jour d'une voûte vitrée qui reste in- visible au spectateur. La lumière qui envient tombe sur la peinture à un angle tel qu'elle est réfléchie dans la direction de ce dernier, et alors la peinture de la face postérieure du tableau reste complète- ment dans l'obscurité. De plus, la voûte est pour^'ue d'un appareil de volets et de transi)arents de diver- ses teintes, au moyen desquels on peut à volonté augmenter ou diminuer l'intensité de la lumière, et la modifier de manière à reproduire avec une vérité et une exactitude incroyables tous les acci- dents naturels de lumière , d'ombre et de clair-obs- cur, c'est-à-dire à représenter les changements vi- sibles qui dépendent de l'état de l'atmosphère, tels qu'un soleil éclatant, un clair de lune, un temps nuageux ou obscurci par le brouillard, l'obscurité du crépuscule. Indépendamment de ces modifica- tions si curieuses dans l'aspect du tableau qu^on obtient par ce mode d'éclairage direct, on peut encore changer, pour ainsi dire, le fond de la pein- ture. Pour cela, on intercepte le jour provenant de la voûte en question , et on éclaire vivement le tableau par derrière, en faisant arriver un flot de lumière sur la face postérieure de la toile. Dans ce cas, le tableau antérieur est annulé, et les objets représentés sur la face postérieure apparaissent à l'œil du spectateur surpris. C'est par ce moyen que Daguerre et Bouton obtinrent im effet véritablement prodigieux avec leur tableau fameux représentant la Messe de minuit à Saint- Étienm-dU'Mont, qui était un chef-d'œuvre au point de vue de l'illusion optique. On voyait d'abord l'église de jour ; puis, le tableau passait par toutes les dégrada- tions de lumière pour arriver à une scène de nuit, éclairée par les flambeaux, les cierges et les lampes, et le public était bientôt émerveillé de voir toutes les chaises, vides tout à l'heure, occupées par une foule de fidèles en prière. Les autres tableaux ex])osés par les deux peintres représentaient V Intérieur de la cathédrale de Cantorhèry, la Vallée d^Unterwaldy Saint- Pierre de Eom^, la Forêt-Noire, C Inaugura- tion du temple de Salomoyi, etc. — Dans ces der- nières années, plusieurs dioraraas fort intéres- sants ont été offerts à la curiosité des Parisiens. DIRE FAUX. — On sait ce que c'est que chanter faux : c'est, musicalement, donner un son qui s'écarte plus ou moins du son indiqué par le compositeur, attendu par l'auditeur, et dont l'intonation vicieuse blesse l'oreille la moins sensible et la moins expt*rimeutée. L'ac- teur qui dit faux produit une impression aussi douloureuse sur toute oreille un peu sensible, sur tout esprit un peu délicat. Dire faux, c'est débiter une phrase avec des inflexions qui sont en désaccord complet avec la pensée ex- primée , c'est donner un sens vocal faux au sens des paroles qu'on est chargé de transmettre au FlakChe six. — Un lUvetUMcment aux FoUn-BïTE^re, d'spris nue ifficLe Itlsmt puUe d« la coUcctiDO ilc M. DcnoUien. DIRECTEUR BREVETÉ. — DISTRIBUTION. 299 public. Entendre un comédien dire faux est une souffrance aussi intolérable, aussi aiguë, que d'entendre un virtuose chanter et jouer faux. DIRECTEUR BREVETÉ. — C'est ainsi qu'on appelait officiellement naguère, lorsque les théâtres vivaient sous le régime adminis- tratif, tout directeur en possession de son bre- vet, de son privilège. En tête de ses affiches, le directeur plaçait cette mention : Troupe de M, X...... directeur breveté du.,, arrondissement théâtral, (Voj. Brevet.) DIRECTEUR DE LA MUSIQUE. — On donne parfois ce titre , dans un théâtre lyrique, au premier chef d'orchestre, afin que son au- torité s'exerce sur tout le personnel d'une fa- çon plus complète et plus étendue. Il est arrivé parfois aussi qu'on attribuait ce titre et cette autorité à un artiste placé à côté et au-dessus du chef d'orchestre lui-même, ce qui ne doit pas être et ce qui présente de sérieux inconvé- nients, entre autres celui d'ouvrir la porte à d'in- cessants conflits. De deux choses l'une, en effet : ou le chef d'orchestre est à la hauteur de la si- tuation qu'il occupe, ou il n'en est pas digne. Dans le premier cas, il doit être absolument maître comme il est absolument responsable; dans le second... on doit le remplacer sans merci. DIRECTEUR DE LA SCÈNE. — On donne ce nom à un employé supérieur qui, ainsi que ce nom l'indique, a la direction ab- solue de tout ce qui concerae l'action scé- nique ; c'est lui qui met en scène, qui dirige les études, qui préside aux répétitions, les sur- veille et en dirige la marche à tous les points de vue, et qui, naturellement, est responsable, en ce qui concerne l'ensemble, de la bonne exé- cution des ouvi'ages représentés. Il va sans dire que le directeur de la scène est toujours un ancien comédien , très habile au point de vue de la pratique de son art, très expérimenté, et Siichant du théâtre tout ce qu'on en peut savoir. DIRECTEUR DE THÉÂTRE. — Tout homme qui se trouve à la tête d'une entreprise théâtrale. Parfois, surtout à Paris, où une telle entreprise exige souvent des capitaux considé- rables, le directeur est le représentant d'une société d'actionnaires ; d'autres fois il est en- trepreneur à ses risques et périls. — Les Ita- liens se servent précisément du mot imprésario (entrepreneur) pour désigner un directeur de spectacles ; les Anglais emploient celui de ma- nager, qui a exactement la même signification que le nôtre. DIRECTION. — Mot qui symbolise et per- sonnifie en quelque sorte une entreprise théâ- trale. On dira, par exemple : La direction de tel théâtre est en honnis mains; ou bien : La 7iouvelk direction de ce théâtre ne renouvellera pas les fautes de Vancieiine; ou bien encore : Tel théâtre demande des danseuses et des cho- ristes; s'adresser à la directiœi, DISLOQUÉ. — C'est le nom que le popu- laire donne volontiers, en pro\ânce, aux acro- bates qui dans les cirques font les exercices de clown (Voy. ce mot). DISTRIBUTION. - C'est l'attribution des rôles d'une pièce aux divers acteurs qui sont chargés de la représenter. Pour en donner un exemple, voici la distribution de V École des Maris à l'époque où fut créé ce chef-d'œuvre : Sgaxarkllk Molière. Ariste L'Espy. Isabelle M"*^ De Brie. LÉONOR Armande Béjart. Lisette Madeleine Béjart. Valère La Grange. Ergaste Duparc. Un Commlssaike De Brie. A Paris, l'auteur d'une pièce nouvelle est absolument maître de la distribution de celle- ci; il n'a d'autre guide que sa volonté, et si l'on a Wi certains acteurs refuser les rôles qui leur étaient distribués, on n'en a guère vu ré- clamer ceux qui ne leur étaient pas confiés, car ils n'ont pour cela aucun droit. En province, ce n'est pas la même chose, les emplois étant beaucoup plus délimités qu'à Paris, et l'on a de nombreux exemples de comédiens qui ont 300 DIVA. — DOMAINE PUBLIC. justement réclamé des rôles qu'on avait à tort distribués à d'autres. DU^A . — Mot italien qui signifie déesse. Les Italiens l'employaient naguère, dans leur exagé- ration artistique habituelle, pour désigner une cantatrice hors ligne, une charmeuse, une en- chanteresse. La diva constituait une sorte d'i- dole pour un théâtre, on ne pensait qu'à elle , on ne voyait qu'elle, on n'entendait qu'elle, elle était l'objet de manifestations aussi enthou- siastes que ridicules, on l'applaudissait avec fureur, et l'admiration qu'elle excitait prenait toute l'apparence d'un culte irréfléchi. De l'I- talie, ce mot, comme bien d'autres, s'était intro- duit dans notre langue théâtrale. Aujourd'hui il est démodé, et chez nos voisins, comme chez nous-mêmes, Tusage semble en être depuis long- temps abandonné. DIVERTISSEMENT. — En France, il ne saurait y avoir d'opéra important sans qu'il contienne une partie dansée, et c'est cette partie chorégraphique qui constitue ce qu'on appelle le divertissement ; dans le langage usuel, on lui donne assez souvent le nom de ballet, mais l'expression est impropre et doit être réservée aux ou\Tages purement dansés et mimés, aux ballets-pantomimes. Pour le compositeur, le divertissement est une partie importante d'une œuvre lyrique, car il lui donne l'occasion de déployer toutes les ressources et la fécondité de son imagination. Au point de vue scénique, le divertissement, lorsqu'il est tiré des entrail- les mêmes du sujet, peut donner lieu soit à des épisodes pleins d'intérêt et de nouveauté, comme la scène des Nonnes de Eoberf-k-Diable, soit à des hors-d'œuvre d'autant plus charmants qu'ils sont en situation, comme le divertisse- ment des Patineurs du FropJiète, Malheureu- sement, il n'en est pas toujours ainsi, et il arrive que le divertissement est plaqué de la façon la plus maladroite et la plus sotte. Mais les exi- gences d'une certaine catégorie d'habitués de rOpéra sont formelles à cet égard , et l'on se rappelle que l'accueil aussi cruel qu'inepte qui fut fait naguère sur ce théâtre au l'annhàuser de M. Richard Wagner était en pirtie une ven- geance exercée contre ce compositeur, qui s'é- tait absolument refusé à introduire un diver- tissement dans son œuvre. Les habitués dont nous parlons ici, beaucoup moins sensibles aux charmes de la musique qu'à la vue des jupes d'une danseuse, ont pour habitude de ne pren- dre place dans leur stalle que quand commence le divertissement, pour s'enfuir rapidement dès qu'il est terminé. Autrefois, on donnait à ces épisodes le nom de fête. Dans nos théâtres de drame et de féerie, le Châtelet, la Porte-Saint-!Martin, la Gaîté, l'ha- bitude des divertissements s'est aussi conser- vée. On les appelait aussi y?/«« jadis, et le prin- cipal personnage de la pièce ne manquait jamais, au moment où les danseurs se présen- taient, de s'écrier avec empliase : « Que la fête commence î » La phrase est restée célèbre. Au dix-huitième siècle, la Comédie- Française et la Comédie-Italienne avaient pris l'habitude de terminer une grande partie de leurs petites pièces par un divertissement chanté et dansé, qui les finissait gaiement. Beaucoup de petites comédies de Regnard, de Dancourt, de Le- grand, se terminaient ainsi. Aujourd'hui, dans certiiins petits théâtres comme les Folies-Ber- gère, on donne le nom de divertissement à de petits ballets d'ensemble de courtes dimensions, qui réunissent un personnel assez nombreux. DOCTEUR (Le). — L'un des types de la comédie italienne. C'était un personnage sot, prétentieux, pédant et ridicule, qui n'ouvrait la bouche que pour dél)iter quelque sentence emphaticjue ou prononcer quelques paroles la- tines ; d'ailleurs lx;rné, bafoué et ridiculisé par tout le monde. Molière, en lui donnant des noms de fantaisie, s'est scnû plus d'une fois de ce type, emprunté par lui aux Italiens. — Les artistes qui ont joué le personnage du Docteur à notre Comédie-Italienne sont Constantino Lolli, Marc- Antonio Romagnesi et Francesco Matterazzi, DOMAINE PUBLIC. — Au point de vue de la production intellectuelle et artistique, une fiction légale comprend dans ce qu'on ap- pelle « le domaine public » toutes les œuvres dont la reproduction , la publication , la repré- sentation et l'exécution n'entraînent le paie- DOMPTEUR. — DONNÉE DE PIÈCE. 308 ment d'aucuns droits d'auteurs, ceux-ci étant morts depuis assez longtemps pour que leurs droits et ceux de leurs héritiers soient périmés. En attendant que l'éternité soit reconnue pour la propriété intellectuelle comme pour toute autre propriété, chaque année fait tomber dans le domaine public les plus admirables chefs-d'œuvre, sans que les héritiers de ceux qui ont créé ces chefs-d'œuvre aient rien à ré- clamer en ce qui concerne leur exploitation. DOMPTEUR. — L'un des spectacles les plus étranges, les plus curieux et les plus émou- vants que l'on puisse contempler est celui que donnent les dompteurs de fauves et d'animaux féroces, qui promènent de ville en ville des ménageries parfois superbes, dont les sujets leur obéissent, on peut le dire, au doigt et à l'œil. Il y a vraiment quelque chose de grandiose et de saisissant dans ce spectacle de l'ascen- dant exercé par la force morale , le courage de l'homme sur la force brutale et l'instinct féroce des animaux les plus dangereux. Il est vrai que quelques-uns de ces dompteurs ont fini d'une façon tragique, et Ton en a vu devenir victi- mes d'une trop grande confiance en eux-mê- mes. Ces exemples funestes ne découragent pas cependant ceux qui viennent après eux, et il semble que ce soit une véritable passion que celle qui pousse certains hommes à jouer ainsi leur vie dans des exercices périlleux. Vera 1880, on connaissait ainsi trois domp- teurs qui ont fait Tétonnement et l'admiration du public français. Ces trois hommes étaient Carter, Martin et Van Ambm-gh. Martin était un ancien écuyer que des pertes d'argent avaient dégoûté de son métier, et qui cher- chait une autre profession, a II se lia alors, dit un biographe, avec M"' Vanaken, fille du directeur d'une des plus belles ménageries de l'Europe, l'épousa, et prit un intérêt dans cette entreprise. Martin, ayant toujours réussi à dompter les chevaux qui passaient pour in- domptables, voulut essayer si l'on ne pourrait pas également soumettre les autres animaux de différentes espèces. Il fit ses premières ex- périences sur un tigre royal âgé de six ans qui paraissait le connaître et le préférer aux autres personnes attachées à la ménagerie. Après huit mois d'observations, Martin parvint à connaître tous les mouvements du tigre lorsque cet animal se mettait en colère, ou lorsqu'il était content qu'on l'approchât. Martin profita de cet avantage au point qu'il avait rendu son tigre si docile, qu'il lui faisait prendre sa main dans sa gueule et la lâcher au commandement, et une foule d'autres choses qui prouvaient l'ascendant que Martin avait obtenu sur ce terrible animal. Il s'occupa ensuite de dompter le lion, l'hyène, etc., et y réussit d'une manière surprenante. Martin est venu donner des preuves de son courageux talent à Paris, où il a ouvert sa ménagerie le 5 décembre 1829, Nous ne saurions rapporter tout ce qu'il y a d'étoraiant dans le spectacle qu'il offre chaque jour au public... y> Martin obtint en effet un succès prodigieux, succès qui s'accentua davantage encore lorsque, dans une pièce faite exprès pour servir de ca- dre à ses exercices, les Lions de Mysore, il se présenta au public, avec ses animaux, sur la scène du Cirque-Olympique (1831). Il ne fut pas moins heureux en province, en se montrant dans cette pièce sur les théâtres de la plupart des villes de France. C'est vers la même épo- que qu'un autre dompteur, Yan Amburgh, pa- iement habile et courageux, remportait aussi de gmnds succès. Dans ces dernières années, plusieurs dompteurs énergiques, possesseurs de ménageries superbes, se sont fait applaudir aussi : Crockett, M. Pezon, le nègre Delmonico, M. Bidel, ce dernier surtout, qui a paru avec ses lions, au théâtre de la Porte-Saint-Martin, dans un des drames de M. Jules Verne. DONNA {Prima, Seconda), — Ces mots, qui signifient exactement jyrmnière, seconde femmey sont ceux qui servent aux Italiens à ca- ractériser les emplois de première chanteuse et de seconde chanteuse dans l'opéra. Prima donna assoluta veut dire que l'artiste qui est ainsi désignée tient absolument le premier rang. DONNÉE DE PIÈCE. — La donnée d'une pièce de théâtre, c'est son sujet pris dans son ensemble ; la donnée première^ c'est son point de départ, son idée mère. C'est ainsi qu'on dira : « La donnée de cette comédie est origi- f*. V 804 DOUBLE (ACTEURS EN). — DRAMATIQUE. |£î I I ■ 'i I I nale ; ]> et : « La donnée première de ce vau- deville est extrêmement scabreuse. » DOUBLE (Acteurs ex). — L*acteur en double, auquel on donne parfois le nom un peu dédaigneux de doublure, est celui qui est chargé de remplacer, en cas d'indisposition de celui-ci. Facteur en possession d'un rôle im- portant. Lorsqu^un théâtre met en scène et offre au public un grand ouvrage nouveau , il prend généralement la précaution de faire ap- prendre chacun des rôles de cet ouvrage par un acteur en double , de façon à se mettre à l'abri de tout accident. De cette manière, en effet, la marche régulière de la pièce est assurée quoi qu'il arrive, chacun des interprètes pou- \'ant être remplacé immédiatement par un ar- tiste qui, sans le valoir sans doute, tiendra du moins honorablement sa i^artie dans Tensemblc. Autrefois, à rOi)éra , il y avait trois catégo- ries d'artistes : les premiers sujets , les rempla- cements et les doubles. Les remplacements suppléaient les premiers sujets, et les doubles suppléaient les remplacements. On pourrait donc dire qu'alors les doubles n'étaient que des triples. DOUBLE (JouEU au). — Au dix-septième siècle, quand une pièce obtenait un grand suc- cès, les comédiens, pour profiter de ce succès, la mettaient , c'est-à-dire qu'ils doublaient le prix des places. Les Précieuses ridicules sont la première pièce de Molière qui ait été mise au double, ainsi que nous l'apprend un chroniqueur : « La troupe de Molière fit doubler, pour la première fois, à la seconde re- présentation de cette pièce, le prix ordinaire des places, qui n'était alors que de dix sols au parterre. » En 1G75, Vlnconnu, comédie héroï- que de Thomas Corneille et De Visé, fut mise au double pendant 33 représentations. En 1679, la Comédie sans titre, de Boursault (que nous connaissons aujourd'hui sous le titre du Mercure galant) ^ fut jouée au double plus de quatre-vingts fois de suite, et la Devineresse, de Th. Corneille et De Visé, vit ses dix-huit premières représentations au double. Quelques années après, en 1085, VAndronic de Campis- tron donna lieu à un fait qui n'a peut-être pas d'autre exemple, et que De Léris rapporte ainsi : — « Cette tragédie, qui tira des larmes des plus insensibles, eut mi succès si prodigieux que les comédiens, après avoir fait payer le double aux vingt premières représentations, l'ayant mise au simple, furent obligés par la multitude des spectateurs de la remettre au double de nouveau, principalement afin de se ménager de la place sur le théâtre pour les acteurs (1). » DOUBLL'RE. — On a m ce que c'est que l'acteur en double, à qui, nous l'avons dit, on donne souvent le nom de doublure. Il va sans dire que la doublure ne vaut pas l'artiste en titre ; c'est ce qui fait qu'on dit quelquefois, en parlant d'une pièce mal jouée, qu'elle n'est jouée que u i)ar les doublures ». DOYEN DE LA COMÉDIE-FBAN- ÇALSE. — Le doyen de la Comédie-Française est l'artiste qui se trouve être non le doyen d'âge, mais le doyen d'ancienneté. Ce décanat ne constitue d'ailleurs ni une charge , ni une dignité, mais une situation, qui comporte seu- lement certaines prérogatives, entre autres celle de représenter et de personnifier en quel- que sorte la Comédie dans certaines circonstan- ces particulières, certaines cérémonies officiel- les, où il a l'avantage et l'honneur de porter la parole en son nom. Je ne saurais citer ici les noms de tous les artistes qui, depuis la naissance de la Comédie- Française, ont été ses doyens. J'en ai cepen- dant retrouvé quelques-uns : Pierre de la Thorillière, qui se retira en 1731 ; Dangeville (1740); Quinault-Dufresne (1741): Legrand (1758), Armand (1765) et Grandval (1768), qui tous trois se succédèrent directement ; puis, au commencement de ce siècle, Monvel, Duga- zon, Fleury, Saint -Fal, qui se suc^cédèrent aussi. Le doyen justement respecté et admiré aujourd'hui est M. Got. DRAMATIQUE. — Cet adjectif s'applicjue aux choses scéniques qui se distinguent par un (1) On sait qu*à cette époque, les deux côtés de la scène étaient garnis de spectateurs. DRAMATISTE, DKAMATURGE. — DRAME. 805 caractère passionné, pathétique, émouvant. On dira d'une scène qui fait verser des larmes qu'elle est dramatique, d'un acteur qui touche et qui émeut que son jeu est dramatique, d'une situation grandiose, violente, imprévue, qu'elle est essentiellement dramatique. En générali- sant, on donne aussi la qualification de dra- matique à tout ce qui touche à la scène, en quelque genre que ce soit; c'est ainsi qu'on dit Vart dramatique, un auteur dramatique, la musique dramatique. Un écrivain, Viollet-Le- duc, a fait de ce mot un substantif féminin, en publiant un traité didactique qu'il a intitulé Précis de dramatique. Ce n'est pas le seul exemple qu'on connaisse de ce mot pris dans cette acception. DRAMATISTE, DRAMATURGE. — En inscrivant dans son Dictionnaire le mot drama- tiste, qui sert à caractériser l'écrivain qui fait des drames, Littré fait fort justement remar- quer que ce mot est peu usité. D'autre part, il constate, au mot dramaturge, qui offre la même signification, (pie celui-ci est presque toujours pris en mauvaise part, et appliqué d'une façon dédaigneuse. Quoi qu'il en soit , nous devons constater, à notre tour, qu'il n'y a pas d'autre mot pour désigner les écrivains qui s'occupent spécialement de dmme, et que sous ce rapport nous n'avons pas le choix de l'expression à employer. Il est bien évident néanmoins (jue nous ne saurions qualifier de l'épithète de dramaturges les deux grands créateurs du drame moderne, Victor Hugo et Alexandre Dumas, non plus que ceux qui les ont suivis dans la voie qu'ils avaient si largement ouverte : Frédéric Soulié, Alfred de Vigny, Félicien Mallefille, Maillan, Léon Gozlan, M. Lockroy, etc. Mais, après ceux-ci , on trouve toute une légion d'auteurs dramatiques, — qui ne sont pas toujours des écrivains, — et qui , avec plus ou moins de ta- lent, plus ou moins d'habileté, quoique presque toujours avec succès, se sont lancés dans la carrière du drame émouvant et pendant plus de trente ans ont été les fournisseurs attitrés des grands théâtres du boulevard, consomma- teurs infatigables de cette denrée très cotée auprès de leur public. Au premier rang de DICTIONNAIRE DU THÉÂTRE. ceux-ci il faut citer Joseph Bouchardy, qui a remporté des succès éclatants avec Gaspardo le Pêcheur, le Sonneur de Saint-Paul, le Secret des Cavaliers y et quelques autres drames fort mal écrits, mais d'une rare puissance de con- ception. Après Bouchardy on vit venir Anicet- Bourgeois, Michel Masson, Paul Foucher, Al- boize, Rougemont, Rosier, Victor Séjour, puis MM. d'Ennery, Eugène Grange, Cormon, Au- guste Maquet et quelques autres. Quant aux écrivains qui n'ont pas fait du drame leur spécialité, mais qui s'y sont aven- turés quelquefois en y apportant de hautes qua- lités littéraires , on ne saurait les passer sous silence, car ces incursions dans un domaine qui n'était pas absolument le leur ne leur en ont pas moins valu des succès éclatants et prolongés. George Sand avec Mauprat et le Pressoir, Ronsard avec Charlotte Corday, M. Emile Augier avec les Liontus pauvres et le Mariage d^ Olympe, ^L Octave Feuillet avec Dalila et le Roman d" un jeune homme pauvre, M. Alexandre Dumas fils avec la Dame aux ca- mé/ia^s et Diane de Lys, M. Victorien Sardou avec Patrie et la Haine, M. Jules Barbier avec Jea7ine d^Arc, ont assurément bien mérité de la scène et du public français. Quant aux tenta- tives qui ont été faites en ces dernières années par quelques jeunes écrivains bien doués, MM. Albert Delpit, Jules Claretie, Catulle Mendès, Jean Richepin, elles n'ont pas encore assez prouvé en faveur de leurs aptitudes spé- ciales pour qu'on puisse compter ces écrivains parmi les véritables... dramatistes. (Voy. Mé- lodrame.) DRAME. — Au point de vue général, le mot drame ^ d'après son étymologie même, de- vrait s'appliquer à toute action scénique, à toute œuvre dramatique, quels qu'en soient le genre et le caractère. On l'employait souvent ainsi au dix-huitième siècle, et aujourd'hui encore les Italiens qualifient souvent de drarn- magiocoso (drame joyeux) certains opéras bouf- fes, ce qui prouve que le mot drame embrasse à lui seul tous les genres scéniques. Sa signifi- cation pourtant s'est particularisée aujourd'hui, et maintenant on ne donne le nom de drames qu'à des pièces d'un caractère émouvant, d'une 20 806 DRAME. forme plus familière que la tragédie, se rap- prochant de celle-ci toutefois par la nature et la complication des événements, tout en empruntant à la comédie ses procédés d'intri- gue, son langage naturel et la peinture des in- cidents ordinaires de la yie. De là, on le com- prend, une grande latitude laissée à Timagina- tion de l'écrivain, et une grande variété dans son œuvre. Molière, qui a touché à tout, qui a tout dé- couvert, qui, en dehors de ses comédies inunor- telles et de ses farces prodigieuses, a eu l'in- tuition de l'opéra dans Psyché, celle de l'opéra- comique dans le Sicilien, a, pour ainsi dire, posé les bases du drame moderne dans Don Garcie de Navarre et surtout dans le Festin de Pierre, chef-d'œu\Te où l'on voit se coudoyer le noble et le naïf, le tragique le plus palpitant et la plus franche bouffonnerie. Ici , Molière serrait de plus près non la vérité scénique, la vérité générale, qui n'a jamais eu de peintre plus admirablement fidèle, mais la vérité de la vie, la vérité des événements de chaque jour, qui fait du drame le spectacle le plus émou- vant qui se puisse concevoir, parce qu'il est à la fois le plus varié, le plus naturel et le plus sin- cèrement passionné. Mais Molière n'avait fait qu'indiquer la voie à suivre, et n'était pas entré de plain-pied dans le domaine du drame. Plus d'un demi-siècle devait s'écouler avant que l'on vît la comédie non pas encore se transformer en drame, mais incliner vers la peinture des sentiments pathé- tiques et passionnés. C'est surtout à La Chaus- sée qu'on doit les efforts faits en ce sens, et quelques-unes de ses pièces : Mélanide, F École des Mères, le Préjugé à la mode, qui obtinrent des succès retentissants, lui valurent aussi des critiques nombreuses au sujet du genre qu'il prétendait introduire au théâtre et auquel on donnait, par raillerie , la qualification de comi- que larmoyant. Voltaire lui-même prit la plume à ce sujet, dans le but de réagir contre une tendance qu'il jugeait funeste, et partit en guerre contre ceux qui voulaient apporter à notre théâtre un élément nouveau et un moyen d'action puissant : — « Celui (|ui ne peut faire ni une vraie tragédie, ni une \Taie comédie, disait-il, tâche d'intéresser par des aventures I bourgeoises attendrissantes. Il n'a pas le don du comique, il cherche à y suppléer par l'inté- rêt ; il ne peut s'élever au cothurne, il réchauffe un peu le brodequin. Il peut arriver sans doute des aventures très funestes à de simples ci- toyens ; mais elles sont bien moins attachantes que celles des souverains, dont le sort entraîne celui des nations. Un bourgeois peut être as- sassiné conmie Pompée, mais la mort de Pom- pée fera toujours un tout autre effet que celle d'un bourgeois. Si vous traitez les intérêts d'un bourgeois dans le style de Mithridate, il n'y a plus de convenance : si vous représentez une aventure terrible d'un homme du commun en style familier, cette diction familière, con- venable au personnage, ne Test plus au sujet. Il ne faut point transposer les bornes des arts. La comédie doit s'élever, et la tragédie doit s'abaisser à propos ; mais ni l'une ni l'autre ne doit changer de nature. y> Voltaire, cet immortel ennemi du pi-éjugé, était pourtant ici victime autant qu'esclave du préjugé. Au reste, ni ses objurgations, ni les railleries de Piron et de bien d'autres ne furent en état de nuire au succès des pièces de La Chaussée, surtout de MèhnûU, qui. On peut le dire, arracha des larmes à tout Paris (1). Ce qui est plus curieux sans doute, c'est que Voltaire, oubliant ses critiques, n'en écrivit pas moins Nanine et V Enfant prodigue. Après lui vinrent Diderot, avec le Père de famille et le Fils naturel, Sedaine avec le Philosophe sans le savoir, Beaumarchais avec la Mère coupable, puis, plus près de nous, Népomucène Lemercier avec son Pinto, Tout cela n'était pas encore le drame tel que nous le connais- (1) C'est Piron qui, rencontrant un de ses amis qui 8*en allait assister à une représentation de Mt'lanir lies productions liltéraires d'une haute originHlito, et annonçant les réfornicB procliiiines, publia une ma- gnifique préface oii il développait ses idées sur la littérature tliéStriile, et au bout de cette préface une pièce eu cinq actes, beaucoup trop longue et trop abondante en perKonnages pour être rcprér sentée. La pièce était intitulée Cromwell; elle met- tait en ])ratiqiie les théorie» qui la précédaient et 808 DRAME DE CAPE ET D'ÉPÉE. était là comme l'exemple à côté du précepte. La préface plaidait pour l'émancipation de la littéra- ture dramatique trop longtemps captive , et décla- rait que la tragédie et la comédie, se donnant la main et se prêtant un mutuel secours, devaient désormais mettre sur la scène ce qu'un public fran- çais n'y avait pas encore vu : un spectacle com- plet , une action présentée sous toutes ses faces , avec tousses accidents, ses chocs et ses contrastes, enfin une représentation vraie de la vie humaine. La couleur locale était appelée à l'aide de cette vérité toute nouvelle. Le beau et le sublime , dans leur plus haute expression, étaient présentés comme le but de cette réforme ; le laid et le gro- tesque devaient ser\ir de repoussoirs, et fournir des ombres au tableau. Le poésie, répandue avec tant de profusion dans les œuvres de Dieu , devait jeter sur le tout le charme de ses paroles , qui vi- brent au cœur comme la musique aux oreilles. La Fantaisie, fille des Rêves, était invitée à descen- dre du ciel, et à remporter sur ses ailes l'imagina- tion du poète. En un mot, la peinture , avec ses ac- cidents de lumière, ses magnificences de couleur, ses mer\'eilles de clair-obscur, était appelée à rem- placer les statues, magnifiques déformes, mais dépourvues de vie et d'animation, qu'enfantait le «iécle des poésies tirées au cordeau et des in- ventions réglées à l'avance. Le drame de Cromirell servait de spécimen à ce nouveau système, et, comme on fait dans tout spécimen , le poète y avait prodigué avec une sorte d'exagération les contras- tes de caractères et de situations , les chansons des fous grotesques à côté des méditations du grand politique, les querelles de ménage auprès des gra- ves questions d'État, les folies d'un écer^'elé au milieu des conspirations mortelles ; partout, comme l'avait annoncé l'auteur, le sublime à côté du gro- tesque , le laid à côté du beau... Cromivell n'était pas jouable , et son auteur le savait mieux que personne. Mais Hemani, malgré les luttes premières, les combats qu'il eut à soutenir, remporta le triomphe que Ton sait, en affirmant les droits du drame tel que le poète l'avait conçu. Vinrent ensuite Marion Delarme, le Roi s* amuse (qui vient de se ven- ger, après un demi-siècle, de l'interdiction qui avait pesé sur lui après son unique représenta- tion) , Lucrèce Bargia, Marie Tndor, Angelo, Ruy-Blas, la plus magnifique expression du génie de l'auteur, et les Burgraves, Alexandre Dumas avait suivi de près Victor Hugo dans la lice; il l'avait même précédé en donnant, un an avant Hernani, Henri III et sa cmir, et il faisait jouer successivement Aniony, Char- les VII, TérésOy la Tour de Nesle (avec Gail- lardet), puis Angèle, Catherine Howard, Don Juan de Marana, Kean,,. Avec deux lutteurs de cette force, le drame moderne, définitivement fondé, ne pouvait manquer de réussir. Ils furent aidés d'ailleurs dans leur œu\Te, avec plus ou moins de bon- heur, par quelques vaillants esprits qui se mirent à leur suite, entre autres Frédéric Sou- lié, qui donna le Proscrit, le Fils de la Folle, Roméo et Juliette, V Ouvrier, la Closerie des Genêts, Alfred de Vigny, dont le Chatterton obtint tant de retentissement, puis Félicien Mallefille, Maillan, Charles Lafont, Léon Goz- lan. Tous ceux-là méritaient la qualification de poètes dramatiques, et ils écrivaient des dra- mes littéraires, alliant le souci de la forme à la richesse du fond. On eut ensuite des drames plus ou moins habilement faits, construits par des écrivains qui n'avaient pas la même en- vergure, et qui, remuant des passions moins nobles, peignant des caractères plus vulgaires, mettant au service d'idées souvent puissantes, mais moins jeunes et moins élevées, une langue l)eaucoup moins châtiée et qui même ne bril- lait pas toujours par la pureté et la correction, ne laissaient pas que d'émouvoir le public et de lui faire prendre goût à une forme scé- nique d'une force d'expression si intense et si vive. Aujourd'hui, par malheur, le drame sem- ble être passé de mode, et il ne se trouve plus guère d'écrivain capable de remuer une foule avec une œu\Te de ce genre, bien en point et bien venue. Mais que surgisse un esprit puis- sant, bien doué, qui retrouve la trace du filon creusé par ses devanciers, qui soit capable d'é- tonner, de toucher et d'émouvoir par des con- ceptions hardies, par les qualités d'une inven- tion ingénieuse et grandiose, et le drame retrouvera tout l'intérêt, tout l'attrait qu'il excitait dans le public, toute l'influence, touti; l'autorité qu'il exerçait sur lui. DKAME DE CAPE ET D'ÉPÉE. — Cette expression nous vient de l'ancien théâtre espa- gnol, où ceitains drames étaient dits de capa y espada, parce qu'ils mettaient en scène à la DRAME FANTASTIQUE. — DROITS D'AUTEUR. 309 fois des hommes du peuple et des grands sei- gnem's ou des guerriers, c'est-à-dire des hom- mes qui portaient la cape et d'autres qui por- taient répée. Nos romantiques mirent à la mode, il y a cinquante ans, les drames de cape et d'épée ; on en peut surtout citer deux comme types du genre : la Tour de Nesle, d'Alexandre Dumas et Gaillardet, et Perimt Leclerc, de M. Lockroy. DRAME FANTASTIQUE. — Drame dont l'action repose sur un sujet fantastique, dont la donnée a pour point de départ un fait surna- turel. Sans parler de certains drames de Sha- kespeare, tels que the Tempesf, ou du Fmist de Gœthe, nous pouvons citer en France quel- ques drames fantastiques, comme Don Jiiun de Marana, d'Alexandre Dumas, le Cheval du Diable, de Ferdinand Laloue, le Miracle des roses, etc. DRAME LYRIQUE. — C'est la qualifica- tion qu'on donne souvent à un opéra sérieux, dans lequel le sentiment dramatique , pathéti- que, passionné, est poussé à sa plus grande puis- sance. Il y a vingt ou vingt-cinq ans , on consi- dérait encore les Huguenots, Guillaume Tell, la Juive, h Prophète, comme de beaux drames lyri- ques; depuis lors, une nouvelle école musicale, l'école des wagnériens à outrance, a changé tout cela ; les chefs-d'œuvre que nous venons de citer ne sont plus considérés par les nouveaux ico- noclastes que comme de simples opéras , et il n'est pas besoin de dire avec quel mépris ce mot est employé par eux ; la qualification, l)eaucoup plus noble, paraît-il, de drame lyri- que, est exclusivement réservée aux œuvres de Richard Wagner, pour lesquelles il eût été im- possible de se passer d'une désignation spéciale. Nous ne faisons pas ici de polémique ; nous nous bornons à constater un fait. DROITS D'AUTEUR. — On appelait jadis honoraires d'hauteur, on appelle aujourd'hui droits d'auteur la rémunération absolument légitime, équitable, rationnelle, que tous les théâtres sont obligés d'accorder aux auteurs des pièces qu'ils représentent. Equitable en effet, car que seraient les théâtres sans les au- teurs, et que pourraient-ils faire ? Que les pièces soient bonnes ou qu'elles soient mauvaises, il en faut bien aux comédiens pour les pouvoir débiter, et tout le talent de ceux-ci resterait à la fois improductif et inconnu, si les auteurs n'étaient là pour lui permettre, par leurs œu- vres, de prendre corps et de se manifester. Et cependant, il a fallu du temps pour obtenir que ceux qui se servaient des auteurs voulussent bien admettre que ces auteurs leur fussent Ijons à quelque chose, et qu'il n'était que juste de rétribuer d'une façon convenable et leur peine et leur talent ; et près de deux siè- cles s'écoulèrent avant que le principe d'abord en fût admis, et qu'ensuite il fût réglé d'une manière satisfaisante. La lutte fut longue, par- fois violente, et deux hommes de talent qui étaient aussi deux hommes d'affaires, Beau- marchais d'alx)rd, Scribe après lui, en surent quelque chose. C'est à ces deux écrivains en effet, à leurs efforts, à leur action énergique, que tous les auteurs dramatiques doivent au- jourd'hui de voir leurs intérêts dûment étabhs et sauvegardés , leur situation assurée. Dans l'origine, les choses se passaient fami- lièrement, et chaque auteur devait débattre ses conditions avec les sociétés de comédiens qui dirigeaient les théâtres de Paris. Le poète Alexandre Hardy, qui se vantait , dit-on , d'a- voir écrit sept cents tragédies, et qui précéda Corneille dans la carrière, était, en quelque sorte, à la solde de la troui)e de l'Hôtel de Bourgogne, dont il se trouvait le fournisseur en titre. Il devait lui li^Ter au moins six tra- gédies par an, et il lui arrivait souvent d'en faire deux par mois, ce qui donne la mesure de leur valeur. Pour cet office, et aussi pour celui qui consistait à rajuster et à corriger les pièces que leur apportaient d'autres auteurs, les comé- diens de l'Hôtel de Bourgogne lui accordaient dans leurs bénéfices une part égale à celle que touchait chacun d'eux, même (juand on ne jouait rien de lui. Aussi, lorsque Corneille, âgé de dix-neuf ans, fit jouer à ce théâtre sa première pièce, Mélite, qui, bien que faible encore, en- chanta le public par sa supériorité sur celles de Hardy, celui-ci, loin d'être jaloux, se mon-^ tra-t-il enchanté, parce que les recettes devin- 810 DROITS D'AUTEUR. rent telles que sa part , comme celle des comé- diens, en fut de beaucoup augmentée. On sait que Corneille fut loin de s'enrichir avec ses chefs-d'œuvre ; il faut croire cependant qu'il manifesta quelques exigences relatives vis- à-vis des comédiens , puisqu'on prête à une actrice du temps, M"*^ Beaupré, cette réflexion empreinte d'un naïf égoïsme à l'égard de ce grand homme : — « Il nous a fait grand tort ; nous avions ci-devant des pièces de théâtre pour trois écus ; en une nuit elles étoient faites ; on y étoit accoutumé, et nous gagnions beaucoup. Maintenant les pièces de M. Corneille nous coûtent bien de l'argent, et nous gagnons peu de chose. Il est vrai que ces vieilles pièces étoient mauvaises, mais les comédiens étoient excel- lens, et ils les faisoient valoir par la représen- tation. » Les comédiens n'étaient pourtant pas encore devenus bien généreux, car on raconte l'anec- dote suivante relativement à Rotrou et à son Vencesîas, et il faut remarquer qu'à cette époque (IG48) Rotrou était dans tout l'éclat de son talent et de sa renommée, puisqu'il ne donna plus que deux pièces par la suite : — « Rotrou, après avoir achevé la tragédie de Vencesîas, se préparoit à la lire aux comédiens, lorsqu'il fut arrêté et conduit en prison ])our dettes. La somme n'étoit pas considérable: mais Rotrou étoit joueur, et par conséquent assez souvent vis-à-vis de rien. Il envoya cher- cher les comédiens, et leur oifrit pour vingt pistoles sa tragédie de Vencesîas, Le marché fut bientôt conclu ; Rotrou sortit de prison, et sa tragédie fut jouée avec un tel succès que les comédiens crurent devoir joindre au prix con- venu un présent honnête ; mais on ne sçait si Rotrou l'accepta. » C'est seulement à .partir de Quinault qu'un droit proportionnel sur les recettes commença à être accordé aux auteurs, et ceci fut pres(iue l'effet du hasard. Quinault était à peine âgé de dix-huit ans lorsqu'il écrivit sa première pièce, les Rivales; Tristan le tragique, lauteur de Ma- rianne et de la Mort de Crispe, qui lui donnait des conseils et le regardait comme son élève, voulut lui-même, pour lui rendre service, por- ter cette pièce aux comédiens et leur en faire lecture. Ceux-ci le comblèrent d'éloges, et, croyant la pièce de lui et le connaissant par les succès qu'il leur avait déjà procurés, lui offri- rent cent écus de la tragédie qu'ils venaient d'entendre. Tristan leur fit connaître alors que celle-ci n'était point de lui, mais d'un jeune poète nommé Quinault, ce qui changea aussi- tôt la situation, et fit dire aux comédiens que, la pièce n'étant point de lui, ils n'en pouvaient donner plus de quinze pistoles, c'est-à-dire la moitié de ce qu'ils avaient proposé d'abord, Tristan insista vainement, et, ne pouvant ob- tenir de conditions meilleures, imagina un expé- dient. Il proposa aux comédiens d'accorder à l'auteur le neuvième de la recette de chaque représentation pendant la nouveauté de la pièce, après quoi elle leur appartiendrait, ce qui fut accepté. A partir de ce moment, cet usage fut adopté. Vingt ans après, nous trouvons dans le livre de Chappuzeau sur le Théâtre François (1675) les renseignements que voici sur les droits ac- cordés aux auteurs par les comédiens : — «La plus ordinaire condition et la plus iuste de costé et d'autre, dit l'écrivain, est de faire en- trer l'autheur pour deux parts dans toutes les représentations de sa pièce iusques à un certain temps. Par exemple, si l'on reçoit dans une chambrée (c'est ce que les comédiens appellent ce qu'il leur revient d'une représentation, ou la recette du iour ; et comme chaque science a ses notions qui luy sont propres, chaque profes- sion a aussi ses termes particuliers), si Ton reçoit, dis- je, dans une chambrée seize cent soixante livres, et que la troupe soit composée de quatorze parts, l'autheur, ce soir-là, aura pour ses deux parts deux cents livres, les autres soixante livres, plus ou moins, s'étant levées parpréciput pour les frais ordinaires, comme les lumières et les gages des officiers (employés). Si la pièce a un grand succez , et tient bon au double vingt fois de suite (I), l'autheur est riche, et les comédiens le sont aussi ; et si la pièce a le malheur d'échouer, ou parce qu'elle ne se soutient pas d'elle-même, ou parce qu'elle (1) Dans la nouveauté d'une pièce , il arrivait très souvent qu'on la jouait (Voy. ce mot), c'est-à-dire en taxant les places au double du prix ordi- naire , ce qui augmentait d'autant la recette. DROITS D'AUTEUR. 811 manque de partizans qui laiescnt aux critiquée le champ libre pour la décrier, on ne B'opiniâ- tre pas à la joiier davantage , et l'on se console de part et d'antre le micax que l'on peut, comme il faut Be consoler en ce monde de tous les événemcns fâcheux. » Il faut remarquer ici la restriction que fiii- saient les comédiens, en n'accordant de rétribu- tion k l'auteur que pendant la nouveauté de m pièce, après quoi elle letir appartenait, c'est-à- dire qu'ils la pouvaient reprendre et jouer tant qu'ils voulaient sans rien payer. Écoutons un écrivain très au courant de toutes ces choses, liemazurier, qui va nons expliquer comment ils agissaient : Pourquoi donc borner les droits d'auteur aux. seules représentât ioD s données dans la Douveauté? N'éf ait-il pas juste d'accorder des honoraires à J'hoTiinie de lettres toutes les fois que son ouvrage produisait une recette lï la Biœiété? Comment les \ 1 >■"# ■' ^ '^jL ^^BH^^^^^Rfîr^ ^^^^^-^ comédiens pouvaient-ils consentir, lors de la reprise d'un ouvrage, à H'enricliir de la petite portion qne l'auteur aurait pu réclamer dans leurs recettes? Prétendaient-ils donc que leurs talens seuls fussent BUffîsans pour remplir la caisse, et que le mérite de l'ouvrage qu'ils jonaient n'entrât pour rien dans l'affliiencedespectateursqui venaient apporter leur argent? La calcul des comédiens d'alors était réel- lemeitt d'une bassesse indigue. Ils ne s'en tenaient pas là. Suivant des règles qu'eux-mËmes avaient établies, quand une pièce ne faisait pas une recette de 1,200 liiTes en liiver, de 800 livres en été, l'autenr n'avait plus de droit sur sa part dans les produits : la pièce appartenait aui comédiens ; elle était tombée dam les riglet; on abrégeait même cette locution, la pièce at dans h» rêglea. Dès lors, le niallieureus auteur n'avait plus rien à prétendre ; son ouvrage eùt-il ensuite produit cent mille «eu», il ne lui en serait pas re- venu un liard. Il y avait encore un autre abus bien criant. La Comédie louait beaucoup de petites loges à l'année ; elles ra])portaient infiniment, et, sous prétexte que cet argent n'entrait pas dans la recelte journalière, l'auteur se voyait frustré de la part qui lui en appartenait légitimement. Des difficultés s'élevaient incessamment en- tre les auteurs et les comédiens, et les pre- mietB avaient beaucoup de peine à obtenir des seconds les procédés équitables auxquels ils 312 DROITS D'AUTEUR. avaient droit. Il fallut que l'autorité royale, s'exerçant par ses mandataires, intervînt pour régler au moins certaines conditions indispen- sables. Au milieu du dix-huitième siècle, voici comment étaient fixés les droits d'auteur sur nos deux grandes scènes littéraires : à la Comé- die-Française, le neuvième de la recette nette, après prélèvement des frais journaliers, pour les pièces en cinq actes ; le douzième pour les pièces en trois actes, le dix-huitième pour les pièces en un acte. A la Comédie -Italienne, c'était le neuvième pour les pièces en trois ac- tes et plus, le douzième pour les pièces en deux actes, le dix-huitième pour les pièces en un acte. Mais ceci toujours avec cette réserve que les auteurs n'avaient plus rien à réclamer par la suite lorsque leur pièce était tombée dans les règles. Or, c'était justement là une source de conflits perpétuels, les comédiens usant de toutes sortes de moyens et de subterfuges pour amener ce résultat d'une façon accidentelle, et profiter ensuite de la situation. A l'Opéra, les choses s'étaient passées d'au- tre façon. Tout d'abord, Lully, on le sait, s'é- tait attaché Quinault par un traité en règle, et lui donnait un traitement fixe de 4,000 li\Te8 pour lui fournir chaque année un livret. Ce n'était pas là une condition ruineuse. Lorsque Quinault eut renoncé au théâtre et que Lully fut mort, l'Opéra en vint, lui aussi , à traiter de gré à gré avec les auteurs et les composi- teurs, et cela dura jusqu'à l'arrivée de Campra et à la représentation de son opéra-ballet r Eu- rope galante. « Ce ballet, disent les frères Par- fait, qui est le coup d'essai de la muse lyrique de La Motte et la première musique sur des paroles françaises de Campra, occasionna un usage qui a été depuis toujours observé au su- jet des honoraires des poètes et des musiciens. L'usage était alors qu'on dounât aux auteurs des paroles et de la musique une certaine somme qui était plus ou moins forte, selon le mérite de leur ouvrage. La Motte et Campra furent traités en inconnus, et on leur ofirit une somme très modique qu'ils refusèrent. Quelques personnes proposèrent des arrangements à ce sujet, et on s'en tint à celui qui est devenu depuis une espèce de loi , ce fut d'accorder au poète et îiu musicien, chacun en particulier. cent livres par jour des dix premières repré- sentations de leur pièce, et cinquante livres de même par jour, jusqu'à la vingtième, après la- quelle l'opéra appartient à l'Académie royale de musique. A l'égard des tn^édies [lyriques], on étendit la recette de cinquante livres jus- qu'à la trentième, d On remarquera cet usage absurde, qui a persisté pendant plus d'un siècle et demi, de diminuer ce droit fixe des auteurs après un certain nombre de représen- tations. Ainsi, le règlement de 1816, relatif à l'Opéra, stipule que le droit des auteurs for- mant spectacle entier sera de 500 francs à par- tager entre eux pour chacune des quarante premières représentations ; il tombe et reste à 200 fr. à partir de la quarante et unième. S'il faut, pour compléter le spectacle, ajouter un ballet à cet opéra, ce droit est diminua d'un tiers. Enfin, le droit des auteurs d'un opéra en un ou deux actes est de 240 francs pour cha- cune des quarante premières représentations, et de 100 francs seulement à partir de la qua- rante et unième. Ainsi, plus un ouvrage avait de succès, moins les auteurs percevaient de droits. Rien n'est plus ridicule. Pour en revenir à la situation générale, des contestations s'élevaient chaque jour entre les auteurs et les administrations théâtrales, et les conflits étaient à l'état permanent. Beaumar- chais, qui savait compter, et qui d'ailleurs prit avec énergie et vigueur l'intérêt de tous ses confrères en même temps que les siens, ouvrit le feu contre la Comédie-Française à l'occasion de son Barbier de SéviUe, et donna de la ta- blature à messieurs les sociétaires. Vers 1777, il convoqua tous les auteurs dramatiques, éta- blit avec eux des règlements nouveaux, qui, s'ils ne furent pas mis en vigueur, amenèrent cependant de réelles améliorations, et posa ainsi les premières bases de la future Société des auteurs dramatiques. Grâce à lui, et à la pétition des auteurs à l'Assemblée nationale en 1790, le principe de la propriété littéraire fut solennellement reconnu, et les auteure purent du moins lutter avec les entreprises théâtrales. Il faut cependant an'iver à Scribe pour voir régulariser enfin les choses. A l'époque où celui-ci commença à agir, on voyait certains DROIT DES PAUVRES. 313 théâtres, la Porte-Saint-Martin, par exemple, payer un vaudeville 200 francs une fois don- nés, ou accorder neuf francs de droits par représentation à l'auteur d'un drame en trois ou en cinq actes. L'Ambigu, plus généreux, ne se ruinait pas non plus en droits d'auteur, car il les réglait à trente-six francs par soirée pour les vingt-cinq premières représentations d'un drame en trois actes, et à vingt-quatre francs pour les suivantes ; pour une pièce en quatre ou cinq actes, il consentait à payer qua- rante-huit et trente-six francs! Vers 1827, Scribe reprit l'œuvre de Beaumarchais, et, mal- gré ropi)08ition des théâtres, il eut la chance et rhonneur de la mènera bonne fiu. Grâce à lui, à la Société des auteurs et compositeurs dra- matiques, dont il fut le promoteur et le créa- teur, dont pendant longtemps il resta Tâme, les entreprises dramatiques durent faire enfin aux gens de lettres, aux musiciens, une situation digne d'eux et du noble rôle qu'ils remplissent. L'Empire avait réglé les droits d'auteur pour certains théâtres. Ainsi, à la Comédie- Française et à l'Odéon, ces droits étaient d'un huitième de la recette (le tiei*s j)rélevé pour les frais) pour une pièce en quatre ou cinq actes, d'un douzième pour une pièce en trois actes, d'un seizième pour une pièce en un ou deux actes. A l'Opéra-Co- mi(]ue, c'était un neuvième pour une pièce en trois, quatre ou cinq actes, un douzième pour une pièce en un ou deux actes. Enfin, au Vaude- ville, un neuvième pour une pièce en trois ac4xis, un douzième |X)ur deux actes, un seizième pour un acte. (Voy. V Annuaire dramatique pour 1810.) La lutte fut longue, difficile, acharnée ; mais l'union des auteurs ne se démentit pas, et cette union força les directeurs à capituler et à subir les conditions très justes qui leur étaient im- posées. Aujourd'hui, pas un directeur ne peut prendi'e l'administration d'un théâtre avant d'avoir signé avec la Société des auteurs dra- matiques, représentant légal et mandataire au- torisé de la masse des auteurs, un traité par lequel il s'engage à lui payer chaque jour un droit proi)oi'tionnel sur ses recettes. Ce droit varie généralement, pour les théâtres de Paris, de 10 à 12 pour cent ; il est de 15 pour cent à rOpéra et à la Comédie-Française. En pro- vince, selon l'importance des villes, il s'élève à 5, 6, 7, 8 pour cent et plus. Mais nul ne peut s'y soustraire, et tout auteur est assuré aujour- d'hui de voir ses droits respectés, et de recevoir pour ses œuvres la juste rémunération qui lui est due. DROIT DES PAUVRES. — On sait que, en dehors de tous les impôts d'Etat ou de mu- nicipalité qu'ils doivent payer, à l'égal de tou- tes les autres entreprises commerciales ou in- dustrielles, les théâtres jouissent du privilège peu enviable d'être frappés d'une taxe spéciale en faveur des pauvres, c'est-à-dire de l'admi- nistration de l'Assistance publique; mais ce qu'on ne sait pas généralement, c'est à quel point cette taxe est ini(iue dans son principe, monstnieuse par son importance, vexatoire par son mode de perception. Xous allons es- sayer d'en retracer ici l'historique. Le droit des pauvres n'est pas moindre de 11 p. loo des recettes faites par les théâtres; c'est-à-dire qu'un théâtre qui a encaissé dans le cours d'une année une somme de 500,000 fr. a dû en prélever 55,000 au profit de l'adminis- tration des hospices. Car, — et c'est là ce qui constitue la plus grande iniquité de cette taxe, — non seulement elle est exorbitante, mais elle est perçue sur la recette })rute^ avant que le théâtre ait le droit de prélever un sou pour le paiement de ses frais quotidiens (1). Il faut remonter jusqu'aux premiers commencements de notre théâtre, c'est-à-dire jusqu'à l'établis- sement des Confrères de la Passion, pour (1) Il y a une quarantaine d'années, on vit le directeur d'une des grandes scènes du boulevard mis en faillite, après trois années d'exploitation , en laissant un passif de 200,000 francs. Pendant le cours de sa direction il avait dû prélever sur ses recettes , avant toute chose et sous le nom de droit des pauvres, une somme de 330,000 francs au profit de l'administration des hospices. Si, comme on n'a jamais cessé de le demander, cette taxe n'avait été perçue qu'après le prélèvement des frais quotidiens du théâtre, la part des pauvres eût été mince sans doute, mais le directeur n'aurait pas subi la faiUite et n'eût pas laissé sans place et sans pain plus de cinq cents artistes, employés et ouvriers de toute sorte, que l'Assistance publique se gard:i certainement de secourir. La moralité du fait est facile à tirer, et ne prouve pas la moralité de la taxe qui en amène de semblables. 314 DROIT DES PAUVRES. trouver l'origine de la taxe des pauvres. Dès l'année 1541, un arrêt du Parlement de Paris établissait que ces comédiens religieux, — ou ces religieux comédiens, — paieraient en f avem* des hospices une imposition de 80< ) li\Tes parisis. Cependant, ni les acteurs de l'Hôtel de Bour- gogne, qui remplacèrent les Confrères, ni ceux du théâtre du Marais, ni ceux de la troupe de Molière, n'eurent à payer d'impôt semblable. La Comédie-Française elle-même, lors de son organisation en 1680, n'en paya pas davan- tage ; tout au moins , si elle le fit , fut-ce de bonne grâce et de bonne volonté : lorsqu'elle aban- donna, en 1C89, le théâtre de la rue Guénégaud pour prendre possession de celui qu'elle s'était fait construire rue Xeuve-Saint-Germain-dcs- Prés, elle décida que cha(iue mois elle prélève- rait sur ses recettes une certaine somme qu'elle distribuerait aux couvents et aux communau- tés religieuses les plus pau\Tes de la ville de Paris. Les Capucins ayant été les premiers à bénéficier de cette mesure charitable, les Cor- deliers s'empressèrent de demander la même faveur, et ils le firent à l'aide du placet suivant, qu'ils adressèrent aux comédiens : Messieurs , Les Pères Cordeliers vous supplient très humble- ment d'avoir la bonté de les mettre au nombre des pauvres religieux à qui vous faites la charité. Il n*y a pas de communauté à Paris qui en ait plus de besoin , eu égard à leur grand nombre et à l'ex- trême pauvreté de leur maison, qui, le plus sou- vent, manque de pain. L'honneur qu'ils ont d'être vos voisins leur fait espérer que vous leur accor- derez l'effet de leurs prières, qu'ils redoubleront envers le Seigneur pour la prospérité de votre chère compagnie. Après les Cordeliers, qui reçurent satisfac- tion, on vit venir à la rescousse les Augustins réformés, qui envoyèrent aussi leur petit placet : A Messieurs (le F illustre Compagnie (le la Comédie du Roi. Messieurs , Les Religieux Augustins réformés du Faux-bourg Saint-Germain vous supplient très humblement de leur faire part des aumônes et charités que vous distribuez aux pauvres maisons religieuses de cette ville, dont ils sont du nombre. Ils prieront Dieu pour vous. Ce ne fut toutefois (jue dix ans après qu'on vit l'établissement d'un impôt régulier. Dès le commencement de 1699, une ordonnance royale intervient qui établit en faveur des pauvres un impôt d'un sixième sur les spectacles. L'abbé de Laporte nous apprend qu'on jouait alors à la Comédie-Française une tragédie de l'abbé Brueys, intitulée Oabinie : « Dans le tems de la représentation de cette tragédie, dit-il, il plut au roi d'ordonner qu'on tireroit un sixième en 8118 de la recette journalière des comédiens pour les pau\Tes de l'hôpital général, ce qui fut trompette et affiché par toute la ville. De ce jour, le parterre fut mis à dix-huit sols, et le reste à proportion. » Cependant on était gêné, paraît-il, pour la perception matérielle de cet impôt, et Pontchartraiii, alors adminis- trateur de l'hôpital, écrivait bientôt au prési- dent de Harlay, pour lui proposer une combi- naison : « Sa Majesté m'ordonne de vous dire qu'il lui paroît qu'il seroit bien plus commode, pour rhôpiti\l mesme, pour Fntucine (alors directeur de TO^x^ra) et pour tout le monde, que ce fust Frijincine luy môme pour l'Opéra , et les comédiens pour la comédie [-Française], qui s'abonnassent à une certaine somme, plu- tôt que d'y mettre ou un receveur particulier, ou un contrôleur, ce qui seroit sujet à mille et mille inconvénients. » Il paraît qu'en effet les deux seuls théâtres existants alors, l'Opéni et la Comédie -Française, prirent chacun un ce abonnement », qui fut fixé à 40,0(M) li\Tes pour le premier et à 25,000 pour le second. C'étiiit, comme entrée en matière, un assez joli denier. On trouva cependant que ce n'était point assez, et que les théâtres bénéficiaient trop de cet arrangement. Deux ans après (1701), une nouvelle ordonnance supprimait l'abonne- ment et arrêtait que les pauvres seraient mis en possession du sixième des recettes a sans aucune diminution ni retranchement, sous pré- texte de frais ou autrement ». A partir de ce moment, les hospices devinrent iuflexibles, et commencèrent à traiter les théâtres de Turc à More. Ceux-ci eurent beau réclamer, rien n'y fit, et un chroniqueur nous rapporte cette anec- dote, dont le héros est Dancourt, l'un des meilleurs acteurs de la Comédie-Française : — a: Ce comédien avoit été chargé, par ses cou- DUCASSE. 315 frères, de porter aux administrateurs de l'hôpi- tal la part des pauvres. Il s'acquitta de sa com- mission, et fît aux administrateurs un très beau discours. L'archevêque de Paris et le pré- sident de Harlai étoient à la tète du bureau. Dancourt s'efforça de prouver que les comé- diens, par les secours qu'ils procuroient à l'hô- pital, méritoient d'être à l'abri de l'excommu- nication. Son éloquence ne fut pas heureuse. M. de Harlai lui répondit : et de la re- nommée fugitive, mais immense, du fameux banquier Law ; c'est, dit-on, à la libéralité de ce personnage qu'on dut la transformation de l'éclairage, et la substitution des bougies aux lampions et aux chandelles. Puis, bientAt, nn lampiste nommé Argent inventa la lampe à double courant d'air et à réflecteur qui prit le nom de quinquet, de celui qni la frabriqua et la perfectionna. Toutefois, il y eut lutte entre les deux éléments, l'huile et la cire, et celle-ci, pam!t-ii, conservait comme une sorte de privilège aristocratique, car voici la note assez singulière que je trouve dans les Mémoires de Flcury : — « Depuis que la Comédic-Ita* ÉCLAIRAGE (l') AU THEATRE. lienne avait adopté rOpcra-Comiqne, elle n'esistait que pour mémoire ; le bâton de me- sure du chef d'orchestre devint un sœptro de fer; il pesait ai lourdement sur la tête d' Arle- quin, de Pantalon et d'Argentine, que ces ancieunea g-Iotres, quand leurs jours de repré- sentation arri vaient,n'o8aicnt éclairer leur spcc- 319 tacle gtiavee de Vhiiik, tandis que les act^ura chantants filaient noblement des sons à la lu- mière des bougies. » L'usage du quinquet prévalut cependant, et devint bientôt général. Mais tandis que la bougie avait détrôné la chandelle, l'huile, qui avait vaincQ la bougie, dut à son tour céder la place au gaz. C'est l'Opéra qui eut encore l'hon- neur de cette tninsformation nouvelle. Dès lt*I8', M, de La Ferté, intendant des menus jjlaisirs, était envoyé en mission à Londres pour se renseigner sur les efTets du gaz hydro- gène applique à l'éclairaf^e des théâtres. Son rapport fut favorable, des expériences furent fuites, et quatre ans plus tard, le 6 février 1822, le gaz faisait son apparition triomphale il l'Opéra. Par une coïncidence ai c'était le jour de la première repi'ésentation A'A/adin ou la Lampe merveilleuse, opéra nou- veau et posthume de Kicolo. L'emploi du nou- vel agent lumineux se répandît promi>tenient dans tous nos théâtres, et aujourd'hui la Comé- die-Française est la seule qui ait consente (pour la rampe eeideinent) l'éclairage -a Thuile, comme moins fatigant pour les yeux des acteurs. 820 ÉCLAIRAGE (i/) AU THEATRE. Voici maintenant quelques renseignements pratifjues donnés par Moyiiet sur réclairage de la scène dans nos théâtres : L'éclairage de la scène se fait par la rarupe , les herses, les portants et les traînées. La rampe , que tout le monde connaît , est cette ligne do lumière qui sépare Torchcstre de la scène , disparaît ou re- monte suivant les besoins , et enfin éclaire les ac- teurs en face et si bien qu'aucun jeu de physiono- mie n'est inaperçu. Les moindres détails de leur figure et de leur costume ne peuvent échapper au spectateur. La ligne de feu s' étendant d'un côté de la scène à l'autre, tous les personnages sont éclai- rés de la même façon , quelle que soit la place qu'ils occupent. La rampe éclaire donc T avant-scène d'une façon égale, et ses feux vont en s' adoucissant vers le fond du théâtre , ce (jui permet , dans les scènes de nuit, de distinguer encore le jeu des acteurs, alors que tout le théâtre est dans l'obscurité. Le grand inconvénient de la rampe, c'est le danger d'incendie, surtout pour les costumes légers qui viennent flotter au-dessus d'elle. Dans les bal- lets, combien n'a-t-on pas eu à déplorer d'accidents de ce genre! On s'en préserve à l'Opéra à l'aide d'un système nouveau qui consiste en un renverse- ment des feux et dans la modification des réflec- teurs qui renvoient la lumière en grande quantité tout en absorbant une partie de la clialeur. Après la rampe viennent les herses, cylindres el-* liptiques en tôle traversant le théâtre, et dont une partie ouverte et munie d'un grillage métallique laisse échapper les feux d'une traînée de beca de gaz, situés à l'intérieur. Cet appareil est suspendu par des chaînes , qui sont elles-mêmes rattachées à des cordages, à la distance où la chaleur de la herse ne peut plus les mettre eu danger. Le tout est monté sur tambour et contrepoids, pour qu'on puisse charger ou appuyer (Voy. ces mots) la herse. Il y a une herse par plan : un conduit monté sur un pas de vis va rejoindre une petite logetto si- tuée à l'avant-scène , où se tient le lampiste; de cette logette il peut donner ou retirer du feu en tournant un robinet , ce qui lui permet d'obscurcir graduellement le théâtre , en commençant par la rampe , la herse du premier plan , etc.; il tient aussi les robinets des poitants , dont nous allons parler, ce qui met tout le système lumineux dans sa main. Les portants sont de longs montants de bois , sur lesquels sont fixés des tuyaux do cuivre. Sur ces tuyaux sont branches trois , quatre ou cinq et même dix becs de gaz avec leurs verres. Les montants sont poun'us , à leur partie supérieure , d'un large crochet qui sert à les suspendre soit à une traverse de châssis , soit à un mât. Une fois le portant sus- pendu, un lampiste vient boulonner un tuyau de cuir ou de caoutchouc à la partie inférieure du tuyau de cuivre où se trouve situé un robinet. Ce tuyau de cuir ou de caoutcliouc passe à travers le plancher et va rejoindre un système de tuyaux qui se branchent sur le conduit central où est le robi- net du gazier. Ces portants s'adaptent à tous les plans , et les tuyaux sont assez nombreux pour ap- porter un foyer central de lumière à un point dé- terminé , si les besoins de la scène le commandent. A ces trois appareils , il faut en ajouter un qua- trième, qu'on appelle les traînées, et qui n'a pas de poste fixe : on le dispose selon les besoins. Lors- que la décoration est accidentée, et lorsque les châssis peu élevés occupent plusieurs plans du théâ- tre, le traversant quelquefois dans sa largeur, comme des terrains, des bandes d'eau, de petites fermes de paysage, ces décorations porteraient ombre les unes sur les autres et seraient imparfai- tement éclairées si on ne mettait entre elles des ap- pareils d'éclairage. Ces appareils sont des traverses plus ou moins longues, sur lesquelles on adapte un cylindre creux, duquel jaillissent par de minuscules ouvertures une série de flammes minces et longues , assez semblables aux illuminations des monuments les jours de fête ; ces traînées sont d'un grand ef- fet dans de certaines décorations. Ajoutons que les décors mobiles , comme les nuages, les plateaux sur lesquels on monte ou l'on descend des personna- ges dans les féeries, sont aussi éclairés par le gaz, la facilité de raccourcir ou d'allonger le tuyau con- ducteur permettant partout l'emploi du gaz. L'éclairage à l'huile n'est pas tout à fait aban- donné. Pour le ser\'ice des dessous, du cintre, et même sur la scène, la lumière doit souvent accom- pagner l'ouvrier qui a une réparation à faire ou un objet à agencer dans un des mille endroits obscurs où la lumière du gaz ne peut pénétrer. Mais la vieille lampe à l'huile du théâtre ancien , si ingé- nieusement construite qu'on pouvait la promener partout sans aucune précaution, celle qui a jadis éclairé l'Olympe dans les fameuses gloires de l'O- péra, ne sert plus aujourd'hui qu'aux services se- condaires du théâtre. On commande « un petit ser- vice à l'huile » pour les travaux et pour les répéti- tions , l'emploi du gaz nécessitant la présence d'un grand nombre de sapeurs. L'administration, pour éviter des frais, éclaire aussi la salle à l'huile pen- dant le jour pour le ser^*ice des répétitions. Il faut dire , cependant , que certains théâtres n'emploient même plus l'huile que très exceptionnellement ; les ÉCOLE DE CHANT DE L'OPÉRA. 321 quinquets n'y servent guère que pour l'éclairage ambulant (1). Le gaz, qui depuis soixante ans brille dans nos théâtres, est destiné certainement, dans un avenir plus ou moins prochain, à faire place à rélectricité. Déjà des essais ont été faits, au point de vue de la pratique journalière , paiti- culièrement à l'Opéra et aux Variétés ; mais il reste encore quelques diiîicultés à résoudre, quelques obstacles à vaincre pour que l'emploi de la lumière électricjue puisse s'appliquer d'une façon satisfaisante et définitive à Téclairage des établissements dramatiques. Le jour où le problème sera complètement résolu, presque tout danger d'im^endie aura disparu, et Ton n'entendra plus parler do catastrophes horribles comme celles qui, récemment encore, ont si- gnalé la destruction du Kiiig-theater de Vienne ou du théâtre itaheu de Nice. (Vuy. i.E Fku AU THÉÂTRE.) Pour ce qui est de la lumière électricpie employée comme moyen d'etfet scéni^pie , ceci ne se rapporte plus à l'éclainige proprement dit, et nous renvoyons le lecteur à ce mot spécial, de même (pie, pour ce (jui concerne l'éclairage des salles de si>ectacle, nous le prions de se reporter aux mots Lustre et Plafond LUMINEUX. ÉCOLE DE CHAXT DE L'OPÉRA. — Bien (ju'un n'ait aucun renseignement l>ien positif à ce sujet, on est à peu près certain que Lully, artiste prudent et directeur a\isé, éta- blit une école de chant à l'Opéra dès 1672. Cette école semble avoir disparu vei*s l'époque de sa mort, pour être reconstituée quelques années plus tard , en môme temps qu'on orga- nisait à ce théâtre une école de danse. Cette double école était alors situc*e dans une dépen- dance de l'Académie royale de musique, rue Saint-Nicaise, connue sous le nom de Magasin., et c'est pourquoi l'on prit bientôt l'habitude de désigner les élèves qui en faisaient partie (il n'y avait que des femmes) sous le nom de filles du Maf/asî7i, Les filles du Magasin étaient admises à figurer sur le thàitre avant d'avoir achevé leurs études, et, par un pri\nlège assez singulier, elles ne dépendaient plus de personne lorefiu'une fois elles étaient inscrites sur les registres de l'école : l'autorité des parents, du mari même, cessait sur le seuil de l'établisse- ment. On cite parmi les professeurs de cette pre- mière école de chant Dun fils (1714), Lacoste, Bluquet, Deshayes (171Î)), Dubreuil (1737). En 1751, Lagarde en était directeur, Levas- seur en 1758, Féret en 1773, De la Suze en 1779. ^lais bientôt une autre école allait surgir. Sur les instances du baron de Breteuil, un arrêt du conseil d'Etat en date du 3 janvier 1784, relatif à l'Opéra, établissait à ce théâtre une école destinée à lui former des sujets. Voici le passage essentiel de ce document : Le Roi ayant reconnu que ce qui pourroit con- tribuer le plus effîcacenient à donner à un specta- cle aussi intéressant pour le public un nouveau de- gré de perfection , ce seroit d'établir une Ecole où Ton pût former tout à la fois des sujets utiles à l'Académie royale de musique et des élèves propres au service particulier de la musique de Sa Ma- jesté, etc., Ordonne : Art. 1". — A compter du P' août prochain, il sera pourvu à rétablissement d'une Ecole tenue par d'habiles maîtres de musique, de clavecin, de déclamation, de langue franç.oise, et autres, char- gés d'y enseigner la musique, la composition, et, en général , tout ce qui peut servir à perfectionner les différents talents propres à la musique du Roi et de l'Opéra. U) Aujourd'hui, en ctïet, le service même de jour se fait au gaz, dans la plupart des théâtres; mais un nom- bre de becs est scrupuleusement déterminé, nombre que l'on ne peut augmenter sans augmenter en même temps la garde des pompiers , comme pour le service du soir. Ainsi, dans un grand théâtre, comme la Porte-Saint- Martin , le nombre des becs de gaz qui peuvent être al - lûmes dans le jour ne peut dépasser dix ; dans un petit théâtre, comme la Renaissance, il est fixé à trois. DICTIONNAIRE DU THÉÂTRE. L'Ecole fut organisée avec soin, et placée sous la direction de Gossec, avec des professeui*s tels que Piccinni, Langlé, Ri^rel, De hi Suze, Saint- Amans, Rodolphe, (luénin, ^lolé, etc. On l'installa dans les bâtiments des ^lenus- Plaisirs, faubours^ Poissoimière, et ce fut véri- tablement là le premier essai d'enseignement musical, qui devait plus tard donner naissance 21 822 ÉCOLE DE DANSE DE L'OPÉRA. — ÉCOLE ROYALE DRAMATIQUE. au Conservatoire. Toutefois rancienne école du chant de l'Opém continua de subsister jusqu'en 1790, concun-emment avec l'éUiblissement nou- veau, qui avait reçu le nom d'Ecole royale de chant et de déclamation, et qui fonctionna à partir du 1'"' a^Til 1784. ÉCOLE DE D.VNSE DE L'OPÉRA. — C'est versle commencement du dix-huitième siè- cle , vingt ou trente ans peut-être apivs la mort de Lully, que semble avoir été créée à l'Opéra l'école de danse qui fait encore aujourd'hui par- tie de ce théâtre. Gnice à cette institution fort utile, dans laquelle de nombreux élèves des deux sexes reçoivent, dès leur plus tendre en- fonce, une éducation spéciale très complète, notre première scène lyri(]ue a toujoura eu sous la main une pépinière de jeunes artistes dans laquelle elle pouvait puiser incessamment pour renouveler et compléter son personnel dansant, en même temps qu'elle maintenait intactes les traditions d'un art qui paraît mallieureusement avoir perdu une partie de son ancienne splen- deur. Les directeur de l'école de danse de l'O- péra ont été Lany (1750), Hyacinthe (1761), fîardel j^ère (1770), Deshayes (1781), Gardel (1799 jusqu'à 1815). A partir de cette é\\0' que, il ne pamît plus y avoir eu de directeur 8i)écial pour l'école, mais seulement des pro- fesseurs, qui ont été successivement Maze, Coulon , Romain , Vestris , Mérante, M"*" Ta- glioni, M""" Dominique, etc. L'école, qui porte officiellement aujourd'hui le nom de Conservatoire de danse, est tenue avec soin. Avant d'avoir terminé leur éduca- tion , les élèves sont admis, selon leurs capaciU% à paniître dans les ballets de l'Opéra ; des exa- mens périodiques, établissant leurs progi*ès, leur pennettent d'obtenir de Tavancement , de passer d'un quadrille effacé dans un quadrille l)lus important, de devenir ensuite coiyphées, et parfois même premiers sujets. C'est à l'école qu'on a dû des artistes de la valeur de la pau- vre Emnui Li\Ty, de iM'*''" IVIarie Veraon, Laure Fonta et ])ien d'autres, qui ont fait honneur à TOpéni. Au siècle dernier, ou accordait à certaines élèves, pour leur permettre de se former et de prendre l'habitude de la scène , l'autorisation de danser sur les petits théâtres des Foires Saint-Laurent et Saint-Germain, particulière- ment à l'Opéra-Comique. En 1779, on ouvrit même à leur usage spcK^ial, sur le ])oulevard du Temple, en face la rue (^^harlot, un théâtre nouveau qui prit la dénomination de 2'héâtre des élèves delà danse pour V Opéra. On jouait là irde grands l:>allets-pantomimes à spectacle, tel» que la Jérusalem délivrée, V Amour enchaîné par Diane ^ etc., dans lesquels ce personnel mignon, composé d'enfants de cinq à quinze ans, étonnait le public par ses talents précoces. Toutefois cette entreprise eut une fin malheu- reuse, se termina par la faillite des entre- preneiu^, et les élèves retourneront à l'Opéra, tiindis (jue le nouveau théâtre changeait de directeiu^, de genre, de répertoire , et devenait celui des Beaujolais. (Voy. Conservatoire DE DANSE.) ÉCOLE ROYALE DRAMATIQUE. — Cette école, qui semblait jusqu'à un certain point destinée à devenir le pendant de l'Ecole de chant établie à l'Opéra, est restée bien obs- cure, (;ar aucun historien, que je sache, n'a ré- vélé son existence. Cette existence fut courte d'ailleurs, car, établie le r^'aral 17S(>, l'école disparut dès les premiers jours de la Révolu- tion. La seule tmce que j'en aie retrouvée est dans le petit almanach les Spectacles de Pari» (1789) : — » ÉCOUTER. — Sîivoir êcoiife/\ avec intelli- gence, avec vérité, n'est pas l'un des moindres talents du comédien. Dans une situaticm dra- mati(iue surtout, bien écouter son interlocu- teur, suivre attentivement i^on récit, le com- menter du ireste et du rei::ard, faire comprendre au spectateur les sentiments «ju'il fait naître en vous Siuis cependant chercher à accaparer son attention au détriment de l'acteur (jui parle, c'est là luie (jualité* rare et (pie certains altistes savent porter à un haut point de per- fection. Talma, dit-on, était merveilleux à vair écouter ; Racliel savait écouter d'iiue fa(;on admirable. De nos jours, une i^n*ande tniiré- dienne lyrique, W^' Krauss, montre une j)uis- sance et une sai^acité dramati(pies inconq)ara- bles dans sa façon d'écouter: il faut la voir dans la irrande scène qui ouvre le cpiatrième acte des Hu(jue)w1s ])our comprendi'e tout le talent cpi'un .L^rand artiste peut di'ployer seu- lement en écoutant. ECKIYA I X D RAMAT I qV E. Auteur dramatiquk. Vov ÉCUYER, ÉCUYÈRE. — Artistes (pii font les exercices é(piestres dans les cinpies et dans les manettes publics. C'est depuis environ 17S0 (pie la UKxle de ces exercices, aujourd'hui si populaires, a été importée d'Anj^leteire en France par deux écuyers fort habiles, les frères Astley, aux(|uels succéda plus tard Franconi l)ère. Ce nom de Franconi a été célèbre à Paris pendant plus de soixante ans, dans la personne du fondateur de la dynastie, puis dans ceJles de son fils et de sa fille, Laurent et ^linette Franconi, et de son petit-fils Adolphe Franconi. Au reste, c'est par famille que vont générale- ment les écuyers, et il en est plusieurs qui ont joui d'une grande réputation, en pro\ince comme à Paris, les familles Loyal, Loisset, La- lanne, Bouthor. Puis, parmi les écuyers et écuyères (pii se sont fait un renom par leur ta- lent, il faut citer ]\r. Paul Cuzent et M""* Pau- line Cuzent, M. et M""" liejai-s, MM. Baucher, Pcllier, ^I™''' Adams, Maria d'Embrun, Coralie Ducos, lladwiger, etc., etc. EFFET. — Lnpression produite sur le pu- blic, et (pli, par sa vivacité, excite la satisfac- tion, ou l'adminition, ou l'hilarité des specta- teurs. Tl y a des pièces à effet, des actes, des scènes, des situations, des mots à effet ; il y a des décoi*s, des trucs, des mises en scène à effet. Tl y a des effets sérieux et comi(pies, des effets dramatiques, pathéti(iues, attendrissants. On dira d'une pièce (pi'elle n'a point produit d'ef- fet, l(»rs(prelle s'est déroulée devant le public sans le faire sortir de son indifférence, et l'on dira d'un artiste (ju'il a maïKpiéson effet, loi*s- (pi'il aura laissé fi'oid le spectateur dans un endroit où il aurait dû exciter ses applaudis- sements. « Une j)ièce contient toujours, disait un chnmicpieur théâtral, un certain nombre de passages indiqués par la tradition, ou par l'auteur lui-même, ou par l'acteur dans le rôle du(piel ils se trouvent, comme devant exciter, suivîint les cas, les api)laudissements, le rire ou les larmes, (."est ce (pi'im appelle un effet. Il y a des acteurs (pii, par jalousie ou par inimitié, neutralisent les effets de leui*s camara- des, ce qui est facile, en s'abstenant de donner la réplique juste, ou en omettant un geste con- venu, ou en se hâtant de ])arler immédiate- ment après le mot de valeur. » Il y a des comédiens qui cherchent constamment l'effet, qui le poursuivent sans cesse, voulant l'attein- dre à quel(pie prix (pie ce soit. Il en est d'au- tres qui ne recherchent que la vérité, qui ne s'en écartent jamais, et ne veulent d'autres effets (pie ceux que permettent la raison et le lx)n goût. Nous n'avons pas besoin de dire chez lesquels se trouve la supériorité. 826 ÉGEILLARD— EMPLOIS (les) AU THEATRE. ÉGRILLARD. — Mot égriUard, couplet égrillard, style égrillard, sont des choses qui se comprennent plus facilement qu'elles ne s'ex- pliquent, et que l'opérette moderne surtout a rendues familières à un certain public. Il suffit de dire que tout cela fait partie d'une littéra- ture qui n'est pas absolument celle qui convient à un i)ensionnat de jeunes demoiselles. ÉLÉVATION. — Se dit, en termes de danse, des mouvements que l'artiste exécute en s'éle- vant de terre. « Dans toutes les élévations, dit Blasis, développez une vigueur nerveuse, et que vos pas d'élévation contrastent agréablement avec la rapidité de vos terre-à-terre, sans jamais oublier, d'ailleurs, de régler le choix de vos pas d'après le genre de danse que vous avez adopté, et aussi d'après votre constitution physique. )) ELEVES. — Il y a soixante ou quatre-vingts ans, les vieux comédiens ne voulaient pas ad- mettre qu'on pût faire d'élèves pour le théâtre. Ils considéraient la théorie et l'enseignement d'un professeur comme choses inutiles, sinon nuisibles, et ne comprenaient que l'éducation pratique, celle qui s'acquiert uniquement par l'habitude, la fréquentation et l'expérience de la scène. On est revenu aujourd'hui de ce pré- jugé, et l'on a fini par comprendre que si cer- tains êtres bien doués peuvent en effet faire leur éducation eux-mêmes , en s'exerçant sans cesse et en se brisant au métier de comédien, d'autres n'agissent pas moins bien en se pliant aux conseils et aux leçons d'un professeur, et en faisant leur profit de son expérience et de son habileté. Il est certain (jue nos théâtres, à Paris, sont peuplés d'artistes qui ont commencé par être élèves du Conservatoire, et l'on serait bien embarrassé de dire ce qu'ont pu perdre ainsi des comédiens tels que M^î. Got, De- launay, Co(iuelin, Thiron, Worms, Lacres- sonnière, Saint-Germain, Marais, Joumard, Sylvain, M""^* Favart, Barretta, Reichemberg, Samary, Delaporte, Périga, Patry, Réjane, Brindeau, Malvau, et bien d'autres (^ue je ne saurais nommer. EMBOITURE. — C'est, dit Compan, la troisième des cinq positions du corps nécessai- res à la danse, (c On la nomme emhoîture parce que cette position n'est parfaite que lorsque les jambes sont bien étendues l'une près de l'autre, ce qui fait que les deux jambes et les pieds étant bien serrés, l'on ne peut voir de jour entre deux ; ainsi elles se joignent et doi- vent se joindre comme une boîte. L'emboîture apprend à se tenir ferme, à tendre les genoux, et assujettit à cette régularité qui fait toute la beauté de l'art de la danse. j> EMMÉLEIA. — C'était l'une des trois dan- ses théâtrales des Grecs. D'un caractère em- preint de noblesse et d'élégance, elle était ré- servée à la tragédie. EMPLOI DES BEAUX ROLES. — Ceci est une expression railleuse dont se servent lea comédiens de province pour caractériser l'em- ploi joué par leur directeur. A l'exception des grandes villes, en effet, les directeurs de théâ- tre en province sont toujours acteurs, et ils profitent généralement de leur situation pour écrémer à leur usage tous les emplois et choisir dans chacun d'eux les rôles (ju'il leur convient de jouer. On comprend qu'ils ne prennent point les plus mauvais , et ne s'emparent que de c«ux qui sont de nature à produire un grand effet. EMPLOIS (Les) AU THÉÂTRE. — On appelle emploi toute une catégorie de rôles se rattachant à un genre spécial, et exigeant, au point de vue de la voix, du physique, du jeu scénique, certaines aptitudes, certaines facultés qui sont le propre de tel ou tel individu ^t qui le rendent particulièrement apte à remplir cet emploi. De même qu'un vieillard ne saurait jouer les amoureuses et qu'une jeune fille ne saurait jouer les pères nobles, de même certains acteurs, nés pour le genre comique, seraient dans l'impossibilité de remplir un rôle sérieux, et vice versa. Il a donc bien fallu, pour établir, ave(î autant de précision qu'il est possible de le faire en pareille matière, la paît de chacun, former des séries de rôles analogues et consti- tuer ce qu'on appelle des emplois. Il y a, dans la fonnation des emplois , une part à peu près fixe, qui est basée sur des gé- EMPLOIS (LES) AU THÉÂTRE. 327 néralités, et une pure un peu mobile, qui, en ce qui concerne la province, prend sa source dans le renom que s'est acquis à Paris tel ou tel acteur, et (pii fait que l'on désigne toute une série de rôles du nom de cet acteur, parce que c'est lui qui les a créés. C'est ainsi que, dans le genre de roix*ra-conii(|ue, on caractérise encore certains rôles sous ce nom : les Larvetie, les Trial, les Dugazotu et même des rôles (pie ces artistes n'auraient pu jouer, puisqu'ils ai)par- tiennent à des ouvrages représentés depuis près d'un siècle qu'ils ont disparu de la scène, mais (pli rentrent dans la nature du genre et du talent qui les ont rendus célèbres. Il en est de môme, pour le vaudeville, en ce (|ui concerne les Dèjazet. Mais il faut remarquer qu'il ne se produit guère à Paris un comédien remarqua- ble sans qu'aussitôt son nom serve à caractéri- ser, en province, les rôles dans lesquels son tiilent s'est affirmé : c'est ainsi qu'on a dit successivement, ])our le genre lyri(jue, les Clair- val, les Elleviou, les Ponchard, les Martin, les Lays, les Solié, les Gavaudan, les Pliilipi>e, les Juliet, les Lesage, les ^loreau, les Dozain- vi lie, les Pliilis, les Saint- Aubin, et, dans le genre du vaudeville, les Perlet, les Boscjuier- Gavaudan, les Potier, les Tiercelin, les lirunet, les Levassor, les Acliard, les Bouffé, les l^res- sant, les ^li nette, les Aldégonde, etc., etc. Seu- lement, à mesure qu'un de ces artistes disparaît, son nom disparaît aussi de la nomenclature des rôles, pour faire place à un autre qui sur- git. Il n'y a (jue les (piacre acteiu's que nous avons cités plus haut. Trial et Laruette, M"'*** Dugazon et Déjazet, dont les noms se soient ainsi maintenus, et cela suffit à faire apprécier la place importante que ceux-ci ont occupée dans l'art. l^arfois, les emplois se sont trouvés prendre jKmr nom la qualité de certains personnages. C'est ainsi (pie, dans l'opéra et dans la tragé- die, on avait autrefois les rois y les reines ^ les primasses, et dans la comédie les valets, les jwfils-maifres, hsjjat/sa/ts (on a encore aujour- d'hui les financiers et les souhretfes). Parfois encore Temploi tirait son appellati(m d'une particularité du costume; on avait alors les rôles à baguette (reines d'opéra), les rides à man- teau (premiers rôles et i)ères de comédie) , les r{)les à tablier (basses d'oix^ra-comique , repré- sentant généralement un ouvrier avec un grand tablier de cuir), les rôles à corset (villa- geoises d'opéra-comique , qui se jouaient en corset et en jupon), etc., etc. D'autres fois en- fin, l'emploi tirait son nom de celui (|ui sem- blait le caractériser dans un grand nombre de pièces différentes, où il portait le même nom : on avait les Colins (amoureux d'oixTa-comi- (iue),les Front ins (valets d'opéra-comique), les Betzis (ingénuités de vaudeville), les J/argots (duègnes d'opéra-comi(pie), et d'autres encore. Si l'on veut se faire une idée de la compli- cation dans hujuelle on tombait quelipiefois au sujet de la désignation et de la distinction des emplois, on n'a qu'à jeter les yeux sur le ix?tit document cpie voici ; c'est le tableau de la troupe (pli desservait le tlu'^àtre de Nantes en 1829, et qui (îtait divisée en deux parties, l'une comprenant les artistes (pii jouaient la comédie et la trag(Hh"e, l'autre ceux qui jouaient l'oj^éra, tous d'ailleurs jouant duns le vaudeville, comme c'était riiabitude à cette éjmque : COMKDIE KT TrAUKI'IE. MM. Mainvikllk, premier rOle en tout jjjcnre. Li:«iHAND-U(xHK, jeunes i)remicrs, fort jeunes pre- miers rùles au besoin dans le vaudeville. Fkmx, troisièmes amoureux: seconds rules analo- irues à cet emi)loi dans le vaudeville. Welscu, sc(^(mds amoureux et rolos de conve- nance. TANTRf:M().NT, secoudes amoureuses. DÉPRK cadette, troisièmes amoureuses, secondes uu besoin. Lucie, soubrettes en tout genre, comédie, drame et vaudeville. CofHEZK. caractères et mères nol»les. LuxKX , mères nobles. Daudexxe, utilités. OrÉUA. MM. lîODEL. les premiers ténors, Kllrriou , Pouclamî , Choifttj et jeunes rôles do giand opéra. HEi-'RTArx, (laraudan, Plùfippe , première linute- contre do grand opéra, Gonthifr et rôles an- nexés dans le vautleville. LÉox Chapelle, forte seconde haute-contre. Co- lin, jeune première haute-contre, les jeunes Go- raïufan, et premiers amoureux du vaudeville. FoiGXKT, les Martin, Lais et Snlii'. Lemoxxier, premières basses-tailles nobles et rôles annexés dans le grand oi»éra. (ioxD<»ix, basses-tailles, tabliers, fortes secondes. Julirf , rôles analogues dans le vautleville. Pall\xti, troisièmes basses-tailles, secondes au besoin, coryphées et rôles analogues dans le vau- deville. FÉLIX, troisièmes et secondes hautes-contre, troisiè- mes et seconds amoureux dans le vaudeville. LekÈvri:, les Larurtte, limthre, Juliet, et rôle.-, annexés dans le vaudeville. E\>i:xLi;rFKEL, seigneurs et rôles de convenance. Martin, (Juexay, S. Valis, utilités. M'"' * Lemoulk, ])remière chanteuse en tout genre, opéra-comique, grand opéra. Pail r»RKARi>, forte première chanteuse . l'»)rteZ>«- //^f:ow, jeunes mères Dugaian , Bon l(inffn\ etc. DE^riAXKL, les I)uffa.::tm , A^aiut-AitbiH , (hiraïuhni, PraMir, rôles annexés dans le vaudeville. Daxtrkmoxt, jeunes J^uffarjui^ IJetzhy rôles à corset. Ji'LE.^ I{o«HK, deuxième chanteuse et deuxième ('ociiKzi;, les premières duègnes en tout genre, opéra-comi«pic et traduction^. LirxKX, secondes duègnes et mères Dugazon, les M argot s. Dardexxe, deuxièmes coryphées. Loi'sciiron se maintient en deboi's des ddsi- JL^nations par trop conventionnelles, nous allon.s voir de quelle façon on désigne les différents emplois. !Mais tous les pleures étant aujourd'hui très distincts, en province comme à Paris, il faut les cla.sser selon la nature des œuvres jouées, et les diviser en trois séries, relatives Tune au gnmd oj^'m, l'autre à ropéra-comique, la troisième au drame et à la comédie : Oim';iîa. — Premier fort ténor; Ténor léger; Deuxième ténor : lîarvton : Première basse : Seconde basse; Troisième basse. — Première forte chan- teuse (soprano); Première chanteuse (contralto); Chanteuse légère à mulades; Seconde chanteuse; iSeconde chanteuse légère , jouant les pages. Oi'KiiA-<'oMi',)UK. — Premier ténor léger; Second ténor; Triai ténor comique; Baryton: Basse chan- tante; Si'conde basse, Larufttr; Troisième ténor et second Trial. — Première chanteuse légère; Pre- mière Dugazon ; Seconde chanteuse ; Seconde Du- gazon; Jeune mèn* Dugazon; Duègne. Dra>ie et CnMKPiE. — Grand ]>nMnier rôle; Fort jeune premier amoureux, jiMine premier rôle; Se- cond amoureux; Premier lîomique ; Second clois sont, pour les femmes, les dnèirnes, caractères et mères nobles: pour les Imnnnes, les i^^rimes, financiers, pères nobles, ])ères dindons, o-anaches, ])re- miei** rôles marplaudissements ni S(.'S bravos. — .Mais le mot a sa contre-partie. Quand racteur charL^i' d'une scène inq>ortante ne se montre pas à la hauteur de la situation, (|uand il est froid, truindé. sans passion, (pfil reste manih'stement au-dessous «le la tîiche qu'il est charp' de remplir et «ju'il ne prouve (jue Son insulîisanci?, alors il arrive (jue le ])U- blic donne des nranpies non é((uivoques d'im- patience et de m(''Contentement, (pii se tradui- sent ])ar des exclamations et des nuirmures sii^niilicatifs. Ceci s*api>elle être empoigné, EMPORTE-PIÈCE.— Dans lelanortance telle et d'une si jurande beauté qu'on le considère comme devant à lui seid emporter le succès d'un ouvraire. EN CHEF ET EX PAPtTAGE. — Vov. ClIKF d'kMPLOI. EX CHEF ET SAXS PARTAGE. - Yov. ClIKF d'kMPLOI. EXCORE. — Vov. Bis. EXFAXT DE LA BALLE. — Expression d'ar^^ot thé/itral. On donne le nom iïenfantde la balle à tout acteur né de parents comédiens eux-mêmes, (pii a ('té InTcé au théâtre, élevé dan> les ccadisses. et pour qui, dès son ])his jeune ài^a*, la profession n'avait plus de secrets. EXFAXTS-SAXS-SOUCL — Les Enfants- sans-Souci sont une de ces sortes de corpo- rations artisiiques(jui,avec les Confrères de la Passion, les (Mercs de la Bast»che et la (-om- pairnie des Sots, donnèrent, vers la fin du moyen âtre, l'inquilsion à notre théâtre et ré- ]»andirent chez nous le iroût des jeux scéniques. Tandis que les Confrères faisaient en (pielcpie sorte pntfession du théâtre, qtie les (Mercs mêlaient, comme une distraction a.u:réable et intell iu^ente, l'exercice de cet art à des travaux j)luss«''vères, les Enfants-sans-Souei et les Sots se recrutaient i>armi de jeunes tils de famille fortunés (jui aimaient le plaisir et à (pii s'ad- joignaient quehiues jeunes ])oètes partageant leurs .iroûts, tels rjue Clément ^larot, artie de leur compai^nie. Les Confrères de la Passion s'adonnaient à la rej)résentation (h'S mystères et des miracles; les Basochiens, les Sots et les Enfants-sans-Sou- ci, essentiellenu.-nt turbulents et frondeui*s, s'attachèrent particulièrement à la satire. Alors que les Rasochiens, dans leiu's jeux, s'en pre- naient surtout au Parlement et aux jLreiis du Palais, les Sots se tirent une spécialité de la sotie j genre de pièees imagiiu' par eux et dans les(pielles ils entrej^renaient de railler la sottise humaine sous tous ses aspects, et les Enfants- sans-Souci, j)our justifier lem* nom, représen- taient surtout ces farces joyeuse^, burlesques, licencieuses, qui devinrent si célèbres alors et. qui se r<''])andirent bientôt par t(>ut«.' la France. Il n'est i)as facile de rien ])récis<.*r, au ])oint de vue historique, en ce (pii concerne les Sots et les Enfants-sans-Souci; d'abord parce que les renseignements à leur sujet sont très confu>. 8S0 ENFAXTS-SANS-SOUCI. très insuffisants, souvent contradictoires, en- suite parce que l'existence de ces deux compa- gnies joyeuses, d'abord distincte, se mêle et se confond plus tard, et que leur histoire finit même par se fondre dans celle des Confrères de la Passion. Ce n'est guère que dans les dernières années du quatorzième siècle que l'on voit les Sots et les Enfants-sans-Souci en possession de leur pleine actirité; mais il est évident que leur existence date de plus loin, et que cens-ci, comme ceux-là, aviiicnt commencé d'une façon plus ou moins ol)scure. Ainsi que nous l'avons dit, les uns étaient d'abord distincts des autres , mais bientôt les deux socictcs, qui, comme on l'a fait observer, poursuivaient le même but par les mêmes moyens, ne tardèrent pas à con- fondre et leui-s troupes et lenrs pièces, et l'on vit même parfois les Basocliiens se mêler aux unes et aux autres sur la même scène et dans le même spectaele. Sots et Enfants-sans-Souci donnaient ces spectacles aax halles, qui à cette époque étaient le rendcz-i'ous du jwpulaire pa- risien et le centre favori des amateurs de Mulie graisse. On n'a pu démêler encore si leurs re- présentations étaient al)solument publiques, c'est-à-dire si elles avaient lieu en plein air, sur un écbafand, ou bien si elles étaient don- nées dans un local dos et couvert, dans un vé- ritable théâtre. Rien de ce qu'on a pu décfiu^Tir jusqu'ici ne pennet de préciser quoi que ce soit dans l'un ou l'autre sens. Au surplus, je vais emprunter à un écrivain très expert en ces matières, il. Victor Fournel, ce résumé des renseignements recueillis par lui sur ce sujet intéressant : Lea jeux des Enfants- Eane-Soiict aux halles avaient lieu dons l' après-dîner, comme tous les spec- tacles jusqu'au dix-liuitième siècle. Qaelle en était la périodicité? Lu encore il eut impossible de pondre nettement, tant cette partie de l'histoire de notre thcStre est couverte d'cpnisseset impénétra- bles ténèbres. Divers indices jiourtant , et quelques mots de nos vieux écrivains des quinzième et zièmc ttiècles , donnent à etitcndre que le dimanche était privilégié pour ces représentations, conn est facile de le comprendre. Mais les jours gros surtout ramenaient les grands Irionjphes et l'cpa- noiiiEseraent des jeux des halles. Le carnaval, fête de la licence et du franc parler, lAchait la bride joyeuses audaces de la mtie, et cet usage de- bien vite, comme le bœuf gras, une sorte de tradition parisienne qui survécut même à la dispa- rition des Enfants sans Souci Quand ceux-ci eurent abdiqué plus ou n n I ntairement , pour se fon- Lvec les L nf d la Passion, qu'avait tués la défense de j ue d nuais des mystères reli- gieuï et qu aba d ua t la faveur publique , quand enfin la vie 11 f t [a se des tréteaux popu- laires aux planci de la ue Mauconseil, où elle allait peu a [ eu d en t oraédic , les acteurs de l'HStel de Bou ^ ne h nte ent de cette partie de leurs attribut ns t I gardèrent précieusement , à la fois comme une obligation et comme un pri- 'ilège, l'habitude d'aller, au jour du mardi gras, di- 'crtir la multitude sous les piliers des halles. Gaul- N^\?t m/otv-îiïnr.-f 0-nt :r,^ A ■(■ -.■ i es *-* § u ^\Tt 'jV 'Vl s 'ÉFIh û iMsyiri i^pl/l||g g ^Wf ^iTf^g ** ^ll'*^ J /w/ ;^ i>^ ^CL- .^^^ -^i-L. y. tier-Garguille, lîroa-Guiilaume et leur gnccesseur Guillot-Gorju n'y manquèrent pas; et même, en dehors de ces farceurs de haute volée, les lialles relatèrent toujours le lieu de prédilection de la vieille gaieté gauloise, l'un des sanctuaires de la farce et de la chanson , le rendez-vous des suppôts de Carême-prenant. La confrérie des Sots et des Enfants-sans-Souci ne s'était posdissoute en entier lorsqu'elle s'absorba dans l'Hôtel de Bourgogne ; elle garda une exis- tence et un nom à elle (on l'appelait la Société des sots attendants), quoique désOiTiials bien diminuée d'importance. En 1604, i! s'engagea entre le sieur Nicola.s Joubert, plus connu kous le nom burles- que et typique d'Angoulevent , qui se qualifiait Prince eJee Sotn et jiremîer clie/ de la S^lie , et les sieurs Maclou Poulet, guidon de la Sotie, et Nico- las Amant, liérault de ladite Sotie, un procès ENGAGEMENT. 331 ayant pour but de contraindre le premier à prendre jour proraptement <( pour faire entrùe sotte en cette ville de Paris, et, pour ce, faire la con- vocation et assemblée ordinaire, y despendre lar- gesses et faire toutes autres cérémonies accoutu- mées , Ti sous peine de dégradation et de déchéance. Conformément à la requête, Angoulevent fut con- damné « à faire son entrée en liabits décents , au l*' mai i)rochain, par les lieux, portes et places ordinaires, avec ses officiers, suppôts et sujets )>. L'arrêt l'autorisait a à vendre et à engager tous ses biens, meubles et immeubles, pour faire les frais de son entrée. Faute de quoi, il serait déchu ; les portes de sa loge à Tllotel de Bourgogne de- A'aient lui être fermées, ses armes abattues, et il serait fait défense à ses chancelier, avocats et con- seillers de se servir des marottes et chaperons i>ar luibailléi*, » Angoulevent interjeta ai)i)el. Les maî- tres de la confrérie de la Passion, Valeran Le C(»mte et J. Resneau, intervinrent dans la cause, ainsi que les administrateurs de Tllôtel de Bourgogne, en se joignant aux conclusions de ses sujets rebelles. L'affaire traîna en longueur, mais entin, jtar ar- rêt du 19 juillet 1608, Angoulevent triomi^ha sur toute la ligne et fut maintenu dans son titre de Prince des Sots et les droits v attachés. Tout en le déchargeant de son eutrre. sotte à Paris, jusallet intitulé Ballet de V amour de ce temps. Puis, on n'entend plus parler ni des uns ni des autres. ENCiACiEMEXT. — k L'engagement, di- sent MM. Vivien et Ed. l)lanc dans leur Traité de la législation des t/téâfres, est un acte par Ic- (juel le comédien s'engage à faire partie d'une entreprise de théâtre pendant un temps dé- terminé ; c'est un contrat synallagmîi tique, puisqu'il contient des obligations réciproques. Sous ce rapport, aux tenncs de l'art. 1325 du Code civil, il doit être fait double, et l'accom- plissement de cette formalité doit être men- tionné sur chacun des doubles ; à défaut de cette précaution, il serait nul, à moins qu'il n'ait déjà commencé à être exécuté, ou que chacune des i)arties n'eût entre les mains le moyen de contraindre l'autre à l'exécution du tmité : ainsi un engagement qui serait fait par coiTespondance semit valable, si des lettres pro- duites il résultait (pie le consentement a été donné de part et d'autre, et (]ue toutes les con- ditions du traité ont été valablement convenues et arrêtées. » En ce (pli concerne les théâtres de Paris, la moindre durée des engagements est génénilc- ment de trois ans ; il est rare qu'ils ne soient faits que pour une année ; parfois ils ont une durée de cinq ans et plus. En province, au contraire, rengagement n'a jamais (pie la du- rée d'une année th(''âtrale, (piehiuefois d'une seule saison. Ceci dit, nous allons reproduire ii!i la formule d'un engagement de provinc<î ; on y verra, par les conditions (juiy .sont faites au ('omédien, (pie si les traités de ce genre de- vaient être suivis à la lettre, nulle profession au monde ne serait au-dessous de celle de co- médien , nulle n'offrirait moins de sécurité, nulle ne serait traité'e avec moins de respect et de dignité. Heureusement, dans les cas de con- testation sérieuse, les tribunaux se chargent (le redresser ce que de tels traités peuvent offrir d'insolite. TIIÉATUE DE... Direction i>e ^I... Engagement de ^I... Appointements, par mois : Exercice 1882-188:5. Kntrc les tiousaUjnéa^ convenons ce qui suif , savoir : Moi, , je m'engage à consa- crer tous mes talents, et sans réserve d'aucun, à l'entreprise théâtrale dirigée par M... Je m'engage, en outre, à tenir en chef ou en partage l'emploi de forts jeunes ])remiers, jeunes premiers rôles. Déclarant être prêt aux r«Mes jw^r- tés sur mon répertoire signé, ne demandant que deux jours pour remettre les rôles manpiés d'ime croix, abandonnant à la direction le soin de dis- 332 ENGAGEMENT. tribiier, corame elle l'entendra, les pièces nouvel- les, sans égard aux noms et emplois des artistes créateurs de l'ouvrage. Consentant à y jouer un et même plusieurs rô- les, si besoin est. Je me fournirai tous les costumes exigés par mes rôles , sauf ceux réputés de magasin , desquels je me contenterai, quels qu'ils soient, sans y rien clianger, à moins d'autorisation spéciale. Me tenant obligé d'avoir les rôles de musique ou de poème appartenant à mon genre, et déclarant devoir restituer, à la fin de l'année théâtrale, ceux qu'il aurait plu à l'administration de me conlier pour liAter les études. Je me conformerai à tous les règlements de po- lice intérieure et locale, faits ou à faire, émanant de la direction ou des autorités: aux usages con- nus propres à établir l'ordre de l'administration et des spectacles ; à assister à toutes les réunions , ré- pétitions et leçons indiquées par le billet de service ou prescrites verbalement par le directeur ou ses avants droit. Je paraîtrai et chanterai les cliœurs dans les pièces de tout genre. A première réquisition , je jouerai les rôles portés sur mon réi)ertoire. J'ap- prendrai dans la comédie, le drame, le vaudeville ou féerie sur le pied de cinquante lignes de douze syllabes par jour, sans compter les répliques; dans les opéras ou opérettes, un acte en sept jours, deux actes en dix jours, trois actes en douze jours ' quatre ou cinc^ actes en «piinze joiu's. Je jouerai dans l'opérette les rôles convenables à mon physi(iue et à mes moyens, ce genre appar- tenant aussi bien aux artistes lyriques que drama- tiques. Je suivnii la troupe, en totalité ou en partie, pitrtout où il plaira à la direction de me conduire, sans exiger d'autre dédommagement que les frais de transport pour moi et mes bagages. Sous aucun prétexte, je n'introduirai personne dans les coulisses. Je ne pourrai réclamer aucune entrée dans la salle. Je jouerai et chanterai deux fois î>ar jour et dans deux endroits différents, si besoin est, et m'oblige à ne faire usage de mes talents que pour le service exclusif de la direction. Je ne m'absenterai jamais de la ville sans au- torisation. J'accepte pour mode de début les conditions im- posées i»ar l'autorité. En cas de non-réussite, je devrai mon service un mois entier. Je laisse à la direction le soin de me faire faire un quatrième début, si elle le juge nécessaire. Le directeur se réserve le droit de résilier, môme après débuts, le traité d'un artiste qui serait en- gagé pour un emploi qu'il n'aurait encore jamais tenu. Il en sera de même envers tout artiste qui , durant la saison, pourrait, par l'affaiblissement de ses moyens, compromettre le succès de l'exploita- tion. Le directeur se réserve le droit de remercier, à la fin du premier mois , tout artiste soumis ou non aux débuts. Tout artiste reconnaît devoir au moins quinze rôles de complaisance. Toute grossesse non déclarée , même dans le cas de légitimité, entraîne le droit de rupture de l'en- gagement , de même que maladies chroniques , in- conduite, incapacité notoire, injures ou sévices envers qui que ce soit dans l'intérieur du théâtre. Toute maladie doit être constatée par le méde- cin de l'administration. Le directeur retiendra à son gré les journées de maladie, et pourra rompre après huit jours de service interrompu. Toute in- terrui)tion de service, pour n'importe quel motif, du fait de l'artiste , entraîne de droit la suspension des appointements, même pour un seul jour. L'artiste se rendra tous les jours de représenta- tion, avant cinq heures, au théâtre, jouant ou ne jouant pas. Si le spectacle était changé, le régis- seur aura le droit de lui désigner la ]ûèce qu'il doit jouer. S'il s'absente, il doit faire savoir au régis- seur où il sera, sous peine de cent francs d'amende. L'artiste qui, sauf le cas de maladie constatée, ferait manquer une représentation afhcliée , paiera la totalité d'une représentation au maximum, sans préjudice de dommages-intérêts. Si l'artiste ne se trouvait pas rendu à son devoir aux heures indiquées par le billet de service, il se- rait passible des amendes suivantes : Jirpiddons. Pour iiu retard de cinq minutes )) fr. 25 c. — d'un quart d'heure ï) fr. M> c. — d'une demi-heure 1 fr. — d'une heure 2 fr. Pour une répétition entière , de deux à huit journées de solde , selon le cas , au profit du directeur. lîeprhentatKins. Pour un retard de ciuq minutes 1 fr. — d'un quart d'heure 3 fr. — d'une demi-heure h fr. Pour parler au puV)lic «*» fr. Pour avoir manciuê son entrée, de 1 à ô fr. , selon le cas. Pour avoir manqué de tigurer dan«î une représenta- tion, de 5 à 10 fr., selon le cas. Les amendes n'étant que dos moyens de répres- u EX SCKXEî » ^33 BÎon ordinaire, et no pouvant réparer réellement les torts que pourrait éprouver une entreprise théâ- trale, tout outrage i>ar jiaroles , voies de fait envers le directeur, les régisseurs ou toutes personnes at- tachées au théâtre, inconduite , immoralité, iviess<', refus de se conformer aux ordres de service ou au maintien de la décence et do la tranquillité, tant du foyer que dans les coulisses , loges , couloirs ou escaliers, entraînera, sans action judiciaire et ]>ar la seule volonté du directeur, hx rui»tnrc immédiate du présent engagement, avec restitution des avan- ces. Ces conditions acceptées et remplies. M... s'en- gage et s'oblige à pa\er à M... hi somme (K; cent cinquante francs par mf)is d'été, et deux cents francs par niuis d'hiver sauf le cas de force majeure, suppression d'autorisation, causes iH)liti'iues, con- currence, suppression de subvention, incendie dan.s la salle, calamité i»ublique, éj'idémie, inondations, émeute, sinistre, guerre civile, interdiction, se- maine sainte, etc., entin tous autres cas de ferme- ture indéijemîants de hi volonté du directeur; néan- moins, malgré cette fermeture et non(»l)stant cette suspension d'ai»pointements, l'artiste ne pourra re- fuser d'assister aux re]irtit ions qui sentnt indiquées. Si l'artiste était enqiéehé de jouer }>ar ordre de l'autorité, les appointements cesseraient et l'enga- gement serait annulé do plein droit. Le présent engag<.'ment commencera le 15 sep- tembre ]M>ur les a])pointements, car M... con- sent à être à la disposition du directeur du 1'"' au 5 .sei)tembre, i»(»ur n'qiéter, et j^mr (Jcu.r ou trots fois sans rétr'thut'mn , les apj>ointements ne courant (pie du 15 septembre i>our finir au «limancrhe de Lîi'tare, de la Passion ou des Rameaux, au choix du direiîteur. Le dernier mois se règle au jour le jour. En tenq>s utile, il sera fait à M... une avance •le la somme de cent francs, «jui lui sera retenue dans les quatre j^remiers mois de la eami'agne. Le directeur se réserve le droit de ne payer cha- que mois que dix jours après son échéance. L'artiste aura droit à son vovage de Paris à..., en troisième classe. 11 mettra ses bagages, «juinze jours au moins avant l'ouverture, à la petite vitesse , afin d'éviter tout retard. Le poids de ces bagages ne ]»ourra excéder 150 kilogrammes, le surplus res- tant à la charge de l'artiste. Après avoir j.ris connaissance des conditions ci- dessus, s'être déclaré (ou déclarée) libre de tout en- gagement antérieur, avoir certilié être majeur (ou majeure), ne pas être sous la déi»endanco d'un mari (ou n'agir qu'avec son autorisation écrite), l'artiste f>'engage à se conformer à toutes les clauses .'■ tipulées dans le présent acte, et à être rendu (ou rendue ) dix jours à l'avance pour commencer gratuitement lo .service des répétitions, sous peine d'une amende de cinquante francs par jour deretJird. Si ce retîird se prolongeait huit j«.>urs, il serait loisible au direc- teur de considérer cet engagement comme résilié, sous la réserve dos dommages-intérêts ci-après .sti- ])ulés. 11 sera donné, dans les trois jours qui suivront la clôture, une rejuvsentation au bénélice de la Cîtisse de l'Association tics artistes dramatiques. L'artiste devra son service gratuitement. Les i»arties contractantes se soumettent respec- tivement à l'exécution du ijrésent engagenu?nt ]»en- dant toute sa durée . sous peine d'un dédit de la somme de..., laquelle sera i)ayable en tous lieux, sous toutes juridictions, même en j>ays étrangers, vingt-quatre hein'os après la signature du pré- sent : passé lequel tenq»s, outre le dédit, tous dé- l»ens et dommages-intérêts seraient exigibles du l)remier cont revenant. Toutes les contestations qui pourraient survcnii seront portées devant le Tribunal de commerce, que les parties reconnaissent compétent. Le .service ne i^ourra être suspendu jusqu'après le juicement, et devra même être continué en cas d'aj)iiel. Les frais de timbre et d'enregistrement des pré- sents seront à la charge de celle des i»arties qui donnera lieu à l'accomplissement de cette forma- lité et à la iierception de ces droits. (.Quelque sévère que pui>se être le firésent enga- gement dans ses diverses clauses écrites ou impri- mées, l'artiste soussigné déclare les acce]»ter et les approuver, reconnaissant lui-même qu'il est in- dispensable de laisser entre lt?s mains du diret^teur les pouvoirs les plus étendus, seul moyeu do lui permettre d*a.ssurer le succès de son entrei»rise, auquel tous deux sont également intéressis. Fait en double et do bonne foi, à..., le... 1882. « EX SCÈXE : ). — ("est le cri (jiiefait en- tendre le régisseur an moment de commencer hi n'q>ctition, alin (ramener sur la scène les ar- tistes ivent y prendre ])art. Lorsqu'il s'a- git d'une pièce à grand spectacle, à personnel nombreux, et ({u'on procède à IVtude «runc scène dans laquelle tout ce personnel doit être réuni : acteurs, choristes, danscui's, compar- ses, etc., le régisseur pousse le cri sacramen- tel : En scène, fout le monde.' et le tliétUre est envahi aussitôt par cette foule higaiTce, dont le maniement diiticile est confie aux soins du metteur en .scène. 334 ENSEMBLE. — ENTR'ACTE. ENSEMBLE. — Au tliêûtre, on appelle ensemble une qualité précieuse, toute particu- lière, qui ne peut s'acquérir que par l'habitude qu'ont les mêmes comédiens d'être réunis , de jouer ensemble, de connaître intimement leur jeu, leura facultés personnelles, de fî\çon que l'exécution jcénérale se ressente de cette con- naissance et atteigne ce degré de fondu, de cohésion , d'iiomogénéité qui constitue comme une sorte de perfecticm relative de l'action scé- nique. Une jeune troupe, dont les éléments n'ont pas encore été groupc's, ([ui se présente pour la première fois devant le public, ne pourra, quelle que soit d'ailleurs la valeur des éléments qui la composent, posséder cet en- semble si désirable, et ne l'acquerra qu'à la longue, par le frottement incessant, par la fusion de ces éléments divers. — On appelle troupe (Tenseynhlê une comj)agnie d'artistes d'une valeur à peu près égale, dont les éléments sont soigneusement pondérés, dans lar|uelle on ne sacrifie pas sottement certaines parties se- condaires à la gl<.)riole de posséder un ou deux sujets hors ligne, et qui brille enfin, sinon par des qualités supérieures, du moins par une hannonie complète et par le juste é(iuili])re de toutes les i>arties entre elles. ENSEMBLE (Morceau b'). — Dans un opéra, diins une opérette, dans un vaudeville même, un morceau d'ensemble est un morceau à plusieiire voix, parfois renforcées pir le chœur. ENTR'ACTE. — C'est, ainsi que son nom l'indique, l'espace de temps qui s'écoule entre deux actes d'une pièce, et, par extension, entre deux pièces différentes. Quelle que fût la ri- gueur de l'ancienne loi des trois unités, il est évident que la limite extrême de \nngt-(iuatre heures, pendant la durée de laquelle devait s'é- couler l'action d'une pièce, devait laisser néan- moins dos vides forcés dans cette action , con- densée dans les cini] actes d'une tragédie ou d'une comédie (pii en durait deux à peine. De là la nécessité des entr'actes, pendant lesquels certains faits, souvent d'ailleui*s impossibles à présenter aux regards du public, sont censés se passer lioi-s de sa vue et hii sont explitiués ensuite. L'entr'acte est donc un repos de quelques minutes, pendant lequel la toile se baisse et vient cacher la scène aux yeux du spectateur. Cependant, à la Comédie- Française, dans les ouvrages du grand répertoire où l'unité de liea est rigoureusement observée, dans les tragédies de Corneille et de Racine, les comédies de Mo- lière et de Regnard, l'entr'acte n'est en quel- que sorte que fictif, le rideau ne se baisse pas, la scène se vide seulement, et la durée de l'en- tr'acte est d'une minute à peine. Il en est au- trement dans les ouvrages modernes, où la décoration change à chaque acte. Dans cer- tains théâtres, d'ailleurs, où la mise en scène est très compIi(iuée, l'entr'acte, qui est pour le spectateur un moment nécessaire de i*epo3 et de détente d'esprit, est au contraii^» une période de branle-bas et de remue-ménage indescriptible- den-ière le rideau, qui lui cache ce travail très particulier et très curieux. Les machinistes alors s'emparent de la scène, où pei'sonne autre n'a le droit de circuler: ils déplacent le décor de l'iu'te qui vient de finir, le remplacent par celui qui doit figurer à l'acte suivant, pendant qu'un garçon de théâtre aiTOse et balaie avec soin le plancher. Le chef machiniste commande la manœuvre, ses hommes l'exécutent, les toiles , les fermes, les fils, les herses, sont en mouve- ment, tandis que les acteui's (pii doivent chan- ger de costume remontent dans leur loge pour l^rocéiler promptement à ce travail, et que les autres vont dans le foyer prendre un instant de repos. Puis, loi*sque tout est prêt, que le décor est placé, que les artistes ont revêtu leur nou- veau costume, (juc le souffleur est rentré dans son trou, que les musiciens i)révenus sont de retour à l'orchestre , le régisseur, placé derrière le rideau, crie le sacramentel Place au théâtre! frappe majestueiLsement les trois coups, et domie ainsi le signal du commencement de l'acte nouveau. Il est assez singulier de voir ipi'autrefois les choses se passaient précisément tout au con- traire de ce qu'on les voit aujourd'hui. C'est à la Comédie-Française, où le décor ne changeait jamais pendant le cours d'une pièce, c^ue l'on faisait des entr'actes, tandis que l'Opéra, théâ- tre fameux par sa mise en scène, n'en connais- 1 sait iK)int, et (jue cha(iue acte se trouvait relié ENSEMBLE. — EXTR'ACTE. Ik, ENSEMISLF:. — Ail tlu'âtrc, oii uiipullc ensemble uiiu (lUJilîh' |invieusc, toute imrtit'ii- livrc, ijiii n<- [wiit s'iicfim-rir que jmi- l'Imliitiiiif (jii'uiit Il'h iiii''iiK'a l'oiiii'-tlk-iisdttrc ivniiis, dir joiiLT L'iii-ciiilili.', (11! i:f 111 liai ni? iiitiiiiL't lient leur jfll. k'Iira fllUllIU'-H lK.TSimiH.-llw, lit; fUi.MIl flUf l'cxi^iitiori fîi'iii'Tiilf se rcweiite ilo fi-tto iniii- naiiisiiiu.'O et uttuiîriic w diiîiv de finidii, ck- nihi'Hioii , d*li(iii|[ifri'tiiiUh'' ijui coiiiitJtiK.- (-(iiniiii.' nue surU- (II! ]HTffC'tin'iiiii-i\; foin df\"jiut k' imblic, iif )M)iirRi, i|tK-llu(juk' si di'siiiilik-, et iio riicjiierrj ijti'ù lu kni^u!, jKir lu frutti^mi-iit iiieessiiiit, jmr la fugidti de ces éléments divers. — Oii «lilielle Iroiijie tT fil se m blé une i-(imiw;riiie d'artistes d'une viilenrii ihjii iià'séspde, dont lusi'k'ineiits sont siit^'iieiisenu'ni puiidérês. as siittemeiit eeniiines parties se- oiindiiircs i\ la fri'inole deiawsinler un un deux sujets hors lifrue, et ijui liriilu etiliii, sinon ]iiir des qtiiilités supiTieuivs, du iiiciiiis jiiiv une haniionie «■oiii]ilète et jMir le juste énnililu'e de toiite.i les iMirties entre elles. EXSKMlîLK (Mmt.KAU i>"). — Dans nu «IxIt.U dans une i.i|iiTette, dans iiu vande\'illf même, un nnin-eau d'enseuilile est un umn-L'iLn à plnsieui-s voix, parfois renf-ireées [wir le i-lnenr. EXTK'A(.'TK. — (."est, ain^ii que son nom riuditjite, l'espaiv de tenijis qni s'éconk' entn' deux iirt'-s d'une pii-ce, et, |iiir exk-nsinn, cutiv deux pii-ces dirtVi'entes. ijnelle c|ue fut lu ri- piienr de l'auck-nnu loi des trois nnilt's, il est évident quo la limite exin'mo de vîjifrt-ijiiîitre lienivs, pendant la dnive de lat'ible deri'ièa' le rideau, qui lui cache ce travail très [larticnlier et [ivs curieux. Les machinistes alors npaivnt do la sci'ue, on iiersonnc autre n'a lirait de circuler: ils déplacent le décorde l'iicic qui vient de linir, le renqilaccut [wr celui qni doit li£;iM'er à l'acte suîvani. |K.'ndant qu'un on de tlii-àtiv arrose et Uilaie aveo soiu le plancher. Le chef machiniste eomniandc la maïut'iiTi-e, ses liouimes l'exéi'ntent. les toiles, les fermes, k-.s lils, les herses, sont en mom-c- nicnt . tandis cjiio les m-teurs qui doivent clian- ^'er de cfistume iviminterit dans leur kige pour liMiciMitT pr-imptement à ce ir.iviiil, et que les autiTs vont dans le fuyer prendre un insiantde rei>os. Puis, liii-sc|ne naît est ]in-t, f|uc le décor est place, (pie les artistes unt revêtu leur iiou- vi-iiii ccisiume, ijLie le sotiltleur est rentri^ dans son trou, que k-s iniisieieiis prévenus sont de retour à l'orchestri', le n^i'^^eur, placé derrière le rideau, l'rie le sacramentel l'iocf nu Ihèâlrei fnip]ie majestueusement les trois coups, et duiine ainsi le si>.'nal du eomnieiieenient de l'acie nouveau. Il est assez singulier di- \oii- qu'autR-fois 1« choses se ]iassjiicnt ]inrisi''tncnt tout au coii- tniiri- de ce qu'on k-s voit anjounrhiii. C'est ù la('omédie-Fr;invaise,oùk- dn-or ne elianfp'uil jamais pemlant le cours d'nne iiii'-ee, que l'on faisait des eiitr'acu-s, taudis que rt.)|H''i-a, théâ' tre fameux par su mise eu seém-, n'en connais- sait jK.int, et que chaque autese trouvait relî* 384 ENSEMBLE. — ENTR'ACTE. ENSEMBLE. — An thwUre, on appelle ensemble nne qualité précieuse , toute ]>articu- lière, qui ne peut s'acquérir que par Thabitude (|u'out les mêmes comédiens d'éti-e réunis, de jouer ensemble, de connaître intimement leur jeu, leurs facultés jK^rsonnelles , de fa(;on que l'exécution générale se ressente de cette con- nais-sance et atteigne ce degré de fondu, de cohésion , d'homogénéité qui constitue comme une sorte de jxîrfection i-elative de l'action scé- nique. Cne jeune trou})e, dont les élémentis n'ont pas encoi^j été grouix'S, (jui se prt^sente pour la première fuis devant le public, ne pourra, (pielle que soit d'ailleurs la valeur des éléments qui la composent, ix)sscM:ler cet en- semble si désirable, et ne l'acquerra qu'à la longue, par le frottement incessîint, par la fusion de ces éléments divers. — On aj^wlle troupe (T ensemble une compagnie d'artistes d'une valeur à peu prés égale, dont les éléments sont soigneusement pondérés, dîins huiuelle on ne sacrifie pas sottement certaines pjirties se- condaires à la gloriole de posséder un ou deux sujets hors ligne, et qui brille enfin, sinon par des qualités supérieures, du moins par une hannonie complète et par le juste éérette, dans un vaudeville même, un morceau d'ensemble esc un morceau à plusieurs voix, parfois renforcées par le chœur. ENTR'ACTE. — C'est, ainsi que son nom l'indiciue, l'espace de temps qui s'écoule entre deux actes d'une piw'e, et, i)ar extension, entre deux pièces différentes. Quelle que fût la ri- gueur de l'ancienne loi des trois unités, il est évident que la limite extrême de vingt-^iuatre heures, pendant la dur('*e de laquelle devait s'é- couler l'action d'une pièce, devait laisser néan- moins des vides forcés dans cette action, con- densiHî dans les cinq actes d'une tnigédie ou d'une conuHlie qui en durait deux à peine. De là la nécessité des entr'actes, iK*ndant les(|uels ccrtfiiiLS faits, souvent d'ailleui*s im^xissibles à présenter aux regards du public, sont censés se passer hors de sîx vue et lui sont explitjués ensuite. L'entr'acte est donc un repos de quelques minutes, pendant leipiel la toile se buisse et vient cacher la scène aux yeux du spectateur. Cependant, à la Comédie- Française, dans les ou\Tages du gr.md réi)eitoire où l'unité de lieu est rigoureusement ol)servée, dans les tragédies de Corneille et de Racine, les comédies de Mo- lière et de Regnard, l'entr'acte n'est en quel- ([ue sorte que fictif, le rideau ne se baisse pas, la scène se vide seulement, et la durée de l'en- tr'acte est d'une minute à peine. Il en est au- trement dans les ouvrages modernes, où la dcVonition change à clia<|ue acte. Dans cer- tains théâti-es, d'ailleurs, où la mise en scène est très compliquée, l'entr'acte, qui est pour le sixictateur un moment nécessaire de repos et de détente d'esprit, est au contraire uneixîriode de branle-bas et de renme-ménage indescriptible den-ière le rideau, qui lui cache ce travail très particulier et très curieux. Les machinistes alors s'emparent de la scène, où [Kji'sonne autre n'a le droit de circuler; ils déplacent le décor de l'îictc qui vient de finir, le renqJacent par celui qui doit figurer à l'acte suivant, ix'udant qu*uu garçon de théâtre arrose et Imlaie avec soin le plancher. Le chef machiniste commande la manccuvre, ses hommes l'exécutent, les toiles, les fermes, les fils, les herses, sont en mouve- ment, tandis ({ue les acteui*s qui doivent chan- ger de costume remontent dans leur loge pour prœéder promptement à ce tnivail, et que les autres vont dans le foyer prendre un instant de repos. Puis, lors(iue tout est prêt, que le décor est placé, (juc les artistes ont revêtu leur nou- veau costume, (jue le souffleur est rentré dans son trou, (]ue les musiciens prévenus sont de retour à l'orchestre, le régisseur, placé derrière le rideau, crie le sacramentel Place au théâtre! fi*ai»pe majestueusement les trois coups, et donne ainsi le signal du commenœment de l'acte nouveau. Il est assez singulier de voir tpi'autrefois les (•hoses se passaient ])récisément tout au con- tmire de ce qu'on les voit aujourd'hui. C'est à la Comédie-Française, où le décor ne changeait jamais i>endant le cours d'une pièce, que l'on faisait des entr'actes, tandis que l'Oi^ra, théâ- tre fameux par sa mise en scène, n'en connais- I Siiit {mut , et que chaque acte se trouvait relié '■/ 1 I 4 K I ENTRAIN. — ENTRECHAT. 337 au suivant par un divertissement dansé, le | rideau ne tombant pas une seule fois dans le cours de la soirée. On peut s'en assurer par ce passage d'un écrit du dix-huitième siècle : Vous sçavez que la tragédie est coupée et divisée en cinq actes : vous sçavez aussi que chacun de ces actes est séparé de celui qui doit le suivre par un intervalle de six ou sept minutes , pendant les- quelles , pour que nous n'ayïons i)as le tems de nous ennuyer, on nous joue des airs de violons. Or con- venez que nous sommes hien plus raisonnables à rOpéra. Ces vuides , ces intervalles , qui sont tout à fait contre la vraisemblance , n'y sont i)oint con- nus. Au moyen des divertissemens qui finissent chacun des actes , l'opéra marche , et marche sans interruption, ce qui rend son action sensible, con- tinue, beaucoup plus vraisemblable, et infiniment supérieure à celle de nos tragédies, qui à ne les re- garder que de ce côté-là, sont beaucoup moins par- faites : ce qui me réjouit beaucoup, parce que j'aime le singulier; et en effet il est plaisant qu'on trouve dans un genre qu'on traite de monstrueux , une per- fection qui înanque aux deux de nos genres de poé- sies qui ont réellement le plus de régularité et le plus de vraisemblance (1). Ce qu'il y a de plus siu^rulicr encore, et ce qu'on ne sait guère dans le public, c'est (]ue cette coutume de TOpéra, de ne jamais baisser le rideau pendant la durée d'un spectacle, s'est perpétuée pendant plus d'un siècle et demi, et presque jusqu'à nos jours. Ce n'est qu'en 1881 qu'elle a pris fin , le jour de la première repré- sentation du Philtre, ainsi que nous l'apprend Castil-Blaze : — (c A la fin du premier acte de l'opéra nouveau, le rideau s'abaisse et vient donner la faculté de changer les décors sans le secours des machines. Depuis le 11) mars 1G71 jusqu'au 13 octobre 1831, depuis IGO ans, le rideau, levé sur les derniers accords de l'ouver- ture, ne s'était abaissé qu'après le dénouement de l'opéra, du ballet. La scène était à découvert pendant toute la durée d'une pièce qui, le plus souvent, composait le spectacle en entier, et tous les changements de décor se faisaient à la vue du public. Gluck avait imposé silence à Torchestre pendant les entr 'actes, la nouvelle direction imagina de cacher à nos yeux les illu- (1) Bf'jlexions iur V Opéra, par Rreuve villageoise,, Grétry a écrit un entr'acte qui est un véritable bijou, et la gavotte que M. Ambroise Thomas a placée comme entr'acte dans sa partition de Mignon est absolument exqui'îe. EXÏRAIX. — Qualité précieuse pour un comédien, surtout pour celui qui remplit un emploi comique. De la vivacité dans le débit, de l'agilité dans la démarche, de la mobilité dans la physionomie, de l'animation dans le jeu, tout cela constitue cette qualité complexe, rare, charmante, qu'on appelle l'entniin, et que ceux qui la possèdent savent communiquer à ceux qui les entourent en les obligeant à se mettre à leur diapason. Arnal, ^I^''' Déjazet, étaient des comédiens pleins d'entniin, (lui mettaient, peut-on dire, le feu aux planches, et qui entraînaient toute une salle à leur suite dans un élan de gaieté folle et désordonnée. GeotFroy est l'un des acteurs de ce temps qui ont eu le plus d'entrain ; M. Coquelin met le feu aux poudres. ENTRECHAT. — Mouvement de danse léger et rai)ide dont Blasis donne ainsi la des- cription : L'entrechat est un pas léger brillant; pendant son exécution, les jambes du danseur se croisent rapidement , et retombent soit à la cinquième posi- tion, soit en attitude sur une jambe, comme dans l'entrechat à cinq , à neuf , la cabriole , les brisés et les ronds de jambes en l'air... Les entrechats com- mencent généralement par un assemblé, un coupé 22 838 ENTRÉE. — ENTRÉE DE BALLET. ou un jeté; lo corps s'élanyant alors en l'air, les jambes passent à la cinquième position pour ne croiser et se couper. Dans les entrechats, vous pouvez couper quatre, six, huit, dix, et même douze fois , si vous avez assez de force pour battre ces entrechats. Quelques danseurs passent des en- trechats à quatorze , mais il faut pour cela des ef- forts d'un effet désagréable, et qui ne produisent rien autre chose sur le spectateur que l'étonnement de la force extraordinaire des muscles d'un sauteur. Les entrechats les plus élégants sont à six , l'entre- chat à six ouvert fait par une ouverture au troi- sième coupé, et l'entrechat à huit. On dit battre, j^^fsser un entrechat. Celui (jui frotte l'entrechat n'est (ju'un danseur mé- diocre, qui ne sait ni le détailler ni lui donner le brillant et le fini nécessaires. ENTREE. — Action d'un personnage qui entre en scène, pour prendre part à Faction dramatique. La façon d'amener les entrées et les sorties des personnages dans une œuvre théîitrale, de les motiver, de les faire se pro- duire sans confusion, sans froideur, sans mala- dresse, n'est pas une des moindres ditticultés (jue rencontre l'écrivain (jui se voue à la scène : parfois les entrées font essentiellement partie de la trame dramati(jue, forment coup de théâ- tre et amènent, j)ar la surprise, des effets tout à fait saisissants. L'entrée du comte au premier acte du Mariage de Figaro, lorscjue Chérubin vient de se cacher sur le fauteuil, jette le spec- tateur dans la perplexité et établit une situa- tion dont celui-ci attend le dénouement avec une curiosité impatiente. Il y a nombre d'exem- ples de ce genre. On donne aussi le nom d'entrée à la salve d'applaudissements qui accueille un artiste aimé du public lorsqu'il fait en scène sa pre- mière entrée de la soirée. C'était là autrefois un témoignage très flatteur de l'affection que le public portait à l'acteur, et du plaisir qu'il éprouvait à le voir; par malheur, l'indigne usage de la claque a gâté tout cela , et celle-ci seule aujourd'hui fait les entrées , comme elle provocjuc les rappels, ce qui enlève aux unes comme aux autres à ixîu près toute leur valeur. Il est juste de dire, toutefois, que loi*squ'un comédien véritablement aimé du public se pré- sente en sc^^ne pour la première fois dans une soirée, celui-ci, sans vouloir mêler ses applau- dissements aux bravos salariés de la claque, sait lui manifester son plaisir par un murmure et un susuiTcment général dont le caractère est particulièrement flatteur. ENTRÉE (Manquer son). — Se dit du comédien distrait ou inattentif qui, n'ayant pas entendu sa réplique ou n'étant pas à son poste, n'entre pas au moment précis où il doit faire sur la scène son apparition. Ou comprend le mauvais effet produit par un oubli de ce genre, et l'embarras des acteurs qui sont en scène, attendant l'entrée de celui qui n'an*ive pas. On a vu cependant des comédiens très adroits, très ingénieux, avoir assez de sang-froid pour occuper utilement la scène en attendant l'ar- rivée du retardataire, et de telle façon que le public ne s'apercevait pas d'un accident qui est toujoui*s pour lui fort désjigréable et excite volontiei's sîi mauvaise humeur. ENTRÉE DES ARTISTES. — On com- prend que le personnel scéni(jue d'un théâtre ne puisse y pénétrer de la même façon que le public ; le service de la salle et celui de la scène étant naturellement, forcément et complète- ment séparés, les spectateurs se répandent dans la première par la grande entrée, tandis qu'une entrée particulière est réservée à tous œux qui ont affaire au théâtre proprement dit ou dans ses dépendances. C'est cette dernière qui reçoit le nom (Ventrée d^s artistes, expression impro- pre ou tout au moins inctjmplète, puisque cette entrée sert non seulement aux comédiens, aux artistes de la danse, de l'orchestre, des chœurs, mais aussi aux employés, aux machinistes, aux ouvriei"s, enfin à tout le personnel scénique. C'est donc entrée du personnel de la scène qu'il faudrait dire. ENTRÉE DE BALLET. — Expression dont l'usage est depuis longtemps perdu, et qu'on employait au dix-septième et au dix-hui- tième siècle. Compan la caractérise ainsi dans son Dictionnaire de danse (1787) : — « La di- vision ordinaire de toutes sortes de l)allets est en cinq actes. Chaque acte est composé de trois, six, neuf, et quehfuefois de douze entrées. On appelle entrée une ou plusieurs (piadrilles de ENTRÉES DE FAVEUR. 3$9 danseurs qui, par leurs pas, leurs ^t«B, letirs attitudes, rcprésentoient la partie de l'action géniinile dont ils étoient chargés. — Entrée se dit encore de l'air de symphonie par lequel débute un ballet. — ■ Enfin, entrée se dit encore " de l'opéra d'un acte entier, dans les opéras-bal- lets dont chaque acte forme un sujet sépaiT. comme l'entrée de Verhmne ef Pomone dans les Èlèmens, l'entrée des ZnaiJi dans Us Indes ENTREES DE FAVEUR. en/rées de faveur on simplement entrées la fa- culté accordée à certaine» iiersonnes, par l'ad- ministration de tel on tel théâtre, d'entrer à ce théâtre (juand il Icnr plaît et d'assister au spectacle sans iiayer. Un registre contenant les noms de toutes les jwrsonnes qui onf leurs en- trées est déposé au contrôle de chaque théâtre pour éviter toute erreur, et ces personnes n'ont (|u'à donner leur nom pour qu'on les laisse pénétrer dans la salle. Il va gans dire que les théâtres ne garantissent aucune place à cette catégorie de spectateurs, qui, s'il n'en est point de libres, doivent se cimtenter de se tenir debout dans un endroit quelconque de la salle oii ils puissent le faire sans gêne pour le public. Les entrées ne sont ^las toujours une faveur pour ceux qui en jouissent, et représentent même parfois pour eux une obligation. liCS critiques et les courriéristes de théâtre, par exemple, les médecins de ser^■ice, le capitaine de |>ompiers, sont dans ce cas. On ne saurait dire Tion plus que les auteurs r|ui ont leurs entrées profitent d'une Éiveur, Des entrées sont accordées aux actionnaires d'un théâtre, anx comédiens d'autres théâtres, ii des fournisseurs, enfin à des amis particuliers du directeur, et à chaque changement de direction le registre des entrées est revisé. Au dernier siècle, alors que les seuls théâtres existants dépendaient étroitement de la maison du roi, les entrées étaient sévèrement régle- inenttkis par l'autorité HU]K''rieure. On en aura hi prouve par ce frat;ment du règlement de la Co- médie-Française qui les concernait, règlement établi par les gentilshommes de la chambre : Pour remédier aux abus qui se sont introiiuitK an sujet des entrées gratuites, eu conséqucuce des ordres du Roi, nous avoDB arrêté l'état de celles 'jui doivent Mubsister. Défendons aux cornédieuB de laia- Rer entrer à la comédie sans pajer aucunes pereon- nes, soua queli|ue prétexte que ce soit, excepte cel- les comprises audit état, joint ou présent règlement. L'auteur de deux pièces en cinq actes, celui de trois pièces en trois actes ou de quatre pièces en ENTREES DE FAVEUR. nu acte , aura son entrée ea vie durant. L'autenr d'une pièce en cinq actes jouira de son entrée pen- dant trois ans; l'aTiteur d'une pièce en truis actes pendant deux ans, et celui d'onc en un acte pen- dant un an Eeulcment. Un auteur jouira de son entrée aussitôt que la pièce aura été reçue par les comédienB, Ordonnons anx comédiens de laisser jouir les auteurs des entrées dans toute la salle, eïceptû à l'oTchestre, secondes loges et parterre, ainsi qu'il est énoncé ci-dessus, à peine de vingt livras d'a- mende , applicable auï pauvres de la paroisse, con- tre celui ijui contrevi endroit au présent règlement, auquel il ne sera dérogé que dans le cas oii un au- teur seroit convaincu d'avoir troublé le spectacle par des cabales ou des critiques injurieuses , auquel cas déclarons qu'il sera privé de ses entrées, après la preuve des faits produite i^ar devant nous. Voici quel Était, en 1759, d'aprèe le règle- ment en question, l'état des personnes qui ft^'aicnt leurs entrées à la Comédie-FrançaÎBe : Uoiclic (]h Fnnçolfl Auleun qui oni Uurê entrées de ihoit Messieurs : De Crébillon. Do Saint-Foii De VolUire. De Marmontel De Marivaux. MauRer. De ClifiUaubnm. Bret. Gresset. De Cahuzac. Piron. De la Place. Auteur» doiil le droit n'eftjiai encore complètement acqni». Renoud. Le Mierrc. Rcroux. Colet. De la Touclie. Brunet. De Moissy. De Belloy. Culardeau. Poiusinet de Sivry. Bonchor. Boucbardon. Slodtz. Le Moine. Doyen. Cars. Codiin. A ces noms il faut ajouter ceu.x de tous les memlji-es de rAcadémie française, ù qui la Co- médie avait offert leurs entrées en 178^, ainsi que iiouH l'iipprend un clironiqneiu- cont«ni- porain : — « Le 3 niiirs 1732, les Comédiens du Roi se rendirent à, l'Académie fmnçoisc, et le sieur Quinaull-Dufresnc prononça un dis- cours servant d'invitation aux académicieus de ENTRKEK SOLENNELLES. Ul prendre leurs en trt^s » lu Ciiniédio-Françoise; l'offre diis Ciimédiciis fut ac<;e])tce, et depuis ce tems Messieurs les Aeadémicicus eu ont joui ; elles leur ont éU- continuées \mï les derniers règlemcns. ainsi qii'nux plus célèbres artistes. On peut dire que le théâtre de la nation est au- jfiurd'hui le rendez-vous (.■omniuii des sciences et des arts. » Au sujet d'une petite pièce intitulée lês Trois Gascons, rcpràentée ù lu Cmnédie-Françaisi; en 1701 et impriinré sous les noms de La Motte et de Boindin , on u rapporté cette anec- dote : ^ « On prétend que cette comédie est de La Motte seul. Il l'iivoit, dit-on, comi>oséc [wur tivoir sou entrée à la Comédie. Se trouvant indis]»o3é, il pria Boindin d'aller la présenter aux Coin(.yiens. Oeiix-ci y donuèrent de si grands applaudissemens que Boindin, séduit par les éliif,'es, lu laissa inscrire sous son nom et prufitii des entrées. La Motte voulut bien lui l>ai'donner cette 8U|icrclierie et comiiosa la Ma h'one itÉjihèse, tju'il donna sous son propr nom, et lui-même, n Dans les tlii-âtres de province, lorsiju'oi donne une représentation extraonlinaire, soi pour le bénéfice d'un artiste, soit pour tout autre cause, on a soin de mettre cette men- tion sur l'articlie : Abonnements et entrées de faveur généralemenf suspendus, ENTRÉES SOLENNELLES.— Il faut mpt 1 re i [ t. le j pulain. ■ 1 ]l po pc les j lu hes 1 }! f t u 1-s t -«1 11 1 r Pa 1 u ra les i 1 -s ! t t 1 nbiB. d im t 1 1 a tl 1 tt m[ des nHu au retour d'une eamjia^ie vicutrienst. On voyait alfirs rémjue et le cleiyé (It- Paris. l'univeTsicé. le [tarleiiieut, puis la f-liamlin: des comptes et la i;unr des aides, les fonfK-ries et les mr]»' de métiers, le prévôt des marchands . les ëelievins et le corps de ville, tona revêtus de costumes pleins de richesse, aller au-derant du souvcmin jusijue dans le fau- bourg, et former nn ti^rtège donc les moindres détails étaient rt-^'iis avec le soin le plus scru- puleux. Un chnmirjUL'ur dn di.v-septièmc siè- cle di'iinait à ce snjet les détails suivants : Le curps de ville . qui jouait Eurtout no grand rvle dans cctie conjoncture, se composait comme il suit : le colonel des arcliers de la ville, les gni- dous et le lientcnani . les troi» cents archers de la ville avec la cofaque Meue à galtrns d'argent, sur laiiutlle élaienl Imidées les anues de Paris ; — le I iiiaîire d'Ii^iel. l'iiuprinieur. le capiininc de l'artil- | lerie. le maître de marunneric et cliaqienterie, t(ius<]uutreen lialiiis noirs: — les liuissiera en ro- bes de drap mi-juirties. avei; la nef d'argent doré bur l'épaule : le greffier vi'-tii d'une robe nii-partie ù manches pendantes de velours rouge et tanné; le ^ prévit des miiTcliands. en riit>e de jialais ini-]>arlic de velours rouvre tt tanné [Kir-dessiiK , une eoutanc ; de satin ronce cramoi>i avec Iioutons. ceinture et cordon d'or, eollerettc eu [iiint d'Angleterre . to- que de veinure avec diainaiit d'une valeur de cinij cent iiuaranie luillc livre» tournois: les éclievin.s. le i procureur dn roi . en rolw: de velours roiij;e. le rc- i ceveur de la ville, le oiiseiller de ville, les rince. suivi de ses seiiineurs à cheval, s'uvaiiçaii sous un im- mense dais d'azur semé de lis d'or, et se rcn- BSTREMETS. Sis dait processionneUement à Xotrc-Damc, au son des cloches, au chant du Te Deiim, par- courant les rues jonchées de fleurs, entre les maisons tapissées d'étoffes précieuses et dont les fenêtres regorgeaient de curieux, précédé et BQivi d'une multitude broyante ([u'enivrait la vue de tant de uia^iificcnces et qui, jusque sous les pieds dos chcTaux , criait Noël! Noël! et faisait retentir l'air de ses acclamations. On cite, pamii les plus célèbres de ces entrées sou- veraines, celles de Louis XI, de la reine Isa- l)eau, de Charles VII (U37}, d'Anne de Bre- tagne (150i), de François I'''' (1515), de Louis XIV et de Marie-Thérèse (16C0), etc. ENTREMETS. — lîeaucliamps, daus ses Recherches sur les Ihéûlres de France, nous fait savoir ce t|u'on eritenilait, au moyen âge, par entremets .- Je dirai peo de clioBe des entremets : ces specta- cles consistoieiit en dansée et en reiiTésentations pendant les festins que les rois et Ioh princes se dounoient. Quelquefois on appelloit aussi de ce nom les macliines mises sur la table en manière de surtout. Entremise étoit l'action d'entremets... Un des plus magnifiques dont il soit fait mention est ce- lui que donna le duc de Bourgogne Philippe le Bon, le 18 février 1453, à Lille en Flandres, an duc de Clèves, son neveu. On trouve plusieurs particulari- 346 ENTRER EN RÉPÉTITIONS. — ÉQUILIBRISTES. tés sur cette espèce de spectacles dans Thistoire de Mathieu d'Escouchy, résidant à Perronne en Ver- mandois , dont il étoit originaire, et natif du Ques- noy-le-Comte , an comté de Hainault. ENTRER EN RÉPÉTITIONS. — Lors- (^u'unc pièce est mise à Tétude dans uii théâtre et qu'on s'occupe des premiers travaux qui lui sont relatifs, on dit ;quV elle entre en réi)éti- tions ». ÉPILOGUE. — C'était, chez les anciens, une partie du spectacle qui était en dehors de la pièce représentée et qui en formait comme une sorte de couronnement et de commentaire. ates d'un genre particulier, qui se présentent toujours au public au nombre de trois ou (juatre, et dont les exercices consistent à se tenir en équilibre les uns sur les autres dans les postures les plus étranges et les plus difficiles. Ce sont aussi les équilibristes qui se livrent à ce qu'on appelle l'exercice de la perche : l'un d'eux tient une longue perche, qu'il maintient en équilibre, tandis qu'un ou deux de ses compagnons, grim- pant à l'extrémité du kiton, se livrent là à des jeux d'une adresse , d'une souplesse et d'une EQUIPE. — ESCAMOTEUR. hardiesse surprenantes, sans ijne jamuis fai- MisBC ecl'.ii qui les titiit ainsi snspcndiiâ en l'air et dont le moindre mouvement pourrait leur être fatal. EQUIPE. — On !iH)elle (■■<|uipe IVnseml.le de tons les ouvriera miiuliinistes d'un théâtre, Icstiuels sont sous les onlres du maeiiiniste en chef. EQUIPER UX DEt'dR. - décor, mi truc, une uiachine, Ei|ui|K- eette macliiuo, ec truc, ce décor, et les mettre en état de inaiKtiivrur an sijfnal e KRATO. — I.'nne des neuf ^tluses, eclèlires ehez les lirees et les Romiiins, Clière aux :iuiants, elle (iivsidaît à la poésie lyri<|ue et luiacréontiqne , et de plus elle purtaf;eait avec Euterpe et Polyiunic l'enipin; de ia musique. Quelques-uns lui iittrilment Tinvcntion de la iyri-, comme à Meninv, celle de la flùte.cimnne à EucoriK'. enfin celle du chulinneau. Elle jin'- r I sidait aussi à la danse, niiiis mm exclusivement r.iinnu' sa srenr Terpsichinv ; c'i-it jm la Hjiuniit paifuis avec mie ji'iirî-iudi- île llom-s dans la main friiuche, ei, de liL drciin'. relevant avec frn'iee son vêtemeni de dessous, à la ma- niéiv des diinsi-uses. L(s lînniains, qui lui eim- sacraient le TLLois d'avril, lu n.-pn^' ruaient phu ;:éiiéndemem sous les iniits il'une nymiilie vivi et enjouée, tenant d'une main snii, la i^ninile, soit la petite lyre, et de l'auiR' le plectrum. qu'un tiisait aussi iuvnté piir elle, haus uiu |ieiuture d'IIercnlaninn, on la vuit vêtue d'uni tunii[ue rose et tenant le harhit'm à neuf cor- des. Dans Hca Lelirex à Emilie, Demimstiur pi-é- m ) sente Api'll'm luirtatrea iiir l'iiir ]ilaiiitit de lu m EWAMOTKUlî. — T/escamotcnr vulL'aire est un simple faiseur de toiii-s de ;;iiltclets. tels que nufîuére on eu vuyait sur les places publi- 848 E8TABLIES. qnes et qu'on en voîb encore dans lea baraqnes de saltim1»nqneB. Son nom vient, dit-on, d'une petite balle de Moge qu'on appelait jadis esRi- mofe, et avec laquelle leaescamotenrsambalanta jonaient d'une façon très habile, la faisant aux yenx du spectateur disparaître, chauger de place, réapparaître, la multipliant parfois prodigieu- sement, au grand ébahisscment des naïfs. On sait 'd'aillciu^ tous les tours d'adresse et de sub- tilité auxquels se livrent lea escamoteurs, et qui, bien que beaucoup aient été dévoilés, n'eu restent pas moins mystérieux pour la foule. (Voy. Prestidiritatei'r.) ESTABTJES. — Nos premiers théâtres, ceux qui étaient destinés à la représentation des mi- racles et des mystères, étaient construits en plein vent. Ce n'était d'abord que de simples et grossiers échafauds, figurant seulement la scène et destinés aux actcnrs, le public se tenant de- bout. Un [«u plus tard, ces conatmctions m- dimentnircs et toujours provisoires furent pour- tant niucliorées et agrandies, de façon que les spectateurs fussent plus à leur aise. Au nom d'écliafaud (Voy. ce mot), qu'elles a^ïiient tout naturellement reçu d'abord, on substitua celui d'establies, ainsi qu'on le voit daua le Mystère de { Incamalion êl Nalivilé (1477) : « Et cs- toient les establies assises en la partie septen- trionale du nenf marchié depuys l'hostel de la Hache couronnée jusqu'en l'hostel où pend l'enseigne de VAnge. » (ieorges Kastner dit à ce siijut : — « Ce nom à'establies était celui qu'on donnait aux différetttâ étages du théâtre, mais par synccdoche il signifiait le théâtre même. Ij'œu\Te en bois destiné à la représenta- tion des scènes contenait ordinairement plu- sieurs establies, c'est-à-dire qu'il était divise par compartiments. Comme on ne savait pas faire les changements à vue, on constmisait un certain nombre d'échafauds à câté les uns des autres, quand la pièce comportait uu grand dé- ploiement de mise en scène, une grande quan- tité de décorations. II y avait, [mr exemple, des mystères tellement longs qu'il fallait plusieurs jours pour les jouer. Dans un de ces mystères divisés en plusieurs journées, les Actes des Apôtres, le nombre des lieux distincts à repré- senter ne s'élevait pas à moins d'une centaine. Pour la représentation de la Passion, jouée à ÉTOILE. — ÊTEE EN VOIX. 349 Angers en 1480, on fut obligé d'établir (c cinq eschaffautz à plusieurs étages couverts d'ar- doises. » La scène proprement dite, c'était donc Veschaffaut, qu'on appelait aussi jeu ou parloir. L'endroit réservé pour le spectacle, et que devaient occuper les comédiens et le public, s'appelait le parc ou U parquet.., La partie la plus élevée des anciens éc:hafauds scéniques, les eatahlies supérieures, figuraient le Paradis, tandis que l'Enfer, représenté par une énorme gueule de dragon, était i)lacé au-dessous ou plutôt en dehoi-s de Yesfab/ie inférieure, y* ÉTOILE. — Expression relativement nou- velle, qui n'a guère cours (jue depuis une tren- taine d'années et par laquelle on désigne un artiste non pas toujours d'une valeur excep- tionnelle , mais qui a acquis sur le public une influence peu ordinaire. Depuis vingt ans, cer- tains théâtres de Paris ont sacrifié aux étoiles beaucoup plus (jue de raison, payant fort cher des comédiens parfois médiocres et dont les exi- srences de toutes sortes sont intolérables, les en- tourant fort mal parce que ceux-ci veulent tout le succès pour eux, ])our la même raison anni- hilant tous les rôles d'une pièce nouvelle pour ne laisser d'importance (pi'à celui de l'étoile, subissant enfin tous les caprices de celle-ci, justpi'au jour où le public, his de voir le même artiste jouer toujours le même rôle vt la même pièce sous un nom et sous un titre différent, s'éloigne enfin d'un théâtre si mal administré et en désapprenne complètement le chemin. En réîilité, toute étoile devient toujoui^s, à un mo- ment donné, la ruine matérielle et artistique d'une entreprise théâtrale. ÊTRE BLEU, ETRE MOUCHE, ÊTRE TOC. — Trois expressions d'argot théâtral (|ui n'en font qu'une, étant donnée leur synony- mie parfaite, et dont il est impossible de saisir l'origine et l'étymologie. Toutes trois signifient (|ue l'œuvre ou l'artiste auquel elles s appli- (juent est abominablement mauvais, ce La pièce nouvelle est bleue, y> dira-t-on de la première ; et de l'autre : Explique qui voudra ce langage al>8olument inexpressîf pour les pro- fanes, mais singulièrement caractéristique pour ceux qui l'emploient I ÊTRE DANS LA PEAU DU BOX- HOMME. — On dit d'un comédien qu il est m: dans la peau du bonhomme, » lorsrpi'il mon- tre tant de naturel, qu'il se pénètre à ce point de son rôle, qu'il s'identifie tellement avec le personnage représenté par lui , <]ue l'illusion produite est complète, et que l'acteur disparaît aux yeux du spectateur pour ne laisser à celui- ci que le sentiment de la réalité vivante qu'il est censé avoir devant les yeux. ÊTRE ÉGAYÉ. — Se dit d'une jnèce (lui a excité les murmures du public, d'un acteur qui a été quelque peu sifflé ou malmené par les spectateurs. Pourquoi ce terme iVéfjai/é pour caractériser un fait qui n'a rien de réjouissant ni pour l'acteur, ni pour la pièce ainsi traités?... L'argot théâtral a ses mystères. ÊTRE EMPOIGNÉ. — Voy. Empoigner LE IH'BLIC. ÊTRE EN SCÈNE. — L'une des quaUtés les plus précieuses d'un comédien digne de ce nom. Un acteur est en scène lorsque, absolu- ment i)énétré de l'importance de la tâche (]u'il est apijclé à remplir, tout entier à son art, in- sensi])le à toute distractiim extérieure, il parle, marche, agit, écoute, absolument comme s'il était en réalité le personnage qu'il représente. Pour lui il n'y a plus de théâtre, il n'y a plus de public; il n'y a (prune action, à laquelle il prend part, à laquelle il se trouve mêlé d'une façon intime, et dans laquelle tous ses efforts tendent à procurer au spectateur l'illusion la plus comi)lète et à lui donner le sentiment de la réalité. ÊTRE EN VOIX. — Lorscju'un chanteur est en possession de tous ses moyens, qu'on n'a à redouter de sa part aucune faiblesse, aucune défaillance, qu'il est en état de donner la me- sure complète de ses facultés, de déployer toute la puissance et la Ixîauté de son instrument, on dit qu'il est a en voix ». 3b0 ÊTRE RECONDUIT. — EXCURSIONS. ÊTRE RECONDUIT. — On dit d'nn ac- teur (ju'il est reconduit lorsqu'à la fin d'une scène où son action est importante, il parle, agit et gesticule avec tant de maladresse, d'une façon si évidemment fâcheuse, que sa sortie de scène excite les murmures des spectateurs et est ac- compagnée de ricanements et de marques ma- nifestes d'improbation. ÉTRENNER. — D'un acteur qui a été de la part du public l'objet de marques visibles d'impatience, d'une manifestation quelque peu hostile, qui a essuyé un coup de sifflet, on dit qu'iY a étrenni. — Mais comme, au théâtre aussi bien qu'ailleurs, les extrêmes se touchent, on dit aussi d'un comédien qu'*/ rî^a pas éirmné lorsque, chargé d'un rôle important et à effet, il n'a pas su pourtant se faire applaudir une seule fois et exciter l'approbation des specta- teurs. ÉTUDE (Pièce a l'). — On dit d'une pièce qu'elle est «c à l'étude, y> lorsque, la dis- tribution étant fiiite, les rôles étant attribués et remis à chacun, on a commencé les travaux relatifs aux répétitions, à la mise en scène, (jui doivent se poursuivTc sans discontinuer jus- qu'au jour de la première représentation. Le temps des études varie nécessairement selon l'importance de l'ouvrage mis en répétition ; il est évidemment plus court lorsqu'il s'agit d'un simple vaudeville en un acte que lorsqu'il est question d'une grande œuvre littéraire, ou d'une féerie à spectacle, ou d'un opéra, et, dans ces deux derniers cas surtout, il est souvent en- core prolongé par la nécessité de créer un ma- tériel scéniijue considérable, consistant en dé- cors, costumes, machines, etc. Ici, il arrive parfois que six mois ne sont pas trop pour mettre une pièce au point, et en état d'être présentée devant le public. ÉTUDIER. — Apprendre un rôle, et s'en graver toutes les parties successivement dans la mémoire. Étudier et travailler un rôle sont deux choses distinctes. Étudier, nous l'avons dit, n'est autre chose que la besogne presque machinale qui consiste à apprendre le texte, de façon à pouvoir le réciter sans hésitation ; travailler, c'est réfléchir ce rôle, se rendre compte de la manière de le jouer, en chercher les effets, en faire enfin un personnage dont l'acteur saisit le caractère, au point de vue de l'ensemble comme des détails, pour le présen- ter au public dans sa nature et dans sa vérité. EUTERPE. — La seconde des neuf Muses, filles de Jupiter et de Mnémosyne, que révé- raient les anciens. On lui attribuait l'invention de la flûte, instrument qui, chez les Grecs, te- nait le premier rang après la lyre. Comme Calliope, Euterpe était la muse des poètes lyri- ques, mais elle présidait surtout à la musique, ainsi que ses sœurs Érato et Polymnie. Les bas-reliefs antiques la représentent souriante, couronnée de fleurs, entourée d'instruments de musique, et tenant à la main une flûte double, parfois remplacée par des trompettes, ÉVOLUTIONS. — Dans les grands opéras, les drames à spectacle, les féeries, dans tous les ouvrages enfin à grand déploiement scénique et où un personnel très nombreux est appelé à prendre part à l'action , ce personnel doit sou- vent opérer des mouvements très importants, soit régulièrement, soit tumultueusement, soit ensemble, soit en sens di\\îrs. Ce sont ces mou- vements qui prennent le nom d'évolutions et qui , dans une mise en scène réglée avec habi- leté, produisent parfois des effets saisissants. EXCURSIONS. — Dans les grandes viUes de province , les théâtres jouent généralement cinq ou six fois par semaine, quelquefois tous les jours ; dans les Wlles moins importantes, on ne donne que trois représentations, les mardi, jeudi et dimanche; enfin, dans le plus grand nombre, on ne joue que le jeudi et le dimanche, dans quelques-unes même le dimanche seule- ment. Mais, pour ces dernières sm-tout, comme le produit d'un si petit nombre de specta- cles ne suffirait pas à couvrir les frais d'une entreprise théâtrale, on fait ce qu'on appelle des excursions : c'est-à-dire que, sans quitter la ville où elle est installée, la troupe s'en va chaque semaine donner une ou deux représen- tations dans quelque localité avoisinante ; on part dans la journée, on joue le soir, et l'on EXCUSES AU PUBLIC. 351 repaît apK'S le spectacle pour rentrer coucher chez soi. Ceci n'est plus l'exercice d'un art, mais celui d'un métier sin<(ulièreraent pénible et dépourvu de toute poésie. EXCUSES AU PUBLIC. - Tout n'était pas rose jadis dans le métier de comédien, et la vie de théâtre, si elle avait ses avantages, avait bien aussi ses inconvénients et ses ennuis, pour ne pas dire ses douleurs. Au dix-huitième siè- cle, l'acteur était en fjuel(|ue sorte la chose, l'es- clave du public, lc(\inA public avait ses caprices, ses boutades, ses fantaisies, ses cruautés, et ne se faisait nul souci de blesser, d'outrager, parfois d'humilier jusqu'aux artistes qui lui étaient le plus chers. Ce public était d'ailleurs très clia- touilleux, très susceptible, toujours poité à croire que le comédien voulait lui manquer de respect, et dans ce cas devenait impitoyable. Le parterre de nos théâtres était nerveux au delà de toute expression, injuste souvent dans des colères que rien ne légitimait, et toujoui-s prêt à user du sifflet avec ou sans apparence de raison. Les mœurs théâtrales différaient alors essentiellement de celles que nous voyons au- jourd'hui, et amenaient souvent les scènes les plus regrettables. Un acteur tardait-il un peu trop à faire son entrée, ou manquait-il de mé- moire en scène, ou sem])Iait-il n'être pas en possession de tous ses moyens ? vite, le sifflet faisait nige, ou il voyait pleuvoir sur lui toute une série d'interpellations plus ou moins con- grues. Parfois, l'acteur répondait (car, à cette époque, des colloques frét^uents s'établissaient entre la salle et la scène), et, si sa réponse dé- plaisait, les sifflets redoublaient, les clameui*s s'accentuaient; la patience échappait -elle à celui qui était l'objet de traitements si fâcheux ? laissait-il entendre à son tour un mot un peu malsonnant? ou bien une parole, un geste de sa part étaient-ils mal interprétés par les spec- tateurs? alors c'était des vociférations, des huées, des injures, un tapage infernal. ^?î pri- son! Au For-rUvêqtœ! s^écYVàit'On de toutes parts ; mais avant tout ou exigeait des excuses de la part de l'artiste qui avait manqué au pu- blic, ou qui était censé lui avoir manqué. En de telles circonstances , (pie pouvait faire le pau\Te comédien ? Quels (pie fussent sa fierté. et son honnêteté, et le sentiment qu'il pouvait avoir de sa dignité, il avait affaire à plus fort que lui, et généralement il lui fallait céder, car il n'y avait pas d'autre issue à la situation dans laquelle il se trouvait engagé. Il faut re- marquer en effet que cette situation n'était en rien modifiée par le fait, qui se produisait quel- quefois, de son envoi en prison sur l'ordre des gentilshommes de la chambre (Yoy. ce mot) : le public impitoyable ne manquait pas alors, quand il reparaissait à la scène après quelques joui-s de captivité, d'exiger de lui avant toute chose, avant (pi'il pût prononcer une parole, des excuses relatives à la conduite qu'on lui reprochait. Et notez qu'il ne s'agissait pas en ce cas de paroles })lus ou moins banales, mais d'excuses véritables, de regrets explicites qui devaient être exprimés à genoux, devant toute la salle assemblée. Quelques-uns s'en tiraient, et Siiuvaient leur fierté ns-à-vis d'eux-mêmes i)ar un trait d'es- prit audacieux, par un sous-entendu habile et hardi , dont la portée échappait à l'attention de leui*s auditeurs. A la vérité, ce n'était là (ju'unc satisfaction en quehiue sorte platonique et tout à fait personnelle, toute raison étant en apparence donnée au public ; mais n'est-ce pas déjà quelque chose en telle occuiTcnce ? L'un des plus jolis exemples de ce genre est celui qui fut donné par un artiste à (pii Ton repro- chait d'avoir traité les spectateurs d'imbéciles, et de qui l'on exigeait des excuses ; il les fît en cette phrase (xmrte, qui est un chef-d'œuvre de malice hardie, et dans laquelle, on peut le dire, le public ne vit (pie du feu : i( Messieurs, je vous ai appelés imbéciles; c'est vrai. Je vous fais mes excuses ; j'ai tort. » Un autre, — c'était Quinault-Dufresne, ar- tiste fameux pourtant et chéri du public, — eut maille à partir un jour avec lui , et agit de même façon. Voici comment l'ablx^ de Laportrit connaissance de cette affaire , or- 352 EXECUTANTS. — EXODE. donna que Dufresne feroit des excuses au public. Cet acteur souscrivit à regret à ce jugement, et, s^avançant sur le bord du théâtre, il commença ainsi sa harangue : « Messieurs, je n^ai jamais mieux senti la bassesse de mon état, que par la dé- marche que je fais aujourd'hui. > Ce début ctoit assurément très injurieux pour le public ; mais le parterre, plus occupé de la démarche dun acteur quMl adoroit qu'attentif à son discours , ne voulut pas qu'il continuât, dans la crainte de Thumilier davantage, et Dufresne eut la satisfaction de vexer ceux même qui cherchoicnt à l'abaisser. Ces habitudes de parterre tapageur persis- tèrent longtemps, et jusque dans le siècle pré- sent; témoin l'aventure qui, vers 1822, arriva au Gymnase à Pcrlct, lequel était pourtant, comme autrefois Quinault-Dufresne, Tidole du public. Il avait à chanter dans une pièce nou- velle, îe Comédien d'Élampes, un air anglais que les spectateurs avaient pris en goût ; voici (ju'un jour Perlet s'obstine, on ignore pour quelle raison, à ne pas vouloir clianter cet air. Le public se fâche, l'artiste continue de résis- ter, un tapage épouvantable s'ensuit, et, sur l'ordre de Tautorité, Perlet est conduit à Sainte- Pélagie pour y réfléchir sur les suites de son obstination. Trois jours après, il reparaît sur la scène ; aussitôt on réclame des excuses , et Per- let, s'avançant, déclare d'une voix émue, mais respectueuse, que son intention n'avait pas été de manquer au public. Mais cela ne satisfait pas les turbulents, des cris violents de : A ge- noux/ se font entendre de divers côtés, et, de- vant l'impassibilité de Perlet, l'orage devient tel que l'artiste s'évanouit. Revenu à lui, il s'avance de nouveau vers les spectateurs, et leur dit d'une voix ferme : ocsie de Voltaire ou de Shakespeare; la fureur de Talma, terrible comme celle des hci-os d'Homère ; la physiono- mie de W^'' Georges dans les Machahées et dans Sèmiramis, belle comme la Niobti antique; l'ingénuité de W^"" Mars, innixîente et maligne comme celle d'une fille de seize ans à son pre- mier amour ; le naturel de Michot, vrai comme la lK)nhomie d'un paysan suisse : voilà les modèles de l'expression théâtrale, voilà c« qu'il faut admirer, messieurs les amateurs ; voilà ce (ju'il faudrait imiter, messieurs les petits acteurs aux grandes prétentions. y> F FACE. — La scène d'un thcVitre a naturel- lement deux extrémités, un commencement et une fin. L'extrémité la plus proche du public, Tavant-scène , s'appelle, en termes de mise en scène, hiface. L'extrémité opposite, celle ([uiest représentée par le mur du fond, s'appelle le lointai?i. FAIRE DE L'AIK^EXT. — On dit d'une pièce qu'elle /a /7 de P argent (piand elle procure au théâtre (|ui la joue d'abondantes recettes, et que chaque soir elle remplit la salle. D'une pièce dont la carrière produit un résultat con- traire, on dit (prelle <(. ne fait pas le sou ». Il y a des théâtres qui font toujours de rar<^ent, d'autres qui n'en font jamais. FAIRE DE L'EFFET. — Sedit d'un acteur, ou d'une pièce, on d'un fraauvre directeur, dont la salle ne peut s'atrran- dir à volonté et (pii est toujours condamné à faire des mécontents. » FAIRE DE LA TOILE. — Locution qu'on employait autrefois, et qu'un (<*rivain d'il y a soixante ans expliquait ainsi : — «^ Faire de la toile, s'embrouiller, ne savoir ce qu'on dit. Les acteui*8 doués de l'esprit d'imj)rovisation font de la toile fine ^ en paraphrasant une pensée et en donnant ainsi au soutHeur le temps de se remettre en bonne route. L'acteur qui reste court et qui ne peut trouver dans son esprit aucun secoui's contre sa mémoire, fait du cane- vas. » On comprend encore la si lignification as- sez expressive de ces mots : faire de la toile, dans le cas dont il est question ; on s'explitpie moins la valeur de ceux-ci : battre le job, (]ui 356 FAIRE ÉVACUER LA SALLE. — FANTASMAGORIE. leur servaient de synonymes et qui étaient em- ployés dans la même circonstance. Quoi qu'il en soit, les deux expressions sont aujourd'hui hors d'usage. FAIRE ÉVACUER LA SALLE. — Ceci est un droit qui n'appartient qu'à la police et dont elle n'use, on le comprend, qu'en cas de troubles graves se produisant dans un théâtre, et seulement à la dernière extrémité. On a mi certains ouvrages à allures politiques exciter de telles colères parmi les spectateurs, provoquer entre ceux-ci des scènes si violentes, parfois si sanglantes, que la police ne pouvait se dispen- ser d'inter\'enir, et que le seul moyen pour elle de rétablir Tordre était de faire évacuer la salle. D'autres fois, en province surtout, les spectacles consacrés aux débuts d'ime troupe nouvelle étaient aussi le signal de conflits et de désordres ^ns nom, de rixes brutales, auxc^iels on ne pouvait mettre fin que par l'évacuation de la salle. Dernièrement encore, à Lille ou à Rou- baix, la représentation d'un ancien drame de Monvel, les Victimes cloîtrées, donna lieu à des scènes si scandaleuses qu'on dut avoir recoure à ce moyen énergi(iue. FAIT HISTORIQUE. — A l'époque de la Révolution, aloi*s que de graves événements politiques ou militaires surgissaient chaque jour, les nombreux théâtres qui existaient à Paris s'emparaient rapidement de chaque fait qui se produisait ainsi et le transportaient à la scène sous forme de pièces de circonstance. On prit l'habitude de donner à ces productions éphémères la qualification de « fait histori- que », et ce fut, pendant quelques années, un véritable déluge de pièces de ce genre, dont quelques titres pris au hasard feront compren- dre la nature et la portée. On eut ainsi, au théâtre Molière, le Suisse de Ghâteaumeux (1791), à TAmbigu, la Journée de Varennes, h Gémral Custine à Spire (1791), au Palais- Variétés, la Mort de Beaurepaire (1791), au théâtre Feydeau, le Siège de Lille (1702), au théâtre Favart, Le Pelletier Saint-Fargeau (1793), etc., etc. FANFARE (La). — C'est le nom que l'on I donne à l'une des fractions distinctes de l'or- chestre, celle qui comprend tous les instruments de cuivre, tandis que l'ensemble des instru- ments à cordes prend le nom de quatuor, que celui des instruments à vent en bois s'appelle Vhurmonie, et qu'on donne le nom de batterie^ à la réunion des instruments de percussion. FANTASMAGORIE. — La fantasmagorie est un spectacle très curieux, qui consiste à faire apparaître aux yeux des assistants, placés dans une salle très obscure, des spectres et des figures en quelque sorte lumineux, qui sont rendus visibles, et dans certaines conditions particulières, à l'aide des illusions de l'optique. Les moyens employés et les effets produits , en matière de fantasmagorie, ont été ainsi exposés jmr un écrivain : Les principes qui constituent la fantasmagorie sont aussi ceux sur lesquels repose la lanterne ma- gique. Les objets sont éclairés et amplifiés par les m^'mes verres, ajustés de la même façon; seule- ment , dans la fantasmagorie , on a modifié le but des diverses parties de la machine , afin de produire un effet saisissant. Chacun sait que dans la repré- sentation des images par la lanterne magique le spectateur se trouve placé entre celle-ci et la toile qui les reçoit ; dans la fantasmagorie , la toile est tendue entre le spectateur et l'instrument. Voici comment les choses se passent dans une séance fantasmagorique. Le spectateur, plongé dans Tobs- curité la plus profonde, voit briller d'abord dans yn très grand éloignement un point presque imper- cej>tible, qui, s'agrandissant peu à peu à mesure qu'il avance , finit par se peindre aux yeux comme un fantôme lumineux. Ce fantôme continue d* ap- procher lentement, puis tout à coup se précipite sur le spectateur et rentre immédiatement dans les ténèbres d'où il est sorti : l'illusion produite est complète , et l'on comprend sans peine que dans des temps d'ignorance une pareille puissance d'évoca- tion devait passer pour le résultat de quelque pacte infernal. Ces effets d'une apparence si extraordi- naire sont pourtant très faciles à obtenir. Une lan- terne magique ordinaire est disposée de manière à pouvoir s'éloigner ou se rapprocher du tableau de taffetas gomme ou de toile cirée unie sur lequel vient se peindre l'image du fantôme. Derrière cette toile est placée la lumière. Les verres de la lan- terne magique sont disposés de telle sorte que, sui- vant que l'opérateur avance ou recule sans bruit PANTASilAfîORIE. 357 son appareil, le<|ucl repose evt dea roiilctten gar- nies de drnp, les objetG rcpréscotés xe montrent plus petits ou plus grands. Les apparitions produites ]iar la fiintiisma- gorîc sont de diverses sortes : les mios, d'abord très petites et semblant comme un point lumi- neux dans l'éloigiiemcnt, grandissent et se nip- l>roelient progressivement jusqu'au moment oii le spectateur les croit sur lui, et s'évanouis- sent alors subitement; d'autres se montrent tout à coup au milieu de rassemblée, puis s'é- loignent et semblent parccjiirir toutes les par- ties de I» sct'iie ; enfin, d'autres encore ont une grandeur fixe, mais sont douira de mouvement et paraissent animées, de façon quel(|uefoi8 à produire des effets étranges. C'est dans cette dernière catégorie qu'il faut ranger l'apparition traditionnelle, et d'un effet eomiqne certain, d'un cuisinier portant sur un plat une énonue tÊte de veau qui, à un moment donné, vient se placer biusquement sur ses épaules tandis (|ue lu tête même du cuisinier va s'ébattre sur le plateau. Ce double mouvement s'oiière avec une rapidité telle, et le spectacle en est si sin- gulier, que la surprise se manifeste imnianqua- 858 FANTOCCINI. — FARCES. bleineiit par un éclat de rire général. Ou assure que c'est un escamoteur fameux, Philippe Le- dni, connu sous le surnom de Cornue, qui, vers la fin du dix-huitième siècle, introduisit le pre- mier à Paris, dans ses séances de physique amusante, les effets si curieux de la fantasma- gorie. FANTOCCINI, — Xom italien des marion- nettes (Voy. ce mot). Toutefois, les ^/flpnfomVîi sont des marionnettes perfectionnées, supé- rieurs aux hurattini et aux pupazzi, en ce sens quMls ne sont pas mis en mouvement seulement par la main de l'opérateur, mais qu'ils obéis- sent à des fils, à des ressorts , et que par des moyens mécaniques on les fait marcher, sauter, danser, et exécuter enfin d'une façon surpre- nante tous les mouvements du coq)S humain. FARCES. — La farce fleurit en France du quatorzième au seizième siècle, au temps des mystères, des soties et des moralités. C'était un genre de petites pièces courtes, d'un comi- que l>as, tri\ial, burlesciue et la plupart du temps très licencieux, qui cherchaient surtout à exciter le gros rire de la foule, sans s'inquié- ter de savoir si elles offensaient le goût des esprits délicats. La farce tirait son nom, dit- on, d'un genre de poésie très usité au moyen âge et (]ui prit naisstmce vei*3 le dixième ou onzième siècle; cette poésie, écrite alternative- ment en latin et en langue à'oc ou en langue d'ail, était appelée /«ma oufarcita, parc« i\UQ le texte latin était comme farci de termes wû- gaires ajoutés après coup. La farce est la mère de notre comédie, mère aux allures mi peu libres, il en faut convenir, mais pleine de cette gaieté gauloise qui est un produit naturel de noti*e sol et à qui RaMais, Montaigne, la Fontaine et Molière ont donné sa plus haute expression littéraire. Lorsque le peuple, à Paris comme eu province, commença à se montrer un |xîu las de la sévérité des mys- tères et des miracles, et peut-être surtout de la longueur de leur représentation, les dei^cs de la Basoche et les Enfants-sans-Souci songèrent à faire concurrence aux Confrères de la Passion en remplaçant les drames trop édifiants de ceux-ci par des farces et des soties, qui, outre qu'elles n'exigeaient point la pompe scéni- que des mystères, ne réclamaient qu'un petit nombre d'acteurs doués d'mi bon sentiment comique. Ce nouveau théâtre facétieux , dit M. Paul La- croix, 8^ ouvrit d'abord en plein air, sur les champs de foire, dans les halles, au milieu des carrefours de la ville. Deux ou trois bateleurs, montés sur des tréteaux , affublés d'oripeaux , le visage noirci ou enfariné , dialoguaient avec une verve graveleuse quelques scènes de mœurs populaires, qui avaient pour sujet presque invariablement l'amour et le mariage. Ces canevas, peu décents par eux-mo- mes, prêtaient mer\'e il leusement à des improvisa- tions plus indécentes encore. Plus tard , aux impro- visations succédèrent des pièces écrites en vers ou plutôt en lignes rimées, qui n'empêchaient pas l'acteur d'improviser encore et qui donnaient de la marge à sa pantomime licencieuse. Il n'en fallut pas davantage pour enlever aux Confrères de la Passion la plupart de leurs spectateurs et pour ren- dre leurs représentations moins productives. Ce fut en vain que les Confrères de la Passion essayèrent dé faire concurrence à leurs redoutables rivaux , soit en intercalant dans les mystères cer- tains épisodes burlesques, certains personnages bouffons, qui apportaient quelque diversion à la gra- vité du sujet , soit en créant sous le nom de mora- lités un nouveau genre de pièces dialoguées , dont l'allégorie satirique et morale faisait à peu près ton» les frais ; ce fut en vain : les joueurs de farces étaient toujours mieux accueillis que la troupe de l'hôpital de la Trinité, et le public qu'ils divertis- saient prit parti pour eux quand ils furent persécu- tés par la prévôté de Paris , qui voulut s'opposer à l'installation permanente de leur théâtre. Il était trop tard désormais pour supprimer un genre de spectacle qui allait si bien à Tesprit français : on ne put que lui prescrire des bornes et le subordon- ner, pour ainsi dire , au privilège accordé par Char- les VI aux Confrères de la Passion. En conséquence, les Confrères signèrent avec les Enfants-sans-Souci un traité d'alliance , par lequel ces derniers devaient exploiter, de concert avec eux et sur la même scène, les trois genres dramatiques qui se i>arta- geaient le domaine encore restreint de Tart théâ- tral. Il fut convenu entre les deux troupes rivales qu'elles se mettraient en valeur l'une par l'autre, et qu'elles joueraient à tour de rôle la iiioraUfé, la farce et le mystère^ pour varier leurs représenta- tions. Le mystèiv était religieux ; la moralité était FARCEURS. 359 grave et allégorique; la sotie avait un l)ut satirique ; la farce fut essentiellement burles- que. Les titres de quelfiues-unes de celles qui nous sont restées (sur des milliers qui ont été jouées, sinon écrites), l'indiquent suffisam- ment : la Farce des hommes qui font saler leurs femmes^ à cause quelles sont trop douces; la Farce des Bossais ; la Farce joyeuse et récréa- tive d'une femme qui demande des arrérages à son mari. Je m'arrête ici, car la plupart de ces titres en disent plus loui? qu'il ne faudrait et indiquent trop crûment le caractcTc licencieux du genre ; il en est pourtiint qui n'ont jx)int de signification extérieure, et qui ne laissent pas prévoir la nature de rœu\Te : tels sont ceux de la Farce du Retraict (l'une des plus salées, pourtant) ; lu Farce de Pernet qui va au vin; la Farce du Munyer de qui le diable emporte Vâme en enfer; la Farce du pot au laict; la Farce nouvelle deft cinq sens de P homme; lu Farce de frère Ouillelert, etc., etc. Les farces du quinzième et du seizième siècle, dit encore M. Paul Lacroix , qui furent le berceau de la vraie comédie , contribuèrent néanmoins au relâchement des mœurs, malgi'é l'esprit, la gaieté et la malice qu'on y trouve presque toujours et qui les recommandent encore à Tétude des curieux; la plupart ne furent jamais imprimées ; pres'pie tou- tes ont été perdues et anéanties : on ne les connaî- trait plus que par ouï-dire, si deux pubiicîitions récentes no nous en avaient pas remis au jour en- viron cent cinquante, qui ont échappé ainsi à une destruction systématique, a On ne syauroit dire, écrivait Antoine du Verdier, sieur de Vauprivas, dans sa Bibliothèque franroise , imprimée à Lyon en 1584, on ne sçauroit dire les farces qui ont été composées et imprimées , si grand en est le nombre ; car, au passé, chascuu se mesloit d'en faire, et encore les histrions, dits Enf ants-sans-Soucy , en jouent et récitent. Or n'est la farce qu'un acte de comédie, et la plus courte est estimée la meilleure, atin d'éviter l'ennuy qu'une prolexité et longueur apporteroit aux spectateurs. » Du Verdier ajoute que, selon VArt de rhétorique de Gratian du Pont, il faut que la farce ou sotie ne i)asse pas cinq cents vers. Outre la farce proprement dite, il y avait aussi des dialogues joyeux à deux personnages , des monologues et des sermons joyeux, que récitait un seul comédien. De cette multitude de farces qui ont été représentées et imprimées souvent, dix ou douze seulement avaient été sauvées; car les ec- clésiastiques et les personnes dévotes étaient par- venus à faire disjiaraître tous les exemplaires de ces compositions libres ou obscènes : on ne s'expli- que pas autrement pourquoi tant de farces impri- mées, tant d'éditions successives ont disparu, sans laisser de traces. De toutes ces farces, i>ourtant , il en est une qui surgit, puissante et magistrale, merveilleuse en son unité comique et scénique, et qui est le chef-d'œu^TC de notre théâtre primitif : c'est celle de Maistre Pierre Pathelin, qui suffirait à la gloire de celui qui l'a écrite, et dont cepen- dant depuis plus d'un siècle on a recherché Tauteur sans le pouvoir découvrir avec certi- tude. Cette farce, véritablement épique et typi- que, est-elle Tœuvre de Fmnçois Villon, ou de Pierre Blanchet, ou d'Antoine de La Sale, à qui on l'a successivemeut attribuée, ou de quel- que autre encore ? Jusqu'ici on en est réduit aux conjectures sur ce sujet, et il est vraisem- blable que le jour ne se fera jamais sur une (picstion pourtant si intéressiinte. Quoi qu'il en soit, on ne saurait oublier, dès (pi'on fait con- naissance avec tous ces personnages devenus légendaires, ni maître Pathelin et sa femme Ouillemettc, ni le drapier (xuillaume Joceaume, ni le berger Thibault Aignelet, ni le juge lui- même, et la farce française n'eût-elle produit cjue cet admirable chef-d'œuvre, ce modèle de vrai comique, qu'elle serait digne de Tétude à laquelle elle a donné lieu depuis tant d'années. Molière avait parmi ses livres la farce de Jfais- tre Pathelin, et le plus bel éloge (pi'on puisse faire de celle-ci, (;'est de supposer, avec vrai- Rcmblance, (lu'elle a pu Tinspirer plus d'une fois pour ses farces immortelles. FARCEURS. — ( -'est ainsi qu'on appelait ceux qui jouaient des farces, soit, à l'origine, sur les places publicjues et dans les carrefours , soit, i)lus tard, à l'Hôtel de Bourgcjgnc, où la farce, on le sait, était en gi-and honiuMir. Ici, les farceurs avaient nom Jodelet, Cîros-Ciuillaume, Turlupin, Gauthier-(îarguille, Ouillot-(îorju , etc. On donna ce nom aussi aux j)remiers co- médiens itîiliens (pii vinrent en France, Scara- mouche. Arlequin, le Docteur, Pantalon , Tri- velin, Mezzetin... Molière lui-nicnic, quoicpi'il fût un grand comédien, fut pendant longtemps 360 FARD. - FÉERIE. qualifié de farceur, et il figure à ce titre avec tous ceux que je viens de nommer, sur un ta- bleau très (îurieux appartenant à la Comédie- Française et qui porte cette inscription : Far- ceurs françois et italiens, depuis soixante ans. Peint en 1671. FARD. — Se dit du mélange de blanc et de rouge (jue le comédien doit appliquer sur son visage, afin que la crudité de la lumière artifi- cielle ne le fasse pas paraître livide et blême, comme cela aurait lieu Sîins cette précaution. (Voy. Faire sa FifrURK.) FARSA (Farce). — C'est le nom que les Italiens donnent à de petites pochades musicti- les, de petits ojjéras bouffes en un acte, qui n'ont pas plus d'imix)rtance que les petites opérettes à proportions mignonnes que l'on jouait na- guère aux Bouffes- Parisiens. Pourtant de grands musiciens, à l'occasion, ont écrit des bleuettcs de ce genre, et l'on connaît àa^ farse signées des noms illustres de Paisiello et de Cimarosa. Vn^farsa de Rossini est restée célèbre : c'est celle qui est intitulée Bruschino, o il Figlio i^er azzardo. Jadis, ces petits ouvrages se jouaient dans l'entr'acte d'un opéra sérieux, et le prési- dent de Brosses, dans ses curieuses Lettres sur ritaîiê, niconte en avoir entendu une ainsi à Bologne : — «... Il y a, dit-il, un lM)uffon et une bouffonne qui jouent une farce dans les entr 'actes, d'un naturel et d'ime expression comique qui ne se peuvent ni payer, ni imagi- ner. Il n'est pas vrai qu'on puisse mourir de rire, car à coup sûr j'en serois mort, malgré la douleur que je ressentois de ce que l'épanouis- sement de ma rate m'empeclioit de sentir, au- tant que je l'aurois voulu, la musique céleste de cette farce. Elle est de Pergolèse. » FAUTEUIL. — Le fauteuil, dans les théii- tres, est d'invention assez récente, et son usage ne remonte guère à plus d'une trentaine d'an- nées. Auparavant, les bmquettes étaient sim- plement divisées en stalles, comme le sont celles de nos omnibus. On est incomparablement mieiLX assis et plus à son aise dans les fauteuils d'aujourd'hui, mais il n'est pas inutile d'ajou- ter qu'en revanche les places sont incompara- blement plus chères. Il n'y a' de fauteuils qu'à l'orchestre et au balcon ou à l'amphithéâtre des premières. FÉERIE. — La féerie est une pièce à grand spectacle, dont l'action repose toujours sur un sujet fantastique ou surnaturel, et dont l'élé- ment merveilleux fait surtout les frais. Grâce à cet élément, qui lui i)ermet de ne compter ni avec la logique des faits ni avec celle des idées, elle se meut tout à son aise et à sa fantaisie, dans un monde et dîins un milieu convention- nels, sans j>rendre souci de la vraisemblance, et n'ayant d'autre objectif que de s'entourer de tout le prestige, de toute l'illusion, de toute la puissance que peuvent lui ]>réter le luxe de la mise en scène, la splendeur du décor, la richesse du costume, les grâces de la danse, le cliarme de la musique, en un mot tout ve que le dé- ploiement scénique le i)lus fastueux, le plus étrange, le plus varié ixiut réunir pour sur- prendre, éblouir et enchanter le spectateur. La féerie serait assurément un spectacle ado- rable, si elle était aux mains d'un vrai poète, se laissant entraîner librement au Ciiprice de son imagination, et capable tout à la fois de char- mer l'esprit de ses auditeui-s et d'émerveiller leurs yeux. Par malheur, il arrive que l'on compte trop sur la IxMiuté du spectîicle maté- riel, et que celui-ci ne fait trop souvent que servir de passeport aux iiiepties les plus gros- sières et aux fables les j)lus ridicules, racontées daiLs une langue (.|ue désavouerait le dernier des cuistres littéraires. jMalgré tout, le public court toujours en foule à toutes les féeries qu'on lui sert, parce (ju'il adore ce spectacle ATaiment magique que les progrès de la mise en scène savent rendre chaque jour plus séduisiint, et qui n'a que le tort de laisser trop étouffer le principal sous les splendeurs d'un accessoire éblouissîint. Nous n'en sommes plus, i)ar mal- heur, au temps où Shakespeare écrivait la Tem» pète et le Songe d'une nuit d'été, et, sous ce rap- port, il faut bien se contenter des rapsodies qui ont cours. Le genre de la féerie n'est pas d'une exploi- tation aussi ri'cente qu'on serait porté à le sup- poser, et, en ce qui concerne la France, ce n'est pas, comme on Ta dit parfois, sur les théâtres I. (TMilc lu i'u]Jt«Il< FEERIE. 363 de notrc ancien boulevard du Temple qu'il a pris naissance. Il y a tantôt deux siècles et demi que le public parisien a commencé à don- ner des preuves de sa gi'andc sympathie pour les pièces de ce genre , et l'ancien théâtre du Marais se rendit fameux, dès le milieu du dix- septième siècle, par le luxe et la magnificence qu'il déployait dans ses grandes (c pièces à ma- chines, )) qui n'étaient autre chose que des fée- ries, — mais des féeries où la place occupée aujourd'hui par des fées et des enchantcui*s était tenue par les dieux de TOlympe. Avant môme que PieiTe Corneille eût fait représenter Andromède et la Toison d'or, qui sont de sim- ples féeries, l'abbé Boyer avait, dès 1048, donné au Marais sa grande tragédie k à nuichines » in- titulée Ulysse dans Vile de Circè ; c'est au même théâtre qu'il donna encore les Amours de Jupi- ter et de Sémélé^ et que de Visé fit jouer succes- sivement diverses pièces du même genre , les Amours de Vén us et d A donis ( 1 (*> 7 0) , les Amours du Soleil (1671), le Mariage de Bacchus (1672). Enfin la Psyché de Corneille et Molière, repré- sentée en 1670, peut certainement passer pour une féerie, et il en faut dire autant de tous les opéras de Quinault et Lully, qui constituaient des féeries extrêmement compliquées, entre autres Persèe, Phaéton^ BeUèrophon et Pro- serpiîie. De sorte que quand, daiLS les dernières années du siècle dernier, le gentil petit théâtre des Jeunes- Artistes offrit à son \)uhUc Arlequin dans un œuf, les 24 Heures dWrlequin^ (juand, un peu plus tard, la Gaîté faisait courir tout Paris avec son fameux Pied de mouton , Tun et l'autre ne faisaient que renouer une tradition seulement interrompue. C'est ce légendaire Pied de mouton, du reste, qui raviva le goût inépuisable des Parisiens pour la féerie, et qui, il faut le dire aussi, servit par la suite de type presque invariable pour la construction de ce genre de pièces. Voici ce qu'un écrivain théâtral, Saint-Agnan Choler, en disait, en parlant de la féerie au point de vue génénd : Le Pied de mouton eut un nombre immense de représentations, et, en termes de journal, lit courir tout Paris. Dans cette pièce , un des personnages recevait d'une fée ou d'un génie un talisman à l'aide duquel il opérait une foule de merveilles, i\\\\ fournissaient au machiniste un thème fécond et au public une suite d'étonnements sans cesse renou- velés. Ce succès amena nécessairement les imita- tions, et dès lors le cadre des féeries fut irrévoca- blement fixé. Dans toutes les féeries possibles , les personnages sont protégés par des puissances supé- rieures, bonnes ou mauvaises, dont les influences se balancent, se combattent, se vainquent tour à tour, et qui arment leurs favoris de talismans plus ou moins efficaces. Au reste, l'invention était loin d'être nouvelle, et on la retrouve dans les arlequi- nades , où la possession de Colombine est toujours assurée à Arlequin par sa batte, don d'une fée bienfaisante, qui le défend contre les maléfices des mauvais génies. On comprend facilement com- bien cet antagonisme entre deux influences surna- turelles peut amener d'effets variés et d'étranges complications. Cependant, la tâche de l'auteur qiii dispose de si fécondes ressources n'est pas aussi facile qu'elle le paraît au premier coup d'œil. En eftet il est soumis , comme le librettiste, au compo- siteur, au contrôle du décorateur et du machiniste : et les possibilités du merveilleux théâtral, les opé- rations de l'escamotage à l'aide duquel s'exécutent les changements à vue, les transformations, etc., étant après tout assez bornées, il lui faut mainte- nir son imagination dans de certaines limites, et subordonner les fantaisies de l'invention aux né- cessités positives de l'exécution. Du fond même de ce genre, essentiellement ca- pricieux, et d'ailleurs peu porté aux prétentions littéraires, il résulte que toutes les libertés, toutes les licences même, lui sont permises, et qu'il ne re- connaît, en fait de limites et de règles, que celles dont nous venons de parler. Selon la volonté de l'auteur, il touche indifféremment au comique et au tragique : il chante avec le vaudeville, il se ré- pand avec la farce en gros rires et en plaisanteries dévergondées, il pousse avec le drame quelques cris de douleur et suspend aux yeux du spectateur une larme que sèche bientôt la variété, la mobilité qui est son essence. Aussi est-il impossible d'abor- der, même en vagues paroles , cette poétique aux larges horizons. Tout ce qu'on peut dire de la féerie, c'est qu'elle doit être nécessairement surprenante, amusante si elle peut, intéressante si elle veut. Pour ajouter l'exemple au précepte , citons comme modèle du genre la célèbre féerie jouée au Cirque Olympique sous le titre de les Pilules du Diable. Les IHlules du Diable ont en effet détrôné le Pied de mouton dans Taffeetion des Parisiens, et dei)uis quarante ans qu'elle a i)aru pour la i)re- mière fois, cette féerie véritablement amusante 364 FERME. — FESTIVAL. a obtenu un nombre prodigieux de représenta- tions, qui se chiffre aujourd'hui par près de quinze cents. Cependant, il faut dire que depuis un demi-siècle un grand nombre de féeries ont été représentées, qui presque toutes ont trouvé de grands succès. Parmi les meilleures, on doit signaler la Biche au bais, les Sept Châteaux du diable, le Petit Homme roit^e, les Quatre Elé- ments, les Contes de la mère l'oie, puis les Sept Merveilles du monde, le Chat botté, la Citât te blanche, les Bibelots du Diable, les Mille et une nuits, Rothomago, Riquet à lu hovi>pe, Cen- driïlon. Peau dIAne, etc., et<;. La représentation d'une féerie exigeant un théâtre vaste et i^articulièrement machiné, ce genre de pièces ne se joue que sur un petit nombre de scènes, où les changements à vue, les trucs, les travestissements, les apothéoses, puissent se produire avec facilité. En première ligne, parmi ces théâtres, se trouve le Châtelet, qui a été construit et aménagé spécialement à cet effet, comme étant le successeur direct de l'ancien Cirque-Olympique du boulevard du Temple ; viennent ensuite la Porte-Saint-Mar- tin et la Gaîté, qui, l'une et l'autre, sont aussi très bien machinées et de façon à jouer les piè- ces à plus grand spectacle possil^le. Quant aux autres théâtres, ce n'est (jue par exception qu'on voit parfois l'un d'entre eux se livrer à un essai plus ou moins timide dans un domaine qui n'est pas le leur et qui ne saurait leur ap- partenir sérieusement. FERME. — Ternie de machinerie théâtrale. Une ferme est une partie de décoration montée sur châssis, qui se tient droite sur la scène et qui monte toujoui*s des dessous, en passant par les trappillons. Tout fragment de décor qui se tient debout et qui n'est ni rideau ni châssis de coulisses, est une ferme. Le fond d'un décor fermé est toujours une ferme ; ferme aussi la maison- nette qui tient le milieu de la scène dans un décor de paysage, et l'arbre qui est auprès, et le buisson (jui se trouve au côté opposé ; ferme en- core, dans une place publique, la fontaine qui s'élève à t^l ou tel plan , et la statue placée sur son piédestal, et la cohmne qu'on voit dans le lointain. 11 y a des fennes très développées et très compliquées, qui comportent des ouver- tures nombreuses, telles que portes, fenêtres, etc.; on comprend la précision qu'il faut ap- porter dans l'ajustement de c«s décors pour que leur manœuATe se fasse aisément et qu'ils puis- sent, sans accident, surgir du dessous par les ouvertures étroites qui leur livrent passage. Parfois, dans un changement à vue, un grand nombre de ces fermes s'engouffrent à la fois dans le plancher, tandis que d'autres, en nom- bre aussi considérable, apparaissent pour for- mer ou compléter le nouveau décor. Tl faut, on le conçoit, que ce double travail soit préparé et combiné avec le plus grand soin, afin que la manœuvre puisse se faire rapidement, sûre- ment et sans hésitation. FERMETURE. — En matière de théâtre, fermeture et clôture ne sont point synonymes, comme on poun'ait le croire. La clôture est gé- néralement momentanée : un théâtre fait sa clôture, pour une raison quelconque, mais en indiquant qu'il fera sa réouverture à une épo- que déterminée. Le mot fenneture implique au contraire avec lui quelque chose sinon de défi- nitif, du moins d'indéfini. Si un directeur fait de mauvaises affaires et ne peut soutenir son exploitation, il fait la fermeture de son théâ- tre; si un scandale violent, des désordres pu- blics se produisent dans un établissement de ce genre, et constituent un danger, l'autorité peut ordonner sa fermeture ; des troubles civils ou politiques, une insurrection, une guerre, un siège, amènent naturellement la fermeture des théîltres. Comme on le voit, fermeture et clô- ture sont deux choses distinctes. FESTIVAL. — Ce nom s'applique à de grandes fêtes musicales consacrées surtout à l'exécution d'oeuvres dans lesquelles l'élément choral tient une place préi)ondérante, telles qu'oratorios, cantates, etc., et loraque cette exécution comprend un nombre très considéra- ble de participants. Il faut bien le dire, la France est fort arriérée sous ce nipixjrt , et ne connaît guère que les festivals orphéoniques, qui ne tiennent à l'art véritable que par un fil singulièrement ténu. C'est surtout chez les peu- ples de race germanique, flamande et anglo- saxonne, où la culture musicale est très gêné- FÊTE DES FOLS. — FEU. raie et trèa a^'ancée que les fest vais out pr s tout leur développement et do i ent lieu parfo tisse parfois le chiffre des ap- pointements. FEU (ATOiK DU). — FEU D'ARTIFICE. S6S Voici l'originD et l'étymologîe du mot, f|ui remoate jnstc k deux siècles. Le 28 septembre 1682, les acteurs de la Comédie- Franc aise dé- cidèrent que chacun d'eux rece^Tait cinq sois pour le bois à chauffer sa loge , c'est-à-dire pour le /eu, et deux sois six deniers pour la chan- delle nécessaire à l'éclairer. On n'avait droit à ce feu que lorsfjue le froid commençait, et il va sans dire qu'on ne le recevait que lorsqu'on jouait. Le 20 septembre 170l), le feu fut porté à vingt boIh, et en 17(>0 il était fixé à deux livres. De la Comédie- Française, le feu passa plus tard à d'autres théâtres; puis il devint, comme nous l'avons vu, comme une aorte de haute paie attribuée à certains comédiens pour empêcher leurs plaintes et échauffer leur zèle. Il est sûr que le comédien qui touche des feux ne trouve jamais qu'il joue trop souvent. FEU (Avoir itu)- — Pour un comédien, avoir du fcn est presque synonjine d'avoir de la chaleur (Voy. ce mot); et cei^ndant, il y a une nuance, et ce qu'on appelle le feu est plus en dehors, plus accusé que la chaleur pro- prement dite, qui peut parfois 6tre un peu con- centrtK et se faire jour sans éclat et sans ^-ché- FEU D'ARTIFICE. — On sait ce que c'est <|nc ce genre de spectacle, accompagnement obligé de toutes les gmndes fêtes publiques ou twrticn Hères. Importé en France dans le cours du dix-septième siècle, il devint tK-s jwpulaire àpartirdudix-hnitième, et fut porte à son plus haut [joint de splendeur par des artificiers qui étaient de véritables altistes, Torré d'abord, puis la dynastie nombrense des Ruggieri, qui n'est pas encore éteinte. A l'époque de la Ré- volution et sous le premier Em])ire, dans les grands i4«blissement3 de plaisir où la foule s'as- semblait librement et en plein air, tels que l'an- cien Colisée, les jardins Marbeuf, de Tivoli, du Vauxhall, l'Elysée Rcaujon, les feux d'artifice faisaient tout naturellement jtartic des diver- tissements offerts aux spectateurs, qui se pres- saient pour admirer les merveilles des Ruggieri, FEU (LE) AU THEATRE. depuis longtemps paseés inaitres en ce genre. Mais on peut s'étonner que les théâtres, en- droits clos et eouverta, aient trouvé le moyen d'offrir, sans danger, ce spectacle à leur clientèle habitueUe. C'est pourtant ce qui se faisait cons- tamment, il y tk un peu plus d'un siècle, à la Coniédie-Itaiienne. En parlant de la mort d'an acteur chéri du public de ce théâtre, Jean-An- toine Romagueai (1742), un chroniijueur du temps s'exprimait ainsi : — n II emporta les 367 regrets du public, et sa mort fut une époque de la décadence du Théâtre-Italien, qui ne revint en faveur que lorsqu'il donna ses feux d'arti- tice, dont l'invention ramena le public toujonra avide de la nouveauté, u Le même écrivain nous apprend qu'à la première.-, représenta- tion d'un de ces feux d'artifice, intitulé les Métamorphoses (1746), « on vit tomber dîf- férens couplets, sur plusieurs airs de vaudevil- les connus, qui pai'toient de l'ouverture ovale du cintre, au-dessus du piirteiTe. Ccr couplets ctoient imprimés sur de petits carrés do pa- pier Bëpurés; ila faisoîent allusion aux feux d'artifice en général, et avoient été composés par Messieurs Panai-d et Gidlet, auxquels on eut l'obligation de cette idée ingt'iiieuse. j> L'un de ces couplets était ainsi conçu : Le SI R (le l'n) L'engage à vous remercier; Orfices à l'extrômo indulgence Dont vous Iionure/. ëcs travaux, Messieurs, nous n'avons point en 1 TirL' notre pouJre aux moineaux. La vogue de ce di\'ertissenient à la Comédie- Italienne se prolongea pendant une dizaine d'années. Les feux d'artifice qui furent ainsi livrés au public s'appelaient h Tableau, le Ber- ceau, Atlas, h Temple d^ Apollon, la Pyramide, la Giiiiiyuetk, la Terrasse, le Parterre, le Bou- quet, etc. Il en était d'eux comme des pièces nouvelles, et les exf'cutions s'en renouvelaient iiutimt de fois que le public y trouvait de plaisir. FEU (Le) au THEATRE. — Des désas- tres effi'oyables , qui se renouTCllent périodi- quement et qui souvent coûtent la vie à des 8G8 FEU (LE) AU THÉÂTRE. centaines dMndmdus , ramènent à chaque ins- tant l'attention publique sur cette question si pleine de dangers et de périls : — Le feu au théâtre ! — question qui se représente aved une fréquence si douloureuse et si fatale. Fatale en eflfet, les théâtres, par leur nature, semblant destinés dèa leur naissance à périr par le feu. De fait, les sinistres de ce genre sont innom- brables : et s'ils n'ont pas tous, au pomt de vue de la vie humaine, des conséquences aussi épou- vantables que ceux qui atteignirent, en 1881, le Théâtre-Italien de Nice et le Ring-theater de Vienne, on peut dire qu'il n'y a pas d'années où l'on n'en ait plusieurs à enregistrer. Dans ces derniers vingt ans, on compte cinquante théâtres au moins dont la destruction, presque toujours totale, s'est opérée par le feu. Qui ne se rappelle l'émotion dont Paris fut saisi, dans la nuit du 2({ octobre 1873, à la nouvelle de l'incendie de l'Opéra. Mais c'est merveille, dans une ville semblable, (jui compte quarante théâtres et un nombre illimité de spectacles et de cafés-concerts, que pareil fait y soit rare. La catastrophe de l'Opéra, (jui n'a coûté la \ie qu'à un héroïque caporal de pom- piers, n'a guère causé d'autres accidents de personnes. Il n'en est malheureusement pas tou- jours de même. En 1809, lora de l'incendie du théâtre de Cologne, que le feu avait détruit déjà dix ans auparavant, on compta neuf morts et un bien plus grand nombre de blessés. En 1876, lorsqu'un incendie se déclan\ à l'Opéra de Cincinnati, pendant une représentation donnée en faveur des élèves pauvres des écoles publiques, une panique épouvantable se pro- duisit : les pauvres enfants qui assistaient en grand nombre au spectacle, n'ayant point la force de se défendre, furent foulés aux pieds par la foule affolée, et pour la plupart écrasés ou étouffés. Beaucoup y perdirent la vie, et bien plus encore furent gravement blessés. Un désastre terrible encore dans ses consé- quences fut l'incendie du théâtre des Arts, à Rouen, en 1870. Ce théâtre, qui venait d'at- teindre sa cent-unième année, puisqu'il avait été inauguré en 177G, fut attaiiué par le feu le soir, vei-s sept heures, peu d'instants avant que l'on dût commencer la représentation d'iZam- let. Il faut avoir connu ce théâtre, ses couloirs étroits, ses dégagements impossibles, sou état de délabrement et de vétusté, pour se rendre compte de ce qui pouvait s'y produire en un pareil moment. Fort heureusement encore peu de personnes étaient entrées dans la salle, lorsqu'une frise, enflammée par un jet de gaz, communiqua le feu aux décors, aux portants, puis bientôt à la scène entière et à tout le bâ- timent. Les musiciens étaient à l'orchestre, tout le personnel était sur pied, les machinistes en scène, les artistes dans leurs loges, ainsi que les figurants, parmi lesquels se trouvaient trente-cinq soldats de la garnison. On se fait une idée de l'émotion de tout ce monde, à qui le feu, se propageant avec une rapidité inouïe, coupait de tous côtés la retraite. 11 y eut là des scènes déchirantes : des malheureux suffoqués et asphyxiés par la fumée ; d'autres qui tombè- rent dans l'horrible fournaise ; d'autres qui, se précipitant par les fenêtres du quatrième ou du cinquième étage, se blessèrent mortellement, en dépit des matelas qu'on apportait de toutes parts et qu'on étendait sur le pavé ; d'autres encore, — détail épouvantable ! — qui, essayant d'ouvrir des fenêti-es, laissaient, sans y pouvoir réussir, des lambeaux de la chair de leurs .mains aux ferrures rougies par le feu, et furent brûlés sur place. Ce sinistre coûta la vie à plus de vingt personnes, et il y eut trois fois plus de blessés. Parfois, gi-âce au ciel î on n'a déploré que des pertes matérielles énormes, comme dans l'incendie fameux du théâtre de la Reine, à Londres, en 1867. Là, comme presque toujours d'ailleurs, on ne put rien sauver. L'admirable bibliothèque musicale du théâtre, tous les ins- truments de l'orchestre, un grand orgue superbe, qui n'avait point coûté moins de 1,000 li\Tes sterling, une quantité de décors magnifiques, des milliers de costumes, tout fut la proie des flammes , sans compter la garde-robe particu- lière des artistes : M. Stanley, miss Clara Kel- logg, M"*^ Titjens, et jusqu'aux diamants de cette dernière, qui représentaient, dit-on, une valeur de 50,000 fmncs. Si l'on veut une liste à peu près complète des tliéâtres que le feu a dévorés depuis une vingtaine d'années, la voici : En 1801 , le 20 février, le théâtre Niwvo, de FEU (LE) AU THEATRE. 369 Xaples, est entièrement détruit. Au mois d'a- vril, c'est le tour des Nouveautés, de Bruxelles, où le feu prend après la représentation des Bibelots du Diable, et du Lycée de Barcelone, envahi par les flammes un quart d'heure avant le moment de commencer le spectacle, et d'oîi l'on voit les artistes se sauver à demi vêtus, quel- ques-uns en chemise. Au mois de juin, à Lon- dres, c'est l'immense salle de concerts du Royal Surrey Garden, élevée en 1855 par les soins du fameux chef d'orchestre mulâtre Jullien, l'an- cien rival de ^lusard, (jui est dévorée par un incendie. En 1802, le V octobre, le théâtre de Xamur, alors en reconstruction , est frappé par la fou- dre, de façon cju'il n'en reste que les murs. Celui-là jouait de malheur. Il avait été brûlé deux ans auparavant, en 18(î(), et il le fut de nouveau complètement en janvier 18(>7. En 18(>5, à Londres, le théâtre Surrey, érigé en 1782, incendié en 1805, reconstruit en 180G, brûle pour la set^onde fois. Dans le cours de la même amiée, on signale la destruction du théâtre d'An^^^ers, du Théâtre Roval d'Edim- bourg, et du théâtre du Parc, à Stockholm. Au mois de mars 186(5, à la suite d'une ré- . pétition du Bossu et du Postillon de Lonju- ineau, (|u'on devait jouer le soir, le théâtre de Brest devient la i)roie des flammes. Peu de jours après, une explosion de gaz qui se produit au théâtre d'()i)éra de Cincinnati, quehjues instants après le spectacle , amène sa destruction et celle de plusieurs maisons avoisinantes ; les pertes sont évaluées à deux millions de dollars. Le 22 mai, un des théâtres les plus vastes du monde, l'Académie de musique de Xew-York, qui pouvait contenir 5,000 spectateur, dis- paraît à son tour. Bientôt c'est le théâtre de Bowery, de la même ville, qui est détruit par le feu ; puis celui de la Xouvelle-Orléans ; puis enfin le (irand-Théâtre de Constantinople, qui n'avait pas coûté moins de six millions. En 1808, il faut mentionner les incendies de rOxford !Music-IIall, de Londres, du Théâtre- Social, de Trévise, et du thi'îâtre Alberto Nota, de Turin. 18(î9 est pres(iue aussi fécond en désastres que 1866. Après le théîitre de Cologne, dont il a été parlé plus haut, on déplore la perte du DICTIONNAIIIE DU THÉÂTRE. théâtre royal de Dresde, qui avait coûté un milhon de thalers. Le feu prend pendant que le maître de ballets faisait faire une répétition à son personnel dans la salle de danse, située près des combles ; les danseuses et leur chef ont toutes les peines du monde à s'enfuir, dans leurs costumes légers. Le 30 septembre, à onze heures du soir, notre Hippodrome, construit en 1855, est attaqué par le feu de façon qu'il n'en reste rien. En octobre et en novembre, il en est de même du théâtre Sainte-lsalxille, à Pernambuco, et de la sîille Rochester, à Xew- York. En 1870, il faut enregistrer les sinistres qui détruisent le théâtre de Brùnn (Moravie), le théâtre Alexandria, de Glascow, et celui de Luchon. Quant au superbe théâtre Naum, de Constantinople, il partage le sort de tout un quartier de Péra, qui est réduit en cendres. Il en est de même, en 1871, du théâtre de Darms- tadt et du AVall's Opéra House, de AVashing- ton, et en 1872 du théâtre Xiblo, à New- York ; de celui du Prince-of-AVales, à Sydney, et de TEthiopian Opéra House, à Philadelphie. Pour l'année 187'5, dont la fertilité funèbre veut être particulièrement signalée, on ne compte pas moins de neuf sinistres de ce genre : le 15 janvier, c'est le théâtre d'Odessa; le '1?>^ le Théâtre-National, de Washington ; avant la fin du même mois, le théâtre de la cinquième avenue, à New- York; le 25 mai, le théâtre royal de La Valette, à Malte, où le feu prend pendant la répétition d'un nouvel o^xn^a, la y erg in e del Castillo; le 25 juin, l'AIcazar de Mai-seille : le î) novembre, le théâtre de Holiday Street, à Baltimore, le second (pii avait été construit en Amérique et dont l'inauguration s'était faite, en 1782, en présence de Washing- ton et de La Fayette: le 12 septembre, le théâtre de Ford, compris dans l'incendie de tout un quartier de Baltimore ; le 20 octobre, rOpérn de Paris; enfin le théâtre du Globe, à Boston, qui brûle, ainsi que les gmndes fabri- ques de pianos des maisons Cliickering et Brockett, avec toute une portion de la ville. En 1874, à Chicago, le théâtre Adelphi brûle dans les mêmes conditions ; puis on signale la destruction du Grand-Théâtre de Kasan, et celle du théâtre d'opéra italien de Tiflis. En 24 870 FEU (LE) AU THEATRE. 1875, c'est le tour dn théâtre de Saint-Brienc ; du théâtre Belleconr, à Lyon ; de celui de Leeds (Écosee) ; dé celui de Barmcu ; enfin, du Théâ- tre Royal d'Edimbourg, qui est anéanti pour la troieième fois ea Tîngt-deux ans. En 1876, on constate la perte de l'Opéra de Cincinnati et dn tbé&tre des Arts, à Rouen. Enfin, au mois de février 1878, Chicago est de nouvean fhkppé par la destmction de son Académie de musique. et l'on se rappelle l'horrible désastre qui s^cst produit à Nice en 18H1 , désastre dont les con- séquences funestes ont été dépassées encore par celles de la catastrophe du Ring-theater, de Vienne. Cette liste n'a pas la prétention d'être abso- lument complète ; maÏB on voit, par son étendue, combien de dangers le thaîtro entraîne après soi. Voici d'ailleurs une autre liste, celle des ^ sTlfe p l« ik.. î 1 y rtUIivc à l'incvuiUv da t incendies de théâtres qui, depuis on peu plus d'oa siècle, ont fait le plus grand nombre de victimes ; A Amsterdam, an théâtre Schouwbourg, 11 mai 1772, iit victimes. A Saragossc, au Coliséc, 12 novembre 1778, 77 victimes. A Paris, à l'Oiwra, 8 juin 1781, 21 victimes, ACapod'Ifltria, 8 ]uinl784, 1,000 victimes. A Londres, au Covcnt-Ourdeu, 20 septem- bre 18118, -li victimes. A Richmond, 2G septembre 1811, 72 victimes. A Saint-Pétersbourg, au Cirque Lelunann, 14 février 183C., 8i)0 victimes. A Canton, 2') mai 1845, 1,670 victimes. A Québec, au Théâtre-Royal, 12 juillet 1846, 2(10 victimes. A Carlsmhe, au Tliéâtre de la cour, 28 février 1847, H 10 victimes. A Ijivonme, 7 juin 1857, 100 victimes. A Philadelphie, au théâtre Fox, 1!) juin 18(17, 28 rictimes. A Sanghaï, au Théâtre chinois, 1871 , 120 victimes. FEUILLETON DRAMATIQUE. 371 A Ttien-tsin, au Théâtre chinois, mai 1872, 000 victimes. A Brooklin, au théâtre Conway, 5 décembre 187C, 380 victimes. A San Sacramento, 10 décembre 1876, 110 victimes. Inde anglaise, Ahmadnuggar, 11 mai 1878,40 \âctimes. A Nice, au théâtre itahen, 23 mars 1881, 80 victimes. A Vienne, au théâtre du Ring, 8 décembre 1881, 1,100 victimes. En ce qui concerne Paris, il serait difficile peut-être de faire une énumération exacte de tous les tliéâtres ou spectacles qui, depuis plus de deux siècles, ont été détruits par le feu. Voici ce que nous avons pu découvrir à ce sujet. Le premier, croyons-nous, qui ait été dévoré par les flammes , est le théâtre du Marais, situé rue Michel-le-Comte, auquel ap- partenait le célèbre Jodelet, et qui est détruit en 1034. Le 10 mars 1702, un incendie terrible réduit en cendres toute la Foire Saint-Germain, ainsi ({ue tous les théâtres qui s'y trouvaient, à l'exception de l'Opéra-Comique ; la « logo » de Nicolet fut la première atteinte. L'Opéra brûle trois fois : en 170;3, en 1781 et en lH7o, et en 1788, la salle des Menus-Plaisirs, qu'il avait occupée un instant, sul)it le même sort. En 171)7, c'est le tour des deux petits théâtres en lx)is qui existaient sur la place Louis XV. En 1798, les Délassements-Comiques et le Cir- que du Palais-Royal sont anéantis. L'année suivante , c'est l'Odéon , qui est encore détruit en 1818. En 1826, le Cirque-Olympique et l'Ambigu-Comique disparaissent l'un après l'autre dans les flammes. Puis, c'est le Gym- nase-Enfantin (1827 ), la Gaîté (1885), l'Opéra- Italien (salle Favait) et le Vaudeville de la rue de Chartres (1888); l'Hippodrome (1840); le Diorama et la salle du physicien Philippe, qui sont engloutis dans le désastre du Bazar Bonne- Nouvelle (1840); le théâtre du Pré-Catelan (1859); les Nouveautés, faubourg Saint-Mar- tin (1806); le théâtre de Belleville (1807); enfin, le second Hippodrome (1809). Ce chapitre du feu au théâtre est douloureux, on le voit, et plus d'une fois l'Europe entière s'est émue à la nouvelle d'un de ces désastres qui font des centaines de victimes, la sécurité de tous se sentant menacée par un tel danger. L'unique recours que l'on conçoive contre le retour de désastres si terribles est dans la subs- titution de l'éclairage par la lumière électrique à l'éclaimge par le gaz. Bien des recherches sont faites pour amener ce résultat, bien des essais ont été tentés déjà, mais aucun jusqu'ici n'a donné de résultats pleinement satisfaisants. Tout fait espérer cependant que dans un avenir plus ou moins prochain ce but si désirable sera atteint. L'emploi de la lumière électrique écar- tera pres(iue complètement les chances d'in- cendie, et le théâtre ne sera plus un plaisir souvent meurtrier. En attendant, il nous semble (pi'on aurait bien pu, pour écarter quelques- unes de ces chances, mettre en usage l'un des divers procédés (jui assurent, sinon l'incom- bustibilité, du moins l'ininflanmaabilité des dé- cors et des costumes. Il ya déjà longtemps que ces procédés sont connus, et l'on ne sait \Tai- ment comment il se peut faire qu'aucun ne soit encore employé dans nos théâtres. (Voy. IXINFLAM3IA1ÎIL1TK DES J)ÉC0IIS.) FEUILLBTOX DRAMATIQUE. — On sait ce que c'est qu'un feuilleton : un article inséré au bas d'un journal, et séparé des autres matières de ce journal par un large filet. Il n'y a pas encore vingt ans, tous les journaux pu- bliaient, le lundi de chaque semaine, un feuil- leton théâtral qui rendait compte des premières représentations, des livres nouvciiux relatifs au théîitre, enfin de tous les faits dramatiques qui s'étaient produits pendant les huit jours précé- dents. Plusieurs journaux donnaient aussi , le mardi, un feuilleton musical. Cette partie de nos journaux était confiée à des écrivains spé- ciaux, à des critiques exercés qui se sont acquis dans cette spécialité un renom mérité. Par mal- heur, cette excellente coutume a été jxîu à peu presque complètement abandonnée, et trois ou quatre jouniaux seulement à Paris ont con- servé l'heureuse tradition du feuilleton. Les autres, avec la manie d'informations rapides qui s'est établie si complètement depuis quel- ques années, ont pris la déplorable habitude de publier leurs comptes rendus de théâtre le lendemain même des premières représentations. 87â FEUILLETONISTE. — FIASCO. Or, ceci est la négation môme et la mort de la critique proprement dite. Il est impossible en effet à un écrivain, quels que puissent être son talent et sa compétence, de donner une opinion raisonnéc, au sortir du théâtre, sur une œuvre importante, aloi-s qu'il n'a eu le temj» ni de réfléchir, ni d'analyser ses impressions, ni de coordonner ses idées. D'ailleurs, la véritable critique ne peut procéder que par comparaison, par rapprochements entre une (L'uvre nouvelle et celles du même genre qui l'ont précédée ; elle doit généraliser ses idées pour justifier les raisons qui la portent à approuver ou à blâmer certaines tendances, certains principes littérai- res ou artistiques. Comment tout cela pourrait- il se produire avec des comptes rendus faits à la hâte, improvisés au sortir d'une salle de spectacle, alors que l'écrivain, l'esprit encore obscurci par tout ce qu'il vient de voir et d'en- tendre , n'a pu dégager nettement ses impres- sions et se rendre à lui-même un compte exact de leur valeur. D'autre part, il arrive ceci, que le critique, autrefois maître de son feuilleton, pouvait se débarrasser, en quatre ou cinq lignes dédaigneuses, d'une production sans valeur et sans hnportance , et accorder toute son atten- tion à une œu\Te sérieuse, qui parfois soulève tout un monde d'idées et amène l'étude de questions littéraires, ou artistiques, ou sociales, du plus haut intérêt; taudis qu'aujourd'hui, obhgé de consacrer un article sjx^cial aussi bien à une pochade inepte ou sans conséquence qu'à une œuvre puissante et de haut vol, il donne en apparence autant d'importance à l'une qu'à l'autre, et éprouve le regret de trou- ver toujours trop long l'article qu'il consacre à la première, et toujours trop court celui qui concerne la seconde. De tout ceci il résulte, conmie nous le disions, que la critique théâ- trale se meurt, et que c'en sera fait bientôt d'elle, si l'on ne revient à des pratiques plus saines, plus rationnelles et plus intelligentes. FEUILLETONISTE. — Écrivain chargé de faille chaque semaine, dans un journal, sous forme de feuilleton, l'analyse et la critique des œuvres théâtrales et musicales qui sont pro- duites au public. Parmi les feuilletonistes qui , à des titres divei*s, se sont fait un renom dans cette si)écLalitë, il faut citer Geoffroy et Jules Janin au Journal des Débats, Théophile Gau- tier à la Presse, Paul de Saint- Victor au Jfoni- leur tmtversel, Hipi)olyte Rolle à l'ancien iV^a- tional, Fiorentino au Constitutionnel et à ii France, Nestor Roqueplan au Constitutionnel; pour la partie purement musicale, on doit rap- peler les noms de Castil-Blaze et d'Hector Berlioz aux Débats, d'Adolphe Adam à V As- semblée nationale et au Constitutionnel, de Léon Kreutzer à V U?iion, et©., etc. L'ancêtre de nos feuilletonistes actuels est assurément le gazetier-rimailleur Loret, qui, dans sa Gazette en vers, rendiiit compte avc(^ tant de conscience , — et de naïveté , — des œuvres théâtrales qui de son temps se produi- saient à la sct*ne. On se fera une idée de sa » i)ar ce fragment de sa Gazette qu'il consacmit à la représentation de T École (les Femmes : Pour divertir seigneurs et dames. On joua VKcoh des femmes^ Qui fit rire Leurs Majestés Jusqu'à s'en tenir les côtés ; Pi«ce aucunement instructive Et tout à fait récréative ; Pièce dont Molière est auteur Et même principal acteur; Pièce qu'en plusieurs lieux on fronde , Mais où pourtant va tant de monde Que jamais sujet important, Pour le voir, n'en attira tant. Quiint à moi, ce que j'en puis dire, C'est que pour extrêmement rire Faut voir avec attention Cette représentation , Qui peut , dans son genre comique , Charmer le plus mélancoli(iue. Surtout par les simplicités Ou prisantes naïvetés D'Agnès, d'Alain et do Georgcttc, Maîtresse, valet et soubrette. Voilà, dès le commencement, Quel fut mon propre sentiment. FIASCO, — Mot d'argot théâtral italien qui répond à notre moi four, et qui a passé quelque jjeu dans notre langue. Quand un ou- vrage ha fatto fiasco, c'est qu'il est tombé à plat, qu'il a fait une chute complète, sans espoir de relèvement. Au sens propre, le mot fiasco signifie flacon, bouteille. Aussi Rossini, FICELLE. — FIGURES DE CIRE. 873 toujours gouailleur, même envers lui-même, écrivant un jour à sa mère pour lui annoncer le résultat, — qui avait été déplorable, — de la représentation d'un de ses opéras, ne trouva-t-il rien de mieux que de dessiner sur son papier un énorme ^sc^. Ce langage hiéroglyphique ne pouvait ne pas être compris. FICELLE. — Le comédien qui, faisant bon marché du naturel et de la vérité, a recours à un simple procédé scénique pour provoquer l'effet qu'il veut produire sur le spectateur, emploie ce qu'on appelle nuQjîceJle. De même, l'auteur dramatique qui, pour se tirer d'une situation délicate, oscjuive la difficulté au lieu de la surmonter, et échappe à l'obstacle, au mo- ment où il de^Tait faire preuve de vigueur et de sincérité, par le moyen d'un trompe-l'œil qu'il emploie avec assez d'habileté pour donner le change au public sur sa valeur, a recours aussi à la ficelk. Mais les ficelles, qui ne prouvent que la paresse ou Finsuffisance de ceux (|ui les emploient, ne trompent pas longtemps le spec- tateur et n'ont auprès de lui que peu de chances de succès. FIGARO. — Un des tyj>es immortels de la scène française. Depuis qu'il a été évoqué ])ar Beaumarchais dans son Barbie?' de Sèville d abord, puis dans le Mariage de Fùjaro, puis dans la Mère coujmble, Figaro appartient à l'histoire théâtrale au même titre que les Cris- pin, les Pasquiu, les 8ganarelle, les Mascarille, les Frontin et autres héros de notre comédie. Figaro est le prototype des valets rusés, four- bes, intrigants, à rintelligence souple et avisée, plus riches d'expédients que de scrupules, et pour qui tous les moyens sont bons pour an'i- ver à leurs fins et mettre la fortune de leur côté. Le personnage est trop connu pour qu'il soit nécessaire de nous étendre davantage à son sujet. FIGUR.VKT, FIGURANTE. Comparse. Voy. FIGURATION. — Dans les grands théâ- très, la figuration comprend l'ensemble des figumnts, comparses, marcheuses, qui prennent une part miieite à l'action scénique. Dans les autres théâtres, la figuration comprend aussi les choristes ; souvent même elle ne se compose que de ceux-ci. FIGURES DE CIRE. — Il y a plus d'un siècle que dure la vogue des musées de figures de cire, et le succès obtenu par le musée Gré- vin , ouvert à Paris depuis trois ans environ , montre qu'elle n'est pas près de s'éteindre. C'est à un Allemand nommé Curtius, établi en France, qu'on doit sinon l'invention, du moins la grande popularisation de ce spectacle. C'est aux environs de 1780 que Curtius installaàParis son Salon de figures de cirej et voici ce qu'en disait un annaliste en 1791 : — <( Le sieur Curtius, artiste allemand, naturalisé Français par son domicile en France depuis nombre d'années, et enclore plus par le patriotisme dont il a fait ju-euve dans la Révolution, où il s'est signalé plus d'une fois et de plusieurs manières très honorables, tient depuis longtemps sur le boulevard du Tein])le et sous les galeries du Palais-Royal un cabinet de figures en cire, imitant parfaitement la nature. Tous les ans il renouvelle ses deux salions, et tous les mois il y change quelque chose. Outre les figures de fantiiisie qu'on lui fait faire en ville, et dont il garde une copie quand les tètes ont du carac- tère et de la beauté, il a des héros, que l'on reconnaît sur-le-champ, et qui, de la tête aux ])ieds, sont costumés avec la plus grande vé- rité. Les figures qui ont eu le plus de vogue cette année au sallon de Curtius sont celles du roi, de ^M^F. Bailly, la Fayette et de plusieurs illustres députés de l'Assemblée nationale, cel- les du fameux sieur llulin, du sieur Elie et des autres principaux vainqueui*s de la Bas- tille... » ^Fais il n'était guère question jusque-là que de figures isolées, ce qui était encore Ti^nfance de l'art. Le fameux musée de ^ladame Tus- saud, à Londres, si célèbre aujourd'hui depuis près d'un demi-siècle, prit une route nouvelle, dans laquelle il est maintenant suivi par le musée Grévin. Non seulement, dans ces éta- blissements, on exhibe tour à tour les figures de tous les personnages célèbres : souverains, prétendants, hommes politiques, artistes, écri- 874 FIL. — FINANCIERS. vains, criminels, mais ou reproduit, d*une fa- çon véritablement saisissante, des groupes spé- ciaux et des scènes entières représentant des événements contemporains, et cela de &çon à produire une illusion complète et à tromper l'œil le plus exercé. Un fait divers émouvant, un acte criminel , la confrontation d'un assas- sin avec sa victime, la mort d'un grand per- sonnage, tout cela est présenté au public avec tous les accessoires nécessaires, avec un senti- ment de la réalité qui fait naître dans l'esprit du spectateur l'impi^ession véritable du fait mis sous ses jeux. FIL. — En langage de machinerie théâ- trale, on donne le nom de fil à tout cordage qui sert à faire descendre du chitre ou à y faire remonter les différentes pièces de la décoration. Quelquefois, la réunion de plusieurs fils est nécessaire entre les mains du machiniste pour lui permettre de faire manœuvrer d'un seul coup les diverses parties d'un fragment de décor ; la réunion de ces fils prend le nom de jwù/née, — Les machinistes, qui sont gciLS de ressource, ne manquent jamais certaine plaisanterie dont l'usage est passé en tradition : c'est une amende qu'ils infligent de leur propre autorité à toute personne du théâtre qui, par inadvertance ou par inexpérience, prononce le mot de corde ou de cordage eu parlant d'un//. Si la victime est un petit employé , ou un choriste , ou un simple comparse, elle en est quitte pour une ou deux bouteilles qui seront proprement vidées à ses frais chez le marchand de vin attenant au théîitre ; mais s'il agit d'un artiste important, d'un régisseur, d'un employé supérieur, la chose lui coûte plus cher et se fait avec plus de cérémonie : dès le lendemain matin, une députation des machinistes se rend chez le dé- linquant, avec un gros morceau dejil dont on a déroulé et écaité les filaments dans sa partie supiîrieure pour lui donner l'apparence d'un énorme bouquet, dont le hoiit dix Jil foiine la queue. Les déimtés offrent soleimellement ce bouquet à leur victime en lui expliquant la faute dont elle s'est rendue coui)îil)le, et celle-ci n'en est pas (juitte alors à moins d'un ou deux louis, avec lesquels ou va faire bombance eu son honneur. FILER UNE SCÈNE. — Dans une œuvre dramatique, on dit d'une scène qu'elle est € bien filée > lorsque, cette scène étant impor- tante par la situation qu'elle présente et qu'elle développe, l'auteur a su la conduire d'un bout à l'autre avec talent, avec adresse, avec habi- leté, de façon à exciter l'attention du public, à le charmer, à l'émouvoir, et à faire produire à la situation ainsi traitée tout l'effet qu'elle com- jwrte. FINALE. — Le finale est un morceau de musique très développé, à plusieurs voix, avec chœura, qui marque le point culminant de Fac- tion dramatique, qui embrasse parfois plusieurs scènes, et qui termine certains actes d'opéra. Le finale du premier acte de la Somnambule, celui du second acte du Barbier de Séville, ce- lui du second acte de Lu4>ie de Lamermoar^ celui du troisième acte de VAfrkmne, celui du second acte de la Dame blajiclie y sont des mo- dèles chacun en leur genre. FINANCIERS. — Emploi de comédie, qui dans l'origine tira son nom de la qualité du personnage représenté, et qui comprend une certaine classe de rôles marqués, tenant le mi- lieu entre les pères nobles et les grimes. Les fi- nanciers ne sont pas tenus à la dignité des premiers , et ils ne tombent jamais comme les seconds dans le bas comique et la caricature. Dans le grand répertoire, ou comprenait jadis dans l'emjiloi des financiers un certain nom- bre de rolas à manteau (Voy. ce mot) ; d'autres prenaient la qualification assez originale de ventres dorés , parce que, presque toujours, le fond de la veste brodée de leur riche costume était de drap d'or : parmi ceux-ci, on classait en première ligne Lysimon du Glorieux (Des- touches), et Turcaret de Turcaret (Le Sage). Les rôles suivants appaitiennent aussi à l'em- ploi des financiers : M. de Sottenville dans George Dandin, Oéronte dans le Médecin mal- gré lui, M. Guillaume dans r Avocat Patelin^ Orgon dans les Jeux de Vamour et du hasard (ISIarivaux), M. Mathieu dans VÉcoU des Bourgeois (d'AUain val) , Démophon dans les Ménechmes (Regnard), Lysimon dans la Feinte par amour , Argan dans le Préjugé à la mode ,L'' -Hlf 11 LOUIS XIV EN 170C PALAIS DL VFR.SAlLLfS FIORITURES. — POIRE (théâtres de la). 375 (La Chanssée), Francaleu dans la Mètromanié (Piron), Oéronte dans U Méchant (Gressct). FIORITURES. — Ornements, d'un goût ploB OU moins épuré, — plutôt moins que plus, — que certains chanteurs se permettent d'a- jouter sans façon au texte musical qu'ils sont diaigés de transmettre au public. Nous })ensons qn*U est peu de comédiens cjui voulussent pren- dre sur eux de corriger les vers de Corneille, de Molière ou de Racine ; mais nos c]ianteui*s, (|ui BOnt doués généralement d'une prodigieuse confiance en eux-mêmes, ne se font aucun scrupule de corriger Rossini, Hcrokl et Meyer- beer, pensant sans doute que ceux-ci devraient s'estimer trop heureux de les avoir pour colla- borateurs, même au prix des solécismes harmo- niques les plus prononcés. FLOXFLOX. — Ce mot, qui semble n'a- voir été d'al)ord qu'une onomatopée destinée à rendre l'idée du son des instruments, est de- venu eiiiiuitc un substantif à Taide duquel on a caractérisé la musique et les refrains des chansons joyeuses et populaires. Sous sa pre- mière forme, on sait l'emploi qui en a été fait dans le refrain si connu : Flon, flon, flon, lariradondaine , Gai, gai, gai, laiiradondé ;... sous la seconde, on a pris la coutume de l'employer pour lui faire désigner, d'une façon un i)eu dédaigneuse par rapport à la vraie mu- sique, celle des couplets qui se chantaient na- guère dans nos vaudevilles. C'est en ce sens qu'on disait « les flonflons du vaudeville )>, et que d'un opéra dont la musique était d'un ca- ractère trop léger, voire un jkîu vulgaire , on disait encore : « Il n'y a que des flonflons, » Pendant cent cinquante ans, les flonflons du vaudeville ont fait la joie de nos itères; qui sait si nos fils n'y reviendront pas ? FOUETTÉ. — Un des temi» caracUTisti- ques et fondamentaux de la danse. FOIRE (Théâtres de la). — Ce n'est qu'en tremblant que je touche à ce sujet sca- breux, et que je vais essayer de donner quel- ques détails sur ces innombrables spectacles connus collectivement sous le nom de théâtres de la Foire, joie du Paris des dix-septième et dix-huitième siècles. Les renseignements sur ce pomt sont tellement \'agues, tellement épars, tellement confus, qu'il est bien difficile de se retrouver dans ce dédale, et d'ailleurs la ma- tière est si abondante qu'elle exigerait à elle seule plusieurs volumes. Si je bronche en un point, ou en quelques-uns, on voudra bien m'excuser. Mon ambition n'est autre que de rappeler par une \7ie d'ensemble ce que furent les grandes foires de Paris en ce qui touche les divertissements et les jeux publics qu'on y trouvait en foule, et je demande grâce d'avance pour les quelques erreurs de détail que pour- ront contenir ces lignes. L'essentiel est que rien d'important n'y soit oublié. A une époque, dit M. Bonrquelot, où les com- munications étaient difficiles et périlleuses , quand les lieux où Ton pouvait trouver à la fois des objets de luxe et des objets de nécessité étaient rares et éloignés, les foires satisfaisaient à beaucoup de besoins. Des franchises, des privilèges spéciaux donnaient aux marchands le moyen de compenser par des gains aisés et certains les dépenses du voyage ; ils venaient en caravanes, et de puissants bcigncurs répondaient de la sûreté de leurs person- nes et de leurs bagages. Puis aux marchands de profession se joignaient quelques bourgeois du voi- sinage, quelques habitants des campagnes qui vou- laient s'approvisionner ou se divertir ; les pèlerins et les dévots accouraient sous prétexte de rendre hommage à un saint renommé , d*adorer une ptiis- sante relique, d'assister à une brillante cérémonie religieuse ; mille réjouissances , mille spectacles di- vers étaient offerts à la foule; les baladins, les joueurs de mystères établissaient leurs tréteaux à côté des loges des débitants; des poètes et des musiciens ambulants répétaient des chansons ou des airs aimés du peuple. Le droit de foire comp- tait parmi les privilèges des ^-illes. On voit combien les jeux, les divertissements publics, les spectacles de tout genre tiennent de près à l'histoire de ces immenses marchés périodiques qui se renouvelaient chaque année dans un grand nombre de villes de France et d'Europe. Paris, pour sa part, a eu de temps 876 FOIRE (théâtres de la). presque immémorial des foires extrêmement importantes, où affluaient des ULirchands et des débitants de toutes sortes, et qui attiraient la foule. Je ne parlerai jms de la foire de Saint- Ucnis, qui remonte, dit-on, au septième siècle, non plus (lue de celle si célèbre du Lendit, non plus que de celles de Saint- Ladre, de Saint- Lazare et de Saint-Oucn : mais il me faut rap- peler les deux plus fameuses, la foire Saint- Laurent, qui succéda à la foire Saint-Lazare, puis Li foire Saint-Germain, et ensuite les foires Saint-Clair et Saint-Ovide. Dans toutes oclles-ci nous voyons dos bateleurs , des saltim- banques, des loges de marionnettes, puis enfin de ATais théâtres venir se joindre aux bouti(|ues et aux étiila^^es qui de toutes parts faisaient 4iccourir les curieux. La foire Saint-Laurent était établie dans l'enclos de ce nom, sur un emplacement vaste et superbe situé entre les rues du Faubourg- Saint- Denis et du FaulKmrg-Saint -Martin, proche l'église Saint-Laurent. La ff)ire Sîiint- Germain , situé sur l'autre rive de la Seine, dans le faubourg Saint-Germain, était plus fastueuse, plus brillante, plus aristocnitique que celle-ci. L'une et l'autre furent longtemi)s célèbres. Voici les renseignements (juc donnait sur elles, au point de vue (\m nous occuimî, un recueil siK»cial, le Calendrier historique des spectacles de Paris, en Tannée 1751 : Les deux foires de Paris sont celles de Saint- Germain et de Saint-Laurent. Celle-ci se tient en été, et I autre en bvver. Elles ont varié souvent toutes deux, soit pour le tcnis, le lieu ou la durt^o. La foire Saint-Gennuin s'est tenue d'abtird au mois d'octobre, ai elle ne duroit que liait jours. On la remit au mois de mars, ensuite au mois de mai; on la prolongcoit quelquefois de quinze jours, de trois semaines , d*un mois ; entin elle u été fixée au mois de février, et elle dure ordinairement deux mois entiers, et queltiucfois plus. La foire Saint- Laurent, après plusieurs vicissitudes semblables, après avoir changé souvent de place, quoique tou- jours dans lo Fauxbourg Saint-Maitin, a été fixée au mois d'aofit, et dure à peu près autant que Tau- trc. Il scroit difîicilc d'assîp:ner l'origine de ces deux f(»ircs; tout ce (ju'on en sçait seulement, c'est i[\w pendant plus de deux ou trois cents ans on n'y vuyoit que des gens qui vendoient, et d'au- tres qui aclietoient ; c'étoit là à quoi se réduisoient tous les spectacles. On n'avoit alors ni sauteurs, ni danseurs de conle, ni comédiens, ni marionnettes; et il n'y a guère que cent ans qu'on a commencé à y dresser des théâtres (1). Ce sont les marionnet- tes qui ont l'avantage de l'ancienneté ; le fameux Brioché y transporta ses machines , et il fut suivi de beaucoup d'autres dans le même genre. Ensuite parurent les animaux sauvages . tels que les lions , les tigres , les ours et les léopards qu'on faisoit voir dans différentes loges. Les géans succédèrent, et après eux vinrent les animaux familiers, comme les chiens , les chats, les singes, qu'on avoit formés à toutes sortes de tours pour tirer de l'argent du peuple qui venoit en foule à ces spectacles. On y vit ensuite des joueurs de gobelets, des sauteurs et des danseurs de corde qui attiroient aussi à leurs jeux beaucoup de monde ; mais ce n'est qu'en 1G78 qu'on commença à y représenter |K)ur la première fois des pièces de théâtre. La plus ancienne (|ue l'on connaisse est intitulée tes forces de ramour et de la mwfie. C'est un divertissement comique en trois intermèdes, ou plutôt un mélanj;e jissez bi- sarrc de sauts, de récits, de machines et de danses. Ces sortes de pièces étoient représentées par des sauteurs , qui formoient différentes troupes. On en comptoit trois principales en 1G97. La première se nommoit la troupe des frères Allard ; la seconde portoit le nom de Maurice, et la troisième celui d'Alexandre I Bertrand. La sui)pression de l'an- cienne troupe des Comédiens-Italiens, qui arriva cette même année, offrit un champ vabte aux en- trepreneurs des jeux de hi foire, qui, se regardant comme héritiers de leurs pièces de théâtre , en don- nèrent plusieurs fragments à la foire de Saint-Lau- rent, ajoutant à leur troui)e des acteurs propres à les représenter. Le public, (pii regrettoit les Ita- liens, courut en foule en voir les copies, et s'y di- vertit beaucoup. Alors on construisit des salles de spectacles en forme, des théâtres, lopjes, i)ar- quet, etc. Les Comédiens- François , attentifs à leurs privilèges que cette nouveauté attaquoit , s'en plai^çnirent au lieutenant de police, qui défendit aux comédiens forains de rei)résenter dans la suite aucime comédie. Ceux-ci apjKïllèrent au Parlement de cette sentence ; mais le Parlement ne leur fut pas favorable. Ils eurent recours alors à n\ille ar- tifices pour se mettre à l'abri des poursuites des Comédiens. Ils obtinrent du (îrand-Conseil un ar- rêt en leur faveur : mais cet arrêt fut annulé par (1) D'une fayii {Kïrmancntu, i>ciit-êtrf. Mais dû? IM'6 ou .'«{•^ale ht prèifoiicc, i\ la fuiru Saint-Geritiuiu, d'une trou]>e de comOiliens de province. FOIRE (théâtres de la). 879 le Conseil privé du Roî , où TafEaire avoit été por- tée. Les comédiens forains furent donc réduits à ne représenter que des scènes muettes. Ils traitèrent ensuite avec les syndics et les directeurs de TAca- démie royale de musique , pour obtenir la permis- sion de jouer sur leurs théâtres des petites pièces mises en vaudevilles , mêlées de prose et accompa- gnées de danses et de ballets. Ces spectacles pri- rent le nom à! Opéra-Comique , dont M. Lesage doit être regardé comme le premier auteur. Flatté par le succès des pièces qu^il avoit données à ce théâ- tre, il voulut par reconnoissance quitter tout autre ouvrage, pour se consacrer entièrement à ce genre de spectacle. Les pièces que l'on jouoit à l'Opéra- Comique étoient souvent des parodies de quelques pièces sérieuses qu'on représentoit en même tems sur les théâtres de la Comédie-Françoise ou de l'A- cadémie royale de musique. Le ])euple y accouroit en foule, et ce spectacle étoit réellement très di- vertissant. Un autre spectacle qui eut coiu*s pen- dant quelques années durant le tems de la foire, ce fut celui des pièces représentées par écriteaux. Comme on avoit ôté aux comédiens forains la li- berté des représentations ordinaires, ils prirent le parti de jouer à la muette. Mais dans l'impossibilité où étoient les acteurs d'exprimer par des gestes des choses qui n'en étoient pas susceptibles, on imagina l'usage des cartons, sur lesquels on im- prima en gros caractères , et en prose très laconi- que, tout ce que le jeu des acteurs ne pouvoit ren- dre. Ces cartons étoient roulés, et chaque acteur en avoit dans sa poche droite le nombre qui lui étoit nécessaire pour son rôle. A mesure qu'il avoit be- soin d'un carton, il le tiroit et l'exposoit aux yeux des spectateurs, et ensuite le met toit dans sa poche gauche. Ces écriteaux en prose ne parurent pas long-tems au théâtre; quelques personnes imagi- nèrent de substituer à cette prose des couplets sur des airs connus , qui , en rendant la même idée, y jettoient un agrément et une gaieté dont l'autre genre n'étoit pas susceptible. Pour faciliter la lec- ture de ces couplets, l'orquestre en jouoit l'air, et des gens gagés par la troupe et placés au parquet et aux amphithéâtres, les chantoient, et par ce moyen engageoient les spectateurs à les imiter. Ces derniers y prirent un tel goût , que cela f ormoit un chorus général. Voilà à peu près ce qui se passa aux foires de Saint-Germain et de Saint-Laurent depuis la suppression de l'ancienne troupe des Comédiens-Italiens jusqu'à l'établissement de la nouvelle, qui vint à Paris en 1716. Quelques an- nées après leur arrivée, ces comédiens s'apperce- vant que leur recette étoit bien différente de celle qu'ils avoient faite les années précédentes , prirent une résolution assez extraordinaire , qui fut d'aban- donner pour quelque tems leur théâtre de l'Hôtel de Bourgogne , et d'en ouvrir un nouveau à la foire Saint-Laurent; mais ils n'y jouèrent que durant l'espace de trois années, et pendant la foire seule- ment. Apparemment qu'ils n'y trouvèrent pas d'as- sez grands avantages. L'Opéra-Comique avoit été supprimé et rétabli plusieurs fois ; mais depuis l'an- née 1724-, que le sieur Honoré en obtint le privilège, ce spectacle a toujours duré jusqu'en 1745, qu'il a été entièrement aboli; et l'on ne joue plus actuel- lement à la foire que des scènes muettes et des pantomimes. Les choses sont revenues à leur pre- mière institution , et tout se réduit enfin à quelques troupes de danseurs de corde et de sauteurs, aux marionnettes , aux animaux sauvages et aux joueurs de gobelets. Tel est l'état i)résent des spectacles de la foire qui se tient deux fois l'année à Paris , une fois au Fauxbourg Saint-Germain, l'autre fois au quartier Saint-Laurent. Ce petit précis historique nous montre ce que furent juscju'au milieu du dix-huitième siè- cle, en ce qui concerne les spectacles et les di- vertissements publics, nos deux grandes foires parisiennes. Le même recueil nous donne cet Ordre chronologique des principales troupes qui ont paru successivement sur les différens théâ- tres de la Foire, depuis Vannée 1697 jusqu'à présent (1751) : Troupe d'Alahp. 1097. — Alard étoit de Paris, fils d'un baigneur étuviste du roi ; il étoit grand et bien fait , et a passé pour le plus habile sauteur et le plus grand pantomime de son tems. Il paroissoit toujours sous l'habit de Scaramouche, et il en exé- cutoit la danse supérieurement. En faisant un saut périlleux il tomba , et sa tête ayant porté contre une coulisse, il ne prit point assez de précaution contre les suites de ce coup ; il s'y forma un abcès qui lui causa la mort peu de tems après la foire Saint-Laurent tenue en 1711. Troupe de Maurice. 1697. — Maurice fut le plus habile des élèves d'Alard. 11 joignoit , au ta- lent de sauteur, celui de danser sur la corde avec beaucoup de grâce et de légèreté. Malgré la répu- tation d'Alard, sa troupe l'emporta bientôt sur celle de ce dernier, par la quantité d'excellens sujets dont il avoit sçu faire l'acquisition. Il n'en jouit pas longtems , car il mourut l'année suivante. Sa veuve soutint les engagemens de son mari et ceux qu'elle fit depuis, avec une conduite supérieure. Elle épousa depuis un gentilhomme , et mourut à sa terre de Vineuf , en 1720. 380 FOIRE (théâtres de la). Troupe de Bertrand. 1697. — Bertrand étoît maître doreur à Paris ; il joignit pendant quelques années au travail de sa profession celui de faire des figures de marionnettes. Il entreprit ensuite de conduire lui-même ses figures, et donna un spec- tacle de marionnettes en son nom. Il ajouta à son jeu des sauteurs et des danseurs de corde ; il fit même représenter des pièces par des jeunes gens de Tun et de l'autre sexe , et devint ainsi chef de troupe. Quelques années après, il s'associa avec Do- let et Laplace, et sa troupe devint plus connue sous le nom do ses doux associés. Ceux-ci étoient de Paris, et ayoicnt joué tous deux dans des trou- pes de province. Dolet faisoit le rôle d'amoureux, et Laplace ceux de Pierrot et ensuite de Scara- mouche. Troupe de Selle. 1701. — Selle avoit été élève de Maurice; il étoit bon sauteur, et avoit ras- semblé d'exccllcns sujets pour nés exercices. Mais dans les contestations qu'eurent les Comédiens- François avec les forains , il fut obligé comme bien d'autres, en 1710, d'abandonner son jeu. 11 s'enga- gea avec des comédiens de province , et il partit de Paris, où il n'est plus revenu depuis. ■ Troupe de Dojîixique. 1710. — Biancolelli, plus connu sous le nom de Dominique , étoit fils du célèbre Dominique , de l'ancienne troupe italienne. Il se destina au même rôle que son père (Arlequin) , mais il joua quelque tems en province avant que de débuter à Paris. Il y revint en 1708, et s'enga- gea dans la troupe de la veuve Maurice. Deux ans après, il se mit lui-même à la tête de celle que les sieurs Beilegarde et Dcsguerrois avoient levée; la plupart des pièces qu'il y faisoit jouer étoient de sa composition, et jamais aucun acteur forain n'a joui d'une plus grande réputation que lui. Il est mort le 18 avril de l'année 1734. Troupe d' Octave. 1712. — Constantini portoit le nom d'Octave dans ranciennc troupe des Comé- diens-Italiens, et il l'a toujours conservé depuis. Il remplissoit dans sa troupe les rôles d'amoureux. Après la suppression de ce théâtre , il se fit chef de troupe dans les foires ; il choisit les meilleurs su- jets de celle d'Alard , et par l'ordre de ses décorji- tions, le goût des habits, l'adresse de ceux qu'il employoit pour conduire ses machines et le soin enfin qu'il donnoit à la i)erf ection de son spectacle , on y voyoit toujours une grande afHuence do monde ; mais quoiqu'il eût tout lieu d'être fort sa- tisfait de ses succès, les diflicultés «pii augmen- toient de jour on jour au sujet des permissions de jouer commencèrent à le dégoûter. Il abandonna son théâtre en 171G, et mourut Tannée suivante. TiiourK Di- Fraxcisque. 1720. — Cette troupe a été une des meilleures des deux foires ; plusieurs bons auteurs y ont fait jouer des pièces qui ont eu un grand succès. Francisque a joué longtems en province ; il vint à Paris où il fut quelques années, et passa en Angleterre ; sa famille se chargea de sa troupe, qui a toujours passé sous son nom. Troupe i>'Hoxoré. 1724. — Honoré, maître chandelier de Paris, après avoir fourni pendant plusieurs années des lumières au théâtre, s'avisa d'en entreprendre un. Il obtint en son nom le pri- vilège d'un nouvel Opéra-Comique. Il ne joua ja- mais lui-même , mais il eut dans sa troupe de bons acteurs. Ses affaires ne lui permirent pas de conti- nuer longtems cette entreprise, et il céda son privi- lège à un autre. Troupe de Ronteau. 1727. — Ponteau est celui à qui Honoré céda son privilège. On i)eut dire qu'entre ses mains l'Opéra-Comique a été porté à sa perfection. Il lui est toujours resté depuis ce tems-là, jusqu'à la suppression qui en fut faite il y a quelques années. Ponteau a eu le bonheur de trouver de bons auteurs , d'excellens acteurs , d'ha- biles décorateurs et de parfaits musiciens. Troupe de Rkstikr et Lavigne. 1735. — Cette troupe fut nommée la Graiule Troupe étrangère^ et elle n'a pas cessé de représenter aux foires de Saint- Germain pendant près de dix ans. Klle porte en- core le même nom, et elle est composée de très bons sauteurs , que tout Paris va voir avec empres- sement. Cette nomenclature, (jui d'ailleurs ne com- mence qu'en l(îi)7, est fort incomplète. Tout d'abord , en niison de cette date , elle ne pou- vait comprendre la troupe enfantine fameuse de la veuve Raisin, dite Troupe du Dauphin, dans la(|uelle ^lolière découvrit et s'appropria , en 1<;<;1, un enfant dont les disiwsitions lui semblèrent merveilleuses, et i{\n devint en etfet l'une des gloires de la scène française, Michel Baron. Mais pinni les autres jeux des foiixis Saint-Laurent et Saint-Cermain, nous en trou- vons bien d'autres qui ne sont pas mentionnés ici : 1° les Marionnettes de Tiquet ( vers 170i'); 2** la troupe d'acteurs, danseura de corde et sauteurs, diripcée iwir le même Tiquet et son associé RcKîhefort (Foire Saint-Laurent, 170')- 1708); 3" les ^Marionnettes de Gillot (Foire Saint-Cermain, 1708); 4° la troupe d'acteurs de Ni velon ( Foire Saint-Germain, 171 1 ) ; 5° les troupes de la veuve IJaron et de Saint-Edrae (vers 1712) ; G® le jeu c<3lèbre de Marionnettes FOIRE (théâtres de la). 881 de Bienfait, installé aux deux foires, et dont Tentrepreneur prenait le titre de « seul joueur de marionnettes de Monseigneur le Dauphin » (171 7) ; 7 la troupe de Baxter et Saurin (Foire Saint-Laurent, 1717); 8° le jeu du chevalier Pellegi'in , frère du fameux abbé Pellegrin qui fut le collaborateur de Rameau (Foire Saint- Laurent, 1718); i)'' celle de Pcclavé (Foire Saint-Laurent, 1718); 10"* rOpéra-Coniique de Lalauze, Maillard et sa femme, Baxter, Alard, Saurin et M"^ d'Aigremont (1721); ir^ celui de De Vienne (Foire Saint-Laurent, 17:>2) ; 12** la troupe de pantomimes de ^lathews (Foire Saint- Laurent, 1745) ; 13" celle de comédiens de M""" Santdham (Foire Saint -Germain, 1746); 14" les ^^Farionnettes de Levasseur, connues sous le nom de ««. comédiens prati- ciens », à cause de la pratique qui servait à les faire parler (Foire Saint-Germain, 174i)), etc., etc. (Ij. Les auteurs (jui travaillaient pour les divers théâtres de la Foire, comédiens on marionnet- tes, étaient Le Sage, Fuzelier, d'Orneval, Piron, Panard, Carolet, Dominique, Le Tellier, Ra- guenet, Legi'and, Favart, Boissy, Lafiichard, Le Noble, Largillière, Autreau, Fromaget, Pontau^ La Font, YeiTière, Mainbray, et quel(jues au- tres. A kii seul (mais quehpiefois en collabora- tion). Le Sage leur fournit plus de quatre-vingt- dix pièces, et Piron en écrivit environ quatre- vingts. On voit que nos petits théâtres n'avaient pas à se plaindre de la valeur de leurs fournis- seurs. Un chroniqueur disait à ce sujet ; a Pen- dant l'espace d'environ cinquante ans que nos auteurs ont travaillé pour les spectacles de la Foire, ils ont donné plus de cinq cents petits ouvrages dramatiques, dont quelques-uns se (1) Il fut un temps où le traitement des acteurs était loin d'être brillant dans les troupes des Foires. Les frères Parfait nous apprennent que « M"" Bastolet, actrice foraine, entra chez Bertnind, en 1098, pour les rôles d'amoureuses, à raison de vingt sols par jour, ap- jwintemens que cet entrepreneur donnait à tons ses ac- tenrs. )>En parlant d'un autre acteur, nommé Tamponet , ils disent encore : « Tamponet étoit h ce qu'il disoit maître à danser ; mai>» cette profession ne lui donnant pas de quoi subsister, il prit le parti d'entrer chez Ber- trand h raison de vingt sols par jour, et de la soupe, tous les jours qu'il jouoit, J> représentent encore tous les jours au théâtre de la Comédie-Italienne et n'attirent guères moins de spectateurs que dans leur nouveauté. » Les pièces de Le Sage, en effet, faisaient fureur à la Foire, de même que celles de Panard et de Piron , et attiraient la foule. Quelques-uns des théâtres de la Foire avaient aussi d'excellents acteurs, et ce qui le prouve, c'est (|ue plusieurs de ces acteurs leur furent enlevés par nos grandes scènes. L'Opéra, entre autres , s'y empara d'une chanteuse fort distin- guée, M"' Petitpas, et de trois danseuses re- marquables, M'»" Delisle, W^'' Rabon, W^^ Salle, dont la dernière devint une de ses célébrités, tandis que la Comédie-Italienne s'appropriait Dominique fils, Paglietti et Romagnesi. Le petit recueil que j'ai déjà cité nous offre d'ail- leura la liste ([\ie voici des c( acteurs et actrices qui se sont le plus distingués sur les théâtres de la Foire, placés selon le teins où ils ont commencé à s*v faire connaître o • Renaud Fran cessa ni Dominiijue Francisque Le Biclieur La Tour Marc Benville Billard Maillot Reister Roger Belloni Hamoche Lambert Alard Nivelon Octave Romagnesi Desgranges M"'^'' Maillard Delisle ACTFATRS. 1(>98 1701 1708 1718 1724 1738 1607 1607 1698 1702 1704 , 1698 \ 1704 ( 1715 ) 1704 1697 ( 1711 ( 1712 1712 1712 ACTRICES. 1711 ( 1711 ) Pour les rôles (T Arlequin. Pour les rôles de Gille, Pour Us rôles de PieiTot. Docteur. Pantomimes. Pour les rôles d amoureux. Sraramouche. Pour les rôles de Colombine, 382 FOIRE (théâtres de la). M"®» Bastolet Lambeit Baune Salle 1698 1704 1712 1718 Petitpas 1723 1 Pour les rôles ( d'amoureuses, ! Danseuse, qui entra depuis à V Opéra, ! Actrice chantante, qui entra depuis à V Opéra. Pour donner nne idée de renscmble qu'of- fraient les foires, au point de vue ^es spectacles et des divertissements ou curiosités qu^elles présentaient au public, je reproduis ici Tan- nonce détaillée que publiaient, en ce qui con- cerne la Foire Saint-Germain, les Annonces, affiches et avis divers dans leur n® du 12 fé- vrier 1753 : Comme la plupart des spectacles particuliers de la Foire Saint -Germain no sont ouverts que depuis peu de jours, nous avons été obligés d'en différer jusqu'à i>résent Tannonce , pour rendre en une fois cet article aussi complet qu'il est possible. On y voit : Sur le Tliéâtre des grands Danscurs-de -Corde , la Récréation militaire , pantomime nouvelle. Sur le Théâtre du sieur Bienfait, le Rossignol, précédé des Marionnettes. — Au bout de la rue Mercière (1). Chez le sieur Prévôt , les Plaisirs du Gaillard- Bois ou le Baccanal anglais, suivi de la Gibecière dévoilée; et un petit Cheval qui a six jambes, et qui fait dos tours surprenans. — A la troisième traverse de la rue de la Lingerie , vis-à-vis le ca- dran. Chez le sieur Renaud, machiniste, de nouvelles Marionnettes, — Rue de la Lingerie, vis-à-vis la quatrième traverse. Chez le sieur Myoli , Vénitien, une Académie de Singes et de Chiens, deux Vénitiennes qui font des tours de force extraordinaires, et un Animal sauvage. — Rue de Paris , auprès des grands Dan- seurs-de-Corde. Chez le sieur Baudoin, une J'Jcole militaire, et des Animaux étrangers de différentes espèces. — A la troisième traverse , au coin de la rue de la Lingerie. Chez le sieur Dupin, un petit Cheval turc, qui (1) Le grand espace occui)é par les foires, les nom- hreuse-s constructions qui s'y trouvaient réunies, en fai- saient de véritahles j^titcs villes , qu'on avait dû divi- ser en rues et en prOaux. fait toutes sortes d'exercices amusans. — Rue de Paris, vîs-à-xns l'Académie des Chiens. Les Tours de gibecière du sieur Palatine. — Vis- à-vis les grands Danseurs-de-Corde. Les Exercices dune troupe dEnfans, — A la se- conde traverse , rue de la Lingerie , à gauche. Les Tours datlresse du fameux Paysan de la Nord- Hollande. — Au bas de Tescalier de la rue Mercière. Les Petits Danseurs anglois et hollandoîs. — A la quatrième traverse. Différens Animaux singuliers. — Au coin de la seconde traverse, en descendant par la Porte Rovale. Un Petit Homme âgé de dix-huit ans, qui a 23 pouces de haut , et dont les membres ont une conformation extraordinaire. — Au coin de la quatrième traverse. Un Lion de la grosse espèce, un Bouquet artifi- ciel qui se change en Fruits, etc. — A l'entrée do la rue de la Chaudronnerie. Une Chienne dressée à connoître les cartes, à compter, à distinguer les couleurs et les personnes. — Rue Mercière , en entrant par la rue de Toumon , à gauche. Un Rhinocéî'os âgé de quinze ans. — A la qua- trième traverse. On voit qu'il y en avait pour tous les goûts. Encore ici ne voit-on pas annoncés certains spectacles de physique, de mécanique, qui n'é- taient pas moins nombreux que les précédents et dont on se fera une idée par l'an nonce que voici, extraite des Affiches de Paris an 20 juil- let 1747 : Par permission du Roy et de M. le Lieutenant général de Police, au Cocq qui chante, à la Foire S. Laurent, rue Princesse, cabinet curieux et di- vertissant, digne de l'admiration du public. On y voit à tout instant , depuis trois heures après midy jusqu'à neuf du soir, un Palais magique où il se passe des effets extraordinaires qui ont fait le di- vertissement de la Famille Royale et des Seigneurs et Dames de la cour, tant par les différentes ma- nœuvres des Esprits invisibles qui travaillent con- tinuellement dans ce Palais, que les fortunes ou in- fortunes qu'ils présentent aux humains qui les consultent. L'on démontre aussi plusieurs Pièces de physique et mécanique, fort amusantes, à la portée de tout le monde. Enfin, l'on fait voir plusieurs beaux phénomènes d'Electricité, avec la nouvelle Danse des Pantins, et la course des Vaisseaux élec- FOIRE (théâtres de la). 385 triques. L'auteur démontrera la mécanique de tou- tes les pièces, après les représentations, et Ton fera voir ces Esprits invisibles, qui satisfont en- tièrement tous les connoisseurs. On représente ex- traordinairement, en avertissant la veille. En 1752, nos foires eurent un regain de suc- cès par la résurrection de F Opéra-Comique, dont les grands théâtres avaient obtenu la sup- pression quelques années auparavant, et qui fut rouvert par un directeur intelligent, nommé Monnet. Celui-ci fit construire à la foire Saint- Laurent et à la foire Saint-Germain deux sal- les somptueuses, et sut donner à ce théâtre un éclat qu'il n'avait encore jamais eu. (Voy. Opéra-Comique.) La fondation par Nicolet père du spectacle des Grands - Danseurs de corde, par Audinot de celui de T Ambigu- Comique, augmenta aussi les attraits de nos foires. La foii-e Saint-Germain, détruite entiè- rement par un incendie au commencement de 1762, renaquit bientôt de ses cendres et re- trouva toute la faveur publique; quant à la foire Saint-Laurent, sa vogue commença à dé- croître lorsque les Parisiens prirent l'habitude d'aller promener leur oisiveté du côté de ce qu'on appelait alors (( les nouveaux boulevards » (Voy. Boulevard du Temple), et surtout lorsque l'Opéra-Comique, supprimé une seconde fois, eut été réuni à la Comédie-Italienne. Les lx)ulevards ne furent pas les seuls à DICTIONNAIRE DU THÉATBB. bénéficier du délaissement dans lequel était tombée la foire Saint- Laurent. Une autre foire, la foire Saint-Ovide, recueillait une partie de ses débris , et trouvait là pour elle un nouvel élément de succès. Voici comment un chroni- queur parlait de celle-ci en 1773 : Cette foire se tenoit ci-devant sur la place Ven- dôme, et se tient actuellement sur celle de Louis XV [la j)lace de la Concorde]. Elle commence dans le courant du mois d'août, et finit ordinaire- ment dans celui de septembre. Pille forme une en- ceinte bien décorée , composée de boutiques garnies de toutes sortes de bijoux, de colifichets, de mous- selines, d'indiennes, de modes, etc. On y voit plusieurs sortes de spectacles : celui des Grands Danseurs de corde, où on donne à peu j)rès le même spectacle qu'aux boulevards (1). Le sieur Nicolet cadet y a un théâtre de marionnettes. On en voit encore plusieurs autres à peu près dans le même genre , tels que ceux du sieur Renaud , des Fanloccinl italiens et des Pantoccini françois , ainsi que quelques ménageries d'animaux rares et curieux. On vit à cette foire en 1771 , dans le café du sieur Valindin , un concert composé d'aveugles. L'orchestre étoit de huit personnes, vêtues en rob- bes longues, et portant de grands bonnets pointus. Un neuvième aveugle étoit suspendu en l'air, sur wn paon, et battoit la mesure (hors de mesure). Il avoit de même que ses camarades une robbe rouge, des sabots à ses pieds, et un grand bonnet avec des oreilles d'âne. Ils chantoient, chacun à son tour, des couplets plaisans , en s'accompagnant ri- diculement du violon, et ils répétoient en chœur le refrein des couplets. Chaque aveugle avoit de- vant soi un papier de musique et une chandelle allumée. L'affluence du monde qui alloit voir cette plaisanterie étoit souvent si grande, que l'on fut obligé de mettre des fusiliers à la porte du caffé et de faire de tems en tems descendre les prétendus musiciens pour quelques instans. Quelques-uns des confrères du sieur Valindin , jaloux de son succès, voulurent faire une diversion en l'imitant; mais comme il avoit le mérite de la nouveauté, il con- tinua d'avoir la vogue tant que dura la foire. Elle étoit à peine finie que des marchands de gravures en débitèrent une qui rendoit parfaitement la ca- ricature des aveugles placés dans leur orchestre, et dont ils eurent un grand débit. (1) Peu d'années après, Audinot vint aussi instaUer I son spectacle à côté des Grands-Danseurs de Nicolet. 25 386 FORLANE. — FOR-L'ÉVÊQUE (le) ET LES COMÉDIENS. A rimitatîon du concert des aveugUs ^ on vit Tan- née dernière le Caffé des Nymphes. Les chanteurs et les chanteuses portoient de longues coiffures à la grecque , et chantoient des ariettes et des cou- plets (1). La foire Saint-Ovide ouvrait régulièrement le 1 5 août, et durait d'ordinaire jusqu'au 0 oc- tobre. En 1777, elle subit le sort qui avait anéanti la foire Stiint-Germain quinze ans au- paravant : Le 23 septembre , le feu (trit à la foire Saint- Ovide , vers minuit un quart ; en moins de douze minutes les flammes dévorèrent toutes les bouti- ques qui se trouvoient entre le jardin des Tuileries et la salle de spectacle du sieur Audinot : les se- cours arrivés très promptement préservèrent cette salle et tous les bûtîmeus qui étoicnt au delà ; il y eut 33 boutiques brûlées. Les infortunés marchands auxquels ce désastre causa des pertes considérables et difficiles à réparer pour quelques-uns , trouvèrent des secours dans la bienfaisance de plusieurs per- sonnes. Les sieurs Audinot et Nicolet , entr'autres , s*empresAèrent d'adoucir leur tnste situation en donnant, le 2G et le 27, deux représentations en faveur des incendiés ; le prix des places n'étoit point fixé; c'étoit à la générosité publique à le régler et à profiter du moyen qu'ils lui procuroîent de faire quelque chose pour ceux qui réolamoient sa pitié. Aussi a-t-on vu plusieurs persoimes donner six francs, et même un louis; on a surtout remarqué un particulier, très simplement vêtu, qui, ayant donné un double louis, ne voulut prendre qu'un billet de douze sols... La recette des deux repré- sentations données par le sieur Audinot s'est mon- tée à 1,400 francs , et celle du sieur Nicolet à 2,000 et quelques cents livres , attendu que la salle de ce dernier est beaucoup plus grande que celle de l'Am- bigu-Comîque (2). Il y avait encore à cette époque une autre foire, la foire Saint-Clair. « L'ouverture s'en fait le 18 juillet, disait le même annaliste. Elle dure oixiinaircment huit jours. Les marchands qui s'y rendent se placent le lon*,^ de la rue Saint-Victor. Les 8i)ectacle8 que l'on y voit consistent dans quehiues petits théâtres de (1) Almnnach fvrain , ou h« hlffirent Spectacies des BoiilcrarJs et dts foiret de Parié, année 1773. (2) Lia Sjyectadeê dafoirti et det boulevards de Paris , puur 1778. marionnettes et quelques animaux curieux. )> Celle-ci n'était que peu de chose, comparée a ses grandes sœurs, et la foire Saint-Ovide elle-même n'atteignit jamais l'importance et le degré de prospérité des deux foires Saint-Ger- main et Saint-Laui*ent. Quant à ces deux der- nières, l'histoire de notre théâtre se trouve in- timement liée pendant plus d'un siècle à leur propre histoire, de même que, pendant plus de soixante ans ensuite, elle se trouve liée à celle du boulevard du Temple. La Révolution porta un coup funeste à l'une et à l'autre ; les centres des plaisirs, des divertissements, des agglo- mérations populaires, se déplacèrent complète- ment à leur détriment, et le Palais-Royal d'une part, les boulevards de l'autre, attirèrent bien- tôt de leur côté les Parisiens désœuvrés. Mais on ne saurait oublier que c'est dans les deux grandes foires que nous venons de rappeler qu'ont pris naissance nos théâtres populaires, que c'est là que le public parisien a pris le goût de ces plaisirs scéniques qui lui sont devenus si chers, que c'est là enfin qu'on a vu naître l'O- péra-Conii(iue avec Le Sage, la Gaîté avec les Grands Danseurs de corde de Nicolet, et l'Am- bigu avec les jx'tits comédiens d' Audinot ; sans compter Curtius, ce premier ancêtre de M^'^Tus- saud et de M. Grévin, et les innombrables jeux de marionnettes dont nos enfants peuvent voir les descendants aux Tuileries et aux ê Cham]i)s-Ely8ées. FORLANE. — Voy. Airs a danser. FOR-L'ÉVftQUE (Le) ET LES COMÉ- DIENS. — TiC For-l'Éveque ! voilà un nom qui devait sonner mal à l'oreille des comédiens du dix-huitième sit»cle, car plus d'un dut faire connaissance avec cette Bastille au petit pied. Les comédiens , — j'entends ceux des grands théâtres, — étaient très protégés à cette époque ; mais selon la maxime : (c Qui aime bien châtie bien, » l'administration sui)érieure ne se faisait nul scrupule de les envoyer coucher quelques nuits en prison lors(iu'elle le jugeait nécessaire pour punir ([uehiue incartade de leur paît, et le public, trte chatouilleux à cette époque et fort au courant de ces coutumes, ne manquait jamais, pour la i)lus petite faute, jwur l'ap- FOR-L'ÉVÊQUE (le) ET LES COMÉDIENS. 887 parence même d'un manque d'égards ou de respect envers lui, de s'écrier avec ensemble, pour attirer le châtiment sur la tête du cou- pable : En 'prison! A V Hôpital! A la Force! Au For-TÉvêqtte! Et quand l'acteur était en faute, il pouvait tenir à peu près pour certain qu'il n'échapperait pas à la punition et qu'il irait en effet faire un tour au For-l'Évêque, qui était le logis le plus habituel qu'on lui don- nait en ces circonstances (1). Un jour. Carlin, l'Arlequin favori de la Co- médie-Italienne, s'avise, dans une de ses fré- quentes improvisations, de plaisanter, par une allusion facilement saisissable, sur un nouveau règlement édicté par le ministre de la guerre ; il ^t aussitôt envoyé au For-l'Evêque, où il a toute liberté de disserter à part lui, pendant quelques jours, sur les écarts de paroles des comédiens. — En 1777, une danseuse de l'O- péra, M"" Cécile (Dumesnil), se refuse, pour une raison futile, à paraître en scène et à rem- plir son service ; celle-là est conduite aussi au For-l'Évêque, malgré tous les égards dus à son sexe. — En 1781, Lays, chanteur célèbre du môme théâtre, véhémentement soupçonné de vouloir quitter Paris furtivement, est appré- hendé au coips chez lui , dans le milieu de la nuit, et dirigé sur le même lieu, d'où il est extrait deux jours après, sur son engagement écrit de ne plus chercher à s'enfuir. Dans le même temps, Florence, acteur de la Comédie- Française, ayant insulté son camarade Larive (l) Le For-l'Évêque était situé dans l'espace compris aujourd'hui entre le quai de la Mégisserie et la rue Saint- Germain-l'Auxerrois ; il avait été construit sur l'empla- cement de la grosse tour qui défendait au nord le pont de bois bâti par Charles le Chauve vers 861 et qui fut détruit une première fois par les Normands; il datait du treizième siècle environ. C'est là que s'exerçait tout d'abord la justice temporeUe de l'évêque de Paris, et que siégeait son prévôt j mais en 1674 le For-l'Évêque cessa de faire partie du domaine archiépiscopal, fut réuni au Châtelet et devint une prison pour dettes. Cela n'empêchait pas qu'on n'y enfermât aussi les jeunes gen- tilshommes turbulents , et surtout les comédiens indo- cUes aux ordres de leurs supérieurs administratifs, ou qui manquaient ou paraissaient manquer À leurs devoirs envers le public. Le For-l'Évêque fut supprimé comme prison aux environs de 1780 , en même temps que le pe- tit Châtelet ; mais on ne le démolit que vingt ou vingt- cinq ans plus tard. et s'étant battu en duel avec lui, après avoir manqué de respect au public, alla passer à son tour dix jours dans la fameuse prison. — L'an- née suivante, c'était une danseuse de l'Opéra, M"*' Théodore, qui était appelée à faire con- naissance non avec le For-l'Évêque, qui venait d'être abandonné, mais avec la prison de la Force, et, peu après, une de ses camarades, M"® Dupré, y était envoyée en punition d'une escapade un peu forte. Par malheur, ces punitions, pour justes qu'elles fussent quelquefois en principe, n'en étaient pas moins basées sur l'arbitraire, et l'on Siiit ce que l'arbitraire peut engendrer d'i- niquité. Or, cet usaçe odieux de l'envoi des comédiens au For-l'Evêque fut cause un jour d'un événement déplorable, en amenant la retraite prématurée d'une artiste qui était la gloire de la scène française, à qui elle aurait pu consacrer encore de longues années. Voici le fait, tel qu'il a été rapporté par un biogra- phe de M"^ Clairon : Un comédien nommé Dubois , aussi méprisable sous le rapport du talent que sous celui dos mœurs, avait attrapé par le monde une maladie indigne ; il se fit traiter et guérir par un médecin , auquel il' refusa le prix de ses soins. Un procès a lieu , Du- bois offre de jurer et jure devant le tribunal qu*il ne doit rien , il est acquitté. Ses camarades , per- suadés qu'il s'était déshonoré par un parjure, se cotisent , paient la somme et demandent à leur su- périeur l'expulsion de Dubois. On la leur promet ; mais ce Dubois avait une jolie fille ; mais cette jo- lie fille était maîtresse du maréchal de Richelieu ; mais ce maréchal était gentilhomme de la cham- bre, et exerçait, en cette qualité, un empire absolu sur les coulisses. Il n'eut pas honte de prendre fait et cause pour l'histrion , et il lui donna un ordre qui le réintégrait dans son emploi. Cet ordre fut tenu secret jusqu'au jour où l'on devait représenter le Siège de Calais^ dans lequel Dubois jouait ha- bituellement le rôle assez insignifiant de Mauni. C'était le 15 avril 1765. Le matin de ce jour, Du- bois fait signifier l'ordre qui l'autorise à jouer ; on l'avait déjà remplacé ; grande rumeur au théâtre : Lekaîn , Mole , Brizard , Dauberval , déclarent qu'ils ne joueront point et disparaissent ; Clairon prétexte une indisposition et se retire. Cependant l'heure du spectacle arrive , la salle se remplit , la toile ne se lève point ; l'afiiche annonçant le Siège de Calais, le parterre demande à grands cris le Siège de Ca- 388 FORCER L'EFFET. — FOUS (fête des). laie; on ne peut le donner. Alors de toutes les par- ties de la salle sYlèvent des vociférations ; les épi- tliètes de coquins, de marauds, de gueux, sont pro- diguées aux comédiens. En vain un homme de bon sens élève la voix, et dit, en montrant au foyer le buste de Molière : c Voilà un de ces gueux, qui a été et qui sera longtemps plus envié à la France que ne pourra jamais Têtre aucun gentilliomme de la chambre. 9 Ce ne fut qu*après plusieurs heures de tumulte que la foule se résolut à reprendre son argent à la porte et à se retirer. Le lendemain , les quatre acteurs que nous venons de nommer et Glaî- # ron furent conduits au For-rEveque : elle n*y resta que cinq jours ; mais profondément indignée de rinjuste affront qu'on lui avait fait subir, trop fière ix)ur s'exposer à le voir renouveler, elle jura de ne plus reparaître sur la scène, et tint parole. Clairon était alors Agée de quarante-deux ans, et dans toute la force do son talent. Voilà comment, par l'infamie d'un misérable, par l'indignité d'un gentilhomme omnipotent et dissolu, par cette coutume odieuse d'envoyer en prison des comédiens qui ne pouvaient même pas se défendre contre un excès de pou- voir, la scène française fut à tout jamais privée d'un des plus beaux talents qui l'illustraient. Et il ne faudrait pas croire que cette coutume barbare ne se soit pas longtemps prolongée : sous la Restauration encore, et jusqu'en 1880, on vit souvent des comédiens traités comme ils l'étaient sous l'ancien régime. Seulement, comme alors ni le For-l'Évêque ni la Force n'existaient plus, c'est à Sainte-Pélagie qu'on jugeait à propos de les incarcérer (1). (1) C'est d'aiUeurs à rEmpire qu'on doit le rétablis- sement de cette aimable coutume, comme on peut le voir par ces trois ailicles du règlement des quatre grands théâtres, signé par Napoléon lui-même, et daté du !•' novembre 1807 : — — Heureux temps, heureuses mœurs ! FORCER L'EFFET. — On dit d'un acteur qu'il force l'effet lorsqu'il manque aux lois du goût et de la sobriété pour exciter, par tous les moyens possibles, les applaudissements des spectateurs. Dans le drame les éclats de voix et les grands coups de talon, dans le comique les charges grotesques et les grosses pasquinades, dans le chant les coups de gosier excessifs et les fioritures de mauvais goût, par\icnnent souvent à forcer l'effet. Cela n'augmente en aucune façon, bien au contraire, le talent de l'acteur qui se li\Te à de tels écarts. FOUR (Faire). — Locution d'argot théâ- tral qui signifie : éprouver un échec complet. On dit d'une pièce tombée qu'elle a (c fait four », de même qu'un acteur « fait four » lorsqu'il joue un rôle sans y produire aucun effet. Na- guère, en province, cette expression avait un sens matériel plus précis : dans les petites ^ille8 de département où le théâtre était peu recherché et attirait peu de spectateurs, on disait que les comédiens avaient Uin Je Tdd^ Boit cLemeurer loul feul, à Dijon présent. Un lui faisait de grandes salutations; on lui offrait du vin et des fruits; il buvait, et com- mençait à chanter. Aussitôt tous les assistants, le haut cliopur d'un c5té et le bas chœur de l'autre, répondaient en élevant progressivement la vois et en Hni.ssant par lutter à qui crierait le plus fort, dirait le plus de facéties, gesticulerait de la ma- nière la phis grotesque. On sifflait, on raillait, on hurlait; c'était un ereseenih assourdissant. Quand les forces de chacun étaient épuisées, l'huissier, dans plusieurs églises du Midi , prenait la parole , et disait en langue romane : a De port mossenhor l'a- bat e SOS cossellier, vos fam assaber que tôt hom lo segua lay on voira anar, e aquo sus la pena de talhor la braia, tout pt'iaf ^atroir h haut Je ckaut- i€ê eoujiê. > On sortait alors tumultueusement et on |>nrcoiirait la ville on continuant à se lii-ier à mille extravagances. Indépendamment de cet abbé, nous avons dit que les églises cathédrales et celles qui relevaient directement du Saint-Siège élisaient un évêque ou un |iape des fous. Ce choix était fait parmi le peu- ple, au milieu de l'appareil le plus burlesque. L'élu était revêtu d'habits pontificaux, et, précédé do jeunes ecclésiastiques portant sa mitre et sa crosse, sa croix archiépiscopale ou sa tiare, entouré d'un clergé nombreui, affublé de déguisements divers, les uns masqués ou barbouillés de lie , d'autres dé- guisés en femmes, il était porté sur leurs épaules jusque dans sa maison. A son arrivée, on ouvrait 390 FOUS (FÊTE DES). toutes les portes et toutes les fenêtres ; on plaçait | ou le pape entrait dedans, et de là il donnait sa bé" un tonneau défoncé sur une des croisées ; Tévêque | nédiction à la multitude. Puis on se rendait pro- nmtif jart&D 4^ï\emawz4^nutfu\^r afomf ^ C - ^^'^1 ♦_* i C—- % % ^/ ' ^' ^ , ■» ^ , ^ ^î-.-^ :d|>teotof Ctip^v bvomc^noC uéi^ vckslbxàXitot W>«iu / ♦ ^ ^ * ^^^=1 A % S-^-2^-* *-* mm Vf at^tna TJ^tiCx-wmrAni ^ûfi^ xaltrin.ccc(e/ C » ** * » _ = —-ri « « inAvu«1^ef.|}«tt * ^* » ^ S— ^ ^- lUim ATc^d rnb^mn cmn««>ttx Cet usage barbare et anti-artistique, encouragé par le public, se prolongea pendant plus de soixante ans. On eut, en 1702, les Fragments de Lully, ajustés par Campra; en 1704, TiUmaqm, « Fragments des modernes, » arrangés par le même; en 1711, de Nouveaux Fragments de Lully: en 1729, de Nouveaux Fragments; puis encore des Fragments de différents auteurs en 1731, 1748, 1750, 1751, 1759, 1767, et d'autres que j'oublie. Cependant, à partir de cette der- nière époque, Tusage commença à tomber en désuétude, et l'on n'entendit bientôt plus par- ler de fragments. FRAIS. — C'est par jour qu'on a l'habi- tude de calculer les « frais » d'un théâtre, les dépenses nécessitées par ses représentations. Lorsqu'on dit d'un théâtre qu'il a tant de frais, soit 1,000, ou 2,000 ou 3,000 francs, on sous- entend toujours « par jour t>. En province, le chifire de ces fi*ais est évalué d'ordinaire sans qu'on y comprenne les appointements des co- médiens; à Paris, au contraire, tout est com- pris. Depuis les habitudes somptueuses de mise en scène qu'on a prises dans ces vingt dernières années, les frais journaliers des théâtres pari- siens sont devenus énormes, et parfois fantas- tiques. Sans parler deTOpéra, dont la dépense s'élève à 15,000 francs environ chaque fois qu'il ouvTe ses portes au public (les frais d'é- clairage seuls se montent à 1,300 francs par représentation), il est tel théâtre de drame ou de féerie, comme le Châtelet ou la Porte-Saint- Martin, où la somme de frais quotidiens flotte entre 4,000 et 5,000 francs, selon l'importance des dépenses occasionnées par la mise en scène de telle ou telle pièce. Le chiffre est à peu près le mêpfie en ce qui concerne TOix^ra-Comique, en raison des exigences des chanteurs et du nombreux pereonnel syraphonique et choral nécessaire. Certains petits théâtres de genre, comme la Renaissimce, par exemple, atteignent parfois, quand ils ne le dépassent pas, le chiffre de 3,000 francs. Enfin on voit de simples cafés- concerts, tels que l'Eldorado, n'en être pas quittes à moins de 1,600 ou 1,800 francs par jour. Pour donner une idée nette des frais d'ex- ploitation d'un grand théâtre, nous allons re- produire, d'après un document officiel, le Rap- port sur le budget des beaux-arts présenté à la Chambre des députés en 1883, le détail du budget des dépenses de la Comédie-Française pour l'année 1882 : Administration 63.216 60 Acteurn aux appointements 164.371 55 Musique 22.074 90 Employés de la salle 38.000 d^ du théâtre 27.300 d^ des magasins, traités à foi-fait 35 . 989 80 d^' machinistes 40.354 50 Pensions des sociétaires 85.649 65 d'' des acteurs et actrices 17.800 d° des employés 11.477 50 Secours alimentaires 20.560 20 Comparses et coryphées 25.086 85 Accessoires, frais de la scène.. . . 3.483 25 Feux ordinaires et extra , jetons . . 38 . 600 Travaux littéraires, indemnités, gratifications 25.000 Réserve administrative 36.400 Impositions et patente 4.688 55 Assurances 11. 657 60 Affiches et programmes 19.553 Éclairage 89.092 85 Chauffage 13.000 Costumes, indemnités de toilette. 142.003 Droits des hospices 186.954 70 Droits des auteurs 268.621 80 Garde 8.161 Sapeurs*pompiers 12 . 181 90 Décors et accessoires (peinture) . . 33 . 292 45 Bois , toile , cordage , quincaillerie (décors) 15.016 30 Mobilier et tapis de la salle 7 . 285 35 Impressions 5 . 744 50 Fournitures de bureau 2 . 162 40 Archives, bibliothèque, galerie, portraits 875 35 Fournitures et dépenses diverses.. 19.119 80 Entretien de Timmeuble, nettoyage et matériel 23.108 65 Tapissier et mobilier de la scène. 24.047 15 A reporter 1.541.831 05 FEANCATRIPPA. — FEAPPEK LES TROIS COUPS. â95 Report 1.541.831 05 Allocations aux Bociétairea 199.207 65 Réserve du miniittre 48 .000 Réserves pour réparations 10.000 Beprésentalions à bénéfice 22.000 Matinées 24.609 50 Frais funéraires. 800 75 Affaire Sarah lïemhardt 81 09 Souscription monument Barrière.. 500 Beconstitution de la rente 3''/o par annuîléa C.876 15 Total.... 1.853.906 79 Ce total d'un million H53,906 fr. 7'J c. dorme une moyenne do 4,87H fr. 70 c. de frais par re- présentation, il niison de 380 piir an (y eomi>ris les matin «33). Il est assez curieux de placer en regaril de ces chiflres celui des frais occasionnés pai- une représentation de la troupe de Molière en 16()(t; le voieî, d'après le registre fumeux de son ami La Grande : Germain, portion . Sai nt- Miche 1 , portii tîc loges t M'"" Gobert poiir contrôle ■eiise (le loges. . .. Brouart , M"' Lcstaug la recette ( La Genty, ou Brillart et si de loges Malliieu, décorateur La aen-ante de M. Foveli, coi.inie concierge ■Violons Chandelles Affiches pour deus fois, rouge et A Charles, valet c Collation do vin, tisane, pain. 43 15 Quarante-irois livres quinze sous! Nous voilà loin des comptes d'anjourd'hui. A la vé- rité, le droit des pauvres n'existait pas alors, le droit des auteurs pas beaucoup plus , et noua n'avons pas ici d'appointements d'artistes. C'est égal, ce chiffre modeste a de quoi faire rêver nos directeurs actuels. On se rendra compte, au surplus , de l'im- portance qne doit prendre le chîlTi'e des frais d'un grand théâtre, en songeant à ce qu'il re- présente : loyer, impàte, assurances, droits d'auteurs, droits des pauvres, acteurs, orches- tre, chœurs, comparses, danse, machinistes, administration, contrôle et location , décors et costumes, éclairage, affiches et affichage, garde et pompiers, etc., etc. Lorsqu'on réfléchit qu'un théâtre fait vivre directement, à lui seul, jus- qu'à deux, trois, quatre et cinq cente person- nes, on comprend que son budget soit lourd et que la somme de ses frais journaliers soit singulièrement considérable. FRANCATRIPPA. — Francatrippa, dont Icnom indique suffisamment l'origine italienne. était un tj'pc de farceur populaire qui fut t meux à Paris au seizième siècle. On ne sait pas grand'chose de lui, et il n'en reste guère que l'excellente charge dans laquelle Callot nous l'a montré en sou costume traditionnel, avec son nez crochu, son menton pointu, son chapeau k double plume et sa batte, faisant une gam- l>ade burlesque. FRAPPER LES TROIS COUPS. — Lors- que tout est prêt, qne le décor est posé, que les symphonistes sont à l'orchestre, le sonflUeur dans son trou, chacun à son poste, le régisseur fait faire place an théâtre, et, placé derrière le 396 FRISES. — FRONTIN. rideau d'avant-scène, certain quMl peut compter 8ur le concours de tous, frappe solennellement, avec son lourd bâton, les trois coups que le public attend toujours avec quelque impatience et qui sont le signal du commencement. Dans les temps ordinaires, ce signal n'a d'importance qu^en ce qui touche la bonne allure et la marche régulière du spectacle ; mais lorsqu'il s'agit de la première représentation d'une œuvre consi- dérable, d'une œu\Te qui peut être appelée à tenir une place, à marquer une date dans l'his- toire de l'art, que d'anxiétés, que de craintes, que d'hésitations, que d'espoirs semblent con- tenus dans ces trois coups que le régisseur fait résonner à intervalles égaux sur le plancher de la scène. Et pourtant, ce Ixiton en lui-même est fort insensible, et il agit avec la même in- différence, la même impassibilité, qu'il s'agisse d'Hemani, des Lionnes pauvres, des Hugue- Twiêy du Pré aux clercs, ou du dernier des vau- devilles qui sera joué dans le dernier des bouis- bouis par les derniers des comédiens. FRISES. — Les frises sont les bandes de toile peinte qui, dans un décor ouvert, repré- sentant un pavsagc , une forêt, une place pu- blique, descendent du cintre à chaque plan, pour cacher le vide des dessus du théîitre , et , tenant toute la largeur de la scène, viennent porter, à chacune de leurs extrémités, sur le sommet des châssis de coulisses. Bien que ce mot dc/rtses soit toujours d'un usage courant dans nos théâtres, cependant les machinistes ne s'en seiTent plus professionnellement, et donnent à ces bandes de toile le nom de pla- fonds; et pour les distinguer du châssis formant vraiment plafond qui vient s'abattre sur les décors fennés, ils donnent à ce dernier le nom de plafand plat FROID (Un). — Au théâtre, où l'action scénique, dans quelque situation que ce soit, ne doit jamais fléchir, où l'action purement matérielle ne doit jamais laisser à l'esprit ou à l'œil du spectateur un instant de repos, on ap- pelle « un froid j> tout ce (]ui peut donner lieu sur la scène à un moment, si court soit-il, d'hésitation, de vide ou d'inaction. Le « froid » peut se produire, soit dans telle partie de l'œu- vre même, soit dans la façon dont elle est in- terprétée : tel fragment de dialogue doit être plus serré, soit dans ses réparties, ce qui dépend de l'auteur, soit dans son exécution, ce qui dé- pend des comédiens, sous peine de produire un froid. Parfois un geste, un mouvement, une passade, un peu de vigueur donnée à la diction (f une phrase, suffisent à échapper au froid et à le faire disparaître ; une entrée mal préparée, une sortie faite sans entrain, peuvent amener un froid et feire manquer l'effet attendu. Un auteur dramatique exercé, un metteur en scène habile, sauront toujours échapper au froid, cha- cun en ce qui le concerne, et les répétitions sont là pour leur permettre de trouver les moyens d'y remédier quand il se produit. FROXTIN. — Personnage de comédie et d'opéra-comique qui est devenu presque un type, et qui a pris naissance sur notre scène dans les dernières années du dix-septième siè- cle. Frontin est un descendant un peu dégénéré des Soapin, des Mascarille, des Crispin et des Gros- René, un précurseur un peu pâle de Fi- garo, dont il n'a i)i l'esprit sémillant ni la large envergure. C'est un valet rusé, malin, matois, que l'on trouve mêlé à toutes les intrigues, qui jacasse sans cosse, fait la cour aux soubrettes, soigne autant qu'il le peut les affaires de son jeune maître sans pour cela négliger les siennes, et qui se fait rcmar(|uer par sa bonne humeur, son envie de bien vi\Te et son esprit un peu vulgaire, quoique parfois réel. Il est ^Tai que l'opéra-comique, en s'emparant, il y a tantôt un siècle, de l'ancien Frontin de comédie, nous l'a un peu gâté.en Je vulgariaant peut-être plus que de raison. Je ne sais si c'est Dancourt qui a inventé ce personnage ; toujours est-il qu'on le trouve dè^ KiOJ.dans une de ses comédies, ks bourgeoises à la mode, et dans une autre, les Curieux de Compiègne, i*e])i"ésentée en 1 (»98. Marivaux l'employa ensuite, dans P École des Mères (1732), les Serments uuîiscrets (1732), C Heureux Stratagème (1733), le Petit- Maître corrigé (1734), la Méprise {17 Si) , les Sincères (1739), VÉpreuve (1740) ; puis ce fut Philippe Poisson dans F Amour secret (1740), Saint-Foix dans le Sglp/ie (1743), Gresset dans le Méchant (1747), etc. Il de\int même le hé- FUNAMBULES. — FUREUR (faire). 897 ros de certaines pièces, telles (jue les Ruses de Fronttn, Frontm marï garçon, et autres. Tou- tefois, Frontin était déjà malade lorsqu'est survenue la révolution de 1830; celle-ci lui a donné le coup de ^âce, et depuis lors personne n'a été tenté de le ressusciter. FUNAMBULES. — C'est le nom que les Romains donnaient aux danseurs de corde, dont l'art était très pratiqué chez eux, après l'avoir été chez les rJrecs. Les funambules ro- mains étaient extrêmement habiles, et diverses peintures découvertes dans les fouilles d'Her- culanum donnent des preuves convaincantes de cette habileté. Les danseurs figurés sur ces peintures offrent une étonnante variété d'atti- tudes, dont les unes gracieuses et les autres grotesques. Ils représentent des satyres et au- tres personnages de la Fable. Les uns portent le thjrrse , dont ils se servent comme d'un ba- lancier; d'autres jouent de la Ijre, ou de la double flûte, en dansant sur leur propre musi- que; d'autres encore versent du vin dans des vases de formes diverses. Au reste, les Ro- mains étaient passionnés pour ce genre de spectacle. FUREUR (Faire). — On dit qu'une pièce ou qu'un artiste fait fureur, lorsque le succès de cette pièce ou de cet artiste est éclatant, fait l'objet des propos de la ville entière, et amène chaque jour au théâtre une foule avide et impatiente de plaisir. — Les Italiens, qui emploient dans le même sens la même expres- sion, se servent aussi dans ce cas du mot fatm- tismo. Ils ont tout dit quand ils ont constaté que tel ténor ou tel opéra non seulement yà/w- rore, mais encore fa fanatismo. G GAGISTES. — C'est le mot qu'on em- ployait jadis, à l'origine de nos théâtres, pour désigner tous les artistes ou employés qui ne faisaient point partie du personnel scénique proprement dit, c'est-à-dire des comédiens. Le | mot était bien appliqué, et avait sa raison d'être. En effet, les comédiens alors étaient toujours en société, et chacun d'eux courait les chances, bonnes ou mauvaises, de l'entre- prise ; au contraire, tout le personnel, en de- hors d'eux, musiciens, comparses , danseurs, employés, ou\Tiers, était payé, gagé par eux, et ne courait aucun risque. De là le nom tout naturel de gagistes. Pour les employés propre- ment dits, et surtout dans un ordre supérieur, on leur donnait parfois la qualification d'^- cms. GALERIE. — Toute salle de spectacle est entourée de deux, trois, quatre, cinq ou six galeries superposées, formant saillie, et qui s'étendent sans interruption d'un côté à l'autre de l'avant -scène. Dans les théâtres d'Italie, ces galeries sont uniformément divisées en lo- ges ; dans les théâtres de France, les unes sont de même divisées en loges , tandis que d'autres, tout à fait découvertes, sont garnies de rangées de stalles ou fauteuils. Ce sont ces dernières qui prennent le nom de galeries proprement dites, et on les appelle premières, deuxièmes, troisièmes galeries, selon l'étage auquel elles sont situées. — (Voy. Balcon.) • GALOUBET. — Dans le langage thc^tml, galoubet est synonyme de bonne voix, organe solide et résistant. Qu'il s'agisse d'un comé- dien, on dira qvî'ila un bmi gaJaubet, s'il est en possession d'un organe vibrant, sonore, bien timbré ; si Ton parle d'un chanteur à la voix corsée, puissante, étendue surtout, on dira qu'tï a du galoubet, GANACHES. — Classe de rôles qu'on qua- lifie aussi quelquefois de pères dindons, et que cette double appellation suffit à caractériser. CeB rôles de vieillards ridicules et burlesques rentrentdans l'emploi des grimes (Yoy. ce mot). GARÇON D'ORCHESTRE. — Le garçon d'orchestre, dont le rôle acquiert une certaine importance dans les théâtres lyriques, est un employé qui, comme son titre l'indique, est spécialement chargé de tout ce qui concerne l'orchestre, personnel et matériel. Il doit tenir l'orchestre soigneusement en ordre, prendre soin des gros instruments qui y restent tou- jours, tels que les contrebasses, la grosse caisse, le tambour, les timbales, entretenir la propreté dans le foyer, porter les bulletins de service, distribuer la musique sur les pupitres lors des répétitions et des représentations, et la ranger lorsque l'exécution est finie, faire signer la feuille de présence aux artistes, prévenir ceux-ci de la fin de l'entr'acte, enfin, pendant le ser- vice, se tenir toujours à la disposition des chefs, qui peuvent avoir besoin de lui. GARÇON DE THÉÂTRE. — Les garçons de théâtre sont les hommes de peine et les conmiissionnaires de l'administration. Ce sont des employés qui sont chargés de nettoyer, de tenir en ordre toute la partie du théâtre qui comprend la scène et ses dépendances, et de se tenir, pendant les répétitions et les représenta- tions, à la disposition de qui peut avoir besoin d'eux pour un objet quelconque. GARDE (La) AU THÉÂTRE. — Dans tout lieu public où se trouve une grande réu- i GARDE (LA) AU THÉÂTRE. nion d'hommes, la présence de la police eet toujours nécessaire, soit pour prévenir tout désordre, soit pour l'arrêter, soit pour le répri- mer. On trouvera an mot ]>0lkè les renseigne- ments nécessaires sur ce point ; ici nous n'avons à nous occuper que de la garde militaire char- gée d'assurer la sécurité des théâtres pendant leurs représentations. Yoici ce qu'un document nous apprend en ce qui concerne la garde de l'Opéra en 1759 : — u Pourassurerlabranquillitc de ce spectacle, i! y a une garde du régiment des Gardes- Fran- çoises, composée de quarante hommes et trois caporauï commandés par trois sei^ns et nn des deux seigens-majors , et il est payé à cette garde par chaque jour de représentation wje somme de 3G li\Tes prélevée sur le produit de l'Opéra, et 500 livres aux deux sei^ens-majors par chaque année par forme de gratification. Ces soldats se tirent de toutes les compagnies, et on choisit toujours les plus sages, les plus braves et les mieux faits, ainsi que les sergens qui les commandent; ils y sont en faction comme chez le Roy, tant aux portes que dans l'intérieur de la salle, jwur^ contenir Us spec- tateurs dans te respect dû à une maison roi/afe (1). 1 Noua voyons qu'à la même épo- que, M la ^rde des Comédies Framjoise et Ita- lienne est composée d'un serç^ent-major, de deux sei^ens, de quatre caporaux et de trente soldats du régiment des Gardes-Frauçoiscs. > (1) Le> Spedoclti dt l'ai 4<»(> ♦■.AL1'E-L«'3îE. T'^t^ui't K ri aiiî- î»iii*' liird. iiciu^ ^'.mune' ei. ]/i'r':ut LfVi'ûtni :.»!.. e; ï*^ ini'-â^ fruu'.'uitjef ou: 2 ai; ]>ia'>. a u. ira-ù^. iiaiioiiui'.. ' Lt îriL-a*. û* î'^.'jH'n. ee: ff.»ui] •■*•*- d*: »• «irium-t iioniuit* dt ît iriird*. iia^i'jiiLj». . '.-'"iLjirir avni W-TireUfe: 'juairt caji'»rui:i- Lf* j*>iir»- dt "tilI. «^lit en: amnneuL*^ à*r -.mairLUi*: nomnieK. > (iHiuu; h il C'.»iii^jit- Friiii'^iiJHt . vni'.'i f-minw^TiT eiit 'Ai imrd*-* : — « Lfc tri^rd» d* il. '^. ■.»iii«.'ûi*- ««: '■ iu.]»'.*"t d* c-ïl- ' îuuîi:*. iicmiiufii'd*.- m irard* nuiioiiait jiuri'îieLii*:. a Kfc '■■■■»:.•" : dj:: ;:?-**i;a'ij*^r»' e: 'juarau:^ i5'»idaif def C'.HLjjai'iiieK di. 'j'jiiir*;. f-turL.if' jiar ;a ]»!viLifrt «j: wooLidt d'vigJ'.'L. 'juj »»-'m rt-levt* L''»ufe ief iii'ji»;. J.K- j)iuK. ♦::■■: ^■li■•lllu:r*:*' f-.'urni^ ]«ir ia pî^'iiiifît di^■j^^j '-•:-. ui M;r:r*.*:iî *.•: vu. cajifiraL Cei'u*: ;rardt *;«: ^-.'Uiiiiaijd-^. jjar lll iieuitiiaiii f»u ^'.•U'ï'jjeuivnaîi; ci: dt '..uar».i*T. d^/ui h^rj'iUk •.'I fjuairt «iji'ira'j-'i rei*.'^».'^^ :'iUk j*?t deiLi in'.'ifc. J ] V i* : ' "U ^ j *ih '■ •■. •" T> uii 'Ji; ; 'iui : ii *: . : i*'u:'e naii: '. «u M.»UK-li»/Uueiiaîii diih d*r jk.iIi'j*:. Le r.i: a»iUi*:«!i *.■; ♦•nirytieiiî. jKrjir vt'Ii^fr a'js a'j'.'idvu»- ci: f*^u. uu»r ;rard*: dt 'juatr*: jy.'inpier»;. ]»iav> daiië d;3Vr*fii»' *^udrr»ii* du ùi*^;.-*.-, «vaii; auj-iret d'eu:: ul tnyau dii^ jK.»!Lj»e:^.'UJ'.»u!> prêt a f'.'um.T dt J'eau au î.>rtiiii«:'r KiiTiial. *ii 'yjui fjïnxr'jii 'v.irreKjfirjd il uue jy.'iuj.it piav^ prev d'ui réM^nr-ir y; ^^*r^■j^: par hu.il yjjdal* du T*i"S-iii*fiii d*;h :^a^d*r*^ i^a- tionaiet; jjar>j*:'::ïje^- c.'iLimaiidéb jjar "ûl •>*?.••- ;r';iji *?l uu oajK.iral ] ;. • Vil dwrei dt TA'jWi'iiirn'iît naijonaîfr dt iaii- TÎer ITÎ^l êLal»:i*5^ail i^an. 7* i»* dJKjyjvhion»! soi va ni*» : — ^^ Il ij'v aura au ^5pe'JLa^■i'b '^li'uju'r îrard*r txiérieurt. d'.»m le*; irr»uji»* dt ji:ni»r li*; beroni yAiii f.-ht^rj'^. h] est îj"**>: fh^u*: \h 'sdk '■u l*rE ofhtjitfrn UL'iiiJcijjauï i«rur*:ri f*?ral'.'.M la r^riui^iiio:! f^rj^-vli»:. J! v tura vrj-'Vjri; -j!. '»b p]u>?i»:'jP: 'iffif •;<:•> '.-ivjjh daii»^ î*i:i'u'-'ri';irr d«i#' haLe*. »:a Ib ij'ârd'; :.*v j.n.-'jj*>r*.-rei 'jue dau»; k ':u>: 'jÙ la »^ûr-v- j.»ii"r.»]j"jui»r M-.'raJ*. Mo:Ljir'.«î;.:b«:. •*: «ur la r».*'j:;>:iioL '.ipre^v: d»: J"otîJ'-i^/r v?'. j.'. Je'^u*:] w- '.-oijfonxi^rra aui jOλ; v: !»-;.''j«/!ij«.':jU d'. jx.ij ] c^. To u : ' • : :■'.• vp rj i^ j^ -^^j - rj *...•>- r j i » »,. v i ^^; , SouE la iàWtauraiy.'ij. .a jy^^x- d'>. tr.'â'.MA '-laii r;/;:jfi»3»r au>: »^^'Jii* d'urj*; ;'aj"'i*; '.o;.'.jy.»wr', d': 'j'rjjdanu'rg 'ri dfr v.-J'idir d'.-: n-^rJ.Vj'rM' 'j'r Ja *. , //♦.« .*/>'. '.îa'.'ej 'ie J'*.''Tuit . «ol^ le?- c»r .'::••> d'iiL u:: mduu: . c'r.L 'ilîi'.'ier d^.- «r^.'udunu'jrj--, d'i'X •:»&'.•)«_•: dt il niiiib'L dt TK rr» dv " 'fti'.'j-! d* ]» ô't uàm.- nifit rut : vt- dL '.i iian ie: . A ;: i ' 'urd 'i j r. ! . it «*er^ i r**. d"'«rdrt d*^ Lii^rrt*, v.iu: •_x:^ri*'T:T . tr'.»innjt reia'îjiÎBfihi: it dt-'jr*.'; de 17:*:. *>•: .ar» thlt ux: pej'.»t.»L dt îrardef r'.":iL:».j'/i.:ii6 S'iu»- j* r'.iiL- iiinnd*:meiri c'iil *i:rj*-/.fii .i-T. *:: ]ia! 'jneiiixit* îTurdieut^ d*r jl MlI.'l 'TAl:I»E«l:Oi:E. — Ir. nj •: ê^^Lii-uî r^iriî- samiitiit d* i'j.--:u-iuv. ••: d-.'*;rn'.- iî* '.• ili^'-zi»!. d*r vom îiîne*' ïl'i'lZ. '.••iij'.'îifL d'il T'-^j-'àt-TT^ïiir reiLj'iT S--L -.-IL]*] '.. <'":j>'t: -ïiiir'w-irr*. ! la^jd» •iL*a l'arifr :-ou: '.•-■ :;. r*.L:r- duii"' jt -onTUfM ] »r. 'J irtfiïieL: c:: ■J-:: r-'.Ti i «un] û /ar.-L'zr jai^ ] "ad:i.:LJ mn*: î iL -i :. : .•ir-a: r- i. :• ■ ■ j v". - - 1- ] •] iLJTJ-iiiT ♦.*: r*;s>. a la 'j bi*:'::^ û-. ':-:^-: - : ■ . . . ' a ' "i^-iir i. ' a ji^iii a jm:tv-..t _m'l:;i- •>'Ttv:>r?- -jt^ :-«ljt*::--rï' cil** (U ri'U , ji pa-"!"'. '.-.'ntrti.-rL d*. :»r: Tînct:. ô'«Li iei- aj»]»'.Viyr':ue:.if <"iji ':Lr'-:Jrr-jLJvLî TlIi*- tu:- ciei-ue»-. e«: '•'•::::•- Ôt i»^. f-ur:.!: -'j_-:i:éiu*- Lc»iif j»;»r ';o«t:-^*.'-. ;'«> -e- :ib":iilj-:i.".-iif irt-^issatr** a v.'i »j'j_]ij •!. El K -'■•:. •>•:..'•: _l"ul «•■:! ib-'/ii- t?»-. «i-L î«r- vrj-T. ■■■■..•: .-> T.»'/» dr d:ijere.iji* vM^-iyf •,'„; v.i!.: rr':»:'r'-.VL'>.H •=*:;: ïl Tlztiltî de* iii»5â:'^ d-: Pa-."- oi ^v. r-.ijîro :• «T^Tût du éir»: apjirw: a .'■','.•': ; : ::j- v- 1 icv. M-z^iJ^saUK-, Lnui^A'IJJ. L'.c:^ A'JV, L.■-^XY.L.cl-XTL «.■•p'>'j ut r*.- vo. u: ■ • •• :ifc : :t . : :. : f ■" ■m»*;?' ri. i ";: Lairi* . eu."., avis'.' j*-»: a':"*;iî*^-:r*ri' *i.f^ /o-zj: Ut-i'-ssaires a ';ha';VTj d*».y;:. v-i»: '^-.^ '■.-hii'à^survf . t->:t*. ar- A'jih^. ifc ;;ar'i»r-,' '.:*»': d*":L O'-il-'Ijv:. uHi.'Uri'Tiï 0»: r^av ar. •.'k^-*.-.]': '.rj-pv: f-.-r. iL^Tiona:.:-:-. e: doh--':ij': «iiT-'; pv^^r iui ]\^A\\ d- s.îiLî' îu^e?- Ja^Ji^. ijo*» a'ryr jri- jibri-ieii?. -/ji ^v4.kL: de •/rajAi' yryj^rjrjr-^. i;"h«>:La:î:L: Tta*. n cas *if:\i*^::\. a «^'adn.-Bser a •■"^-ilo-"'::!: d-. c-cx-c^i da/i»» r;:, ;:;orjjf:Li d*tTL*r»arrr. >:-. ■..: u-or? «rvaii a J';Tjr c}ibri:v-. CViai: a :;:.-: ■::•■:•.:.:;{ cni J*'.';j :/avaii par. sur àb dij^::- -Ir !'L.:::mevî d': j'ari-iVr, j'rE îiiviLt* id-.r^ e. !ts r..v:-:.t< sc-rc- p--rj*i- qu'aujourd'hui, v: T- •:: >V:i rê:..irri .-•.'•ir.p:*^ I ]i;>r C'.-iv: iieiit^ tuj].'I:-:uv -lUv I^.ivni.nd Poif- GAVOTTE. — GENTILSHOMMES DE LA CHAMBRE. 401 son, le fameux Crispin de l'Hôtel de Bourgo- gne, adressait au duc de Créqui quelques jours avant la première représentation de la Mère coquette, comédie de Quinault dans laquelle il était chargé d'un rôle fort important : Let Amans brouillés , de Quinault , Vont 80U8 peu de jours faire rage : J'y joue un marquis, et je gage D'y faire rire comme il faut. C'est un marquis de conséquence, Obligé de faire dépense Pour soutenir sa qualité. Mais s'il manque un peu d'industrie , Il faudra, malgré sa fierté. Qu'il s'habille à la friperie. Vous, des ducs le plus magnifique, Et le plus généreux aussi, Je voudroia bien pouvoir ici Faije votre panégjTique. Je n'irois point chercher vos iUuatres aïeux Qu'on place dans l'histoire au rang des demi-dieux. Je trouve assez en vous de quoi me satisfaire : Toutes vos actions passent sans contredit... Ma foi, je ne sçai comment faire Pour vous demander un habit. Chappuzeau, dans son Théâtre-François, si- gnale ainsi les frais que les comédiens de son temps faisaient pour leur garde-robe : Cet article de la dépence des comédiens est plus considérable qu'on ne s'imagine. Il y a peu de piè- ces nouvelles qui ne leur coûtent de nouveaux ajus- temens , et le faux or, ny le faux argent , qui rou- gissent bien tost , n'y estant point employez , un seul habit à la Romaine ira souvent à cinq cens es- eus. Ils aiment mieux user de ménage en toute autre chose pour donner plus de contentement au public, et il y a tel comédien dont l'équipage vaut plus de dix mille francs. Il est vray que lorsqu'ils représentent une pièce qui n'est uniquement que pour les plaisirs du Roy, les gentilshommes de la chambre ont ordre de donner à chaque acteur pour les ajustemens nécessaires une somme de cent es- cus ou quatre cens livres, et s'il arrive qu'un même acteur ayt deux ou trois personnages à re- présenter, il touche de l'argent comme pour deux ou pour trois. GAVOTTE. — Voj. Airs a danser. GENTILSHOMMES DE LA CHAMBRE. — En raison de la subvention qui leur était DICTIONKAIRB DU THÉÂTRE. attribuée sur la cassette royale, nos grands théâtres étaient placés jadis sous une sorte de tutelle que le souverain faisait exercer par tels personnages qu'il lui convenait de choisir. Tandis que l'Opéra relevait directement du mi- nistre de la maison du roi, la Comédie-Fran- çaise et la Comédie-Italienne étaient chacune sous la dépendance de quatre gentilshommes de la chambre qui exerçaient ces fonctions par quartier, c'est-à-dire chacun trois mois par an- née. La surveillance de nos théâtres était pour ces grands seigneurs charge fort enviée, en rai- son des privilèges familiers qu'elle leur octroyait à une époque où la dissolution des mœurs avait atteint ses dernières limites ; aussi , parmi ces gentilshommes-directeurs, voyait-on briller les plus beaux noms de France, ceux du duc d'Aumont, du duc de Duras, du maréchal de Richelieu, des ducs de Créqui, de Fleury, de Saint- Aignan, de Beau\illiers, de Mortemart, de Gesvres, de la Trémoille, de Tresmes, de Yillequier, de Fronsac, etc., etc. Il serait assez difficile de définir avec exactitude et précision les fonctions dont ils étaient chargés : il est certain cependant que les gentilshommes de la chambre avaient la surveillance de la comp- tabilité et de la gestion financière, qu'aucun emprunt ne pouvait être souscrit par les comé- diens sans leur autorisation, qu'ils devaient si- non rédiger, du moins approuver tous les règle- ments et veiller à leur exécution, se faire l'arbitre de toutes les difficultés qui pouvaient s'élever entre les sociétaires, maintenir à l'égard de ceux-ci les droits du pubhc, etc. On sait aussi qu'ils étaient responsables du bon ordre dans les théâtres dont ils avaient la surveillance, et qu'à ce titre ils étaient juges des différends qui surgissaient souvent à cette époque entre les spectateurs et les comédiens, et avaient le droit, selon le cas, d'infliger à ces derniers certaines « punitions » qui se traduisaient soit par des excuses au public, soit par des amendes con- sidérables, soit même par un emprisomiement plus ou moins long. (Voy. FoR-L'ÉvÊQUE.)Leur pouvoir d'ailleurs était absolu, comme leurs dé- cisions étaient sans recours possible. La Ré- volution détruisit tout cela, avec bien d'autres choses ; mais l'Empire, qui singeait la royauté, établit des GIANGURGOLO. — Giangurgolo est ime variété du caractère Capitan, dont il était le type calabrais. Il appartient donc à l'an- cienne comédie italienne, qui avait emprunté à la comédie espagnole le véritable Capitan. Comme celui-ci, Giangurgolo est un faux brave, toujours prêt à faire le fendant avec qui ne lui répond pas, mais rentrant sous terre à l'appa- rence du moindre danger. Avec cela très entre- prenant avec les femmes, et, de plus, doué d'une voracité effroyable que son nom caractérise suffisamment, car Giangurgolo signifie Jean le goulu, Grand' gueule. Au moral, c'est un être gourmand, libertin, poltron, vantard et vo- leur ; quant à son aspect extérieur, on l'a décrit ainsi : long nez de carton, apte à flairer le ma- caroni d'autrui, moustaches à faire peur aux moineaux, feutre large et pointu, interminable rapière pleine de toiles d'araignée et pour- point écarlate aux manches jaune pâle rayées de rouge. GIGOGNE (Dame). — Dame Gigogne, connue plus familièrement sous l'appellation de a Mère Gigogne », qui lui était bien due, est un type de notre ancien théâtre , qui s'est rendu fameux plus tard aux marionnettes, en compagnie de Polichinelle, et qui, devenu es- sentiellement populaire, a reparu à diverses reprises sur quelques-unes de nos scènes pari- siennes. Dame Gigogne était le type de la fé- condité maternelle : commère délurée, couveuse effrénée, on la représentait souvent en géante, donnant l'essor à tout un régiment d'enfants qui, en présence des spectateurs, s'échappaient de ses vastes flancs et sortaient en courant de dessous ses immenses jupes ; c'était d'un effet irrésistible sur le public. Avec cela « forte en gueule î) , maîtresse langue , à la convei*sation colorée et pimentée, elle avait avec Polichinelle des entretiens empreints d'une saveur gauloise qui plaisaient à nos pères, mais dont il serait difficile aujourd'hui de reproduire les accents vigoureux. Quoique son origine soit assez confuse, on peut affirmer qu'il n'y a pas loin de trois siècles que dame Gigogne jouit de son immense po- pularité, car voici ce qu'en dit Charles Magnin : — (( Dame Gigogne est, je crois, contempo- raine de Polichinelle, ou de bien peu d'années sa cadette; elle a commencé, comme lui, à s'ébattre, en personne naturelle, sur les théâ- tres et même à la cour de France. On l'a vue aux Halles, au Louvre , au Marais et à l'Hôtel de Bourgogne, avant de l'applaudir dans la troupe des acteurs de bois. Je lis dans le jour- nal manuscrit du Théâtre-Français, à la date de 1G02 : a Les Enfants sans-souci, qui ten- n: toient l'impossible pour se soutenir au théâtre (( des Halles, imaginèrent un nouveau caractèi-e « pour rendre leurs farces plus plaisantes. L'un le vieux dic- ton : € Vérité en deçà, erreur an deli ; » mais cela prouve qu'au théâtre, comme en géogra- phie, il j a des latitudes. GRIL. — Le gril est le plancher à claire- voie qui, placé dans les combles du théâtre. GRIL. — GRIMER (8E). 18 du dernier corridor du cintre, s'étend sur toute la surface de la scène. On y voit une foule do timibours de différentes grosseurs, de moufles de toutes sortes, enfin tous les cngrinB et corda^'cs nécessaires nu maniement et à la uiana-uvre des décora. Le lecteur trouvera au mot dessue tons les détails relatifs au service du gril ot à son rAle dans la machinerie théâ- trale. Ce nom de gril est donné à ce plancher parce que les traverees qui le compoeent, au lieu d'être exactement jointes ensemble, comme celles d'un parqnct, sont écartées les unes des antres comme les branches d'un gril. GRIMACIER. — Une des variétés innom- brables du genre saltimbanque. Le talent du grimacier, dont l'origine remonte à la plus haute antiquité, est suffisamment caractérisé par le nom donné à Varttste. Yers 1759, dit nue chronique, nn bateleur dont la physionomie grotesijne exprimait d'une manière hideuse, mais caractéristique, différentes sensations, ac- quit sur le boulevard du Temple le surnom de grimacier. D'abord il se montra en public sur une chaise et s'abandonna à la générosité de son auditoire ; sa dernière grimace était ton- jouis celle de la supplication , et souvent son escarcelle était remplie. Tojant que la foule l'entourait, il imagina de construire une bara- que en bois (sur l'emplacement oii fut plus tard le petit théâtre de M"" Saqni, qui devint ensuite les Délassements-Comiques) ; le public entra dans sa baraque voir le grimacier, qui, après avoir réalisé des bénéfices, céda sou en- treprise à un directeur de marionnettes, mais à la condition qu'il resterait en qualité de gri- macier, en chef et sans partage. Cet homme aimait son art. Il paraissait dans les entr'actes, et pendant longtemps encore resta le favori du pahUc. GRIMER (Se). — Expression exclusive- ment théâtrale, dont la signification est toute particuUère. Pour un comédien, c'est, selon les nécessités du rôle qu'il doit remplir, l'art de vieillir et d'enlaidir son visage à l'aide de moyens artificiels. Avec du rouge, du blanc, de l'ocre, du noir et des pinceaux, il se creusera des rides, s'agrandira la bouche, la dégarnira de SCS dents, blanchira ses sourcils, se creusera les joues, éteindra son regard, que sais-je?' se rendra mt'connaissable à ce point que ses ca- marades même, ceux qui jouent chaque jour avec lui, croiront avoir affaire à nn étranger en lu coudoyant dans les coulisses. Mais il y a une GRIMES. — GUERRES MUSICALES. 407 différence entre se grimer et faire sa figure (Voy. ce mot). L'artiste qui se grime fait sa figure ; mais celui qui fait sa figure ne se grime pas toujours, et se borne à appliquer sur son visage la couche de blanc «t de rouge néces- saire. Se grimer, je l'ai dit, c'est se vieillir, et, partant, s'enlaidir; mais le jeune premier et la jeune première n'ont besoin ni de l'un ni de l'autre, — au contraire. GRIMES. — Les grimes forment une classe de rôles masculins ridicules , et tombant sou- vent dans la charge et dans la caricature. Ar- gante des Fourberies de Scapin, Géronte du Légataire universel, Albert des Folies amou- reuseSf Lisidor de Crispin inédecin (Hautero- che), Orgon du Consentement forcé (Guyot de Mer\âlle), sont des grimes. Dans les troupes peu nombreuses, les grimes et les financiers sont souvent confondus en un seul emploi, confié à un seul et même artiste. Ce nom de grimes vient de ceci, que, le personnage repré- sentant toujours un vieillard, l'artiste qui le personnifie est obligé de se grimer (Voy. ce mot). GRIVOIS (Genre). — Des sous-entendus, des allusions transparentes, des équivoques, des mots à double entente, des couplets égril- lards, voilà ce qui constitue, au théâtre, le genre qualifié de grivois. Dans le domaine du vaude- ville, Désaugiers, Brazier, Dumersan, puis Clair\ille et quelques autres écrivains, ont brillé en ce genre, dans lequel une actrice charmante, Virginie Déjazet, douée d'un tact exquis, n'a pas connu de rivale. De nos joui*s, l'opérette est devenue extrêmement grivoise, pour ne pas dire plus, et elle a trouvé aussi, dans la personne de M"'*'* Schneider et Judic, deux interprètes qui ont excellé à masquer, sous les grâces de leur diction, les libertés un peu excessives d'un dialogue très coloré. GRUE. — Expression irrespectueuse dont on se sert pour qualifier certaines actrices pré- tendues, généralement plus remarquables au point de vue physique que sous le rapport des aptitudes scéniques. En réalité , la grue n'est qu'une drôlesse qui prétend se servir du théâtre uniquement pour faire valoir aux yeux de cer- taine partie du public ses avantages personnels. On ne la rencontre que sur quelques scènes de bas étage, qui n'ont pas honte de se livrer à cette exhibition. Elle ne tient à l'art par aucun côté, et déshonorerait le nom de comédienne, si elle le pouvait porter. GUERRES MUSICALES. — C'est ainsi qu'on a qualifié certaines querelles artistiques dont le retentissement a été grand , et qui ont laissé dans l'histoire de l'art une trace profonde et qui ne sera jamais oubliée. La musique dra- matique a eu ce privilège singulier de passion- ner toujours les esprits avec une force extrême, et de susciter des polémiques ardentes qu'aucun autre art n'a jamais soulevées de telle façon. La fameuse querelle des classiques et des ro- mantiques offre, en littérature, le seul exemple d'un pareil déchaînement de fureurs, et il n'est pas sans intérêt de rappeler, au moins très sommairement, ce que furent nos grandes guerres musicales au dix-huitième et au dix- neuvième siècle. La première en date est celle qui a reçu le nom de Querelle des houffonistes et des lullistes, ou Guerre des coins , et qui éclata en 1752. C'est dans le courant de cette année 1752 qu'une petite troupe de chanteurs italiens, à la tête desquels se trouvaient le bouffon Ma- nelli et la célèbre Tonelli, après avoir donné des représentations à Rouen et à Strasbourg, vinrent à Paris et obtinrent du roi l'autorisa- tion de jouer des intermèdes italiens sur la scène de l'Opéra. Ces chanteurs débutèrent, le 1*"^ août, par le chef-d'œu\Te de Pergolèse, la Serva padrona, qui obtint un succès prodi- gieux, et firent connaître ensuite toute une série d'autres ouvrages du même genre. Le public français, qui jusqu'alors ne connaissait rien de la musique italienne, fit à ces artistes un ac- cueil enthousiaste, et quelques partisans ultra-, passionnés de cette musique voulurent profiter de la circonstance pour battre en brèche la musique française et la déclarer incapable de jamais rien produire qui pût supporter la com- paraison. De là le signal des hostilités, qui furent vives et prolongées, et dont J.-J. Rous- 408 GUERRES MUSICALES. seau, qui était l'un des défenseurs les plus ar- dents des Italiens, racontait ainsi la naissance : — « Les bouffons firent à la musique italienne des sectateurs très ardents : tout Paris se di- visa en deux partis plus échauffés qije s'il se fût agi d'une affaire d'État ou de religion. L'un, plus puissant, plus nombreux, composé des grands, des riches et des femmes, soutenoit la musique françoise; l'autre, plus vif, plus fier, plus enthousiaste, étoit composé des vrais connoisseurs et des gens à talent, des hommes de génie. Son petit peloton se rassembloit à l'Opéra, sous la loge de la reine. L'autre parti remplissoit le reste du parterre et de la salle ; mais son foyer principal étoit sous la loge du roi. Voilà d'où viennent ces noms de partis, célèbres en ces temps-là, de coin du roi et de la reine, La querelle en s'animant produisit des brochures. Le coin du roi voulut plaisanter ; il fut moqué par le Petit Prophète; il voulut se mêler de raisonner, il fut écrasé par la Lettre sur la musique françoise» Ces deux petits écrits, l'un de Grimm, l'autre de moi, sont les seuls qui 8ur\âvent de cette querelle ; tous les autres sont morts (1). » M"® de Pompadour, qui s'était hautement prononcée en faveur de la musique française, avait naturellement rangé le roi à son opinion, en sorte que ceux des spectateurs qui servaient cette même cause avaient, tout naturellement aussi, choisi pour lieu de ralliement le côté de la salle où se trouvait placée la loge du souve- rain. Ce ne furent d'abord que saillies, bons mots et épigrammes échangés de part et d'au- tre; mais bientôt, comme le dit Rousseau, les choses s'envenimant et la question prenant une importance démesurée, ce fut un déluge de brochures et de pamphlets à ne s'y plus recon- naître. Après Grimm et Rousseau , qui ouvri- rent le feu, on vit entrer en scène d'Holbach, Suard, l'abbé de Voisenon , Rameau , Cazotte, Fréron, le P. Castel, l'abbé Laugier, le che- valier de La Morlière, puis une foule d'autres plus obscurs. Nos théâtres même prirent part à la querelle , et tandis que la Comédie-Fran- çaise donnait les Adieux dti goût, de Patu et (1) Confissions, 11* partie, liv. VIII. Portelance, la Comédie-Italienne représentait le Retour du Goût, de Chevrier, la Revue des Théâtres, du même, la Frivolité, de Boissy, toutes pièces qui avaient trait à cette grosse question de la suprématie de la musique ita- lienne sur la musique française (I). Vingt-cinq ans plus tard, on vit surgir une polémique du même genre et non moins vio- lente. Cette fois, c'était à cause de la rivalité fameuse de Gluck et de Piccinnî, et la nouvelle guerre s'en trouva prendre le nom de Querelle des gluckistes et des piccinnistes, c Deux partis violents se formèrent, dit Fétis à ce sujet : les gens de lettres s'enrôlèrent dans l'un ou danë l'autre, et les journaux furent remplis tous les matins d'épigrammes, de bons mots et d'inju- res que les coryphées de chaque parti se déco- chaient. Les chefs des gluckistes étaient Suard et l'abbé Arnaud ; du côté des piccinnistes on comptait Marmontel, La Harpe, Ginguené et jusqu'au froid d'Alembert. La plus haute so- ciété, les femmes du meilleur ton, entraient avec chaleur dans cette querelle grotesque. Les soupei's, alors à la mode, réunissaient les anta- gonistes, encore émus des impressions qu'ils venaient de recevoir au théâtre ; ils devenaient une arène, où l'on combattait avec chaleur pour des opinions mal définies ; on y entendait pousser des cris inhumains, et tout y présentait à l'œil de l'observateur un spectacle plus cu- rieux que celui pour lequel on disputait. Cet état de choses dura jusqu'en 1780, époque où Gluck retourna à Vienne ; alors les esprits se calmèrent, et l'on comprit qu'il valait mieux jouir des beautés répandues dans Armide et dans Roland que disputer sur leur mérite. » Pour donner une idée des aménités qui s'échan- (1) Au milieu de tous les incidents burlesques que fit naîti-e cette lutte héroï- comique, il en est un que je note au passage. Un soir, à une représentation des chanteurs italiens , deux spectateurs d*opiniou contraire s'échauffaient dans leur discussion au point de troubler la tranquiUité de leurs voisins et d'attirer l'attention de la sentinelle. Au moment où le soldat de garde s'ap- prochait d'eux pour les engager à baisser la voix, le lulliste lui dit à brûle-pourpoint et d'un ton très sé- rieux : Monsieur est donc bouffoniste ! et cette expression, dont il ignoi-ait la portée, parut sans doute si humiliante au pauvre grenadier qu'il en demeura déconcerté, et tout confus retourna prendre son poste. 1 GUERRES MUSICALES. 409 geaient au sujet de ces querelles bizarres, il suffira de cit«r ce court dialogue rapporté uq matin par le Journal de Part» (1777) : — « Od donnoit la semaine dernière, à rO|iéra, Akeste, tragédie de M. le chevalier Gluck. Mademoiselle Levasseur jouoi t le rôle d' Alceste ; lorsque cette actrice, à la fin du second acte, chanta ce vers sublime par son accent : Il me déchire et m'aTraclie le cœur, une personne s'é- cria : Ah! mademoiselle, vous m'arradies les Morte Ha' /y 04 ■ oreilles! Son voisin, transporte par la beauté de ce passage et par la manière dont il était rendu, lui rc'pliqua : Ah! monsieur, quelle for- lune, si c'est pour vous en donner (Fautres! « C'est alors que les détracteurs de Gluck, pré- tendant les expressions viles et calom- nieuses, voire inême outrageantes, qui ont été appliquées par les idolâtres de Richard Wagner à ceux qui ne partagent pas d*une façon absolue leurs sentiments. L^un serait aussi curieux que l'autre, et prouverait que la palme de la poli- tesse appartient moins encore à son parti qu'au parti opposé. S'il est, en effet, quelque chose de plus intolérable que les doctrines de Richard Wagner, c'est l'insolence, la suffisance et l'ou- trecuidance des wagnériens. GUIGNOL. — Guignol est la marionnette populaire par excellence de la seconde ville de France, et il trône en vainqueur à Lyon depuis tantôt un siècle. Guignol est un enfant du terroir, la représentation du canut lyonnais, gouailleur, lx)n enfant , satirique , parfois un peu pratique, mais toujours amusant et gai, et souvent ayant plus d'esprit dans sa petite tête de bois que bien des comédiens en chair et en os. Ses grands succès à Lyon lui ont fait des imitateurs qui ont voulu le faire voyager, et depuis environ quarante ans nos petits théâtres de marionnettes des Tuileries et des Champs- Elysées ont pris indûment le titre de Théâtre de Guignol; mais ils n'en ont que l'enseigne et n'ont pu donner le personnage, par cette simple raison que Guignol, Lyonnais de naissance et canut de profession', est intransportable et per- drait ici toute sa saveur et son originalité. Un grave magistrat, qui n'en est pas moins un homme d'esprit, a publié sous ce titre : Théâtre lyonnais de Guignol, un recueil des jKitites farces jouées par les marionnettes lyon- naises, en y joignant une charmante introduc- tion historique (1). C'est à cet éditeur anonyme que je vais emprunter les détails relatifs au célèbre pantin. L'écrivain se demande d'abord ; « Quelle est l'origine de ce Guignol qui règne aujourd'hui en maître sur ce petit peuple de (1) Théâtre lyonnais de Guignol, publié pour la pre- mière fois, avec une introduction et des notes. Lyou, Schcuring, 1«C5, in-8<^; 2« série, 1870, in-S». comédiens ? C'est de Lyon , cela est bien cer- tain, que Guignol a pris son toI vers Paria et Bar toat* la France ; mais comment et qnand s'est-il manifesté à Lyon? y est-il né ? y est^il arrivé d'ailleurs ? qui lui a donné son nom ? t Autant de questions auxquelles il est difficile de répondre. L'auteur, s'en référant aux tra- ditions locales, les résume ainsi : NOL. 411 Oq n'a pas souvenir de l'eiietence de Guignol à LyoD avant les dernières années du xvni» siècle. C'est un Lyonnais, Laurent Mourguet, qni lui a donné tonte sa célébrité. Mourguet, lorsqu'il avait monté son premier tliéâtre , avait , comme ses con- frères d'alois , pria pour personnage principal , pour prolagonitla, comme on dit eu Italie, l'éternel Po- lichinelle. Mais Mourguet , qui était un homme de beaucoup d'esprit et de gaieté, avait pour voisin, dans le quartier Saint-Paul, un canut de la vieille roche, autisi gai, aussi spirituel que lui, qui était devenu son confident et son Égérie. Il ne lançait jamaÎB une pochade sane en avoir fait l'elïet sur ce cen- seur, et comme le compagnon était non seulement un fin connaisseur, mais encore un esprit fécond en matière de facéties, Mourguet rapportait toujours de ces communications nn bon conseil et quelque trait nouveau, qui u'était pas le moins original de la pièce. Quand !e vieux canut avait bien ri , et qu'il donnait sa pleine approbation, il avait coutume de dire : C'est guignolanl! ce qui, dans son lan- gage, dans lequel il était touvent créateur, signi- fiait : C'est trcs drôle cest très amusant! C'est à ce mot suprême [uo Mturguet reconnaissait son succès, et |uand le jugement avait été ainai for- mulé, il portait sans crainte son œuvre devant le Or, Mourguet, dans les pièces qu'il représentait à Lyon, avait été amené par lu foree des choses à «2 GUIG introduire eoDvent on ounrier en soie. Pour faire parler ce personnage , il était impossible que les idées , les facéties , l'accent de sou vieil ami ne lui vinBsent pas sans cesse à l'esprit et à la bouche. Le epuis ce temps, Mourguet a développé ce type de Guignol dans une longue série de pièces, en lui conserA-ant toujours son costume, celui des ou- vriers lyonnais de la fin du BÎéclc dernier, son ac- cent qui est aussi lyonnais de la même époque, sa bonne humeur et son originalité d'esprit. Le carac- tère de ce personnage est celui d'un homme du peuple : bon cœur, assez enclin à la bamboche, n'ayant pas trop de scrupules, mais toujours prêt à rendre service aux amis; ignorant, mais tin et de bon sens; qui ne s'étonne pas facilement; qu'on dupe sans beaucoup d'effortx en flattant ses pen- chants , mais qui parvient j)res(]ue toujours à se ti- rer d'affaire. La carrière dramatique de Mourguet a éU' lon- gue. Le premier théâtre permanent où il se soit montré paraît être celui qu'il ouvrit dans la nie Noire, qu'il vendit ensuite à un M. Verset et qui a été longtemps une des crèches les plus appréciées de Lyon (1). Il joua ensuite dans la lue des Prê- tres, dans la rue Juiverie, aux Drotteaux dans la Grande- Allée [aujourd'hui le cours Morand] , prés du lieu où l'on a vu plos tard lo Café du Grand- Orient , et enfin , un peu plus loin , au Jardin Clii- (1) Les crècha B( \ Lyon, des apectacleB présentatioD de quelques ecénes du Nouveau Testament, et DOtamment de l'étable de Bethléem. C'est un reste de nos anciens mystcrea. I^e père et la mûre Coquard , qui parltot 1b langage lyontinia, y figurent indispensable - un couplel; connu de tous 1«9 Lyonnais, dans lequel il est question de nos brouillards, et y sdresuut aux jeanes sjiectateurs une éloquente eihortation ù se bien con- duire, aËD que leuru parents ies ramènent Jt \n crèche. nois. Il avait là pour aide et pour compagnon une autre célébrité des rues de Lyon , le père Thomas , dont le nom véritable était Ladray. II transporta ensuite son théâtre dans diSérenteB villes des dé- partements voisins et flxa enfin son dernier éta- blissement à Vienne, en Dauphiné,où il mourut en 1814, à l'âge de quatre-vingt-dix-neuf ans, en- core entonté de ses chères marionnettes. Il avait toujours eu l'amour de sou art; il l'avait inspiré aux siens , et l'inspiration est resiée dans sa posté- rité. Son 61s Jacques Mou^uet a longtemps fait, à l'aide de Guignol, la fortune du Café du Caveau sur la place des Célestîns, à Lyon. Il a aussi joué à Grenoble et à Maiseille. Il a eu un flls qui a porté en Algérie notre marionnette lyonnaise. Laurent Mourguet a fondé en effet tonte une dynastie de joneurs de marionnettes. Aujour- d'hui encore, plus d'un de ses descendants exerce à Lyon son art populaire et aimable , et, grâce aux BucceBseurs de Mourguet, l'inimitable Guignol et son intime ami Gnafron, le joyeux compagnon de ce héros burlesque, font plus que jamais la joie de ce pays où ils excitent une si grande affection. « C'est par ces artistes, dit l'historien de Guignol, que notre marion- nette , un peu délaissée pendant quelques an- nées, 2. retrouvé les beaux jours du père Mour- guet et étendu sa réputation bien an delà des limites de notre province. Qui n'a entendu au ( Café Condumiu de la rue Port-du -Temple Gui- gnol aux mains de Vieillerme, et Gnafron aux mains de Josserand dans le Déménai/ement , dans un DeniUte, dans îes Frères Coq, n'a qu'une idée incomplète de !a verve, de la gaité, de l'esprit qui se dépensent avec une intarissable prodigalité dans nos divertissements populaires. Ces dignes succ^seurs de Mourguet ont beau- coup augmenté et augmentent chaque jour le répertoire du fondateur. > C'est à Laurent Mourguet et aux siensque l'on doit, en effet, non seulement le jeu des marion- nettes lyonnaises, mais leur riche et amusant ré- pertoire, a II n'était pas rare jadis, dit encore k ce sujet notre écrivain, de rencontrer en France, comme on le voit encore en Italie, des artisans qui avaient reçu une véritable éducation lit- téraire et qui conseiraient le goût des lettres au milieu de leurs occupations manuelles. C'est sans doute une telle éducation qu'avait reçue GUIGNOL. 413 Mourgueb. Suivant les traditions de la famille, il composait ses 'pièces lui-même, sans autre collaboration que celle du vieil ami auquel il communiquait ses canevas. Il empruntait sou- vent à quelque ouvrage déjà connu l'idée prin- cipale de son œuvre, mais ce n'était là qu'un thème sur lequel il tissait une action originale. Les pièces les plus populaires, celles qui ont encore aujourd'hui le plus de succès , viennent de lui, et, à travers les nombreuses transfor- mations qu'elles ont subies, elles gardent un cachet qui les rend très reconnaissables. )> Il est très amusant, ce répertoire du théâtre de Guignol, tel que nous pouvons le juger d'après ce qu'en a publié son éditeur anonyme, plein de saveur, avec un goût de terroir très curieux et très prononcé. J'en aurais voulu donner quelques échantillons, mais je serai obligé de me borner, la place commençant à me faire défaut. Deux ou trois passages, d'ail- leurs , suffiront à donner le ton de la plaisan- terie ; je les prends dans une des plus amu- santes farces, h Déménagement, dans laquelle Guignol, et sa femme Madelon, et Gnafron son ami, ont maille à partir avec leur propriétaire, M. Canezou, homme grincheux, comme tous ses pareils, qui ne consent pas à trouver na- turel qu'on occupe sa maison pendant neuf termes sans lui faire voir une fois la couleur de son argent. Une scène est très amusante, c'est celle dans laquelle M. Canezou réclame en vain à Gui- gnol le montant de son loyer, et finit par lui proposer un arrangement : Canezou. — Voyons , monsieur Guignol , je veux être bon pour vous... Voulez-vous gagner vingt francs ? Guignol. — Pour ça, je veux bien. Que faut-il faire ? Canezou. — Je vais vous l'expliquer. Vous me devez 320 francs pour neuf termes. Hé bien, je vous laisse quitte à 300 francs. Payez-les-moi; c'est vingt francs que vous gagnez. Guignol. — Ah ! c'est donc ça ! Vous êtes un vieux malin, vous ! Eh ben, je veux bien; mais v'ià comme nous allons nous arranger. Vous allez me donner les vingt francs en argent, et moi je vous donnerai mon billet pour les 320... Vous aurez la signature Guignol. Canezou. ^ Vous vous moquez de moi. Eh bien , je vous ferai changer de ton. Je vais vous faire donner un commandement. Guignol. — Les commandements ! ah ! je con- nais ça; on me les a appris quand j'étais petit : Tes père et mère... Canezou. — Eh bien , il y en a un que vous avez oublié : Ton propriétaire tu paieras A Noël et à la Saint-Jean. Guignol. — Ah ! c'est pas comme ça qu'on me l'a appris : A ton vilain propriétaire tu donneras, A chaque terme , autant d'argent Qu'on en donne à présent Sur le pont Morand. Au milieu de la scène survient Gnafron, qui, débiteur aussi du propriétaire, aide Guignol à le rosser et à le chasser. Puis, quand Canezou est parti : Gnafron. — En quel siècle vivons-nous, mon pauvre Chignol? Se voir injurier en pleine rue par ses créanciers! Guignol. — Te lui as fait prendre le chemin de fer? Gnafron. — Que qu'il te voulait , le vieux gri- gou? Guignol. — Ah ! des bêtises ; il me demandait de l'argent... Je lui dois neuf termes... Gnafron. — Neuf termes!... et te lui as jamaib rien donné ? Guignol. — Rien. Gnafron. — Tiens! embrasse-moi!... Je t'ai tou- jours aimé, Ciiignol! T'es le modèle des loca- taires ! Ce mot-là est un chef-d'œu\Te. Mais où le drame de\ient épique, c'est par son dénoue- ment et la scène ^Taiment étonnante de recon- naissance qui ramène. Canezou, qui est allé requérir la force publique poui- avoir raison de son locataire, revient avec le bailli, un brigadier et un gendarme ; après une mêlée burlesque, on parvient enfin à se saisir de Guignol : Canezou. — Nous le tenons enfin. Le Bailli. — Il ne sera pas dit qu'on se sera impunément joué de nous. Conduisez-le en pri- son! Guignol. — En prison!... Un m' ment! un 414 GUINDER. — GYMNASIARQUE. m* ment! On ne mène pas en prison nn gone comme moi qu*à Givors a tiré du canal trois hom- mes qui se noyaient. Canezou. — A Givors ? Guignol. — Oui, y a douze ans. Y avait un papa à perruque qui vendait de la mort aux rats. Canezou. — Arrêtez ! Ce jour-là , possédé de la passion de la pêche à la ligne , ce négociant avait jeté dans les flots du canal une ligne garnie d'un asticot dont les effets étaient irrésistibles... Tout à coup le goujon biche , le pêcheur donne un coup sec... Mais à ce moment un limaçon perfide et ja- loux dirigeait ses pas dans ces lieux. Le pied du pêcheur glisse, il tombe dans le canal... Guignol, — Vous le connaissez ? Canezou, — Le limaçon V Guignol. — Non ; le pêcheur ? Canezou. — C'était moi. Guignol. — C'était vous ! ah ! Canezou. — Et mon sauveur? Guignol. — C'était moi. Canezou. — C'était vous! Ali! dans mes bras, mon sauveur, dans mes bras! (TU s'embrassent.) Le Bailli. — Arrêtez!... A ce moment, un homme , tourmenté par des malheurs domestiques , se promenait le long du canal en donnant un libre cours à ses mélancoliques pensées... La journée était orageuse... Un vent glacial fouettait les feuil- les des arbres et soulevait les ondes... Cet homme portait un parapluie feuille-morte... Un coup de vent l'enlève et le fait tourbillonner dans les airs... Désolé de perdre ce compagnon de ses rêveries, cet homme s'élance et tombe dans le canal sur un pê- cheur à la ligne qui s'était précipité à la recherche de sa proie. Guignol. — Vous connaissez cet homme ? Le Bailli. — C'était moi. Guignol. — C'était vous! ah ! . Canezou. — Et le pêcheur, c'était moi ! Le Bailli. — C'était vous! Et mon sauveur? Guignol. — C'était moi. Le Bailli. — C'était vous ! Ah ! dans mes bras, mon sauveur! Canezou. — Dans nos bras , notre sauveur ! (//« s'embrassent) Le Brigadier. — Arrêtez !... Ce jour-là, un jeune habitant de Rive-de-Gier, trouvant que le maître d'école de l'endroit avait quehiue chose de mono- tone et de fastidieux dans sou enseignement, l'avait planté là pour aller goûter les délices du bain dans le canal... Tous. — Ah ! Le Brigadier. — Il se livrait à une coupe gra- cieuse, lorsqu'il sent un instniment contondant lui dégringoler sur la nuque du cou... C'était un para- pluie feuille-morte... Tous. — Ah ! Le Brigadier. — Il s'apprêtait à le saisir, lors- qu'il reçoit sur le dos un particulier qui s'élançait à la poursuite de ce riflard... Tous. — Ah î Le Brigadier. — C'en était trop ; il succombe , et bientôt le canal aurait tout dévoré, si... Guignol. — Ce jeune habitant de Rive-de-Gier, vous le connaissez. Le Brigadier. — C'était moi. Guignol. — C'était vous! ah ! Le Bailli. — Et le parapluie , c'était moi. Le Brigadier. — C'était vous!... Et mon sau- veur? Guignol. — C'était moi. Le Brigadier. — C'était vous ! Ah ! dans mes bras, mon sauveur ! Le Bailli et Canezou. — Dans nos bras , notre sauveur ! (Us s'embrassent.) Le Gendarme. — Arrêtez!... Moi, je ne suis pas tombé dans le canal , mais je voudrais en avoir goûté l'onde amère, mossieu Guignol, pour avoir le droit de vous serrer dans mes bras. (Ils s'embras- sent tous.) Le Bailli. — Voilà bien des reconnaissances ! Canezou. — La mienne ne finira jamais. Gui- gnol, je vous fais remise de mes neuf termes. Et ce n'est pas tout : ma maison est désormais la vôtre. Je vous la donne. Guignol. — Allons, ça sert à qucque chose de savoir nager... Me v'ià propriétaire à présent. Faut plus badiner. Je ferai payer d'avance, et je me méfierai de la lune. Le dernier trait termine bien la pièce, et montre que Guignol, parvenu au rang de pro- priétaire, ne se souviendra plus de ses misères passées, et deviendra aussi féroce que s'il était né sous la calotte grecque de M. Canezou. GUINDER. — Terme de machinerie. Guin- der un décor ou un fragment de décor, c'est l'attacher, le fixer solidement, à l'aide de cro- chets ou de crampons, sur le mât ou sur le châssis qui doit le supporter et qui est caché par lui. GYMNASIARQUE. — Chez les Grecs, c'était le maître qui, dans les palestres, était chargé de l'éducation des athlètes , qui devait présider à leurs exercices et les préparer à ton- i GYMNASTE. 415 tes les luttes, à tous les jeux auxquels ils étaient appelés à prendre part en public. Aujourd'hui, le mot gymnasiarque est employé comme syno- nyme de gymnaste (Voy. ce mot). GYMNASTE. — Les gymnastes sont des acrobates d'une extrême habileté qui, à l'aide d'échelles, de trapèzes, de cordes suspendues, exécutent, dans des cirques ou dans des théâ- tres ad hoc, des exercices d'une hardiesse sur- prenante. A une audace inouïe, au mépris le plus complet du danger, à une force hercu- léenne, ils joignent généralement une aisance, une souplesse et une grâce merveilleuses, qui éloigne précisément de Tesprit du spectateur toute pensée du péril qu'ils peuvent courir. On a vu même des femmes se livrer à de tels exer- cices, et y déployer une habileté et un sang- froid incomparables. Au reste, s'il faut en croire les gymnastes eux-mêmes, leur confiance et leur assurance sont telles que le danger pour eux serait plus apparent que réel ; voici ce qu'on lit à ce sujet dans les Mémoires des frères Hanlon Lees^ ces clowns fameux qui pendant deux années ont fait courir tout Paris : — rc On se fait généra- lement une fausse idée des dangers que les gym- nastes ont à redouter. On n'est pas toujours disposé à (( travailler » avec le même entmin. Une fausse digestion, de mauvaises nouvelles, des ennuis intimes, des idées noires vous trou- blent malgré vous. Ces dispositions fâcheuses se manifestent quelquefois par une bizarre transsudation des mains, qui deviennent hu- mides et moites, quelque soin qu'on prenne de les essuyer. Il en résulte pour l'artiste de vagues appréhensions. Point de danger réel pourtant. Dès qu'il entre en scène, il n'y songe plus. L'asixîct du public produit en lui une surexci- tation neuveuse qui dissipe ses faiblesses. Il n'est pas de vertiges pour un gjrmnaste exercé, et encore moins d'éblouissements, à moins d'é- carts de régime qu'il ne faut pas prévoir, car ils équivalent à un suicide. Il n'y a point de raison sérieuse pour qu'il manque un exercice qu'il a étudié et pratiqué. De là son indiflTérence devant des éventualités de chute tout à fait improbables. Son courage, son audace sont une conséquence naturelle de la confiance qu'il a dans ses forces et dans les camarades qui lui sont associés. » Mais, pour acquérir cette sûreté, un travail de chaque jour, sans cesse répété, est d'une nécessité absolue : — a: Cela est le grand point, le point capital ; c'est pour arriver à cette confiance (jue nous nous réunissons tous les jours, et que nous répétons le matin ce que nous devons exécuter le soir. V\\ accord parfait en- tre nous est indispensable. Nous convenons des modifications à apporter à nos exercices ou des effets nouveaux à y ajouter. Ce travail est tel- lement nécessaire qu'on n'y saurait manquer impunément. » Les gymnastes prennent parfois aujourd'hui le nom de (jymnasiurqties. H HABILLEUR, HABILLEUSE. — Cha- que théâtre emploie un certain nombre d'ha- billeurs et d'habilleuses, qui font office de valet et de femme de chambre auprès des artistes auxquels les attache Tadministration. Chacun des acteurs chargé d'un rôle important a son habilleur ou son habilleuse spéciale ; ceux qui remplissent des emplois secondaires, et qui sont deux, trois ou quatre pour occuper une seule loge, n'ont qu'un habilleur ou une habil- leuse par loge. Les choristes, les danseuses du corps de ballet, qui sont parfois réunies huit, dix ou douze dans une loge, n'ont qu'une ou deux habilleuses par loge. HABITUÉS. -=- Autrefois, à Paris, chaque théâtre un peu important avait un certain nombre d'habitués, qui n'auraient pas laissé écouler une semaine sans y passer une ou deux soirées, qui s'attachaient aux acteura, suivaient avec attention leurs progrès et les encoura- geaient selon leurs mérites. Ahjourd'hui , la race des habitués est perdue, comme celle des carlins; le public cosmopolite amené chaque jour par les chemins de fer les a tués. Et puis, il faudrait aux habitués des estomacs solides pour digérer la même pièce unique pendant huit ou dix mois, et parfois davantage î (Voj. Amateur.) HANSWURST. — La plus fameuse des marionnettes allemandes, au dire de Charles Magnin, qui en parle en ces termes : Dès que nous arrivons à la fin du XV'' siècle, le loustic habituel des parades et des marionnettes allemandes nous est parfaitement connu : c'est une espèce do Francatripe, farceur de haute graisse, nommé à bon escient Haiwvcursi, c'est-à-dire Jean Boudin. Cet acteur est , sous un autre masque, une sorte d'Arlequin ou de Polichinelle allemand. Je dis sous un autre masque , car, s^l se rapproche de ces deux types pour le caractère et le tour d'esprit , il diffère entièrement de l'un et de l'autre par le costume et par l'allure... Depuis deux siècles, le type physique et moral de Hanswurst n'a que fort peu varié. Ce bouffon, suivant Leasing, possède deux qualités caractéristiques : il est balourd et vorace, mais d'une voracité qui lui profite, tout différent en cela d'Arlequin, que sa gloutonnerie n'engraisse pas , et qui reste toujours léger, svelte et alerte... En Allemagne, Hanswurst a eu plu- sieurs rivaux : il a dû céder plusieurs fois le pas à Arlequin, à Polichinelle, même à Pickelhœring. Banni , au milieu du dernier siècle , du théâtre de Vienne par l'autorité classique et souveraine de Gottsched, il a été remplacé par le joyeux paysan autrichien Casperle , qui s'empara tellement de la faveur publique que la plus belle salle de marion- nettes qui orne les faubourgs de Vienne reçut le nom de Casperle-Théâtre , et qu'on appela ccuiperle une pièce de monnaie dont la valeur était celle d'une place de parterre à ce théâtre. C'est avec ce personnel et un choix des farces de Hans Sachs dans leur valise , que les anciens toJchenapieUr ont, jusqu'à l'avènement très tardif du théâtre régulier, promené leurs joyeuses boutiques de foires en foires et de donjons en donjons. HARMONIE (L'). — L'harmonie est l'une des fractions de l'orchestre considéré dans ses éléments sonores. Elle comprend l'ensemble de tous les instruments à vent en bois : flûtes, clarinettes, hautbois et bassons, tandis que la fanfare (Voy. ce mot) comprend l'ensemble des instruments de cui\Te. Toutefois, on peut dire que la fanfare fait partie de l'harmonie, tandis que l'harmonie ne fait jamais partie de la fanfare. HAUTE COMÉDIE. — En langage théâ- tral, la haute comédie, c'est la comédie classi- que, celle de Corneille, de Molière, de Renard HAUTE-CONTRE. — HEURE (l') DU SPECTACLE. 417 et de tous les grands maîtres, celle enfin qui forme le fond admirable du répertoire du Théâ- tre-Français. HAUTE-CONTRE. — Voix d'homme dont le diapason est plus élevé que celui du ténor. Depuis plus d'un demi-siècle, la voix de haute- contre a complètement disparu pour faire place au ténor. Au contraire , tous les rôles élevés dé nos anciens opéras et opéras-comiques étaient écrits pour des hautes-contre. Le On voit que jusque-là l'heure était fixée d'une façon invariable. Ce n'est que plus tard, et, je pense, vers l'époque de la Révolution, qu'elle commença à être moins absolument uniforme et à se modeler sur le plus ou moins de longueur des spectacles. Toutefois, elle res- 27 418 HIÉEAKCHIE DES THÉÂTRES. tait toujours à peu près dans les mêmes limites, de façon que les représentations prissent fin vera neuf heures ou neuf heures et demie, et que le souper de famille, ce souper de nos pères, si gai et si réjouissant, n'en fût pas at- teint (1). Cependant peu à peu les habitudes se modifièrent, au point de vue du spectacle, comme les mœurs et les coutumes générales se modifiaient elles-mêmes : les affaires prenant chaque jour plus d'extension, la journée de travail se prolongeant sans cesse, Theure du dîner se trouvant reculée d'une heure environ à chaque période de dix ou quinze ans, si bien que nous dînons aujourd'hui à sept ou huit heures, tandis qu'il 7 a un demi-siècle nos pères dînaient à quatre heures, les théâtres durent conformer leurs usages à ceux du public et re- tarder de plus en plus le moment où ils com- mençaient leurs spectacles. Il 7 a une quaran- taine d'années, les représentations théâtrales commençaient entre cinq heures et demie et six heures et demie; vingt ans plus tard, elles étaient déjà reculées, et ne commençaient guère que de six heures et demie à sept heures et demie ; aujourd'hui enfin, on ne va pas au spectacle avant huit ou neuf heures. A moins d'un changement complet dans les mœurs, on ne peut guère attendre de nouvelles modifica- tions, car, les théâtres fermant leurs portes à mi- nuit, la durée du spectacle se trouve aujourd'hui réduite à ses dernières limites, et il n'est pas probable qu'on la puisse accourcir davantage. HIÉRARCHIE DES THÉÂTRES. — Dans notre cher pa7S de France, où l'adminis- tration a la manie de se mêler de tout, de tout réglementer, et où elle a atteint les dernières limites de l'omnipotence et du ridicule, les théâtres étaient un trop beau sujet de lois, de (1) II est certain qu'à l'époque de la Révolution les spectacles Unissaient tou.<% aux environs de neuf heures. Les preuves abondent & cet égard, et entre autres en Toici une que nous donne le Journal de Pari» du IG dé- cembre 1792, en annonçant des jeux de fantasmagorie et des apparitions de spectres qu'offrait au public, à riiôtel de Chartres, rue Richelieu, un certain Paul Fi- lidort : (( Il répétera ces évocations deux fois par jour ; la première à 5 heures et demie, et la deuxième à 9 heures, à la sortie des spectacles, p décrets, de règlements, d'arrêtés de toutes sortes, pour n'être pas sans cesse l'objet de l'at- tention de l'autorité. A force de les vouloir protéger, on finissait par leur rendre la vie im- possible, et l'on s'occupait d'eux à ce point qu'on ne leur laissait même pas la faculté de s'arranger entre eux à leur convenance, et qu'on emplo7ait, à les classer et à les hiérar- chiser, un temps qui eût pu certainement être dépensé d'une façon plus utile. Sous ce rapport, le Règlement pour les tliéâtres du 25 avril 1807 peut être considéré comme un chef-d'œuvre d'absolutisme autoritaire et de manie admi- nistrative. Ce règlement établit une hiérarchie spéciale pour les théâtres de France, et divise ceux de Paris en quatre catégories distinctes. Il 7 avait d'abord trois (c grands théâtres » , qui étaient le Théâtre-Français, l'Opéra et l'Opéra- Comique ; puis deux ou « doubles » de ces derniers, l'Ambigu, les Jeunes- Artistes, les Jeunes-Elèves, le théâtre Sans-Prétention, les Jeunes-Comédiens, etc., etc. Cliaque théâtre avait, par ce règlement, son genre nettement et strictement déterminé, et il ne pouvait s'en écarter. Au Théâtre-Français et à l'Odéon, la tragédie et la comédie ; à l'Opéra, les ou\Tages >. A la Porte-Saint-Martin le mélo- drame , les pièces à spectacle et les ballets ; toutefois on ne pouvait donner sur ce théâtre des « baUets dans le genre historique et noble », ce genre « étant exclusivement réser\'é au Grand Opéra ». On voit combien tout cela était puéril, «ot et ridicule. Ce n'est pas tout cependant. Il était absolu- ment interdit aux artistes des grands théâtres de se montrer, même pour des représentations k HILARODIB. — HIPPODROME. 419 jibëuélice, sur les théâtres secondaires; on comprend facilement qu'ils auraient amst pro Ëiné et déshonoré leur talent D'autre part, le rang de chaque théâtre devait être rigoureuse- ment observé dans le placement et le groupe- ment de leurs affiches. II est certain que la so- ciété aurait pu être ébranlée sur ses bases le jour où l'on aurait vu l'affiche des Yanetfs se pavaner à côté de celle de l'Opcra, un ccDl dt la Porte -Saint-Martin s'étaler orgucilleuseineut au-dessus de celle de la Comédie Française Enfin nul théâtre ne pouiait, en dehors de l'Opéra et de l 'Opéra- Corn i q ue , faire entendre un atome de musique nouvelle, le moindre couplet inédit chante au VaudeMJle ou aux Va- riétés pouvant, on le conçoit, déterminer la plus épouvantable anarchie. Le temps de ces sottises est passé. Les théâ- tres sont aujourd'hui les maiti'es absolus de leurs destinées, et une administration tatil- lonne, insupportable et tracassière n'est plus là pour leur imposer ses volontés, les fiiire obéir à ses moindres caprices et établir arbitraire- ment la situation que chacun d'eux doit occu- per iis-à-vis de ses confrères. HILARODIE. — C'est te nom que les Grecs donnaient à certaines pièces d'un cai-ac- tère particulier, qui semblaient tenir le railien entre la tragédie et la comédie et se rapprocher jusqu'à un certain point de nos drames mo- dernes. Athénée signale, comme étant d'un nomme Rhinton, une hilarodie intitulée Âm- philryon, qui pourrait bien avoir servi de mo- dèle à Plaute, et par conséquent avoir été utile indirectement à Molière. HIPPODROME. — Chez les Grecs, ce mot signifiait une arène pour courses de chevaux et de chars, par opposition au stade, qui était ap- proprié il la course à pied. Certains gymnases possédaient des hippodromes, dans lesquels les jeunes firecs venaient apprendre l'art de l'é- quitation. Mais le véritable hippodrome, celui dans lequel avaient lieu les courses publiques, se rapproche beaucoup du cirque romain ( Voy. ce mot), tout en en différant par certains détails, et il était souvent attenant à un stade, lequel seri'ait non seulement aux courses à pied. comme nous venons de le dire, mais aussi aux luttes des athlètes C'est ainsi que la carrière olympique, de même que ceUes de Némée, de Delphes, de l'Isthme, où se célébraient les quatre grands jeux, les jeux sacrés de la Grèce, se divisaient en deux parties, le stade et l'hip- podrome. Les courses qui avaient lieu dans les hippo- dromes de la Grèce n'étaient point sans danger pour ceux qui y prenaient part, et des obstacles terribles étaient préparés aux coureurs. , les chassa de sa cour, leur fit défense d'y reparaî- tre, et appliqua spécialement à des œuvres de dévotion et de charité l'argent qu'il aurait dépensé à entretenir les scandaleuses dissolu- tions du théâtre (1). » Il est bon de remarquer qu'à l'époque dont il est ici question le théâtre véritable n'existait pas encore, et que ces réflexions s'adressent aux bateleurs, aux joueurs de farces, aux jongleurs, à tous ces gens qu'on traiterait aujourd'hui de cabotins et qui alors recevaient oflScielle- (1) L'ancien théâtre en France, introduction du Re- cueil de Farces, sotties et moralitis. 422 HONORAIRES. — HOTEL DE BOURGOGNE. ment Tappellatioii d'histrions. Ce sont ceux-là que rÉglise a chargés de ses anathèmes, ceux- là qu'elle a excommuniés, non absolument à cause de leur profession, mais à cause de la façon dont ils la pratiquaient, et surtout en raison de Tindignité de leurs mœurs, de leur conduite infâme, de leur existence dégradante et des vices qu'ils affichaient sans pudeur. Plus tard, quand ces saltimbanques, quand ces joueurs de tréteaux eurent fait place à de yéritables comédiens, à des hommes qui surent d'un ignoble métier faire un art plein de gran- deur, de noblesse et d'élévation, et pour qui des poètes immortels écrivirent d'incomparables chefs-d'œuvre, les sévérités de l'Église conti- nuèrent de peser sur ces grands artistes, bien que ceux-ci ne ressemblassent en aucune façon aux drôles qui les avaient précédés et dont ils avaient transformé la carrière. De là le discrédit qui pendant si longtemps s'est at- taché aux comédiens, de là l'espèce de déchéance morale dont ils se trouvaient frappés injuste- ment et dont enfin ils commencent à se relever. L'art du théâtre n'entraîne pas plus que d'au- tres l'inconduite, et ne légitime par conséquent le mépris public; là, comme partout, il y a de grands artistes et des talents médiocres, comme partout d'honnêtes gens et des gens sans aveu, comme partout de hautes qualités morales et des vices impurs. Toutes les classes de la société sont partagées de même façon, et je n'en sache pas qui soit tout particulièrement digne d'admira- tion ou digne d'infamie. Seulement, le comé- dien, qui vit plus en public que les autres ci- toyens, montre plus facilement ses faiblesses, et ne prend peut-être pas assez le soin de les cacher. Telle est sans doute la raison qui at- tache encore sur lui les restes d'un vieux pré- jugé. Quant aux infaillibles, aux incorrupti- bles qui, en plein dix-neuTOme siècle, s'effor- cent de lapider les comédiens et les traitent majestueusement d' ac histrions, y> en les cou- vrant de tous les vices et de toutes les iniquités, ceux-là rappellent trop volontiers aux gens de sang-froid la vieille parabole de la paille et de la poutre. HOXORAIRES. — C'est la rétribution que paie le comédien à l'agent dramatique par l'entremise duquel il est engagé dans un théâtre. Pour les théâtres de province, les ho- noraires se montent à deux et demi pour cent de la somme totale que doit toucher l'artiste pour toute la durée de son engagement ; lors- qu'il s'agit d'un théâtre de Paris ou de l'étran- ger, ils s'élèvent à cinq pour cent. HOQUET DRAMATIQUE. — On appelle de ce nom une certaine respiration bruyante et forcée dont quelques acteurs de di'ame ou de tragédie ont pris l'habitude, dans l'unique but de forcer l'effet de leur diction et d'augmenter l'impression qu'elle doit produire sur le specta- teur. Comme tous les moyens factices et puisés en dehors de la nature, celui-ci est fâcheux ; il l'est d'autant plus que le résultat obtenu par son aide est beaucoup plus désagréable que puissant. Rien n'est moins flatteur, en effet, et plus fatigant pour l'auditeur, que cette respi- ration heurtée, forcée, violente, qui altère la pureté de la voix et qui fait ressembler le go- sier de l'acteur à un soufflet de forge en exercice. HOTEL DE BOURGOGNE. — C'est le premier théâtre régulier qu'ait possédé Paris. Lorsque, aux en\irons de 1545, les Confrères de la Passion, établis depuis peu à l'Hôtel de Flandre, reçurent de François I*^ Tordre de quitter celui-ci , que le souverain voulait faire démolir ainsi que quelques maisons environ- nantes, ils achetèrent l'Hôtel de Bourgogne, qui, situé rue Fmnçaise et rue Mauconseil, était inhabité et tombait en ruine depuis la mort de Charles le Hardi, dernier duc de Bour- gogne, tué au siège de Nancy. Ils y firent cons- tniire un théâtre, dans lequel ils s'installèrent pour y donner leurs représentations, et sur la porte duquel ils firent figurer, comme une sorte de devise personnelle, les instruments de la Pas- sion, qu'on y voyait encore en 17(53. Au bout de vingt-cinq ou trente ans, les Confrères, renonçant à leurs jeux scéniques, louèrent leur théâtre à une troupe de comédiens de profes- sion, qui bientôt le rendirent célèbre et y at- tirèrent la foule. C'est alors que l'Hôtel de Bourgogne commença de jouir d'une immense renommée, qui dura tout un siècle; c'est là (jue prit naissance notre théâtre régulier, que HOTEL DE BOURGOGNE. 423 Be fonnèrent nos premiers ^nds coniédieiiB, et que furent jouées les pièces de JodeUe, de Garnier, de Hardy, pnis celles de Théophile, de Bacan, de ïlairet, de Gûtnbauld, et plus tard qnelques-anes de celles de Eotroa, de Corneille et de Rikcine. Dana les commencements, on voyait k farce la plus grossière s'allier, à l'Hô- tel de Bourg<^ne, à la tragédie et aux œuvres les plus sérieuses; c'est alors qne floriasaient ces trois ferceurs épiques qui furent, pendant près d'un demi-siècle , la joie et l'enchantement des Parisiens : Gauthier-Garguille, Gros-Guil- laume et Turlupin, qui de leurs vrais noms s'appelaient Hugues Guèm, Robert Guérin et Henri Legrand, et qui, après avoir joué dans la farce et dans la parade sous ces trois sobriquets, ])renaient, pour se montrer dans le jr^nre sé- rieux, les surnoms plus nobles de Fléchelles, Laflenr et Bulle ville. Dans sa Galerie historique des acteurs du Théûtre-Français , Lemazurier a donné," sur l'Hôtel de Bourg(^e, les détails que voici ; Le tliùâtre était conbtniit, conime tous ceux que l'on élevait à la même époque, ilaos un jeu de paume qui formait un carré long, très commode sans doute pour cet exercice, mais fort peu propre aux représcutationa tliéAtrales. On ne s'était pus donné la peine d'en changer la forme ; à. l'une des exirémitéa s'élevait une estrade destinée i\ figurer le proscenium des anciens. Trois ou quatre châssis de chaque cBté, une toile peinte dans le fond, quel- ques bandes de papier bleu au plancher pour imi- ter les nuages, telle était la décoration habituelle, qui servait aussi bien pour un palais que pour une priaon, pour une forft que pour un jardin. Quand 424 HOTEL DE BOURGOGNE. on vonlait faire connaître an spectateur que le lieu de la sccne allait changer, ou levait on l'on tirait nne tapisserie, et cela se faisait jusqu'à dix du douze fois dans la même pièce. Aux murailles du jeu de paume formant, comme on sait, un carré long, étaient appuyés deux ou trois rangs de galeries en charpente, lellenient dis- posées que la moitié des spectateurs ne voyaient les acteurs que de cSté, et que cens qui occupaient les premières loges, ce que l'on appelait par excel- lence les bonnes places, assis trop loin de la scène, avaient bien besoin que leurs organes de la vue et de l'ouïe fussent parfaite. On pouvait à la vérité se trouver plus prés du théâtre, en allant au par- terre; mais, outre qu'il fallait s'y tenir debout, plusieurs inconvéïtients notables pouvaient dégoû- ter de cette place. Un auteur contemporain les a dépeints assez naïvement : « Le parterre, dit-il, est r, tngMIc ic Su Rtcf, leprttei fort incommode à causo de la presse; il s'y trouve mille marauds mêlés avec les honnêtes ^cns aux- quels ils veulent quelquefois faire des affronts. Ils font une querelle pour im rien, mettent l'épée à la main, et interrompent toute la comédie. Dans leur plus parfait repos, ils ne cessent de parler, de crier et de siRler; et parce qu'ils n'ont rien paj'é à l'en- trée, et qu'ils no viennent là que faute d'une autre occupation, ils ne se soucient guère d'entendre ce que disent les comédiens. » Parmi loa acteurs qui fireut jiartie de k troupe justement ciîlèbre de l'IIôtel du Bour- gogne, nous citfrona les suivants : Bellerose, Floridor, L'ÉpT, Lafontaine, LafrauL*, Lenoir, Resneau, Saint-Martin, Valeran Le Comtfl, Bcauchâtcau, de Villicrs, llontfleury, Jodelet, Lafleur, Hauteiiïche, Raymond Poisson, Bn''- court, I.a Thoriltièrc l", Olinmpmcslé, La Thuilleric, M""' Beaucliàtcau, Beau^Til, Pois- HUÉES. — HYPORCHÈME. 425 8011, Dennebaut, Cliampraeslé , La Thuillerie, Brécourt, Bellerose, Floridor, Mqntfleury, Beau- pré, Boniface, Valliot, Belonde, etc. L'Hôtel de Bourgogne est, avec le théâtre du Marais, le véritable berceau de la Comédie- Française, et il servit ensuite d'asile à la Co- médie-Italienne, qui y demeura jusqu'en 1783. Pour ne pas nous répéter, nous renvoyons le lecteur à ce que nous en avons dit aux mots Comédie- Française, Comèdie-Italienm et Con- frères (h la Passion, HUÉES. — Le public de nos théâtres s'est civilisé. Peut-être dirait-on aujourd'hui qu'il est devenu trop débonnaire, et que sa placidité tourne à l'indifférence. Toujours est-il que jadis il se montrait beaucoup plus difficile et ])eau- coup plus chatouilleux, et que son esprit de critique allait souvent jusqu'à la cruauté. A tout prendre, mieux vaut sans doute excès d'in- dulgence qu'excès de sévérité. Comédiens et comédiennes sont des êtres humains, et nous ne voyons pas pourquoi, parce qu'ils portent un costume et se dévouent à nos plaisirs , le pre- mier goujat venu se permettrait de les insulter. Autrefois, les parterres de nos théâtres, impi- toyables envers l'acteur qui leur déplaisiiit ou chez qui se montrait une défaillance, ne se con- tentaient pas de murmures impi'obateui's ou même de sifflets cruels. Ils les couvraient de cris, d'imprécations indignes, de huées formi- dables, et le malheureux, (jui n'avait pas le droit de s'insurger, était obligé de se taire et de dévorer en silence un affront que parfois il n'avait pas mérité, des injures auxquelles il lui était interdit de répondre. Aujourd'hui, nous n'en sonames plus Là, et si le sifflet a peut-être trop complètement disparu, ix)ur certains ac- teurs qui méconnaissent aussi bien leur dignité que le respect qu'ils doivent au public, du moins T outrage n'est-il plus de mise au théâtre, où il n'avait pas plus de raison d'être qu'ail- leurs. HYPORCHÈME. — C'est le nom spécial que les Grecs donnaient aux i)aroles des cho- rodies, c'est-à-dire que les hyporclièmes for- maient le texte même de ces chansons dansées , qu'accompagnait le son des crembales, de la lyre ou de la flûte. La danse hyporchématique produisait une représentation aussi fidèle que possible des actions et des sentiments exprimés par les paroles. Ce fut là la première manifes- tation et comme le genne du théâtre en Grèce. On connaissait trois espèces d'hyporchèmes : les monodies, ou chants à une voix seule; les chants amœbées, qui étaient à deux voix; en- fin, les chœurs, exécutés par un plus ou moins grand nombre de personnes , chantant et dan- sant ensemble. L'hyporchème datait de Tâge homérique, et les premiers furent composés à Délos. L'hymne à Apollon Délien est placé sous le nom d'Ho- mère, et un autre hymne homérique nous mon- tre les dieux exécutant eux-mêmes la danse hyporchématique : Ai)ollon joue de la cithare, les Muses Tentonrent en chantant, et, tandis que dix autres dieux forment le chœur et la danse, Ares et Hermès (Mars et Mercure) mi- ment les paroles chantées par les Muses. De Délos, l'hyporchème se répandit dans toute la Grèce ; il fut principalement cultivé par Xéno- dame de Cythère, par Pratinas de Phlionte, par Pindare, et surtout par Simonide, qui y excella. I ILLUMINATEUR. — Voy. Lampiste. ILLUSTRE (l') théâtre.— La troupe de V Illustre Théâtre fut la première à la tête de laquelle Molière se trouva placé à Paris. C'était en 1615, il était alors âgé de \ingt-troi8 ans, et sa passion pour le théâtre était assez puis- sante pour le forcer à résister victorieusement aux objurgations de sa famille, désolée de lui voir embrasser une carrière condamnée par TEglise et pour laquelle les grands semblaient faire profession du plus complet mépris, en dépit de la rage qui poussait alors tout le monde aux ^ spectacles. En sa qualité de survivancier de l'emploi de tapissier- valet de chambre du roi , dont son père était titulaire, Molière avait ac- compagné Louis XIII dans un voyage à Nar- bonne, puis, de retour, il s'était livré à l'étude du droit et fait recevoir avocat. « Après son retour à Paris, dit Taschereau, Poquelin s'a- bandonna avec ardeur à son goût pour les spectacles. Fidèle habitué de Bary, de l'Orvié- tan, dont le Pont-Neuf voyait s'élever les tré- teaux, il se montra, dit-on, 8i)ectateur égale- ment assidu du fameux Scararaouche... Ce qu'il y a de constant, c'est qu'au commencement de la régence d'Anne d'Autriche , régence an- noncée sous d'heureux auspices, trop tôt dé- mentis, le goût du théâtre, loin de s'affaiblir par la mort de Richelieu, son partisan enthou- siaste, n'avait fait (fue s'accroître et s'étendre jusqu'aux classes moyennes de la société. Le jeune Poquelin se mit à la tête d'une de ces réunions de c ; Incessamment signifie « bien- tôt » ; enfin : Irrévocablement doit être entendu pour c( un de ces jours ». INCIDENT. — Dans une œuvre théâtrale, les incidents sont les événements, petits ou grands, qui, naissant de l'action principale, viennent la compliquer, en augmenter l'intérêt, et fortifier l'intrigue en l'embarrassant jusqu'à ce qu'un dernier incident prépare et amène le dénouement. (( Toutes les pièces de théâtre, dit Chamfort, ne sont qu'un enchaînement d'inci- dens subordonnés les uns aux autres, et ten- dans tous à faire naître l'incident principal, qui termine l'action... L'avantage des inci- dens bien ménagés et enchaînés avec adresse les uns aux autres, est de promener l'esprit d'objets en objets, de faire renaître sans cesse la curiosité et d'ajouter, aux émotions du cœur, la nouvelle force que leur donne la sur- prise ; d'amener l'âme par degré jusqu'au com- ble de la terreur ou de la pitié ; si l'action est comique, de pousser le ridicule ou l'indigna- tion jusqu'où ils peuvent aller. Il faut éviter la multiplicité trop grande des iucidens, dont la confusion ne servi roit qu'à fatiguer l'esprit du spectateur, et ne feroit que des impressions légères sur son ccLUir. Il est nécessaire que chaque incident ait le tems de produire son degré de crainte, de terreur ou de ridicule, avant de passer à un autre, lequel doit enchérir sur le précédent, et ainsi de suite jusqu'au dé- nouement. » L'incident très puissant et très inattendu, celui qui détermine une grande surprise et une grande émotion chez le spectateur, celui qui change de la façon la plus impréMie les con- ditions établies de l'action dramatique et qui renverse toutes les suppositions qu'on avait pu échafauder sur elles , prend le nom de coup de théâtre (Voy, ce mot). INGÉNUITÉS. — L'un des emplois de femme les plus charmants qui soient au théâ- tre. Suffisamment caractérisé par son nom, il ap- pelle seulement cette remarque que l'ingénuité est une toute jeune amoureuse, dont lé cœur s'ouvre à peine aux émotions et aux accents de la passion, et qui conserve la candeur et l'in- 430 IN6RESS0. — ININFLAMMABILITÉ DES DÉCORS. nocence la plus pure. Les deux rôles d'Agnès de T École des femmes et de Marianne de Tartufe sont les types de l'ingénuité de la haute comé- die. Celui de Chérubin, dans le Mariage de Fi- garo^ rentre aussi dans cet emploi, et offre un des rares exemples de rôles travestis quMl com- porte ; cependant il semble tenir plutôt et tout à la fois de la jeune première et de la soubrette. Parmi les ingénuités qui se sont rendues célè- bres à la Comédie-Française, il faut citer tout d^abord cette charmante M'^^ de Brie, Tamie de Molière, qui à soixante ans jouait encore Agnès de manière à faire illusion, et M'^ Mars, qui jouit du même avantage et qui a laissé imi nom impérissable. On ne saurait oublier non plus M"® Gaussin, que Dorât a chantée dans des vers langoureux, et dont de Boissy a fait ce joli portrait dans une de ses pièces, V Embarras du choix, en parlant précisément du personnage qu'elle représentait : Bien ne pent Tenlaidir, tout sied à sa personne ; Tout devient agrément par l'air qu'elle lui donne. On ne sçauroit la voir sans en être enchanté. Son air, son caractère est Tingénuité, Hais ingénuité fine , spiritueUe ; Car elle a de Tesprit presque autant qu'elle est beUe. Ses grâces sans étude , et qui n'ont rien d'acquis , Charment dans tous les tems. sont de tous les pays; Et son âme parfaite, ainsi que sa figure, Pour devoir rien à l'art tient trop à la nature. INGRESSO, — Mot italien qui signifie en- trie. Dans les grands théâtres italiens, où cha- que loge (Voy. ce mot) constitue une propriété et où, par conséquent, le propriétaire a le droit de l'occuper sans la payer, nul spectateur pour- tant ne peut pénétrer dans la salle sans payer sou ingresso. Ce droit dHngressOj qui est d'un prix unique, et que l'on acquitte à un premier guichet, ne vous donne droit à aucune place, mais seulement à l'entrée au théâtre ; il vous laisse la faculté de vous placer soit à la platea (parterre), dont l'accès reste toujours ouvert, soit à l'amphithéâtre ; mais si vous arrivez trop tard et que tout soit plein, vous n'avez plus que la ressource de vous promener dans les cou- loirs. Que si vous voulez una sedia riservata m (une place ^é8er^^ée), par exemple un fauteuil d'orchestre, vous devez le prendre à un second guichet, après avoir payé Yingresso, A la Scala, de Milan, dans la grande saison d'hiver, Vin- gresso est de 5 francs, et le prix du fauteuil de 20 francs, ce qui fait en tout 25 francs. Dans ces conditions, et bien que les loges ne soient d'aucun produit pour l'entreprise, on peut encore faire un maximum de 11,000 francs de recette. Pour les autres saisons, le prix de Yingresso est réduit d'ordinaire à 3 francs. ININFLAMMABILITÉ DES DÉCORS. — Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on recherche les moyens de parer, dans la mesure du possible, aux dangers d'incendie qui menacent incessam- ment les théâtres, et de prévenir des catastro- phes terribles qui souvent font un grand nom- bre de victimes. C'est surtout du coté de la scène que se sont toujours portés les soins, car c'est là que gît le véritable péril, avec les accu- mulations de toiles, d'étoifes de toute sorte, de cordages , de châssis, de peinture, qui à chaque instant peuvent se trouver en contact avec les innombrables becs de ^z qui jettent sur ce petit espace des torrents d'une lumière éblouis- sante. Depuis longtemps, des hommes intelli- gents et bien intentionnés se sont eflForcés de trouver des préservatifs pour les décors et les costumes, et de rendre ceux-ci sinon incom- bustibles, du moins ininflammables, ce qui écarterait une grande partie du danger. Il y a une vingtaine d'années , un industriel, M. Car- teron, avait imaginé une substance vraiment précieuse, un liquide dans lequel on pouvait tremper toute espèce d'étoffes, qui (même les plus légères, les gazes et les mousselines) de- venaient incombustibles après cette opération. Des expériences furent faites sur des costumes, sur des décors, et donnèrent les résultats les plus satisfaisants. Pourtant, comme la routine est une force d'inertie qui vient à bout de tout, le procédé de M. Carteron n'obtint dans nos théâtres qu'un succès absolument théorique, et jamais son inventeur n'en put voir l'appli- cation. Les acteurs, — les actrices surtout, et plus encore les danseuses, — prétendirent que le trempage enlevait aux étoffes des costumes leur souplesse et leur grâce ; de leur côté, les peintres affirmèrent qu'ils ne pouvaient obtenir, avec des toiles ainsi préparées, l'éclat et l'in- tensité d'effet qui leur étaient nécessaires. On INSPECTEUR DE L'HABILLEMENT. — INSPECTEUR DE LA SALLE. 431 conserva donc les vieilles habitudes, et grâce à cette incurie, à cette mauvaise volonté de la part des principaux intéressés, on eut à enre- gistrer de nouveaux et effroyables sinistres, tels que ceux de Rouen, de Nice, de Vienne, et à i*egretter la mort de plusieurs milliers d'êtres humains. Et cependant, l'invention de M. Carteron n'était pas la première de ce genre. Déjà, il y a près d'un demi-siècle, un procédé semblable avait été soumis, avec succès, à l'appréciation des hommes compétents, et les exi^ériences avaient donné de tels résultats que l'attention de l'administration su|)érieure avait été éveillée, et que l'emploi de ce procédé avait été formel- lement prescrit aux théâtres. Une ordonnance du préfet de police, en date du 17 mai 1888, portait en effet les dispositions suivantes : Art, l®^ — A l'avenir, tout directeur de théâtre de la capitale et de la banlieue ne pourra plus mettre en scène aucun décor neuf , à moins que les fermes , châssis, terrains, bandes d'eau, rideaux, bandes d'air, plafonds , frises , gazes , toiles de lointain , n'aient été rendus ininflammables, soit par une préparation des toiles , soit par un marouflage qui rendrait également les décors ininflammables. Art. 2. — Il est pareillement enjoint aux direc- teurs de faire procéder immédiatement au marou- flage avec papier ininflammable des doublures de châssis vieux à l'usage actuel de la scène. Art. 4. — Les toiles et papiers destinés aux dé- corations indiquées par l'article V^ seront toujours, avant leur emploi , soumis à l'examen de la com- mission des théâtres , ou d'un de ses membres dé- signés par nous, lequel vérifiera et constatera si les toiles et papiers qui lui seront i)rcsenté8 par les directions théâtrales sont réellement ininflam- mables. Art. 5. — La vérification et la réception desdi- tes toiles seront constatées par l'application immé- diate , sur leurs tissus , de deux mètres en deux mètres , d'une estampille de notre préfecture. Art. 6. — Le papier pareillement reconnu inin- flammable sera aussi estampillé, avant son usage, à notre préfecture. Art. 7. — L'établissement de tout décor neuf, avec des toiles et papiers non estampillés à notre préfecture, donnera lieu, non seulement à la sus- pension de la représentation , mais encore à l'en- lèvement immédiat des décors de l'intérieur du théâtre. Ce n'est pas le tout que d'être préfet de po- lice, et de rendre des ordonnances. Encore faut-il, surtout lorsqu'elles sont utiles et bien- faisantes, comme l'était celle-ci, prendre la peine de les faire exécuter. INSPECTEUR DE L'HABILLEMENT. — Naguère, à l'Opéra, ce titre était porté par un employé supérieur dont les fonctions étaient ainsi définies dans le Règlement du Théâtre de la Répuhliqiie et des Arts du 19 ventôse an IX : Les fonctions de l'inspecteur de Thabillement sont de balancer les versemens de marchandises faits aux magasins, avec les diverses consomma- tions ; d'inspecter l'emploi des matières fait par les chefs et ouvTÎers tailleurs ; de faire connoître tou- tes les infidélités ; de veiller à l'ordre qui doit ré- gner dans le magasin des habits confectionnés. Il donne , tous les mois , au commissaire du gouver- nement et à l'agent comptable , un état comparatif d'acquisitions et de consommations. Le garde-ma- gasin , les chefs et ouvriers tailleurs sont , pour la partie économique seulement , sous son inspection particulière ; il est aussi responsable des fraudes et des abus. INSPECTEUR DU MATÉRIEL. — Dans certains théâtres fort importants, particulière- ment à l'Opéra , on trouve un employé supé- rieur portant ce titre, et qui est spécialement chargé de la conservation du matériel, des dé- cors, costumes, etc. INSPECTEUR DE LA SALLE.— Chaque théâtre un peu im|X)rtant, à Paris, compte un employé supérieur qui porte ce titre. Pour se faire une idée de la nature des fonctions dont il est investi , on peut lire ce que disait, au sujet de l'inspecteur de la salle de l'O- péra, le Règlement de ce théâtre du 19 ven- tôse an IX : — (c L'inspecteur de la salle a sous son inspection tous les préposés aux bu- reaux de recette et de supplément, les divers contrôles, soit à la porte, soit au parterre, or- chestre et amphithéâtre ; les ouvreuses de loges, les concierges et portiers ; il veille au maintien de la police pendant le spectacle. Il signe les feuilles de recettes ; il est responsable des fraudes et des abus, ainsi que des accidents INSPECTEUR DU THÉÂTRE. — INTERDICTION. 432 qui pourroient résnlter dn défaut de ramonage des cheminées, et il rend compte au conunis- eaire du gouvernement et k l'agent comptable, en ce qui concerne leurs attributions particu- lières. > INSPECTEUR DU THÉÂTRE. — L'O- [KT.i il toujours et*; one pépinière k emplois de toutes sortes ; voici ce qu'on lit encore, dans le Riglemeat du Théâtre de la République et des Arts ia 19 ventôse an IX, concernant les fonc- tions de l'employé ([ui portait le titre d'inspec- teur rlu théâtre : Liuspecteur du théâtre centrale toutes les de- majiiIcE faites pour de nouveaux ouvrages et répa- rations ; en déclare par écrit la nécessité ou le rejet; contrùle ces ménieB travaux faits au théâtre ou au dépôt des fêtes nationales; certifie les mémoires des fcuroisBeurs conformes a ce i^ui a été demandé, fourni et fait; le macliinUtc, le préposé au lumi- naire , tous les ou^TÎere du théâtre et allumeurs sont SOUK Min ÎDspection immédiate pour la partie éco- nomiiiue. Il donne, tous les mois, au commissaire du gouvernemcut et à l'agent comptable, un état comparatif d'acquisitions et de consora mutions ; il est rwponsahle des fraudes et des abus. 11 est chflrgi, en outre, du maintien de la police parmi les otTriers, pendant les représentations et les ré- pétitions ; il a la surveillance des pompes, des pom- piei^ et des ouvriers aux pompes, ainsi que de la garde sédentaire. INSTRUMENTATION. — On appelli instrumenlalion ou orchestration le travail qui consiste, ponr le compositeur, à écrire toutes les parties qui doivent être exécutées par les instruments composant l'orchestre. C'est ainsi qu'il» dit d'un compositeur, lorsqn'il se livre à ce travail, qu'il instrumente ou qu'il orchestre sa partition. INSTRUMENTISTE. - Artiste qui joue d'un instrument de musique. INSTRUMENTS. — On trouvera, au mot orcktslre, tous les détails relatifs à la com- position des orchestres d'importance di' au nombre et an groupement des instruments qui t'encourent à l'exécution musicale. En ce qui concerne ces instruments mêmes, nous n'a- vons qne peu de chose à aîont«r. Nous dirons seulement qne tons les artistes qui font partie d'un orchestre doivent fournir chacun l'instru- ment dont ils se servent, à l'exception des contrebasses, des timbales, et de cens qni for- ment la batterie (tambour, grosse caisse, cym- bales, triangle), qui sont fournis par les admi- nistrations théâtrales. Ces demiera, qui ne sauraient être transportés sans difficulté, res- tent toujours dans l'orchestre. Quant à ceux qni appartiennent aux autres eiécatants, le foyer de l'orchestre est généralement pourvu d'un certain nombre d'armoires qui servent à les enfermer lorsque l'exccntion est terminée. INTERDICTION. — Il arrive qne la cen- sure (Voy. ce mot) met son veto sur une pièce avant son apparition devant le public, et en in- terdit préventivement la représentation. D'au- tres fois, c'est après une ou plusieurs représen- tations qu'on a vu l'autorité administrative, on le ministère, ou le souverain lui-même, in- terdire une pièce et s'opposer à ce qu'elle fût jouée davantage. Dans les première temps du théâtre, alors que le pouvoir royal était omni- potent, on vit des choses singulières à divers ti- tres. En 1667, rur/c/e, autorisépar Louis XIV, est interdit pur le Parlement après sa première représentation , et ne peut reparaître à la scène qu'un peu plus tard. Vingt ans après. Racine, sur la demande de M""' de Maintenon, écrit pour les jeunes filles de Saint-Cyr Eslher et Athalie; mais voici qu'on s'avise de découvrir dans ces dens chefs-d'œuvre des portraits et des allusions, et que la représentation publique en est interdit* : Alhaïie ne put être jouée qu'eu 1716, et Esliier qn'eu 17^1, longtemps après lamort du poète. En 1686, Campistron avait donné à la Comédie-Française une tra- gédie intitulée Phraate; après trois représen- tations, il la voit interdire. Il en est de même, .l'année suivante, d'une tragédie de Dupuy, Varron, défendue après sa septième soirée. En 1702, on laisse jouer dis fois une comédie de Boindin, le Bal (TAuteuil, puis on enjoint aux comédiens de la retirer. En 1727, Boissy ne peut faire représenter qu'une fois sa tragédie d'Akesie et Adm'ele. Vingt autres exemples pourraient être donnés de faits semblables, ùmanant d'un pouvoir qui u'uvait correctif. Pendant IVpoque révolutionnaire, où l'on peut malheureusement dire (|ue l'absolutisme populaire remplaça trop souvent l'absolutisme V()yal, on vit interdire ausaî nombre de pièces. La liste serait longue k dresser de tout*» celles IXTERDICTIOX. li frein ui 483 qui furent proscrites soit par k Comiunne ou le C'imité de salut ))ublic iiKissant pour le compte et sous l'influcuce de Robespierre, soit jiar le comité central du canton de Paris obéis- sant aux ordres du Directoire. C'est d'abord, uu tluiâtredelaXatiou, l'Ami des lois, dv hnya, et k fameuse Paitiéla, do François de Xenf- le il'£irAc;', traKi^-'Ui cliâtcau ; puis, au tbétUre de k Répu1ilii|ue, le Timoléon de Slarie-Josi'ph C'iiénier : k TOptini, Adrien, d'Hoffmau et ilélnd; au tliùâtre Fu- vart, Monlatio et SUphaiùe, de Déjaiire et Berton, qui, interdit iipri-s s;i jiremière repré- sentation, ne put reiKiraitrc qu'après t'ora-e- tions opérées ; iiu tliwUre des Jenues-Artistes, ht Aarnnhléea primaires ou les Elections, vaii- DICTIOBIIAIHE bC TBËATUB. deville de Martuinviile ; l'iiistoiit de tes ouvm- f^'S, et de bien d'auta-B qni furent dans le même cas, est reatt^; i-éJèiire. Il va siuis dire (|ue le Consulat et !e nouverneraeut imix-rial ne montri^rent ni plus de loii de plus en plus irrévocablement, elles iront certainement à sept ou huit. Ce sont là de petites malices adminis- tratives un peu cousues de fil blanc, mais qui ont toujours quelque influence sur les retarda- taires et sur les badauds. ISABELLE. — L'un des personnages de Tancienne comédie italienne. Il fut importé en France par la belle et fameuse Isabella An- dreini, et fut tenu plus tard par la fllle du cé- lèbre Arlequin Dominique, Françoise-Marie- Apolline Biancolelli , dont la sœur jouait les Colombines. Tandis que Colombine était une soubrette, Isabelle était un type d'amoureuse, mais d'amoureuse un peu maîtresse-femme, et touchant à l'amazone. Comme la plupart des autres caractères de la comédie italienne, Isa- belle trouva plus tard sa place sur les petites scènes de la Foire. ITINÉRAIRE. — A l'époque où les théa- très, en province comme à Paris, relevaient directement du ministre de l'intérieur, qui nommait ou révoquait les directeurs, ceux d'entre ceux-ci qui dirigeaient dans les dépar- tements des « troupes ambulantes 3 étaient tenus de dresser, avant le commencement de chaque année théâtrale, l'itinéraire qu'ils comp- taient sui\Te dans le cours de la campagne ; cet itinéraire était soumis par eux au ministre, et, une fois approuvé par lui, ne pouvait plus être modifié. Comme le même arrondissement théâtral était quelquefois exploité par deux et même trois troupes, le directeur de la première avait l'avantage de tracer son itinéraire avant son ou ses confrères, et cet avantage n'était pas illusoire, car il se Réservait naturellement le séjour dans chaque ville au moment où il gavait que ce séjour devait être le plus pro- ductif. Depuis que le décret de 1864 a rétabli la liberté industrielle des théâtres, peut être directeur qui veut, et tout directeur n'a à s'entendre qu'avec les municipalités des -silles qu'il désire exploiter. ( Voy. Arrondissement THÉÂTRAL.) JAN KLAASSEN. — Ce nom est celui du héros des marionnettes hollandaises, du petit homme de bois qui, dans la patrie de Rem- brandt et de Wouwerman, s'est approprié non Bans sncci'S les coutumes turbulentes et la ga!té un pou cynique du Punch anglais et de notre Polichinelle. JANOT. — Type populaire qui fit fortune à Paris, sur nos théâtres de second ordre, quel- tjn» de Juiot BU Ibt&tre 6tt VutéWs u ques années avant la Ré\'olution, et qui est resté célèbre. Il fut inventé par Dorvigny et prit naissance dans un vaudeville de cet écri- vain, Janot ou les Batlus patent Vamende, qui et dans lequel le fameux comique Volange fit courir tout Paris pendant plus de 200 reiiré- sentations. C'est à l'aide du type de Janot que Dorvigny mit à la mode ce langage baroque et fut représenté en 1779 aux Variétés amusantes, | tant imité depuis, qui cherchait et trouvait le 488 JARDINS PUBLICS. comique par la burlesque interversion de pensées et des mots, comme dans ce fragment d'une de ses chansons : Je suis Janot ; mes actions comiqaes Ont fait de moi rire depms longtemps, Et de mon pèr' je suis le fils unique, Quoiqu' cependant nous étions douze enfants. Un jour, la nuit, j'entendis IVer mon père ; Il vint à moi, et m' dit comm' ça : a Janot, Va-t' en chercher un peu de beurr* pour ta mère , Qu'est bien malad' , dedans un petit pot. j> J'entre en passant chez mon oncle Licorne , J'ii dis comm' ça : La vo- gue du Jardin Beaujon ne fut cependant pas arrê- tée par ces accidents, et se poursuivit jusqu'en 1824, époque où il fit place à des constructions. Jardin de Psyché. — Situé à l'angle de la rue Plumet et du boulevard des Invalides, ce jardin fut inauguré en 1816, et n'eut qu'une courte exis- tence. On y voyait des feux d'artifice, des danses, des fêtes champêtres , des pantomimes et des exer- cices de corde. Jardin du Delta. — Ouvert en 1818, au mo- ment de la grande vogue des Montagnes russes , ce jardin offrit ce divertissement au public, et y joignit des bals et des feux d'artifice. Le Delta, qui était situé à l'extrémité du faubourg Poisson- nière , n'obtint cependant qu'un succès médiocre ; il disparut en 1824 , pour faire place à de simples maisons de rapport. Nouveau Jardin de Tivoli. — Fondé par le fa- meux physicien Robertson , cet établissement fut ouvert en 1826, à l'angle de la rue de Clichy et de la rue Blanche, et obtint bientôt une vogue prodigieuse, justifiée par le souci qu'il prenait des plaisirs du public. Outre ceux qu'on trouvait d'ordinaire dans les lieux de ce genre, on y voyait le superbe ca- binet de physique de R(>bertson, de brillantes ex- périences de fantasmagorie , des ascensions aérosta- tiques d'un genre nouveau, des jeux hydrauli- ques, etc. Le succès du nouveau Tivoli se soutint pendant plusieurs années, jusqu'au moment où, la fureur des jardins publics s'apaisant, il dut se transformer en un simple bal. Jardin turc. — Ce jardin, qui avait eu une grande vogue à la fin du dix-septième siècle , la re- trouva lorsqu'en 1836 il s'avisa de donner des con- certs sous la direction du fameux chef d'orchestre Jullien, qui sut y attirer la foule. Le Café turc, dont les salles et le jardin étaient alors très vas- tes, conserva pendant plusieurs années la faveur du publie. Château des Fleurs. — Ouvert aux environs de 1845, au bout de l'avenue des Champs-Elysées, cet établissement charmant donnait des concerts très soignés , dans lesquels on vit se produire pour la première fois une jeune femme qui était appelée à devenir une grande artiste, M"« Ugalde. Plus tard , il devint un simple bal public , puis disparut tout à fait. Jardin d*hiver. — Situé aussi aux Champs- Elysées, entre le Rond-point et l'Arc de l'Étoile, le Jardin d'hiver, qui date de la même époque que le Château des Fleurs , était une sorte de petit pa- lais de cristal , luxueusement orné des plantes les plus délicates, des fleurs les plus charmantes, d'arbres exotiques , de pelouses , de jets d'eau , etc. On y donnait de très beaux concerts dans lesquels on entendit, entre autres, le Désert et le Christophe Colomb de Félicien David , puis des bals par sous- cription , des bals d'enfants , de grandes fêtes de nuit. Pourtant , ce bel établissement ne put se sou- tenir au delà d'une quinzaine d'années. Le Pré Catelan. — Celui-ci était un vaste parc, situé au bois de Boulogne , dans lequel on donnait des concerts en plein air, des bals , des kermesses , des spectacles de pantomime, des fêtes de nuit, etc. II semblait qu'il eût tout ce qu'il faut pour réussir, et cependant, ouvert aux environs de 1855, il avait cessé d'exister au bout de cinq ou six ans. Le Chalet. — Etablissement moins grandiose et plus intime, situé aussi au bois de Boulogne, et où l'on trouvait aussi des spectacles , des concerts, des divertissements variés. Il ne fut guère plus for- tuné que le précédent. JEANNOT. - Voy. Janot. JETÉ. — Mouvement de danse qui n'a j)oint de valeur propre par lui-même, mais qui fait partie du Coifpé (Voy. ce mot). JETÉ-BATTU. — Autre mouvement de danse, un peu plus compliqué que le précédent. JETER DES POMMES CUITES. — Les mœurs du théâtre, en ce qui concerne les rela- tions du public avec les acteurs, ont singuliè- rement changé depuis deux ou trois siècles et se sont heureusement modifiées. Il fut un temps où les spectateurs, très exigeants et peu endu- rants, ne laissaient passer à un comédien au- cune négligence , aucune faiblesse même passa- gère ou involontaire. Les sifflets, les apostrophes JETON. — JEU. Ub blessantes ne tardaient pas k fondre sur le mal- heureui, et il arrirait qu'on lui lançait même sur le théâtre, pour lui marquer le mépris qu'on faisait de lui, des projectiles d'un genre particulier, tels que pommea cuites ou œufs pourris. De là cette locution, encore employée aujourd'hui lorsqu'on veut parler d'un comé- dien dont le talent est au moins médiocre : — « Il estmauvais à lui jeterdes pommes cuites! » JETON. — On donne le nom de jeton à une gratification accordée par le directeur d'un théâtre à un acteur qui lui a rendu service en se chargeant gracieusement d'une tâche qui n'est point la sienne, comme -.de consentir à remplacer au pied levé un camarade absent ou malade, de lire un rûle en scène pour ne point faire manquernn spectacle, etc. — En province, les directeurs qui font de fréquentes excursions i allouent parfois un jeton k leurs artistes à titre du frais de déplacement. JEU. — Au seul point de vue du théâtre, le mot jew comporte plusieurs significations qu'il est utile de pi'éciser. Tout d'abord il faut cons- tater que, au dix-huitième siècle, le nom de théâtre semblant ti'op noble pour eux, on don- nait celui de/eu aux petits établissements dra- matiques qui abondaient aux Foires Saint- Germain, Saint-Laurent ou autres. Encore &ut-ii distinguer ; lenom de^us'apphquaità l'entreprise, tandis que le théâtre, matérielle- ment parlant, s'appelait la loçe. On aurait dit. par exemple, que le^ew de Baxter, on le^éu de Francisque, attirait la foule, et que le feu avait détniit la loge de Nicolet, ou la loge d'Audinot. On voit la différence. Parfois cependant, dans l'usage, il arrivait que l'un se confondit avec l'autre. La seconde acception du mot jeii se rappor- tait à la repràontation proprement dite, et la caractérisait particulièrement. Ainsi, on disait que l'Opéra avait par semaine trois jours de Jeu (Voy. ce mot) pour indiquer qu'il donnait seulement trois spectacles, et qu'un accident s'était produit à la Comédie- Italienne pendant le^eM. 446 JEU DE SCÈNE, JEU MUET, JEU DE PHYSIONOMIE. Aujourd'hui, le mot jeu ne s'applique plus qu'à rexécution des acteurs. On dit d'un co- médien qu'il a le jeu ouvert, ou en dehors, d'un autre qu'il a le jeu concentré, ou en de- dans, de celui-ci que son jeu est brillant, de celui-là qu^ son jeu est pitoyable. Les détails du jeu d'un acteur sont infinis : ils compren- nent l'organe, la démarche, la tournure, la dic- tion, la physionomie, la correction, la &ntaifiie, puis l'innombrable quantité de qualités ou de défauts divers que chacun peut posséder. Nous n'avons pas à aller plus loin ; il nous suffit d'a- voir caractérisé le mot en faisant connaître sa valeur. JEU DE SCÈNE, JEU MUET, JEU DE PHYSIONOMIE. — Trois choses qui, tout en étant relativement distinctes, se confondent pourtant de telle façon dans Faction théâtrale qu'il est impossible de les traiter séparément. Le jeu de scène proprement dit est souvent arrêté et réglé d'avance : la façon de faire une entrée, d'effectuer une sortie, de faire une pas- sade, d'opérer en scène une rencontre ou une reconnaissance, tout cela se règle aux répéti- tions ; mais combien de nuances le comédien intelligent, adroit et bien inspiré n'apportera- t-il pas souvent dans l'exécution de ces divers jeux de scène, et quels effets n'y pourra-t-il pas trouver ? L'artiste qui doit mourir en scène, celui qui doit reproduire un élan de fureur, celui qui aura à représenter un i\TOgne ou un fou, pourront multiplier à l'infini les jeux de scène, qui seront pour eux la source d'effets toujours nouveaux et inattendus. Dans le genre comique, on peut dire que le jeu de scène est inépuisable; toutefois, là surtout, il ne faut pas qu'il soit excessif, sous peine de tomber dans la trivialité et le mauvais goût. Les jeux de théâtre qui contribuent ù la vérité de la représentation , a dit Chamfort , et ceux qui servent seulement à la rendre plus agréable , peu- vent s'exécuter par une seule personne, ou ils dé- pendent du concours de plusieurs acteurs. Dans ce dernier cas, la vraisemblance exige que les degrés de leur expression soient proportionnés au degré d'intérêt que leurs personnages prennent à l'action qui se passe sur la scène. Dans les images que nous offre le spectacle, de même que dans les tableaux, la figure principale doit avoir toujours sur les au- tres l'avantage de fixer principalement les regards. Il n'est pas moins essentiel , dans les jeux dont il s'agit, que les attitudes et les gestes des divers acteurs contrastent ensemble le plus qu'il est pos- sible. Tout, au théâtre, doit être varié. Nous y portons le goût pour la diversité à un tel point , que nous voulons non seulement que les acteurs diffèrent entre eux, mais encore que chaque jour ils diffèrent d'eux-mêmes, du moins à certains égards. L'envie de multiplier les jeux de théâtre fait souvent que la comédie dégénère en farce. Dans l'Avare de Molière, il est très naturel qu'Harpagon, voyant deux bougies allumées, en éteigne une; mais il n'est guère vraisemblable qu'il la mette dans sa poche, encore moins que maître Jacques la lui rallume. Quelquefois les jeux de théâtre sont poussés si loin qu'ils étouffent l'ac- tion principale et empêchent le spectateur d'enten- dre le dialogue. C'est un défaut qui n'est suppor- table que quand le spectateur n'a rien à entendre de bon. Mais le jeu de scène n'est pas toujours un jeu actif. Souvent il est muet, et ne se mani- feste que par le geste de Facteur, ou l'accent de sa physionomie, ou tous deux à la fois. Le jeu muet i)eut porter en lui une indicible ex- pression, et certains grands artistes y trouvent le moyen de faire naître chez le spectateur une émotion profonde et indéfinissable. nis en présence de (Jiiinctiua Flaminins, qui y fut proclamé le likTatenr d'Argos, ils furent encore l'objet de la sollicitude de l'empereur Adrien. ïfais il ne paraît pas que ces jeux aient duré aussi longtemps, car, aprt's Adrien, aucun écrivain n'en fait plus mention. Tout en leur donnant moins d'importance et un caractère moins solennel que les Grecs, les Romains eurent aussi des jeux, dont quel- ques-uns étaient célébrés en l'honneur des dieux, dont d'autres étaient offerts au peuple par'des magistrats ou des particuliers qui voulaient soit aolenniser quelque grand événement, soit simplement flatter la multitude et obtenir de la popularité. Parmi les principaux, nous cite- rons les suivants. Les Jeux Apollinaires (Liidi ApolUnaree), consacn'S a, Apollon, et institués après la bataille de Cannes, sur l'onlre d'un oracle trou\'c dans les livres Marciens ; ils étaient célébrés tous les ans, te l> juillet. — Les Jeux d'Auguste {Liidi Av^justaUs), qui se célébraient périodiciuement en l'honneur d'Au- guste, à Rome et dans d'autres parties de l'empire, — Les Jeux Capitolins {Ludi Capi- tolini), fondés par le Sénat sur la proposition du dictateur Camille, après la retraite des Gaulois, pour témoigner la reconnaissance pu- blique à Jupiter Capitoliu. — Les Grands Jeux, Jeux du Cirque ou Jeux Romains {LuM Maijiii, Oircenses ou Romani), les plas''8olen- nels de tous ; consacrés selon les uns à Jupiter, ù Junon et à Minerve, selon d'autres à Jupiter, à Consus et à Neptune, ils étaient préparés et présidés par les édiles curules, et se célébraient chaque aimée pcudaut sept jours, du 4 au 12 septembre. — Les Jeux Séculaires {LvdiSvfW- lares), célébrés avec moins de rt-gularité que no semblait le comporter leur titre, et qui donnè- rent lieu à l'hymne fameux d'Horace, Carmen sœeti7are. — Enfin, il y avait encore : les Jeux des Carrefours {Liidi Oompilales), célébrés an- nuellement en l'honneur des dieux des carre- JEUX SCÉNIQUES. — JONGLEUR. 453 fours ; les Jeux Floraux {Ludi Florales), en rhonneur de Flore ; les Jeux Funèbres {Ludi Funèbres) ; les Jeux de Mars {Lî(di Martiales), qui remplacèrent les bacchanales; les Jeux Palatins (Zî^e Palatini), qui se tenaient sur la colline de ce nom; les Jeux Plébéiens {Ltidi Pleheii), etc., etc. JEUX SCÉNIQUES. — Expression dont on se sert pour caractériser ce ([ui se rapporte aux représentations théâtrales chez les anciens, (juels qu'en soient le genre et la nature, et (ju'il s'agisse de la tmgédie, de la comédie, de la pantomime ou de la dause. On dira ainsi « les jeux scéniques » des Grecs, tés caractéristiques de ce t\'])e théâtral de Jocrisse, inventé, il y a près d'un siècle, par le vaudevilliste Dorvigny, qui avait abandonné Janot, son premier-né, pour faire la fortune de celui-ci. Si Volange, en per- sonnifiant Janot, l'avait ])orté aux nues. Bru- net, en pcreonnifiant Jocrisse, contribua puis- samment à la fortune de cette espèce de Pierrot parlant, aussi maladroit, aussi k'te et en même temps aussi bon que le rival toujoui-s malheu- reux d'Arlequin. Jocrisse, avec ses bas chinés, sa petite culotte, sîi veste rouge et sa perruque à queue, régna longtemps en maître sur nos théâtres secondaires, et son type se perpétua dans une foule de piè(;es dont il était le héros : le Désespoir de Jocrisse , Jocrisse jaloux, Jocrisse congédié, Jocrisse prestine seul. Jocrisse au bal de r Opéra, la Sœur de Jocrisse, Jocrisse changé de condition, etc., etc. Aujourd'hui, et depuis longtemps déjà, Jocrisse a disparu de la scène, mais son nom est resté comme un synonyme de bêtise, de bonasserie et de candeur naïve. JONGLEUR. — Nous avons, au mot ^a- tt'leur, déjà parlé des jongleurs, disant que Tun et l'autre se touchaient de près et que l'a- nalogie était grande entre eux, bien (ju'il n'y eût pas complète ])arité. C'est vers le onzième siècle, semble-t-il, (jue l'on commence à voir apparaître les jongleurs ; compagnons des mé- nestrels et des troubadours, nos premiers poètes, ïU s'associaient volontiers à ceux-ci, courant avec eux le pays et popularisant leurs chansons eu se chargeant de leur exécution. Les talents du jongleur étaient multiples d'ailleure, et on le surprenait tantôt récitant des romans ou des chansons de geste, tantôt jouant de la harpe, ou de la flûte, ou du rebec, tantôt chantant ou dansant, tantôt faisant briller son adresse dans des tours de passe-passe, montrant des animaux savants ou excitant les rires par ses grimaces. 45 1 .fO\f;LEUR. Il y «viiît k Iii f'iiii, (liinfl Ift jonylcnr, d<: l'ar- t'wti: l'tdii wiltriinlmri'iii): , et ca [in.-mi'^r amn- iirjiir (Ilii»(, le ivilt: «lu jonglcnr nV-tJiit pis WÉiiM iirriiiiTir pHrfdJH i|iitl<|ni: iiobk-sw, et M. V. KifitriK:! iit/ax \<: pnmvc <1iiiih ce passafît; (11; lu ri]ijiio;;nipliie fHi'il en a tnici-c : Du pliiH Inin ')U0 hoiin a|>nrc(:viiii]!i Ich jiin^k'iirH, nniiN li-H tniiiv'iim mtAm l'i l:i \h KiR-rri*Ti! du la nnliiiD, Kbrvimt de liôrniitii d'armcH ilntm Im j'>ut<-s et tciiirncis, pTÙcÀilaot ou liuivant le.-' ami>V-^. ^oit pnr une siirt? d'enr'<]?mcnt Tolnniiiro. suit enqun- lit'; de /l'iia'Kti'tj'ir» et d'otficierv de< b:irardes gauloi^ et des Kcalilcs Scandinaves. Le 1.^716 de ce jungl^nr belliqueux est le fameux Taillefer, ce Tynêe nor- mand du nnzïèm'^ fili'rîe, donr les prouesses et les R-l^— . .■•«Iitrnr iimnim contribiièrcnt puÎHKituimeDt à la vietoirc 4. (.es vi'-u\ roititins et les vieilles clironi- H-l£lir<'- urei! enlliuusiiiKinc les exploits de t luéiii-Mlrel : THilliri-r. kl 111..II bien conliiit Hiu lin cuviil ^iti tout nllnlt. ',11'.' Aaas li> n.inau du '^"ii. Kt le y (iuiliuir. diiiis »^^^i llutuiri lif» mit fiDt/IO'iia.eoHS, nous le raonlre m livrant . entre k'K deux amii'es, imx. tours d'udri.-sse cl de preï-tidi- •.'itnlinu <|iLi fnisnieiit déjù luirtie de lu seienec du jongieur : « Il |>rit sa lance ci>mme ti ç'edt été im bAlrmnet , et la jetunt en l'air il la recevait par la liiiiuti:. Trois fuis ainsi il Jeta sa laiiee. A la qua- trième, il s'avance et la Jette au milieu des An- glais. I! eu pciva un eu iduin corps. Puis nv rotiriint rn arriére, il jette ton l'iiêe eu l'air et la reçoit de ini'me li-ois t'ois,»! biempie k-s Anglais sodisaient l'un à l'antre que c'était un i-u<'lmi)tement. » Un niDUieut, l'emploi des divers. ^s J'onetions du jon- (rleur: Taillefor cliatito les i-xplvits des héros, il exécute des tours d'adresse et de siilitilitc, il anime les soldats, ildclie l'ennemi. r;ii' inulliuiir, ces temi'S liéi-oïiine.s furent lie l'diiite durée potif le jongleur, ijui se i-es- seiitit liicutiU de la Imîsesae de aiu origine. Ilintrioiis, joiitïleurs et butclctirs se eoufoiidi- a-Til- liienti'it, eb i>ii les lit eiiseiiiMe , dans les ciirrefimw et siii- les places iiuljlii|uoa ties "i-iiiides vilks, se lîvivi- ii toutes suites de jeu-x de bas ('tarfe pour divertir la iiopuluce, 1 (m'ils meuaieut avec eux. Au treizième siècle exécutant cus-mf mes différents tours d'adresse dt^jà ils étjiient renommés sous ce rd|ii>ort, car ou les faisant faire par des singes liien drcssi^ | un étlit rendu sous le ri'jîut de saint Louis , l'taUisHiuit un tarif pour les droits à piyer à I mit quati-c deniers, mais que si le siiifjc ap- l'entri'e de Paris sous le petit C'hàteiet, porte [ partcnait à un joiifileur. l'clui-ei n'aurait, jniur que le marchand qui np|>orLe rai t nn sirii^e paie- I toute taxe, ipi'ù le faiR' ^'iimbadcv devaTit le pt^frer. C'est de là (jiie vient le proverlie : Payer I et jongleresses de Paris habitor une seule me «( monnaip de KÙiffe. de la ville , qui bientôt prend leur nom, rue dos An siècle «uivaut, on voit tous les jongleurs I Jongleurs, pour s'appeler plus tard rue Saint- 466 JOUER. — JOUER LA COMEDIE. Julien des Ménétriers, de répliBC de ce nom, que deux des leurs avaient fondée. C'est là qu'on allait quérir ceux qu'on voulait louer pour rendre une féts plus divertissante et plus gaie. Mais il est dit que la caque sont toujours le ha- reng, et les jongleurs retombèrent dans leurs coutumes primitives en se faisant remarquer par la licence de leurs jeux. C'est ce qni amena, en 1395, une ordonnance du prévôt de Paris, leur enjoignant a de ne rien dire, représenter on chanter dans les places publiques ou ailleurs, qui pût causer quelque scandale , à peine d'a- mende arbitraire, et de deux mois de ])rison au pain et à l'eau d. Enfin, au quinzième siècle. eUcIc pu il«Di jtmglaïui, JKqi»i Gni !t IlDet le Lorrain. les jongleurs ne s'occupant plus absolument que de tours d'adresse et de vils amusemente, on recommença à leur donner le nom de bateleurs, et ils n'en counuientr plus d'antre par la suite. JOUER. — Ce mot, appli()u6 aux choses du théâtre, s'emploie dans différents sens. On dira ; « On joue telle pièce ce soir à tel théâ- tre, » ce qui signifie qu'on y représente cette ]>ièce ; on bien : « Tel thésUre ne joue pas ce soir, u ce qui revient à dire que ce théâtre fait relâche et qu'il n'y a pas spectacle ; et encore : « Tous les rôles de cet ouvrage sont bien joués, » ce qui donne lieuteudre qne l'ouvrage dont on parle est interprétai avec talent jMir les artistes qui concourent à son exécution. JOUER LA COMEDIE. — Être acteur. JOUER LES MAINS DANS SES POCHES. — JOURNAUX DE MUSIQUE. 457 On se sert de cette expression : « Il joue la comédie, » pour indiquer que tel ou tel a em- brassé la profession de comédien. JOUER LES MAINS DANS SES PO- CHES. — Phrase par laquelle on caractérise le jeu trop familier, trop sans façon d'un comé- dien qui en prend trop à son aise avec le public, (|ui ne se donne pas assez de peine pour lui plaire, et qui semble trouver que ce qu'il fait est toujours assez bon pour ceux qui viennent l'entendre. On dit de ce comédien qu' « il joue les mains dans ses poches ». JOUER DEVANT LES BANQUETTES. — Expression usitée au théâtre pour indiquer que les spectateurs sont i*ares dans la salle, et que Ton joue devant des banquettes qui en sont privées. JOUER D'ORKJINAL. — Les mots créa- tion, créer léu rôle, sont, au théâtre, d'un usaossibilité de faire son service. Parfois, l'ar- tiste qui joue au pied levé connaît à peine la pièce à l'exécution de laquelle il va prendre part, et n'a fait aucune répétition. On en a vu qui, doués d'une excellente mémoire, appre- naient au fur et à mesure de la représentation, dans la coulisse, pendant les scènes dont ils ne faisaient point partie, le rôle dont ils s'étaient ainsi chargés, et le savaient assez pour ne lX)int paraître trop emljarrasscs lorstiue le mo- ment était venu pour eux d'occulter la scène. JOURNAUX DE MUSIQUE. — La plu- part des journaux spéciaux de musique s'occu- pant naturellement de théâtre, il ne nous semble pas inutile de rappeler ici les titres de ceux qui, depuis un peu plus d'un siècle, ont existé en France. Il va sans dire que nous écarterons de propos délibéré, comme ne ren- trant pas dans notre sujet, ceux qui sont uni- quement consacrés à la musique religieuse ou aux orphéons. Le premier journal spécial publié en France portait ce titre, qui ne serait plus guère de mise aujourd'hui : .Sentiment (Tun harmoiii- phile sur diffèrvns ouvrages de imisique (175G), et n'eut que deux numéros. On vit paraître, après lui, un Journal de musique dont l'exis- tence fut assez accidentée, car elle est di\'isée en trois étapes séparées par d'assez longs inter- valles : 1770-71, 1773-74, 1777-78, après quoi il meurt de consomption. Viennent ensuite la Correspondance des amateurs musiciens^ de Cocatrix (1802-1805), le Jourtml de musique et des théâtres de tous les pays (1804), les Ta- blettes de Polymnie, d'Alexis de Garaudé (lsiO-1811), r Indicateur musical, de César Gardeton (1811)), et entin la Revue musicale, de Fétis, fondée en 1827. C'est seulement à partir de ce dernier qu'on peut dire que la jn'esse musicale existe réellement en France, car c'est là ({u'on trouve les premières manifes- tations d'une critique sérieuse, l)asée sur la comparaison historique, sur de solides connais- sances techniques et sur un profond sentiment (le l'art. Pres(iue parallèlement à la Revue mu- sicale se créait la Gazette musicale, autre re- cueil estimable et plein d'intérêt ; tous deux se fondaient l'un dans l'autre au bout de quel- (pies années, sous le titre de Revue et Gazette musicale de Paris, et formaient une publi- cation modèle en son genre, qui malheureuse- ment a pris fin avec l'année 1881. L'année 18:^:5 voyait paraître le Ménestrel, (jui est aujourd'hui à la tête de notre presse sjKÎciale ; en 1887 paraissait à son tour la France musicale, qui eut un instant d'existence bril- lante; puis bientôt on vit surgir successive- ment la Mélodie, la Romance, le Pianiste, de Chaulieu, quehiues autres feuilles éphémères dont la vie fut obscure et courte. Un peu plus VA JOTEXAUX IiE THEATRE. — JOUE.S DE JET. uM, r-»: frit U: x/r*T A:: }f(md^ mv*tr^/L '!•: f^'- ' nima rnuMiml^ *\h ÎI. f'hAr]-'rr V*r.^'., d^ ht (Jriiifpi*: inuhiral^. *\' SX^.JÎMft Az^rv^î*/ <'1'*4»; •. «^î-.* UprH/ii^rn: Chrfmiqv^mvtimh, (\h t Arimvnif.al (IHff^f^, Tri a.«^v:z lony t^mf/^ ««'w^uK: alor- çans «I^i^iaK-fi; maûc^ rJix ilnmi^r^ anné^rs en ont j vn Tialtn; un aa>$rrz îfrand nombr»:. ^^a «k'* d'à- î UmJ la ^:f:ou(h: Chrfmiqv^. rnufira!e n><7'i», Um*\*it j#ar M. Arthnr ll'rnlhard. rrc-neil f*pk-n- dide, d'un ^tiUTH al/iy^lunient n^-uf, a dont la lio^frapliie des journaux de tln-âtre. I^e-s éléments et la place me manf|ueniient à la fois |ifjur remplir une imreille u'iche. Je me Ujrnenii à prés^.-ntcr qucl- <|ucjH nMmeif(nements sommainjs, «jui malj^ré UiUt ne seront )ms sans ()ueK|ne utilité. Il w;mlile (jiie le premi(rr journal sjKîcial fjui ait ét<' fondé en Fnmce doit être \{i Journal des Théâlren^ i\\\\ parut de 177o à 177H. Ou eut ensuite //' Nouvmu Spectateur, de Le l^révost d'Kxmes ( 1 170)\FOtfservateurdffMSpecl^fcles,d(i (îhevriïT CI77:i;; juiis la d/rrespotidance dra- matiqve du (îhevalier du Coudniy (1777). La itévolution , v\umi assez sinjruliére, vit écloi'c un f^nind nombre de feuilles théâtmles : le JonrrutI den ThéâtrcHf de ljeva<;lier de Chamois (I7ÎM-I7ÎH'), dont Taut^Mir monta sur Téelia- faud révolutionnaire ; le Journal des Spectacles, de l'awîd Hoy<.T (171).'^, (|ni réservait le même sort; à Sun foiidutour : le Journal des Tlimtres et des Fêtes nationales, de Ducliosal (an TT- aii Ml) : le (hiseur dramatique, de (Jrimod de la Itcyiiicnî (an V-an VI) ; ii? Courrier des Spec- tarlf's^dv. \iV Pan, journal fort mal fait, mais plein d'intérêt vi d'utilité néanmoins pour l'his- toire t InVitrale de (îctte ép(M|u<', j)ar ce fait qu'il écai: or;'.-:îdieTi. 'iz'il drjuj&iz \^ ^^. ^rjULT^-r d^ •^.-c^a^k-s. e: ':*:':i f^îrit d^xz:,^. T&r. V • 17',«*îi ; a->^j a*e n 1 >" • 7 ; I '.- J'/unvf l 'M* TrU' ? :r? # , d^ tiiférature ft d^i art*, d^ Ilûer.iv-IiziîTiir.il an VII;: >r Journal dei Sj-^^a^'*.*, de Br^aun-'ir ^an X,. Avec la Re*Uicra::"n. r.*.::? tr'-a- vons : le Journal générât d*.* ThWm. drr Ri- CjnJ n >< 1 0- 1 '^ 1 >* u au'javl i5Uc-:-den: Us A rch /- ve.ss d^ Thalie f l^lf^-l^^'J-J : /V t'cvrrier : le Jfir^ir. r Album, le Feuilleton littéraire, le Me n for, h Lorgnette, la Pan&jrif la Xouveaufè. T Opinion, etc. C'est auiïsi la Restauratiun qui vie naitrt le fameux journal de Charles Maurice, d«»nt k-s transfonniiiion* furent nomi»rfU«es et «jui, de 1818 à lx4H, s*apfiela «ucoessivement le Camp vol(int, le Fanal des Thé'Vres, le Journal des Théâtres, le Courrier des Thé'itrfs, les Nou- velles des Théâtres et le Coureur des Sj)rcfacles. La collection complète de ce journal est an- jourrrhui aW^lument introuvable. Un autre recueil célèbre et devenu aiLSsi fort rare, c'est le Monde dramatique de Oérard de Nerval, qui [larut de I8;3i5 à IH41, avec la c«»llalx)ration de toas les écrivains de r«}cole romantique et des meilleurs dessinateurs de l'époque. On eut en- suite le Moniteur des Théâtres, de Chaalon d'Argé (l«4o) ; la Tribune dramatique, de Jac- cjues Araj;:o: le Mercure des ThéCdres (1840); la Revue et Gazette des Théâtres^ de Ponnne- reux; le Messager des Théâtres, de Victor Her- bin ; le /Succès (1848) ; Nndépmdancc drama- tiqiie (1855-1858); h France théâtrale; le 77iéâtre; puis divers jouniaux-pro^jrraniraes : l'Entracte, la Gazette des Etrangers , le Figaro- Pro^rawwK», et(\ Aujourd'hui, et dejniis bien lonjrtemixs, il n'existe malheureusement plus en France un seul journal de théîttre (pii sup- lK)rte la lecture et qui appelle l'attention. JOURS DE JEU. — Un seul thwitre, à Paris, ne joue pas tous les joui"s : c'est TOiK'ra. Aussi est-il le seul où l'habitude se soit c(m- servée de cette locution : jours de jeu , qui date du dix-septième siècle, à l'époque où les théâtres ne donnaient que trois ou quatre rc- JOURS T)E JEU. 45!l préBentations par semaine, et qui servait à ca- ractériser les jours où jivaient lien ces rcpré- BentatioQs. En ItJSft, qnand Molière vint s'établir défi- nitivement h Paris, partageant la salle du Pe- tit-Bonrbon avec les Comédiens-Italiens , ceux- ci ne jouant que trois fois par semaine, les mercredi, vendredi et dimanche, il prit les qua- tre antres jours, et donna ses si>ectacle3 les lun- di, mardi, jeudi et samedi, A cette époque, les comédiens de l'Hôtel de Bourgogne ne jouaient que trois fois, les mardi, vendredi et dimanche ; ce n'est qu'à partir de KlGl et de In foule que leiu" attira une tiiifrédie de Thomas Corneille, Camma, qu'ils se décidèrent à ajouter, au moins d'une façon extraordinaire, le jeudi à leurs jours de jeu. Les Comt'diens-Italicnsnyiint fait une assez longue aiiscnce, et liOuLs XIV ayant autorisé îlolièrc à. s'installer dans la salle du Palais-Royal, celui-ci prit, à son tonr, les mardi, vendredi et dimanche ponr ses specta- cles, et Chappuzeau, dans sou Thwlre-Fran- ems, nons donne les raisons de ce choix : — « Ces iours, dit-il, ont esté choisis a4'cc pm- denee, le lundy estant le grand ordinaire iKiur J'Alemagne et l'Italie, et jjour toutes les pro- vinces du royaume qui sont sur la route; le mercredy et le samedy iours do marché et d'af- 460 JOURS DE JEU. faires, où le boargeoia est plus occupé qu'en d'autres ; et le jeiiây estant comme consacré en bien des lieux pour nu îour de promenade, sur- tout aux académies et aux collèges. La pre- mière reprcscntation d'une pièce nouvelle se donne toujours le vendredy pour préparer l'as- semblée à se rendre plus grande le dimanche suivant par les éloges que Iny donnent l'an- nonce et l'affiche. » C'est à partir de 1C«0, épofine de lu réunion des deux troupes françaises à la salle Guéné- gaud et de la constitution définitive de la Co- médie-Française, que celle-ci prit l'habitude de jouer tous les jours ; c'est aussi en cette année leïiliM» au moyen igt. que la Comédie- Italienne, en prenant posses- sion de l'Hôtel de Bourgogne, doubla le nombre de ses spcctacies et en donna six par semaine, le vendredi seul restant njservé. Quant à l'O- péra, il ne jouait toujours régulièrement que trois fois par semaine. Voici, d'après un annaliste, qui'tlcs étaient les coutumes des tliiiitreset du public en 17tiO : — « Le Concert spirituel n'est ouvert qu'au.\ grandes fêtes et pendant certains jours du carême, où les autres spectacles sont femiés. On ne donne l'Opéra que trois fois la semaine, depuis le jeudi qui précède la fête de l'Ascen- sion jusqu'au jeudi d'après la Saint-Martin, sçavoir : le dimanche, le mardi et le ven- dredi (1); mais c'est le vendredi sur-tout qu'on (1) Celtu rédaction Bm|>bitjologique n'explique qu« JOURS D'OPERA. — JOUTE. 461 voit jouer les lx)n8 acteurs. Les trois jours où il y a le plus de monde à la Comédie-Françoise sont le lundi, le mercredi et le samedi. C'est pour CCS jours-là qu'on réserve les meilleures pièces, ou les pièces nouvelles. Les autres jours, le spectacle est moins fréquenté, excepU» les dimanches, où il y a aussi beaucoup de peu- ple. Les beaux jours pour la Comédie-Italienne sont les lundis, les jeudis et les samedis. Les dimanches sont encore des jours où Ton donne de bonnes pièces, et où le spectiicle est fré- quenté. Pendant le tems des foires de S. Ger- main et de S. Laurent, c'est-à-dire pendant les mois de Février, Mars, Avril, Juillet, Août et Septembre, tous les jours il y a spectacle à la Foire. On y voit des opéras-comiques, des pan- tomimes, des danseurs de corde, des voltij^eurs, des sauteurs, des marionnettes (1). )> En 1792, le Règlement paur l* Académie royale de musique fixait le nombre des repré- sentations ré<^ulières à quatre par semaine, les mardi, mercredi, vendredi et dimanche. En 1817, nous n'en voyons plus que trois, qui ont lieu les lundi, mercredi et vendredi. Encore aujourd'hui, ces trois jours sont les jours de jeu réguliers à l'Opéra ; mais ce théâtre donne cependant quatre représentations par semaine ; très imparfaitement la coutume de l'Opéra, qui jouait seulement trois fois par semaine depuis l'Ascension jus- qu'à la Saint-Martin , et qui , dans la saison d'hiver, de la Saint-Martin à l'Ascension , joignait le jeudi & ses trois jours de jeu ordinaires. (1) Les Spectacles de Paris, 17(»0. seulement, le quatrième jour est mobile : c'est tantôt le samedi, tantôt le dimanche. JOURS D'OPÉRA. — C'est une locution dont on se sert couramment pour indiquer les trois jours de la semaine où ont lieu les repré- sentations régulières et réglementaires du théâ- tre de l'Opéra, savoir : limdi, mercredi et ven- dredi. JOUTE. — Les joutes étaient un exercice chevaleresque qui était surtout eu homieur à l'époque de la Renaissance. C'était un combat entre deux chevaliers armés de lances, qui cherchaient mutuellement à se désarçonner. On ne doit pas confondre la joute avec le tour- noi, qui comprenait un grand nombre de par- ticipants. Le plus souvent, au contraire, les joutes avaient lieu dans les tournois, et c'était ordinairement la partie de ces grandes fêtes guerrières qui excitait le plus vif intérêt, parce (lu'elle en était en quelque sorte le couronne- ment et que deux chevaliers se présentaient pour rompre une ou deux lances en l'honneur d,e leurs dames, qui assistaient au combat. Quand les joutes avaient lieu en dehors d'un tournoi, on leur donnait généralement le nom de joutes à tous venants, grandes et plénières, — Dans les fêtes publiques, on appelle /om- tes sur Veau un divertissement dans le(|uel deux hommes, placés chacun sur un batelet, cherchent mutuellement à se faire tomber à Teau au moyen d'une longue lance tamponnée dont chacun d'eux est aniié. K KAPELLMEISTER, — Mot aUemand qui signifie matire de chapelle, et par lequel on d(î8igne le chef d'orchestre. Les Allemands, en effet, n'ont pas notre expression : chefd'&r- chestre, et se ser\-ent du mot Kapellmeieier pour caractériser l'artiste qui remplit cette fonction, que ce soit à l'église, au concert ou au thcTitre. KARAGHEUZ ou CARAGUEUZ. — La marionnette favorite des Turcs, et le person- nage particulièrement populaire des théâtres d'ombres chinoises à Constantinople. Kara- gheuz est pour l'Orient ce que Punch est pour l'Angleterre, Casperle pour l'Autriche, Poli- chinelle pour la France, Pulcinclla pour les Napolitains. Seulement, il y a une diiférence entre la marionnette turque et les marionnettes européennes : c'est que celles-ci, dans leurs plus grands excès, ne franchissent jamais les limi- tes extrêmes de la bienséance, tandis que celle- là se distingue par un dévergondage de paroles et de gestes (jui lui appartient en propre et qui en fait une personnalité tout à fait à part parmi la troupe universelle des bonshommes de bois. Comme on la dit, Karagheuz se rapproche beaucoup du Priape antique, et c'est par des exploits dignes de ceux d'Hercule auprès d'Om- phale qu'il plaît surt<^ut au peuple turc. Dans son Voi/af/e en Orient, Gérard de Ner- val a donné sur Karagheuz et sur le théàti'e à Constantinople des renseignements très curieux, (^ue je vais transcrire ici : Les acteurs, vrtus de vestes brodées d'or, por- taient sous leurs tarbouches élégants de longs che- veux nattés comme ceux des femmes. Les paupières rehaussées de noir et les mains teintes de rouge, avec des paillettes apjiliquées sur la peau du visage et des mouchetures sur lcui*s bras nus , ils faisaient au public un accueil bienveillant, et recevaient le prix d'entrée , en adressant un sourire gracieux aux effendia qui payaient plus que le simple populciire. Un irméUkalten (pièce d'or de 1 fr. 25) assurait aux spectateurs rexpressi(»n d'une vive reconnais- sance, et une place réservée sur les premiers bancs. Au demeurant , personne n'était astivint qu'à une simple cotisation do dix paras. II faut ajouter «pie le prix d'entrée donnait droit à une consommation de café et de tabac. Les sorbets et les divers ra- fraîchissements se payaient à part. Dés que je fus assis sur l'une des banquettes, un jeune garçon élé- gamment vêtu, les bras découverts jusqu'aux épau- les, et qui, d'après la grâce de ses traits pudiques, eût pu passer pour une jeune fille, vint me deman- der si je voulais une chibouquo ou un narghilé, et, quand j'eus choisi , il m'apporta en outre une tasse de café. La salle se remplissait peu à peu de gens de toute sorte ; on n'y voyait pas une seule femme ; mais beaucoup d'enfants avaient été amenés par des esclaves ou des serviteurs. Ils étaient la plupart bien vêtus, et, dans ces jours de fote, leurs pa- rents avaient voulu sans doute les faire jouir du spect4icle ; mais ils ne les accompagnaient pas , car en Turquie l'homme ne s'embarrasse ni de la femme ni de l'enfant ; chacun va de son coté , et les petits garçons ne suivent plus les mères après le premier âge. Quand la salle se trouva suffisam- ment garnie, un orchestre placé dans une haute galerie lit entendre une sorte d'ouverture. Pendant ce temps, un des coins de la salle s'éclaira d'une manière inattendue : une gaze transparente , entiè- rement blanche , encadrée d'ornements en festons, désignait le lieu oii devaient apparaître les ombres chinoises. Les lumières qui éclairaient d'abord la salle s'étaient éteintes , et un cri joyeux se fit en- tendre quand l'orchestre se fut arrêté. Le silence se fit ensuite, puis on entendit derrière la toile uu bruit pareil à celui que feraient des morceaux de bois remués dans un sac ; c'étaient les marionnet- tes, qui, selon l'usage, s'annonçaient par ce bruit, accueilli avec joie par les enfants. Aussitôt, un spectateur, comi)ère probablement, se mit à crier KARAGHEUZ. 463 à Facteur chargé de faire parler les marionnettes : « Que nous donneras-tu aujourd'hui ?» A quoi celui-ci répondit : a Cela est écrit au-dessus de la tt porte pour ceux qui savent lire. — Mais j'ai ou- « blié ce qui m'a été appris par le hodja. — Eh «bien, il s'agit ce soir de l'illustre Caragueuz, a victime de sa chasteté. — Mais comment pourras- « tu justifier ce titre? — En comptant sur l'intcl- u ligence des gens de goût, et en implorant l'aide a d'Ahmad aux yeux noirs. » L'orchestre se rcnit à jouer, et l'on vit apparaî- tre derrière la gaze une décoration qui représentait une place de Constantinople , avec une fontaine et des maisons sur le devant. Ensuite passèrent suc- cessivement un cavas, un chien, un porteur d'eau et autres personnages mécaniques, dont les vête- ments avaient des couleurs fort distinctes , et qui n*étaient pas de simples silhouettes , comme dans les ombres chinoises rte le Yen-e sur un écr.iii blanc plaré si une certaine dHaiice. Les images pnijeti-es «nr cet i-i.-ran sont wn^idéralileniuiit amplifiées, mais elles sont ronveim-s. l'ourles reda-sser, il n'y a f|u a placer le verR' peint de nianiirc que les lij.'ui'es soient renversées, on' alors elles se tronvui-ont redressées snr l'écran. Le jnxississemeut obtenu est le nip]«irt- des disliiiiccs de la lentille c.ttti- rieuro à récniii et an verre peint. Par cousc- qncnt, sî IVciiin u*t cent fois, deux cents fois pin» éloifïnc de la lentille que la ligure peinte, le •çrossisfeniciit seni 1 uij ou :iOu. Il est superflu de dire que, pour donner tout son écOat ii cotte expérience, il faut opérer dans une chambre complètement oliscure. » 11 n'y a pas encore trente ans qu'on entendait souvent retentir le son, dans ks luoa de Pmis, te cri bien connu dts enfants Lanterne magique ' la piiee ett- riewe ' C étaient de inodtètLS industriels, des Sj^ojanls, dit-on, pour la plupart, qui, pour une rétribution très raisonnable, offraient ainsi ec s|H.ctacle aux j irtitulicrs On les faisait monter chez soi, on tuiilait un ^tand drap blanc dans une thambre, les deux hommes fusaient joutr kur appan.il, et pour quelques francs on jniLurait anx ciif iiits un sjxictacle cliannaut et dout ik st niontniicnt très friands. CtttL industiiL a diiparu LVRMEs D^NS L\. VOIV — Certains conu'dicns sont doiK^i pui la nature d une fa- (nlti \(.]itnbkiin.nt piccuune pour la profes- «•lon qn lis (xeiLi nt ils ont < c qu on appelle B dLK laimes dins li ïoix ( ist-a dire que leurorgani lient a \okinti, pHudu un ton iel- Icmeiit touchant, que dm-, uni, -itiintion ten- dre, dramatiqui. itatlutiqiu ils semblent ix^l- IcniLiit sins le coup d une douleur poif^nante, Lt jhiikiit liis importaint an ^Hiint de vue se^'niquo (praii point de vue vocal, et <|ni doit son nom il l'artiste qui lui a donné naissance. Laruetto était uti coiucHlicn excellent en luêine temps i|n'uii roui)>ositeur aimable, qui se fit, dans la seconde moitié du sii'clc dernier, une piinde ivputation ii l'ancien Opliic de cet artiste, la nature de remploi auquel il attacha son nom : — "Il prit d'alxird les n'ilcs d'amoureux, mais son défaut de voix et l'air vieux de sa titpire rompée'bùrent d'y R-ussir. 11 eut le Ixiu c»iini de compre'iidra ses (( LA TOILE ! y> — LAZZL 467 défauts, et les fit tourner à son avantage en prenant les rôles de pères et de tuteurs, où il se fit une grande réputation comme acteur. On dut déplorer ensuite les succès qu'il obtint dans cet emploi, auquel il a donné son nom, et dont l'influence se fit longtemps sentir; car, ayant établi un répertoire où les rôles de pères, qui doivent appartenir aux voix de basse, sont écrits pour le ténor, on peut le regarder comme le type de ces acteui-s sans voix qui se sont succédé sans interruption à rOpéra-Conii(]ue, tels que les Dozai ville, lés 8aint-Aubin, les Lesage, les Vizentini, etc., tous excellents comédiens, mais, comme Ta fort bien remarqué Castil-Blaze, chanteui^s déplorables qui ont em- pêché (pleine meilleure distribution des rôles ne fût faite dans les opéras français, et qui ont retardé Tintroduction des morceaux d'ensemble dans la musique dramati(]ue en France. » (( LA TOILE ! )» — C'est un cri que se rappellent certainement tous ceux (]ui ont connu les anciens théâtres du boulevard du Temple. Quand l'apprenti et le jeune voyou du <( poulailler, » trouvant Tentr'acte trop long, commençaient à s'impatienter, et avaient d'alx)rd vigoureiLsement frappé le rappel avec leurs pieds Siins que le rideau consentît à se lever, on entendait bientôt de divei's côtés des voix qui s'écriaient : La foile ! la toile! et l)ien- tôt, comme par manière de mépris : La toile, ou mes quaV sotis ! Il me semble évident que ce dernier cri devait avoir pris naissance aux Fu- nambules, où le prix des dernières places était fixé précisément à quatre sous, et fjue de là il aura ravouTié sur les autres théâtres. « L'AUTEUR î L'AUTEUR ! » — C'est le cri par lequel la claque — car le public aujour- d'hui n'y est plus pour rien — réclame le nom de l'auteur après la première représentation d'une pièce nouvelle. Même depuis Tépoque, éloignée déjà, où les auteurs dramatiques ont consenti à laisser mettre leurs noms sur l'atti- che (Voy. ce mot), on ne les y a jamais inscrits le jour de la première représentation. La crainte d'un échec, toujours possible, était la cause de cette discrétion ; si cet échec se produisait, l'auteur ne se nommait pas, et son amour-pro- pre n'avait pas à souffrir. Le parterre avait donc pris l'habitude, au siècle dernier, lors- qu'une pièce obtenait du succès, de demander en masse le nom de l'auteur une fois le rideau toml)é, et lorsqu'on venait lui li\Ter ce nom il l'accueillait par des applaudissements vigou- reux. Dans le cas contraire, et si la pièce tom- bait, personne ne soufflait mot, et l'auteur demeurait inconnu de la masse du public. Aujourd'hui, le cri fameux : V auteur ! Tau- te\(r! n'est plus qu'une formalité presque ridi- cule, de même que le silence de l'affiche aux joui-s de première représentation n'est plus qu'une malice cousue de fil blanc. En effet, avec l'expansion de la presse et les habitudes de commérage et d'indiscrétion qu'elle a prises depuis nombre d'années, tout Paris sait, six mois à l'avance, le nom de l'auteur d'une pièce nouvelle, tous les journaux le répètent à l'envi le jour même de l'apparition de cette pièce, et il y a \Taiment quelque chose de bizarre à en- tendre un certain nombre d'énergumènes s'é- gosiller, à la fin d'un spectacle, à réclamer la révélation d'un secret qui n'est plus que celui de Polichinelle, (^et usage, devenu si singulier, persiste néanmoins, et rien n'indi([ue qu'il soit près de disparaître. LAZZI, — Ce mot italien, qui s'est presque implanté dans notre langue, sert à désigner toutes sortes de ])lai sauteries burlesques^ soit en paroles, soit en actions, des jeux de mots, des grimaces, des gestes grotesques et jusqu'à des détails de farces de tréte aux. Les lazzis sont caractérisés sinon j)ar la grossièreté de la plai- santerie, du moins par une certaine vulgarité ; c'est du comique sans distinction, de la bouf- fonnerie réelle que ne relève pas l'esprit, mais dont l'elfet de surj^rise et de rire est presque infaillible. Les anciens comédiens de l'Hôtel de Bourgogne, Turlupin et autres, étaient fa- meux par leurs lazzis ; Molière n'en a pas dé- daigné l'emploi dans ses farces merveilleuses, et plus d'un de nos acteurs du jour leur a dû une partie de sa renommée (1). (1) Le singulier du mot itaUen est Inzzo , le pluriel lazzi. Puisqu'en fmnçais nous avons pris l'habitude d'employer au singulier le pluriel italien et de dire un 4C8 LÉ ANDRE. LEiVXDRE. — L'un des types d'amoureux de l'ancienne comédie italienne. Ce fat d'abord ua jeune damcrc-t, élùgant, aimable, bien rn de» fenuncH, et c'est soufl cet aspect que le représentait ('hurles Roini^ncfli, peu d'années avant la fermeture du premier théâtre de la Comédie-Italienne. Plna tard, le type se modi- iu, et Lt'andre, confondant un peu sou carac- tère avec celui du Capitan, dennt une espèce de Iwll&tre l'aniteux et insupportable, (jui était Houvent la victime de si propre sottise. C"c»t ainsi qu'en dégénérant il s'est introduit dans Léaniltv, ■l'uprè* Calbft. notre pantomime, où il n'eut plus qu'un amou- reux lienié, toujours repoussé i»ar Colombiue, tundis qu'il est joué et souvent Utttu ]>at Ar- lequin, et m^mc par Pierrot, Sous sa première fcirme, aimable et ^■acieusu, Léaiidre h été mi» i, lu scène, en France, par Pierre Corneille, puis )wr Molière.qui nous l'a montré dans TA''- lourdi, dans les Fuiirherm dp iScapfn, dniiâ k Médecin maigri lui. et enfin jiar Hestonclies, dans la Fausse Agiii-s. iC Bemblc iiïtiin.'! d'on tormci te pluriel t notic langue, et d'ùcrite iln laf:U. LE(j'OX. — Dans les théiUres lyriques, et même dans les théâtres de vaudeville, chaque artiste reçoit, soit dc^ chefs du chant, soit des chefs d'orchestre, une série de Icçoil^?, liir*|u*il a un rôle à apprendre dans une pii-ce. Lors- que, ^dce à ces leçons, chacun sait ainsi son rûlc musical, on procède aux leçons d'ensem- ble, qui sont donnée.s par k-s mêmes chefs de service. On procède de même à l'égard des chœurs; seidement, comme ici le tra\'ail indi- viduel entraînerait trop de longueurs, on diràe les voix par genre en les réunissant par frrou- pes, et on dimne les leçons séparément & tous les sopranos, à tous les contraltos, à tous les U'nore, à tous les Wrytons, à toutes les basses, apri-s ([uoi viennent les ensembles du chœur complet. Ce n'est que quand ce travail préli- minaire a été fait avec le plus grand soin, qu'on peut entamer celui des R'i)ôtitions proprement dites. LECTURE. — A Paris. lonMiu'une pièi-e va être mise à l'étude dans im thiïitri', on commence jxir en faire une lecture aux altistes (|ui sont chargés de rinterpn.4;er. Ceux-ci sont convoqués à cet effet, et la lecture est faite dans l'un des foyers du théâtre, soit |Kir l'au- teur ou l'un des auteurs de l'ou\Tage nouveau, soit par une personne désignée jmi eux jxiur remplir cet office. Cette lecture, on le comprend, C4it essentielle, afin de donner aux artistes une pleine connaissance du sujet, de la conduite de l'œuvi-e, des caract^'res des divers personmi- ges et de leure relations entre eux. lia lecture fuite, on procède à lu distribution des n'iles, chatjue acteur reçoit le sien : dès le lendemain on en fait la collation, et le jour suivant 1» pièce entre en repétition. Dans les théâtres lyriques, ou fait simultanénient la lecture du iwme et de la musique ; c'est î^nêralcment le compositeur qui se cliai'g:e d'exécuter liit- mêine sa partition au piano. LELIO. — Lclio était i'un des iiersomiagos de l'ancienne comédie italienne: c'était l'a- moureux heureux, aimé de celle qu'il aimait, toujours aimable, pii, de Ixnine hnmeur, avec une pointe de comi'iue. Ce caractère fut tenu à Paris avec nue rare distinction par divers — LETTRES PATENTES. 469 artistes, entre autres par Louis Riccoboni, qui y obtint de grands succès et qui les méri- tait par son talent, sa grâce, son élégance et son heureuse physionomie. Molière a introduit la figure de Lelio dans deux de ses comédies, T Étourdi et le Com imaginaire; Marivaux a employé ce personnage dans sa seconde Surprise de VAniour, elier, deux hom- mes qu'on ne s'attendrait pus sans dout« à trouver en cette affaire : l'abbé Jlaury et Ro- bespierre lui-même. Cba]>elier, cliargi- du nip- port, établissait ainsi la question de la lil)erté théâtrale ; Il faut examiner si celte liberté doit l^trc accor- dée, Kl k'8 principes la réclonient, tsi l'intérêt de l'art la sollicite, ai le bon ordre n'en peut pas souf- frir. Nous croyons, Messieurs, ecta('lo qu'une garde extérieure, dont les troupes de ligne ne se- ront point chargées, si ce n'est dans le cas où les of- ficiers municipaux leur en feraient la réquisition formelle. 11 y aura toujours un ou plusieurs offi- ciers civils dans l'intérieur des salles , et la garde n'y pénétrera que dans le cas où la sûreté publique serait compromise, et sur la réquisition expresse de l'officier, lequel se conformera aux lois et aux règlemens de police. Tout citoyen sera tenu d'o- béir provisoirement à l'officier civil. D'un seul coup, ce décret concis réglait toute la matière , non seulement en instituant sur les bases les plus larges la liberté théâtrale, mais encore en établissant pour l'avenir les rap- ports entre auteurs et entrepreneurs , en accor- dant à tous les établissements dramatiques la faculté de représenter les chefs-d'œuvre de la scène française, (jui sont le imtrimoine de la nation, enfin en disposant la police ordinaire des salles de spectacle. Lorsqu'il fut rendu, les théâtres existant à Paris étaient au nom- bre de onze. On en vit bientôt s'élever un grand nombre, dont quelques-uns, comme le Vaudeville, les Variétés (Montansier), le théâ- tre Louvois, les Jeunes- Artistes, les Jeunes- Élèves, le théâtre Molière, eurent une exis- tence brillante et donnèrent à l'art dnimatique LIBERTE DES THEATRES. nne impuJsion féconde. Pourtant, après une expérience de plus de quinze ans, dont les résultats étaient loin d'être restés infructueux, la liberté thi'àtralc succombH, avec tant d'au- tres, sous les coupa d'nn pouvoir absolu. Un décret impérial de 1807 vint bmariuement la supprimer, et rétablir d'un coup le monopole, les privilégies et la délimitation des genres ; et tandis que Paris comjitait onze théittres en 17!)1, on ne lui en laissa que huit en 1807. Peu à [wu, il est \Tai, et par la force même des clioses, ce nombre s'augmenta, si bien qu'en lHi'3 Paris possédait dix-huit thratres grands et petits, sans compter les spectacles de curosités, jardins publics, etc. Néanmoins, (in en était toujours au régime du bon plai- sir, et si le monopole tendait à en restreindre les effets, c'était toujours le monopole. La révolution de 183(1 vit rouvrir cette question toujours agitée de la liberté des théâ- tres, l^e monde spécial a'cmut, des pétitions furent adressées aux Cliambres, on put croire un instiint que le décret de 1791 allait de nou- nonvean régir la matière ; mais les esjiéranceB que le nouveau régime avait fait naître sous ce rapport se dissipèrent bientôt, et la situa- tion resta ce qu'elle était. Malgré tout pour- tant, le nombre des théjitres à Paris augmen- tait toujours, et on en comptait vingt et un en 1833. Il noua faut franchir nne longue distance et arriver ii l'année 18tî4 [H>ur voir enfin l'art théâtral affranchi des entraves qui depuis si longtemps le tenaient enchaîné. Le premier empire avait coufisipic la liberté théâtrale ; le second devait nous la rendre, et il le fit tout 474 LIBRETTISTE. d'un coup, sans crier gare, par ce déci'et daté du 6 janvier 1804 : Art. /*'. — Tout individu peut faire construire et exploiter un théAtre , à la charge de faire une déclaration au ministère de notre Maison et des Beaux- Arts et à la préfecture de police pour Paris ; à la préfecture, dans les départements. Les théâ- tres qui paraîtront plus particulièrement dignes d'encouragement pourront être subventionnés soit par TEtat, soit par les communes. Art, H. — Les entrepreneurs do théâtres de- vront se conformer aux ordonnances, décrets et règlements pour tout ce qui concerne l'ordre, la sécurité et la salubrité publics. Continueront d'être exécutées les lois existantes sur la police et la fer- meture des théâtres, ainsi que sur la redevance établie au profit des pauvres et des hospices. Art, III, — Toute œuvre dramatique, avant d'Ctre représentée, devra, aux termes du décret du 30 décembre 1852, être examinée et autorisée parle ministre de notre Maison et des Beaux- Arts, pour les théâtres de Paris; par les préfets, pour les théâtres des départements. Cette autorisation pourra toujours être retirée pour des motifs d'ordre public. Art. IV. — Les ouvrages dramatiques de tous les genres , y compris les pièces entrées dans le do- maine public, pourront être représentées sur tous les tliéâtres. Art, V. — Les théâtres d'acteurs enfants conti- nuent d'être interdite. Art. VI. — Les spectacles de curiosité, de ma- rionnettes, les cafés dits cafés chantants, cafés- concerts et autres établissements du même genre restent soumis aux règlements présentement en vigueur. Toutefois, ces divers établissements seront désormais affrancliis de la redevance établie par l'article 11 de l'ordonnance du 8 décembre 1824 en faveur des directeurs des départements, et ils n'auront à supporter aucun prélèvement autre que la redevance au profit des pauvres ou des hospices. Art, Vil. — Les dii-ccteurs actuels des théâtres autres que les théâtres subventionnés sont et de- meurent affranchis envers l'administration de tou- tes les clauses et conditions de leurs cahiers des charges, en tant qu'elles sont contraires au pré- sent décret. Art. VII l. — Sont abrogées toutes les disposi- tions des décrets , ordonnances et règlements dans ce qu'elles ont de contraire au présent décret. Art. IX. — Le ministre de notre Maison et des Beaux- Arts est chargé de l'exécution du présent décret , qui sera inséré au Bulletin des lois et rece- vra son exécution à partir du l**" juillet 1864. Tel est rhistorique du régime de la liberté théâtrale en France. Nos théâtres continuent de vivre, depuis 18G4, sous l'effet du décret qu'on vient de lire, et rien n'autorise à penser que cette situation doive être nïodifiée dans l'avenir. LIBRETTISTE. — Auteur de livrets d'o- péra ou d'oj>éra-comi(iue. Pendant deux siè- cles la France a été bien pourvue sous ce rap- port, et nos compositeurs ont eu la chance de rencontrer, comme collaborateurs, des écrivains qui comprenaient à merveille les nécessités et les exigences de la scène lyrique , et qui leur fournissaient des livrets excellents. Pour l'O- ]>éra, c'était Quinault, Danchet, La Motte- Iloudard, Roy, Cahuzac, Fuzelier, Scribe; lK)ur l'opéra-comiquc, Favart, Sedainc, An- seaume, Marmontel, Laujon, La Chabcaus- sière, Monvel, Marsollier, lîoffman, Dejaure, Saint- Just (Godard d'Aucourt), Longchamps, Alexandre Duval, Etienne, Dupaty, Planard, Creuzé de Lesser, Tiiéaulou, Scribe, IMélesville, Saint-Georges, Sauvage, Brunswick, Michel CaiTc, de Leuven, M. J. Barbier, etc., etc. Par malheur, l'art de faire des li\Tefes d'opéra semble se perdre de jour en jour, et nos musi- ciens auraient grand besoin de retrouver un Scrilxî ou un Saint -Georges qui les remette dans la bonne voie et les empêche de s'égarer ainsi qu'ils le font. L'Italie, elle aussi, a possédé de bons libret- tistes, eu tête desquels il faut placer Métastase et AiX)Stolo Zeno, qui étaient de véritables poètes. Dans le siècle présent, plusieurs écri- vains se sont distingués sous ce rapport , entre autres Felice Romani, Romanelli, Solera, Rossi, Cammarano, Piave, Marco Marcello, etc., etc. Il est \m\ que la besogne de ceux-ci était faci- litée par ce fait qu'ils nous empruntaient sans vergogne nos j)ropres livrets, les aiTangeant ou les dérangeant ensuite à leur guise, et même qu'ils ne se gênaient point pour ac<îomm()der au goût de leui-s compositeurs nos drames, nos comédies et nos vaudevilles, témoins Frnani, Rigoktto, Lucrezia Borgia, Marion Deîornu', LIBRETTO. — LIVRÉE (grande, petite). 475 la Traviata, et tant d'autres qu'il serait trop long d'énumérer. LIBRETTO. — Mot italien qui désigne un livret d'opéra (Voy. ce mot). LIGNES. — C'est en comptant les lignes d'un rôle que le comédien peut se rendre compte de son importance matérielle. Aussi son premier soin est-il de faire ce compte. Il y a des rôles de trois li»;:nes, de dix lignes, qui sont de simples acrcessoires, et (jui ne sont pfis de nature à préoccuper beaucoup la mémoire de ceux qui en sont chargés. Par ctmtre, il y en a de 500, de 800, de 1,000, de 1,200 lignes, qui sous ce rapport exigent un véritable tra- vail. Dans la conversation de théâtre, le mot lû/nes est toujours sous-entendu, et l'on ne s'en sert jamais : un comédien ne dini pas : « Mon rôle a 300 lignes, d ou : <( j'ai un rôle de 600 lignes à apprendre, » mais bien : «. Mon rôle a 3oo, y* ou : « j'ai un rôle de 600 à ap- prendre. y> LIRE UN ROLE. — Dans le cas d'indis- position subite d'un acteur, et lorsque i)ersonne n'est prêt à le remplacer, il arrive i)i\rfois qu'on demande au public s'il consent à ce qu'un au- tre acteur Use le rôle de l'absent. Si le public ne fait point d'opposition, on voit alors un comédien entrer en scène la brochure à la main, et lire en effet le rôle en essayant de le jouer autant qu'il lui est possible en une telle situa- tion , qu'accompagne toujours un peu de ridi- cule en dépit de la bonne volonté du sujet (jui se dévoue. — On assure qu'un jour un comé- dien vint lire ainsi en scène le rôle d'un per- sonnage qui était aveugle ! Il fallait au public une grande dose de sang-froid pour conserver quelque illusion devant un tel spectacle. A une époque où les chanteurs voulaient bien prendre la peine de se donner une solide instruction techniiiue, où ils étîiient meilleurs musiciens qu'ils ne le sont généralement au- jourd'hui , à une époque où la troupe de l'O- péra-Comique comptait dans ses rangs des compositeurs comme Gaveaux, Solié, Fay, Le- brun, des virtuoses accomplis tels que Martin sur le violon, Chenard sur le violoncelle, Bap- tiste et M"*' Pingenet sur le piano, il arrivait qu'un artiste accomplissait ce tour de force de venir remplacer un camarade malade, et de lire ainsi un rôle, poèm^ et musique, la partition en main, devant les sixîctateurs. Solié, particuliè- rement, se fit remarquer plusieura fois sous ce rapport, sans jamais broncher, iiiôme dans les morceaux d'ensemble les plus difficiles. Il est juste de déclarer que depuis bien longtemps le public n'a pas été à môme d'admirer une telle habileté. LIVRÉE (Grande, Petite). — Dans la langue théâtrale, on appelait autrefois rôles à li- vrée ^ ou plus simplement Uurée, toute une classe nombreuse de rôles appartenant à l'emploi des comiques et qui tenaient cette dénomination tant du costume que du caractère des person- nages (ju'ils représentaient. Ces rôles ne sau- raient être entièrement confondus avec ceux des valets proprement dits, car si parmi ceux- ci l'on compte des rôles à livrée, il s'y trouve aussi nombre de rôles à costume, tels (]ue les Scapin, les Mascarille, les Gros-René, etc., dont le vêtement devenu classique n'a aucun rapport avec la li\Tée. Les rôles qui composîiient la livrée, ou la casaque, car on leur donnait aussi ce nom, étaient matériellement représentés par la Cîisa- que rouge, symlwle de l'emploi, et, selon leur importance, se divisaient eu deux catégories. On avait la grande livrée ou grmule casaque, qui comprenait ce qu on pourrait appeler les jxîreonnages héroïques de l'emploi, les valets de premier ordi-e; on trouvait là les rôles extrê- mement importants de Pasquin du Dissipateur, Hector du Joueur, Sganarelle du Festin de Pierre, Labranche de Crispin rival de son maî- tre, et même Figaro, ([ui, malgré son costume traditionnel et spécial , était considéré par les comédiens comme faisant partie de la grande li\Tée. Dans le répertoire classique, la grande livrtîe formait le fond et la partie la plus importante de l'emploi des premiers comiques. Cet emploi, aussi brillant (]ue difficile, était le but de toutes les ambitiDUS pour les artistes bien doués sous ce rai)port. Revêtir la grande ciisacjue, c'était prendre possession des première grands rôles 476 LIVREE («BASUE, PETITE). comiques, de ces rôles que Pre\illo Auj,cr, La Rochelle, Dazincourt Diij^zoïi Monrose, avaient élevé au pTcniiLi ran^ et qui exigent, avec de l'intelligeiiLe et une ctounaiite sou- plesse de jeu et de phj Bionomie du m >rdant. de la vivacité, et parfois meiiK. comiue dans Fi- garo, de la profoudcui Diiif 'riété al)solue de ceux qui les possèdent, il va sans dire qu'ils ont le droit de les occuper sîins rétribution. Mais on ne ixiut cei)endant, tout en possédant une loge, pénétivr au théâtre Siins payer Yingresso (l'entrée), (jui, pour la Scala par exemple, est ordinairement de cinq ciencieuxj je dois les consigner ici. Dans le petit nlma- nach Ub Sitectacles de Paris, pour 1700, la liste de < employés de l'Opéra mentionne, parmi les Ouvreurs et OurreuKs. « le sieur Pigoreau, ouvrant la baignoire, lea timballes (?), les crachoirs (!!). )> LOGES D'ARTISTES. — LOINTAIN. 479 francs par pereonne pour la saison d'hiver, et de trois francs pour les autres saisons. C'est ce droit d'entrée qui est la meilleure source des revenus de l'entreprise, droit d'entrée unique pour toutes les places, au moins en ce (jui con- c<îme les grands théâtres (l). LOGES D'ARTISTES. — Les lo^es sont les chambres dans lesquelles chaque artiste doit procéder à sa toilette de théiUre ; elles sont si- tuées derrière la scène ou sur ses cotés, aux di- vers étages des escahers de l'administration. Chacun des principaux sujets occupe une lo^a à lui seul réservée, dans latiuelle il est absolu- ment chez lui ; les acteurs secondaires s'habil- lent parfois deux ou trois dans une même lojre ; quant aux choristes, aux fij^urants, aux com- parses, aux daiLseuses du corps de ballet, il y a pour eux et pour elles des lo«i:es communes de huit, dix, quinze, vingt personnes et plus. Dans les gmnds théâtres, la loge d'un artiste en renom forme parfois tout un petit appar tri- ment, avec antichambre, pièce principale, cal)i- nets de toilette, eto. Les femmes surtout font de ces loges de petits réduits charmants, meu- bler et décorés avec le goût qui ne les quitte jamais. Les hommes s'y font volontiers de vé- ritables petits musées, qui ne laissent pas d'offrir un certain intérêt. Le comédien passe une lx)nne partie de son temps dans sa loge, ut l'on comprend (ju'il veuille se la rendre le plus agréable possible. Au point de vue du mobilier professionnel, à part les porte-manteaux, qui sont toujoui*s garnis de costumes, le meuble essentiel d'une loge d'artiste est la toilette et sa glace indispensable. C'est là qu'on « fait sa figure, T) et c'est là que sont réunis tous les ob- jets nécessaires à cette ojx' ration, selon l'emploi et le sexe de Tartiste : pots de rouge, flacons ou boîtes de blanc, cold-cream, poudre de riz, pompons, pattes de lièvre, i)inceaux, crayons, couleurs diverses, gomme liquide, crêpés pour barbe et moustaches, etc. L'artiste procède seul à cotte opération délicate et difficile ; pour le reste, il a, selon le sexe, à sa disposition, un (1) En Italie , on ne dit pas, comme chez nous : pre- mières , secondes loges , etc., mais loges de premier, de second rang : pakhi di prima, di accouda jîla , etc. habilleur ou une habilleuse sj^écialement atta- ché à sa personne, et qui est chargé de l'aider à se costumer. Si l'on veut savoir ce que peuvent être les loges dans un théâtre immense comme l'Opéra, avec le pereonnel formidable d'un tel théâtre, on n'a qu'à consulter M. Nuitter, dont les ren- seignements ne sauraient être plus précis : Pour le service de cet immense personnel il existe au nouvel Opéra 80 loges destinées aux sujets du chant et de la danse. Ces loges, réparties dans rétendue de deux étages, se composent chacune d'une petite antichambre, de la loge proprement dite et d'un petit cabinet de toilette. La loge est garnie de deux glaces , dont une , placée à peu do hauteur du sol , permet de se voir des pieds à la tête ; de «juatre becs de gaz, placés de chaque côté des glaces; deux de ces becs, ajustés à un tube souple, glissent le long d'une tringle, où ils peu- vent être maintenus à telle hauteur qu'on le dé- sire. Enfin il y a dans chaque loge une cheminée et une bouche de calorifère, afin que l'artiste puisse clioisir à son gré la chaleur sèche ou la chaleur humide. Outre les loges des sujets, il existe : une grande loge de GO places avec autant d'armoires pour les choLMirs hommes ; ime loge de 5i) places avec 50 toilettes pour les chœurs dames ; une loge de 12 places pour les élèves du cliant ; une loge de 12 places pour les enfants de chœurs; une loge de 34 places avec autant d'armoires pour le corps de ballet (honnnes); une loge de 20 places avec au- tant de toilettes pour les danseuses coryphées; une loge de 20 toilettes pour les danseuses du pre- mier quadrille ; une loge de 20 toilettes pour les danseuses du deuxième quadrille ; une loge de 20 toilettes pour les danseuses élèves ; une loge do 20 toilettes pour les marcheuses; une loge de IDO places pour les comparses. C'est, comme on le voit, un total de 538 personnes, pour lesquelles est organisé le service de l'habillement. A proxi- mité des loges se trouvent deux postes pour les coiffeurs et deux postes à chaque étage pour les avertisseurs. LOGES D'AVANT - SC KNE. AVANT-SCÈXE. Voy. LOINTAIN. — Le loinfain est la partie la plus reculée de la scène, celle qui est limitée par le mur du fond. Celle qui lui est opposée, qui forme ravant-seène, s'appelle la/are. LOUP. — LUMIÈRE ÉLECTRIQUE. 480 LOUP. — Le loup est assez difficile à dé- crire, et présente un côté un peu mystérieux. Ce n'est guère qu'aux répi^titiona qu'on entend parler de lui, par ce fait que tous les efforts tendent alors à ce que sa présence ne se pro- duise pas aux représentations. Lorsque, jœn- dantlea études d'une pièce, une scène ou un froment de scène ne ie présente pas d'une fa çon normale, naturelle qu on sent instinctive ment, sans pouvoir le nettement de finir qtic la situation oifrc quelque chose de ^afrue d'incomplet, de confu"" qui doit troubler 1 es prit du spectateur et ne pii'j le laisser «-itisfnit on dit qu'il y a un I&up. On étudie le jinssafre alors; chacun ; auteur, acteurs, dii-ectcur, rt'- gisseur. y met du sien ; on cherche, on coupe, ou ajoute, on corrige, et, en fin de compte, à force de travail et do bouue volonté, on finit par tuer le loup et par remédier au mal. LUMIÈRE ÉLECTRIQUE. — Si Ton n'a pu parvenir encore — ce qui pourtant ne sau- rait tarder — à faire scn-ir l'électricité à l'éclai- mtre normal de nos théiUres ( Voy. Eclairage), depuis longtemps déjà la inniiêre électrii]ue coucourt d'une façon brillante à l'éclat et à la splendeur de leur mise en sei-ne ; on peut même dire que, sous ce rapjKirt, elle a quelque peu révolutionne les coutumes ayant cours. C'est de 1846 que datent les premiers easaia en ce genre, et c'est à cette épo(:[ne que la la- micre électrique fit su première apparition à rOpéra, pour le fameux effet de soleil levant du Prophète. Je vais emprunter à M. Ch. Kuit- ter (1) quelques détails sur son emploi k ce théâtre : La lumière électrique se prdte aux effets les plus divers. Kon seulement elle produit un éclairage (Jont nul autre foyer lumineux ne pourrait égaler riutonsitù, mais elle vient en aide au décorateur I>our l'imitation des pliénomènes phyEÏqucs ou la réulistitioo d'effets f éeriqueK. Klle colore l'ean d'une fontaine, qu'elle rend lumineuse; elle projette ent les murK d'une église les reflets de vitraux éclairés par le soleil ; elle produit les éclairs ; elle traverse un prisme et fait paraître Hiir une toile peinte un véritable arc-en-ciel. Le spectateur, liabitué maintenant à la perfection toute scientifique de ces divers effets, sourirait sans doute si ou lut rarc-€ii-riel ai serrurerie el loile trane^M- LUMIERE ELECTRIQUE. 481 rente quo nous trouvons montionnc , en 1748 , dans l'inveotaire des décore de l'Opéra. Le laboratoire deetiné à la préparation des piles électriques a été placé au nouvel 0[>rra dans une des colles du rez-de-cbaufisôe. On a ainsi é^'ité tous les inconvénients que peut présenter le transport des acidoa dans les étages eupérienrs du bAtimcnt. Cette salle, d'environ cinquante nié trc;: superficiels, est garnie de six longues tables en cliOne , couver- tes chacune d'une épaisse feuille de verre qui les préserve de l'action corrosive des acides et place la pile dans des conditione parfaites d'isolement. Sur ces feuilles de verre sont rangés les élénierits de» piles électriqucE, nystcme Bunsen, grand modèle. Le nombre de ces éléments , qui était de 60 à l'an- cien Opéra, a clé porté à 70, en raison de l'agran- dissement des surfaces à éclairer et de la résiatance produite par la grande longueur des Sis. La dis- tance que le courant électrique doit parcourir, de la salle des piles au (loint le plus éloigné de la scène, est de 122 mètres, et la longueur totale des tils pour le service de la lumière électrique est d'environ 1 ,200 mètres... Le courant électrique |)artatit de la pile e^t transmis ù l'appareil produi- sant sur le tliéiltre les différents effets exigés par la mise en scène. Cet appareil pe compose d'une lampe Il régulateur automatique placée dans une lanterne en bois munie d'une lentille et d'un miroir en verre argenté. Cet appareil est diKpi)8é do fo^on à pren- dre toutes les inclinaisons néceseaires pour produire les effets demandés, pour faire suivre tel jierson- nage ou tel groupe par un rayon lumineux, etc. A l'organisation de la lumière électrique , M. Du- boBC à joint celle de la lumière Drummond. Une double caiialisatien spéciale de gaz d'éclairage et d'oxygène permet la production do cette lumière, moina intense que celle de l'électricité... Un pont a été disposé au-dessous du cintre, de câté et dans toute lu longueur de la scène, pour le service de l'éclairage électrique. Des prises de cou- rants , placées ù chaque plan ainsi que sur le théâ- tre et dans les dessous, permettent, à tel point DICTIORNAIRS DC THËATQE, donné, de relier les appareils a\ ec les générateurs d'électricité. Telle est l'installation de ce service au nouvel Opéra. Ou voit qu'elle se prête ù tous les besoins du théâtre. Les dessins vgale, et en même temps très agréable. i> M MACCTJS. — Personnage de !a farce anti- que, très populaire chez les Latins, et qui semble avoir pris naissance chez les Oaqiies, dans la Campante, province da pays napolitain, d'où il passa ii Rome. On croit (jiie le ^raeciis fut un type comique représenté tout à la fois par des act«un! virantB et par des marionnettes, semblable en cela au Pulcinella naixilitain et à notre propre Polichinelle, auxquels ou pré- tend qu'il a donné naissance. Quelques-uns le représentent, d'après certains monnmeats an- tir]ues, la tête entièrement nue, avec de gran- des oreilles, un nez prodigieusement camard, le visage grimaçant, la physionomie d'un sot gourmand, ivrogne et débauché, et une double bosse devant et derrière, Ch. Magnin, après avoir rappelé ce physique horriblement difforme qu'on prf'te à Maccus, proteste cependant, dans son Hinhire des Jfarminetles, contre la laideur hideuse que, selon lui, on lui accorde trop W- né^'oIemcDt ; — w J'ai tort, dit-il, de donner ici, suivant un mauvais usage, le nom de Mac- cus à tous ces bossus obscènes. Ijc véritable Maccus de Campante n'a rien de ces difformi- tés hors de nature. Flusiuurs statuettes anti- ques, et, en première ligne, celle de bronze trouvée lï Rome en 1727, nous le repr«'«entent le sternum et les éi>aules légèrement uniucs et la tunique serrée à la taille. C'est là lo seul Maccus que le Pulctuella napolitain puisse re- MACHINERIE THEATRALE. 485 vendii^uer pour son ancêtre. » Ce qui est cer- tain, c'est que Maccus fut la plus célèbre des marionnettes antiques. MACHINERIE THÉÂTRALE. — Le mot macUinei-ie n'est pas admis par les lexico- graphes ; mais il est absolument passe dans la lan^e théâtrale, et son utilité pratique lui donne forcDineut cours dans le lanj^age usuel. Ce mot de machinerie semble comprendre tout à la fois et l'ensemble des instruments, appa- reils, enf,'iiis de toutes sortes dont l'emploi est destiné à assurer le jeu des machines (treuils, tambours, moufles, cordages, etc.), et l'art sï complexe et si difficile du machiniste, art au- quel se rapportent la construction, ré<[uipe et la plantation des décors, puis l'exécution et la manœuvre des trucs, la confection des prati- cables, le jeu des trappes, des apparitions, des travestissements, des transformations, en im mot l'organisation, l'aménag'ement, la mise en œuvre et en mouvement de tout ce qui con- courtà l'action scénique au point de vue maté- riel et décoratif. Ce n'est pas sans un ceitain étonnement que l'on peut constater trn fait .issoz singulier ; c'est qu'à une époque où la mécanique opère des prodiges sans nombre, oii l'emploi de lava- peur, de l'électricité, des forces hydrauliques, change la face du monde industriel et nous fait assister chaque jour k des miracles nou- veaux, la machinerie théjitrale est restée pres- que complètement statiounaire, et demeure, à peu de chose près, ce qu'elle était il y a plus de deux siècles. On peut se rendre compte de ce fait en consultant V Encyclopédie , les livres Spéciaux de Boullet, machiniste de l'Opéra, et du colonel Grobert , publiés au commencement de ce siècle, les monographies des théâtres construits dans ces dernières années ; ou y verra que les procédés, les moyens employés n'ont pas\'aric depuis deux cents ans, et que les mo- difications apportées dans le jeu des machines sont à peu près insignifiantes. Je vais emprun- ter ici quelques renseignements à M. Ch. Nuit- ter, qui a traité la question a\'ec soin : A l'origine , tous les décors étaient coDstruile de la même manière , et les liiéStres que Ich marcliands de jouets fabi'iijuent pour les enfants peuvent en doanor l'idée. Ces décors présentaient un parallé- lisme complet, d'après une perspective régulière, toujours pris lan elles dimi- nuaient de iiauteur et se rappiocliuient du centre 486 MACHINERIE THEATRALE. de la scène. Les plafonds ou bandes d'air qui les accompagnaient, s'abaissant progressivement , lais- saient au fond un étroit espace fermé par un ri- deau , ou souvent même par un châssis. Voilà quel- les étaient les dispositions des anciens décors. Les améliorations apportées par Servandoni en- 1726 consistèrent dans un emploi plus ingénieur des ressources de la peinture et des illusions de la perspective , mais la machinerie resta la môme. Les moyens mécaniques qui mettaient en jeu les décors étaient bien simples. On accrochait les châs- sis ou coulisses à des portants fixés sur des chariots qui roulaient dans le dessous sur une espèce de rail. A chaque plan, ces portante étaient doubles. Les chariots étaient reliés à un treuil unique placé au centre des dessous, de telle façon qu'à chaque tour de treuil Tun des portants d'un même plan avançait sur le théâtre , tandis que l'autre reculait dans les coulisses hors de la vue du public. On en- levait alors le châssis fixé à ce dernier portant et on le remplaçait par celui qui devait apparaître au prochain changement. Il suffisait d'un nouveau tour de treuil pour produire un mouvement inverse. Tour à tour chaque portant reculait ainsi pour re- paraître revêtu d'un nouveau décor... Ce système de machinerie s'appliquait aussi bien à un paysage , où chaque coulisse représentait ordinairement un groupe d'arbres, qu'à un intérieur. De chaque côté, dans ce cas, c'était encore une série de châssis, présentés de face, où les lignes obliques de la perspective se raccordaient tant bien que mal. Les portes et les fenêtres n'existaient qu'en peinture. Les entrées des acteurs se faisaient tout simplement en passant entre deux coulisses. De face, à mi point convenable, un décor d'archi- tecture traité de cette façon pouvait produire quel- que illusion ; mais pour peu qu'on fût placé de côté, qu'on montât aux secondes ou aux troisièmes loges , les lignes de perspective ne se raccordaient plus et la confusion était complète. Les décorateurs em- ployaient fréquemment alors pour les intérieurs des séries de colonnes qui rendaient les défauts de la plantation moins visibles. Jusque de nos jours on avait conservé l'usage de quelques décors de ce genre. Le salon qui a servi aux dernières représen- tations de Lucie de Lamermoor était encore cons- truit de cette façon. Dans ces décorations, il n'y avait pas de prati- cables, c'est-à-dire de ces constnictions légères qui, placées derrière les châssis, permettent de faire descendre ou monter les personnages, de leur faire gravir les marches d'un escalier, traverser un pont , etc. Les anciens machinistes n'en réalisaient pas moins des effets très compliqués. Leurs efforts so portaient sur les c^pparitions, les gloires, les vols. Le répertoire de l'Opéra était depuis l'origine presque exclusivement emprunté à la mythologie; il n*y avait guère d'ouvrages où l'on ne vît les dieux des- cendre de l'Olympe, les démons sortir des enfers ou s'y précipiter. Nous ne pouvons mieux faire comprendre ce qu'était alors l'art du machiniste qu'en empruntant aux li\Tets de l'époque la descrip- tion de quelques-uns des effets qui furent le plus admirés. Voici quelle était au prologue de Cadmus, en 1G74, la scène du Dragon. On se trouvait d'a- bord dans une campagne riante. « Les danseuses rustiques qui ont suivi le dieu Pan commencent une fête qui est interrompue par une espèce de nuit qui obscurcit tout à coup le théâtre, ce qui oblige l'assemblée champêtre à fuir en poussant des cris de terreur qui font une manière de con- cert affreux avec les bruits souterrains. Dans cette obscurité soudaine, V Envie, sort de son antre qui s'ouvre au milieu du théâtre. Elle évoque le mons- tnieux serpent Python , qui paraît dans son marais bourbeux jetant des feux par la gueule et par les yeux, qui forment la seule lumière qui éclaire le théâtre. Elle api>elIo les vents les plus impétueux pour seconder sa fureur. Elle en fait sortir qimtre de ceux qui sont renfermés dans les cavernes sou- terraines, et elle en fait descendre quatre autres de ceux qui forment les orages. Tous ces vents, après avoir volé et s'être croisés dans l'air, vien- nent se ranger autour d'elle... Des traits enflam* mes percent l'épaisseur des nuages et fondent sur le serpent Pyilwn^ qui, après s'être débattu quelque temps en lair, tombe enfin tout embrasé dans son marais bourbeux. Une pluie de feu se répand sur toute la scène et contraint Y Envie de s'abîmer avec les quatre vents souterrains , tandis cjue les quatre vents de l'air s'envolent. Dans le même instant, les nuages se dissipent et le théâtre devient entiè- rement éclairé. y> Quelques-uns de ces effets étaient sans doute exécutés d'une façon un peu naïve. Le tableau n'en est pas moins assez compliqué et met en jeu des ressources fort diverses. £n 1727, au cinquième acte de Proserpine, on voyait un désert avec des roches et des troncs d'ar- bres entre les(iuels un torrent so ])récipitait d'une hauteur de vingt pieds. La chute d'oau était imitée par plusieurs gazes d'argent qui formaient la cas- cade au moyen de deux roues do douze pieds de diamètre chacune. Le mouvement de l'eau agitée par la chute du torrent se faisait par le moyen de trois espèces de colonnes torses irrégulières, de MACHINERIE THÉÂTRALE. 487 différentes proportions et placées horizontalement, qui tournaient dans le même sens. Pour tennîner sur ce chapitre, empruntons au même document la dencription d'un décor exécuté eu 1734, à la reprise de Philomèle^ par Parrocel le fils, d'Avignon. On voit que dès cette époque les machinistes sa- vaient produire une illusion assez complète. De nos jours, l'eau et le feu sont encore imités par des moyens analogues. Un seul agent nouveau a été in- troduit au théâtre ; c'est la lumière électrique , dont les effets sont si brillants et si variés... A partir de 1829, le rideau de l'Opéra, s'abaissant à chaque acte, permit de construire les escaliers de la Tentation, des Huguenots y le pont de Guil- laume Tell et d'autres praticables qu'il n'eût pas été possible de faire venir à vue. En même temps on put pour les salons , pour les intérieurs , se servir de décors fermés ; quant aux moyens mécaniques , ils furent toujours les mêmes. La manœuvre a con- tinué à se faire à main dliomme. Les machinistes enlèvent et portent en équilibre les châssis de dix à douze mètres de hauteur. Pour le jeu des rideaux et des fermes, un système de contrepoids facilite le travail. C'est tout, et c'est ce qui existait à l'ori- gine de l'Opéra. On voit que, ainsi que nous le disions plus haut, les proa^iés de la machinerie théâtrale restent aujourd'hui ce qu'ils étaient jadis. On n'a, pour s'en convaincre, qu'à voir les dessins de machines donnés, ily a un siècle, parl'-É'/i- cyclapédie, ceux publiés en 1801 par Boullet, chef machiniste de l'Opéra, dans son Essai sur Part de construire Us théâtres y enfin ceux du gentil livre de J. Moynet, V Envers du théâtre, publié il y a dix ans ; on verra, par la compa- raison de ces différents ouvrages, que les moyens et les instraments sont demeurés exactement les mêmes. Il est juste d'ajouter, toutefois, que l'habileté des décorateurs et des machinistes ayant fait de grands progrès, on obtient au- jourd'hui des effets beaucoup plus puissants, plus artistiques, plus saisissants que ceux aux- quels nos pères étaient habitués. Pour terminer cet article, il ne me semble pas inutile de grouper ici presque tous les mots qui fonnent le vocabulaire de la langue du machi- niste; on verra, par retendue relative de ce vocabulaire, quelle est l'importance de l'art de la machinerie thàitnile : A me. Fil. Appuyer, Filer, Bâti, Gloire, Brigade, Gril, Brigadier, Guinder, Cassette. Herse. Changement. Levée. Changement à vue. Lointain. Chapeau de famé. Manœuvre. Charger. Mât. Chariot. Moufle, CJiÙMis. Plafond. Châssis oblique. Plan. CJiâssis à développe- Plancher. ment. Plantation, Cintre. Planter, Commande. Poignée. Gmtre 2>oids. Pont volant. Cheminée des contre- Portant. poids. Praticable. Conidor du cintre. Raccordement. CosUère. Reculée. Coté cour. Régler. Côté Jardin. Rue. Couplet, Sablière, Dessous. Su^spension. Dessus. Tambour. Équipe. Tiroir. Équiper, Traînée. Face. Trappe. Fausse rue. Traptpe anglaise Faux châssis. Trappillon. Faujrjil. Treuil. Ferme. Truc. Feuillure. Vol. Tous ces termes s'appliquent soit au person- nel, soit au matériel, soit aux instruments, soit à Tespace, soit enfin au travail. On trouvera à Icnr place, dans ce Dictionnaire, l'oxplioiitiuu an plus grand nombre et des pins iiiijxTtnnts. MACHISES, ^~ On donne le nom de ma- chines, un tluiâtre, i'i tous les pnx-ijdré niL'caiii- quc8 à l'aide dcsiiueU on produit sur la scène un mouvement mateaucoup ])lus compliquées, beaucoup plus variées que celles des anciens, et qu'on obtient aujourd'hui des effets incomparal dément plus puissants. Certains théâtres, à Paris, tels que l'Opéra, le Cliâtelet, la Porte -Saint-Martin, la (Jaité, spécialement organisés pour le jeu des machines, obtiennent des résultats véritable- ment surprenants, et les Anglais, «jui ont poussé très loin les recherches en ce sens, ne nous sont nullement inférieurs. Il est même arrivé que sur de petites scènes, telles (^ue celle des Varié- tés, qui ne sont machinées que d'une façon en (pielque sorte rudimentaire, on a produit des effets aussi agréal.)les que curieux. MACIIIXISTE EX CHEF. — Dans un grand théâtre, le machiniste en chef est un personnage fort important ; on s'en rend faci- lement compte en songeant au talent qu'il doit d(''ployer et à hi responsal)ilité énorme qui pèse sur lui. C'est lui ([wi doit procéder à la cons- truction de tous les châssis de décors, de tous les pratical)les, de tous les bâtis, (jui doit régler les plantations, exécuter les trucs et en régler le jeu, étaldir le mouvement des trappes et trappillons, étiuiper toutes les parties de la dé- coration, organiser les manaunres, commander à un nombreux personnel en fixant à chacun la tâche qui lui incombe, envisager l'ensemble et surveiller les mille détails de la machinerie, parer aux accidents (jui peuvent se produire, veiller sans cesse à la confection , à l'entretien et au renouvellement d'un matériel très coû- teux, se faire obéir sans hésitation de tous ses subordonnés, avoir l'œil partout et sur tous pour éviter toute surprise, tout faux mouve- ment, toute erreur, dont les conséquences pour- 490 MACHINISTES. raient être incalcalablcs, soit aa point de vue de la marche des représentations, soit en ce qui concerne la sûreté des personnes et du th(!Atre même*, que sais-je ? Un machiniste habile, on le comprend, est un homme pré- cieux, qui doit joindre les qualités du caractère, l'autorité du commandement, le sang-froid dans le danger, au talent de Tartiste et aux connaissances professionnelles. Le machiniste doit être tout à la fois menuisier, cliarpentier, ébéniste, serrurier, mécanicien ; l'étude du dessin, celle de la dynamique, lui sont indis- pensables; il ne doit être étranger ni à la physique, ni à la chimie, auxquelles il peut em- prunter de précieux efiTets ; son imagination doit être sans cesse éveillée pour la construction des trucs, qui exige un véritable génie d'in- vention et une souplesse d'esprit infinie pour la découverte des moyens à employer ; enfin il lui faut avoir le coup d'œil net, nipide et sûr pour remédier aux défauts jxîssibles d'une dé- coration, régler la marche et le mouvement de chacune d'elles et aider le peintre dans la recherche et le jeu des effets de lumière. En un mot, le chef machiniste est l'âme du théâtre au ix)int de vue matériel, celui qui, à ce point de vue, est seul resjwnsable devant la direction et devant le public de tout ce qui se produit sur la scène, et dont l'autoiité doit être telle que pas un fil, pas un fétu, pas un lambeau de toile ne puisse être dérangé sur le théâtre, dans les dessons ou dans les dessus, sans sou ordre ou son assentiment. On ne trouvera |)eut-être pas ici sans quel- que intérêt la liste à ]teu près complète des chefs machinistes qui se sont succédé à l'O- péra depuis un siècle et demi. Le premier dont j'aie retrouvé la trace s'appelait François Le- jeune, et était attaché à ce théâtre vers 1730 ; il eut un fils qui fut un des bons acteurs de la Comédie-Italienne. Vingt ans après, en 1750, le machiniste en chef était un nommé Arnoult, qui eut pour successeur, en 1757, un nommé Girault. Après celui-ci nous voyons venir, en 177H, un praticien fort distingué, Boullet, auteur d'un intéressîint Essai sur l'art de cons- truire les théâtres; Boullet, on peut le dire, mourut au feu ; un soir de l'année 1804, pen- dant le spectacle, il fit une chute du cintre sur la scène et tomba raide mort (1). Il ftat rem- placé par Boutron, qui eut pour successeur, en 1816, Gromaire, lequel, vers 1830, céda lui- même la place à Constant. Aux environs de 1850, M. Sacré, qui avait fait brillamment ses preuves au Cirque, passa à l'Opéra, et le ma- chiniste actuel de ce théâtre est M. Brabant, ancien machiniste de la Porte-Saint-Martin. Parmi les machinistes qui se sont fait remar- quer dans d'autres théâtres, je citerai M. Pier- rard, qui appartenait, il y a trente ans, au Théâtre- Lyrique, M. Godin, qui a donné à la Gaîté des preuves d'une habileté peu commune, et M. Courbois, machiniste actuel de la Porte- Saint-Martin. MACHINISTES. — Les machinistes sont les ouvriers chargés du 8er\ice des décors et de tout ce (lui concerne la mise en scène maté- rielle. Leur nombre varie, naturellement, selon l'importance et la nature du théâtre auqnel ils appartiennent. Tandis qu'un théâtre de dimen- sions modestes pourra se contenter de huit ou dix machinistes, une scène de plus vastes pro- portions en exigera une vingtaine, et s'il s'agit d'un théâtre machiné, jouant des f(«rie8 et des pièces à gi-and spectacle, le nombre pourra s'élever à quarante, cinquante et quelquefois davantage. L'Oj)éra n'emploie pas moins de soixante à (juatre-vingts machinistes, qui par- fois sont augmentés de quarante ou cinquante aides extenies, comme, i)ar exemple, pour le fameux vaisseau de l'Africaine, L'ensemble du personnel des machinistes d'un théâtre prend le nom d'équipe. Cette é«juiiK* se divise généralement en trois briga- des : la brigade de la scène, la brigade du cintre et la brigade des dessous, commandées cliacune par un brigadier, qui a pour aide un sous-brigadier. Le service est organisé avec une précision c|ui ne saurait être nulle part j)lus nécessaire, et chaque homme a sa tâche si)écia1e à un poste qui lui est assigné. Dans cet apparent et immense tohu-bohu (jui signale (1) La fillo (le Boullet avait épousé Hoffman, le cri- tique fameux du Journal des Débats , l'auteur de quel- ques jolies comédies et de uombreux li\'rets d* opéras- comiques, entre autres celui des JUndes-rvut howgeoitm MACHINISTES. 491 un changement de décor sur un grand théâtre, il faut en effet qu'il ne règne aucune confusion réelle, et pour cela il faut que chacun soit à sa place, sache ce qu'il a à faire et ne s'écarte pas de sa tâche. Dans les décors avec pratica- bles surtout, et lorsqu'un nombreux personnel doit se mouvoir sur la scène , des précautions infinies sont nécessaires, malgré la prompti- tude avec laquelle le travail des machinistes doit être exécuté. « Ces praticables, dit Moynet, sont montés, fixés et recouverts de planches en quelques minutes, pendant qu'une scène se joue dans une petite décoration. Apporter les fermes de chari^ente, les mettre en place, placer les crochets d'écartement, claveter les planchers qu'on descend du cintre, revêtir les praticables, mettre en place la décoration elle- même, tout cela sur un plancher chancelant, sans qu'un retard, un accident se produise, c'est l'affaire de quelques minutes, et, comme nous l'avons dit, deux cents compai-ses, une trentaine de chevaux courront tout à l'heure sur ces planchers. » Les machinistes doivent faire preuve, dans leur travail, d'adresse et de vigueur, de force et de rapidité. Ceux-ci transportent les châssis et les mâts, ceux-là grimpent comme des chats au sommet de ces mêmes mâts pour y fixer les feuilles de décoration , l'un traverse le haut du théâtre sur un pont volant pour passer d'un corridor à l'autre du cintre, tandis qu'un autre part de l'escalier des dessous pour exécuter un ordre et arrive d'un trait sur le gril, après avoir franchi la hauteur de la scène et des des- sus. Il est prodigieux de voir l'adresse de ces hommes robustes, qui maintiennent en équili- bre, en les transportant, des châssis ayant parfois jusqu'à dix mètres de développement et dont le poids est souvent fort inégal en raison de leur forme particuHère. Et l'ampleur de ces châssis tend constamment à se développer. « Les châssis d'autrefois, dit encore Moynet, qui avaient quatre pieds de large à l'Opéra, c'est-à-dire environ 1",35, et 21 pieds de haut ou 7 mètres, développent à présent jusqu'à 8 et 9 mètres avec leurs brisures. Le temps n'est pas bien éloigné où les décorations seront plus hautes et plus larges aux derniers plans qu'aux premiers. Nous avons déjà, au fond du théâtre, des châssis de imnorama qui atteignent 14 mètres de hauteur et 6 à 7 mètres de large. On est obligé de les briser, au moyen de char- nières ou couplets, dans les deux sens, largeur et hauteur. Sans cette précaution on ne saurait oîi emmagasiner ces immenses feuilles de déco- ration. Pour les remuer dans un espace relati- vement exigu, au milieu de personnes nom- breuses qui vont et viennent pour remplir les fonctions diverses dont elles sont chargées, au milieu de ce tohu-l)ohu et d'un éclairage mo- bile qui menace d'incendie à chaque fausse manœu\Te, on comprend la difficulté à vaincre pour retirer une décoration et en mettre à sa place une autre pendant Tespacc si court d'un entr'actc, et pourtant ce désordre apparent, tout cet embarras, ces difficultés, sans cesser d'exister, échappent aux yeux du public lors- qu'il s'agit d'un changement à vue... A rOj)éra, le personnel est nombreux. Chaque homme, à son i)08te , s'occupe de ce qui le concerne sans se laisser distraire par autre chose. Des théâtres d'une très grande importance, où des raisons d'économie réduisent tous les frais au strict nécessaire, et où, quoiqu'on n'ait pas de sub- vention comme à l'Opéra, on monte des ouvra- ges qui, pour la richesse de la mise en scène, rivalisent avec notre première scène lyrique, on arrive avec un personnel moindre à faire un service beaucoup plus compliqué. Il y a bien quelquefois un châssis en retard ou un • autre qui commence son mouvement un peu avant le signal, mais quand on a vingt ou vingt-cinq changements dans la soirée, sans compter les trucs, les ballets, les sept ou huit cents costumes et accessoires, il est juste que le spectateur se montre bienveillant. » La manœuvre du décor proprement dit n'est pas le seul travail des machinistes. Ce sont eux aussi qui font jouer les trappes, qui procèdent aux transformations instantanées des personnages de féerie, qui font descendre du ciel les gloires entourées de nuages, eux encore qui doivent faire la pluie, le vent, la neige, les éclairs, le tonnerre, (pii doivent imiter le roulement des voitures, allumer les incendies, etc., etc. Enfin, il arrive souvent que, leur présence en scène étant nécessaire, soit pour mie manœuvre discrète, soit pour 492 MAESTBO. — MAITRE DE BALLET. porter certains fardeaux, tels qu'un dais, ou un palanquin, ou un coffre quelconque, quel- ques-uns d'entre eux doivent revôtir un cos- tume }M>ur prendre |)art à la figuration dans ces conditions iwirticulières. En résumé, le service des machinistes est très compliqué, très divers, parfois danjçereux, et il exige de leur |)art beaucoup d'attention, d'activité et de bonne volonté. MAESTRO.— Maestro, maître. C'est la qualifK'atJDn ([ue l\)n donne, en Italie, à tout coin iMJsiteur d'une (uuviv dmmatique. // signor poêta , il siijiwr maestro n»présentent notre li- ba^ttisti* et ntjtixî cianpositour. MAHSTIIOAL CEM HALO, — Vov. Ac- COJJPAiJNATKrU Al' (M.AVEl'lX. MAESTRO CONCERTATORE, — C'est ainsi qu'on désij^ne, en Italie, l'artiste qui rem- plit les fonctions de chef d'orchestre. MAGASIN. — On apj>elle maurasin le ma- tériel des habits, costumes, armes, é<:|uii)e- ments, etc., que i>osstHie chatiue théâtre et qui sont nécessaires au sernce des représentatif jus. On donne aussi le nom de majrasin au locîil où tous ces objets se trouvent déiMisi-s et réunis. — En province, où chaque acteur doit avoir sa garde-robe ( Voy. ce mot), il arrive i)ourtant * que certains artistes, i)eu founiis sous ce rap- port, ont souvent recours au magasin p^jur tel costume ou telle partie de Cfjstume qui leur manque. MAGASINIER, MAGASINIÈRE. — Em- ployé chargé de la garde, de la conservation et de l'entretien du magasin. Dans un grand théâ- tre, cet office réclame parfois plusieurs em- ployés. En 1785, rOi)éra avait un te garde-ma- gasin, )» un «( garde-magasin adjoint >• et un c 80us-garde-mag!isin. » MAGIE BLANCHE. — Ce mot, dont l'usage seml)le s'être iK*i*du, servait naguère à désigner l'ensemble des exen'ices, des exïH*rien- ces, des tours divers auxquels se livraient les physiciens, les escamoteui-s, les prestidigita- teurs. Une séance de mairie blanche était alors ce qu'on appelle aujourd'hui une séance de physique amusante, et réunissait les tours de passe-passe et de gobelets, les tours de cartes ou d'adresse, les exercices d'escamotage, de substitution, de mécanique qui ont fait la re- nommée des Cornus, des Comte, des Bosco, des Robert Houdiu, des Hamilton, etc. Je croirais volontiers que ce nom de magie blanche, géné- ralisé par la suite, dut être appliqué spéciale- ment, tout d'abord, aux prodiges de la fantas- magorie, en raison de la blancheur des images que les exjwrimentateurs offraient à leur public. MAGODIE. — C'était, chez les Grecs, un genre de pièces muettes, de pantomimes, dans lesipielles les gestes seuls servaient à exprimer l'action scénique. LIAISON DE MOLIÈRE. — C'est le nom tjue, piir une sorte d'hommage au gi*and homme i|ui a réellement fondé notre première scène lit- téraire, on donne souvent, en littérature ou diius la conversation , à la Comédie-Française. ^lAITRE DE BALLET. — C'est l'artiste qui, dans un tluVitre, est chargé de régler et d'imaginer les jxis de danse (jui doivent être exécutés, dans un Udlet ou dans un divertisse- ment, aussi bien (xir les danseuses ou les dan- seurs seuls, que par l'ensemble du corps de bal- let. C'est lui qui détermine non seulement la diinse de cha((ue artiste en particulier, mais aussi les mouvements, les évolutions, les mar- ches, les gn>uiKMnents opérés par les masses. Le maître de biillet doit donc d'abord être un excellent danseur, ensuite avoir une imagination fertile qui lui permette de trouver des motifs ou gracieux ou sévères, mais toujours riches en lignes hannonieiises, de façon à présenter an public des tableaux à la fois pleins de charme, de mouvement, de a>lori8 et de poésie. Le maî- tre de Ixillet, qui s'intitule volontiers composi- teur, doit donc, en réîilité, être un artiste fort distingué. Noverre, qui certîiinement i)ossédait sous ce ra}^jx)rt des «jualités exceptionnelles, a divrit ainsi, avec un peu de prétention i>eut- étre, le rôle du maître de ballet : Lo théâtre est le Parua^iso dos comix)sîtour8 in- génieux ; cVst là \\\\M , .sans cherclier, ils rencontrent MATTRE DE BALLET. 498 une multitude de choses neuves ; tout s'y lie , tout y est plein d'âme, tout y est deseiné avec des traits de feu. Un tableau ou une silnation le conduisent naturellement à une autre ; les figures s'enchaînent avec autant d'aisance que de grSce ; l'effet général se fait sentir sur le champ ; car telle figure élégante sur le papier cesse de l'ttre à Teiécution ; telle au- tre, qui le sera pour le spectateur qui la verra en rue d'oiseau, ne le sera (>oint pour les premières loges et le parterre; c'est donc pour lef places Icm moins élevées que l'on doit principalement travail- ler, puisque telle forme, tel groupe et tel tableau dont l'effet est sensible pour le parterre ne peut manquer de l'être dons quelque endroit de la salle qne l'on se place. Vous observez dans des ballets des marches, des contre- mardi es , des repos, des retraites, des évolutions, des groupes ou des pelo- tons. Or, si le maître n'a pas le génie de faire mou- voir la grande machine dans des sens justes, s'il ne démêle au premier coup d'œil les inconvénients qui peuvent résulter de telle opération , s'il n'a l'art de profiter du terrein, s'il ne proportionne pas les manœuvres à, l'étendue plus ou moins vaste et plus ou moins limitée du théStre, si ses dispositions sont mal conçues , si les mouvements qu'il veut impri- mer sont faux ou impossibles, si les marches sont ou trop vites ou trop lentes, ou mal dirigées, si la mesure et l'ensemble ne régnent pas, que sais-je? tout se pe tcté, rd n dp huées SI mp travai m ru uss d L conduite et la marche d'un grand ballet bien des- siné exige des connaissances, de l'esprit, du génie, de la finesse, «n tact siir, une jirévoyance sage et un coup d'fflil infaillible, et toutes ces qualités ne s'acquièrent pas en déchiffrant et en écrivant la danse chorégraphiquenient ; le moment seul déter- mine la composition : l'habileté consiste à le saisir et à en profiter heureusement. Notre Opëra, où la partie dansante a toujours consen-é une importance considérable, a pos- ât y d b rea d B ps nd B n M>U- rc any No rre n b Mi- Aum Ta n n P a nU L AI M ran La C ni d ne et l'ancien Opéra- Conii(|ue, pour qui la danse fut pendant lonptempsnn très vif élément de suc- cès, ont compté aussi dans ce genre des artistes remarquables : Billioni, Rivière, Pitro, De Hesse , Sodi, Felicini pour la première, Xoverre et Dourdet pour le second. I-a Comcdic-Fran- çaise elle-même posséda, pendant un certain temps, nn corps de l>allet trc's soigné, qu'elle confiait à des maîtres habiles, tels que Sodi, Dourdet, Rivière, Allard, etc. 494 MAITRE DE MUSIQUE. — MANUSCRIT. On donne soavent aux maîtres de ballet le nom de chorégraphes, MAITRE DE MUSIQUE. — C'est ainsi qu'on désignait parfois naguère, en province, le chef d'orchestre d'une troupe de vaudeville. MANAGER. — Nom sous lequel on dé- signe, en Angleterre, tout directeur de théâtre (Voy. ce mot). MANDUCU8. — Le plus populaire à Rome, après Maccus, de tous les personnages des atel- lanes. C'était un type de ces comédies satiri- ques à la fois horrible et grotiîsque, une sorte de crofiue-mitainc qui, eu uu\Tant la bouche démesurément, faisait claquer ses dents comme Aludque lin Manduoiis. s'il eût voulu avaler acteurs et spectateurs. Raljelais l'a décrit ainsi au quatrième livre de son Pantagruel: — « C'cstoitunc effigie mons- tnieuse, ridicule, hideuse, et teiTible aux petits eufans : ayant les œilz plus grands que le ven- tre, et la teste plus grosse que tout le reste du coq)s, avec amples, larges et horrifiques mas- choueres bien endentelées, tant au-dessus comme au-dessous : lesquelles, avec l'engin d'une petite corde cachée, l'on faisoit l'une contre l'autre terrificquement clicqueter. » MAXECrE. — Au sens propre, le manège, on le sait, est l'endroit où l'on exerce les che- vaux, où l'on fait leur éducation, aussi bien que celle des écuycrs. Cependant, certaines troupes d'écuyers qui pai'conrent les foires (et où, par parenthèse, on en trouve parfois de fort ha])iles) donnent ce nom de manège aux circjucs ambulants qu'ils élèvent ainsi dans chaque endn)it où ils s'arrêtent pour donner des représentations. MANŒUVRE. — Tout ce qui constitue lii pose, l'équipe, la plantation des décors, enfiu tout le travail opéré sur la scène par les machi- nistes pour remplacer un décor par un autre, s'appelle la mafiœuvre. MANTEAU D'ARLEQUIN. — C'est la grande draperie peinte, presque toujours de couleur rouge, qui délimite l'ouverture de la scène et encadre, en quelque sorte, le rideau d'avant-scène. Quelques écrivains, peu au courant de l'histoire du théâtre, ont af- finné gmvement que ce nom de manteau d'Arlequin avait été donné à cette partie im- mobile de la décoration parce qu'Arlequin avait coutume de faire toujours son cnti-ée en scène par cet endroit, œ qui eût été jmrfaite- ment ridicule et souvent impossible au point de vue des exigences de l'action. La vérité est ({u'Arleiiuin venait souvent se montrer au pu- blic en se glissant entre cette draperie et le ri- deau, mais dans les entr'actes et lorsque celui^ ci était hawsé, quand il lui prenait fantaisie, comme cela an-ivait très souvent au dix-hui- tième siècle, de venir s'entretenir avec les spec- tateurs, soit qu'il vînt leur faire connaître le spectacle du lendemain, soit qu'il eût à leur faire une annonce i-olative au service dn jour, soit qu'il voulût simplement les égayer par quel- ques plaisanteries et quelcjnes lazzi qui lui étaient familiers et qui étaient toujours bien re^us, surtout lorsqu'ils venaient d'un Thomas- sin ou d*un Carlin, artistes chéris du public. Puis il s'en retournait par le même chemin. De là le nom de <( manteau d'Arlequin ». îiLVNUSCRIT. — Une pièce de théiitrc ne peut être imprimée avant sa représentation, en raison des changements et des cou])ures qui se pratiquent dans le texte jusqu'au dernier jour, jusqu'à la dernière heure, parfois même après sa première représentation. Pour que le texte imprimé puisse être absolument conforme à celui de la pièce jouée, on ne i>eut donc le li- vrer à l'impression qu'à la suite de l'épreuve suprême. Les études, à Paris, se font donc sur un manuscrit, et à l'aide de rôles copiés. De lii vient (^u'au théâtre, lorsqu'on veut parler du texte proprement dit d'un ou\Tage à l'étude et MAQUETTE. — MAQUILLER (se). 495 en répétitions, on ne dit jamais la pièce, mais îe manuscrit, MAQUETTE. — On appelle maquettes les esquisses, on, pour être plus précis, les modè- les en petit des décorations théâtrales, telles que celles-ci doivent être exécutées loi-sque, à la suite des corrections reconnues nécessaires , le projet a été définitivement adopté. Ces ma- quettes, qui donnent Taspect et l'impression des petits théâtres d'enfants que l'on trouve chez les marchands de jouets, forment en effet autant de petits théâtres, dans lesquels sont figurés , dans tous îeiirs détails et avec l'exac- titude la plus complète, les décors projetés. Ri- deaux, châssis, fermes, plafonds, pi*aticablcs , tout s'y trouve, figuré en carton, et peint conime doit Têtre la décoration, de façon que l'effet du détail et de Fcusemble soit al)solu- nient exact. A T Opéra, ces modèles sont exé- cutés à réchelle de trois centimètres par mètre, et les visiteurs de l'Exposition universelle de 1878 peuvent se mppeler l'impression de plai- sir et de surj)rise qu'ils ont ressentie eu ad- mirant l'adorable exposition de maquettes théâtrales qui avait été organisée par les soins du ministère de l'instruction publique et des beaux-arts. Aujourd'hui encore, le musée de l'Opéra offre aux amateurs et aux curieux la vue d'un certain nombre de maquettes char- mantes. Jusqu'ici, l'art du décomteur, cet art si compliqué, si difficile et si brillant, ne lais- sait rien den'ière lui ; lorsqu'une pièce dispa- raissait de la scène, ses décors, qui étaient par- fois des chefs-d'œuvre, disparaissaient avec elle, et il n'en restait aucune trace. Désormais, au moins en ce qui concerne l'Opéra, il n'en sera plus tout à fait de même : depuis 18C4, épo- que où les archives de ce théâtre furent orga- nisées par les soins de M. Ch. Nuitter, les ma- quettes de chaque décoration y sont conservées, et l'article 38 de l'aiTeté du 15 mai 18G6 a donné à cette première mesure une sanction définitive. C'est là un fait très heureux, tant au point de vue d'un art spécial et charmant qu'à celui de l'histoire et des progrès de la dé- coration théâtrale. MAQUILLAGE. — Mot d'argot théâtral. Action de se maquiller, défaire sa figure (Vov. ces mots). Pour les hommes, c'est généralement l'art de se vieillir, de se rendre laid ou ridicule ; pour les femmes, c'est bien plutôt l'art de s'embellir, et d'aucunes y réussissent avec le plus grand succès. On raconte que M"® Gui- mard, la célèbre danseuse de l'Opéra, dut à cet art le moyen d'être toujours jeune et de pa- raître , pendant tout le cours de sa longue car- rière, exactement ce qu'elle était au temps de ses débuts ; elle avait, datant de cette époque, un portrait qui la représentait dans tout l'éclat et la fraîcheur de sa jeunesse. Ce portrait, placé dans sa loge, lui servait de modèle lorsqu'elle se disposait à paraître en 8C. 498 MARCHAND D'ORVIÉTAN. — MARINBTTB. Quoi qu'il en soit, les marchands de billets continuent leur petit commerce, tantôt d'un côté, tantôt d'un autre, et il est fort difficile de faire disparaître complètement cet étrange négoce. (Voy. Agences des théâtres.) MARCHAND D'ORVIÉTAN. — Charla- tan, saltimbanque, marchand de drogues pré- tendues médicales qui vendait ses produits avec accompagnement de lazzis, de farces burlesques, de parades et de coups de grosse caisse. L'orviétan était un de ces médicaments de rencontre qui sont restés fameux dans les fas- tes du charlatanisme médical ; il était dû, dit- on, à l'imagination d'un certain Jérôme Fer- rante, natif d'Orvieto, d'où il tira son nom, et depuis son origine jusque vers la fin du dix- huitième siècle il fut débité en France, dans nos villes, dans nos bourgs et dans nos villages, par des Tabarins de bas étage, des bateleurs effrontés, qui s'installaient sur les places pu- bliques, dans les foires et dans les carrefours, et qui, attirant les badauds par le moyen de leur spectacle grossier, aidaient ainsi la vente de leur spécifique incomparable. C'est pour- quoi on a donné depuis lors le nom de mar- chand dorviétan à tous les charlatans de tou- tes sortes. MARCHER SUR SA LONGE. — Expres- sion d'argot théâtral qui s'applique à un vieux comédien, usé par l'âge, et qui, ne sentant pas ou ne voulant pas reconnaître qu'il n'est plus que l'ombre de lui-môme, persiste à traîner sur la scène les restes d'un talent évanoui et dont il ne reste plus que le souvenir. Tous les jours on voit des comédiens marché sur leur lon^e; mais le public, qui a le souvenir des jouissances passées, respecte leur faiblesse et se garderait de manquer envers eux d'égards ou de con- venance. MARCHEUSE. — Ceci est un emploi qui n'est connu qu'à l'Opéra de Paris. Les mar- cheuses sont des... artistes qui ne chantent ni ne dansent, mais, comme l'indique leur nom, se contentent de marcher et de figurer dans les divertissements de danse, où elles font partie des cortèges et servent à compléter les groupes. Il y en a comme cela une vingtaine, dont quel- ques-unes doivent être écujères à l'occasion, ce qui a fait dire à un plaisant qu'à l'Opéra on marchait « à pied et à cheval d. MARIER JUSTINE. — C'était pendant les études d'un vaudeville dont l'héroïne , qni avait nom Justine, devait tout naturellement épouser, à la fin de l'acte, l'amoureiix affolé qui avait soupiré après elle pendant trois quarts d'heure. On était à l'une des dernières répéti- tions, le dénouement paraissait languissant, et le directeur, assis sur une chaise à l'avant- scène, à côté du trou du souffleur, donnait de- puis, un instant des signes visibles d'impatience. Tout d'im coup il se lève, va droit à l'auteur, et lui dit un peu brusquement : — « Mon cher, ce n'est pas tout ça ; votre dernière scène est trop longue; ce dialogue-là est froid en diable, et si nous n'arrivons pas à chauffer le dénouement, nous serons empoignés. Il n'y a qu'une chose à faire, c'est de coui)er toute cette conversation, qui après tout n'est pas intéres- sante, et de marier Justine tout de suite. > Ainsi fut fait, et le résultat prouva que le di- recteur avait raison. Mais depuis lors cette expression étrange et tout d'abord incompré- hensible : Marier Justine, s'introduisit dans la langue du théâtre ; et quand une longueur se faisait sentir dans une pièce en répétitions, cha- cun réclamait la coupure en disant : Il faut marier Justim, MARINETTE. — Personnage de soubrette vive et délurée, qui était l'un des caractères de l'ancienne comédie italienne, mais moins traditionnel que Colombine et souvent primé par elle. Ce rôle fut tenu en France par deux artistes qui semblent n'avoir point manqué de talent, mais dont la première paraît avoir été supérieure à la seconde : c'était la femme de Tiberio Fiorilli, le fameux Scaramouche favori de Louis XIV, qui , s'il faut en croire la lé- gende, avait été d'abord blanchisseuse à Na- ples. L'autre Marinette, (jui s'appelait Angelica Toscane, était la femme de Giuseppe Tortorîtî, acteur fort habile qui jouait le rôle de Pasca- riel, et débuta avec son mari en 1G85 à Paris, MARIONNETTES. 499 où elle resta, ainsi que lui, jusqu'en 1697, épo- que où les comédiens italiens furent renvoyés dans leur pays. — On sait avec quel bonheur Molière introduisit dans son Dépit amoureux le personnage de Marinette, qui est l'une de ses soubrettes les plus originales et les plus accom- plies. La Fontaine en a introduit le type aussi daixs sa comédie satirique h Flormtin, MARIONNETTES. — Il n'est sujet si fri- vole en apparence, si léger, si inconsistant, qui ne puisse donner lieu aux recherches les plus curieuses et les plus intéressantes. Ainsi en est- il des marionnettes, qui dans la personne d'un homme grave, bibliothécaire éraérite, savant austère et membre de l'Institut, ont trouvé un historien plein de grâce, d'élégance et de bonne humeur. L'Hùtoire d^s Marionneites de Charles Magnin est un li\Te charmant, d'une érudition sûre, fertile en détails précis, en renseigne- ments de tout genre, et qui fait singulièrement regretter (pie chacune des différentes parties de l'art si complexe du théâtre n'ait pas encore trouvé d'historiographe tout ensemble aussi so- lide, aussi aimable et aussi épris de son sujet. On sait ce que sont les marionnettes : de petits bonshommes de bois aux membres mo- biles, articulés, se mouvant à l'aide de fils ou d'un mécanisme particulier, que l'on fait par- ler, chanter, agir, danser à l'imitation de i)er- sonnes naturelles, et avec lesquels on joue la comédie dans de petits théâtres portatifs. Nul n'ignore aujourd'hui que l'origine des marionnettes remonte à la plus haute antiquité. Les Chinois, dont la civilisation est antérieure à la nôtre de quelques milliers d'années, les connaissent depuis un temps immémorial ; on en a trouvé des traces chez les Égyptiens, et l'on sait à quel degré de perfectionnement elles étaient parvenues chez les Grecs et les Romains. C'est à ce point qu'Aristote, ou l'auteur du traité De mundo, qu'on lui a attribué, en parle en ces termes : — «Le souverain maître de l'univers n'a besoin ni de nombreux ministres, ni de ressorts compliqués pour diriger toutes les parties de son immense empire; il lui suffit d'un acte de sa volonté, de même que ceux qui gouvernent les marionnettes n'ont besoin que de tirer un fil pour mettre en mouvement la tête ou la main de ces petits êtres, puis leurs épaulés, leurs yeux et quelquefois toutes les parties de leur personne, qui obéissent aussitôt avec grâce et mesure. » Platon , Aristote , Marc- Aurèle , Juvénal et bien d'antres font allusion aux marionnettes, ce qui prouve à quel point elles étaient popu- laires en Grèce et à Rome. On a retenu le nom de Pothin, célèbre marionnettiste d'Athènes, et parmi les marionnettes romaines ou latines on cite le Bucco, le Pappus, le Casnar, le Mac- cus, le Manducus, et leurs joyeuses commères : Citeria et Petreia, Tous ces bouffons de bois, tous ces bonshommes mécaniques sont les an- cêtres de ceux qui depuis trois cents ans et plus font la joie des enfants de toutes les par- ties de l'Europe, — car les marionnettes n'ont cessé d'être populaires en Italie, en France, en Espagne, en Portugal, en Angleterre, en Alle- magne, en Hollande, en Autriche et jusqu'en Turquie. En Itahe, on leur donna divers noms, et on les appela puppi, pupazzi, fantoccini, hu- ratiini (du nom d'un acteur célèbre, Burattino, dont les succès furent tels que toutes les ma- rionnettes italiennes le lui empruntèrent, ainsi que son masque) ; les pièces qu'elles jouaient s'appelaient des hurUtte, et la pratique dont se servaient certains montreurs de marionnettes était désignée sous les noms de fisckio ou pi- vetta; enfin, le petit théâtre où on les exhibait s'appelait casteïlo di legno (château de bois) ou plus simplement casteïlo , d'où les marion- nettistes français ont fait castekt, pour indi- quer la petite baraque qui servait à leurs re- présentations. L'Italie est d'ailleurs le pays classique des marionnettes, celui où elles ont atteint le plus haut degré de perfection, et un de nos compatriotes, Jal, en parlait avec cet enthousiasme en 1834, après les avoir vues dan- ser à Milan : — fc La danse de ces Perrot et de ces Taglioni de bois est vraiment inimagi- nable : danse horizontale, danse de côté, danse verticale, toutes les danses possibles , toutes les fioritures des pieds et des jambes que vous ad- mirez à l'Opéra , vous les retrouverez au théâ- tre Fiando ; et quand la poupée a dansé son pas, quand elle a été bien applaudie, et que le parterre la l'appelle, elle sort de la coulisse, sa- lue en se donnant des airs penchés, pose sa 500 MARIONNETTES. petite main sur son cœur, et ne se retire qu'a- près avoir complètement parodié les grandes cantatrices et les fiers danseurs de la Scala. i> La danse des marionnettes milanaises était parfaite, on le voit ; celle des marionnettes ro- maines ne le lui cédait point sans doute, puis- qu'on assure qu'un jour les autorités de la ville éternelle, prises d'un singulier scrupule de pudeur, et dans la crainte des dangers que pouvait produire une illusion funeste , obligè- rent ces petites sylphides de bois à revêtir des caleçons bleu de ciel ! Mais il y a bien longtemps déjà que les ma- rionnettes ont été importées d'Italie en France. Non qu'elles n'y existassent avant cette épo- que ; car, dès la fin du seizième siècle, Paris possédait des théâtres de marionnettes ; seule- ment, on peut dire qu'elles de\inrent surtout populaires lorsque furent venus de la Pénin- sule ces types fameux de la comédie italienne : Arle(|uin, Trivelin, Cassandre, Colombine, aux- quels se joignirent bientôt nos types purement français : Polichinelle, Pierrot et dame Gigo- gne. Les marionnettes, alors, commencent à devenir l'un des divertissements chéris des Pa- risiens, Brioché ouvre son théâtre aux environs du Pont-Neuf vers 1650, et nous allons voir l'importance que prirent bientôt les petits co- médiens de bois. Ce Brioché, que l'on croit Italien, fit acqué- rir à ses marionnettes une immense réputa- tion ; et ce qui le prouve, c'est qu'il fut appelé en 1669 à Saint -Germain en Laye pour amu- ser le Dauphin , auprès duquel il resta avec sa petite troupe pendant trois mois, ce qui lui va- lut une somme de 1,365 livres pour honorai- res. Déjà, d'ailleurs, des théâtres de marion- nettes avaient obtenu l'autorisation de s'établir à la Foire, et le sujet devenait à ce point in- téressant qu'il préoccupait jusqu'au roi et à Colbert en personne. En effet. Brioché, fils et successeur de celui dont il vient d'être ques- tion, ayant été troublé dans sa sécurité par un magistrat maladroit, ne trouva rien de mieux à faire que de réclamer auprès de Louis XIV lui-même, si bien que Colbert écrivait au lieu- tenant général de la police, le 16 octobre 1676 : — «Le nommé Brioché s'étant plaint au Roy des deffenses qui lui ont esté faites par le com- missaire du quartier Saint-Germain-l'Auxer- rois d'y jouer des marionnettes. Sa Majesté m'a ordonné de vous dire qu'elle veut bien lui permettre cet exercice, et que, pour cet effet, vous ayez à lui assigner le lieu que vous juge- rez le plus à propos. » On voit que l'affaire était d'importance. Mais si les marionnettes avaient des protec- teurs, — et quels protecteurs ! — elles avaient aussi des ennemis, — et quels ennemis I C'est à leur sujet que nous allons voir a: l'aigle de Meaux d, le grand Bossuet lui-même, entrer en scène et tonner contre le goût du jour. En 1686, l'année même de la révocation de l'édit de Nantes, à laquelle il avait pris quelque part et qui semblait devoir suffire à son activité, Bos- suet signalait ainsi les marionnettes de son diocèse à la sévérité de M. de Vemon, procu- reur du roi au présidial de Meaux : — « Pen- dant que vous prenez tant de soin à réprimer les mal-convertis, je vous prie de veiller aujssi à l'édification des catholiques, et d'empêcher les marionnettes, où les représentations hon- teuses, les discours impurs et l'heure même des assemblées portent au mal. Il m'est bien fâ- cheux, pendant que je tâche à instruire le peuple le mieux que je puis, qu'on m'amène de tels ouvriers, qui en détruisent plus en un mo- ment que je n'en puis édifier par un long tra- vail. 3) On peut dire de l'illustre prélat qu'il ne négligeait \Taiment rien. Pauvres petites marionnettes ! de quoi pou- vaient-elles donc être coupables ? Tout au plus, sans doute, de quelques pointes un peu décol- letées, de quelques saillies un peu gaillardes, comme celles que se permettait Polichinelle, ainsi que nous l'apprend Hamilton dans une lettre en vers adressée par lui à la jeune prin- cesse d'Angleterre : ...BlanchiBseuses et soubrettes, Du dimanche dans leurs habits , Avec les laquais , leurs amis (Car blanchisseuses sont coquettes), Venaient de voir, à juste prix , La troupe des marionnettes. Pour trois sols et quelques deniers , On leur fît voir, non sans machine , L" Enli'vement de Proserpine , Que l'on représente au grenier. Là, le fameux Polichinelle, MARIONNETTES. 501 Qui du théâtre est le héros , Quoiqu'un peu libre e» ses propos, Ke fait point rougir la donzelle, Qu*il divertit par ses bons mots. D'ailleurs, de quoi se plaignait Bossuet? Si les marionnettes de Meaux lui paraissaient sé- ditieuses, celles de Paris étaient bien pensan- tes, car elles triomphaient publiquement de la fâcheuse situation des protestants. A ce point que M. de Hariay, procureur au parlement de Paris et homme à Tépiderme évidemment cha- touilleux, croyait devoir en référer en ces ter- mes au lieutenant de police : — a A Monsieur de la Reynie, conseiller du Roy en son conseil, etc. — On dit ce matin au Palais que les ma- rionnettes que Ton fait jouer à la foire Saint- Germain y représentent la déconfiture des hu- guenots, et comme vous trouverez apparemment cette matière bien sérieuse pour les marionnet- tes, j'ai cru. Monsieur, que je devois vous donner cet avis pour en faire l'usage que vous jugerez à propos dans votre prudence, d Bos- suet, M. de Hariay, M. de la Rejiiie, M. de Vemon, ne voilà-t-il pas de bien gros pereon- nages en branle, et bien des affaires pour de chétives marionnettes ! Celles-ci, toutefois, n'en continuèrent pas moins de charmer leur public, et ce public n'était pas uniquement, comme on pourrait le croire, composé d'enfants. C'était celui des foi- res Saint-Germain et Saint-Laurent, où, dès les dernières années du dix-septième siècle, on vit se multiplier les spectacles de marionnettes, qui demeurèrent là, aussi bien qu'aux foires Saint-Clair et Saint-Ovide, jusqu'à la grande vogue du Palais-Royal et du boulevard du Temple. Perrault, l'aimable Perrault, avait osé s'exprimer ainsi dans l'envoi de son joli conte de Peau d'âne : Pour moi, j'ose poser en fait Qu'en de certains momens l'esprit le plus parfait Peut aimer, sans rougir, jusqu'aux marionnettes , Et qu'il est des tems et des lieux Où le grave et le sérieux Ne valent pas d'agréables sornettes. Bientôt Lemierre, le sombre auteur de la Veuve du Malabar, prendra des pinceaux plus riants pour peindre à son tour la joie que procurent à tous les gentilles marionnettes dont les théâtres se pressent dans les préaux des deux grandes foires ; c'est dans son poème des Fa^s- tes qu'il a chanté ainsi les petits comédiens de bois : Où court donc tout ce peuple au bruit de ces fanfares ? Viens, ma muse! suivons ces juges en simarres (1) ; Us ouvrent dans Paris un enclos fréquenté, AsUe de passage an marchand présenté. Pour fixer en ce lieu la foule vagabpnde Qui s'écoule sans cesse et qui sans cesse abonde , Vingt théâtres dressés dans des réduits étroits , Entre des ais mal joints, sont ouverts à la fois. Il en est un surtout, à ridicule scène, Fondé par Brioché , haut de trois pieds à peine, Pour trente magotins , constants dans leurs emplois Petits acteurs charmants que Ton taille en plein bois Trottant , gesticulant , le tout par artifices , Tirant leur jeu d'un fil et leur voix des coulisses. Point soufflés, point siffles , de douces mœurs. Entr'eux Aucune jalousie, aucun débat fâcheux. Cinq ou six fois par jour ils sortent de leur niche, Ouvrent leur jeu : jamais de rhume sur Tafflche. Grand concours ! on s'y presse , et ces petits acteurs Fêtés , courus , claqués par petits spectateurs , Ont pour premier soutien de leurs scènes bouffonnes Le suffrage éclatant des enfants et des bonnes. Brioché avait engendré des imitateurs, et Dieu sait s'ils étaient nombreux, les joueurs de marionnettes qui étaient venus à sa suite! Ce fut d'abord Bienfait, qui s'intitulait grave- ment le « seul joueur de marionnettes des me- nus-plaisirs de Monseigneur le Dauphin » ; puis Alexandre Bertrand, qui fut l'un des plus célèbres; puis les deux associés Dolet et La- place ; puis Tiquet, et Gillot, et Francisque, et John Riner, et les frères Nicolet, et Fourré, et Boursault, et Levasseur, et Prévost; puis en- core Audinot, et Second, et Caron, que sais- je ! On avait ainsi les Comédiens praticiens français, les Fantoccini italiens, les Fantoccini français, les Porenquins (?), les Pantagoniens, les Lilliputiens, les Pygmées, et bien d'autres. Et il ne faudrait pas croire que ces petites troupes de bois se contentassent de jouer des canevas ^allgaires, des pièces sans valeur, de plates rapsodies. Non pas, vraiment. Elles avaient des opéras-comiques, des vaudevilles. (1) AUusion au costume des magistrats qui faisaient solenneUement, chaque année, l'ouverture des deux foires. 602 MARIVAUDAGE. des parodies qu'écrivaient expressément pour elles leurs auteurs attitrés, et quels auteurs ! Ce n'était rien moins que le Sage, Fuzelier et d'Omeval, les trois inséparables, Favart, Pi- ron, auxquels il faut joindre Carolet, Valois d'Orville, Nougaret et quelques autres de moindre valeur. Tout Paris se pressait pour venir entendre ces petites pièces pleines de folie et de gaîté, pour applaudir messer Poli- chinelle et sa double bosse, dame Gigogne et son formidable cotillon, pour voir Arlequin en son costume bariolé, Pierrot à la face pâle, le prétentieux Léandre, la sémillante Colom- bine et tous leurs compagnons mignons. Cela dura longtemps, presque tout un siècle ! Puis, quand commença de s'épuiser la vogue des anciennes foires, nos comédiens de bois n'attendirent pas que la caducité les réduisît à merci. Ils émigrèrent, qui au Palais-Royal, qui au boulevard du Temple, où la foule commen- çait à se porter, et retrouvèrent là le succès qui ne les avait jamais abandonnés. La Révolution ne leur enleva point leur public, elle fit même la fortune du petit théâtre de Séraphin, et longtemps encore Polichinelle et 8 Ici nous approchons bien de la vérité. Oui, le défaut de Marivaux, ce qui constitue, à proprement parler, le marivaudage, c'est ce langage quin tesson cié, alambiqné, tortillé, par- fois précieux Jusqu'à la fadeur, qu'il fait parler à SCS héros amoureux ; c'est cette habitude, poussée jusqu'à la manie, d'analyser les senti- ments les plus subtils, les plus délicats; de raffiner sur les idées les plus menues ; de parler en quelque sorte lui-même par la bouche de ses personnages et de leur prêter un esprit qu'ils ne pourraient ou ne dc\Taiont avoir ; de mettre incessamment en contact les infiniment petits de l'amour pour avoir le plaisir do gloser à son aise sur un sujet qu'assurément il con- naissait sinon mieux, du moins autant que qui que co soit ; de « peser enfin des riens dans des balances de toile d'araignée ». Mais il n'y a pas que cela k voir dans Marivaux, et ce qui sauve l'écrivain, ce qui lui fait pardonner le marivaudage, ce qui lui assure en dépit de tout une gloire incontestée, c'est qu'il possède une originalité réelle, c'est qu'il sait penser par lui-même, c'est enfin qu'à peindre l'iimour comme il l'a fait, on est certain qu'il sait aimer, et qu'on sent battre son cœur sous celui de ses personnages. MASCARADE. — La mascarade ne repré- sente plus guère aujourd'hui qu'une troupe de gens déguisés et masqués, qui s'en vont courant par les rues, et qui parfois se réunissent pour danser. La chose est vulgaire, et le mot ne 504 MASCARILLE. — MASQUE. donne l'idée que d'une chose assez triviale. Il n'en allait pas de même autrefois : la masca- rade était une chose noble et galante, un divertissement auquel nos rois eux-mêmes pre- naient part et plaisir, et qui fut l'origine du ballet de cour, si fort en faveur au dix-septième siècle. Compan, dans son Dictionnaire de la danse, définit ainsi les mascarades : Trois espèces de divertissemens assez difEérens les uns des autres , ont été connus sous le nom de mascarades. Le premier et le plus ancien étoit formé de qua- tre, huit, douze, et jusqu^à seize personnes, qui, après être convenues d'un ou de plusieurs déguise- mens, s'arrangeoient deux à deux, ou quatre à qua- tre , et entroient ainsi masquées dans le bal. Telle fut la mascarade en sauvage du roi Charles VI , et celle des Sorciers du roi Henri IV. Les masques n'étoient assujettis à aucune loi, et il leur étoit pei^ mis de faire jouer les airs qu*ils vouloient danser pour répondre au caractère du déguisement qu'ils avoient choisi. La seconde espèce étoit une composition régu- lière. On prenoit un sujet , ou de la Fable, ou de rhistoîre. On f ormoit deux ou trois quadrilles , qui s'arrangeoient sur les caractères ou sujets , et qui dansoient, sous ce déguisement, les airs qui étoient relatifs à leur personnage. On joignoit à cette danse quelques récits qui en donnoient les ex- plications nécessaires. Jodelle, Passerat, Baïf, Ronsard , Benserade , signalèrent leurs talens en France dans ce genre , qui n'est qu'un abrégé des grands ballets , et qui paroît avoir pris naissance à notre cour (1). Il y en a une troisième qu'on imagina en 1675, qui tenoit aussi du grand ballet , et qui , en allon- geant la mascarade déjà connue , ne fit autre chose que d'en changer l'objet principal , en substituant mal adroitement le chant à la danse ; cette espèce de composition théâtrale retint tous les vices des autres , et n'étoit susceptible d'aucun de leurs agré- mens. Les mascarades furent innombrables sous les règnes de Charles IX, Henri III, Henri IV et (1) A ces noms il faut ajouter ceux de Daurat et de Philippe Desportes , de ce dernier surtout , dans les œu- vres duquel on peut lire, sous le titre de Cartels et Mas Ub yeni du spectateur... Ces eorie» de poèmes n'ont pas la prétention de te faire croire, ils ne visent point A l'illusion : l'imagination s'abandonne vo- lontairement 1, nu rêve éveillé; elle ne demande, et ces poèmea n'exigeât que cette possibilité générale, cette combinaison â'ima^ que reipérience commune ne re- jette pu comme incompatibles, et sans laquelle l'ima- gination du poète reesembleiait à celle du lunatique. » 505 Sur leurs immenaea théâtres, où les représenta- tions avaient lieu en plein jour, il n'y aurait pas eu d'organe assez puissant pour se faire en- tendre Bans un artifice particulier. Le caractère des masques, déterminé d'avance , était en rap- Muqne d» viclUsnl. Muque d'Idiot. port avec le rôle dont l'acteur était chargé; celui-ci y ajoutait une perruque qui s'ajustait avec son masque , si bien que non seulement la figure, mais toute la tête se trouvait couverte et transformée. Les masques de théâtre deve- naient donc de véritables têtes creuses, dont la disposition concave et certaines particularisa de configuration contribuaient à renforcer la vois et à lui donner une extrême sonorité, La physionomie, d'ailleurs, ne disparais-tait pas entièrement, car, à l'endroit des yeux et de la bouche, le masque était souvent très ouvert, de façOD à laisser voir i rïaage. MASQUE (le) au THÉÂTRE, a grande partie le bas da Uoaque Oo Baochnc .l'eniprnnte, sur la questàon si controversée des masques antiques, quelques renseignements intéressants au catalogue publié par le minis- tère de l'instruction publique et des beaux -arts k propos de l'Exposition oniTerselle de 1878 : Les recherchée ausqnelleB l'exposition théfttrole a donné lieu ont amené on réiialtat intéreaaaot pour l'étude des anciena maaqnee de théâtre. Sur la foi d'un vers de Virgile , qui s'applique unique- ment aux représentations rustiqneB et populaires de l'Italie, ou penBoiC que ces masques étaient fsdts d'écorce ou tout an moins de bois. En prenant pour point de départ de uoe eipérienceB les maa- quee et les enveloppes des momies égyptieiuiM, nous avons acqois la conviction que les masques BACCHiy comiqusK et tragi'iues étaient fabriqué» avec de la toile mise en forme par un procédé d'estampage et couveile d'un enduit crayeux , auquel on donnait plus de cohésion en y mflant de la colle. Ainsi s'eiplique un passage assez obscur de Lucrèce, re- latif à des masques de craie , qui pouvaient , avant d'être complètement Bécliéa , se retourner à l'envers BOUS l'action d'un simple choc. Deux autres témoi- gnages untiqiies, ju*iu'ici trop négligés, attestent que Tliespis inventa les masques faits simplement do toile, et qu'Eschyle après lui trouva les masques recouverte d'un enduit : c'est comme l'histoiro du procédé que nous venonn de décrire. La connaissance de ce procédé est en efTet intéressante, car, ai les monuments de l'anti- quité nous offrent la représentation d'un grand nombre de masques, on n'en a découvert joa- qu'ici aucun véritable. J'ai dit, et on le comprend de reste, que le caractère des mastiues, déterminé d'avanoo, concordait avec celui du personnage que l'ac- teur était chargé de représenter. M. René Mé- nard donne à ce sujet les détails que voici : — « Quant aux types gcnérau.\ affectés aux dif- férents genres de masques, il y avait d'abord deux grandes divisions : les tragiques et les co- miques. Il y avait au moins vingt-cinq espèces MASQUE (LE) AU THEATRE. de masquée tragiques, six pour les vieillards, aept pour lee jeunes gens, neuf pour les fem- mes et trois pour les esclaves. L'arrangement UuiiDe ilo tragùUc. des cheveux et de la barbe était différent pour chacuu de ces masques, auxquels étaient afFec- téea en outre une teinte et une physionomie particulières. On connaît également plus de quarante types de masques comiques : neuf pour les vieillards, dix pour les jeunes gens, trois pour les vieilles femmes, quatorze pour les jeu- nes filles et sept pour les esclaves. En dehors de cela, les dieux, les héros et les grands personnages historiques avaient des masques coiisacrés par l'usage et qui les faisaient de suite reconnaître. » Les Romains, on le sait, imitèrent les Grecs dans l'emploi du masque théiUral, Ce qu'on sait moins, c'est qu'à répwjuedcs commencements de notre théâtre, le masque fut longtemps en usage en France. Et je ne parle pas ici des acteurs de notre Comédie-Ita- lienne, qui, au moins dans l'origine, jouaient presque tous masqués, mais de nos propres co- médiens. Tout d'abord, on est à peu près cer- tain que les premiers farceurs de l'Hôtel de Bourgogne, ceux qui succédèrent aux Confrè- res de la Passion, usaient du masque, particu- lièrement pour les rôles de femmes, toujours remplis alors par des hommes (1). L'n de nos meilleurs historiens spéciaux, Lemazurier, s'ex- prime ainsi à ce sujet : Ces anciens acteurs, qui furent les preoiicTB fondateurs du théStre national, parmi beaucoup de choses qu'ils empruntèrent aux théStres étrangers, adoptèrent lea masques usitée do temps immémorial dans les spectacles do l'Italie, mais ils en restrei- gnirent l'usage aux râles de vieillards et de vieil- les femmes (3). Quand on QEtûste à une repré- (I) On asBiire que li première femme qui se montra aur un de nos théitrea (le Marais on rgûtel de Bour^O- goe) fut Marie Vemier, femme du comédien b Porte. (ï) A propos de In (JaUrit i/u Falaii, de Corneille, re- MAT. — MATASIETE. Bcntation du Menteur, et que l'on enleod cette Bcène admirable qui commeace par cee mots fon- drojaDts ; ÊUt-wni» gentillumimet on ne peut con- ceroir que l'acteur qui les prononçait fût caché BOUS un masque presque semblable k celui dn Pan- talon de la comédie italienne , et l'auteur de cet ouvrage a va plusieurs pereonnea refuser absolu- ment de croire ce fait. Il n'en est cependant pas de plus incontestable; la preuve en existe dans ce vers de la Suite du Menteur, acte I", scène III* ; Votre feu pare même ert joué sodb le maaqne. Le Menteur ayant été représenté en 1642 , ces personnes , obligées de se rendre à une prenve aussi évidente , prétendent que du moins un usage qui Muquc vffrniit la leur semble ausHÎ peu raisonnable ne dura pas longtemps après cette époque , et leur Burpritie aug- mente lorsqu'on leur fait voir qu'en 1736, c'eet-ii- dire quatre-vingt-quatorze ans après la première re- présentation du Menteur, il eo soutenait encore au ThéStre-Franfais. C'est ee qu'on ne peut contester après avoir lu le passage suivant, extrait du Mer- cure de France, que le chevalier de la Boque ré- digeait alors ; Reprise des Fourbtr Sans cela Lully, qui aspirait à une charge de secré- taire du roi , n'aurait pas risqué de le remplir. Actuellement il ne reste de traces de cet usage que dans la scène des médecins burlesques qni viennent chanter à M. de Poureeaugnac : Bon dt, hon di; tons deux portent un masque grotesque (1). Un seul personnEige, qni d'aîllenre j paratb maintenant bien rarement, a conservé son mas- que sur notre théâtre : c'est Arlequin. MAT. — Pièce de machinerie. Les mate Ber- vent à fixer les châssis de décoration placés de chaque cûté de la scène et auxquels on donne volontiers le nom de coulisses. «. Un mât, dit Moynct dans son Envers du théâtre, est on chc^TOn do sapin de 7, 8 ou 9 mètres de hau- teur, pourvu à son extrémité inférieure d'mie espèce de tenon garni de fer ou même tout en fer ; ce tenon passe par la costiére et va s'em- boîter dans nue cassette, espèce de mortaise, (jui se trouve dans un chariot mobile mancea- vrant dans le dessous. Le mât conserve donc sa position verticale sur le plancher-, de plus, il est pourvu d'échelons en fer dans boute aa hauteur, afin de permettre à un homme de monter jusqu'au sommet ; à sa partie infi^rieure, À 1 centimètre du sol, un support eu fer re- çoit le châssis (la décoration), lequel, se trou- vant par ce fait isolé du plancher, va prendre la place qu'il doit occuper, quand on fait ma- nœuvrer le chariot portant tout l'appareil. Les traverses en fer tendent à disparaître pour être remplacées par des chant iguoles. Un accident, récemment arrivé à l'Opéra, a condamné les échelons en fer, qni affaiblissent le corps du mat. Il est utile d'ajouter que le châssis n'est pas seulement fixé sur son crochet, mais qa'fl est attaché, ou, pour mieux dire, « guindé » par une ou deux de ses traverses postérieures, au mât qui lui sert d'appui. » En dehors de ces mâts roulant sur chariots, on se sert aussi, dans les décors compliqués, de mâts indépendants et mobiles, qu'on fixe à volonté dans les costîèrcs pour compléter le soutien de la décoration. MATASIETE (2). - , qui s'appH- (î) Prononce» ; ilm MATASSIN. -- MATINÉES. que en espagnol à an spadassin , un fier-à-braa, un fanfaron, a été donné, sur la scène castil- lane, à un type théâtral assez semblable à celui de Jfalamore ou Matamoros. (Voy. Capitan.) MATASSIN. — Dans le divertissement de Moniteur dé Pourceaugnac, Molière a introduit dea malasiim. On ne sait plus beaucoup au- jourd'hni ce qne c'était que les matassins et quelle était leur spécialité; Caatil-Blaze va nous l'apprendre ; Damer Uê malaesin», dit-il, c'était, dana le moyen âge, imiteT la pyrrhique des Grecs, la danse des Saliens, prStreB de Mars institués par Nnma. Cette danee religiense et guerrière , que les Salicns exécut^ent l'épée à la main , portant au bras de petits boucliers sur lesquels ils frappaient en ca- dence avec leuTB glaives, devint une parade bouf- fonne lorsque les Italiens et les Espagnole s'avieè- rent de la renouveler dee Grecs. Vêtus d'un costume bizarre et de fantaisie, le pot en tête, ces moder- nes baladins se battaient à deux , à quatre , à six , à huit, etc., en dansant. Quoique armés de sabres de bois , ils feignaient d'être blessés et tombaient, restant sans mouvement , comme s'ils étaient morts. De là vint leur nom de mabusina, formé des verbes espagnols malar, tuer, etjingir, feindre. Matado fingido , par contraction, devint malafin, et matachin, matackine, d'où nous avons fait ma- tattia. La batte d'Arlequin n'est autre qu'une épée de matassin. Les Italiens disent aussi malMieino, luataccinala. De son côté, Thoinot Arbeau, qui écrivait dans les dernières années du seizième siècle, décrit ainsi la danse des matasains, qui, on va le voir, touchait de bien près à l'escrime : Les Bouffons ou Mattachios sont vêtus de petits corcelets avec timbries es épaclee, et soubs la ceinture, une pente de taffetas soubs icelles; le morion de papier doré, les bras nuds, les soD' nettes aux jambes , l'espée au poing droit , le bou- clier au poing gauche : lesquels dancent soubs un air à ce propre, et par mesure binaire, avec bat- tements de leurs espées ou boucliers. Pour com- prendre ceste dance, fault présupposer qn'oa y fait plusieurs sortes de gestes : l'un des gestes est ap- pelle/«(ncfe, quand le danceur sanlte sur ses pîedti joincts, tenant son espée sans en toucher aucune- ment : l'aultre geste est appelle eilocade, quand le danceur recule son braa , et avance la poincte de son espée, pour frapper d'icelle son compagnon. L'aultre geste est appelle laille haulu, quand le danceur frappe sou compagnon en descendant et fauchant de la main droicle (de laquelle il tient son espée) , à la main senestre ; l'aultre est ap- pelle raxre haull, quand au contraire le danceur frappe son compagnon en faucbant et descendant dès sa main senestre k sa main droite : l'aultre geste est appelle taille basse, quand le danceur frappe son compagnon en montant de la main droicCe û la senestre : l'aultre geste est nommé revei'i baê, quand le danceur frappe son compagnon en montant de la main senestre u la droicte. En voilà assez pour faire connaître les per- sonnages que Molière a mêlés à ses divertisse- ments. MATERIEL. — Lorsqu'on parie du ma- tériel d'un théâtre on entend non celui de la salle, qui consiste simplement en mobilier, mais exclusivement celui de la scène, qui comprend les décors, les costumes, les accessoires, le mo- bilier, les appareils de toutes sortes, la biblio- thèque, etc., etc. Ce matériel, dans certains théâ- tres, représente une valeur très considérable, qui se chiffe à elle seule par plusieurs centaines de mille itancs. MATINÉES. — Ceci est un des produits les plus récents , mais non pas les moins heu- reux, de l'art théâtral. Eu 1868, un homme ardent et convaincu, M. Ballande, ancien ar- tiste de la Comédie- Française, se mettait en tête d'organiser, dans la salle du théâtre de la Gaîté, des représentât ions de jour qui avaient lieu chaque dimanche, et dans lesquelles, habile en exhumations pleines d'intérêt, il faisait connaître au public certaines œuvres de notre théâtre, abandonnées depuis bien longtemps, qu'on ne pouvait alora juger que par la lecture, et qu'il entourait de tous les soins imaginables, en faisant précéder leur exécution d'une confé- rence historique et critique faite par un de nos écrivains spéciaux les plus en renom. L'idée était intelligente, ingénieuse, et obtint te plus grand succès. Mais voici qu'après quelques an- nées, nos théâtres s'avisèrent que ce qui avait si bien réussi à M. Ballande pourrait bien leur réussir aussi; quelques-uns se mirent de la partie, d'autres les suivirent bientôt, et anjoui- SIO d'hni, chaque dimanche, tons les thcâbree parisienB, depuis la Gotnédie-Françaiae et l'O- péra-Comique jusqu'au thé&tre CInny et aux Metms-PI&iBÎrs, donnent une matinée qui, commençant à une heure et demie, finit à cinq heures, sans préjudice de la représenta- tion dn soir. Je ne dis pas que les comédiens aient lieu d'Stre très satisfaite d'un tel régime, qui s'étend même aux jonrs de gnndes fêtes et qui, une cinquantaine de fois par an, leur im- MÉLODIE. — MÉLODRAME. pose le fardeau de deux spectacles dans la même journée ; mais il est certain que le pablic pari- sien a goûté très fort cette inno^tioa, et que les matinées dramatiques du dimanche, aa- jouid'hui passées dans les mœurs, contînoent d'obtenir le plus grand succès. MÉLODIE. — La mélodie est une sacce»* sion de sons qui s'enchaînent, selon les lois da rythme et de la tonalité, pour former on en- semble intelligible et appréciable à l'oreille, comme le discours est une succession de mots et d'idées qui s'enchaincnt, selon leur valeur relative, de façon à présenter à l'esprit un sens net, précis et défini. Ce livre n'ctant pas un Dictionnaire de musique , et ne s'occujtant de cet art qu'en ce qui concerne ses rapports avec le théâtre, nous n'avons pas à nous Oteiidre da- vantage au Bujet de la mélodie. Il noua suffit de l'avoir caractérisée. MÉLODRAME. — Le mélodrame est une forme exagérée du drame, qui fut imaginée an commencement de ce sii.'cle pour la plus grande gloire des théâtres du boulevard. II a été ainsi décrit et caractérisé par un critique : — •t Voici sur t|iiels fondements presque invaria- bJcs reposait la structure d'un mélodrame digne de ce nom. L'action, jetée dans un moule qui restait toujours à peu pr<.-s le même, s'agitait entre quatre itersonnagcs essentiels : c^était d'abord un troisième rôle, un tyran Bonillé de tous les vices, animé de toutes les passions mauvaises ; en second lieu, et comme contraste. c'était une jeune première, uu héroïne douée de toutes les vertuB, ornée de toutes les quali- tés les plus aimables et les plus intéressantes ; ensuite venait un jeune premier rôle, amant de la victime infortunée ; enfin cette vallée de terreur et de larmes était égayée par un niais, qui faisait surgir le rire an milieu des pleurs. Le tyran persécutait la victime ; celle-ci souf- frait jusqu'au moment où, son infortune et son danger étant an comble, le chevalier arrivait juste à temps pour la délivrer et tirer de son ennemi nue vengeance exemplaire, assisté du personnage comique, qni bc rangeait toujours du côte des opprimés, surtout quand ils avaient le dessus. Le fond, aussi touchant que moral, ne variait guère que par les circonstances et par la position sociale des personniiges. Ainsi, l'héroïne était tantôt bourgeoise et tantôt princesse ; le tjTan était parfois un prince cruel et sanguinaire, parfois c'était un chef de brigands, orné d'un feutre pointu, de bott«s à entonnoir et d'un arsenal en guise de ceinture ; quant au comique, il était toujours niais, sou- vent poltron, quelquefois gounnand, ou possé- dait simultanément ces diverses qualités. Le style adopté par ce genre de litterature était parfaitement en rapport avec l'espèce d'émo- tions qu'il afiêctionnait : c'était, dans le tragi- que, l'emphase la plus boursoufiée, avec un luxe de maximes beaucoup pins morales que bien exprimées, et une redondance d'épithètes plus énei^ques que varices ; dans le comique, une trivialite oii la bassesse se faisait remarquer plus souvent que l'esprit. » Pendant quarante ans le mélodrame régna en vainqueur sur les scènes de la Porte-Saint- Martin, de la Gaite et de l'Ambigu, voire même sur celle du Cirque- Olympique. Plusieurs auteurs, je n'ose pas dire écrivains, y trouvè- rent, comme d'autres dans l'élève des lapins, les moyens de s'y faire quelques bonnes mille li\Tes de rente, sans compter la notoriéte qui s'attachait à leur nom. Les rois du genre ont été sans contredit Cuvelier, Hapdé, Victor Ducange, Caignicz et Guilbert de Pixerécourt, qui, il n'est que juste de le reconnaître, avaient eu pour chef de file ou, si l'on veut, pour pré- curseur, le fameux conventionnel Sébastien Mercier, l'auteur du Tableau de Parts, lequel, MÉLODRAME. 511 aux dernières années du dix-huitième siècle, fit jouer plusieurs pièces qni n'étaient autres que de purs mélodrames : Jenaaiaî ou le Bar- neveli français, VBainlant de la Quadel-oupe, la Brouette du vinaigrier, Jean- Bennut/er (qu'on appelait volontiersyean-£'M«Hy«ia;),ete. Quant aux auteurs que je xnens de nommer, un certain nombre de leurs ouvrages sont de- venus célèbres, et sont demeurée comme les types du genre parmi ceux là on peut citer Sctue du mélodistne de les Frères à Vèpreuve, la Pie voleuse, le Vam- pire, le Chien de Montargis, la Forleresse du Danube, la Tête de bronze. Calas, Cwlina ou r Enfant du mystère, la Femme à deux maris, Tikéli, la Forêt périlleuse ou les Brii/ands de la Calabre, Geneviève de BrabanI, Hariadan Barberoiisse, Thérèse oa l'Orplielinede Genève, la Citerne iTAlbi, les Ruines de ïalbaye de Vaudémont, ete., ete. Cette appellation de mélodrame a éte donnée aux pièces de ce genre parce qu'elles étaient accompagnées de courts morceaux de musique instrumentale, destinés à souligner tel on tel 512 MÉLOPÉE. — MÉMOIRE (la). événement, l'entrée ou la sortie d'un person- nage, un incident qui se produisait, une scène mystérieuse, etc. Ces morceaux étaient eux- mêmes connus précédemment sous le nom de mélodrames, mais le contenant finit bientôt par absorber complètement le contenu et le déposséder à son profit. MÉLOPÉE. — Chez les Grecs, ce mot comprenait Fart ou les règles de la composi- tion du chant, et il s'employait aussi pour caractériser la déclamation notée. C'est dans ce dernier sens que nous l'employons nous- mêmes volontiers aujourd'hui, et Georges Kastner a pu très sensément s'exprimer ainsi à son sujet : — « Il me semble qu'on peut fort bien l'appliquer aujourd'hui aux phrases du récitatif mesuré, d'autant plus qu'il nous manque un terme exprimant l'arrangement des sons dans le cas dont il s'agit. Un récitatif est plus ou moins mélodùmx, mais il n'a pas de mélodie en propre, suivant l'apception ordi- naire qu'on donne à ce mot dans la musique moderne. On ne peut donc, à proprement par- ler, citer la mélodie d'un récitatif, puisqu'un récitatif ne comporte pas un arrangement de sons d'où résultent des phrases symétriques et régulières, mais on peut en vanter la mélopée. Il y a dans les opéras de Gluck un grand nom- bre de passages admirables qui ne sont que des mélopées, jd MELPOMÈNE. — La plus sévère des neuf Muses, après Clio et Uranic. Elle présidait à la tragédie antique, et les modernes ont conservé cette tradition. En effet, au dix-septième et au dix-huitième siècle, on disait couramment « l'art de Melpomène » , pour caractériser la tragédie, « le temple de Melpomène, » pour dé- signer la Comédie-Française, « les soutiens de Melpomène, » pour qualifier les acteurs tragi- ques, et enfin, « le culte de Melpomène, » pour indiquer la vocation d'un poète pour le genre tragique. « A l'époque voisine des siècles hé- roïques, dit un écrivain, les attributs de Mel- pomène étaient une massue, l'arme de Thésée et d'Hercule, un masque grave, et un sceptre. Elle avait de plus une tunique dont les plis balayaient la terre, un grand manteau par-des- sus, une large ceinture qui serrait cette tonique sur des hanches robustes, et de riches cothur- nes exhaussés de quatre doigts. Vierge, elle portait comme les vierges ses cheveux rassem- blés formant un nœud au sommet de la tête. Plus tard, on l'arma d'un poignard et l'on mit dans sa main des diadèmes. On l'a représentée aussi ayant à ses côtés un bouc, prix modeste des premiers vainqueurs dramatiques dans l'enfance de l'art ; mais cet emblème sans no- blesse n'eut point d'imitateurs. Sur un anti- que, elle est figurée dans l'attitude d'une fenmie qui médite, d'une main ramenant modestement sa robe autour de son sein, de l'autre tenant une simple branche de laurier, l'arbuste pro- phétique d'Apollon.» MÉMOIRE (La). — L'une des qualités essentielles du comédien. Dans une grande ville comme Paris, où l'on joue la même pièoe pen- dant des mois entiers, parfois durant toute une année, peu d'efforts sont à faire par les acteurs quant à la mémoire. Il n'en est pas de même en province, surtout dans les villes de peu d'importance, où les spectacles doivent être sans cesse renouvelés, et où le seul travail relatif à la mémoire doit être une des grandes préoc- cupations du comédien. On en jugera par ce fait que chaque artiste s'oblige, par nne danse de son engagement, à apprendre cinquante lignes par jour, et que ce nombre peut étoe doublé au besoin. Or, comme tandis qu'on ap- prend un rôle on en répète souvent un autre et qu'on en joue un troisième, il faut convenir que les efforts de mémoire ne sont pas pen de chose pour un acteur chargé d'un emploi im- portant. On sait, d'ailleurs, combien la mémoire est chose inégale. Aussi voit-on certains comédiens apprendre avec une facilité surprenante, tandis que d'autres sont obligés à un travail opiniâtre pour parvenir à être à peu près sûrs de leurs rôles. Encore en voit-on, et même à Paris, qui n'obtiennent jamais un résultat complet, et qui jamais n'ont pu dire un rôle à la lettre. Chacun, au surplus, a sa manière d'étudier. Lekain, dit-on, avait l'iiabitude, pour appren- dre un rôle, de le lire d'abord deux fois le ma- tin et deux fois le soir ; après avoir procédé MÉMOIRES DRAMATIQUES. 513 ainsi pendant quelque temps, il apprenait les vers. Larive, dans sa jeunesse, apprenait ses rôles couplet par couplet, ce qui le fatiguait beaucoup ; plus tard, il s'accoutuma à lire dix fois, vingt fois un rôle tout entier, sans se préoccuper de sa mémoire ; quand il l'avait bien compris, il le savait. On conçoit que les manques de mémoire, lorsqu'ils se produisent en scène, rendent froide l'action du comédien et sont destructifs de toute illusion , tandis que la sûreté de la mé- moire donne au jeu de l'acteur beaucoup d'ai- sance, de naturel et de vérité. Un fait est à remarquer au théâtre : c'est que, à de rares exceptions près, les femmes sont imperturbables sous le rappoit de la mémoire. Apportent-elles plus de soin dans leur travail ? Il n'y a pas de raison de le supposer. Il faut plutôt croire à une faculté naturelle en ce qui les concerne. Heureusement, le souffleur est toujours là non seulement pour venir en aide aux mémoi- res rebelles, mais pour remédier aux absences accidentelles dont sont victimes certains comé- diens pourtant très sûrs d'eux. Cela n'empêche pas qu'il ne se produise parfois quelque inci- dent singulier, et les annales du théâtre ont conservé le souvenir de quelques-uns, dont les acteurs se tiraient avec plus ou moins d'habileté et de sang-froid. On cite ce trait de AI"* Pa- nier, qui, jouant dans h Jlétrofmom le per- sonnage d'une souljrette qui étudie un rôle pour le jouer en société, se trouve manquer de mémoire après ce vers : Et je prétends si bien représenter ridole... Sans se troubler, elle en forge aussitôt un au- tre, et dit : Mais j'aurai plus tôt fait de regarder mon rôle. Elle tire alors tout naturellement son rôle de sa poche, et, prenant ainsi le temps de se rafraî- chir la mémoire, continue ensuite sans bron- cher. Un autre acteur de la Comédie-Française fut un jour moins heureux ; il s'arrête dans une tragédie à cet hémistiche : J'étais dans Rome alors... et ne peut aller plus loin. Voyant, après avoir répété deux ou trois fois ce demi-vers , que le DICriOKNAlRE DU THÉÂTRE. souffleur ne venait pas à son secours, il l'inter- pelle avec dignité et lui dit d'un ton hautain : Eh hen, maraud, que faisais -Je dans Rome? On juge de l'effet. Un autre encore, dans Mi- t/tridate, vieux comédien rompu à la cadence du vers tragique et habitué à sa régularité, est pris d'une al>sence soudaine à cet endroit : Quand le sort ennemi m'aui'ait jeté i»lu8 bas , Vaincu, persécuté... Ne trouvant pas la fin du vers, il en termine la mesure en j substituant machinalement ces syllabes cabalisti(]ues : (ati, tatou, tata. Vingt fois nous avons vu agir de même à la Comcniie- Française un artiste d'ailleurs distingué, Le- roux, mort aujourd'hui depuis quelques années, et qui de sa vie n'avait pu se graver un rôle dans la tète. A chaque instant il cousait ainsi des mots sîins suite à la lin de tel vers qu'il ne pouvait se rappeler. MÉMOIRES DRAMATIQUES. — Les mémoires, on le sait, sont })récieux pour l'his- toire, dont ils nous font connaître le côté intime et parfois saisissant. En ce qui concerne l'art et les artistes, leur lecture et leur étude sont particulièrement intéressantes. Par mal- heur, les comédiens écrivent peu, et, il faut bien le dire, lors(iu'ils se mêlent de publier ou de laisser des mémoires, ceux-ci, la plupart du temps, n'offrent (ju'un recueil de petits commé- rages sans valeur et de réflexions sans intérêt ; en ce disant, je n'étonnerai aucun de ceux qui ont pu lire, en ces dernières années, les mé- moires publit's sous divers titres et portant la signature de Samson , de Roger, de Lafemère et de M. Bouffé. Il ne se peut rien de plus vide et de plus incolore. On a publié pourtant, il y a une soixantaine d'années, une intéressante Collection de Mémoires sur l'art dramatique (1 ), dans laquelle on trouve quehjues écrits curieux, soit laissés par de grands comédiens, soit rédi- gés d'après leure papiere. Cette collection ren- fenne d'abord des mémoires de grands acteurs étrangers : Oarrick, ^lacklin, Brandes, Iffland ; puis des Mémoires de ou sur Talma, Préville, (1) Ponthicu, éditeur, 1822, 15 vol. in-S^. 83 514 MÉNAGERIE. — MEXEGHIXO. Dazincourt, TiCkain, M"* Clairon, M'^*^ l)u- mcsiiil, etc., dans les(]uel8 on trouve des ren- seignements précieux sur l'état de l'art à Tépo- (juc où vivaient ces grands artistes. Toutefois, je ne connais pas en ce genre de lecture plus attjichante, plus utile, plus curieuse que celle des Mémoires de Fleuiy, mémoires (jui n'ont as- surément pas été écrits jmr lui, puisque Fleury, dit-on, ne savait pas l'orthographe, mais qui ont été évidemment rédigés d'après ses papiers. On rencontre aussi (juclques faits intéressants dans les Souvenirs de J/"'* Louise Fusil, Quant aux Mémoires de J/"® Flore, l'ancienne duègne des Variétés, qui, si j'ai bonne mémoire, sont r(i'U\Te de Darthenav, ils ne constituent autixi chose qu'une fantaisie un peu corsée. Quehpics auteure diiimatiijues ont laissé des mémoires intéressants pour l'histoire du théâ- tre. Je ne parle pas de ceux de Collé, qui ne sont qu'un pamphlet indigne dirigé contre toiLS les artistes qu'il a connus ; mais ceux de Gol- doni sont charmants, ceux de ^larmontel très précieux, de même (pie les Souvenirs ffun sejraf/énaire , d'Arnault. Marsollier a laissé, de son côté, quelques ])ages sous le titre de Jla (■arrière dramatique, (Quelques musiciens ont aussi laissé des écrits de ce genre, mais dont l'intérêt est mincie au point de vue général, et où ils ne s'occupent (pie de leur ixiraonne : tels sont ceux de (îrétiy, de Blangini (recueillis par M. de Villemarest), de Herlioz, et même ceux du compositeur italien Pacini. La Corres- pondance de Favart est très utile à consulter pour l'histoire de la Comédie-Ibilienne et de l'ancien Opéra-Comique, de même que les Mèvuyires de Jean Monnet, restaurateur et di- recteur de ce dernier théâtre en 1752. Le fameux lil)raire théâtnil 15arl)a a publié aussi des Mémoires (jui ne sont pas sans donner (pielques renseignements curieux, Harl)a s'étant trouvé mêlé })en(lant trente ans aux hommes et aux choses du théâtre. Enfin, il faut signaler aussi les mémoires ou souvenirs intimes que divere écrivains ont publiés sur S(>phie Arnould, sur ^I"'' Quinault, sur M"'" Pélissier, sur M"^' !Mars; à tout prendre, si cette lecture est un }>eu fastidieuse, on trouve à glaner par-ci par-là, dans toutes ces publications, certîiins faits qu'il n'est pas inutile de connaître loi*s- qu'on veut se mettre sérieusement au cou- rant de l'histoire du théâtre et des grands artistes qui l'ont illustré ; il ne s'agit «jue de faire la part du feu et, pour ceux de c<î8 faits qui offrent un intérêt réel, de les contrôler soigneusement pour s'assurer de leur exacti- tude. MÉNAGERIE. — Au nombre des specta- cles favoris du public dans les grandes foires et dans les grandes fêtes, soit à Paris, soit en province, il faut placer en première ligne les ménageries d'animaux féroces. Ce n'est pas le seul i)laisir de contempler ces animaux qui attire dans ces établissements des si)ectateurs iKJinbreux, ce sont les émotions (pie procurent les exercices fort dangereiLx aux(piels se livrent les dompteui's, émotions dont la foule est par- ticulièrement avide et (pii assurent le succès de ce genre d'exhibitions. MEXE(iinXO. — L'un dos typc^ carac- téristi(pies du théâtre italien moderne, auquel il apiK>rte une saveur toute locale. Meneghino, en etf'rt, n'est ])as un personnage comme les auti'es et parlant comme eux : fameux surtout îi Milan, où il est poi)ulaire comme Punch l'est à Londres et notre (Guignol à Lv(m, il n'em- ploie sur la scène (jue le dialecte lombard, ce dialecte (pii, l)ien plus encore (jue l'italien pur, se rapproche du français. ^leneghino descend en ligne droite, dit-on, du ^lenego du seizième siècle, et même du Menghino de la Lena de l'Arioste. a II a, dit Frédéric !Mercey, remplacé Arlecpiin et Brighella. ^leneghino est l'enfant gîitiî des ^[ilanais, le Iktos du théâtre de la Stîulem ; son tiileiit consiste surtout dans nue esjxjce de gaucherie adroite, dans la façon plaisante avec laquelle il se heurte contre les murailles et trébuche contre les saillies du par- quet sans jamais toml>er ni sans rien perdre de son sang-froid, » En fait, !Meneghino est un naïf, mais dont la naïveté est parfois si)iri- tuelle, comme dans cette r(*i)onse à un compère (pli lui fait remanjuer (ju'il a un lK)uton & l'oreille : « C'est que j'aurai entendu quelque chose de Sîile, » réjxmd Meneghino. Par excm- ])le, il est effiHjyablement distrait, et ses distrac- tions font la joie du public. •<. S'il est à table, a MÉNESTREI.. 515 dit un de ses portraitiBtes, il met du sucre dans la soupe en guiao de sel , verse à l>oire aiir la ti^te dos convives, puis leur enlève leurs pemiques pour les faire sécher dans le feu. Il sert des bûches pour de la mortadelle de Bolt^ne, et lc^■a8ede nuit pour la soupière. Il prend la chandelle pour la bouteille au vinaif^e, et ré- pand du suif dans la salade. Il met le rôti avec les bottes sur k planche au pain. Il va allumer sa chandelle chcK le voisin, revient chez lui battre le briquet et s'étonne que l'amadou soit inutile. Il est naïf dans ses étonnements, et refuse de faire la commission qu'on lui donne parce qu'il a rencontré un homme à trois têtes, qui n'est autre qu'un peintre portant deux portraits. » Les iklilanais ont une vèrttaiile adoration pour Meneghino, et son nom sur l'affiche attire toiijours le public. J'ai vu jouer un jour, au théâtre Nuovo Re, un drame burlesque qui portait ce titre plein d'ampleur : Chiara di Roseniierg, ovvero il féroce Monlalban, asxa»- eino de! proprio Jiylio, con Meiwjhino posli- gliom, /adore e scoprilore dun orribile delilto. La soirée ne fut qu'un long éclat de rire. Au pbpiijue, Maurice Sand a peint Mencgh o avec une complète exactitude : — « Il prrte h veste courte, et la culotte de drap vert a b u tons et à galons rouffes, le gilet à fleurs les bas rayés. Sa figure, d'une expression j'oi aie au nez retroussé, est encadrée d'une perruqn à cheveux plats , se tenninant par une queue ficelée de rouge, et son couvre-chef, galonné de rouge, ressemble bien plus à ces casquettes de feutre, d'une forme démesurée, que portaient les Iwuffona du seizième siè-cle, qu'à un chapeau à trois cornes, n Deux artistes surtout se sont rendns célèbres, M lan depuis le commencement de ce siècle, [i, r la f çon dont ils ont rendu le type de Me- I Cpl 0 et le talent qu'ils y ont déployé. Le pr n er est Monoalvo, Il on fut alors des ménestrels comme des jongleurs ; ils se dégradèrent peu à peu, par le fait d'un contact im])ur, et tom- bèrent à ce point de déconsidération que Phi- lippe-Auguste crut devoir les bannir du myau- me. Ils y reotrèrent bientôt pourtant et for- mèrent, sous Louis XI, nne association qui prit le nom de Ménestramlk et dont le chef reçut BIbUutbèquc nstigilulc.) celui de roi des ménétrier». Leur profession une fois réglementée par des statuts officiels, comme l'étaient celles des artisans, ils se vi- rent traités comme tels, et leur décadence en devint plus rapide. Ces ménestrels, si bril- lants, si mondains, si élégants à l'origine, vi- vant presque toujoure dans la compagnie des chevaliers et de leura dames, reçus, choyés et fêtés dans les châteaux, dans les palais et jus- qu'à la cour des princes et des rois, tombèrent au rang des pires Italadins, dont ils partagèrent l'existence oisive et débauchée, et avec lesquels ils se virent bientôt justement confondus. Mais on doit se souvenir qu'ils eurent une «[Xique de gloire et de succès universels et qu'ils fu- rent, en somme, nos premiers poètes et nos pre- miers musiciens. MENUET. - -Voy. A[R.s ; MENUS -PLAISIRS. — Dai monarchie française, les Menus-Plaisirs, qu'on appeiaitcommunément&sJ/e«w^, f oi-maient une branche importante de l'administration de la maison du roi et comprenaient tout ce qui avait rapport aux fêtes de la cour. Les Menus-Plai- sirs étaient placés sous la direction d'abord d'un trésorier, et plus tard d'un intendant. Déjà, sous Henri III, cette administration absorbait annuellement, à elle seule, une somme de 70 millions de li\TCS tournois, La direction des spectacles de la cour devint par la suite ime des chairs les plus importantes de l'inten- dant des Menus, et, parce fait, s'enchevêtrait quelque peu avec celle de l'Opéra. En effet, sous Louis XIV, qui habitait généralement Ver- sailles on Saint-Germaiu, les premières repré- sentations d'ouvrages nouveaux étaient pres- que toujours données dans l'une de ces deux villes, de même que sous Louis XV elles étaient souvent données à Fontainebleau, où le roi se rendait chaque année. Or, certains décors et costumes faisaient retour à l'Opéra après avoir servi k la cour, et il résultait de cette situation un frottement incessant entre les deux admi- nistrations. Louis XVI, eu réduisant considé- nkblcment les dépenses de sa maison, ne laissa subsister qu'un ■( maître des Menus-Plaisirs », qui est ainsi mentionné dans VEncyclopédie métlioditiue (17K8) : — « Grand officier qui a l'intendance de tout ce qui regai'de les specta- cles, comédies, bals, mascarades, etc., à la cour. Il avoit aussi d'abord le pouvoir de don- ner des permissions à tous les comédiens forains et à ceux qui montrent les marionnettes, etc., et on ne pouvoit mémo jouer aucune pièce aux deux salles de spectacle de Londres, qu'il ne l'eût lue et approuvée ; mais cette autorité a été fort réduite, pour ne pas dire absolument abolie par le dernier règlement qui a été fait sur les spectacles » L'administration des Meims-PlaisirB avait 518 Bon siège à Paris, dnnB le vaste immeuble qui, Hîtiié faubourg PoisBonnière, s'étendait de la rue fiergrèra à la rue Bicher actuelles. C'est là que laConvention plaça le Conservatoire de mii- aique, qui occupe encore aujourd'hui une par- tie de cet emplacement. Les Menus-Plaisirs reparurent avec la Restauration, mais bien dé- clins de leur ancienne splendeur. Ils forent défi- uitivemeut emportés [mr la révolution de IHâO. Les trois dernière intendants des Menus- Plaisirs (ces fonctionnaires étiiient places sons MÈKE8 NOBLES. — MERLIX. les ordres immc-diats du ministre de la maison du roi) furent Papillon de la Fertc, qui occupa cotte charge pendant les dernières aimées du règne de Louis XVI et qui périt sur l'ccbufiind révolutionnaire, âgé de prés de soixante-dix ans; des Entellcs, qui fut désigné pour cet office en 1814, lors de la Itestauration, et Pa- pillon de la Ferté, fils du priniédent, qui suoctkla à des Entelles, aux environs de 182ii. JIKRES XOBLES. — Chisse de rôles mar- (|ués qui appartient à l'emploi des duègnes et des caractères ( Voy. ces mots). Les mèrea nobles sont des rûies de tenue, d'un genre sérieux et digne, qui ont pour tTjies ceux de M""' Vaii- Desmarres, iiuteur-amutenr, sccrûtairo des commandements du jiriiice de Oondé, fit effectivement représenter à lu C'onu'dio-Fniu- çuise, en 1BH(), sous le titre de Merlin drayon, une comédie en un acte qui iiiirait avoir obtenu du succès. Le tv|)e qu'il avait donné à sou valet engagea quel<|ues auteurs à remettre celui-ci à la scène; c'est ainsi (pi'on eut Merlin pem- Ire, de La ïhuillei-ic. eu 1CH7, Merîiii Gascon, de llaisin l'ainé, en 109(1, et dnn^jla mèmcnn- née Merlin diserinir, de Dauci>urt, <|ui intro- duisit encore ce tyiic dans une iwjchadc inti- METTEUR EN SCÈNE. — MI-CARÊME.- tiilée rimpromptu deijarnison, donnée [lar lui en l(i93. Mais utistiiU: il ne fut plus (jncsliou (In iJersoniiHge. METTEUR EN SCÈNE. — Régisseur spécialeuient chargé, dans un tlrâitrc, du tra- vail de la mise en scène (Voy. ce mot). C'est lui qui doit régler et organiser tout ce travail, indiquer les entrées et les sorties des i«rson- nages, fixer la iilnce que chacun d'eux doit occu|>er en scène, établir lea piissades et les mouvements scénicjues, R'glcrles marches, les cortèges, les évolutions de tout le [«raoniiel des cha-nrs et delafigursition, eimn mot pren- dre soin de toute hi partie matérielle de la re- présentation. C'est donc le mettenr en scène i|ui préside aux études et aux répétitions de tous les ouvrages qui doivent être offerts au pu- blie, c'est lui qui porte la resiionsabilité'de leur bonne ou de leur nuimaise exécution , et rien , SOUK ce riipi>on, ne peut être fait Siuis son fon- conrs et eu dehors de ses indications. METTRE EN SCÈNE. — Réffler, établir et organiser l'ensemble et tons les détJiils de In mise en scène d'un ouvrage draMiati(pie. MEZZETIN. — Mez/etiii, Scapiu. Covielle, Brighelle, tout cela rentre un [«u dans le même ty]w, celui du valet ruse, fourbe, adroit, intrigant, tel que la Coint-die- Italienne la im- [KirU- chez nous. Cliacmi des actenra italiens i]ui venaient ici pour [lersonnificr ce «iractère prenait nn nom particulier, de telle sorte qn'il est facile de se perdre dans cette succession d'artistes et de différencier des types qni, à bien peu de chose près, représentaient le même individu, maïs qui nous déroutent aujourd'hui par les changements de nom dont tU étaient l'objet de la part de ceux qui étaient chargés de les personnifier. En ce qui concerne JIckzc- tin, voici ce que dit Louis Iticcoboni, dans son Histoire du Théâtre Italien ; — « I. 'habit du Meaïctin a étt; mis sur ie théâtre ou France daiiB la troupe des comédiens italiens nos pré- di«esBeurs. Le sieur Angelo Costantini, qui avoit été reçu dans ta troujje pour doubler le sieur Domini(ine Biaucolelli dans le rôle d' Ar- lequin (vers ICWi), se trouvant oisif, pensa à 519 se donner un caractère qui pût être utile À la troupe. Comme on n'avoit jioint d'acteur pour tes rôles de iScapin, il en prit le caractère ; mais il en changea l'habit. I! ne mit point de mas- que, ayant un visage très gracieux et dos yeux qui joiioient admirablement. On com]ioKa cet habit, qui tire son origine des dessins de Cal- lot ou des acteurs comiques du Théâtre Fran- çois de l'an lG;i2, de Tnrinpin et de Fiiipin (?), qui viennent de la même source. Ou en retran- cha la longue culotte, et on te rendit plus gra- cieux, en conservant seulement la qualité de l'étoffe, qui est à rayes de différentes couleurs. » Il faut, croire que ceturtiste rendit fameux par son talent ce ty|H-- de Jlezzetin, car celui-ci chez nous devint traditionnel, et il fut le hé- ros on l'un des personnages importants d'un grand nombre de pièces de notre Comédie- Ita- MEZZO SOPRANO. — \o\\ de femme qui tient le milieu entre le soprano et le cou- tmlto. EllecorresjKindaubarj'ton masculin. Ce terme a été par nous einpninté à l'italien. MI-CARÊME. — La fête de la nii-cacî'mo est comme une sorte d'été de la Siiint-Martin du carnaval. Considérée à Taris comme la fête des blaiichisscusea, qui la célèbrent avec iiomjw, elle se place nu jeudi qui se trouve im milieu du carême, et renouvelle pour un jour les joies et les folies de la semaine grasse. Souvent plus MIME. — MIMODRAME. favorisée que celle-ci par ta température, la mi- caréme se fait encore remarquer par des ca^'al- cades, des chars, des corbèges qui pareourcnt aux Bone de la iiiusi<.iue les boulevards et les voies principales de la grande ville. Toutefois, la mi-carënie nous semble appelée, comme le carnaval iui-méme, à disparaître dana un ave- nir plus ou moins éloigné. (Toy, Caekaval.) MIME. — Actenr qui joue la pantomime, qni prend part à l'exécution d'une action scé- uique à l'aide du geste seul et aans le secours de la panile. Le mime est prc8(}ue toujonra un danseur. Les anciens lui donnaient le nom de panlomme (Voj. ce mot). MIMIQUE. — La mimique est l'art de re- présenter les idées, de les rendre snisissables et compréhensibles par le moyen du geste et da mouvement. Une mimifiue expressive est donc la première qualité de l'nctenr qni joue la pan- tomime, comme une diction juste est la pre- mière qualité du comédien. MIMODRAME. — Le mimodrame est une sorte de mélodrame qui tire sou nom de ce fait que l'action parlée se trouvait parfois inter- rompue et remplacée sinon par une action mi- mée proprement dite, du moins par des soèoes muettes ciui se composaient de combats, d'évo- lutions, de marches guerrières et éi|ucstre8, etc.. (irsprèi qui en faisaient un spectacle à part et d'un genre particulier. Je crois bien que le mimo- drame a pris naissance vers 1795, an tliéâtrc do la Cité, qui était situe sur l'emplacement occupé aujourd'hui par le tribunal de com- merce, à l'époque oii ce théâtre eut recours, pour ra|tpcler sa prospérité chancelante, anx chevaux de Fniiicoui. Cnvelier et Hapdé fu- rent les premiers qni mirent leur plume un service de ce genre lx\tard, auquel on doit les grands drames militaires qui firent plus tard la fortune du Cinjuc -Olympique, alors que, BOUS la rojnuté de Juillet, celui-ci ne cessait de mettre eu action cette trop fameuse h'^ende napoléonienne, qui devait être si fatide à la Fmuce. k Le mimodrame, disait il y a trente ans M. Saint Agnan-Choler, n'a jamais consti- tué une œuvre bien littéraire. La richesse des décorations, la variété et la magniticence des costumes, l'emploi habile de nombreux corn- [uirses, tels ont toujours été ses principaux moyens de séduction. Cependant ces inoyenB ont suffi pour lui attirer une faveur qui ne s'est jamais démentie, et il est venu jusqu'à noua, en se perfectionnant et eu augmentant ses raa- BOQi-ces, mais sans eu changer la nature... Pen- dant longtemps le Cir(|ue-01ynipique, avec sa vaste salle, avec sa sci-nc large et profonde, avec ses cheraux dressés aux évolutions soéni- qucs , est resté en possession de ce genre tout MIRACLE. — MISE EN LOGE. 521 paiticulier, et il lui a dû de longs et profii^ables succès. En effet, les spectateurs ont toujours fort goûté cette espèce de spectacle , propre à enflammer les esprits belliqueux, et à procurer aux caractères pacifiques cette espèce de jouis- sance dont parle le poète, et qui consiste à regarder du rivage les périls de la tempête. On peut bien dire, il est vrai, que, pour trouver là les délices d'une illusion quelconque , il fal- lait y apporter une bonne volonté bien grande ou une imagination bien vive. Ces armées, composées d'une centaine d'hommes, dont douze sapeui*s, un tambour-major, douze tam- bours, trente-six musiciens et une trentaine d'officiers ; ces combats, où les fusils se dé- chargeaient à bout portant sans jamais faire une seule victime; ces charges de cavalerie exécutées par une demi-douzaine de chevaux sur un plancher sonore et faisant beaucoup de bruit, mais pas du tout de mal ; tout ce spec- tacle de convention enfin, assez bien organisé comme spectacle, mais tout à fait mesquin si on le compare aux terribles grandeurs de la réalité, ne pouvait donner d'une véritable guerre qu'une idée fort imparfaite. Mais enfin la poudre brûlée répandait dans la salle son odeur aussi guerrière que fétide ; les uniformes russes, autrichiens ou anglais reculaient devant les uniformes français ; un seul héros, en habit bleu, exécutait victorieusement contre trois ou quatre lâches en habit blanc ou rouge le combat traditionnel du drapeau ; les mots de patrie et d'honneur scintillaient au milieu de tout ce glorieux tapage, et puis il était là, lui, l'homme des grands souvenirs, et voir cette redingote grise et ce petit chapeau, plus adorés mille fois que ne le furent jamais manteau de pourpre ou couronne d'or, entendre cette voix brève et saccadée qui commandait aux rois, n'en était- ce pas assez pour exciter l'enthousiasme en face de ce spectacle assez glorieux iK)ur n'avoir pas besoin d'une complète réalité ! j» Le mimodrame, devenu alors le « drame militaire )>, était exclusivement exploité par deux auteurs dramatiques de quatrième ordre , Ferdinand Laloue et Fabrice Labrousse, qui avaient trouvé le ton nécessaire à ce genre de productions. C'est à eux que Ton dut Murât, Bonaparte ou les Premih-es Pages (Tune grande histoire; Bonaparte en Egypte; M asséna, V en- fant chéri de la victoire, et plusieurs autres chef8-d'œu\Te ejusdem farinœ. Tout cela s'est évanoui, depuis que la guerre nous est réapparue comme un jeu trop cruel en sa réalité pour en faire un spectacle presque ridicule. MIRACLE. — Le miracle était un jeu scé- nique issu du mystère, mais dont les dévelop- pements étaient moindres, et qui, comme le mystère, se représentait publiquement. Son nom indique que, comme lui aussi, il tirait ses sujets de l'Écriture sainte, et qu'il mettait en action les faits et les personnages de l'Ancien et du Nouveau Testament. C'est surtout en Angleten-e, dit-on, que le miracle fut populaire. MISE A LA SCÈNE. — Il faut se garder de confondre la <( mise à la scène » avec la «. mise en scène ». La mise à la scène d'une pièce est sa mise à l'étude, son entrée en répé- tition , le moment où la pensée de l'auteur va prendre corps et où la fiction écrite va devenir une fiction scénique, La mise en scène est tout autre chose, comme on va le voir. Autrefois, il y a un siècle, on abrégeait l'expression, et l'on disait simplement la « mise » d'une pièce. Lorsqu'on annonçait la prochaine mise d'une comédie ou d'un opéra nouveau, cela indiquait que cette comédie ou cet opéra allait entrer en répétition. MISE EN LOGE. — Chanteurs, comé- diens, danseurs, choristes, figurants, compar- ses, nul ne doit avoir à s'inquiéter, en arrivant le soir au théâtre, de la moindre partie du cos- tume qu'il de^Ta revêtir pour entrer en scène ; tout, jusqu'aux plus minces accessoires du vête- ment, doit être préparé avec le plus grand soin, de façon que l'artiste n'ait qu'à s'hîibiller sans avoir à chercher quoi que ce soit. C'est cette préparation qu'on appelle la « mise en loge », et qui regarde le personnel des costumiers. M. Nuitter, dans son Nouvel Opéra, décrit ainsi cette opération, qui, dans un grand théâ- tre comme l'Oix^ra, où le répertoire varie chaque jour et où le personnel est immense, acquiert une impoitance énorme : — « Dans la journée, on a fait ce qu'on appelle la mise 522 MISE EN SCENE. en logCj c'est-à-dire que l'on a rangé dans cha- que armoire toutes les parties du costume que cliacun, depuis le premier artiste jusqu'au der- nier comparse, doit trouver sous sa main quand viendra le moment de s'habiller. Coiffures, bar- bes, moustaches, maillots, vêtements de toute sorte, chaussures, armures, etc., etc., ce sont des milliers d'objets qu'il faut disposer métho- diquement. Quand une indisposition sun'enant au dernier moment nécessite un changement de spectacle, tout ce travail doit être fait à nouveau, tout doit être méthodiquement dé- placé et remplacé ; aux pouqx)ints, aux toques des Huguenots f il faut substituer les rol>e8 de moine, les manteaux de la Favm'^He, ou les /?:'/772^w et les voiles d'Alceste, pendant qu'en même temps sur le thwitre les machinistes vemplacA'nt le château de Chenonremtx par les jardins de ÏAlcazar ou par le temple ù* Apollon, » m MISE EN SCÈNE. — Voici l'un des cotés les plus intéressants, les plus curieux et les plus complicpiés de l'action scénique et de la repré- sentation théâtrale. On ixîut dire (ju'en dehors de la récitation jmre, c'est-à-dire de la diction ou de la déclamation , comme on voudra l'ap- jxîler, la mise en scène englolie tout, com- pi-end tout, embrasse tout, aussi bien au jwint de vue du matériel que du pei*sounel : l'un et l'autre se trouvent même souvent en elle si bien confondus, (ju'on ne saurait les dégager et les traiter séparément. En effet, la mise en scène est l'art de régler l'action scénique considéive sous toutcB ses faces et sous tous ses aspects, non seulement en ce (jui concerne les mouve- ments isolés ou combinés de chacun des per- sonnages qui concourent à l'exécution de l'œuvre représentée, non seulement en ce (pii concerne les évolutions des masses : groui)e- ments, marches, cortèges, combats, etc., mais en(!ore en ce qui est d'harmoniser ces mouve- ments, ces évolutions avec rensemble et les détails de la (lécorati(»n, de ranienl)lemeut, du costume, des accessoires. Il est clair ([u'ou ne fera ])as évoluer des hommes comme dvs femmes, une escouade de soldats comme un groujK.* de nymphes, des clievaliera bardés de fer et armés de lances comme une troupe de ]^aysans aux habits légers et libres de leui*s mouvements. D'autre ])art, il est certain que les mouvements d'un grand personnage en costume de céré- monie, comme un souverain dans son palais, ne sauraient être les mêmes que ceux d'un lion bourgeois agissant dans son salon. Eiiiiu , cent ou deux cents individus, figurant une scène de tumulte dans la cour d'une prison, ne iX)urront se mouvoir de la même façon que s'ils simu- lent une révrJte en plein air, sur une place publique, dans un décor large, spacieux et ou- vert de tous cotés. On voit que la mise en scène, envisagée au seul point de vue du i)er- sonnel, est chose essentiellement mobile, variée de sa nature, qu'elle dépend pour une grande partie des conditions extérieures du drame, et (lu'elle doit se modifier selon les exigenc<îs jjar- ticulièrcs de la scène. Quant à la mise en scène matérielle, elle n'est pas moins compliquée, surtout lorscju'il s'agit d'un ouvrage un peu impoi"tant sous le rai)port du spectacle, que ce que j'appellerai la mise en scène humaine. Il faut que le régis- seur, chargé de ce sen-ice extrêmement diflieile et qui comiX)rte des détails de toutes sortes, se rende un compte exact de l'action qu'il doit faire représenter, de réix)que et du lieu où elle se passe, des costumes et de la condition de chacun des jktsou nages, afin de régler la dis- position des décors et des praticables, celle de tous les accessoires nécessaires au jeu scénique, la manœuvre des changements à vue, ceUe des trucs s'il y a lieu : il faut (ju'il se rende compte aussi de l'espace dont il dis]K)se jyour les êvo^ lutions des mtisses et de la façon dont il pourra faire mouvoir celles-ci selon le plus ou moins d'encombrement de la scène et la nature des événements qu'il lui faut mettre en action. Pour une pièce même intime, sans apparat et sans f nu'as d'aucune soite , la mise en scèue est souvent fort délicate à régler. Dans la vie ordinaire, deux pei-sonnes pourront causer jien- dant une demi-heure dans un salon sans liou- ger, sans, ])our ainsi dire, faire un mouvcmeut. Il n'en est i)as de même au théâtre, où Tim- mobilité est imi)ossil)le, et où cependant les mouvements, dans une situation de ce genre, ne doivent être ni trop accusés, ni troj) brus- ques, ni trop fré(|uents. Il faut donc régler avec soin la posititm diverse des personnages. MISE EX SCENE. 523 les passades, les mouyements discrets, les jeux de scène à peine indiques, les entrées, les sor- ties, les changements de plan, tous ces mille détails qui échappent au spectateur le plus at- tentif, mais qui sont le fond même de Faction scénique et dont l'inobservance le glacerait en lui enlevant toute illusion. On peut s'en rendre compte en voyant, par exemple, à la Comédie- Française, ces adorables proverbes de Musset, à deux ou trois personnages, comme un Caprke et II faut qu'une porte soit ouverte ou fermée; on verra que la scène est toujours occupée, active sans qu'il y paraisse , et que ces entre- tiens mignons sont coupés à tout instant par quelque mouvement, quelque passade, quelque changement de position, sans lesi^uels il n'j au- rait que languem' et monotonie. Mais s'il s'agit d'un ouvrage à grand dé- ploiement scéniiiue, c'est bien une autre affaire. Ici nous pouvons prendre pour exemple l'O- péi-a, qui est un modèle en son genre, et non» verrons quelle étonnante variété, quelle sou- plesse infinie on apporte au théâtre dans le développement des masses, dans la manière de les disposer, de les mouvoir, de les combiner pour produire les plus grands effets, ou les plus charmants, ou les plus pittoresques. Sous ce rapport, le troisième acte des Huguenots ^ avec ses épisodes successifs, si bien imaginés par le poète, est un véritable chef-d'œuvre. On peut citer aussi, comme si)lcndeur, le magnifique cortège du premier acte de Iti Juive; comme sévérité, la scène du concile du premier acte de V Africaine; comme puissîince, le tableau du vaisseau du même ouvTuge ; comme sentiment pittoresque, le divertissement des Patineurs du PropJiète; comme gi-àce charmante, différents épisodes du ballet de Quelle, Dans nos théâtres de féerie, où la mise en scène se complique du jeu des trucs, elle amène aussi des effets sur- prenants. Qui n'a vu, au Châtelet, à la Port«- Saint-!Martin, ces féeries légendaires, les Pilu- les du iJiahle, le Pied de mouton, la Biche au hois, Peau d'âne, et qui n'a été surpris des effets merveilleux qu'un metteur en scène habile peut obtenir sur un espace de quelques mètres carrés, déjà très encombré par les décors, et qui pourtant doit lui suffire pour faire agir cent, deux c^nts et jusqu'à trois cents indivi- dus, accompagnés quelquefois de vingt ou trente chevaux! Il en est de même souvent pour les gmnds drames, qui, à l'occasion, don- nent lieu à un spectiicle plein de puissance et de grandeur. Certains drames d'Alexandre Dumas sont restés justement célèbres sous ce rapport, entre autres Jlon/e Cristo, les IVois Mousquetaires et le Chevalier de Maison-Rouge, En ce qui touche le décor, la mise en scène s'augmente parfois de certaines difficultés par- ticulières : ainsi, par exemple, lorsqu'un auteur, voulant produire simultanément plusieurs ac- tions différentes, juge à propos de partager le théâtre en ])lusieurs parties. Ce moyen a été souvent employé. Dans Ouido et Ginevra^ dans Aida, le théâtre est divisé en deux dans le sens de sa hauteur; dans le Roi s'amuse, la scène offre trois parties différentes , et elle est partagée en quatre dans les Contes d'Hoffmann, Beaucoup de soins sont nécessaires pour don- ner de l'unité à ces actions diverses. Le public ne se doute point de la i>eine qu'on se donne, de l'ingéniosité qu'on déploie parfois pour ses plaisirs, des ruses auxqueUes on a recours pour exciter sa surprise ou son admiration. En voici un exemple assez original qui date de deux siècles, c'est-à-dire de la re- prise de r.4;«^//w«tWe de Corneille qui eut lieu en 1082 ; il est ainsi rapporté dans les Anecdo- tes dramatiques : Les grands applaudissemeus que reçut cette tra- gédie portèrent les comédiens du Marais à la re- prendre après qu'on eut abattu le théâtre du Petit- Bourbon. Ils réussirent dans cette dépense, et elle fut encore renouvelée en 1682 par la grande troupe des comédiens, avec beaucoup de succès. Com- me on renchérit toujours sur ce qui a été fait, on représenta le cheval Pégase par un vérita- ble cheval , ce qui n'avoit jamais été vu en France. 11 jouoit admirablement son rôle, et faisoit en l'air tous les mouvemens qu'il pourroit faire sur terre. Il est vrai que Ton voit souvent des chevaux vi- vans dans les opéras d'Italie ; mais ils y paruis.scnt liés d'une manière qui, ne leur laissant aucune ac- tion, produit un effet peu agréable à la vue. On s'y prenoit d'une façon singulière, dans la tragé- die jï Andromède, pour faire marquer au cheval une ardeur guerrière. Un jeûne austère , auquel on le réduisoit, lui donnoit un grand appétit; et lors- qu'on le faisoit paroître, un gagiste étoit dans une 524 MISE EN SCENE. coulisse et vannoît de Tavoine. L*animal, pressé par la faim , hennissoit, trépignoit des pieds, et répon- doit ainsi parfaitement au dessein qu*on s^étoit proposé. Ce jen de théâtre du cheval contribua fort au succès qu'eut alors cette tragédie. Tout le monde s'empressoit de voir les mouvemens singuliers de cet animal, qui jouoit si parfaitement son rôle. Molière fut moins heureux un jour ; mais il s^agissait ici d'un âne, au sujet duquel Gri- marest raconte cette anecdote : On joua une pièce intitulée Dom-Quixote, On Tavoit prise dans le tems que Dom-Quixote installe Sancho-Pança dans son gouvernement. Molière fe- soit Sancho : et comme il devoit paroître sur le théâtre monte sur un âne , il se mit dans la coulisse pour estre prest à entrer dans le moment que la scène le demanderoit. Mais Tâne , qui ne savoit point le rôle par cœur, n'observa point ce moment ; et dès qu'il fut dans la coulisse il voulut entrer, quelques efiEorts que Molière employât pour qu'il n'en fît rien. Sancho tiroit le licou de toute sa force ; l'âne n'obéissoit point ; il vouloit absolument paroître. Molière apelloit : etites descen- tes pitoyables , d'un dieu ou d'une déesse sur un petit monceau de nuages découpés en rond et at- tachés à quelques cordes , assurément il n'y auroit pas lieu de les regretter. Il y a peu d'apparence qu'on en ait besoin à l'avenir; le genre de féerie et de magie est tombé en désuétude ; ces cliangemens burprenans, opérés par un coup de sifllet, ne nous surprennent i)lus ; ces dieux , ces déesses et tant d'autres êtres imaginaires ont cessé de nous inté- resser, et il est diflicile que désormais le merveil- leux de la Fable soit amené assez heureusement pour ôtre un objet de plaisir : le genre d'opéras que nous goûtons à présent est dramatique et n'ad- met plus guères ces miracles. Surtout il faudroit supprimer les vols; notre goût plus épuré, ou notre critique plus sévère, exi- gent cette réforme. On a voulu , contre le senti- ment de l'auteur de la musique, faire usage de l'ancien vol dans l'opéra de Persée; le public l'a trouvé ridicule, non qu'il fût mal exécuté, il étoit ce qu'il a toujours été , mais nous n'admirons plus si facilement. C'e.st une suite nécessaire de l'impos- sibilité de nous cacher la corde. D'ailleurs l'attitude contrainte de ce combattant n'a nul rapport à celle d'un être qui auroit la faculté de planer dans les (1) Lettres sur rOpira, par M. C***. Paria, 1781, in-12. airs. Il eût été plus vraisemblable et plus intéres- sant que Persée se fût placé sur le rocher devant Andromède , et que de là il eût combattu le mons- tre. Je me souviens encore du vol de Phaéton; rien n'étoit plus ridicule que de voir quatre chevaux de carton, dont les seize jambes brandilloient en l'air. Dans je ne sais quelle autre pièce, on voyoit les douze dieux pendus chacun à une corde qui continuoit de vibrer pendant toute la scène. Il faut convenir que de pareils objets ne sont propres qu'à amuser les enfans. Ce sont ce})endant ces misères qui occasionnent les machines les plus dispendieuses. Est-ce que les Gorgones ou les diables, sortant d'un antre, ne feroient pas autant de plaisir que lorsqu'on les voit s'élever lentement et bien arrangés, au moyen d'une trappe? Le plus ridicule encore, c'est lorsqu'ils vont s'y remettre avec ordre et inquiétude pour redescendre aussi gravement , au sortir d'une scène remplie d'action. Tout cela est bon pour étonner des paysans qui sortent de leur village ; encore ne sera-ce que la première fois. 11 faut convenir que depuis le temps où c«s critiques étaient fornmlées, de grands progrès ont été faits, et qu'aujourd'hui la mise en scène, dans un théâtre important, est de nature à produire Tillusion la plus complète. Il est bien difficile, tant que de nouveaux procédés n'auront pas été inventés, de faire mieux (jue ce qui se fait en Fmiice en tout ce (pii touche le décor et la machinerie ; quant au costume, qu'il s'agisse de l'exactitude historique, de la richesse, du goût, on ne Siiurait rien imaginer de plus parfait. Mais aussi sait-on ce qu'il en coûte, dans un grand théâtre, lorsqu'il s'agit de mettre en scène un ouvrage importimt. Ici, quelques chif- fres ne seront pas sans intérêt. A rOpéra, les frais de mise en scène de Bon Carlos (18G7) se sont élevés à la somme de 124,288 fr. 28 centimes ; pour Ifamîet (18(;8), on a dépensé 10o,82:> fr. 41 centimes; pour Faiist (IHGi)), 118,091 fr. G(j centimes: Aida (1880) n'a pas coûté moins de 23;{,î)91 fr. 92 centimes; enfin, les dépenses faites pour h Tribut de Zamora (1881) ont atteint le chiffre de 270,000 fr. Il me semble assez cu- rieux de faire connaître le détail des frais oc- casionnés pour l'un de ces ouvTages ; le voici donc, en ce qui concerne Faust : 526 MISE EN SCENE. 1*» Muilque 2" In^ruments : Mandolines. 65 Remise en état du grand orgue 550 8" Accetsoiret de la scène : 3,lf»7 fr. 20 615 00 Rouet et cliaise Cassolettes et gobelets Épée mécanique et fleurs ar- ticulées Cannes et béquilles Sorcières et chevaux fantasti- ques Arbalètes Réparations d'accessoires di- vers 23 48 80 166 32 741 80 169 20 l,-260 00 4" Frais de repitUions : Choristes externes 774 a Elèves de la danse 60 Ustensiliers 17(> Comparses et figurantes 9() Orchestre (externes) 3'}5 ) 3,530 10 Bande mQitaire 820 Service de sapeurs-pompiers. 432 10 Service des appareils électri- ques., 817 f}*^ Costumes (main-d'œuvre et façons) : Nettoyage de costumes et étoffes diverses 300 05 Tailleurs et couturières supplé- mentaires 3,789 50 \ Travaux et veillées des em- ployés ordinaires 2,593 00 Travaux à façon au dehors. . 2,647 50 Divers IGO 60 Costumes (étoffes et matières) : Chaussures 2,1 99 \ Bonneterie 6,170 \ Bijouterie, armures 5.108 84 Etoffes de drap et méiinos.. . 7,900 Étoffes de velours 4,572 34 Étoffes do soie et satins 5,492 79 CrêiKîs, dentelles , etc 2.398 19 Toiles et mousselines 3,094 09 \ Broderies, passementeries et )4l,920 41 impressions 2.428 96 Articles divers 2,415 20 9,400 65 Accessoin'8 aux costum*'» : GLace h. main décorée. Glace à main argentée . Coffret émail 1«! 2,-> 100 JRejwrt 69,842 3(5 60 Décoration (main-d'œuvre) : 6,543 90 \ A reporter 59,842 BG Sciage 105 27 Collage du papier. 560 06 Travaux supplé- mentaires des machinistes . . . 3,553 90 Travaux supplé- mentaires de serrurerie 2,325 17 Matières diverses : Bois et perches.. 5,515 45' Toile à décors... 9,102 42 Clouterie et ga- lets 556 45 Papiers, colle et divers....;... 1,415 90 Jardin du 2* acte , fleurs et terrain 1,761 00/ Travaux de jmnture : 6 décorations 31,752 68 / Appareils électriques 56,647 40 18,351 22 / 1,460 00 Total U8,091 66 Nous avons vu que la mise en scène com- prend deux parties distinctes, mais qui en arri- vent souvent à se confondre : d'une part, tons les mouvements, les positions, les évolutions de tou^ les personnages , — acteurs ou compar- ses, — (jui concourent à Taction sc^nique ; de Tautre, la disposition de tout le matériel, — décors, mobilière, accessoires, — nécessaire à cette action. Pour compléter ce qu'on comprend, au point de vue général, sous cette appellation vaste et complexe de mise en scène, il faut y joindre le costume, Téclaii'age, les chevaux, etc. Il faut donc faire remarquer encore que, en ce qui touche Teffet produit, la division que nous venons d'établir se modifie et comprend, d'une part l'action proprement dite, de Tautre le matériel seul. C'est ainsi que l'on dira, d^une pièce dont l'action est organisée, ordonnée avec habileté : ^c La mise en scène est supérieure- ment réglée ; y> et d'une pièce dont la richesse, le déploiement scéniques sont pleins de splen- deur et d'éclat : <( La mise en scène est d^une magnificence admirable. » Dans le premier cas, on loue le talent, l'habileté du metteur en scène; dans le second, la richesse et la Ijeauté des décora, des costumes et de tout le matérieL MOLIERISTE. — MONODIES. 527 Ce n'est pas tout : il nous reste à indiquer un côté accessoire si Ton veut, mais fort im- portant encore, de la mise en scène. Doit-on, dans un ou\Ta MONO DI ES. — Nous avons, au mot hi/por- chemej mentionné les monodies ou chants à une voix usités dans la Grèce antique, et qui furent l'une des premières manifestations et des formes rudimentaires du théâtre. Voici com- ment Charles ^lagnin caractérise les monodies : Plusieurs monuments antiques nous montrent des hommes et surtout des femmes qui chantent et qui dansent seuls. Dicéarque nous a conservt* les premiers vers d'une monodie religieuse ; c'est un hymne en l'honneur de Diane dansé par une femme seule, tandis qu'une autre femme nianiue la mesure avec des crembales : K\ Diane, j'ai résolu de chanter à ta gloire un hymne qui te plaise, tandis que cette femme fera résonner dans ses mains des crembales d'airain doré. » 528 MONOLOGUE. — MONOPOLE. Les monodics étaient lyriques quand Texécutant chantait ses propres émotions et ses sentiments personnels ; elles étaient dramatiques, au contraire, quand il se présentait sous un nom d^empnint, et exprimait les passions supposées d^un personnage fictif. Le plus admirable exemide que nous ayons d'une monodie dramatique est la Maf/icienne de Théocrite, imitée et non pas égalée par Virgile. On peut citer encore la troisième idylle de Théocrite, intitulée le Chcvrier, MONOLOGUE. — Lon^ récit iiue, dans une scène seule, Tun des personnages d'une action dnunati Parmi les monologues les plus fameux au théâtre, il faut citer celui de V Avare ^ de Molière, rappelé par ^larmontel, celui du Mariatje de Fi(/aro, de Beaumarchais, ceux de Vllcnianl et du Ruy Blas de Victor Hugo, sans compter Tin- comparable monologue (|ue Shakespeare a placé dans la bouche d'Hamlet. Dans la première moitié du dix-huitième siècle, îi répo(|ue où les petits théâtres de la Foire étaient constamment traipiés, vexés et tynmnisés par leurs suzerains rOjHira et la Co- médie-Franvaise, (pii leur cherchaient chicanes sur chicanes, ils en furent un instant réduits à ne jouer (jue des pièces en monologues. C'est (piand on leur interdit d'avoir en scène plus d'un acteur à la fois : alors le personnage pré- sent devant le pul^lic débitait un nionologne, après quoi il disparaissait pour laisser la place à un nouveau ixîrsonnage qui continuait Tac- tion à l'aide d'un autre monologue, et ainsi de suite pendant le coura d'un, de deux ou de trois actes. Nos fomins, sous ce i"apport, n'é- ■ taient jamais à bout de ressources, et trouvaient toujoura le moyen de tourner les difficultés ; et tel a toujoui-s été l'amour du Parisien pour le spectacle, telle étîiit Sii sympathie pour ces pau^Tes [Xîtits théâtres (lu'on persécutait sans cesse, qu'il y accourait toujours et ne les en- courageait (lue davantage. On conçoit cepen- dant combien l'art, même un art subalterne, étiiit difficile dans de telles conditions». Parmi les pièces en monologue donné^es à cette épo- (|ue, on peut citer le Lourdaud cTInca, de Fuzelier, Arlequin harlet, pagode et médecin, de Lesiige et d'Orneval, la Fille savante^ etc. Sous la Ilévolution, pendant la première li])erté des théàti*es, la mode courut un instant de petites i»iè*ces mêlées de chant ne comprenant (pi'un seul }K?rsonnage, et fonnant lui long monologue. On eut ainsi Gilles tout seul, de Hizet et Simonnot; Fanchon toute seule, de Ponet ; ^f. Jhlle tout seul, du même : Je déhulê ou l'Acteur tout .seul, de Roiigemont ; Colom* hinc toute seule, de ^lorel, Marty et l*hilibert ; Cnssandre tout seul, de Dubois ; Figaro tout seul ou la Folle Soirée, de ^larty. Ces deux derniers monologues éuiient joués, au théâtre des Jeunes- Artistes , par un acteur encore im- l)erlx^ qui devait être un jour une des gloires de la Comédie- Française : Monrose pè*re. Aujourd'hui, et depuis (pielques années, une autre manie sévit sur Paris, celle du moaologae de salon. On eu voit surgir de tous cotés, en prose ou en vers, et il n'est pjis de semaine oii il n'en paraisse quelques-uns. Le chef-d'œuvre du genre est assurément celui qu'un dé nos jeunes écrivains dramatiques les plus ingé- nieux, ^r. Alrt-aliam Dreyfus, a écrit sous ce titre : un Monsieur en hahit noir, ^lOXOPOLK. — L'art du théâtre, considéré au point de vue industriel et comme entreprise commerciale, constituait jadis un monopole MONSTRE. — MONTRE. 629 au profit de quelques-uns. Le nombre des théâ- tres étant strictement limité, et nul ne pouvant prendre la direction d'un établissement dra- matique sans 7 être autorisé par la puissance administrative, qui lui octroyait à cet effet un privilège (Voy. ce mot), ce monopole florissait dans toute sa beauté. La Révolution nous donna, pour la première fois, la liberté théâ- trale, en 1791 ; cette liberté nous fut enlevée, avec et après tant d'autres , par Napoléon P', à l'aide du fameux déci*et de 1807 ; et enfin la liberté industrielle et commerciale du théâtre fut rétablie en 1864, par un nouveau décret qui mit définitiyement un terme au monopole, en laissant à chaque citoyen, sous les conditions de police légitimes et nécessaires, la faculté d'élever, d'ouvrir et d'exploiter un théâtre à sa convenance. (Voy. Liberté des Théâ- tres.) MONSTRE. — Ce qu'on appeUe monstre, en termes de littérature dramatique, c'est le canevas d'une pièce, à peine dégrossi, et qui ne contient encore que le tracé de l'œuvre pro- jetée, avec indication sommaire des principales situations et des épisodes les plus importants. C'est, en un mot, la carcasse, la première es- quisse d'une œuvre dramatique, le plan primi- tif, appelé à recevoir toutes les corrections, tou- tes les modifications possibles. En ce qui concerne la musique dramatique, on donne le nom de monstre à une coupe ryth- mique que le compositeur, désireux d'em- ployer un motif en portefeuille, donne comme modèle à son poète pour que celui-ci lui écrive des vers sur la mesure qui doit cadrer avec ce motif. La plupart du temps, les monstres de ce genre n'ont aucun sens et se composent de mots sans suite que le musicien fait se succé- der de façon à donner à l'ensemble la foime rythmique qui lui est nécessaire, avec les fina- les masculines et féminines. Parfois cependant ils affectent une certaine apparence inteUigible, témoin ces deux pseudo-vers du Chalet^ qu'on a tant reprochés à Scribe : Du vin, du rhum, et puis du rac. Ça fait du bien à l'eatomac. Or, ces deux vers étaient un monstre qu'Adam DICTIOKNAIRE DU THÊATOX. avait donné à son collaborateur, pour qu'il lui en fournît deux autres de mesure semblable. Scribe n'a eu que le tort de les employer. MONTER UNE PARTIE. — Les comé- diens de pro\ince qui , à la fin d'une campa- gne, se trouvent sans place à Paris, attendant un nouvel engagement, se réunissent parfois un certain nombre pour monter une partie, dans le but de gagner quelque argent. Ils or- ganisent entre eux un spectacle, composé de pièces dont ils savent tous les rôles et qui par conséquent n'exige point d'études, ils vont jouer ce spectacle dans une ou plusieurs petites villes des environs de Paris, et, après avoir soldé tous les frais, ils partagent entre eux le produit des représentations. C'est là ce qu'on ap- pelle monter une partie. Les apprentis comé- diens, les élèves du Conservatoire, organisent aussi quelquefois entre eux des parties ; mais alors ce n'est pas pour gagner de l'argent, c'est dans le but de prendre l'habitude de la scène et d'acquérir l'aplomb nécessaire en se présen- tant devant un vrai public. MONTER UNE PIÈCE. — Pour un théâ- tre, « monter une pièce, » c'est procéder aux études et aux travaux d'une pièce nouvelle, la mettre en scène, en préparer la prochaine re- présentation, et s'occuper avec assiduité des mille soins et des mille détails dont la fusion intelligente doit amener l'ensemble harmo- nieux nécessaire à son apparition devant le public. — liorsqu'il s'agit d'une pièce déjà connue, mais qui depuis longtemps n'a pas paru à la scène et qui exige de nouvelles et im- portantes études, on dit que tel théâtre re- monte telle pièce. MONTRE. — On appelait montre, à l'épo- que du moyen âge et de la renaissance, la grande exhibition ambulante que faisaient avant leurs représentations, par les rues et les places pu- bliques, les sociétés dramatiques fameuses alors, telles que les Confrères de la Passion, les En- fants-sans-Souci, les Clercs de la Basoche, etc. Tous les personnages de la pièce qu'on devait représenter parcouraient ainsi la ville, revêtus 84 fiSO M0> de leurs coetumes, tandis que qaelquea-uns d'entre eux aunonçaient à haute voix le spec- tacle et en bieaietit connaître les détailH. La in«?i/r0j|'Mirafeétaituneca\'alcadc somptueuse, sur laquelle M, V. Fournel nous fournit ces détails intéressants : Tons les ans, ver» la lin de juin ou bu commen- cement de juillet, la BaBoche était tenue, en vertu d'une ordonnance de Philippe le Bel qui remontait à l'origine de la société , do faire une montre géné- rale, compoBÉe de tons les clercs du Palaia et du Clifitclet , et de tous les suppûts et sujets du roi de la basoche. Les clercs se distribuaient en compa- gnies de cent horomes, qui choisissaient le capi- taine , le lieutensnt et l'enseigne ou porte-étendard. Une fois élu, chaque cspitaÏDe désignait une cou- leur et un costume que devuent adopter tous les gens de sa bande, et il le faisait peiodre snt un morceau de vélin qu'oD attacliait au drapeau de la compagnie. Celle-ci prenait un nom en rapport avec l'accoutrement mis à l'ordre du jour. Une peine de dix écQB d'amende, prononcée par le chancelier de la Basoche, Htteedait tout clerc qui eût voulu se ■'^KiIiilMi'LiIî^i."" dérober à ces eogagcmentE. La procession se i tait en inarclie à travers les rues, guidée par les tambours, les trompettes, lea tifrcH et les hautbois. En tête, marchaient le roi de la corporation avec la toque, le chancelier avec la fwiue et le bonnet, et les autres officiers généraux do la société. Der- rière eux venaient les compajinies, toutes vêtues de jaune et de bleu, (lui étaient les couleurs ofS- cîelles de la Basoche, puis des couleurs divcrsen indi- quées ]>ar les capitaines ; elles étaient précédées de leurs chcfsct de l'étendard, Biirlcquel se détachaient, eu tcintCH éclataDtes, l'emblème de la bande ot les trois écritoires on champ d'azur. Les béjaunes, c'est- à-dire les nouveaux clercs re^us tout récemment par les trésoriers, ne manquaieot pas & la réunion. Tout le monde était à clieval. Le cortège se ren- dait en bon ordre dnns la cour du Palais, oii il dé- filait devant son roi, au son des instruments; après quoi, il allait donner les aubades et réveils accou- tumés aux présidents de la grand' cliambre , au pro- cureur général et aux autres dignitaires. La fête se terminait par det< danses et par la comédie. La Ba- soche avait toujours do six à huit mille représen- tants à cette grande exhibition, qui était pour elle une solennelle occasion de se compter et de cons- tater ses forces. Cette mnnlre génhah subsista jus- qu'au régne de Henri III, qui l'abolît. C'était uno des grandes curioeités populaires. François I" vou- MORCEAU DE FACTURE. 531 . 1698 et lut la TOÎT k denx reprises différentea , i en 1540, et il en fut émerveillé. La montre est restée en usage aujourd'hui, et elle est faite non plus par les Clerca de la Baso- che actuelle, qui ne ressemblent guère à leurs anciens, mais... par les écujere des cirques am- bulants qui courent nos foires de province, et qui, dès qu'ils arrivent dans une ville, font, le jour de leur première représentation, uncgrande promenade à cheval, dans leurs plus beaux cos- tumes, pour faire montre de leur i>erBonnel. MORALITÉ, — Lorsque les représentations des mystères, qui étaient souvent interminables et parfois duraient plusieurs journées, com- mencèrent à fatiguer les populations, d'ailleurs lassées aussi d'un genre un peu trop uniforme et qui avait fait son temps, les Clercs de la Basoche, qui tenaient alors le haut du pavé en matière de jeux scéniques, imaginèrent, sous le titre de tnoralités, de [jetites pièces de dimensions beaucoup plus restreintes, d'un caractère tantôt allégorique, tantôt de pure imagination, qui d'ordinaire étaient toujours écrites en vue d'établir une vérité morale. C'est dans ce genre de la moralité qu'on peut ranger les pièces qui avaient pour titre V Enfant pro- digue, le Mauvais Riche, fEnfani ingrat, et aussi la Condamnation de Banequel, de Nicole de la C'hcsnaye, et la Moralité de l'Aveugle et du Boiteux, d'André de la Vigne, l'un des pre- miers poètes scéniques de ce temps. Comme la farce et la sotie, la moralité fleurissait aux quinzième et seizième siccles, et, ainsi qu'elles, prépara la naissance et l'établissement de notre théâtre n^ulier. MORCEAU, — Toute pièce de musique, soit vocale, soit purement sjTiiphonique, qui se fait entendre dans un opéra, dans un ora- torio, dans un reudeville, dans un drame même, prend le nom de morceau. (Les Italiens disent : }>ezzo, pièce.) MORCEAU D'ENSEMBLE. — Voy. En- semble {Morceau d'). MORCEAU DE FACTURE. — Dans un opéra, c'est un morceau dans lequel le musi- cien donne les plus grandes preuves de sou talent et de son habilete au point de vue de la construction générale, de la succession des idées et de la manière de les traiter, du style, ete. Selon CastiUBlaze, « lorsqu'on dit un morceau de facture, on entend parler d'un morceau de longue haleine, fortement intrigué, et dans le- 532 MORDANT. — MUSÉE DE L'OPÉRA. quel le coinpositenr, en déployant tous ses moyens, montrera ce qu'il peut faire. On a déjà applaudi ses romances, ses airs, ses duos; on attend, pour juger son talent, qu'il ait donné un morceau de facture. » MORDANT. — Le mordant n'est pas une qualité de l'organe, conmie on l'a dit, mais une qualité de l'articulation ; et j'ajoute qu'il est plus facile de la constater que de l'expliquer. Une prononciation nette, un débit serré sans précipitation, une voix sonore, une façon brève de lancer les mots, tel me parait être ce qui constitue le mordant chez l'acteur. Inutile dans certains emplois, il est indispensable dans d'autres, et l'on ne conçoit pas plus un Figaro, une soubrette ou une duègne sans mordant, qu'un premier rôle sans dignité, un amoureux sans passion ou une ingénue sans pudeur. MOUCHEURS DE CHANDELLES. — Au dix-septième siècle, la rampe des théâtres, au lieu d'être éclairée à l'huile, comme elle le fut plus tard, au gaz, comme elle l'est aujour- d'hui, à l'électricité, comme elle le sera demain, était simplement composée de chandelles. Ces chandelles ne pouvaient être mouchées que pen- dant les entr'actes, sans quoi le spectacle aurait été interrompu par cette opération intéressante, et il avait fallu créer à cet effet un emploi spé- cial, celui de moucheur de chandelles, qui ne s'exerçait pas sans provoquer incessamment les lazzis et les quolibets du public, et qui pour- tant exigeait une certaine adresse et une cer- taine dextérité, ainsi que nous le fait connaître, dans son Théâtre fran^oia, Chappuzeau, en donnant des détails curieux sur la façon dont on procédait à cet eifet : — « C'est aux décora- teurs, dit-il, de se pourvoir de deux Moucheurs pour les lumières, s'ils ne veulent pas eux-mê- mes s'employer à cet office. Soit eux, soit d'au- tres, ils doivent s'en aquiter prontement, pour ne pas faire languir l'auditeur entre les actes, et avec propreté, pour ne luy pas donner de mauvaise odeur. L'un mouche le devant du théâtre, et l'autre le fond, et surtout ils ont l'œil que le feu ne prenne aux toiles. Pour pré- venir cet accident, on a soin de tenir toujours des muids pleins d'eau, et nombre de seaux, comme l'on en void dans les places publiques des villes bien policées, sans attendre le mal pour courir à la rivière ou aux puits (1) ». MOYENS. — Expression assez singulière- ment choisie pour indiquer qu'un acteur a des poumons puissants, qu'il possède une grande force vocale et qu'il peut faire retentir les échos d'une salle de spectacle d'accents terribles et énergiques. Dans le drame et dans le mélo- drame il faut avoir beaucoup de moyens, et cela dispense parfois d'avoir du talent ; dans la comédie et dans le vaudeville un bon organe suf- fit, mais il y faut joindre quelques autres qualités. MUSÉE DE L'OPÉRA. - Attenant à la bibliothèque, et comme elle accessible à tout visiteur, le musée de l'Opéra est situé dans l'aile gauche du monument, du côté de la me Scribe. C'est là qu'ont été réunis tous les objets dont la vue peut intéresser le public, et qui font passer sous ses yeux les souvenirs de la gloire et de la splendeur de notre grande scène lyrique. Dans des vitrines sont exposés un grand nombre d'autographes précieux dos aux nobles artistes qui ont illustré ce théâtre : Lully, Rameau, Grétry, Cherubini, Sacchini, (1) Un homme grave, un personnage politique, on conventionnel , Pons de Verdun , publiait dans le Jbfar- cure français (25 décembre 1794) le petit conte que voici : Le Débutant. A Couverture d'un spectacle (C'était un spectacle bourgeois) On vient annoncer un obstacle Qui met tout le monde aux abois : La vacance de deux emplois, Mais tels qu'une seule personne Pourrait les remplir à la fois. — S'U est ainsi, qu'on me les donne, Répond soudain un spectatenr, Je les remplirai de bon cœur. Ces emplois dont on le croit digne, En quatre mots lui sont livrés : < Vous moucherez, vous soufflerez. D J'entends fort bien cette consigne. Qu'arrive-t-il ? au premier signe Le quidam, moucheur et souffleur, Pour son début en fait de beUes, Car il s'en vient moucher l'acteur Et souffler toutes les chandelles. À MUSETTE. — MUSIC08. 533 GoBBec, Rosaini, Méhnl, Spontinî, Mejerbeer, Herold, Aubcr, Adolphe Adam, Halévy, Féli- cien David, Victor Massé, MM. Verdi, Am- brolBe Thomaa , Gounod, etc. Sur leB panneaux sont placés, avec un grand nombre d'estampes intéressantes et de curieux dessins, divers tableanx, parmi lesquels un joli portrait de Sca- ramouche, denx charmantcB gouaches de Mo- reau le jeune représentant deus scènes du Di- êertetir, le portrait du fameux corniste Duver- noj, et plusieurs bustes, entre autres ceux des dauBeai? Duport et Gardel, du téuor Roger, du célèbre chef d'orchestre Habencck, de la Cer- rito, de M'" Eugénie Fiocre, etc. Puis, vien- nent des affiches curieuses du dix-septième et du dix-huitième siècle, des scènes d'opéras, des réductions de décors d'après Pannini, Degotti, Cicéri et autres, et enfin, dans un petit réduit un peu écarte de la grande galerie, une collec- tion adorable de dix maquettes de décors qui ont paru à l'Exposition universelle de 1878, où elles obtinrent le plus vif succès. Le musée de l'Opéra s'enrichit et s'accroît chaque jour, et devient de plus en plus intéressant. ACADËMIE ROYALE DE MUSIQUET AuiounTbiii Londi 3i Noyembra [ gOMBCnCHU * LA PREMIÈRE REPRÉSENTATION DE ROBERT liË DIABLE Opéra en 5 actes. ' Cb.ikt : Mesôeùr» Ad-rtenrrir, Lef asscur, F^i^oot, Aleiti, FEnlinaiid-PrdtAt, Uiiual, Laloiil, Pouillej, Tmioz, Virtcl, Hurtcau ; H'^Cûiti-Diiiioreiiu, Doras, Livry. Cjffj£.-U' ^^^B^ j^^^^^^^^^B f^à Ê' '' "^^^^^^H '''' l^^l m Pll^^ iHL l^t|iM HHHil Ml t, ïfrtdsxeptiuii,» K noir, soit pour accompagner un morceau chanté eu dehors de la vue du public, comme au troi- sième acte de VAmbassailrîce. Il y a, dans le répertoire de nos théâti'cs lyrioinct8 de velours , le tout noir, bien montés et leurs chevaulx garnis de housses. Item, après ce train marchoyent quatre commis- saires examinateurs au chastelet de Paris , montés sur mules garnies de housses , pour accompaigncr lesdits entrepreneurs. En semblable ordre marchoyent ung grand nom- MYSTÈRE. 539 bre de bourgeois, marchands et autres gens de la ville, tant de longue robbe que de courte, tous bien montés, selon leur estât et capacité. Et fault noter qu'en chacun carrefour où se fai- soit ladite publication , deux desdits entrepreneurs se joîgnoyent avec les deux establis cy-devant nommés, et après le son desdites six trompettes soné par trois fois , et l'exhortation de la tromi)ette ordinaire de ladite ville faicte de par le roy notre- dict seigneur, et monsieur le prévost de Paris , f ei- rent lesdits quatre dessus nommés, ladicte procla- mation en la forme et manière qui s'ensuyt. Ia cry et proclamation de t entrepr'mse dtidict mistère des Actes des Apostres adressant aux citoyens de ladicte ville de Paris. Pour ne tumber en damnable decours En nos jours cours aux bibliens discours, Avoir recours le temps nous admoneste , Pendant que paix, estant notre secours, Nous dit : je cours es royaumes , es cours ; En plaisant cours faisons qu'elle s'arreste, La saison preste a souvent chaulve teste : Et pour ce honneste œuvre de catholiques, On faict sçavoir à son et crys publicques, Que dans Paris ung mystère s'appreste Représentant actes apostoliques. Notre bon roy, que Dieu garde puissant, Bien le consent , au faict impartissant Pouvoir récent ; de son auctorité Dont chacun doibt vouloir que florissant Son noble sang des fleurs de lys yssant , Soit et croissant en sa félicité ; Venés, cité, ville, université , Tout est cité , venés , gens héroïques , Graves censeurs , magistrats , politicques , Exercés- vous au jeu de vérité. Représentant actes apostolicques. On y semond poëtes , orateurs , Vrais précepteurs, d'éloquence amateurs, Pour directeurs de si saincte entreprise , Mercuriens, et aussi cronicqueurs, Riches rimeurs des barbares vaincqueurs. Et des erreurs de langue mal apprise. L'heure est précise : où se tiendra l'assise , Là sera prise au rapport des tragicqnes , L^élection des plus experts scéniques En geste et voix au théâtre requise , Représentant actes apostolicques. Vouloir n'avons en ce commencement D'esbattement fors prendre enseignement Et jugement sur chacun personnage, Pour les roolletz bailler entièrement , Et veoir comment l'on joiiera proprement Si fault cornent : ou teste davantage Mys ce partage à vostre conseil saige Doibt tout courage : hors les cueurs paganicques, Luthériens , esprits diabolicques , Auctoriser ce mystère et ymagc Représentant actes apostolicques. Prince puissant , sans toy toute remontre Est mal encontre , et nostre œuvre imparfaict : Nous te prions que par grâce se monstre Le jeu , la monstre et tout le reste faict , Puis le meffaict de nos chemins oblicques ; Pardonnes-nous après ce jeu parfaict Représentant actes apostolicques. Fin de la proclamation. Et pour l'assignation du jour et lieu estably à venir prendre rolles dudit mystère fut signifié à tous : de soy trouver le jour et feste saint Estienne, première série de Noël ensuivant , en la salle de la Passion, lieu accoutumé à faire les records et ré- pétitions des mystères joiiez en ladite ville de Paris , lequel lieu bien tendu de riches tapisseries, sièges et bancz pour recepvoir toutes personnes honnestes et de vertueuses qualitez, assistèrent grand nombre de bourgeois et marchans , et aultres gens tant clercs que lays, en la présence des com- missaires et gens de justice establis et députés pour oiiyr les voix de cliacun personnage , et iceulx retenir, compter : selon la valeur de leur bienfaict en tel cas requis , qui f ust une réception honneste , et depuis lesdictes journées se continuent etconti- nueront chacun jouraudict lieu, jusqu'à la perfec- tion dudict mystère. De tous les mystères du moyen aj^e, le plus fameux reste celui de la Passion, tant à cause de son originalité que de son étendue. L'une de ses versions, celle du manuscrit de la bibliothè- que de Valenciennes, ne comprend pas moins de 40,00<» vers et est divisée en vimjt journées ; et il faut ajouter que deux correcteurs l'arapli- fièrent et en portèrent le texte à 67,000 vers. En voici une courte analyse : Le scène était ordinairement figurée par plusieurs rangs d'échafauds, le plus élevé représentant le séjour de Dieu, des anges et des saints, les infé- rieurs les divers lieux de la terre où s'accomplis- sent les différents actes du drame ; et tout au bas une sorte de trou ou de gouffre , dont l'entrée si- mulait la gueule d'un dragon , recevait et vomissait tour à tour des diables. Dès l'ouverture de la scène, on apercevait Dieu le Père sur son trône, entouré de ses anges; autour de lui, la Justice, la Vérité, la Paix , la Miséricorde , tout autant de personna- ges, viennent solliciter du Père étemel, les uns le 510 MYSTÈRE. paidon des hommes , les antres leur panîtioii. La Bonté Tondrait les aanver, la Justice demande que les crimes soient expiéa ; afin de lea satisfaîra tou- tes deux , Dieu se résout A immoler son propre fils pour le saint des hommes; mais l'enfer s'est ému de cette résolution , et Lucifer s'élance du gouiEre et appelle ainsi ses noirs confrères : DUbln d'enfer, hoiriblea et comuB , Groa et meniii , aux regarda buUiqueti , Inf&mes cbieng , qa'êtec-TOui derentu ? Tous accourent; c'est un horrible vacarme de cris, de contorsions; ils s'accusent les uns les au- tres d'6tte les auteurs de leurs supplices ; mais l'un d'eux a trouvé un nouveau crime à commettre con- tre Dieu, et Locifer lui dit : J'enrage de joie de l'oiiyr. La scène est maintenant sur la terre ; on y voit les sunts époux Joacliim et Anne de qui doit naî- tre Marie, la mère du Sauveur. Joachim visite ses bei^ries et converse avec les gardiens de ses trou- peaux; il leur demande avec bienveillance compte de l'état des brebis et dos agneaux , et donne des ordres pour qu'aucun pauvre ne soit acouduil. Ce BOnt des scènes charmantes que viennent égayer quelques tours de deux mendiants habiles à exploi- ter par leurs fourberies la pitié des deux époux. La vie réelle, la peinture de la société du quator- zième siècle s'introduit ainsi dans le récit des mys- tères; la comédie vient y disputer des spectateurs. £d veut-on un exemple ? Pour voir jusqu'à qnel point le profane m mêlait au sacré, et combien l'auteur regardait autour de lui en re- présentant les personnages de rÉvangik', on n'a qu'à lire ce dialogue assurément curieux entre Madeleine et sa aeirante, dialogue qui ressemble iisacz à l'entretien (jue pourrait avoir encore aujourd'hui une coquette avec sa sou- brette : Uaodblaikk. — Que l'on fasse chère jojeuEc A cbascim qui céans viendra. Fabipraë. — On ferai» chère amoureuee Selon ce qu'on entretiendra. Uagdilaikb. — Je veuil estre a toni préparée, Omée , diaprée et fardée Foui me faire bien regarder. Pasipbaë. — Daoïe t nulle autre comparée , De beauté tant eatea parée Qu'il n'est beeoia de vous tanler. Hasdelaime. — Apportei-moi tost mon miroir Pour me regnidei. FAsirHAfc. — Bien, madame. Kaghelaiki. — L'eeponge et ce qu'il (aolt avoir, Ifes floea liqDenn et mon baame. Pasifhaë. — Je croy qu'au monda n'y a fenuaa Qui ait plua d'unignonnementa. HAOnBLAïKL — Qui n'en anisit. Ce wralt blaame De s'y tuonver entre lea gens. PiBtPBA£. — Toid Toa riches ongnementa PoQT tenir le cnlr bel et fnda , Vos bonnes senteurs et pigments Qui Senrent comme beau cypcèa, Bt n'ont pas été prlna ej-prlm : Le tant vient du pays d'Egypte. (fci n lavi Sfagdelaine tt is rairt,pvii ditt : ) Haudklaink. — 8nis-je aaseï Iniaenta ainM? PASirBAli. — Uti»; Cest nne droïcte imaîge aacripte. IlAGPaLAltiE. — Et ma tocquade? Pasipqaë. — Lapollte? Haodblaihe. — Hea oreîllettea. Pasipbaï. — AU mode. Haqdelaink. — Dressez ces tapia et carreaux; Beapandei toat cca finea eaux, Lea bonnee odeuia , par la place. Jetez tout, vnydei les vaisseanx ; Je veuil qu'on me anive 4 la traoe. Tout cela ne laisse pas que d'être plein de grâce, très recherché dans la forme et corienx comme peinture des mœurs du temps. Ce|iendimt, le peuple finit par se lasser de ces sujets pieux dont la rariété dans les détails ne poQvait pallier complètement la monotonie. Mystères et miracles devaient enfin faire place à des sujets plus divers, plus riants, mieux appropriés à la toumnre que prenait l'esprit français, débarrassé des souffrances terribles et du sombre cauchemar du moj^n âge. C'est ce que comprirent les Clercs de la Basoche et les Enfants-sans-Souci, lorsque, entrant en ri- valité avec les Confrères de la Passion, ils cm- rent entrevoir la possibilité de battre ceux-ci MYSTÈRE. Ô41 sur leur propre terrain. C'est alors que, dans leurs jeux, prirent naissance d'abord la mora- lité, puis la farce et la sotie, dont l'allure et la légèreté enchantèrent un public qui commen- çait à trouver trop lourde et trop pâteuse la nourriture intellectuelle qu'on lui servait de- puis si longtemps. Aux sujets religieux se mê- lèrent les sujets profanes ; ces derniers bientôt régnèrent presque exclusivement, et quand les Confrères jugèrent à propos de céder à des far- ceurs leur théâtre de l'Hôtel de Bourgogne, les mystères avaient vécu et disparurent sans re- tour. Les nouveaux farceurs ne tarderont pas à joindre à leurs pièces comiques des pièces sé- rieuses, mais profanes, dans lesquelles des écri- vains encore inexpérimentés chercheront du moins à peindre la nature humaine dans sa vérité, c'est-à-dire dans ses douleurs, dans ses tristesses, dans ses passions, dans sa grandeur. Jodelle, puis Jacques Gré vin, puis les deux frères Jean et Jacques de la Taille, entreront en lice, promptement suivis de quelques autres, notamment de Robert Gamier et d'Alexandre Hardy ; après leui-s hésitations et leurs tâton- nements on aura les essais déjà plus fermes, plus mâles, de Rotrou, puis enfin apparaîtra Corneille, qui d'un seul et large coup d'aile mettra la comédie et la tragédie en pleine pos- session d'elles-mêmes et les portera à leur plus haut point de perfection. De ce jour, le théâ- tre français est né, et grâce à Molière il ac- querra un degré de splendeur que tous les peu- ples nous envieront sans jamais pouvoir l'at- teindre. t pi I II NATUREL. — Qualité précieuse chez un comédien. Le théâtre devant nous offrir avant tout le reflet exact des éréacments, des inci- dents et des émotions de la vie ordinaire, tout excès, tonte exagération dans nn sens ou dans un autre est choquante pour le spectateur in- telligent et délicat. Il ne faut pas toutefois que, sons préteste d t 1 I j d 1 teur d génère en une f m I té q est t qu'un signe de m g t t qu sera t uss bieu dénature t 1 Jlis q 1 mporte ment le plus fâch L'une des plus f m ses brettes d 1 Comédie-Franç ise M Dang II ta t rc marquable par n j t I grâce. C'est cette q I té pi tt. I d^é supérieu q D rut I contient dans I rs { Il me lemble nlla Parler, agir, m ec Piquante nan bq gi Rendre l'art naturel et jiarer la nature. NAUMACHIE. — Ce nom scnait à dési- gner, chez les Romains, tout à la fois un di- verti sscmt^iit <|ni consistait dans la représenta- tion d'un combat naval et le lieu spécial oti se donnait ce divertisscmout. Dans l'origine, les naumachies Ee donmitent soit au ciniue, s«it dans l'aniphitlirtitrc, dont on transfonnait l'a- rène en lac en y faisiint parvenir l'eau du Ti- bre ou des iM^ueducs. C'est à Jules César qu'on doit k première construction d'une naumachie dans une paitîe du Cliainp de Mars ; ninis Au- guste en fit combler le bassinet, sur le bord du Tibre, eu fit creuser un antre, qu'il entoura de plantations. Plus tard, d'antres naumachies fu- rent établies, p«mii lesquelles celle de Domi- tien fnt la pins célèbre. Celle-ci était entourée d'un bâtiment circulaire d'un aspect mona- mental, disposé en gradins servant de Biffes aux spectateurs. On vit aussi, sons diven an- pereurs, le lac Fncin 8er\'ir & ce genre de spec- tacle. Les nm h es pre t so nt n aspect gra d ose les avires b les mbatta Is qu p b p rt es mbats présenta eut ]mrfois presque rëqnivalenb d'une armée na- vale ; OH en vit une, sous l'empire de Claude, qui ne rt'unitpas moins de lUD navires et de 19,000 combattants. Les hommes qui figuraient dans ces si»ectacles étaient généralement des prison- niers de guerre ou des criminels condamnés à mort, et, comme dans les combats de gladia- teurs, la vie des vaincus était à la merci du peuple ou de l'empereur. Les navires engagés formaient deux escadres, auxquelles on don- nait le nom de linéique nation maritime comme les Perses et les Athéniens, les Égyptiens et les Tyi-ions, les Rhodiens et les Siciliens. Ainsi que dans leni-s autres spectacles, les Romains NE PAS DÉPASSER LA RAMPE. — NOMS DE THÉÂTRE. biâ déployaient dans les nanmachies une pompe, nœtid est produit par un fait impoTtant, nn un luxe, un éclat sans pareils. événement imprévu, qui, graremuittoiit àcoup, surprend le spectateur, excite son intérêt et son NE PAS DÉPASSER LA RAMPE. — Ex- attention, et lui donne le désir de voir son Ré- pression dont on se sert pour caractériser cer- nouement. La pièce, en effet, est 7îOîtée par cet tains talents, certains jeux de scène, certaines événement, et elle se dénoue par l'incident final, recherches d'effets qui n'ont point de prise sur le public, qui ne produisent sur lui aucune im- Un des grands secrets pour piquer la curiosité, pression et dont l'action, par conséquent, reste ^^^ Charafort , c'est de rendre r événement incer- en deçà de la rampe. Cette expression n'a point *'?^°- ^^ ^^"* I^^"^ ^^^^ ^"« ^^ ^«^"^ «^^t ^^^ ^^^««^ T i.-L j'j • 11 i. ' ait de la peine à en prévoir le dénouement, et que de caractère dédaisrneux ; elle se borne a cons- , ,, * . .. , . • ,. , ^ . \.. , . ^ ,, /« . 1 , lo dénouement soit douteux jusqu à la fin et, s il tater un fait. On connaît en effet des corne- ^^ pe^t, jusques dans la dernière scène... Tout ce diens dont le talent fin et délicat, mais trop ^„j ^^^^ j^ ^^^^ davantage , tout ce qui le rend discret, ne dépasse presque jamais la rampe ; piug malaisé à dénouer, ne peut manquer de faire on a vu des jeux de scène très intelligents, un bel effet. Il faudroit même, s'il se pou voit, faire mais trop peu accusés, être dans le môme cas, craindre au spectateur que le nœud ne se pût pas et certains effets sur lesquels un artiste se dénouer heureusement. La curiosité , une fois exci- croyait le droit de compter rester absolu- tée, n'aime pas languir; il faut lui promettre sans ment nuls. Ne pas dépasser la rampe n'est pas cesse de la satisfaire , et la conduire cependant un signe de faiblesse ou de médiocrité dans la «^^« ^^ satisfaire jusqu'au terme que l'on s'est pro- conception , mais seulement dans le rendu. P^^^^ '[ ^^"^ ^Pf '^'î^^^ *Î*"J^"^« 3' '^'^^^^^^^ ^^ ^^ conclusion, et la lui cacher toujours; qu il ne sa- ■..^^^^^^,^ . mx^r. ^, , ^ r^ clic pas OU U va , s'il est possible, mais qu'il sache NEUROBATES.-C est le nom que les Grecs ^ien qu'il avance. Le sujet doit marcher avec vi- donnaient à certains danseurs de corde qui, au tesse ; une scène qui n'est pas un nouveau pas vers son de la flûte, non seulement marchaient sur la fin est vicieuse. Tout est action sur le théâtre, une corde tendue, mais se livraient sur elle à et les plus beaux discours même y seroient insup- divers sauts et exercices, aussi facilement qu'ils portables si ce n'étoit que des discours... l'auraient pu faire sur terre. On assure que ces baladins dansaient sur une corde de boyau très Le nœud, on le comprend, dépend unique- forte, mais très fine, de sorte qu'à une certaine lisent du choix et de l'imagination de l'auteur, distance ils pouvaient sembler ne toucher que qui n'a à prendre conseil que de son iuspira- l'air de leurs pieds, tandis que le danseur de tiou et de la nature du sujet traité par lui. Au- corde ordinaire faisait ses exercices sur une cunes règles, en dehors de celles qu'impose la grosse corde visible à tous les yeux. Le neuro- vraisemblance, ne Siuiraient être prescrites à bâte déployait donc nécessairement beaucoup ^^^ égard, plus d'adresse et d'habileté que celui-ci. NOMS DE THEATRE. — Jadis, la car- NL\IS. — On donnait ce nom, il y a une rière du théâtre étant réputée infâme par soixantaine d'années, à certains rôles d'un bas l'Église, et la profession de comédien étant, en comique qui, dans les gros mélodrames du bon- apparence du moins , considérée par les grands levard, avaient pour spécialité de venir do avec une sorte de mépris, les jeunes gens qui temps en temps jeter une note gaie dans les embrassaient cette profession croyaient devoir, sombres profondeurs d'ouvrages tels que îa Tête par égard pour leurs familles, abandonner leur de'hronze, le Fils banni, Ici Forêt périlleuse et nom pour s'y livrer, et adopter, en montant sur autres du même genre. Le niais recevait aussi la scène, un pseudonyme qu'ils ne quittaient parfois la qualification de queue-rouge (Voy. ce plus même dans la vie privée , et sous lequel ils mot). étaient exclusivement connus. C'est ainsi que le plus fameux d'entre tous substitua à son vé- NŒUD. — Dans l'action théâtrale, le ritable nom de Poquelin celui de JVIolière, 544 NOURRICES. — NOUVEAUTÉ. qu'il devait rendre immortel ; c'est ainsi encore qu'on vit Beaulieu devenir Bellement, Pierre Le Messier s'appeler Bellerose, et que tous ces comédiens illustres, connus sous les noms de Jodelet, Floridor, Montfleury, Montménil, Desessarts, Préville, Clairval, s'appelaient en réalité Geoffrin, Josias de Soûlas, Jacob, Le Sage, Dechanet, Dubus, Guignard. Plus près de nous, nous voyons encore nombre d'acteurs prendre ainsi des noms de théâtre, et Foucault devenir Saint-Prix ; Meynier, Saint-Fal ; Bari- zain, Monrose; Mira, Brunet; Becquerelle, Firmin; Tousez, Bocage; Second, Féréol; Pubereaux, Sainte-Foy ; etc., etc. Aujourd'hui, la profession d'acteur, loin d'être reconnue in- digne, comme autrefois, gagnant chaque jour dans l'esprit et dans l'estime du public, Tusage des noms de théâtre a prescjue complètement disparu, et les comédiens n'hésitent plus à se faire connaître sous leurs noms véritables. NOURRICES. — C'était presque un emploi dans notre ancien théâtre, emploi de femme tenu par des hommes, et c'est au grand Cor- neille que nous devons la disparition de cet usage répugnant. Voici ce que dit de Léris en parlant de la Galerie du Palais, le quatrième ouvrage de l'illustre poète, représenté à l'Hô- tel de Bourgogne en 1635 : — « Nous avons l'obligation au grand Corneille d'avoir substi- tué dans cette pièce le rôle de suivante à celui de nourrice, qui étoit dans la vieille comédie, et que des hommes habillés en femmes, et sous le masque, représentoient ordinairement, d La nourrice paraissait aussi dans la tragédie, et il semble bien que ce soit à Corneille que l'on doive son remplacement par la confidente de- venue classique. Un acteur de l'Hôtel de Bour- gogne, dont le nom de théâtre était Alison , s'était fait une réputation dans ce genre de rôles, et un annaliste constate qu' de la Comédie-Française. En 1807, Picard l'abandonne pour prendre la direction de rOpéra, et Alexandre Du val est placé à la tête du théâtre de Tlmpératrice, qui, le 15 juin 1808, quitte la salle Louvois pour aller s'ins- taller à rOdéon reconstruit. La direction d'A- lexandre Duval ne fut pas brillante, et c'est alors que l'Odéon commença à devenir l'objet des brocards qui le poursuivirent pendant si longtemps. En 1816, Picard succède à son suc- cesseur et redevient directeur de l'Odéon , qui brûle une seconde fois, le 20 mars 1818. Il emmène ses comédiens à la salle Favart, occupe celle-ci jusqu'au i) janvier 1820, fait la réou- verture de l'Odéon reconstruit, qui prend le titre de ii,La.ya, Rousseau, Laines, Dérivis père et fils. Nourrit père et fils, Lavigue,Dabadie, Levassent, Dupres, Masaol, Barroilbet, Alizard, Obin, Faure, Yillaret; M*"" Marthe Le Rochoia, Desm&tins, Maupin, Marie Antier, Françoise Joumet, Marie Fel, Lemaure, Pélissier, Durancy, LeTaasenr, So- phie Amonld, Saint-Huberty, Maillard, Bran- chu, Grassan, Jawnrek, Ginti-Damoieau, FaU cou, Stoltz, Doms-Qras, Yiardot, Alboni, Quejmard, Marie Sasa, Kranss, etc. Enfin, il n'est pas snperfiu de rappeler que l'Opéra a occupé, à titre permanent on à titre provisoire, treize salles diverses, dont trois ont été détnii- ^ tes par le feu. Ces trois salles dévorées par de terribles incendies sont : 1° la première salle DéiMoi. tepràBeoté à !■ CaniMI«-ItHlietme en 1J79. du Palais-Royal, précédemment occupée par Molière, qui fut brûlée le 6 avril 1763; 2° la seconde salle dn Palais-Rojal , qui, après onze ans seulement d'existence, fut brûlée h son tour le 8 juin 1781 ; 3" enfin, la salle de la rue Le Peleticr, qui, inaugurée le 16 août 1821, fut détruite dans la nuit du 28 au 29 octobre 1873. La salle actuelle fut ouverte au public le 5 jan- vier 1875. OPERA-BUFFA. — Toy. Opéra. OPÉRA-COMIQUE. — Voy. Opéea. OPÉRA-COMIQUE (Théâtre de l'). — L'histoire de ce théâtre, qui fut toujours l'nn des favoris du public parisien, est singulière- ment compliquée, et fertile en péripéties de toutes sortes. L'Opéra-Comique, dont la fonda- tion remonte aux premières années du dii-hai- tième siècle, n'était à l'origine qu'un petit théâ- tre comme on en voyait tant aux Foires Saint- Germain et Saint-Laurent, et, comme tons tes autres, ne jonait que j>endant la durée de ces foi- res, c'est-k-dire q ne pendant quatre ou cinq mois chaque année. Il ne donnait alors que des vau- devilles et des parodies, et il semble bien que ce nom d'Opéra-Comique lui vient précisémenb de ce qu'il représentait beaucoup de parodies des pièces jouées à l'Opéra, lesquelles deve- naient ainsi des opéras véritablement comiques, et prenaient cette qualification. Xous verrons plus loin par quelle suite d'é^'énements il en vint à transformer son répertoire et à repren- ^.Bir'^j* VJ7 J7jcz. 'ixn I I OPERA-COMIQUE (théâtre de l'). 5d9 dre, après une longue interruption, son pre- mier titre d'Opéra-Comiqne. Voici comment un petit recueil spécial, U» Speclacks de Farit (1754), rappelait les ori- gines premières de ce théâtre : C'est en 1714 que ce spectacle & pris naissance, lie aieur de Saint- Edme et la veuve Baron , qui «voient chacun la direction d'une troupe de comé- dieng forains, formèrent ensemble une Bociété pODT neuf ans , avec l'approbation des syndics et ra de l'Académie royale de Musique ( I ). Ces deux troupes prirent le nom d'Opéra-Comique, et M. Le Sage, flatté du succès de ses premières pièces , quitta tout autre ouvrage pour se consacrer entièrement à ce spectacle. C'est lui qu'on peut regarder comme l'inventeur de cette nouvelle es- pèce de poésie dramatique, ei convenable au génie et au caractère delà nation. L'Opéra-Comique ne fut point inquiété dans ses jeux durant l'espace de cinq ans ; aussi [tendant tout ce tems-là on y joua d'ex- cellentes pièces que MM. Le Sage, Fuzelier et Dor- ncval y Hrent représenter avec l' applaudissement du public. Jamais les Foires n'avoient été plus ttriUantes; mais ce succès leur fut préjudiciable. Les Comédiens -François ne virent pas sans chagrin qu'on abandonuoit leur théâtre pour suivie en foule celui de l'Opéra-Comique. Ils s'en plaignirent, et ce dernier spectacle eut défense de continuer ses lepréBeutatioDB. Ce fut à la lin de la Foire de Saint- Laurent de l'année 1718 que cette défense lui fut lôgnifiée pour les Foires suivantes. M. le duc d'Or- léans, régent du roj'aume, qui nvoit honoré de sa (1) L'Opéra aviit un droit de juridiction sur tous les thiâtrea ; ancua ne pouvait s'ouvrir ema son conaente- ment,et tons lui paj'aieut une lourde redevSDc^e annuelle. (Voy. SDZlHilMETÉ I>K L'OPfiK.l.) présence une des dernières représentations, dit i la lin du spectacle que l' Opéra-Comique reseem- bloitaucigne, qui ne chante jamais mieux que lors- qu'il est prés de mourir. Trois ans après, c'est-à-dire en 1721 , les comédiens de la Foire firent agir plu- sieurs personncG de distinction, à la considération desquelles il leur fut permis de représenter des piè- ces en vaudevilles pendant la Foire de S. Germain ; mais ils n'avoient point encore de privilège pour rOpéra-Coniique ; ils ne l'obtinrent que pour celle de Saint-Laurent de la même année. Ils en furent ensuite privés pendant trois ans, et il fut enfin ac- cordé à Honoré, qui eut l'Opéra-Comique pendant quatre ans ; mais ses affaires ne lui permettant pas 560 OPÉRA-COMIQUE (théâtre de l'). de jccntinaer plus longuement, il céda à Ponteaa 1 conde fois le privilège, et il l'a çoaaèdé jiiiMin'& le reste de la jouissance de son privilège. Ponteau la fin de la Faire de S.-QeniiBin de l'année 1743. eut la direction de ce spectacle joBqu 'à l'année 1732. Le sieur Monnet l'obtint après lui, et ne le gartla n passa après au sieur De Vienne , qui l'entreprit qu'un an. Il passa enfin an sieur Berger, qui l'ent soiu le nom d'Hamoche, acteuide la Foire, et en- jusqu'à la Foire S.-Qermun 1745. On aapprînu snite BOUS celui de Ponteau. Celui-ci en eut une se- I alors ce spectacle, et il ne fut rétabli que sept ans après, en 1752. Le privilège en a été accordé une seconde fois au Eieur Monnet. Il en jouit actuel- lement, et l'on peut dire que l'Opéra-Comiijue est devenu entre ses mains plus brillant qu'on ne l'a- voit jamniu vu, aoit pour la beauté des Halles qu'il a fait construire, soit pour la bonté de l'orclioetre, soit pour les pièces excellentes que l'on joue sur n théStre, soit enfin pour le jeu de quelques-nnei I ses actrices , et en particulier de M"' RoM- Monnet, qui fut mie des figures originales du théâtre au dix-huitième eiècJe, amena en fffet ropt'ra-Comique à un point de splendeur OPÉRA (THÉÂTRE DE L'). qu'on ne lui avait point connu jusqu'alors, et marqua le temps de sa seconde direction par une transformation hardie qui eut pour ré- sultat immense l'écloaion d'une véritable école de musique française. 561 On était à l'époque où une troupe de chan- teurs bouffes italiens, appelés à l'Opéra, re- présentaient sur ce théâtre les adorables in- termèdes lyriques qui firent courir tout Paris et suscitèrent parmi les artistes, les f^ns de lettres, les amateurs, des querelles violentes qui se traduisirent par une polémique passion- née et une véritable pluie de brochures, de libelles et de pamphlets. (Voy. Guerreh kv- nirALES.) Monnet, qui avait toujours l'œil ou- vert et l'oreille au vent, songea à tirer parti de la situation : il fit faire p;ir Tadé les [aroles m TBÊATRE. d'im petit ou\t(^ conçu dans le {jenre des in- termèdes italiens, en fit écrire la musique par Dnuvergiie, et donna ce petit ouvrage, intitulé les TToqveurx, en faisant annoncer qu'il était dû à la plume d'un compositeur italien. Ce Bubterfugje réusait, les plus malins y furent pris, et les Troqueiirs, applaudis d'alwrd par OPÉRA-COMIQUE (théâtre de l'). 5t;2 les partisans de la musique italieiiiic, le furent da^atitagt! encore par ceux de la musique fran- çaise lorsque Monnet eut avoué la supercherie dont il s'était rendu coupable. Ce succès encouragea Monnet, qui, s'cnga- f^eaiit plus ayant dans la voie qu'il s'était ou- verte, appela à lui les compositeurs pour l'ai- der et le soutenir. Duni, Philidor, Laraette, Moiisigiiy ne se firent pas prier pour lui écrire des pièces à ariettes (c'est le nom qu'on leur donnait alors), et la -Comédie- Italienne, voyant que la vogue était de ce côté, imita l'Opéra- Comique et, transformant son genre, se mit à donner, elle aussi, des pièces musicales. Par malheur pour l'Opéra-Comiquc , ses triomphes alarmèrent la Comédie-Italienne, qui, voyant en lui un rival redoutable, chercha simplement à l'étouffer. Celle-ci, à force de démarches et d'efforts de toute sorte, finit par obtenir sa sup- pression, à la seule condition de recueillir dans sa propre troupe six des principaux artistes du théâtre sacrifié : Clairval, Laraette, Au- dinot, Boiiret, M"™ Nessel et Beschamps C'est en 17112 qu'eut lieu ce qu'on appela alors « la réunion des deux troupes », et l'on peut dire i|u'à partir de ce monient le genre de l'opera- comiquc était véritablement fondé eu France, car la Comt-dic- Italien ne s'y adonna presque exelnsivement. Philidor et Duni, Laruette et Monsigny travaillèrent ])our elle cojnine il.i avaient traraillé pour l'Opéra-Comique , et bientôt, (în-try venant se mettre de la partie, tons concoururent à la création de ce répertoire de ]ietits chcfs-d'a'UVTc qui, quoique en disent certains dt^laigncux maladroits, ont porté haut la gloire de la France dans le domaine de la musKjue dramatique. La Fée Urgéle, les Mois- sonneurs, le Bûdteren, le Sorcier, Tom Jones, le Roi et le Fermier, Rose et Colas, le Dèser- leur, Lticile, Zémire el Azor, V Amant jaloux, T Epreuve villageoise, Riehard Cofur de Lion et bien d'autres obtinrent d'éclatants succès et affirmèrent la valeur de nos musiciens. Ijours succès encouragèrent d'autres conqxisiteurs , et bienttit on vit entrer en lice (îossec, Kodol- phe, Martini, Dézèdes, Méreaus. puis Rigcl, Cliam[iein, Désaugiers, Dalayrae, Floqnet, Itruni, Deshayes, Bertoii et bien d'auti^*. ha Comédie-Italienne était seule en posses- sion d'exploiter ce genre de roi>éra-coi nique, 0PERA-C0MIQ;UE (théâtre de l'). lorsi|u'eii 178D elle vît s'élever une concurrence puissante. Léonai-d Antié, coiffeur de k reine 11 iirie- Antoinette, et Viotti, l'admirable violo- niste, s'étaient associés pOur la création d'une nouvelle et colossale entreprise, le théâtre de Monsieur, qui, échangeant bientôt ce titre con- tre celui de théâtre Fcydeau, était destiné à jouer (juatre genres : ropéra-comique français, l'opéra italien, la comédie et le vaudeville, et abandonna promptement les trois derniers pcjur su consacrer exclusivement au premier. Ce fut alors, entre les deux théâtres, nno lutte in- cessante et fiévreuse , profitable non seulement aux plaisirs du public, mais an ^énie de toute une pléiade de musiciens brillants qui fai- saient, on peut le dire, succéder les chefs- ■ d'oiOTre aux chefs-d'œuvi-e, et qui portaient notre musiijue dmmatique à lui point de splen- (feur dont on ne l'aunut pas enic susceptible. A cette éiKJque on vit Berton donner Montana H Sléphanû, le Délire, Aline; Cherubini, Lo- (lo'iska, Méâée, les Deux journées; lioiel- dieu, ^omÏMic etZiihmr, le Calife, Benioii't- H, .Va Tank Aurore; ïléliul, Euphrosine et Coradin, Stralonice, Ariodant, î'Irato; De- vienne, les Visilanâinea, les Comédiens timbu- lanls; Steiht'lt, Roméo et Juliette; Lesueur, Paul et Virginie, Télètaaqw, la Caverne; Dellii Maria, le Prisonnier, F Opéra-Comique; sans compter les ouvraf,'es de Kreutzer, de Ja- (Iin,(]c Gresnick, de Solié, de (iaveanx, de Bruni, de Xicolo, de Tarclii, de Fay et de leurs <'inules. Pourtant, après douze années de cette lutte féconde, les deux tliéjitrea, Veydeau et Favart (c'est le nom qu'avait pris la Comédie-Ita- lienne, à qui l'on domuiit aussi celui d'Opcra- Comique- National), sons.'èreiit à unir leurs efforts et à se fondre l'un dans l'antre. C'est ce qui eut lieu en effet, et, à la fin de l'un IX (1«01), les deux trou]>es se réunirent en une seule, dans la salie du théâtre l-'oyileau, qui a- dopta dréidément le titre d'OïK'r'a-Comiqne, conservé jusqu'à nos jours. L'histoire de l'Opéra -Comique entre alors dans sa période moderne et connue de tons. 504 OPERA DI MEZZO CARATTERE. — OPERATEUR. Aux noms des artistes glorieux que je viens de citer, se jaijTQentsncccsai ventent ceux d'Hcrold. Auber, Halévy, Adolphe Adam, firisar, Kreubé, ilonjjou, Tli. Liibarre, Clapisson, Onslow, " Carufa, Ooinis, Catnifo, Montfort, Flotow, Meyevbcer, Aimé Maillait, H. Reber, Félicien David, Victur Classe, JIM, Ambroisc TJionias, tionnotl, Dtiprato, Boulaiijrer, Gevacrt, Fer- dinand Poise, Léo Deliltes, et tons ceux que je ne siuimis nuniiner. Et ^laiini les ouvrages dont les suc«-èR uff6iis émé- rites, s'installaient dans les mes de Paris peut débiter leurs tnai'uhandises, à grand renfort de discours sau*çrcnuR, de lazzis RTotestiucs et de coiitorsioiia excentriques. Uu peu i>lufl tard, quelcjuca-una d'entre eux se font une clientèle {>armi les badauds, qui se passent dv bouclie on bouche les noms de Malossc^née, du Mau- loue, de iliilassis: un jKu plus tard encore, il en CMt qui deviennent tout à fait célcLires, qui font oublier leurs devauctors et qui révolution* nent véritablement Paris : Btury. Orviétan. Tabarin surtout, ont laissé un nom qui est parvenu jusqu'à nous. Acett* éi»oque, les opé- iiitcnrs s'étubliisnieiit princiiNilemcnt sur le Pont-Neuf, foire ambulante et i)cr]K-tQeIlc où toute la ville ae diumaît rendez-vous : Tout-Neuf , oi-dinairc tliéiUre l)e vctideure d'onguent et d'emplaatre, Séjour des airoebeuni de dcntH..., D'opérateure et lio cliymiiiues Kt de lut'deeiiis Biiaij'yriiiuea (1). « 11 y on avait, dit il. A'. Foumel, de toutes aortes et de tous étages, dejuiis le pauvre dia- ble qui portait lui-même sa Ixiîte :i médicaments sous le bras justin'à œlui qui traînait à sa suit« toute une liande d'auxiliaiii-s. Les plus riches IKiBsédaient de vraies troupes de comédiens, qui eussent pn lutter sans di^ivnutage contre celles des princiimles villes de province , et ils attiraient le public à leurs drofçues on l'amu- sant ]iar des lazzi, des chansons, des pitrades et des fai-ces, sans oublier les pi-ospectus pom- Il !l I OPERETTE. 567 peux qu'ils faisaient distribuer à foison dans les alentours du cheval de bronze, et les affiches dont ils tapissaient tous les coins de rue. » Aujourd'hui qu'on nous a fait un Paris tel- lement propre et tellement ratissé que pour un peu Ton empêcherait d'y marcher, le spectacle populaire, le spectacle des mes, ce spectacle charmant, toujours nouveau, toujours amusant, que l'on y voyait naguère avec tant de joie, a complètement disparu. On n'y voit donc plus d'opérateure, et le dernier de la bande est parti pour l'autre monde dans la personne de Man- gin, le fameux marchand de crayons, l'homme au casque brillant, qui égayait encore les pas- sants en compagnie de son inséparable Yert- de-gris, lequel tournait avec un implacable sang-froid la manivelle de son orgue de Bar- barie. Mais de tous les opérateur passés, pré- sents et futurs, le plus illustre sera toujours Tabarin, dont les farces ont été pieusement recueillies par des lettrés avisés, et que M. Paul Ferrier a fait revi\Te, il y a quelques années, à la Comédie-Française, dans une petite pièce où l'ancien héros du Pont-Xeuf était personnifié par M. Coquelin aîné. Ce n'était pas la pre- mière fois, d'ailleurs, qu'on transportait sur la scène la personne d'un de ces farceurs épiques : en 1702, Dancourt faisait représenter sur ce même théâtre de la Comédie-Française, dont il était l'un des acteurs les plus estimés, une sorte de petite farce en un acte avec prologue, inti- tulée r Opérateur Barry, dont de Léris parle en ces termes : — a II n'y a que le prologue qui ait rapport au docteur (!) Barry, qui étoit un fameux charlatan du commencement du dix-septième siècle ; la pièce est une espèce de petite farce, telle que cet empirique en faisoit représenter sur son théâtre, qui étoit au Châ- teau-Gaillard, au bout de la rue Guénégaud, vers l'endroit où est à présent l'abreuvoir. »> OPÉRETTE. — Petit opéra de peu d'im- portance. C'est du moins la signification que jadis avait le mot, avant l'extension que la chose a prise de nos jours. <^c Ce mot, dit Castil- Blaze, a été, dit-on, forgé par Mozart, pour désigner ces avortons dramatiques, ces compo- sitions en miniature, dans lesquelles on ne trouve que de froides chansons et des couplets de vaudeville. Les Ûhasseurs et îa Laitière, le Secret, V Opéra-Co7niqiie, les Petits Savoyards, etc., etc., sont des opérettes. Mozart disait qu'un musicien bien constitué pouvait compo- ser deux ou trois ouvrages de cette force entre son déjeuné et son dîné. » La rage de l'opérette a commencé à sévir en France il y a une trentaine d'années. C'est sur une petite scène mignonne, située sur le boule- vard du Temple et qui avait nom les Folies- Concertantes, que ce nouveau produit musical prit naissance alors. Les Folies-Concertantes , devenues depuis les Folies-Nouvelles, puis le théâtre Déjazet, étaient placées sous la direc- tion de M. Hervé, artiste incomplet au point de vue des connaissances techniques, mais singulièrement bien doué, et qui était à la fois auteur, compositeur, chef d'orchestre, chanteur et comédien. C'est à M. Hervé qu'on doit les premières opérettes ainsi qualifiées, Fiji et Nini, la Perle de V Alsace, un Drame en 1779, Toinette et son carabinier, Vadé au cabaret, etc. Plusieurs musiciens le suivirent dans cette voie : Pilati, MM. Léo Delibes, Laurent de Rillé, Fr. Barbier, etc. , et bientôt Offenbach obtint le privilège d'un nouveau théâtre, les Bouffes-Parisiens, exclusivement destiné à la représentation de ce genre d'ouvrages, et dans lequel ce compositeur en fit représenter un grand nombre : Dragonnette, la Chanson de Forfimio, les Deux Aveugles, Croquefer, le 66, le Mariage aux Ia7i ternes, etc. Mais le décret de 1864, en établissant le ré- gime de la liberté des théâtres et en abolissant les entraves qui enchaînaient l'industrie théâtrale, allait agrandir le domaine de l'opérette. Celle- ci, jusqu'alors, avait toujours dû se contenter de la forme d'un acte : encouragée par la fa- veur du public, elle s'émancipa aussitôt qu'elle le put, et d'un acte sauta aussitôt jusqu'à trois, en même temps qu'un grand nombre de théâ- tres lui ouvrirent leurs portes à deux battants. Au théâtre Déjazet et aux Bouffes-Parisiens se joignirent bientôt les Variétés, le Palais- Royal, et plus tard l'Athénée, les Folies-Drama- tiques, les Menus-Plaisirs, la Renaissance, les Nouveautés ; de môme, on vit se joindre à Of- fenbach et à M. Hervé, qui continuaient de tenir le haut du pavé, d'autres compositeurs tels f]ue MM. Charles Lecocq, Emile JoaaE, Planqiiette, etc. L'opérette eut alors un mo- ment de vogue indescriptibîe, avec Barbe- Blette, la Vie pariêienne, ia Grande- Duches»e de (ierohfein, VŒU crevé, Jea Turcs, le Petit Faust, les Bavards, Orphée aux Enfers, la Pé- rkhole, la Belle-HéVene, Fleur de Thi, les Cent Vierges, la Fille de Madame Ajigol, Gàrofié-Gi- rofla, la Marjolaine, la Pelife Mariée, les do- ciles de Corneville, et bien d'autres que je ne saumis i-appeler ici. Le euccès de IVipérette ne semble paa près de dt'croître, et il est juste de dire que les eiTorts de quelques musiciens ten- dent à relever son genre et h lui donner plus de distinction qu'il n'en avait entre les mains de ses deux fondateurs. Maïs avec les propor- tions qne cette sorte d'ou^Tages a prises au- jourd'hui, la qualification mignonne d'opérette n'a plus de raison d'être ; aussi la remplac%-t-on volontiers par celle d'opcra-bonffe, et même d'opéra-comique. ORATEUR. — Au dix-septième siècle, l'ha- bitude était que cliaquc soir, dans les théâtres de Paris, l'Opéra excepU-, un comédien vînt faire « l'annonce » à la fin de la représentation, c'est- ii-dire faire connaître au public, dans un petit discours génmiemcnt improvisé, le spectacle du lendemain. L'acteur cliargé de ce soin était dcsif^né sous le nom d'orateur, et il était seul k remplir ces fonctions, (|ue Chappuzeau, dans son Théâtre-François, détermine ainsi : L'orateur ii deux prlDcipales foDctions. C'est l'i luy de faire la liaranguc et de compoRcr rnIHclic, et comme il y a beaucoup de rappoit de l'une l'i l'autre, î) nuit presque lu même règle pour toutes les deitx. Le discoiirH qu'il vient faire à l'issue de la ctJinédie a pour but de caiilîvcr lu bienveillance de l'aHscmblée. M luy rend grâces de son attention favorable, il luy annonce la pièce qui doit suivre celte qu'on vient do repréBcnter, et l'invite à la ve- nir voir [Kir quelques éloges qu'il lui donne: et co sont là les trois parties sur lesquelles roule sua compliment. Le plus souvent il le fait court, et ne le médite point; et quelquefois ntissi il l'étudïe. quand ou le Itoy, ou Monsieur, on quelque prince du sang se trouve présent. Il en use de même quand il faut annoncer une pièce nouvelle qu'il est bcxiiii) de vanter, dans l'adieu qu'il fait au nom de la troupelevendrudy qui précède te prenucr dimanche de la Passion, et à l'ouverture du théAtre après les f estes de Pasques , pour faire reprendre an peuple le goust de la comédie... Cette fonction de l'orateur ne devait pas laisser que d'être assez délicate, dans un temps où le public, beaucoup plus choisi qu'aujour- d'hui, était à la fois instruit, connaisseur et difficile. Chappuzeau nous fait d'ailleurs les portraits, fort intéressants, des différents ora- teurs qui se succédèrent sur les trois théâtres de comédie que l'on vit à Paris dans la seconde moitié du dix-septième siècle, celui de la troupe royale (l'Hûtel de Bourgogne), celui du Marais et celui de Molière : La troupe royale, dit-il, a eu de suite deux il- lustres orateurs , liellcrose et Floridor, qui ont esté tout ensemble de parfaits comédiens. Quand ils ve- noient annoncer, tout l'auditoire iirestoit un très grand silence, et leur compliment, court et bien tourné, estoit écouté avec autant de plaisir qu'en avoit donné la comédie. Ils produisoient chaque jour quelque trait nouveau qui réveilloit l'auditeur et marquoit la fécondité de leur esprit, et j'ay parlé au troisième livre des belles qualitez de ceil deux illustres. Hauterociie a succédé au dernier, ses camarades, qui y ont le mémo droit, le voulant bien de ta sorte, et il s'oquitc dignement de cet employ. Il a beaucoup d'étude et beaucoup d'esprit , il écrit bien en prose et en vers , et a produit plu- sieurs pièces de tliéfitre et d'autres ouvrages qui lui ont aquis de la réputation. Quatre illustres orateurs ont )>aru de suite datas la troupe du Marais, Mondory, Dorgemont, Flori- dor et la Ituque. Mondory, l'un des plus habile:) comédiens de son temps , mourut de trop d'ardeur iju'il aiiportoit i, s'aquitcr de son riJle (1). Dorge- mont lui succéda , qui estoit bien fait et très capa- ble dans sa girofcssion, qui parloit bien et de boune grScc et dont l'on estoit fort satisfait, Floridor le suivit, et entra en 1043 dims ta troupe royale, ou il parut avec éclat, et tel que je l'ay dépeint. La Roque remplit sa place en ta charge d'orateur, qu'il a exercée vingt-sept uns de suiw, et l'on peut dire, sans fâcher personne, qu'il a soutenu le thé.'itre du Mnruis jusqu'à la iin par sa bonne con- duite et par sa bravoure, ayant donné de belles (1) Frsppé d'une ittaquo d'apojileiie, buc même, en jounat le râle d'Hérode J/an TiiBtnn, Uondory mourut pen de temps après. ORATEUR. 569 marques de Tune et de Tautre dans des temps dif- ficiles, où la troupe a couru de grands dangers... Avant les défences étroites du Roy à toutes sortes «le personnes d'entrer à la Comédie sans payer, il arrivoit souvent de grandes querelles aux portes , et jusques dans le parterre ; et eu quelques rencon- tres il y a eu des portiers tuez, et de ceux aussi qui excitoient le tumulte. La Roque , pour apaiser ces désordres et maintenir les comédiens et les audi- teurs dans le repos , s'est exposé à divers périls, et attiré de très méchantes affaires sans en craindre le succez; montrant autant d'adresse et d'esprit qu'il a toujours fait parêtre de cœur pour l'assou- pissement de ces tumultes. Il s'est fait craindre des faux braves, et estimer de ceux qui étoient braves véritablement, suivant en cela les pas de ses frères, qui auroient passé pour des illustres s'ils avoient eu d'illustres emi)loys... La troupe du Palais-Royal a eu pour son pre- mier orateur l'illustre Molière, qui, six ans avant sa mort , fut bien aise de se décharger de cet em- ploy, et pria la Grange de remplir sa place. Celui cy s'en est toujours aquité très dignement jusqu'à la rupture entière de la troupe du Palais-Royal , et il continiie de Texercer avec grande satisfaction des auditeurs dans la nouvelle troupe du Roy. Quoy que sa taille ne passe guère la médiocre , c'est une taille bien prise, un air libre et dégagé, et sans l'ouïr parler, sa personne plaist beaucoup. Il passe avec justice pour très bon acteur, soit pour le sérieux , soit pour le comique , et il n'y a point de rôle qu'il n'exécute très bien. Comme il a beau- coup de feu, et de cette honneste hardiesse néces- saire à l'orateur, il y a du plaisir à l'écouter quand il vient faire le compliment ; et celuy dont il sceut régaler l'assemblée à l'ouverture du théâtre de la troupe du Roy estoit dans la dernière justesse. Ce qu'il avoit bien imaginé fut prononcé avec une merveilleuse grâce , et je ne puis enfin dire de luy que ce que j'entens dire à tout le monde , qu'il est très poli et dans ses discours et dans toutes ses actions. Un autre historien de la Comédie-Française, très informé aussi, Lcmazurier, rappelait en ces tenues, un siècle et demi plus tard, les oriprines, la nature et la décadence de ces fonc- tions de Torateur théâtral : Ces fonctions d'orateur des comédiens sentaient un peu le charlatanisme dont une partie des pre- miers acteurs qui montèrent sur une scène régu- lière faisaient profession avant (jue d'adopter un plus noble emploi. Mondor,Tabarin et les autres fameux opérateurs de Paris et des provinces , pre- naient ordinairement a leurs gages un homme chargé de vanter leurs drogues, et tachaient qu'il fût beau diseur et prompt à la repartie. Les comé- diens de l'Hôtel de Bourgogne et du Marais, dont la plupart avaient paru sur les tréteaux avant de jouer des pièces plus honnêtes, trouvèrent qu'il leur serait utile de faire l'éloge de leurs pièces par l'organe d'un de leurs camarades, spéciale- ment chargé en outre de porter la parole dans toutes les occasions où ils auraient quelque chose à démêler avec les opérateurs. Ces occasions étaient alors beaucoup plus communes qu'elles ne le sont aujourd'hui : il fallait (jne l'orateur fût très disert, qu'il ne se démontât jamais, qu'il eût ré- ponse à tout ; aussi ses fonctions étaient-elles re- gardées comme très importantes. Peu à peu l'ordre setablit dans la comédie; il devint moins néces- saire de dialoguer avec les spectateurs ; on recon- nut qu'il était ridicule de vanter les ouvrages que l'on devait jouer, puisque le public pouvait ré- ]>ondre : Nous verrons hien^ et les fonctions de l'ora- teur se trouvant par le fait réduites à l'annonce du spectacle , qui se faisait entre les deux lûèces , on jugea qu'il n'était pas nécessaire qu'elles fus- sent en titre d'office ; le dernier acteur reçu s'en trouva chargé , comme des compliments de clôture et de rentrée, dont l'usage subsista très longtemps encore, et ne fut abandonné qu'en 171)3 (1). C'est à la retraite de Lecomte (1704), co- médien assez médiocre, mais orateur fort utile, et qui avait succédé à Lagrange en cette qua- lité, que la charge d'orateur en titre fut sup- primée à la Comédie-Française, les fonctions en étant dévolues dès ce moment, comme nous le dit Lcmazurier, au dernier acteur reçu dans la société. C'est à ce titre qu'elles furent exer- cées, entre autres, par deux excellents comé- diens, Dancourt et Legrand, qui l'un et l'autre se firent remarquer comme auteurs. Legrand, qui sous ce rapport, et aussi comme acteur comique, était fort aimé du public, lui plai- sait beaucoup moins dans la tragédie, où son embonpoint monstrueux le rendait d'ailleurs ridicule. Un soir , après avoir excité quelques railleries du parterre en jouant le rôle de Photin dans la Mort de Pompée, il vint faire l'annonce du spectacle du lendemain, ajoutant (1) Galerie historique des acteurs du Théâtre- Fran- r^ais, 1810. 670 ORATORIO. — ORCHESTRE. (]U^on allait donner la première représentation de r Épreuve réciproque, comédie nouvelle. « Je souhaite, Messieurs, dit-il en terminant, vous faire rire un peu plus dans la petite pièce que je ne vous ai fait rire dans la grande. » Il arriva un jour à Dancourt une aventure plus... corsée. Le parterre demandait V Ariane de Thomas Corneille au moment où Legrand, s'acquittant de ses fonctions d*orateur, s^avan- çait pour annoncer une autre pièce. « Ariane , dit Tabbé de Laporte en racontant cette his- toire, étoit le triomphe de M"** Duclos ; elle y excelloit. Malheureusement elle étoit chargée d'un certain fardeau qu'elle n'avoit pas reçu des mains de rhjnnen, et qui touchoit au terme prescrit par la nature. C'étoit cet état qu'il falloit apprendre au parterre, sans blesser la délicatesse de l'actrice, de laquelle l'orateur sçavoit qu'il seroit entendu. Lorsque le tumulte des cris est tombé, Dancourt s'avance, se ré- pand en excuses et en complimens, cite une maladie de M"*" Duclos, et, par un geste adroit, il désigne le siège du mal. A l'instant, M"° Duclos, qui l'observe, s'élance rapidement des coulisses, vole sur le bord du théâtre, ap- puie un soufflet sur la joue de l'orateur, et se tournant vers le parterre avec le même feu, elle dit : — A demain Ariane, m Si cette Ariane- là fut jamais al)andonnée, ce ne dut pas être sa faute ! ORATORIO. — Drame musical dont le sujet est tiré de l'Ancien ou du Nouveau Tes- tament, et qui, bien que sa forme se rapproche souvent beaucoup de la forme théâtrale, est destiné à être exécuté à l'église ou au concert. L'oratorio, comme l'opéra, est divisé en plu- sieurs parties, qui parfois même prennent le nom d'actes ; son action, comme celle de To- pera, est fournie par divera i)er8onnages plus ou moins importants, et les chœurs, ainsi que l'orchestre, y jouent un rôle considérable. C'est vers le milieu du seizième siècle que l'oratorio prit naissance en Italie, giiice à saint Philippe de Xéri, fondateur de la congrégation de l'Oratoire, qui fit exécuter plusieui*s œuvres de ce genre dans l'église de l'Oratoire, d'où le nom d'oratorio donné à ces sortes de composi- tions. Hîendel et Jean-Sébastien Bach se sont immortalisés par leurs magnifiques oratorios : Israël en Egypte^ le Messie^ Dehorah^ la Pas- sion selon saint Matthieu y etc. ORCHESTRATION. — Voy. Instru- MBXTATION. ORCHESTRE. — Ce mot s'applique à trois choses et désigne : 1"* l'espace situé immédia- tement devant la scène et en contre-bas , qui s'étend sur toute sa largeur, et dans lequel viennent prendre place les musiciens d*iin théâtre ; 2® l'ensemble même et la réunion de ces musiciens, qui constitue ce qu'on appelle réellement l'orchestre ; 3° enfin , la partie de la salle qui , comprenant les « fauteuils d'orches- tre j>, s'étend entre l'orchestre et le parterre et remplace ce qu'on qualifiait autrefois de parquet. Après avoir donné cette triple défi- nition, nous nous occuperons uniquement de l'orchestre proprement dit, c'est-à-dire de la réunion des musiciens qui forme le personnel symphoniquc d'un théâtre ou d'un concert. Tous les théâtres ne sont point des théâtres lyriques , tous les théâtres lyriques même ne se trouvent point dans des conditions semblables, soit au point de vue de la grandeur et des proportions de la salle, soit au point de vue du genre adopté. La composition de l'orchestre diffère donc, naturellement, selon ces diverses conditions, et tandis qu'un théâtre de vaude- ville pourra se contenter d'une vingtaine de musiciens, un théâtre d'opérette en exigera une trentaine, et un véritable théâtre Ijrique en comptera cinquante, soixante et jusqu'à quatre-vingts. Les petits orchestres sont for- cément incomplets, c'est-à-dire qu'ils ne com- prennent pas tous les instruments qui entrent dans la comi)Osition de ce qu'on pourrait appe- ler l'orchestre lyrique ou symphoniquc. Ainsi , au temps où l'on jouait le vaudeville, l'orches- tre d'un théâtre de ce genre comprenait géné- ralement quatre premiers violons, quatre se- conds, deux altos, deux violoncelles, deux con- trebasses, une flûte, une clarinette, un cornet à pistons, deux cors et un timbalier. Dans uii théâtre de drame, où l'orchestre devait avoir une sonorité un peu plus corsée, on ajoutait généralement deux ou quatre violons, un bas* ORCHESTRE. 571 son, un second cornet à pistons, nn trombone | d'hui, dans nos théâtres d'opérettes, l'orchestre Gt une grosse cnîsse arec cymbalea. Aiijour- 1 compte ^néralement, en dehors des instru- ♦•f "ïf f f®4 Plw de U muBlqoc du Bnl ma tçnaul U uients ù cordée, deux flûtes, deux clarinettes, lin hautbois, un basson, deux cornets & pis- tons, deux cors, un trombone, timbales et grosse caisse. Enfin, pour faire connaître ce que c'est qu'un orchestre complet et bien pro- portionné, nous allons donner la composition de l'orchestre de l'Opéra : 12 premiers violons, 12 Bccoods violons, 572 ORCHESTRE (fauteuils d'). — ORCHESTRE (stalles d'). . s 8 altos , 10 violoncelles, 8 contrebasses , 2 grandes flûtes , 1 petite flûte, 2 clarinettes , 2 hautbois, 4 bassons (les parties étant doublées , car on n en écrit jamais que deux) , 4 cors, 2 trompettes, 2 cornets à pistons , 3 trombones, 1 ophicléide, 1 timbalier, 1 cymbalier, 1 grosse caisse , 1 triangle. Telle est la composition régulière de Tor- chestre, auquel viennent s'ajouter aœidentelle- ment une ou deux harpes et un ou deux saxo- phones. Nous devons ajouter cependant que si tel est l'orchestre qui se présente aux yeux du public, son personnel est plus considérable, afin que l'on puisse parer aux accidents, aux maladies qui pourraient se produire. Ce per- sonnel comprend donc, en plus de ce que nous avons vu, un quatuor à cordes, une clarinette, un hautbois, un basson, un coniet à pistons, deux cors, et un tromlx)ne. De cette façon, on est toujours sûr que les pupitres seront au complet. En France, le chef d'orchestre se phice tou- jours au centre de l'orchestre, devant la rampe, entre les deux parties de violons. En Italie, on le voit plus volontiers assis au milieu et au fond de l'orchestre, adossé à la Imlustradc (jui sert de limite k celui-ci, et par conséquent touchant le premier rang de spectateurs. Par cette dernière i)osition, le chef d'orchestre a l'avantage d'avoir tout son pereonnel sous les yeux et dans la main, pour ainsi dire, et de n'être pas obligé de faire à chaque instant des mouvements qui ne sont pas toujours agréables à voir. Mais, d'autre part, trop éloigné de la scène, il perd l'immense avantage qu'ont nos chefs d'orchestre de se trouver en communicii- tion visuelle, directe et intime avec les chan- teurs, de pouvoir les cH^huuffer du regard, ce qui est certainement une des conditions essen- tielles d'une bonne et chaleurease exécntion. On sait que Richard Wagner, poussant jus(]u'aa bout son système de ne laisser aux auditeurs de ses œuvres pas même l'apparence d'aucune distraction extérieure, a rendu Tor- chestrc invisible dans son théâtre de Bayreuth; situé plus bas que dans les théâtres ordinaires, cet orchestre est entièrement couvert, de fa- çon que les musiciens disparaissent complète- ment aux yeux du public ; seul, un espace vide et non couvert, ménagé devant la scène, permet aux chanteurs de suivre les mouvements du chef. Ceux qui ont assiste aux représentations de Bayi^euth affirment que, par ce moyen, la sonorité instrumentale acquiert un fondu, un velouté dont on ne peut se faire une idée en entendant un orchestre ordinaire. ORCHESTRE (Fauteuils d'). — L'es- pace qui s'étend derrière l'orchestre des musi- ciens, et qui s'appelait autrefois parquet dans nos théâtres, a pris aujourd'hui le nom d'or- chestre, et les fauteuils qui le garnissent en files serrées sont dits u fauteuils d'orchestre. » Ce sont assurément les meilleures places d'un théâ- tre, et dans la plupart d'entre eux elles sont exclusivement réservées aux hommes, bien que dans certains autres, mais en petit nombre, les femmes y soient admises. Cette exclusion presque générale du beau sexe d'un endroit où il serait si bien à sa place, n'est due qu'à lui- même. A diverses reprises, en cflFet, divers théâtres ont essayé de réagir contre cet ostra- cisme partiel qui pesait sur les femmes, et ont voulu leur permettre l'entrée de l'orehestrc. ^lais ces dames, sans aucun souci de la com- modité des spectateurs masculins, s'instal- laient â l'orchestre avec des coiffiu^ d'une hauteur et d'un déploiement à ce point exces- sifs, qu'elles interccptiiient absolument la vue de la scène à ceux qui étaient placés derrière elles. Des réclamations incessantes se produi- saient aloi*s, tout naturellement, et l'orchestre a été* de nouveau réservé aux spectateurs mâles, ORCHESTRE (Stalles ]>'). — Rangées de stalles qui s'étendent derrière les fauteuils d'orchestre, sur l'emplacement jadis occupé par le parteiTe. (Voy. Stalle.) ORDRE DE DÉBUT. — ORDRE DU SPECTACLE. 573 ORDRE DE DÉBUT. — Jadis, au temps heureux des privilèges, et au temps plus heu- reux encore où les gentilshommes de la cham- bre du roi étaient chargés de l'administration supérieure des théâtres subventionnés, on ac- cordait à.ceux-ci une sorte de droit de préemp- tion sur tous leurs confrères, c'est-à-dire que si l'Opéra, ou TOpéra-Comique, ou la Comé- die-Française trouvait, dans un théâtre de Paris ou de la province, un acteur à sa conve- nance, il lui faisait adresser par le surintendant un ordre de début. Sur cet a ordre », le susdit acteur était obligé de quitter le théâtre auquel il appartenait, et ce théâtre devait lui rendre sa liberté, en dépit de tout engagement. Que si, par impossible, Tacteur se refusait à Thonneur qu'on lui voulait faire, il lui était interdit de paraître à l'avenir mr avcun théâtre de France, et sa carrière était brisée. Cette façon paternelle d'envisager les droits de l'homme et du comédien avait disparu avec la Révolution ; on la retrouve plus vivante que jamais sous la Restauration, et le procès cé- lèbre de Perlet en est une preuve. Voici com- ment VAlmafiach des spectacles de 1823 racon- tait cette affaire, qui fit tant de bruit en son temps : Dans le courant de mars (1822), Perlet reçut de rautorité l'ordre de débuter au Théâtre-Français. aux termes des conditions imposées au Gymnase et insérées dans son privilège. Perlet, ne voulant point s'exposer aux chances de ce dangereux hon- neur, s'y refusa avec modestie , mais en tenues po- sitifs. Nos lois nouvelles ne mettant point, comme au bon vieux temps, des lettres de cachet à la dis- position des gentilshommes de la chambre, il faut donc souffrir que Perlet ait une volonté. Mais comme le système des privilèges est très favorable à l'arbitraire , en même temps qu'on renonce à faire débuter Perlet au Théâtre-Français , on défend au Gymnase de le faire jouer davantage. Perlet, qui connaît tous ses droits , se présente au bout du mois à la caisse du Gymnase , pour y toucher le traite- ment stipulé dans son engagement. Refus de payer, motivé sur les défenses de l'autorité. Action inten- tée au Gymnase par Perlet , en vertu de l'acte en bonne forme qui les lie mutuellement. Tant que l'affaire demeure pendante, Perlet ne touche point son traitement. La privation de son service cause un dommage notable au directeur du Gymnase. Le | jugement intervient. Le double engagement de Per- let et du Gymnase portait un dédit de 60,000 francs. On en alloue 15,000 à Perlet, en sorte que le G3Tnnase perd les riches recettes que lui faisait faire Perlet, plus 15,000 francs; et que Perlet, outre un temps considérable qu'il aurait pu em- ployer utilement, perd les trois quarts de la somme sur laquelle il avait dû compter en cas de dédit. Et voilà ce qui ne peut manquer de résulter du conflit des autorités administratives et judiciaires, fniit nécessaire des privilèges. C'était un temps charmant vmiment que ce lx)n vieux temps ! Quoi qu'il en soit, la révo- lution de 1880 H tué l'ordre de début, et celui- ci n'est plus aujourd'hui qu'un souvenir. Cela ne nous empêchera pas de donner le texte d'un ordre de début, tel cpi'il était adressé en 1774 au chanteur Michu, qui devint l'un des acteurs les plus fameux de la Comédie- Itidienuo : Nous maréclial duc de Richelieu, pair de France, premier gentilhomme de la chambre du Roi, Nous duc de Duras, ])air de France, premier gentilhomme de la chambre du Roi , Ordonnons au sieur Michu, actuellement comé- dien à Nantes, de se rendre à Paris pour y débuter sur le théâtre de la Comédie-Italienne dans les rôles d'amoureux. Paris, ce 3 décembre 1774. tSir/né : le Maréchal duc de Richelieu ; le Duc DE Duras. ORDRE DU SPECTACLE. — Il y a à peine un demi-siècle que nos théâtres ont pris l'habitude d'indiquer avec précision, par une ligne placée au bas de leur affiche et qui poi-te en tête ces mots : Ordre du spectacle, l'ordre dans lequel les pièces doivent se succéder au cours de la représentation. Et , chose assez sin- gulière, c'est de la province qu'est venue cette réforme, ainsi que nous l'apprend VAlmanach des Spectacles de 1830 : — « La rédaction des affiches de sjxîctacle donne heu à des en*eurs. On y lit que telh pièce sera précédée de, stiivic de, le spectacle commencera par.,, ; c'est un laby- rinthe ; on s'y perd ; et tel l)énévole amateur voit entrer en scène, au lieu de Malvina, qu'il attendait, Victoire des Ctminières. Pour éviter de semblables méprises, qui ont lieu surtout en i)i4: ORGANE. — ORIPEAUX. province, M. Nestor, directeur du théâtre d'Or- léans, a pris le parti d'indiquer très clairement, par une dernière ligne, Tordre de la représen- tation, et de numéroter les pièces. » Mais comme les progrès les plus simples, les réfor- mes les plus faciles ne sont pas du goût de tout le monde, nous devons bien constater qu'au- jourd'hui tous nos théâtres indiquent l'ordre de leur spectacle de cette façon rationnelle, tous, — à Texception de nos quatre grandes scènes subventionnées, qui, après un demi-siè- cle, en sont encore aux \ieux errements. C'est ainsi, par exemple, qu'il n'est pas rare de voir l'affiche de la Comédie-Française C(mçue de cette façon baroque : LEYlLl.ArrE, précédé de La Joie fait peur, suivie de Le Feu au couvent. On commencera par Le Philosophe sans le savoir. Et puis reconnaissez-vous là-dedans, si vous pouvez (1). ORGANE. — Ce mot s'emploie, au théâtre, comme synonyme de « voix parlée ». Avoir un l)on organe est une des premières facultés re- quises chez un comédien. Les uns Tout souple et harmonieux, d'autres sonore et retentissant, ceux-ci un peu rude, ceux-là doux et flatteur, d'autres encore un peu grêle, un peu faible. La nature de Torgane doit d'ailleurs s'approprier à la nature de l'individu, ainsi qu'au caractÎTC de son emploi : une ingénue qui aurait une voix de stentor serait aussi ridicule qu'un her- cule avec une voix d'enfant. Au reste, un tra- vail intelligent peut con'iger ccitaincs défec- tuosités de l'organe, et une articulation très (1) Au moment même où je corrige les épreuves de cet article, je remarque que l'affiche de la Comédie- Française a enfin renoncé à cette coutume incommode et ridicule. Elle suit aujourd'hui rcxcmi>le que de]>uis pi longtemps lui ont donné les autres théiUres, et fait connaître chaque jour, par une mention spéciale, l'ordre du spectacle. nette et très pure pouira compléter les bous résultats obtenus par ce travail. PALESTRE. — Chez les Grecs, la palestre était la partie du gymnase où les athlètes s'exerçaient à la lutte, sous la conduite et la surveillance du gymnasi arque chargé de leur éducation. PAXXE. — Expression de la langue théâ- trale, par laquelle les comédiens caractérisent un rôle exécrable, d'une importance infime, et dont il n'y a rien à tirer au point de vue de l'effet à produire, de l'action à exercer sur le public. PANORAMA. — On donne le nom de pa- nomma à un grand tableau circulaire, horizon- tal et continu, qui représente en perspective la vue d'une ville ou d'un paysage. Ce spectacle a été imaginé au dix-huitième siècle par un Alle- mand, le professeur Breysig, de Dantzig ; en 1793, Robert Barker le fit connaître à Edim- bourg, et c'est le célèbre Américain Robert Fui- ton qui l'importa en France en 1804. On a dit avec raison que le panorama est le triom- phe de la perspective. Pour faire un ouvrage de ce genre, l'artiste, placé sur un endroit très élevé, tel que le sommet d'une montagne, peint le paysage qui l'entoure, et ne s'arrête que là 87 578 PANTALON. — PANTOMIME. où rhorizon borne sa vue et oppose à celle-ci une barrière infranchissable. Quant au spec- tateur, placé au centre de la constraction qui abrite le panorama, il se trouve précisément dans la situation du peintre lorsqu'il exécutait son œuvre, et, grâce à cet artifice, il lui semble être réellement transporté sur les lieux dont on lui oflfre la représentation. Le premier panorama fut installé à Paris, au boulevard des Capucines, par un nommé Pro- vost ; on y voyait une vue d'Athènes, qui obtint le plus grand succès. En 1H23, il fut trans- féré au l>oulevard Montmartre, dans une grande rotonde située à peu près à l'endroit où délx)ii- che aujourd'hui la me Vivienne, et l'on y en- trait par le passage qui, de ce voisinage, a con- servé jusqu'à ce jour le nom de passage des Panoramas. Il disparut peu après 1«80, après qu'on y eut admiré de superbes vues de Rome, de Naples et d'Amsterdam. Deux ou trois ans plus tai*d, le colonel Langlois ouvrit, rue des Marais, un panorama où il exposait une Mie d'Alger ; il transporta ensuite son établissement aux Champs-Elysées, où il obtint Ixîaucoup de succès avec une vue de la bataille d'Eylau, puis avec un. tableau de la prise de Malakoff. Depuis longtemps déjà le panonmia du colo- nel Langlois a disparu, mais dans ces derniè- res années plusieurs établissements de ce genre ont été ouverts au public. PANTALON. — L'un des personnages les plus importants de l'ancienne comédie ita- lienne. Il est ainsi caractérisé par l'abbé de La- porte, dans ses Anecdotes dramatiques : Le Pantalon moderne diffère de Tancicn seiilc- ment par le vêtement , qui en a conservé le nom , c'est-à-dire par le caleçon, qui tenoit autrefois avec les bas : le reste de Thabillement est celui que l'on portoit jadis à Venise. La première robe est appelée zimara (simarre) , et est à peu près celle que les marchands avoîent dans leurs boutiques. L'habit de dessous est le même que l'on portoit par la ville, et qui ctoit commun à toutes sortes de personnes ; il étoit rouge alors , et ce ne fut qu'a- près que la république de Venise eut perdu le royaume de Négrepont que Ton changea, en signe de deuil, cet habit rouge en noir; et depuis, on l'a toujours porté de cette couleur. Pantalon a le mas- que d'un vieillard ; son état est ordinairement celui d'un bourgeois et d'un homme simple et de bonne foi, mais toujours amoureux, et dupe soit d'un ri- val, Boit d'un fils, soit d'un valet, d'une servante ou de quelque autre intrigant. Depuis le dernier siè- cle, on en a fait tant()t un bon père de famille, un homme plein d'honneur, tantôt un avare ou un père capricieux. Son langage doit toujours être véni- tien , ainsi que son habit. Les comédiens italiens qui ont joué en France le rôle de Pantalon sont Pîetro Pa- ghetti, Pietro Alborghetti, Fabio, Carlo-An- tonio Veronese et Colalto. On assure qu'un des meilleurs acteurs de la Comédie- Française, Armand, imitant un jour, dans une petite pièce intitulée la Française italienne, le Pan- talon de la Comédie-Italienne, qui était alors Alborghetti, celui-ci, qui assistait à la repré- sentation, trouva l'imitation si parfaite qu'il s'écria : « Si je ne me sentais au parterre, je me croirais sur le théâtre. > PANTALONNADES. — Avec ses allures l)onasscs, le Pantalon de la comédie itaUenne n'en était pas moins un farceur, un plaisant comme tous ses compagnons : Arlequin , Sca- ramouche, Trivclin, et il leur rendait parfois la monnaie de leur pièce en leur jouant des tom-s burlesques, en joignant ses exceritricité? aux leui*s, afin de ne pas être en retour avec eux. C'est à ses farces personnelles, à ses lazzis, à ses Iwuifonneries, à ses grimaces, qu'on a donné le nom de pantalonnades^ et c'est elles qu'un écrivain a canictérisécs ainsi : — « Pantalon- nade : action ridicule et burles(iue, volte-face plaisante ; fausse démonstration de joie, de dou- leur, de bienveillance, de bravoure, d'amitié ; entrée ou sortie brusque d'un étourdi ; enfin, par extension et familièrement, subterfuge ri- dicule, simagrées, grimaces, pour se tirer d'em- barras. » — D'un comédien qui se fait surtout remarquer par ses singeries, ses trivialités, ses plaisanteries grossières, on dit volontiers qu'il n'est bon qu'à faire des pantalonnades. PANTOIklDIE. — Les Romains donnaient ce nom tout à la fois aux danseurs qui repré- sentaient une action scénique à l'aide du geste seul et sans le secours de la parole, et aux piè- ces même qu'ils représentaient ainsi. rétor. Ces pièces eurent un im- 580 PARADE. mense succès à Rome, qui se passionna pour elles, grâce à deux acteurs fameux, Batylle et Pylade. « Batylle, affranchi de Mécène, était Égyptien, dit Amault dans un travail intéres- sant sur ce sujet. C'est lui qui conçut l'idée d'étendre et de perfectionner les scènes que les danseurs toscans exécutaient entre les actes des pièces régulières, auxquelles le peuple ne pi^e- nait qu'un médiocre intérêt. Aidé dans l'exé- cution de ce projet par un maître avide de tou- tes les jouissances, il s'associa Pylade, acteur habile, qu'il avait rencontré en Cilicie, et ils élevèrent à frais communs un théâtre unique- ment consacré à la pantomime. Formant de toutes les danses réunies la danse appelée ita- lique, et soutenus par la symphonie, ils repré- sentèrent des tragédies, des comédies, et aussi des satires y pièces licencieusement épigram- matiques , et ainsi nommées parce que les demi- dieux, ou les demi-bêtes, dont la mythologie peuple les bois, y figuraient au moins dans le chœur. » Mais il arriva que les deux associés devinrent promptement rivaux, puis ennemis acharnés. Batylle se distinguait surtout dans la pantomime tragique, Pylade dans la panto- mime comique ; chacun eut bientôt ses parti- sans exclusifs, dont les uns prirent le nom de batylliensj les autres celui de pj/hdtens, et il en résulta entre les deux acteurs une jalousie et une haine d'autant plus féroces que les Ro- mains se divisaient en deux camps à leur égard, et que la querelle dont ils furent l'objet prit toutes les proportions d'un grave événement public. Ce fut au point que Batylle et Pylade se séi)arèrent, que chacun d'eux ouvrit un théâtre particuUer, et que Mécène fit exiler Pylade et fermer son théâtre. La suite de cette histoire me mènerait trop loin. Pour terminer cet article, je dois faire remarquer que les modernes ont fait revivre la pantomime, avec presque autant de succès que les Romains. On trouvera, au mot ballet, tous les détails relatifs à ce sujet, et l'on y verra avec quel bonheur certains de nos théâtres, en- tre autres l'Opéra et la Porte-Saint-Martin, ont cultivé ce genre de spectacle. D'autres, moins importants, y ont trouvé aussi une source de fortune, particulièrement le tout petit théâtre des Funambules, situé naguère sur le boulevard du Temple, disparu aujourd'hui, et qui, grâce à un acteur d'un talent exception- nel, Debureau, attira la foule pendant plus de vingt ans. Aujourd'hui, la pantomime popu- laire n'a plus de refuge à Paris, et le ballet- pantomime n'est plus en honneur qu'à l'Opéra, où malheureusement, s'il esD dansé brillam- ment, il est joué maintenant d'une façon bien médiocre. Il est bon de faire observer que le mot pan- tomime exprime encore chez nous le jeu de l'acteur qui joue la pantomime ou qui se fait remarquer par l'expression de ses gestes dans une scène muette. Sous ce rapport, pantomime et mimique sont devenus synonymes, et l'on dira indifféremment d'un comédien que B»,panto- mims ou sa mimique est pleine d'éloquence et d'expression. PARADE. — La parade est une scène bur- lesque, bouffonne, souvent grossière, que les baladins et les saltimbanques de nos foires exé- cutent gratis, au dehors de leur baraque, pour attirer l'attention du public, lui donner un avant-goût du spectacle qui lui est promis et l'engager à entrer en payant sa place. La pa- rade est ancienne en France, où elle est née des moralités, des mystères, des soties que jouaient, aux premiers temps de notre théâtre et alors qu'il cherchait à se constituer, les élèves de la basoche, les Confrères de la Passion et la troupe du Prince des Sots. Lorsc^ue les règles de la co- médie furent ILxées, la parade dut à son carac- tère populaire de ne point disparaître, mais elle devint l'apanage des bateleurs et des acro- bates , qui s'en servirent comme d'amorce ponr allécher les spectateurs peu difficiles. En réalité, elle est une sorte de farce rudimentaire, sans règle ni frein, composée de lazzis, de coq-à- l'âne, de calembours, de jeux de scène gros- siers, et uniquement destinée à faire rire; elle tient de loin à l'ancienne commedia delFartê, en ce sens que ceux qui s'y li\Tent se laissent vo- lontiers aller à leur improvisation et brodent à leur manière le canevas qui leur sert de thème primitif. Au dix -huitième siècle pourtant, où les parades des bateleurs des foires Saint- Laurent et Saint-Germain avaient toujours pour personnages le vieux Cassandre, la gentille Isabelle, le beau Loandre et le placide Pierrot, auxquels ae joignBÎcnt parfois un Arlequin et un moucheur de chandelles, on publia un re- cncil de ces parades, qui, sous le titre de Théâ- Ire tie.t Boulevards (Paris, Bauche, 1750, 3 vol. in-12), contenait un certain nombre de ces farces de tréteaux, dont on ne lira peut-être pas les titres sans quelque curiosité : Léandre fiacre, la Confiance des c...., la Chaste Isabelle, le Doigt mouillé, Caramiaca et Léanilre hongre, h Marchand de LDE. 5H1 que voilà gvi ett beav, V Amant eochemarj, VA- niafit poussif, Isabelle grosse par vertu, le Re- mède à la mode, Isabelle double, Léandre ma- gicien, les Deux Doubles, la Vache et le veau, le Bonhomme Catsandre aux Indes, Léandre ambassadeur, la Pomme de Turquie, le Cour- rier de Milan, la Mère rivale, Léandre grosse, le Mauvais Exemple, le Muet aveugle, sourd el manchot, le Chapeau de Fortunalus. Plus tard, à !'épiM]UC de la Révolution, quand lo boulevanl du Temple, devenu le cen- tre du mouvement populaire , eut détrôné les anciennes foires et fut devenu comme une sorte d'immense kermesse permanente , tous les char- latans, les saltimbanques, les acrobates vin- rent installer leurs baraques dans ce centre nouveau des plaisirs parisiens. .\ cette époque, le jrcnrc de la parade se modifia en partie, grâce il ravènemcnt de deux paradisles célè- bres, deux types étonnants de niaiserie bouf- fonne et spirituelle dans sa grossièreté : Bobè- che et Galimafré, qui se complétaient l'un l'au- tre et obtinrent un succès prodigieux. Ces deux farceurs épiques furent bientôt imités par leurs confrères, Bobt-che surtout, qui en- fanta les tj-pes similaires du .Tanot, du Jocrisse et du Paillasse, et les pereonuages de l'an- cienne pantomime disparurent de la parade à l'exception de Cassandrc, qui linitparse trouver seul sur les tréteaux en présence de Paillasse, à qui il se bornait en quelque sorte à donner la réplique et à servir de corapiTe, pour lui per- mettre de débiter ses lazzis et ses folies un peu polissonnes. A ce moment encore, la parade tenait ii l'art par certains côtés, par une sorte 582 PARADIS. — PARAITRE. d'esprit un peu cynique, mais réel, par la re- cherche de l'actualité, par une façon particulière de tourner les choses, de dire des gaudrioles, qui jusqu'à un certain point se rapprochait de l'habileté qu'on exigeait du véritable comédien. Mais quand les baraques des fameux bateleurs parisiens eurent disparu peu à peu du boule- vard du Temple pour faire place à de vérita- bles théâtres, quand le dernier des saltimlmn- ques eut donné son dernier spectacle dans ce quartier qui pendant un demi-siècle avait fait la joie de nos pères, la parade, la vraie parade, si grotesque, si mouvementée, si piquante parfois, la parade mourut pour toujours. Elle est au- jourd'hui reléguée chez ceux de nos acrobates qui courent en province de foire en foire, et qui, n'ayant plus l'esprit de Paris pour les échauffer, les exciter, les inspirer, n'ont gardé de la parade que son aspect extérieur, sans en conserver ce qu'elle avait de jeune, de gai, de bouffon, et, dans son allure grossière et libre, de vraiment divertissant. PARADIS. — C'est ainsi qu'on appelait autrefois, dans nos théâtres populaires, parti- culièrement à ceux du boulevard du Temple , la dernière galerie supérieure, celle qui couronnait la salle. C'est probablement sa situation élevée qui avait valu à cette galerie le nom de paradis ; on lui donnait aussi celui depoulai/Ier, sans doute parce que, le nombre des places n'y étant pas limité, les spectateurs de cette région étaient serrés comme poules dans un poulailler. Toute- fois, cette dernière appellation était essentiel- lement familière , tandis que la dénomination de paradis était en (juelque sorte officielle. Le paradis, en raison du bas prix de ses places, était le refuge naturel des ouvriers modestes , des iitis gouailleurs, des bonnes d'enfants et des militaires ; on s'y mettait volontiers à son aise, et dans les joure de foule, comme il y faisait très chaud, les habitués du lieu ôtaient sans façon leur blouse ou leur veste et restaient en bras de chemise. La population du paradis était d'ailleurs assez bruyante, assez turbulente, mais sans méchanceté aucune, et elle amusait par- fois les autres parties de la siille par les saillies burlesques et les réflexions originales auxquel- les elle se livi-ait à haute voix. Au dix-huitième siècle, ce nom de paradis, appliqué à la partie supérieure d'un théâtre, était déjà connu, et voici l'anecdote qu'un chroniqueur rapportait à ce sujet : Madame la duchesse d'Orléans, née Conti, ou- bliait quelquefois sa dignité jusqu'à vouloir être prise pour une femme galante. C'est dans ce des- sein que, s'étant placée un jour au spectacle dans un coin des quatrièmes loges, appelées commonément paradis, elle y fut accostée par un jeune homme qui ne cherchait que des conquêtes faciles , et qui, la trouvant à son gré, lui dit, après plusieurs mots fort tendres, qu'il se proposait d'aller souper chez elle. La princesse accepte, prend son bras, et ils descendent ensemble. A peine sont-ils au bas de l'escalier, qu'on crie : La voiture de S. A, Madame la duchesse d'Orléans. En même temps deux écuyers se présentent respectueusement pour offrir la main à la personne que le jeune homme accom- pagnait. Il s'aperçoit aussitôt de son erreur et vent s'enfuir. La princesse , l'arrêtant : — Monsieur, lui dit-elle , vous m'avez promis de venir souper chez moi ; est-ce que vous ne voulez pas tenir votre parole ? — Madame , c'était au paradis où tout le monde est égal; mais ici-bas ce n'est plus la même chose. Kt après un profond salut, il se perdit dans la foule. PARADISTE. — C'est le nom qu'on donne aux pitres, aux Jocrisses qui font la parade dans les foires, à la porte des baraques de sal- timbanques, ix)ur amorcer le public et l'engager à entrer. PARAITRE. — Dans les petites villes de province, où les l'essources sont minces et ne permettent pas aux directeurs de théâtre des dépenses superflues, ceux-ci n'ont pas le moyen d'euf^ager de choristes ou de figurants. 11 faat cependant bien, ne fût-ce que dans les drames ou dans de simples vaudevilles, que les bouts de chœur qui se présentent puissent être chan- tés, et, lorsqu'il n'y a même rien à chanter, que soient au moins représentés par quelques personnes. Dans ce cas, les artistes (]ui ne jouent pas dams la pièce sont tenus de paraître, — c'est le terme technique, — et de chanter s'il y a lieu. PARASCENIUM. — PARODIE. 583 PARASCENIUM. — C'était, chez les an- ciens, la partie du théâtre située derrière la scène, au delà du ihur du fond. C'est là que s'habillaient les acteurs. PARCOURS (Avoir du). — On dit d'une danseuse qu'elle a du parcours, lorsqu'ayant à parcourir la scène elle le fait avec rapidité et légèreté, au moyen de très larges enjambées. PARLER LE COUPLET. — C'est un art perdu aujourd'hui, parce qu'il n'a plus de rai- son d'être. A l'époque où le vaudeville était en faveur auprès du public, il arrivait que cer- tains couplets de situation, surtout lorsque cette situation touchait au dramatique, lais- saient passage, dans le court espace de huit vers qu'ils comportaient, à deux ou trois senti- ments différents. Pour rendre plus saisissante l'expression de ces sentiments, les comédiens habiles avaient pris l'habitude d'entremêler en (juelque sorte le cliant et la parole en débitant leur couplet, de façon à pouvoir appuyer avec force sur les mots ou les pensées qui récla- maient de l'énergie, et à glisser avec légèreté sur ceux qui étaient moins importants. On ap- pelait cela dire, détailler, parler le couplet, et ce procédé, employé par un comédien intelligent et expérimenté, était souvent d'un très grand effet. PARLER AU PUBLIC. — Dans tous les théâtres, c'est généralement le premier régis- seur qui est chargé de , c'est-à-dire de prendre la parole lorsqu'il s'agit de faire une annonce quelconque, soit pour un changement de spectacle, soit pour une sul>sti- tution d'acteur, soit pour solliciter l'indulgence en faveur d'un artiste indisposé, soit pour toute autre cause. Naguère, en province, l'engage- ment du régisseur chargé de ce soin portait formellement qu'il remplirait les fonctions de En 1753, Vadé donne à la Foire Saint-Germain <( le Rien, parodie des parodies de Titon et r Au- rore. » Précédemment, Piron avait donné sous ce titre : les Huit Mariannes, une parodie de huit pièces intitulées Marianne, Il y a soixante ou soixante-dix ans, nos théâ- tres de vaude^^lle étaient très fertiles en paro- dies, et Dumersan, Désaugiers et quelques au- tres obtinrent de nombreux succès en ce genre. 584 PARODIER. — PAROLES. Le mouvement romantique de 18î50 ne pouvait manquer d'exciter la verve des faiseurs de pa- rodies, et ceux-ci s'exercèrent particulièrement sur les drames de Victor Hugo : Lucrèce Bor- gia fit naître TOgresae Borgia, On ne dit pas ce que répondit le poète. *t PAR ORDRE. )> — Voy. Spectacle par ORDRE. 86 PARTERRE. imprévus : si elle n'est pas employée en entier, le surplus sera distribué à la fin de Tannée entre les sociétaires* Art. 8. — Une demi-part sera mise en réserve pour augmenter le fonds des pensions de la société. Art 9. — Une demi-part sera employée annuel- lement en décorations, ameublements, costumes du magasin , réparation des loges et entretien de la salle , d'après les ordres du surintendant. Art. 11. — Les vingt-deux parts restantes con- tinueront d'être réparties entre les comédiens so- ciétaires , depuis un liuitième de part jusqu'à une part entière , qui sera le maximum. On voit que la situation des sociétaires de la Comédie-Française n'est pas égale au point de vue matériel, puisqu'elle peut varier d'un huitième de part à une part entière. En fait, la moindre quotité est aujourd'hui non d'un huitième, mais d'un tiers de part. On ne verra peut-être pas sans quelque in- térêt quelle était la situation respective des sociétaires de la Comédie il y a cent vingt- huit ans, en 1756. La voici : Le Grand, La Thorillièi'e, Armand, Dubreuil, Grandval, SaiTazin, Dangeville, Lanoue, M*"" Grandval, M"" Lamotte, Dangeville, Gaussin, Dumes- nil, Lavoy, Drouin, Clairon, avaient part en- tière; Dubois, Bonneval, Paulin, Préville, avaient trois quarts de part; Lekain, Belle- cour, M"*'» Beaumenard, Hus, Brillant et Guéant avaient demi -part. Cent vingt-sept ans après, c'est-à-dire en 1888, voici quelle était la proportion des jmrts entre les sociétaires de la Comédie-Française ; on remarquera que le partajje s'établit par douzièmes et demi-dou- zièmes : MM. Got, Delaunay, Maubant, Co- quelin aîné, Feb\Te, Thiron, Mounet-Sully, Worms, M""'*' Madeleine Brohan, Jouassain, avaient chacun 1 2 douzièmes, soit part entière ; M"'" Reichcmlxîrg et Baretta, 10 douzièmes ; M"*" Bartet, 0 douzièmes; MM. Laroche et et Barré, 8 douzièmes et demi ; M"*^ Riqucr et Jeanne Samary, 8 douzièmes ; ]M"° Emilie Broi- sat, 7 douzièmes et demi ; 'M. Coquelin cadet, i\ douzièmes ; M"^ Tholer, 5 douzièmes et demi ; M. Prudhon et M"** Lloyd, 5 douzièmes; :M. Silvain, M"°* Granger et Dudlay, 4 dou- zièmes et demi. Le total des parts employées était de 18 parts 7 douzièmes. PARTERRE. — Le parterre n'est plus au- jourd'hui, à aucun point de vue, œ qu'il était autrefois. Au dernier siècle, V Encyclopédie en parlait ainsi : — « C'est l'espace qui est com- pris entre le théâtre et l'amphithéâtre; les anciens l'appelaient orchestre. Mais il faut observer que chez les Grecs cet orchestre était la place des musiciens, et chez les Romains celle des sénateurs et des vestales. Parmi nous, c'est celle d'une partie des spectateurs. Le sol du parterre forme un plan incliné, qui s'élève insensiblement depuis l'orchestre où nous pla- çons les musiciens jusqu'à l'amphithéâtre. En France, les spectateurs se tiennent debout dans le parterre, et en Angleterre il est rempli de sièges ou de banquettes. On appelle aussi par- terre la collection des spectateurs qui ont leur place dans le parterre ; c'est lui qui décide du mérite des pièces : on dit les jugemens, les cabales, les applandissemens, les sifflets dn IMirterre. » Le parterre, je le répète, n'est plus ce qu'il était autrefois. Jadis il occupait tout le sol de la salle, à |)artir de l'orchestre des musiciens; aujourd'hui on le réduit à sa plus simple ex- pression , et , quand on ne le supprime pas tout à fait, on lui laisse à i)eine un quart ou un cinquième de la place qui lui était réservée, la plus grande partie du rez-de-chaussée étant maintenant occupée par les fauteuils ou stalles d'orchestre. Jadis il était debout, comme on le voit encore dans la plupart des théâtres d'Ita- lie ; aujourd'hui il est plus ou moins commo- dément assis. Jadis il était fréquenté par des hommes généralement bien élevés, de médiocre fortune, mais prenant au spectacle uu plaisir vif et sincère, artistes, gens de lettres, Ra- diants, commerçants, bons bourgeois ; aujour- d'hui il n'est plus que le repaire de la claque et le i-endez-vous des mains sales. Jadis, par le fait même de sa composition, il était redouté des auteurs et des comédiens, respecté par tous, ses jugements faisaient loi, et une pièce applaudie par lui était sûre du succès, de même que ses sifflets emportaient la chute d'un ou- vrage malencontreux ; aujourd'hui il se garde- rait bien de siffler, payé qu'il est pour applau- dir, mais ses bravos intéressés n'exercent aucune influence sur le jugement du public, et exas- PARTERRE. 587 pèrent les nerfs de celui-ci plutôt qu'ils n'ex- citent sa satisfaction. Ce n'a pas été une petite affaire, au dix- huitième siècle, que la transformation dans nos théâtres du parterre debout en parterre assis. Cette transformation s'opéra tout d'abord dans la salle nouvelle que la Comédie-Française se fit construire sur les terrains de l'ancien hôtel de Condé (Odéon actuel), et qu'elle inaugura en 1782. Tout Paris en glosa dès qu'il connut le projet des Comédiens, des par- tis se formèrent pour et contre, et une polémi- que de brochures et de journaux s'établit à ce sujet. Il y avait longtemps déjà que la question était à l'ordre du jour, et qu'on en causait dans le public. Les auteurs et les acteurs peur saient, avec raison, que le parterre serait moins vif, moins turbulent, moins tumultueux, lorsqu'il serait assis ; mais, chose assez singu- lière, les amateurs de spectacle, refusant d'a- vance les présents d'Artaxerce, ne voulaient pas entendre parler d'être assis, et exprimaient avec vivacité le désir qu'on les laissât, comme jusqu'alors, se presser, s'étouffer, se bousculer à leur guise (1). Enfin, la nouvelle salle s'ou- vrit, et le parterre fut assis malgré lui. Il n'en cria que de plus belle, et ses récriminations furent d'autant plus vives que l'on construisait alors pour la Comédie-Italienne la nouvelle salle où se trouve aujourd'hui l'Opéra-Comi- que, et que tous les efforts des habitués du parterre tendaient à ce que, dans cette nou- velle salle, rien ne fût changé aux anciennes coutumes. Il obtint gain de cause, et voici ce qu'on lisait à ce sujet dans les Mémoires secrets (Bachaumont), à la date du 13 juin 1782 : — (c On a tant crié contre le parterre assis du Théâtre François, que le sieur Clairval, pré- ( 1 ) La presse était telle en effet parfois , que l'abbé de Laporte , parlant d'une œmédie de Jacques Robbe , l'Intéressé , représentée en 1682, raconte l'anecdote sui- vante : — ce A la quatrième représentation de cette co- médie, un des spectateurs voulut ôter son épée de son côté , dans la crainte qu'on ne la lui volât (c'était en- core un des avantages du parterre debout) ; mais il se trouva si serré par la foule , qu'il ne lui fut plus possi- ble de la remettre ou de la baisser devant lui ; ainsi le bras et l'épée restèrent en l'air jusqu'à la fin de la pièce. D pondérant aujourd'hui dans la troupe des Ita- liens, a fait arrêter que le parterre de la nou- velle salle destinée à ce spectacle, resteroit" debout comme l'ancien ; et voilà comme on fait tout de travers, s'écrient les frondeurs; car il n'y auroit aucun inconvénient d'asseoir les auditeurs de ce spectacle, où il n'est guère question que de juger de la musique, ce qui n'exige pas la même énergie, le mêtne enthou- siasme, que lorsqu'il s'agit de se prononcer sur les productions du génie. » La dernière réflexion peut paraître un peu barbare ; mais passons. Le parterre de la Comédie-Italienne resta debout pour quelques années encore. Au reste, le parterre de nos théâtres, tant qu'il exista (je ne parle pas du rudiment de parterre qu'on nous laisse aujourd'hui), se fit toujours remarquer non seulement par son es- prit et sa gaîté, par ses saillies gouailleuses, mais encore par sa turbulence, sa surexcitation nerveuse, et quelquefois par un esprit tyran- nique qui allait jusqu'à la cruauté. On a beau- coup parlé du « plaisant du parterre », ce type symbolique qui a laissé de si curieux souvenirs de son existence, et son tour viendra tout à l'heure ; mais le parterre, pris en masse, ne serait pas moins intéressant à étu- dier, et, à l'occasion, il agissait comme un seul homme, et avec un ensemble, un esprit d'à- propos, parfois un courage \Taiment prodi- gieux. Le parterre a été, pendant près de deux siècles, le témoin ou l'acteur de scènes tantôt plaisantes, tantôt touchantes, tantôt tragi- ques, dont malheureusement le récit me con- duirait trop loin. Et ces scènes ne se produi- saient pas seulement à Paris, car le parterre des théâtres de nos grandes villes : Rouen, Lyon, Bordeaux, Marseille, Montpellier, ne le cédait en rien sous ce rapport à la capitale. Aussi bien, je ne puis résister au désir de rap- porter le récit suivant, dont le parterre de Bordeaux fut le héros, et qui est assurément caractéristique : Le parterre de Bordeaux était un des plus tu- multueux; souvent comiques, les turbulences de cet auditoire méridional s'élevaient parfois jusqu'à 588 PARTERRE. la tragédie. Un jour, une jolie actrice, connue sous le nom de mademoiselle Lanlaire , manqua son en- trée d'une demi-heure , et en véritable enfant gâ- tée reçut fort mal les témoignages de mécontente- ment du public. Celui-ci se fâcha de plus belle , et 8^ obstina à vouloir une satisfaction qu'on s'obstina à lui refuser. De là tapage et sifHets chaque soir ; de là aussi inter^'cntion active des troupes du gou- verneur, qui avait ses raisons particulières pour protéger la belle. Les sifflets et les cris interdits, on trouva autre chose pour les remplacer. Dès que mademoiselle Lanlaire paraissait , tout le monde se trouvait subitement enrhumé; on toussait, on cra- chait , on se mouchait, on étornuait ; mais la prison fit justice de tous ces rhumes de cer^•eau. Enfin l'un des conspirateurs s'avisa d'apporter au spec- tacle un jeune caniche caché sous ses habits : aus- sitôt que l'actrice se montre, il pince la bête qui remplit la salle de piaillements plaintifs, et tout le parterre de crier en chœur, les yeux parfaite- ment tournés vers la scène : ^l bas la chienne! à la jHjrte^ lu chienne! A peine rccomraence-t-elle à parler, que les piaillements et les cris reprennent de plus belle, après quoi le conspirateur lâche son caniche, pour ne pas être surpris. Harangue du ré- gisseur; mademoiselle Lanlaire, qui s'était retirée, a le courage de reparaître ; un brutal lui jette un soulier à la tête. Cette fois , on cerne le parterre , qu'on fait évacuer par une seule issue : l'homme au soulier ne pourra échapi)er. Le premier qui se présente n'est chaussé que d'un pied : s'écrie le soldat de droite, qui le voit. Mais le se- cond n'a qu'un soulier non i)Ius. « Le voilà! » fait le soldat de gauche, a Non, c'est celui-ci, » dit un autre soldat , en happant au collet le troisième , qui s'avance un pied chaussé et l'autre nu. Tout le parterre s'était déchaussé le pied gauche : il fallut bien laisser passer tranquillement le parterre. Il est certain qu'autrefois le parterre était spirituel, et Ton a recueilli ses Iwns mots, ses boutades, avec une complaisiince qui n'a rien d'excessif. Quelcjues exemi)les pourront donner une idée de ce ({u'était ce fameux plaisant du parterre, être anonyme et insaisissable, dont les saillies pleines d'à-propos ont plus d'une fois mis auteurs et acteurs dans le plus cruel embarras, entraînant avec f,^1Îté la chute des uns, faisant avec saufç- froid le désespoir des autres, et n'ayant d'ailleurs, il faut le consta- ter, pas plus d'égards pour les jifrancLs (|ue pour les petits, téinoij^nant de la même irrévérence pour les hommes dejxénie que pour les inconnus. I A la première représentation d'une tragédie de Voltaire, Adélaïde Dugu^sclin^ l'un des personnages, s'adressant à Coucj, avait à lui dire : Es-tu content, Ck)ucy? un spectateur, peu satisfait jusque-là, s'écrie aussitôt : Coaci-couci, et ce mot faillit faire tomber la pièce. C'est Voltaire lui-même qui nous apprend qu'à une autre de ses tragédies, Marianne ,, an moment où Tactrice portait à sa bouche la coape empoisonnée, un farceur 8'a\isa de crier tout haut : La reine boit ! ce qui causa par toute h salle un rire inextinguible. L'auteur, jx)ur en- ter le retour de pareil fait, crut devoir chan- ger son dénouement. La première, — et unique, — représentation d'une bleuette de Chevrier, la Reviie des Théâ- tres, fut arrêtée net, à la Comédie-Italienne, par un incident de ce genre. La satisfactiou du public était loin d'être générale, lorsqu'un des personnages de la pièce , s'adressant à un autre (jui entmit en sccMie, lui dit : Quel motif en ces lieux vous fait porter vos pas V à quoi l'autre répond : Je viens tirer un auteur d'embarras. Ma foi, il était temps! dit alors une voix dans la salle. — Il fut impossible de continuer. Dans une comédie de LaMorlièrc, la Créole ^ un valet, apivs avoir fait à son maître la des- cription d'une fête, lui demandait ce qu'il en pensait, et celui-ci lui répondait : : ;* *i; • I r réduction au piano de la partition d'orchestre, comprenant toutes les parties de chant et nn résumé de Torchcstre traduit en partie de piano, et aussi la réduction pour piano seul de toutes les parties de chant et d'orchestre. La partition complète prend le nom de grande partition^ celle où l'orchestre est remplacé par un accom- pagnement de piano celui de partition pour chant et piano ^ et enfin la transcription pour piano celui de partition pour piano seul, PAS. — Dans les ballets, dans les divertis- sements dansés, tout ce qui forme un fragment séparé, exécuté par un ou plusieurs danseurs en dehors de l'ensemble du corps de ballet, constitue ce qu'on appelle un pas. Il y a des pas de deux, de trois, de quati'e, de cinq, de six. Quand le pas est court, et dansé par une danseuse ou un danseur seul, il prend générale- ment le nom d'écho. — On donne aussi le nom de pas à chacun des mouvements que le dan- seur exécute avec ses pieds, et qui sont différen- ciés, en raison de leur nature, par une déno- mination particulière : coupé, chassé, jeté, assemblé, fouetté, etc. PASCARIEL. — Un des types de l'an- cienne comédie italienne. C'était encore, comme Brighella, Scapiu et tant d'autres, un valet hardi, fourbe et glouton, ainsi que nous l'apprend une sorte de monographie populaire : — est réputé «: mauvais pensionnaire, » au con- traire, celui qui se montre difficile à vivre, toujours prêt à se roidir contre les demandes les plus légitimes, et qui en aucun cas ne saurait faire preuve de souplesse ou de complaisance. PERCHE (La). — Exercice d'acrobates, pendant lequel un homme tient en équilibre une longue perche au haut de laquelle grimpe un autre homme ou un enfant, qui se livre, au bout de ce bâton, à des exercices surprenants d'adresse et d'agilité. PÈRES DINDONS. — Classe de rôles d'hommes vieux et ridicules, auxquels on donne aussi la dénomination de ganaches (Yoy. ce mot), et qui rentrent dans l'emploi des grimes. PÈRES NOBLES. — Emploi de comédie, dont le caractère est déterminé par son nom. Les Pères nobles sont des rôles marqués qui , sans exclure le comique, exigent de la dignité et du maintien. Comme faisant partie de cet emploi, on peut citer les rôles suivants : Gé- route du Menteur, Esope (ï Esope à la cour (Boursault), M. de Melcour de la Mei'e jalouse (Barthe), Lycandre du Glarieux (Destouches), Baliveau de la Mètromanie (Piron), Géronte du Joueur (Rcgnard), Vanderk père du Philo- sophe sans le savoir (Sedaine), le Marquis de 3félanide (La Chaussée), etc., etc. Dans le ré- pertoire moderne, le Duc de Philiberie, Yan- derk père du Mariage de Viclorine, Verdelet du Gendre de M, Poirier, sont des pères nobles. Comme le burlesque trouve place en toutes choses, il arriva ceci, à l'époque de la Révolu- tion, que la qualification de pères fiobks étant considérée comme séditieuse, on donna pendant un certain temps à cet emploi celle de « pères sérieux, » qui d'ailleurs était parfaitement acceptable. PÉRIPÉTIE. — Au point de vue doctrinal, DICTIONNAIBE DU THÉÂTRE. la péripétie, dans une action dramatique, n'est guère autre chose que ce que nous appelons le dénouement. Les anciens apportaient beaucoup de précision dans les divisions théoriques du poème dramatique, et les règles qu'ils ont don- nées de la péripétie sont à peu près identiques à celles de la catastrophe (Voy. ce mot), qui n'est autre chose que l'incident suprême par lequel est amené le dénouement. Chamfort Ta très bien dit : « La péripétie est proprement le changement de condition, soit heureuse ou malheureuse, qui arrive au principal person- nage d'un drame, et qui résulte de quelque reconnaissance ou autre incident qui donne un nouveau tour à l'action. Ainsi la péripétie est la même chose que la catastrophe, à moins qu'on ne dise que celle-ci dépend de l'autre, comme un effet dépend de sa cause ou de son occasion. » Aujourd'hui, où la poétique dra- matique est singulièrement plus compliquée que dans l'antiquité, où les vieux moules ont été depuis longtemps brisés par des mains puissantes, où l'action scénique ne brille plus par la simplicité, mais souvent, au contraire j par une accumulation prodigieuse d'incidents de toutes sortes, nous n'avons plus \b, péripétie seulement, mais parfois plusieurs péripéties dans le même ouvrage, par lesquelles semble amené un dénouement qui fuit toujours. Toutefois, comme une action dramatique doit infaillible- ment se dénouer, il se trouve toujours un inci- dent final qui produit ce résultat, et dont l'effet est le même que celui de l'antique péripétie. PERSONNAGES. — Tous les individus mis en scène dans une œuvre dramatique, tous ceux qui prennent une part quelconque à l'ac- tion imaginée par l'écrivain, part importante ou accessoire, fonnent les personnages de la pièce représentée. Chaque personnage est con- fié à un acteur ou à une actrice, qui est chargé de le personnifier devant le public et d'en rendre le caractère avec tout le naturel , toute la vérité possibles. PERSONNEL. — Le personnel d'un théâ- tre varie de nature et d'importance, selon, l'importance et la nature du théâtre lui-même. Dans certaines petites villes de province, ou 88 59^ PERSONJÏEL. verra ce personnel se réduire à une quinzaine chacun à leur poste. On éclaire alors le théâtre, où d'artistes composant la troupe, plus quatre ou PEUR. — PHENOMENE. 595 finesse et la blancheur inaccoutumées semblaient attester que le recmtement de la figuration s'était opéré dans d'autres classes de la population. Tout le personnel des choristes, hommes^ fem- mes et enfants, arrive à son tour et monte s'habil- ler. C'est encore une centaine de personnes ; puis , pour les ouvrages où le ballet est en scène dès le commencement, comme Guillaume Tell, Faust ^ etc., on voit entrer tout le personnel des danseuses, personnel doublé par la présence des mères, qui ont le droit d'accompagner leurs filles, et des caméris- tes qui suivent les premiers et les seconds sujets. A leur heure sont amvés les réijhseurs, les chef h PHYSICIEN. — C'est l'un des uoms que l'on donne aux escamoteurs, aux prestidigita- teurs (Voy. ces mots), à tons ceux qui donnent des séances de magie blanche on de physique amusante. Ou a. vu en ce genre des hommes d'un taleut très réel. L'un des premiers qui se PHYSIQUE AMUSANTE. — PIÈCES BURLESQUES. 597 sont fait en France une grande réputation est le fameux Cornus, qui, vers la fin du dix-hui- tième siècle, faisait courir tout Paris : — « Le sobriquet de Comus (a dit M. Léon Lagrange dans son intéressante étude sur les Vernet) cache un estimable physicien, Nicolas-Philippe Ledru, à qui ses séances de physique amusante avaient fait une réputation. Ledru fut un de ces êtres hybrides, mi-saltimbanques et mi-sa- vants, qui semblent instruire en amusant, ce qui leur permet de prétendre à amuser les gens d'esprit. Il eut la bonne fortune d'être nommé professeur de mathématiques des enfants de France; mais son principal titre à Tattention de la postérité, c'est qu'il a le premier intro- duit dans le répertoire de la physique amusante les effets surprenants de la fantasmagorie, de Télectricité et du magnétisme. Jouas, autre physicien d'un ordre inférieur, qui donnait pu- bliquement au Vauxhall de la foire Saint-Ger- main des séances d'escamotage très suivies des fils de famille, a compte aussi, parmi ses clients et ses élèves , Joseph et Carie Vernet. » Un autre physicien devait ac(iuérir de nos jours une véritable célébrité, par l'adresse, la sûreté, la grâce et l'étonnante habileté qu'il déployait dans l'exécution de tours vraiment surprenants : c'est Robert-Houdin, dont les fameuses Soirées fantastiques, qui justifiaient leur titre, firent pendant quinze ans courir tout Paris, d'abord au Palais-Royal, où il s'ins- talla vers 1845, ensuite au boulevard des Ita- Hens, où la petite salle primitivement occujiée par lui Test encore aujourd'hui par un de ses successeurs. Il est vrai que Robert-Houdin, ar- tiste non seulement ingénieux, mais fort ins- truit, appelait la physique et la mécanique à son aide, et qu'il obtenait par l'emploi de l'une et de l'autre des effets prodigieux et qui sem- blaient tenir du surnaturel. Il ne paraît pas possible qu'on puisse faire plus et mieux que ce praticien extrêmement distingué, PHYSIQUE AMUSANTE. — On donne le nom de séances de physique amusante aux séances de magie blanche, d'escamotage, de prestidigitation que donnent des gens souvent très habiles en ce genre et dont quelques-uns méritent le titre d artistes. PIECE. — Tragédie ou opéra, vaudeville ou comédie, drame ou féerie, opérette ou paro- die, tout ouvrage représenté sur un théâtre quelconque reçoit la qualification générique de pièce, « C'est une jolie pièce, » dira-t-on ; ou bien : « la pièce nouvelle ne vaut pas le dia- ble. » Toutefois, il est à remarquer que cette dénomination n'est employée que pour les ou- vrages parlés ou chantés , et qu'on ne la voit guère appliquer aux ballets ou aux pantomimes. Ici, en effet, il n'y a plus de pièce, à propre- ment parler ; il n'y a qu'une action, un scénario. Il y a de bonnes pièces et de mauvaises pièces ; c'est là surtout ce qui différencie les unes des autres. Lorsqu'un théiitre joue dans la même soirée deux pièces, dont l'une courte et l'autre fort importante , celle-ci est appelée la grande pièce et celle-là lu petite pièce; on dit aussi delà grande pièce qu'elle est la pièce de résistance, celle qui est appelée à soutenir la recette, et si en effet elle a don d'attirer la foule et de plaire au public, elle devient la pièce à succès. Tout au contraire, quand un théâtre lance une pièce de quelque importance au moment des grandes chaleurs de l'été, c'est qu'il compte médiocre- ment sur sa réussite, et l'on dit alors que c'est une pièce sacrifiée. PIÈCE REÇUE A CORRECTIONS. — Voy. Corrections (Pièce reçue à). PIÈCES A ARIETTES. — Ce sont nos premiers opéras-comiques, qui parurent à l'an- cien Opéra-Comique et à la Comédie-Italienne à partir de 1752. A cette époque, on donnait le nom d'opéras-comiques à des pièces qui avaient la forme du vaudeville de nos jours et de la parodie, et dans lesquelles tous les cou- plets étaient chantés sur des airs connus ; pour jque les pièces du genre nouveau ne fussent point confondues avec celles-ci et pour faire connaître au public que la musique, que les « ariettes » en étaient nouvelles, on les annon- çait sous la qualification de pièces à ariettes, qu'elles conservèrent pendant plus de vingt- cinq ans. PIÈCES BURLESQUES. — On connaît 598 PIÈCES DE CIRCONSTANCE. — PIÈCES A FEMMES. un certain nombre de pièces burlesques, sé- rieuses par la forme, grotesques par le fond, qui , sous ce rapport , se rapprochent de la pa- rodie, quoiqu'en général elles aient été écrites sur des sujets d^imagination. Il faut signaler en ce genre la Mort de Goret, tragédie burles- que de Delorme, donnée à l'ancien Opéra-Co- mique en 1753, et qui semble être une imita- tion comique d'Andromaqite; le Pot de chambre cassé, « tragédie pour rire ou comédie pour pleurer, » imprimée en 1749 et qu'on a attri- buée tantôt à Gaubier, tantôt à Grandval père ; la plupart des vers de celle-ci étaient empruntés à diverses tragédies célèbres, dont elle formait une sorte de critique ; les Fureurs de Vamour, tragédie burlesque de Philidor, l'un des classi- ques du genre, représentée en l'an VI sur le théâtre des Jeunes- Artistes; Titus ou Savon- nette et Toupet^ ou la Mort de Peignoir, ou le Repentir de Lahuppe, ou les Perruquiers, a pe- tite tragédie sans prose en 5,854 pieds, sérieuse si l'on veut, }d de Charrin, représentée en 1806 au théâtre des Troubadours, etc. Quant à la pièce bien connue de M"*^ Deshoulières, la Mort de Cochon, elle n'est guère burlesque que par son titre. Cochon étant le nom du chien de M. de Vivonne, dont elle tniçait une sorte d'oraison funèl^re. PIÈCES DE CIRCONSTANCE. — Vov. A-PROPOS. PIÈCES EN ÉCRITEAUX. — Jusqu'à la Révolution, les grands théâtres ne cessèrent de persécuter leurs rivaux moins puissants, soit pour les pressurer, soit pour réduire aux plus strictes limites ce qu'ils considéraient comme une concurrence. Les théâtres de la Foire, et particulièrement l'Opéra-Comique , eurent sin- gulièrement à souffrir de cette suzeraineté exercée sur eux, et qui se traduisait par des chi- canes incessantes. C'est ainsi que, vers 1710, Li Comédie-Française fit défendre à tous ces petits théâtres de jouer aucunes pièces dans lesquelles on parlerait, soit par dialogues, soit par monologues. !Mais les acteurs forains, tou- jours habiles à éluder les difficultés, et ne vou- lant pas être absolument réduits à jouer la pantomime, imaginèrent un moyen ingénieux. Ils se firent faire des pièces tout en couplets, et firent tracer ces couplets sur des écriteaux, que chaque comédien présentait à son tour au public pour expliquer la situation ; puis, ce moyen étant gênant, ils finirent par faire des- cendi'e les écriteaux du cintre ; l'orchestre jouait l'air, et bientôt les si)ectateur8 prirent l'habi- tude de chanter eux-mêmes, en chœur, le cou- plet qu'ils pouvaient lire. On assure que les deux auteurs, aujourd'hui complètement ou- Miés, qui firent les premières pièces en écriteaux, s'appelaient Rémy et Chaillot ; le fameux abbé Pellegrin en écrivit aussi plusieurs; mais les écrivains les plus féconds en ce genre furent les trois collaborateurs presque inséparables : Le- sage (l'immortel auteur de Oit Blas, qui était le fournisseur attitré des théâtres de la Foire), Fuzelier, le futur rédacteur en chef du Mercure de France, et d'Orne val. L'usage des pièces en écriteaux dura dix années environ, et, comme singularité sans doute, on en donna encore plus tard quelques-unes de loin en loin , même lors- que la faculté de parler et de chanter fut rendue (moyennant finance) aux acteurs forains. Voici les titres de quelques-unes des pièces en écri- teaux qui obtinrent le plus de succès : Arlequin aux Champs-Elysées (1710), Arlequin à la guinguette, les Fêtes parisiennes, les Aventures comiques d'Arlequin, Scaramouchepédaiit scru- puleux (1711), Arlequin rival du Docteur, le Retour d'Arlequin à la Foire ^ l'Ecole de^ Ja- loux (1712), Arlequin invisible , Arlequin roi de Sérendib (1713), la Matrone de Charenlon (1714), le Château des Lutins, le Pied de nez, Arlequin Orphée le cadet, Ariane et Thésée (1718), etc., etc. PIÈCES A FEMMES. — C'est ainsi qu'on appelle certaines pièces d'un genre particulier, pour le succès descjuelles on compte non sur la valeur de l'œuvre, qui en ce cas est toujours mince, mais sur la présence en scène d'un grand nombre de femmes ( ?) dont le seul talent con- siste à se montrer dans un costume aussi abrégé que possible, rappelant de très près celui de certaines tribus sauvages exemptes de tout préjugé en matière de vêtement. Ces exhibi- tions de chair vivante obtenaient parfois un grand succès il y a une vingtaine d'années, et PIECES A LA MUETTE. — PIERROT. 599 attiraient un public spécial. On en est revenu. 8ans être plus pudibond que de raison, il est permis de ne pas le regretter. PIÈCES A LA MUETTE.- C'est l'ancien Opéra-Comique de la Foire qui imagina ce genre de pièces, pour obéir aux injonctions des grands théâtres, dont les persécutions inces- santes lui rendaient la vie singulièrement dure. Ceux-ci lui défendaient tantôt de parler , tan- tôt de chanter, tantôt d'avoir en scène plus .d'un acteur parlant, et il devait, sous peine de mort, courber la tête devant leurs volontés. C'est dans un des moments de crise qu'il avait à subir ainsi périodiquement, qu'il se mit à jouer des pièces dites « à la muette, y> lesquel- les n'étaient probablement pas autre chose que des pantomimes, mais qu'il ne qualifiait pas de ce nom sans doute pour n'être pas confondu avec les petits spectacles de la foire, où la pantomime était jouée par des marionnettes. PIÈCES A MACHINES. — C'est le nom que l'on donna, à la fin du dix-septième siècle, à un certain genre de pièces à spectacles , à dé- cors, à trucs, qui fit fureur pendant plus de vingt ans et affola littéralement les Parisiens. Le théâtre du Marais surtout se fit une répu- tation par la richesse et la magnificence qu'il déployait pour les pièces de ce genre. Parmi les pièces à machines les plus fameuses alors, on doit mentionner Andromède et la Toison d'or, de PieiTC Corneille ; Ulysse dans Plie de Circé, les Amours de Jupiter et de Sémélé, de l'abbé Boyer ; les Amours du Soleil, les Amours de Vénus et d Adonis, de Donneau de Visé. La Psyché de Mohère, Corneille et Quinault était aussi une pièce à machines. (Voy. Féerie.) PIÈCES A SPECTACLE. — Ceci n'est pas une qualification, mais une expression qui sert à caractériser certains ouvrages dramati- ques qui, sans être toujours fondés sur l'emploi du merveilleux, exigent cependant un grand déploiement scénique. Toutes les féeries sont des pièces à spectacle, mais toutes les pièces à spectacle ne sont point des féeries. C'est ainsi que certains drames d'Alexandre Dumas, tels que Monte-Cristo, les trois Mousquetaires, le Chevalier de Maison- Rouge , étaient de vérita- bles pièces à spectacle. On en peut dire autant de presque tous les ouvrages qui composent le répertoire de l'Opéra, et dans lesquels le spec- tacle proprement dit, le spectacle des yeux, prend une extrême importance. PIÈCES A TIROIRS. — Qualification qu'on donne à certaines pièces dont l'intrigue est nulle et sans suite, et dont, volontairement et pour quelque raison tirée des circonstances, les scènes se suivent, se succèdent sans s'en- chaîner réellement, comme si chacune d'elles avait été prise dans un tiroir et simplement soudée aux autres. (Voy. Rôles a tiroirs.) PIÈCES SANS TITRE. — On en connaît au moins quatre, qui sont les suivantes iV la Comédie sans titre, de Boursault, qui n'est autre que le Meicure galant; mais lorsqu'on donna cette pièce à la Comédie-Française, en 1679, de Visé, directeur du Mercure galant, qui s'y trouvait ridiculisé, fit tous ses efforts pour la faire interdire ; le lieutenant de police La Reynie refusa d'aller jusque-là et ordonna seulement qu'à ce titre, le Mercure galant, l'auteur substituerait celui de la Comédie sans titre ^ ce qui fut fait ; 2" le Ballet sans titre, donné à l'Opéra en 1726; 3" la***, comédie de Boissy, jouée à la Comédie-Italienne en 1737 ; 4® la Pièce sans titre, de Favart et Panard, jouée la même année à l' Opéra-Comique, (c Celle-ci, dit un contemporain, fut composée à l'occasion du bruit qui couroit alors d'un fameux voleur qui voloit seul et de nuit, et que le public avoit nommé le Prince nocturne ou ténébreux. On ne voulut pas permettre que la pièce parût sous ce titre, ni sous celui du Nor^ mand dupé, et elle ne passa que sous celui de la Pièce sans titre, d PIERROT. — L'un des personnages de l'ancienne Comédie-Italienne en France, et l'un des types les plus charmants de notre pan- tomime. On a beaucoup disserté sur l'origine de Pierrot. Est-il Français ? est-il Italien ? Les avis à ce sujet sont très partagés, et l'on n'a pu arriver encore à une certitude absolue. Pour ma part, voici ce que je crois : c'est que le type 600 PIERROT. de Piertot, tout d'abord imitation da Pukt- nel/a napolitain, dont il porte presque exacte- ment le costume, n'existait pas en Italie ; mais qu'il a été imaginé en France par les comédiens italiens fixés à Paris, accommodé à notre goût, et qu'ensuite, ayant fait irruption dans nos Foires, où il était personnifié par des artistes d'un véritable talent, il s'est absolument con- formé à notre caractère, à notre génie natio- nal, et est devenu un type complètement, pu- rement et absolument français. Son nom d'ailleurs est bien français; il semble comme un diminutif ou un enjoli- vement du nom de Pierre, et Ton sait que Molière l'employa dans son Don Juan. Quel costume portait-il dans ce chef-d'œuvre ? c'est ce qu'il serait sans doute fort difficile d'établir. Toujours est-il que voici la note qu'on trouve dans V Histoire de Panden Théâtre- Italien de- puis son origine en France (par les frères Par- fait), concernant notre personnage, et l'on verra, en la lisant, que ce n'est pas siins raison que nous avons cité Molière et son Don Juan : Joseph Giaraton ou Grcraton , né à Ferrare , vint à Paris à titre de gagiste employé dans la troupe italienne. Après quelques années de services on lui fit faire quelques relies de peu d'importance. On le trouve employé dans la pièce de /a Suite du, Festin de Pierre^ représentée le 4 février 1673, sous le nom et l'habit de Pierrot. Le caractère de ce rollc est celui du Polichinelle Néapolitain un peu dé- guisé. Effectivement, dans les comédies néapoli- taines, au lieu d'Arlequin et de Scapin, on y admet deux Polichinelles, l'un fourbe et intriguant, et l'autre stupide et imbécille. Le dernier est le ca- ractère de Pierrot. Gératon représenta à titre de ga- giste ce rolle jusqu'en 1684, qu'il fut reçu au nom- bre des acteurs : et dans cette même année il joua dans la comédie de V Empereur dans la Lune le personnage de Pierrot en françois. Il s'acquitta de cet emploi, soit en italien soit en françois, toujours au gré du public, jusqu'en 1697, qui est l'époque de la suppression du théâtre italien. Plus tard, lors de la reconstitution de la Comédie-Italiemie en 1717, Dominique, fils de l'ancien et célèbre Arleciuin de ce théâtre , pa- rut à son tour sur cette scène sous le nom et le •costume de Pierrot, qu'il (juitta d'ailleura bien- tôt pour se consacrer au ixîrsonnage de Trive- lin. Mais déjà Pierrot avait fait fortune à k Foire, où il s'était installé en comj^agnie d'Ar- lequin, du Docteur, de Scaramonchc et de Colombine, et où il était représenté par des acteurs excellents, tels que Boger, Bellonî et Hamoche. Son succès même était tel qu^il avait envahi la province, car les frères Parfait men- tionnent un Pierrot de bcaucoap de talent, nommé Maganax, qui ne parut jamais à Pari? et qui faisait fureur sur les théâtres de pro- vince, particulièrement à Toulouse. Pierrot cependant reparut, par iutermitten- ces, à la Comédie-Italienne, car on cite nn acteur nommé Sticotti, qui s'y faisait vivement applaudir entre 1730 et 1700, et Ton sait que Sedaine et Grétry introduisirent ce personnage dans leur 2'ahleau parlant, où Clairval le per- sonnifiait avec une grâce exquise. Mais il était réservé à notre dix-neuvième siècle d'assister à la plus grande gloire de Pierrot, gnice au talent merveilleux d'un ar- tiste incomparable qui, en s'emparaut de ce t}'pe, sut le rendre légendaire et, dans un théâtre infime, s'y fiiirc admirer de tout Paris et s'attirer les éloges des comédiens les plus célèbres. C'est sur cette petite scène des Fu- nambules, qui n'était guère autre chose qu'âne logedesaltimlmnques, queDebnreau ressuscita, aux environs de 18o0, ce type alors un peu négligé, et qu'il sut, avec son jeu à la fois plein de grâce, de naturel et de vérité, le ren- dre si plaisant, si intéressant et si attrayant. C'est aux Funambules que Pierrot, avec sa grande casaque à gros boutons, son large pan- talon fiottant, ses souliers blancs comme le reste, son visage enfariné, sa tête couverte d'un serre-tôte noir qui tranchait sur l'ensem- ble, c'est là que Pien'ot fit véritablement fb- reur, avec ses allures dégingandées , sa bonho- mie naïve, sa niaiserie sincère comme celle de Jocrisse, ses ahurissements insensés, ses ma> ladi-esscs immenses, ses joies d'enfant et ses chagrins d'un effet si comique. Pendant vingt ans. Pierrot fut une des originalités les plus piquantes et les plus recherchées de Paris, grâce à l'excellent comédien qui, sans jamais dire un mot, sans prononcer une syllabe, savait expri- mer tous ses sentiments, toutes ses pensées, et faisait |)asscr tour à tour et à sa volonté le PIROUETTE. — PITRE. COI spectateur de la frénésie du rire aux larmes sincères que provoquait l'expression touchante et émue d'une douleur poignante. Ceux qui n'ont pas vu Debureau ne peuvent se flatter de connaître Pierrot, bien que ce personnage ait été représenté aussi avec un réel talent par un autre artiste distingué, Paul Legrand, au gentil petit théâtre des Folies-Nouvelles, de- venu depuis le Théatre-Déjazet. Sous la figure de Debureau, Pierrot enchanta tous les artistes et tous les lettrés de Paris, et Charles Nodier, et Jules Janin, et M. Champfleury, et Jal, et Théophile Gautier... Justement ce dernier, dans sa jolie comédie Pierrot posthume^ fait faire à son héros un récit qui peint son caractère de la façon la plus charmante, et par lequel je voudrais tenniner cet article. On a fait croire à Pierrot qu'il est mort : dans sa niaiserie bo- nasse il en demeure persuadé , et voici comme il se lamente lui-même sur sa perte : Je suis mort ! Je m'explique à présent pourquoi j'ai le teint blême. Pauvre Pierrot, aUons, conduis ton deuil toi-même. Mets un crêpe à ton bras, arrose-toi de pleurs, Prononce le discours , et jette-toi des fleurs ; Orne ton monument d'un ci-git autographe, Et , poète posthume , écris ton épitaphe. Qu'y mettrai-je?... voyons... Cependant, s'il était permis à Polichinelle de parler et de.... chanter, ce n'était qa*aQ prix d'une de ces entraves tyranniques qu'on imposait toujours aux petits théâtres : il devait avoir constamment dans la bouche oe^Jb^ pra- tique, qui, faite pour le gêner, a finf par don- ner à son langage un caractère si excentrique et si curieux. On sait ce qu'est la pratique : une sorte de petit sifflet de métal qai semble infliger à celui (|ui s'en sert un enrouement perpétuel et excessif. Peut-être tout le monde ne se rappelle-t-il pas l'aventure dont, à ce sujet, Charles Xodier a été le héros, — on h victime. Xodier adorait les paillasses, les pa- rades, les marionnettes et Polichinelle, et il faisait de longues stations devant les baraqnei des uns et des autres. Un jour, s^arrêtani à celle de Polichinelle, et causant, comme cela lui arrivait quelquefois, avec le « directeur i de la petite troupe de bois, il lui demanda quelques renseignements sur la pratique'etsor la façon dont il s'en servait. Celui-ci ne se fit pu prier pour le satisfaire, et, donnant nne leçon à Nodier, lui montra les moyens de parier intelligiblement avec cet instrument. Nodier cherchait à profiter des conseils, s^exerçaiten conscience, et, tout en mettant et rem^itant la pratique entre ses dents, dit au bonhomme qu'il s'étonnait qu'on n'avalât pas quelquefois cet engin minuscule. — <( Oh ! réplique celoi- ci ; ça arrive bien quelquefois, mais ce n*est pas dangereux. Tenez, celle que vous tenez là, je l'ai déjà avalée trois fois, d On voit d'ici la tête de Nodier ! Au reste, la pratique est de tradition avec Polichinelle, et l'on s'étonnerait autant de le voir sans elle que de voir Arlequin sans batte ou Crispin sans son manteau. Nous vous d'ailleurs maintenant où en faire remon- ter l'origine. Ce qui est moins facile, c'est de connaître l'origine des hautes échasses dont le Polichinelle en chair et en os, le Polichinelle de la pantomime, se servait souvent, et avec lesquelles il dansait si adroitement et d'une façon si singulière (1). J'ai eu beau chercher, (1) Cette danse, avec ou sans échasses, est caracië* POLONAISE. 611 j'avoue que je n'ai pu arriver à percer ce mystère Quo qu il eu soit Polichinelle reste glo neux populaire et lavmc ble Vous pouvez cent nner de 1 aller voir chaque jour boub les qa nconces des Tu lenea dans aa petite bara que et vous le trouverez toujours a\ec sa pratique et son gros bâton fendn, cognant sa femme battant les gendarmes rossant le corn missaire frappant sur tout et sur tous jus qn au moment ou il finit par être pendu pat le bourreau ou emmené par le diable Le tout aux nres et aux applaudissements d une foule m gnonne de bambins et de fillettes auxquels {KtitinlC de Pallchlnelle, i'iiftit uns TigaclM da rVdrn ilt h Fttn, pnbUé ei il procore une de ces joies que l'enfance n'ou- blie pas et qui deviennent pour l'homme un de ses souvenirs les pins chers. riitique et traditioimeUe ; elle s'exécute inr aa air tpé- cUl, rythmé à d«aK-qnati«, et qui & nom la Pelkhi naïc POLONAISE. — La polonaise (polatca, en italien), dont le nom indique suffisamment l'origine, est un air soit chanté, soit dansé, dont l'allore est pleine de brillant et de no- blesse, et qui est écrit en rythme ternaire sur un raonvement modéré. Son accent caractéris- tiqae est obtenu par une syncope qui relie, le 612 POLYMNIE — PORTER. premier au deuxième temps. La polonaise avait une grande vogue à la fin du dix-huitième siècle et au commencement de celui-ci, et on Ta parfois introduite dans les opéras. Meyer- beer en a placé une superbe dans sa musique de Struemie. POLYMNIE. — L'une des neuf muses ré- vérées par la Grèce antique. Elle présidait à la poésie lyrique et à la pantomime, et quelques écrivains lui attribuaient l'invention de l'har- monie. Certains monuments antiques la repré- sentent debout, la main droite élevée, envelop- pée dans sa draperie, et son menton reposant dessus; d'autres la figurent avec une simple couronne de fleurs dans les cheveux, qui sont modestement disposés ; « les perles leur prêtent parfois leur candeur, et parfois aussi les pierre- ries leur éclat ; elle est habillée d'un vêtement blanc sur lequel le laurier d'Apollon tombe en élégantes guirlandes. Elle tient aussi un sceptre de la main gauche, non celui de la royale Melpomène, du commandement, mais le scep- tre qui soumet les esprits, et impose l'admira- tion à ceux qu'il subjugue. » Quelquefois enfin un mas(]ue est à ses pieds, et c'est alors qu'elle est la muse de la pantomime, et justifie un vers d'Ausone dont le sens exact est celui-ci : Polymnie exprime tant (U la main, et parle du geste. PONT-NEUF. — C'est sous ce nom qu'on désigne les vieux airs de vaudeville ou de chanson qui sont depuis longtemps entrés dans le domaine public et dont chacun connaît les titres ou les timbres (Voy. ce mot). Les airs de nos vieilles chansons : Au clair de la lune, M, de Malbrough, J'ai du Ion tabac, consti- tuent autant de ponts-neufs, de même que ceux connus sous ces titres : Dans les gardes fran- çaises. Que ne suis-je la fougère? Va-Ven voir s'ils viennent^ Jean^ etc. Cette appellation de pont-netif vient de ce qu'autrefois, particulière- ment au dix-septième siècle, le Pont -Neuf était le rendez-vous de tous les chanteurs am- bulants de Paris, qui débitaient là leur mar- chandise , et faisaient entendre à tout venant les airs faciles et naïfs de ces chansons , qu'on baptisa de la sorte pour les caractériser. Aussi , lorsqu'on veut parler d*un air plat, trivial, sans accent et sans couleur, on dit dédaigneu- sement : (7est un pont-neuf. Pendant pins d'an siècle, les ponts-neufs classiqaes ont défrayé à eux seuls toute la musiqae de nos théâtres de vaudeville. PONT VOLANT. — Les ponta volante sont des ponts très légers, placés dans les des- sus du théâtre, parallèlement à chaque ruê du plancher de la scène , pour permettre aux ma- chim'stes de passer d'un côté à Paatre de celle- ci afin d'aider et d'activer la manœuvre des décors. Ces passerelles légères et branlantes ne sont point sans offrir certains dangers, et il faut l'adresse, l'habitude et la hardiesse des machinistes pour oser s'y aventurer comme ik le font chaque jour. — On trouvera, an mot Cintre, la description du pont volant. PORTE T)E COMMUNICATION. — On ne communique de la scène à la salle d^an théâtre, et vice versa, que par une ou deux portes situées de l'un ou des deux côtés de la scène, à l'entrée des coulisses, et qui reçoivent le nom de pmtes de communication. Ouvertes pendant le jour, pour les besoins incessants du service, ces portes sont strictement fermées à rheure du spectacle, et ne laissent passage qn^an directeur et aux chefs de l'administration, qui seuls en possèdent la clef. PORTER. — Au théâtre, on dit d'une scène, d'une situation, d'un effet, qu'ils « ont porté, » lorsqu'ils ont produit sur le spectateur l'im- pression qu'on en attendait et qu'ils ont atteint le but auquel on visait. « Telle scène a bien porté, y> dira-t-on à l'issue d'une première re- présentation, ou : « tel effet n'a pas porté. > Ce mot comporte encore au théâtre une au- tre signification. On dit d'un comédien d'un talent secondaire, mais qui, chargé d^un très beau rôle, y a produit beaucoup d'effet, qu' « il a été porté par son rôle. » Cela veut dire que le public l'aurait accueilli avec beaucoup moins de chaleur si le rôle eût été moins brillant, parce qu'il n'y aurait pas trouvé l'occasion d'effets relativement faciles et tout indiqués. PORTER LE COSTUME. — Savoir bien 1 f. t ■I l I I PORTANT. — PRATIQUE. 615 porter le costume, quel qu'il soit, avec aisance, avec grâce, avec goût, n'est pas Tune des moin- dres qualités du comédien. Se mouvoir avec facilité sous le casque et la cuirasse d'un preux, avoir la noblesse que comportent l'habit à éventail et l'ample perruque à la Louis XIV, la grâce qui caractérise l'ajustement Louis XIII, la désinvolture que réclament le costume Louis XV et le costume Louis XVI, ne paraî- tre point gêné sous la robe d'un moine, sous le pourpoint d'un reître ou sous l'habit d'un paysan, et donner à chaque personnage la tournure, la démarche et les manières qu'exige son habillement particulier, ce n'est point là chose aisée et qui s'acquière du premier coup. Aussi n'est-ce pas un éloge banal à faire d'un comédien que de dire qu' « il porte bien le cos- tume. y> PORTANT. — Voy. Châssis (Faux). POSITIONS. — En termes de danse, on appelle positions les dififérentes façons dans lesquelles le danseur peut être placé lorsqu'il va commencer un pas. POSTSCENIUM. — Les Romains don- naient ce nom à la partie du théâtre située derrière la scène, celle où se retiraient les ac- teurs pour changer de costume, se reposer et se dérober aux regards du public. Le postsce- nium , sous ce rapport, semble avoir rempli, dans les théâtres antiques, tout à la fois l'office du foyer et des loges dans nos théâtres mo- dernes. POT POURRI. — On appelle ainsi ime longue chanson dont chaque couplet est écrit sur un air différent et connu. Littérairement, le pot pouiTi est une chanson plaisante, et le plus souvent une parodie; musicalement, c'est une suite de ponts-neufs. Ce genre était très en vogue il y a soixante ou quatre-vingts ans. Désaugiers a écrit des pots pourris qui sont restés célèbres (1). (1) On voit qu'au point de vue mnsical, le pot pourri n'est qu'un mélange, une sorte de macédoine. Cest pour cette raison que son nom est emprunté à un pro- cédé culinaire du même genre, que Tabbé Tuet rapporte POULAILLER. — Désignation familière qu'on appliquait naguère à la galerie supérieure de certains théâtres populaires, celle qui re- cevait presque officiellement le nom (la paradis (Voy. ce mot). POURTOUR. — Dans certains théâtres, où le tour de l'orchestre et du parterre n'est pas occupé par la série de loges dites baignoires, qu'on y rencontre le plus souvent, ces loges sont remplacées par une galerie circulaire qui prend le nom de pourtour, et qui est divisée en stalles. PRATICABLE. — Un praticable est un fragment de décor en charpente, formant un exhaussement sur le sol de la scène et représen- tant soit un accident de terrain, soit une cons- truction, soit un objet quelconque sur lequel une ou plusieurs personnes peuvent monter, marcher, se mouvoir. Parfois le praticable est caché à l'œil du spectateur ; par exemple, lors- qu'il s'agit de faire voir un personnage à une fenêtre, comme Rosine au premier acte du Barbier de Séville; ici , l'actrice doit gravir un escalier pour se présenter à cette fenêtre, et cet escalier, placé dans la coulisse, est ce qu'on ap- pelle un praticable. Mais le plus souvent le praticable est placé sur la scène même ; ainsi , le pont du vaisseau de T Africaine et de celui (\!Haydée, l'escalier des Huguenots, le pont et les montagnes de Guillaume Tell sont autant de praticables. Tel de ces praticables, extrême- ment compliqué, part de l'avant-scène pour s'élever insensiblement, aux derniers plans, presque jusqu'au cintre : c'est le comble de l'art du machiniste, qui produit parfois ainsi des effets saisissants et grandioses. PRATIQUE. — C'est ainsi qu'on appelle l'espèce de petit sifflet de métal dont se sert celui des teneurs de marionnettes qui fait par- ainsi dans ses Proverbes français : — <ï C'était le bouiUi qu'on faisait pourrir de cuire , et qui était composé de bœuf , de mouton , de veau , de lard et d'un grand nom- bre de différentes herbes. C« salmigondis d'herbages et de viandes était serri à table dans le pot même où le tout avait cuit, b 616 PRATIQUE. 1er Polichinelle, et qui donne an langage de i nos grands théâtres tenaient bous leur férule celui-ci un caractère si étrange et ai particulier, tous les petits spectacles et ne montraient jaloux (Voy. Polichinelle.) Jadis, à l'époqae où j des suct^ même de Polichinelle et de ses com- pagnons de bois, ils avaient obtenu que les 1 l'aide de la pratique. De là vient surtout l'u- marionoettûs de nos foires n'obtieudraieut sage de ce singulier instrument, dont Polichi- autorîsation de parler ou de chanter qn'avec I nelle a consen-é la tradition. PRELUDE. — PREMIERS ROLES. 617 PRÉLUDE. — Aujoui-d'hui que nos com- positeurs drainatiques négligent généralement de faire précéder leurs opéras dn morceau de musique instrumentale connu bous le nom d'cfiiverlttre, et qui nous a valu de si admirables chefs-d'œuvre, ils se bornent à écrire, en guise de préface symphonique, une court* introduc- tion d'un seul mouvement, à laquelle ils don- nent souvent le nooi de prélude, et qui n'est pas autre chose en effet. — On donne aussi le nom de prélude à l'horrible charivari que, sous prétexte de s'accorder, font les musiciens de l'orchestre, dans certains théâtres, au moment où ils arrivent en vue du public et où le spec- >ai remploi d« premlen Ma. tacle va commencer. Ce bruit antimusical n'est supporté que par les chefs d'orchestre qui n'ont pas la conscience du respect dû au;^ oreilles des spectateurs. PREMIERS ROLES. — Classe de rôles d'une extrême importance, qui forment un double emploi , — pour les hommes et pour les femmes , — et qui exigent de ceux qui sont ap- pelés à remplir cet emploi, avec les qualités du comédien proprement dit, l'étoffe, l'ampleur et l'autorité. Les premiers rôles sont d'un carac- tère sérieux, souvent dramatiques, parfois très pathéti(iues, et ne peuvent être tenus que par un artiste exercé, instruit par l'expérience, et brisé à toutes les difficultés de sou art. En ce qui est du grand répertoire et pour ce qui con- cerne les hommes, on peut citer, comme types G18 PKENDRE L'ACCORD. - PRESTIDIGITATEUR. de cet emploi, Alceste du Misanthrope, don Juan du Festin de Pierre, Durval du Préjugé à la mode (La Chaussée), le comte de Tufière du Glorieux (Destouches), Almaviva du Ma- riage de Figaro, Morinzer de r Amant hourru (Monvel), Alceste du PhUinte de Molière (Fa- bre d'Églantine) ; dans le répertoire moderne, appartiennent aux premiers rôles Bolingbroke du Verre d^eau, Richelieu de Mademoiselle de Belle-Isle, Charles-Quint de Hernani. Dans le genre du drame, le type de l'emploi des pre- miers rôles est celui de Buridan dans la Tour de Nesle; tous ceux créés par Frederick Le- maître, par Bocage, par Mclingue, par Rou- vière, par M. Dumaine, doivent être classés dans cet emploi. Pour ce qui est des femmes , les deux rôles de Célimène du Misanthrope et d'Elmire de Tartuffe, bien que souvent classés dans les grandes coquettes, sont de véritables premiers rôles, au même titre que la comtesse du Mariage de Figaro, et, dans le répertoire moderne, Ma- rion dans Marion Delorme et M"*" de Prie dans Mademoiselle de Belle-Isle, Il arrive bien rare- ment que l'on trouve deux premiers rôles dans une même pièce ; cela s'est vu cependant, par exception, notamment dans Angelo, où ceux de la Tisbé et de Catarina ont été créés par M"*" Mars et M"'® Dorval. Au reste, tous les rôles établis par cette dernière, soit à la Comé- die-Française, soit aux boulevards, entre autres dans Chatterton et Trente ans ou h Vie d'un joueur, sont des premiers rôles. Il y a aussi ce qu'on appelle les PRENDRE LE THÉÂTRE. — C'est adop- ter la profession de comédien, embrasser la car- rière du théâtre. De quelqu'un qui a quitté un autre état pour se faire acteur, pour jouer la comédie, on dit qu'il a pris le théâtre, qu'il est maintenant au théâtre. PRÉPOSÉE A LA LOCATION. — C'est le nom qu'on donne à l'employée chargée, dans chaque théâtre, du ser\àce de la location des places à l'avance. (Voy. Bureau de loca- tion.) PRESTIDICtITATEUR. — Le prestidigi- tateur est un escamoteur d'une habileté supé- rieure, qui, au lieu d'exercer ses talents sur la place publique, les fait apprécier dans une salle de spectacle, devant une assemblée nombreuse et choisie. Certains prestidigitateurs sont d'ail- PRÊTRESSES DE TERPSYCHORE. — PRIX DES PLACES. 619 leurs de véritables artistes, qui parfois appel- lent à leur aide la mécanique et la physique, ce qui leur a fait donner aussi le nom de physiciens. Ayant renoncé aux tours vulgaires et simples dont se contentaient leurs ancêtres, ils ont raf- finé leur art, lui ont donné l'élégance et la grâce, et l'ont rendu tout à fait surprenant. Quelques-uns sont devenus justement fameux, et l'on sait les prodiges qu'ont opérés tour à tour CCS prestidigitateui-s qui avaient nom Pinetti, Bienvenu, Olivier, Comus, dont les « salons » ont été renommés. Comte, qui a exercé pendant trente ans ses talents dans un théâtre qui portait son nom, Robert-Houdin, qui a fait comme lui et dont le théâtre existe encore, Bosco, Robin, Philippe, Hamilton, Brunet et beaucoup d'autres que nous ne sau- rions citer. PRÊTRESSES DE TERPSYCHORE. — Sous le Directoire , à l'époque où l'Opéra était devenu, pour les gens de l)on ton , « le Temple d'Euterpe, » on ne désignait plus les danseuses de ce théâtre autrement que sous la qualifica- tion de prêtresses de Terpsychore. C'était ime suite de la manie de retour à l'antique qui avait si complètement envahi la haute société pari- sienne. PRIAI A DONNA. — Voy. Dox^a (Prima y PRIMES. — Les statuts de la Société des auteurs et compositeurs di*amatiques établissent une rémunération égale pour tous les auteurs, de la part des théâtres qui jouent leurs pièces. C'est cette rémunération qui prend le nom de droits et auteur. Mais la société n'empêche nul- lement ses adhérents d'exiger une prime lors- qu'un théâtre désire obtenir une pièce d'un auteur en renom ; cette prime, qui s'élève par- fois à cinq, dix, vingt mille francs, se trouve ainsi grossir d'autant les droits que l'écrivain doit percevoir pour la représentation de son œuvre. — Certains éditeurs, lorsqu'ils signent un traité avec un auteur ou un compositeur pour la publication d'un ouvrage nouveau, s'engagent, après lui avoir versé une première somme ferme pour l'achat de cet ouvrage, à lui payer une prime de tant si celui-ci atteint le chiffre de cent représentations. Souvent, lorsqu'il s'agit d'une œuvre lyrique, il y a trois primes successives, l'une à la cinquantième, la seconde à la soixante-quinzième, la dernière à la centième représentation. PRINCESSES. — Au beau temps de la tra- gédie , les princesses formaient un double em- ploi ^e rôles féminins , les jeunes princesses et les grandes princesses, qui aujourd'hui rentrent respectivement dans ceux de jeunes premières et de jeunes premiers rôles. Parmi les jeunes princesses se trouvaient les rôles d'Iphigénie et de Zaïre dans ces deux tragédies ; ceux d'Hermione dans Andromaque et de Camille dans tes fforaœs étaient compris dans les gran- des princesses. M"° Gaussin, M*'*' Volnais, M'^® Bourgoin ont été, à la Comédie-Française, des princesses touchantes et pathétiques. PRIVILÈGE. — C'est le nom qu'on don- nait, à l'époque où l'exercice de l'industrie théâtrale était limité et réglementé par l'ad- ministration supérieure , à l'autorisation accor- dée par elle à un particulier d'ouvrir ou d'oc- cuper et exploiter un ou divers théâtres. Être directeur de théâtre constituait en effet un pri- vilège, puisqu'il fallait pour cela l'agrément du ministre compétent et un brevet signé de lui. On disait alors d'un directeur qu'il avait obtenu le privilège de tel théâtre, de telle ville, de tel arrondissement. (Voy. Arrondissement THEATRAL, BrEVET, LIBERTÉ DES THEA- TRES.) PRIX DES PLACES AU THÉÂTRE. — Il n'est pas très &cile d'être renseigné sur ce sujet, en ce qui concerne nos anciens théâtres. Parlant des commencements de l'Hô- tel de Bourgogne et du Marais, Lemazurier s'exprime ainsi : — « On ne sait pas positive- ment combien il en coûtait, tant à la galerie qu'au parterre, pour obtenir l'entrée de ces spectacles qui commençaient ordinairement à deux heures de l'après-midi, et finissaient vers les quatre heures et demie. Vingt -trois ou vingt-quatre ans avant que des comédiens français se fussent rendus sédentaires à l'Hôtel de Bourgogne, des comédiens italiens nommés 620 PRIX DES PLACES AU THÉÂTRE. /* Gelosi, que Henri III avait fait venir de Venise, jouèrent dans la salle des États à Blois pour un demi-teston par personne, et à Paris dans riiôtel de Bourbon pour quatre sols. A la deuxième représentation des Précieuses ridi- cules, en 165i>, le prix du parterre, qui étîiit de dix sols, fut doublé en raison du grand suc- cès de cette pièce, mais cette augmentation ne fut que passagère. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'en 1G67 on payait quinze sols au parterre du théâtre du Palais-Royal occupe par la troupe de Molière': la preuve s'en trouve dans deux vers très connus de VArf jjoèù'que (1). Cette fixation sul)8ista jusqu'au 5 mars 1690 : alors le parterre fut mis à 18 sols, et le reste à pro- portion. Une nouvelle augmentation eut lieu le 10 février 1716. » Les détails les plus précis que nous possé- dions sur le point qui nous occupe sont ceux qui se rapportent à la troupe de Molière, lors- qu'elle eut quitté le Petit-Bourbon pour s'éta- blir au Palais-Royal. Ici, nous avons la série des prix des places, lesquels étaient ainsi fixés : ThéAtre (bancs sur la scène).. . 5 liv. 10 s. Billet de loge (preraicres) 5 llv. 10 s. Ampliitliéâtre 3 liv. Loges hautes (deuxièmes) 1 liv. 10 s. Loges de troisième rang 1 liv. Parterre 15 s. Une affiche rimée de l'Hôtel de Bourgogne, datée de 1()52, nous prouve que les prix étaient les mêmes à ce théâtre : Venez donc, tous les curieux! Venez, apportez votre trogne Dedans notre Hostel de Bourgogne ; Venez en foule, apportez -nous Dans le parterre quinze sols, Cent dix sols dans les galeries. Plus tard, ces prix furent augmentés, à diverses reprises, pour amener la possibilité (1) On connaît ces deux vers, célèbres en effet : Un clerc , poar quinze sols , sans craindre le holà , Peut aUer au j^arterre attaquer Attila. Mais l'écrivain fait erreur en les attribuant à VArt poé- tique; c'est dans sa Satire IX que Boileau les a placés. de la perception du droit des pauvres. A h Comédie-Italienne, vers 1740, les places de premières loges étaient à 4 livres, celles de se- condes loges à 2 livres. Sur POpéra, nous n'a- vons point de renseignements, siuon que cer- tains chroniqueurs affirment qu'en 1071, aux représentations de Pomofie, l'entrée au parterre coûtait un demi-louis d'or (11 liv. 10 sols), ce qui semble excessif. Tant que les théâtres restèrent placés sons l'autorité directe et sous la surveillance du gouvernement, le tarif du prix des places, pour cliacun d'eux, était fixé par Tadministni- tion supérieure, et aucune modificiition n*T pouvait être apportée sans le consentement de celle-ci. Aujourd'hui que l'industrie théâtrale est libre, les théâtres, à l'exception de ceux qui reçoivent mie subvention, sont absolument maîtres de leur tarif, et peuvent le modifier à leur guise. Pour donner une idée de Taugmentation qui s'est produite depuis soixante ans dans le prix des places au théâtre, nous allons faire con- naître ici les tarifs de nos deux grandes scènes littéraire et musicale, la Comédie-Française et rOpéra, en 1822 et en 1883 : Comédie-França ise. 1822. Balcon , premières loges , orchestre , secondes de face et loges de la 1*"^* ga- lerie 6 fr. 60 c Première galerie et secondes loges. 5 fr. 00 Troisièmes et petites loges 3 fr. 30 Parterre et 2* galerie 2 f r. 20 Amphithéâtre 1 fr. 80 1883. Avant-scène des 1"* loges 10 fr. 00 Loges du rez-de-chaussée , baignoi- res de face, l'*' loges et avant-scène des 2«' 8 f r. 00 Baignoires de côté et fauteuils de balcon 7 fr. 00 Loges de face du second rang et fauteuils d'orchestre G fr. 00 Loges découvertes du 2® rang .... 5 fr. 00 Logea de côté du 2" rang 4 fr. 00 Loges de face fermées du S'' rang. 3 fr. 50 PRIX DE ROME. 621 Avant-scène et loges découvertes du 3® rang, fauteuils de la 2® galerie. 3 f r. 00 Parterre 2 f r. 50 Troisième galerie , loges de face du 4° rang 2 f r. 00 Loges de côté du 4« rang 1 fr. 60 Amphithéâtre 1 f r. 00 Opéra. 1822. Balcon 10 fr. 00 Premières loges d'avant-scène , fauteuils d'amphithéâtre et d'orches- tre, et 2**» loges de face 7 f r. 50 Baignoires, 2®* loges de côté et 3** loges de face 6 f r. 00 Troisièmes loges de côté 4 f r. 00 Parterre et 5"* en face 3 f r. 60 1883. Premières loges d'avant-scène , d'entre-colonnes, de face, et fauteuils d'amphithéâtre Baignoires d'avant - scène , l"** lo- ges de côté, fauteuils d'orchestre. . . Baignoires de côté, 2®' loges d'a- vant-scène, d'entre-colonnes et de face Deuxièmes loges de côté Troisièmes loges de face et d'en- tre-colonnes Troisièmes loges d'avant-scène et de côté Stalles de parterre Quatrièmes loges de face Quatrièmes loges d'avant-scène et de côté, amphithéâtre des quatriè- mes , cinquièmes loges 15 fr. 00 13 fr. 00 12 fr. 00 10 fr. 00 8 fr. 00 6 fr. 00 7 f r. 00 4 fr. 00 2 fr. 50 PRIX DE ROME. — Chaque année, au mois de mai, l'Académie des Beaux- Arts ouvre pour la musique, comme elle le fait pour la peinture, la sculpture, l'architecture et la gra- vure, un grand concours de composition connu sous la dénomination de concours de Rome. Ce concours, réservé aux seuls musiciens fran- çais ou naturalisés tels, et accessible à tous ceux qui n'ont pas accompli leur trentième année, est divisé en deux épreuves. La pre- mière, ouverte à tous ceux qui veulent y pren- dre part (il n'est point besoin pour cela d'être élève du Conservatoire), prend le nom de con- cours préparatoire : les concurrents, dont le nombre est illimité, entrent en loge, où ils restent enfermés pendant six jours, ayant à écrire dans cet espace de temps une fugue vocale à quatre parties et un chœur à quatre voix avec accompagnement d'orchestre. C'est sur ce travail qu'ils sont jugés par le jury, lequel est composé des six membres de la section de musique de l'Académie et de trois autres compositeurs, élus par les concurrents. Quel que soit le nombre de ces concurrents, le jury n'en peut désigner que six au plus pour être admis au concours définitif. Pour ce dernier, les élè- ves admis entrent en loge une seconde fois, et il leur est accordé vingt-cinq jours pour mettre en musique une cantate ou scène lyrique à trois personnages dont les paroles ont elles- mêmes été mises et choisies au concours, et dont l'auteur reçoit une médaille de 500 francs. Cette cantate doit être écrite avec accompa- gnement d'orchestre, et celui ou ceux des élè- ves qui ont terminé leur partition avant le délai de vingt-cinq jours sont libres de sortir de loge. Ce temps expiré, chaque concurrent choisit à son gré les chanteurs à qui il lui plaît de confier Texécution de sa cantate, et ces canta- tes sont exécutées en présence du jury dont nous avons fait connaître la composition. Ce jury émet alors un vote préparatoire sur les œuvres qui lui sont soumises ; mais le vote dé- finitif et l'attribution des récompenses sont réservés à l'Académie des Beaux-Arts tout entière, sections réunies, devant laquelle a lieu une nouvelle exécution, et il n'est pas sans exemple que ce dernier jugement détruise com- plètement l'efifet du premier. Le premier prix accordant à l'élève qui se le voit attribuer l'avantage d'une pension de 3,000 francs pendant quatre ans, à la condi- tion de faire un voyage d'au moins deux ans en Italie et en Allemagne, l'Académie n'en peut décerner qu'un chaque année (1). Elle (1) A moins qu'U n'en ait pas été décerné Taniiée pré- cédente , ou qu'un pensionnaire soit mort au cours de sa pension. Dans ce cas , l'Académie a la faculté de décer- ner, s'il lui plaît, un deuxième premier prix; mais celui- 622 PROCHAINEMENT. — PROLOGUE. peut, à sa guise, accorder deux seconds prix et une ou plusieurs mentions honorables. Un autre avantage est attaché au premier prix de Rome : celui de faire représenter, à son retour en France, un ouvrage en un acte sur le théâtre de rOpéra-Comique, à qui cette obligation est imposée par son cahier des charges. Il est vrai que cet avantage est beaucoup plus théorique que pratique, car la direction de TOpéra-Co- mique, malgré la grasse subvention qu'elle reçoit de l'État, s'arrange presque toujours de façon à éluder une obligation qui n'a pour- tant rien d'onéreux pour elle, et à frustrer indignement les jeunes compositeurs dans leurs plus légitimes espérances. Herold, Halévy, Berlioz, Aimé Maillart, MM. Ambroise Thomas, Gounod, Victor Massé, Duprato, Massenet, etc., ont obtenu naguère le grand prix de Rome. PROCHAINEMENT. 8AMMENT. — Voy. Inces- PROGRAMME. — Le programme d'une fête, d'un spectacle, d'un concert, c'est la nomenclature des pièces, des œuvres, des mor- ceaux, des exercices qui composent la séance, inscrits dans l'ordre où ils doivent être repré- sentés ou exécutés, avec les noms des artistes chargés de la représentation ou de l'exécution. — En province, les administrations théâtrales ont l'habitude de faire imprimer, un ou deux jours avant chaque représentation, des pro- grammes absolument conformes à l'aflfiche du spectacle, et de les faire distribuer chez tous les particuliers que l'on sait amateurs de théâ- tre, afin de piquer leur curiosité et de les en- gager à assister à la représentation. PROLOGUE. — C'est un discours, ou une action préliminaire, qui sert soit de préface, soit de point de départ à une œuvre théâtrale. L'abbé Sabatier de Castres le définit en ces termes : L'objet du prologue chez les anciens , et originai- ci ne reçoit la pension que pour le temps qui reste à courir de ceUe qui se trouve libre. rement , étoit d^apprendre aux spectateurs le sujet de la pièce qu'on alloit représenter, et de les pré- parer à entrer plus aisément dans l'action , et à en suivre le fil. Quelquefois aussi il contenoit Tapolo- gie du poète, et une réponse aux critiques qu'on avoit faites de ses pièces précédentes. On n'a qu'à lire , pour s'en convaincre , les prologues des tragé- dies grecques et des comédies de Térence. — Les prologues des pièces angloises roulent presque tou- jours sur l'apologie de l'auteur dramatique dont on va jouer la pièce. — Les François ont presque en- tièrement banni le prologue de leurs pièces de théâtre à l'exception des opéras. On a cependant quelques comédies avec des prologues, telles que les Caractère» de Thalie, Ésope au Parnasse y etc. Mais Molière ni Regnard n'ont point fait usage des prologues ; aussi il n'y a, à proprement parler, que les opéras qui ayent conservé constamment le pro- logue (1). La première comédie en cinq actes et en prose qui ait été représentée sur un de nos thcVitres, les Corrivaux (1562), œuvre d'un jeune poète mort à vingt ans de la peste, Jean de la Taille, était précédée d'un prologue à l'imitation des anciens, dans lequel l'auteur faisait son éloge au public : — « Il semble. Messieurs, disait ce prologue, à vous voir as- semblés en ce lieu, que vous y soyez venus pour ouïr une comédie. Vraiment, vous ne serez ix)iut déçus de votre intention. Une comédie, pour certain ; vous y verrez non point une farce, ni une moralité. Nous ne nous amusons point en chose ni si basse, ni si sotte, et qui ne montre qu'une pure ignorance de nos vieux Français. Vous y verrez jouer une comédie faite au patron, à la mode et au portrait des anciens Grecs et Latins, une comédie, dis-je, qui vous agréera plus que toutes (je le dis hardiment) les farces et les moralités qui furent oncques jouées en France. Aussi avons-nous grand désir de bannir de ce royaume telles l«dineries et sottises qui, comme amères épi- ceries , ne font que corrompre le goût de notre langage. » Les prologues des opéras de Quinault et Lully, qui ne tenaient à l'action par aucun lien , si (1) Ici, Tauteur se trompe. Molière a fait plus d^nne fois usage du prologue, témoin Amphitryim, V Amour médecin, la Princesse cTÉlide, PRONONCIATION. — PRORATA. 628 mince fût-il, ne formaient jamais qu'un long morceau d'adulation à l'adresse de Louis XIV. Cet usage se prolongea à l'Opéra pendant trois quarts de siècle, et ce n'est que dans les Pala- dins, de Rameau (1749), qu'on vit le prologue briller pour la première fois par son absence. Dans le théâtre contemporain, le prologue n'est plus employé qu'exceptionnellement. Il y a une quarantaine d'années pourtant, un dra- maturge qui eut de gros succès et qui jouit d'une réelle popularité, Bouchardy, le remit en honneiir, et fit précéder presque tous ses* mélodrames d'un prologue qui se passait quinze ou vingt ans avant le commencement de l'ac- tion proprement dite tout en la préparant, et dans lequel il était généralement question d'un enfant qui devenait ensuite l'un des principaux personnages de la pièce. Dans le Sonneur de Saint-Paul, Gaspardo, Lazare le Pâtre et plusieurs autres drames, Bouchardy a mis en œuvre ce procédé. PRONONCIATION. — Une bonne pro- nonciation, une articulation nette et précise, jointe à un organe à la fois sonore et flexible , est Tune des premières et des plus indispensa- bles qualités d'un comédien. Celui qui ne sau- rait se défaire d'un accent pro\incial, qui serait affligé d'un zézaiement ou d'un gras- seyement un peu accusé, devrait renoncer à tout jamais à entreprendre la carrière théâ- trale. PROPRIÉTÉ LITTÉRAIRE. — pour nous servir d'une expression anglaise. Cependant, cha- que année voit signer, avec une nation quel- conque, quelque traité qui garantit les droits de nos écrivains et de nos compositeurs, et bientôt l'Amérique restera la seule à se livrer à l'aimable piraterie qui la met, sous ce rapport, au ban des peuples civilisés. PRORATA. — Jadis, toutes les troupes de comédiens se gouvernaient en société ; aujour- d'hui, à part une seule exception, fournie par la Comédie-Française, elles sont toutes régies par des directeurs qui prennent à leurs risques et périls l'entreprise d'un ou de plusieurs théâ- tres. Mais entre ces deux situations tranchées prit place, surtout en pro\ânce, un état tran- sitoire , pendant lequel les comédiens n'étaient ni tout à fait en société, ni tout à fait en direction. A cette époque, c'est-à-dire vers la fin du siècle dernier et le commencement de celui-ci, les troupes de province étaient admi- nistrées par des « chefs de société j> qui enga- geaient des artistes en leur offrant des appoin- tements fabuleux, mais hypothétiques, dont une très faible partie leur était 0, ou 500, ou 600 francs par mois, sur lesquels ils leur assuraient 60, 80 ou 100 francs ; le reste ne devait venir qu'au cas où l'opération produisait des bénéfices considé- rables, et alors chaque artiste devait recevoir une partie de ces bénéfices au prorata de ce qui lui était promis. Mais ces bénéfices étaient divisés en parts, et le chef de la société com- mençait par prélever pour lui un certain nom- bre de ces parts, qui rendaient les autres à peu près illusoires : il avait d'abord une ou deux parts représentant la valeur du privilège (Voy. ce mot) dont il avait l'exploitation ; puis une, ou deux, ou trois parts pour son magasin, c'est-à-dire pour le matériel de costumes, de partitions, de brochures, qu'il mettait à la disposition de la société ; puis une ou deux parts affectées à son travail et à sa responsabi- lité d'administrateur ; puis une ou deux parts destinées à rémunérer son talent de comédien, que sais- je ? Bref, quand il s'était fait ainsi les parts du lion, quand il avait opéré à son profit tous ces prélèvements, il était bien rare qu'il restât quelque chose aux malheureux ar- tistes sur les prétendus bénéfices, et le prorata C24 PROSCENIUM. — PROSE. restait pour eux une simple chimère. Ce que voyant, ils préférèrent ne point courir des chances si aléatoires et se faire attribuer, sans espoir de surplus, des appointements un peu plus sérieux que ceux qui leur étaient assurés par les chefs de société. C'est alors que, peu à peu, c€ux-ci se transformèrent en véritables directeurs, et que l'ancien régime des sociétés plus ou moins partageantes (plutôt moins que plus) finit par disparaître complètement. PROSCENIUM. — Dans les théâtres an- tiques, c'était exactement ce que nous appelons aujourd'hui la scène, c'est-à-dire toute la plate- forme élevée qui se trouvait lx)rnée en avant par V orchestra, et en arrière par le mur de la scena, mur qui constituait une des parties de l'édifice et n'était point mobile comme les toiles de fond de nos théâtres. Dans les théâtres grecs ou romains, le proscenium n'avait jamais la profondeur qu'atteint la scène des théâtres modernes ; il n'en avait pas besoin, les person- nages du drame antique étant bien moins nombreux que ceux que l'on voit figurer au- jourd'hui dans nos pièces, et le chœur des Grecs (que les Romains n'employèrent pas) faisant toutes ses évolutions dans Vorcftesira, PROSE. — Dans les commencements de notre théâtre, on n'admettait pas (ju'une grande pièce pût être écrite en prose, et la répugnance du public sur ce point était in\'incible. Molière lui-même, comme nous Talions voir, en fit la dure exj)érience. Pourtant, chose assez singu- lière, il semble que les premiers essais de piè- ces en prose furent non des comédies , mais des tragédies. Puget de la Serre donna en 1642 une tragédie en prose intitulée Thomas M or us chancelier d^ Angleterre ou le Triomphe de la foi et de la constance^ et en 1643 une autre pièce de même forme : Climène ou le Triomphe Il en fut de même tout d'abord, deux ans après, pour V Avare, et cette fois c'est Grimarest, l'excellent biographe de Molière, qui nous l'apprend : — < A peine V Avare fut-il représenté sept fois. La prose dérouta ce public. « Comment ! » disoit Mon- sieur le duc de... lichinelle, est un gouailleur, un satirique un peu cru, un peu vert, un peu cynique, qui se permet volontiers les plaisanteries les plus saléeR et qui recherche plutôt la propriété que la pro- preté des expressions. Ce caractère particu- lier lui vient de son origine même, que l'abbé Galiani, son compatriote, a fait connaître en ces termes : Au siècle dernier, il y avait dans Aoerra , ville de la Companie Heureuse, une troupe de comé- diens qui parcourait la province pour gagner quel- que chose. Un jour ils débouchèrent dans im« campagne où les paysans faisaient la vendange. Comme en cette occasion Ton buvait plus que de coutume et qu* hommes et femmes tnvail- laient de compagnie, la gaieté était vive, et chaque passant recevait son brocard. Les comé- diens se virent à leur tour exposés aux railleries de8 vendangeurs ; mais , aguerriff à cet exeniœ , ili commencèrent à répondre et à renvoyer sailIÎM pour saillies. Or, parmi les villageois il y en avait un, nommé Puccio d*Aniello, à la face comique, au nez long, au teint hâlé, assez facétieux d*ail- leurs, et d'esprit pointu. Les comédiens se miient à le plaisanter tout particulièrement, et lui, n re- doublait de lardons et de gausseries. Personne ne voulut céder, et on lutta à qui se moquerait le mieux; les réparties devinrent plus aigres; anx plaiisanteries succédèrent les cris et les haées : ce fut une vraie bataille. Finalement, le campagnard eut le dessus, et les comédiens, honteux, prirent le parti de s'en aUer et revinrent en ville émerveillés. Bemis de leur émotion , selon la coutume des gens de théâtre qui tirent profit de toute chose , ils pensèrent faire nne bonne affaire s'ils engageaient dans leur compagnie ce rontadino qu'ils avaient trouvé si facétieux et si spirituel ; ils lui firent des propositions et il les ac- cepta. Ils parcoururent le pays avec leur nouveau bouffe, qui réussit à merveille et eut accès partout H la faveur de ses pointes : ce à quoi contribuèrent aussi son physique de caricature et sa tenue de campagnard , ù savoir la camisole et le pantalon de toile blanche. PULCINELLA. 628 PULPITUM. — PUNCH. La troupe gagnait gros, et le nom de Paccio d'Anielio était célèbre. Au bout de quelques années, Puccio mourut; mais alors les comédiens le rem- placèrent par un compagnon qui parut avec le même costume et le même masque. Il garda aussi Tancien nom , mais adouci , et s^appela Polecenella. D*autres comiques suivirent Texemple, et bientôt le masque de Polecenella se répandit dans tous les théâtres d'Italie et d*£urope. M. Marc Monnier, dans son livre si intéres- sant : V Italie esUélle la terré des marte f donne au nom de Pnlcinella une origine un peu diffé- rente, quoique se rapprochant de celle-ci, puis il ajoute : — « D'où qu'il vienne, du reste, il est bienvenu à Naples, ce masque noir aux vêtements de Pierrot, qui fait encore la joie de la ville et de la cour. On ne sait au juste ce qu'il est, ni à quoi il sert dans Ig^ comédies ; tour à tour stupide on fourbe , dupeur ou dupe, honnête homme ou filou, ce n'est pas un carac- tère, ni même un type : c'est le personnage burlesque de la pièce, celui qui fait rire, bon gré mal gré, dès qu'il entre et quoi qu'il fasse, avant même qu'il ait dit un mot : voilà tout.]» Mais qui sait si, maintenant que l'Italie se croit appelée à r^nérer le monde, à faire la loi à tous et à marcher de nouveau à la con- quête de l'univers, elle ne va pas dédaigner son vieux Pnlcinella, qui naguère causait sa joie et qui, seul, aux jours amers de douleur et d'esclavage, pouvait faire reparaître le rire sur ses lèvres ? PULPITUM. — Le pulpitum était, dans les théâtres antiques, la partie au. proscenium (la scène) la plus rapprochée du spectateur, celle où venaient se placer les acteurs qui dia- loguaient ensemble ou qui avaient à débiter un morceau de longue haleine. A part sa forme différente, hpulpitvm était donc ce que nous appellerions aujourd'hui l'avaut-scène. Cham- fort se trompe lorsqu'il avance que pulpihim et proscenium n'étaient qu'une seule et même chose. PUXCH. — Le type de Punch n'est autre que celui du Polichinelle anglais, gouailleur, satirique, sacripant comme le nôtre, ne crai- gnant ni dieu ni diable, rossant tout le monde avec sa trique, depuis sa fenmie jusqu'au bour- reau, ivrogne, colère, débauché, perdu de vi- ces, avec tout cela d'un comique irrésistible, et faisant, tant que le jour dure, la joie des grands comme des petits enfants. Aussi popu- laire que notre Polichinelle, Punch, le roi des marionnettes anglaises, lui ressemble non seu- lement au moral, mais encore an physique, avec son immense nez canard, son menton proé- minent, son énorme bosse et le bâton meurtrier qui ne le quitte jamais. D faut convenir cepen- dant qu'il se montre plus cruel, plus cynique encore que mons Polichinelle, et l'on s'en fera idée par cette ballade, intitulée les Fredaines de If, Punch, que l'on croit pouvoir dater de 1795 ou environ, et qui le peint au vif en traits bien accentués : Oh! prêtez-moi Toreille un moment! je vais vous conter une histoire, lliistoire de M. Punch, qui fut un vil et mauvais garnement, sans foi et meurtrier. Il avait une femme et un enfant aussi, tous les deux d^une beauté sans égale. Le nom de Tenf aift , je ne le sais pas ; celui de la femme était Judith. M. Punch n^était pas aussi beau qu^elle. U avait un nez d'éléphant, monsieur! Sur son dos s^élevait un cône qui atteignait la hauteur de sa tête ; mais cela n'empêchait qu'il n'eût, disait-on, la voix aussi séduisante qu'une sirène, et par cette voix (une superbe haute-contre, en vérité!) il séduisit Judith , cette belle jeune fille. Mais il était aussi cruel qu'un Turc, et, comme un Turc , il ne pouvait se contenter d'une femme (c'est en effet un mince ordinaire qu'une seule femme), et cependant la loi lui défendait d'en avoir deux, ni vingt-deux, quoiqu'il pût suffire à toutes. Que fit-il donc dans cette conjoncture , le scélérat ? il entretint une dame. Mistress Judith découvrit la chose, et, dans sa fureur jalouse, s'en prit au nez de son époux et à celui de sa folâtre compagne. Alors Punch se fâ- cha, se posa en acteur tragique, et, d'un revers de bâton, lui fendit bel et bien la tête en deux. Oh! le monstre! Puis il saisit son tendre héritier... oh! le père dénaturé ! et le lança par la fenêtre d'un second étage, car il préférait la possession de la femme de son amour à celle de son épouse légitime, mon- sieur! et il ne se souciait pas plus de son enfant que d'une prise de macouba. Lea parents de sa femme vinrent à la ville ponr lui demander compte de ce procédé , monaieur 1 II prit une trique pour les recevoir et leur servit la même sauce qn'à sa femme, monsieur! 11 osait dire que la loi n'était pas Kt loi, qu'il se moquait de sa lettre, et que, si ta justice mettait sur lui sa griffe , il saurait lui apprendre à vivre. Aloi« il se prit à voyager par tous pays , ai ai- mable et si séduisant que trois femmes eeulcment refusèrent de suivre ses teçoDs ai inatructivea. La première était une simple jeune fille de la campa- gne; la aeconde, une pieuse abbeaee ; la troisième, je voudrais bien dire ce qu'elle était, mais je n'ose : c'était la plna impure dea impures. En Italie, il rencontra les femmes de la pire es- pèce ; en France , elles avaient la voix trop haute ; en Angleterre, timides et prudes an début, elles devenaient les plus amoureuses du monde; en Es- pagne, elles étaient fières comme des infantes, quoique fragiles; ea Allemagne, elles n'étaient que glace. Il n'alla pas plua loin vers le Nord ; c'eût été une folie. Dans toutes ses courses, il ne se faisait aucun scrupule de jouer avec la vie des hommes. Pères et frères passaient par aea mains. Ou frémit rien qu'A penser à l'horrible traînée de sang qu'il a. veraé par système. Quoiqu'il eût une hosec sur le dos, lea femmes ne pouvaient lui résiater. On disait qu'il avait signé un pacte avec te vieux yic'hUu (1), comme on l'appelle; maia quand j'en serais mieux informé, je n'en dir^s pas plus long. C'est peut-être à cela qu'il a dû ses succès partout où il est allé, monsieur ; mais je crois 1 , que ces dames étaient un peu A la fin , il revint en Angleterre, franc libertin et vrai corsaire. Dès qu'il eut touché Douvres, il se pourvut d'un nouveau nom, car il en avait de rechange. La police, de son cSté, prit d'habiles mesures pour le mettre en prison. On l'arrêta au i il pouvait le moina prévoir nn pareil Cependant , lo jour approchait où il devut solder ses comptes. Quand le jugement fut prononcé, il ne lui vint que dea pensées de ruses en songeant ù l'exécution; et quand le bourreau, au front ainis- tre, lui annonça que tout était prêt, il lui fit un si- gne de l'œil et demanda à voir sa mattresae. Prétextant qu'il ne savait comment se servir de la corde qui pendait de la potence, monsieur.' il passa la tête du bourreau dans le nœud conlant et en retira la sienne sauve. Enfin, le diable vint ré- clamer sa dette ; mais Punch lui demanda ce qu'il voulait dire : on le prenait pour nn autre; il ne connaissait pas l'engagement dont on lui parlait. c Ah! voue ne le connaissez paal » s'écria le diable. « Trèa bien! je vais vous le faire connaî- tre. > Et auaaitât ila a'attaqnèrent avec fureur et aussi durement qu'ils le purent. Le diable combat- tait avec aa fourche ; Punch n'avait que son bâton, raoneieur ! et cependant il tua le diable , comme il le devait. Honrrah! Old Nick est mort, i Cette ballade est assurément curieuse, comme caractéristique du type de Pnnch. L'Immortel atiteur de Gulliver, Swift, nous le fait connd- trc pluH intimement encore, dans une satire où il met en présence deux hommes politiques dont l'un compare son adversaire à Punch, et ou il constate l'amour du peuple anglais pour ce dernier : Tim, voua avez nn goût qne je connaia : voua allez souvent voir les marionnettes. Ne remarquez- vous pas quel malaise éprouvent lea spectateurs, tant qne Punch est absent de la scène? Mais, dès qu'on entend grincer sa voix raiiqiic, comme on s'apprête à se réjouir! Alors, l'auditoire ne donne- rait pas un fétu pour savoir quel jugement Salo- mon va prononcer, ni laquelle des deux femmes est la vraie mère, ou la fausse. On n'écoute pas da- vantage la pythonisse d'Eudor. Faust lui-même a beau traverser te théâtre, suivi pas à pas par le diable, on n'y fait aucune atteuiion. Maia que 630 PUPAZZI, PUPPI. — PYRAMIDE HUMAINE. Punch, pour éveiller les imaginations, montre à la porte son nez monstrueux et le retire prestement, oh ! quelle joie mêlée d'impatience ! Chaque minute paraît un siècle, jusqu'au moment où il fait son en- trée. D'abord , il s'assied impoliment sur les genoux de la reine de Saba. Le duc de Lorraine met sans succès l'épée à la main. Punch crie, Punch court. Punch injurie tout le monde dans son jargon. Il rend au roi d'Espagne plus que la moitié de sa pièce. Il n'y a pas jusqu'à saint George, à cheval sur le dragon, qu'il n'injurie et n'attaque. Il empo- che un millier de coups et de gourmades, sans renoncer à un seul de ses méchants tours; il se jette dans toutes les intiigues : à quelle intention]? Dieu le soit. Au milieu des scènes les plus pathéti- ques et les plus déchirantes , il arrive étourdiment et lâche une plaisanterie incongrue. Il n'y a pas une marionnette faite de bois qui ne le pendît vo- lontiers, si elle pouvait. Il vexe chacun, et chacun le vexe. Quel plaisir pour les spectateurs, je dis pour ceux qui ne mettent point le pied sur le théâ- tre , et qui ne viennent que pour voir et écouter ! Peu leur importe le sort de la jeune Sabra , et l'is- sue du combat entre le dragon et le saint , pourvu que Punch (car c'est là tout le beau du jeu) soit bien étrillé , et, en fin de compte, assomme tous ses adversaires. Cependant, Tim , il y a des philosophes qui prétendent que le monde est un grand jeu de marionnettes , où de turbulents coquins remplissent le rôle de Polichinelles. Ainsi, Tim, dans cette loge de marionnettes qu'on api>elle Dublin , vous êtes le Polichinelle, toujours prêt à exciter la noise. Vous vous agitez, vous vous démenez, vous faites un affreux sabbat ; vous jetez à la porte vos sœurs les marionnettes. Vous tournez dans un cercle perpétuel de malices, semant la crainte, l'anxiété et la discorde partout ; vous vous lancez , avec des cris et des grimaces de singe , au milieu de toutes les affaires sérieuses ; vous êtes la peste de votre clan , où chaque homme vous hait et vous méprise; mais, avec tout cela, vous divertissez les spectateurs, qui s'amusent de vos histoires bouf- fonnes. Ils consentiraient plutôt à laisser pendre tonte la troupe qu*à se voir privés de vous. Avec son inconscience, son cynisme et son manque absolu de sens moral, Punch n*en est pas moins le grancl satirique de TAngleterre, le redresseur de tous les torts, le partisan de toutes les réformes utiles, le justicier populaire par excellence. Sa parole est libre, tou^ lui est permis, et il en profite pour dire à chacun ses vérités, qu^il sait faire passer à Taide de son esprit, de son humour, de sa verve endiablée et de sa jovialité gouailleuse. Il a donné naissance à un journal plein de malice et de franchise , qui porte hautement son nom, qui profite de ses leçons, et dont le succès, on le sait, est an des plus considérables que l'on puisse enregis- trer dans l'histoire de la presse. — Ce que c'est pourtant qu'une marionnette ! PUPAZZI, PUPPI, — Nom que l'on donne en Italie à certaines marionnettes (Voy. ce mot). PYRAMIDE HUMAINE. — C'est un exercice d'acrobates qui consiste en ceci, qu'un ou deux hommes placés à terre en font monter sur leurs épaules un ou deux autres qui, à leur tour en reçoivent encore au moins un sur leurs propres épaules. Tandis que ceux qui sont à terre supportent ce fardeau, les autres se li- vrent en l'air à des exercices d'équilibre qui sont souvent prodigieux. QUADRILLE. — Dans un grand théâtre, les daoBeurB et danscnsea sont groupés en un certain nombre de quadrilles, comprenant cha- cun huit ou seize individus et généralement divisés en deux sections. Chaque quadrille se différencie des autres par son costume particu- lier. A l'Opéra, il y a des quadrilles de di des quadrilles de danseuses et des quadrilles d'élèves. — Dans un carrousel, on donne le nom de quadrille à chaque troupe de cavaliers d'un môme parti. Mais ici le mot quadriOe devient féminin, et l'on dira : une belie gitadrilU, le chffde la seconde quadrille, etc. Chaque qua- drille comprend au moins quatre, et au pins douze cavaliers ; comme tes quadrilles de théâ- tre , elles se distinguent entre elles par le cos- tume. ï QUAND VOUS VOUDREZ ! Le premier régisseur ne frappe jamais les trois coups qui précédent le lever du rideau a^'aut d'être absolument certain que tout le monde est à son poste, et que les artistes sont prête à descendre en scène sur les premières mesures de l'ouverture ou de l'entr'acte joué par l'or- chestre. A cet effet, quand le moment est venu 632 QUART D'HEURE DE GRACE. — QUERELLES LITTÉRAIRES. de commencer, le second ou le troisième régis- seur parcourt les loges de tous les artistes qui sont du commencement de Tacte, demandant à chacun s'il est prêt ; puis, lorsqu'il s'est assuré de la présence de tout le monde, il descend sur le théâtre, et crie au premier régisseur : Quand vous vaudrez! Celui-ci fait faire alors place au théâtre, et frappe les trois coups. QUART D'HEURE DE GRACE. — C'est une habitude, dans tous les théâtres de France, d'indiquer l'heure des répétitions un quart d'heure avant celle où elles doivent régulière- ment conmiencer. Ainsi, l'on dit : — On ré- pète à onze heures, pour le quart ; à midi et quart, pour la demie ; à une heure trois quarts, pour deux heures. C'est là ce qu'on appelle le quart d'heure de grâce. Cette habitude a été prise pour établir une concordance de fait entre l'heure de l'hor- loge du théâtre, et celle de la pendule ou de la montre de chaque artiste. QUATUOR. — Dans l'opéra et dans l'ora- torio, le quatuor est un morceau à quatre voix, avec accompagnement d'orchestre. — Le qua- tuor est aussi l'une des formes les plus parfai- tes de la musique instrumentale, surtout en ce qui concerne les instruments à cordes, parce qu'il présente une homogénéité sonore dont on ne saurait trouver la pareille. Les quatuors d'Haydn, de Boccherini, de Mozart, de Beetho- ven, donnent l'idée de la perfection idéale. QUATUOR (Le). — Le quatuor est l'une des fractions de l'orchestre et la plus essentielle, car il en forme la base et l'échafaudage princi- pal, celui qui supporte tout l'édifice instrumen- tal. Il comprend la masse des instruments à archet : premiers violons, seconds violons, al- tos et basses (avec les contrebasses). QUERELLES LITTÉRAIRES. — Des deux querelles littéraires qui, à un siècle et demi de distance, ont agité notre théâtre, la première ne fut presque autre chose qu'un dé- bat engagé sur deux personnalités poétiques, personnalités de valeur singulièrement inégale lorsqu'on songe qu'il s'agissait de Racine et de Pradon ! La seconde, qui devait ayoir nue bien autre portée et dont les conséqnenoes furent un véritable renouvellement de Tart, est la grande querelle des classiques et des romantiques, qui éclata aux environs de 1830 et qui partagea toute la France littéraire, artistique, intelli- gente, en deux campe ennemis tonjonra prêts i s'entre-déchirer. Bien oubliée se trouve aujoord^hni la gninde dispute dont Racine et Pradon furent les héros. Elle fit pourtant grand bruit en son temps, et elle eut pour résultat désastreux d^amener k retraite prématurée de Racine et de nous pri- ver sans doute de quelques chefs-d'œuvre. (Test à cela qu'aboutit en effet la sotte campagne engagée en faveur de Pradon par M°^ Deshoa- lières, de qui on eût pu mieux attendre, et l'indigne cabale montée par elle contre la PAè- dre de Racine au profit de celle de son protégé. (Yoy. Cabale.) Déjà, dans son Tamerlan, re- présenté en 167G, Pradon s'était posé en rival de Racine en choisissant un sujet récemment traité par celui-ci dans BajcLzel; sa tragédie, malgré son peu de valeur, ne laissa pas que d'être applaudie. Mais Racine, par son carac- tère un peu trop jaloux, par sa manie épigram- matique, par le peu de reconnaissance qu'il avait montrée envers Molière et Corneille, s'é- tait fait de nombreux ennemis, auxquels se joignirent bientôt tous ceux qu'offusquent tou- jours un grand génie et une vaste intelligence. On se servit contre lui de Pradon, sans doute parce qu'on n'avait rien de mieux à lui opposer, et on lui jeta dans les jambes ce rival indigne de lui, que Boileau a secoué avec tant de mé- pris. Deux partis se formèrent, dont l'un, qui tenait pour Racine, avait à sa tête Boileau, Houdard delà Mothe, Jean-Baptiste Boussean, tandis que l'autre, qui se ralhait aux couleun de Pradon, était dirigé par W^^ Deshoulières^ soutenue par certains beaux esprits féminins et quelques honmies decourd'une valeur médiocre. Il se trouva pourtant, lorsqu'on eut atteint le but, qui était de décourager Racine, que son vainqueur d'un jour ne rapporta de sa victoire que la sottise et le ridicule. Ses pièces se succé- daient, tombant toutes avec fracas et ne re- cueillant dans le public que des sifflets et des huées. A part Régulus, qui fut accueilli QUERELLES LITTÉRAIRES. 638 fayorablementy il en fut ainsi de Scipion, de Statira, de la Troade, but laquelle Racine, pour se venger, fit courir cette épigramme en forme de sonnet. D'un crêpe noir Hécube embégninée, Lamente, pleure et grimace toujours; Dames en deuil courent 4 son secours : Oncques ne fut plus lugubre journée. Ulysse Tient , fait nargue 4 Thyménée , Le cœur fera de nouvelles amours. Pyrrhus et lui font de yaillans discours ; Hais aux discours leur raillance est bornée. Après cela, plus que confusion ; Tant U n'en fut dans la grande Ilion Lors de la nuit aux Troyens si fatale. En Tain Baron attend le brouhaha; Point n'oseroit en faire la cabale : Un chacun bftille, ou s'endort, ou s'en va. Mais cette lutte qui se soutint autour du nom d'un grand poète et de celui d'un sot écrivain qui confondait géographie avec chro- nologie (1) ne fut rien en comparaison de la grande guerre du romantisme. Ici, ce n'était plus des hommes, c'était les principes qui étaient en jeu ; c'était la grande et saine doctrine de Tindépendance et de la liberté dans l'art qui faisait prendre les armes à toute une jeune école poétique, se révoltant contre les règles trop inflexibles et le conventionnalisme trop étroit et trop timoré de la vieille école classi- que. Quoi qu'on puisse penser du romantisme, il est certain et l'on ne saurait nier qu'il a ou- vert à l'art de vastes horizons, qu'il a donné à la poésie dramatique une envolée telle qu'on n'en avait pas vu depuis Corneille, ce premier des romantiques. Mais ce ne fut pas sans luttes, sans combats, que ce résultat fut atteint, et nos théâtres, à l'heure de cette grande bataille, virent des soi- rées singulièrement agitées et bruyantes. Cha- cun défendait ses dieux avec vigueur, et dans cette vaste mêlée, où les injures s'entre-croi- (1) Au sortir de la première représentation de Tamev' îan , comme le prince de Conti faisait observer 4 Pra- don qu'il aTait placé en Europe une viUe située en Asie, celui-ci lui répondit ingénument : a Je prie Votre Altesse de m'excuser; je ne suis pas très fort en chronologie, d saient, où les gros mots bondissaient d'un spec- tateur à l'autre, plus d'un horion aussi fut échangé, les paroles restant insuffisantes à soutenir les idées que chaque parti prétendait faire prévaloir. Le feu avait été ouvert par la préface aussi- tôt célèbre de Gromwell, qui formulait en ter- mes énergiques et précis les théories de l'école nouvelle. Pourtant, ce n'est pas le glorieux au- teur de Gromwell qui eut l'honneur de planter le premier le drapeau du romantisme au théâ- tre ; il fut devancé par Alexandre Dumas, qui en faisant représenter Henri III et sa cour, donna le signal de la première grande manifes- tation publique contre les théories qu'il s'agis- sait de battre en brèche. Mais on attendait Herimni avec une impatience fiévreuse, Her- nani parut enfin à la Comédie-Française, et amis et ennemis se trouvèrent en présence à la première représentation de cette œuvre maî- tresse, qui était vraiment le signal du grand combat. Il faudrait citer tous les journaux du temps pour donner une idée de la fureur, de Tachamement que les uns mettaient à exalter le drame du jeune maître en qui ils reconnais- saient un chef, que les autres apportaient dans la défense d'idées qui leur étaient chères et qu'ils voyaient en péril. Dès le début de l'œu- vre, les classiques se révoltèrent à l'audition de ce vers suivi d'un enjambement : Serait-ce déjà lui? — C'est bien à l'escalier Dérobé... « On casse les vers pour les jeter par la fe- nêtre ! s'écrie l'un d'eux. Jamais Racine n'eût fait cela. — Racine est un polisson I j» réplique aussitôt un romantique. Et cela continua pendant cinq actes, — et pendant nombre de représentations, car on sait le succès final S*Hernan%, Lors de la re- prise qui en fut faite en 1867, Théophile Gau- tier, rappelant ses souvenirs, s'exprimait ainsi à ce sujet : Chaque soir, Hemani était obligé de sonner da cor pour rassembler ses éperviers de montagne, qui parfois emportaient dans leurs serres quelque bonne perruque classique en signe de triomphe. Certains vers étaient pris et repris comme des redoutes dis- 684 QUEUE. putées par chaque année avec une opiniâtreté égale, poètes romantiques, jusqu'à ce qu'enfin ceux-ci Un jour les romantiques enlevaient une tirade. que restassent maîtres du terrain. Mais pendant rennemi reprenait le lendemain, et dont il fallait ^jx années cette grande question préoccupa le le déloger. Quel vacarme! quels cris! quelles huées ! ^^^^ ^sien, et l'apparition de chaque œu. quels sifflets ! quels ouragans de bravos ! quels ton- n ji. «i. > ,. ^.^ i > j. 1 j- T iT 1. iî j _x. ». vre nouvelle était un ventable événement, nerres d applaudissements ! Les chefs de parti s m- ^ , -rr- tt i. • i juiraient comme les héros d'Homère avant d'en ve- ^^^^^^ ^^^ ^^^^^ ^"^^ ^^PP^'^ ^^ ^^«P« nir aux mains, et quelquefois, il faut le dire, ils décisifs avec Marion Delorme, Lucrèce Bofçia, n'étaient guère plus polis qu'Achille et qu'Aga- ^^î/ ^^» Alexandre Dumas donnait successi- memnon. Mais les paroles ailées s'envolaient au vement Antonj/, Charles VIT chez ses grands cintre , et l'attention revenait bien vite à la scène, vassaux, Catherine Howard, Richard d^Ar- On sortait de là brisé, haletant, joyeux quand la Ungton, Kean, Don Juan de Marana, Puis, soirée avait été bonne, invectivant les philis- c'était Mallefille avec fe^ iS^/ M/anfe ef(? Xara, tins quand elle avait été mauvaise, et les échos noc- ^jf^çj ^^ ^i^j avec Châtia ton et Othello, turnes, jusqu'à ce que chacun fût rentré chez soi, ^ Lockroy avec Perrimt LecUrc, Bouchardy répétaient des fragments du monologue d Hemani a j j j . •, '^j, r,i .X 1 .. même, dans un ordre secondaire, avec Oas- ou de don Cari os, car nous savions tous la pièce -' ^- ,« ,ry>« par c«nr, et a«jourd'lnn nous-mfme la soufflerions ^^'^ ^ P^^^> ^* '^'^"""' ^ famt-Paul, au besoin. Christophe le Suédois, Lazare le Pâtre.,. Ce fut une époque vraiment brillante pour le théâtre, Et ailleurs, Gautier montre plaisamment le d'autant que ces écrivains étaient soutenus par mépris dont il était rempli pour les classiques un groupe de comédiens merveilleux, d'artistes impénitents dont les efforts devaient rester pleins d'audace, de fierté, de grandeur, que stériles : rien n'effrayait, et dont l'admirable talent n.,; «««c !«<, ^«^«^^Ar^^o «,r^« ,.r> o««« ^r.\A scmblait fait pour livrer les plus nobles com- Uui, nous les regardâmes avec un sang-froid ^ *^ parfait toutes ces larves du passé et de la routine, ^^ • Frederick Lemaître, Bocage, Geffroy, tous ces ennemis de l'art , de l'idéal, de la liberté Jemma, Lafemère, Delafosse, M"^ Geoi^es, et de la poésie, qui cherchaient de leurs débiles M'"®" Dorval, Ida, etc. Les noms de ces giands mains tremblotantes a tenir fermée la porte de l'a- artistes sont désormais inséparables de ceux venir ; et nous sentions dans notre cœur un sauvage des écrivains dont ils étaient chargés d'inter- désir de lever leur scalp avec notre tomahawk prêter les œuvres, et, comme ceux-ci, ils appar- pour en orner notre ceinture; mais à cette lutte, tiennent à la postérité. Aujourd'hui, après un nous aurions couru le risque de cueillir moins de ^^mi-siècle, la guerre du romantisme n'est plus chevelures que de perruques ; car 81 elle raillait 1 e- , . ■ i, i. i» j ,. , 1 iw 1 1 . quun souvenir; mais elle restera lune des cole moderne sur ses cheveux , I école classique , en ^ . i i • . revanche, étalait au balcon et à la galerie du pages les plus curieuses et les plus intéressantes Théâtre-Français une collection de têtes chauves ^^ l'histoire du théâtre en France, pareille au chapelet de crânes de la déesse Dour- ga. Cela sautait si fort aux yeux, qu'à l'aspect de QUEUE. — La queue est un usage à la fois ces moignons glabres sortant de leur col triangu- ridicule et barbare, qui consiste en ceci : que laire avec des tons couleur de chair et beurre les personnes qui n'ont pas le moyen de louer rance , malveillants malgré leur apparence paterne, ^^^g pj^^^eg à, l'avance en subissant la surtaxe un jeune sculpteur de beaucoup d'esprit et de ta- j ^^^^ ^^^ imposée, ou qui ne veulent pren- lent, célèbre depuis, dont les mots valent les sta- ^^^ ^^ ^^^^^ ^ ^ j^^^ ^^^ ^ ^^ ^^ tues, s écna au milieu d un tumulte : ul /a ûrM///o- ^. ^ ^ i .• • \ ^^ ^ ,. , , retiennent pas en location, viennent attendre tine^ les genoux! , , , , ,„ ^ ,, ■% à la porte du théâtre Iheure de louverture des Ceci peut donner une idée du spectacle que bureaux. C'est ce qu'on appelle a: faire la s'offraient à eux-mêmes les spectateui-s de 1830. queue. » Devant le théâtre sont disposées des Un seul effort pourtant ne suffisait pas pour barrières à claire-voie pour contenir ces futurs enlever définitivement la victoire, et, bien que spectateurs, en leur permettant seulement de l'issue de la lutte ne fût pas douteuse, elle se se ranger un à un ou deux par deux, à la queue renouvela à chaque nouvelle manifestation des leu leu. Quelque temps qu'il fasse, qu'il pleuve. QUEUES-ROUGES. — QUINZENIER. 635 qu'il grêle, qu'il neige, qu'il vente, le théâtre est impitoyable, et tous ces amateurs de spec- tacle : hommes, femmes, enfants, sont obligés d'attendre que les bureaux veuillent bien s'ou- vrir et condescendre jusqu'à accepter leur argent. Mais il arrive ceci, que les bureaux n'ouvrent jamais qu'une demi-heure avant l'heure du spectacle. Or, voici ce qui se pro- duit si la queue est considérable : d'une part, il est matériellement impossible aux buralistes d'agir aveô assez de rapidité pour la faire écou- ler avant que le rideau soit levé, de sorte que, tout en ayant attendu plusieurs heures à la porte, les derniers 8i)ectateurs entrés sont dans l'impossibilité de voir le commencement du spectacle ; d'autre part, si le nombre des ama- teurs dépasse celui des places disponibles, les derniers ne peuvent trouver place, ont attendu vainement et sont obligés de se retirer. Cet usage, barbare autant que ridicule, nous le répétons, est indigne d'un peuple policé. Si les administrations théâtrales avaient pour le public le respect et les égards qu'on doit toujours à ceux qui vous apportent leur argent et qui vous font vi\Te, elles trouveniient facilement le moyen de faire cesser un état de choses qui est bien près d'être scandaleux, et d'employer envers les spectateui-s un procédé moins inique et moini^ grossier. QUEUES-ROUGES. — On désignait ainsi naguère une certaine catégorie de rôles comi- ques, qui tenaient nette dénomination de la couleur adoptée pour le ruban qui formait la queue de la perruque portée par le personnage. Les quettes-roiiges étaient des comiques jeunes, naïfs jusqu'à la niaiserie, tels que les fameux Jocrisses qui commencèrent la réputation de Brunet et certains rôles qui , dans les mélodra- mes du boulevard, avaient pour mission d'a- mener un peu de gaieté dans une action sombre et volontairement poussée au noir le plus téné- breux. QUINQUE. — Au dix-huitième siècle on n'avait pas encore adopté le mot quintette, qui nous vient de l'italien, pour désigner un mor- ceau à cinq parties, et l'on se sers'ait à cet effet du mot quinque, J.-J. Rousseau, dans son Dictionnaire de musique, ne mentionne que ce dernier, qui est aujourd'hui complètement abandonné. (Voy. Quintette.) QUINQUET. — Genre de lampe à double courant d'air, inventée par un nommé Argant, fabriquée par un ferblantier nommé Quinquet, dont elle prit injustement le nom, et qui, dans la seconde moitié du dix-huitième siècle, ser- vit à l'éclairage de la rampe dans nos théâtres, où elle régna jusqu'à l'introduction du gaz. QUINTETTE. — Dans un ouvrage lyri- que, opéra ou oratorio, un quintette est un morceau à cinq voix, accompagné par l'orches- tre ; quelquefois, le chœur s'y trouve adjoint. — Dans un concert instrumental , le quintette est une composition à cinq instruments con- certants, qui à eux seuls forment une harmoliie complète. QUINZEXIER. — Voy. Semainier. R RACCORD. — Quand une pièce qui n'a pas cessé de faire partie du répertoire d^un théâtre n^a pas cependant été jouée depuis quelque temps, et qu'on est obligé de la remet- tre rapidement à la scène, il arrive souvent qu'on en fait non une répétition complète, mais un simple raccord, c'est-à-dire une répé- tition des seules parties les plus importantes de l'ouvrage, ou de celles qui pourraient don- ner lieu à quelque hésitation ou à quelque erreur. — Quand un artiste nouveau vient à reprendre dans une pièce un rôle qui était joué précédemment par un autre, on fait aussi un raccord, appliqué seulement aux scènes aux- quelles participe l'artiste en question. — Enfin, on fait presque toujours, le lendemain d'une première représentation, un raccord de la pièce nouvellement offerte au public, pour pratiquer les coupures reconnues nécessaires ou modifier certains jeux de scène qui ont été reconnus imparfaits. RAISONNEURS. — C'est ainsi que l'on désignait jadis un emploi qui rentrerait au- jourd'hui dans la catégorie des troisièmes rô- les, et que son appellation caractérise suffisam- ment. Les raisonneurs sont des rôles d'un caractère sérieux, parfois austère, qui exigent beaucoup de correction, de tenue et de dignité. Philinte dans le Jlisauthrape, Béralde dans ie Malade imaginaire, Théodon dans Mélanide (La Chaussée), Ariste dans le Méchant (Gres- set), Damon dans le Préjugé à la mode (La Chaussée), Philinte dans le Glorieux (Destou- ches), sont des raisonneur. RAMPE. — La rampe est cette ligne de feu qui s'étend , sur le plancher, d'un côté de la sC'ène à l'autre, par devant le rideau d'avant- scène ; elle estdivisiMî en deux i>arties égales par le trou du souffleur, qui Toblige à se farûer. Comme le reste du théâtre, la rampe est éclairée au gaz, et partout par des becs à flamme droite, excepté à l'Opéra, où, pour éviter le retour d'accidents déplorables tels que celai qui coûta la vie à l'infortunée Emma Livry, on a ima- giné d'employer un système de becs à flamme renversée, qui a été décrit ainsi : — c Dans ce système, chaque verre, recouvert d'mi petit appareil mobile par où s'échappe le gaz, est ajusté par le Ijas à un tube correspondant à une forte cheminée d'appel ; dès Ion la flamme, au lien de s'élever, s^abaisse ; aacnn dégagement de chaleur ne se produit au-deflaos de la rampe, et l'on peut poser la main snr le verre dépoli qui la recouvre. La Inmière est aussi vive que dans l'ancien système, et lea artistes, les danseuses particulièrement, vétoea de jupes amples et légères, peuvent s^approcher de la rampe en toute sécurité. » RAPPEL. — Jadis, pour donner à un grand artiste, à un grand comédien, un témoignage éclatant de l'admiration qu'il avait causée, le public le rappelait en masse à la fln de Tonvrage représenté, et lorsque, le rideau relevé, Tartiste reparaissait ix)ur recevoir cet hommage offert à son talent, il était couvert d'applaudisse- ments. Cette marque d'estime était rare alors, et \y8LT conséquent très flatteuse. Aujourd'hui, et depuis l'introduction odieuse de la claque dans nos théâtres, cette manifestation, renou- velée à tout propos et s'adressant souvent à des acteurs très secondaires, a perdu tout son prix et est devenue d'une banalité désespérante. On n'attend même plus qu'une pièce soit termi- née, et la fin de chaque acte donne souvent lieu à un rappel ; on ne se borne même pas à rappeler un artiste d'un mérite exceptionnel, et la claque a pris l'habitude de crier : Tous! RAT D'OPERA. 637 Tous! de façou qu'on voit parfois cinq ou six acteurs, tous plus admirables sans doute les uns que les autres, se présenter, en se tenant par la main, devant le public impassible, et recevoir, sans sourciller, les bravos des claqueurs pa- tentés. Les auteurs sont aussi quelquefois, mais seulement les jours de première représentation, l'objet de manifestations de ce genre, et celles- ci sont généralement plus sincères et ne laissent pas le public aussi complètement indifférent. C'est Voltaire qui a eu l'honneur du premier rappel à la Comédie-Française, le jour de l'ap- parition de Mérope (1743); il ne se présenta pourtant pas sur la scène, et c'est dans une première loge qu'il vint s'offi-ir aux regards du public. Le premier compositeur qui fut l'objet d'un rappel à la Comédie-Italienne fut Philidor, lors de la représentation du Sorcier (1764), et celui qui reçut le premier cet hon- neur à l'Opéra fut Floquet, pour son opéra VUnion de Vamour et des Arts (1773). Quel- ques auteurs, justement soucieux de leur di- gnité, se sont toujours refusés à donner ainsi leur personne en spectacle, et l'on cite cet exemple d'un écrivain anglais, qui, obligé malgré lui, par les instances du parterre, à se présenter sur la scène après la représentation de sa comédie, tint au public ce petit discours très sensé : — En Italie, les compositeurs sont singulière- ment friands de cette marque de satisfaction du public, que l'abus a fini par rendre ridicule à ce point qu'aujourd'hui vingt rappels seule- ment dans le cours d'une soirée équivalent à la chute d'un ouvrage ; il en faut trente ou qua- rante pour que l'on puisse constater une appa- rence de succès. Et comme on ne saurait relever le rideau un si grand nombre de fois, on a imaginé un moyen ingénieux dans certains théâtres : on a pratiqué dans ce rideau une espèce de petite porte pouvant donner passage à une personne, et c'est par cette porte que le musicien triomphant vient s'offrir aux regards d'une foule idolâtre. Dans les autres théâtres, il se contente de pénétrer modestement sur la scène en se glissant entre la toile et le manteau d'Arlequin, ce qui manque absolument de dé- corum et de majesté. RAT D'OPÉRA. — Le rat est une variété de l'espèce rongeuse, absolument spéciale à l'Opéra de Paris. Elle a été souvent dépeinte, mais mal définie, par les naturalistes qui s'en sont occupés. On peut tenir pour ressemblant le poitrait qu'en a tracé un homme qui s'y connaissait, Nestor Roqueplan, dans ses Nou- velles à la main (décembre 1841) : Nous dirons que le rat a toujours été mal connu et mal défini. Certaines gens du dehors appellent rats de grands êtres qui n^ont rien de Texiguîté et de l'inconsistance de ce petit animal , et il y a des jeunes gens de famille qui ne désabusent pas leurs parents quand ceux-ci, en parlant de grosses dia- blesses de trente ans, leur reprochent leur rat de V Opéra, Le vrai rat, en bon langage, est une petite fille de sept à quatorze ans , élève de la danse , qui porte des souliers usés par d'autres, des châles dé- teints , des chapeaux couleur de suie qui sentent la fumée de quinquet , a du pain dans ses poches et de- mande dix sous pour acheter des bonbons. Le rat fait des trous aux décorations pour voir le specta- cle, court au grand galop derrière les toiles de RÉCEPTION D'UXE PIÈCE. — RECETTE. fond, et joue atu qiutre coinB dans les corri- dors ; il est censé gagner vingt sons par soirée , mais au moyen des amendes énormes qu'il encourt par ses désordres, il ne toache par mois que huit à dix francs et trente coups de pied de sa mère. Le rat reste rat jusqu'à l'époqne où il prend nn autre nom, qu'il est hors de propos de dire, jusqu'à l'ftge ou il ne demande plus de bonbons et reçoit des bouquets. Le rat appartient exclusiTement à la danse ; le chaut n'en produit pas. RÉCEPTION D'UNE PIÈCE. — Il n'y a plBB anj'ourd'hai, comme autrefois, de comités de lecture dans les théâtres. Tout auteur pré- sente directement sa pièce au directeur dn théâtre où il désire la voir représenter, et ce- lui-ci la reçoit ou la refuse, restant le seul juge de l'œuvre qui est soumise à son appré- ciation. A U Comédie-Française, les choses se passent de façon différente, et l'on a conservé à peu près exactement la manière de procéder en nsi^ au siècle dernier et qui nous est ainsi racontée par nn écrivain du temps : Un auteur qui a fait une pièce nouvelle la remet i celui des comédiens qui, chaque semaine, est chargé des petits détails de la troupe, et que, pour cette raison, on nomme semainier. Ce semainier en fait part à l'assemblée qui se tient tous les lundis, à onze heures du matin, à l'hâte! de la Comédie. On y convient, à la pluTalité des voix, du jour oti l'on fera la lecture de cette pièce, et le semainier a soin d'en prévenir l'auteur. Chaque acteur et ac- trice préeens à la lecture reçoivent un jeton de la valeur de trois livres, qui leur est payé par le cais- sier de la troupe. L'auteur seul, ou celui qui pré- senl£ la pièce , a droit d'assister à l'assemblée avec les comédiens. La pièce lue , l'auteur se retire , ne devant point être présent à la délibération. Le se- mainier a soin de fournir trois fèves à chaque ac- teur et à choque actrice : une blanche pour l'ac- ceptation simple d<; la {)iéce ; une marbrée pour l'acceptation avec des changemens, et une noire pour le refus absolu. Après que chacun, par ordre d'ancienneté, a proposé ses réflexions et que les avis ont été discutée, on procède paria voie du scrutin, et le semainier fait part à. l'auteur du jugement de l'assemblée. S'il s'agit de faire des chango- raens dans la pièce, et que l'aiiteur s'y soumette, il demande une seconde lecture lorsqu'il croit avoir IX réussi. Après cette lecture, qui h fait dau la même forme que la prenûèr«, on décide défini- tivement, et l'on n'emploie daua ce second juge- ment que des fèves blanches on noires , pour l'ac- ceptation ou pour le refus. Le secret est îis plus puissiinte que celle de ce dernier, parce (jue sa responsabilité est énorme, <]u'il est mêlé à tous les détails de la macîhine tht'îitrale, et que le directeur ne saurait rien faire sans le consulter et prendre (1) Dictionnaire théâtral, ou 1233 rmVt>. (1824.) son avis. C'est le rt^sseur général qui organise et surveille tout le travail intérieur, qui, aveo le directeur et les auteurs, établit la distribu- tion des pièces nouvelles, arrête le répertoire et, lorsque survient une indisposition, un em- pêchement, un accident quelconque, modifie le spectacle annoncé ; c'est lui qui reçoit toutes les réclamations relatives au service, qui s'occupe de la préparation des débuts et des auditions , surveille la marche de toutes choses, entretient les relations avec la commission de censure ; en- fin c'est lui qui suit le travail des répétitions, qui préside à la représentation pour s'assurer que tout fonctionne bien, et qui, le soir, eu cas d'accident matériel, d'al)sence ou d'indis- position d'un artiste, est chargé de parler an public et de faire les annonces. Cette dernière ])iirtie de sa ti\che n'est ])as la moins délicate, en province surtout, où, devant un public pres- que toujoura hargneux et de fâcheuse humeur, elle exige lieaucoup de tact et de finesse, de sang-froid et d'habileté. C'est précisément en province que ce fonctionnaire théâtral reçoit souvent la qualification spéciale dcrégisseurpar- îant au public. Le régisseur chargé de la mise en scène reçoit, lui, le nom de metteur eti scène. Tandis (jue l'autorité du régisseur général s'exerce en tout temps, sur tout et sur tous, que tous les chefs de service se trouvent i)lacés sous ses ordres immédiats, celle du metteur en scène est circonscrite et limitée aux planches du théâtre ; mais là elle est complète aussi, abso- lue, et chacun lui doit obéissance. C'est le metteur en scène qui monte les ou>Tage8, con- jointement avec l'auteur, qui en dirige les ctudes, en régie la marche scénique, donne aux acteurs les indications, les conseils, les avis dont ils peuvent avoir Ixîsoin, fixe la place que cha- cun d'eux doit occuper en scène, indique les passades, les entrées, les sorties, fait mouvoir les masses des figurants et des comparses, (jui met, en un mot, une pièce en état d'être re- j)réscntée et qui est responsable de sa bonne exécution. Ce n'est ims là un mince travail, et un bon metteur en scène est un homme précieux dans un théîitre. Au dernier plan de la hiérarchie , nous trou- vons le sous-réf/îsseur, celui qui est chargé de REGLEMENT. e4S ce f|i]'oti appelle la petite régie, et à qui on applique souvent la dénomination burlesque de régisseur des bouts de chandelle. Pour mo- destea qu'elles soient, les fonctions de celui-ci n'en Bont pas moins utiles. Il est le lieuteuant du régisseur général, chargé de veiller à ce que tous les petits rouages de la grande machine fonctionnent régulièrement il doit être au thLâtrt avant tout le monde matin ou soir a assurer que chicuu est a son poste faire sonner le commencement de la répétition ou du spectacle surveiller le travail des garçons de théâtre et des machinistes, constater les absences ou les retards, infliger les amendes pour toOB les manques de sen'ice, faire les bul- letins de répétition affichés aux foyers ou en- voyés à domicile, faire la police de la scène, veiller à ce que les entr'actes ne se prolongent pas plus que de raison, etc., etc. La besogne di, chacun on le voit est net tement déterminée Toutefois nous devons dire que tous les théâtres ne sont pas sous ce rappirt oroiinists de la même façon et que cette orginisation n est pis infle\ibk Dans quelques uns cest le directeur lui mfme qui se ("harge de la mise en scène dans d autres celle (,1 est faite par le régisseur gênerai qui dckgue alors une partie de s<^ pouvoirs a un second régisseur dont 1 antonté est limitée Parfois môme c est un acteur qui exerce aoit les fonctions de régisseur général, soit celles de metteur en scène. Il n'y a pas, dans ce ser- vice de la régie, de règles lises et invariables ; mais, partout, les lignes générales sont celles que noua avons tracées. Nous ajouterons seule- ment que dans certains grands théâtres, où le personnel est très divers et particulièrement nombreux on trouve parfois des régisseurs secondaires charges d un service tout spécial comme régisseur dt la dan'-e tt rLgisseur des chœurs. Il n est pas besoin de dire que 1 auto nte de ceux ci est absolument limitée au pcr sonnel placé se us leurs ordres RÈfiLEMENT. — Le règlement est une sorte d'ordre général, comitosé d'un plus ou moins grand nombre d'articles, qui établit'les règles du travail intérieur dans un théâtre, fixe et délimite les attributions et les devoirs de chacun, prévoit les infractions et fait connaî- 644 REGLEE UN PAS. ~ RELACHE. tre le chiffre des amendes par lesquelles elles sout panies, organise enfin tonte la marche du service quotidien pour les répétitions et les re- présentations, de telle sorte que nul ne puisse se trouver en faute sans le savoir et sans en avoir été prévenu par la lecture de ce règle- ment, qui est affiché dans l'intérieur du théâtre d*une façon très apparente. RÉGLER UN PAS. — En termes de danse, c'est l'action qui, pour le m^tre de ballet, consiste à imaginer et à coordonner les divers mouvements et figures qui seront ensuite exé- cutés par un ou plusieurs danseurs, et dont Fensemble forme ce qu'on appelle un pas. RÉGLER LA MLSE EN SCÈNE. — C'est établir les divers mouvements qui doivent se produire en scène, soit entre les acteurs, soit, dans une pièce à spectacle, entre les masses qui concourent à l'action. C'est là dans tous les cas, qu'il s'agisse d'une pièce intime ou d'une grande machine scénique, un art difficile et qui réclame du metteur en scène une grande expérience et beaucoup d'habileté. On dit, en employant une ellipse, « régler » un acte, « ré- gler ï un tableau, pour faire entendre qu'on rè- gle la mise en scène d'un acte ou d'un tableau. REINES. — On appelait ainsi, au dix-sep- tième et au dix-huitième siècle, l'emploi tragi- que de fenmies que l'on désigne aujourd'hui sous le nom de premiers rôles. Cette appellation lui venait de la qualité habituelle des person- nages (|ui formaient cet emploi. M"" Raucourt, Duchesnois, Georges, M"^ Pai-adol, ont tenu magnifiquement l'emploi des reines à la Comé- die-Française. (Voy. Rôles a baguette.) REJET. — Dans les théâtres de province, à l'époque des débuts, les spectateurs qui pren- nent part au scrutin votent sur Vadmissmi ou le rejet des artistes qui leur sont présentés. Ceux qui sont rejetés doivent être remplacés au plus vite par la direction. RELACHE. — C'est l'expression dont on se sert pour indiquer qu'un théâtre en pleine exploitation reste une soirée sans jouer. Le relâche a des causes générales ou particulières ; parmi les premières, il faut compter la mort d'un souverain, d'un grand personnage public, ou une calamité nationale, qui amènent tous les théâtres à fermer momentanément leurs portes ; les causes particuUères sont dues ordi- nairement à des faits imprévus, tels que l'in- disposition subite ou la disparition d'un artiste tenant un rôle important dans une pièce en cours de représentation, et que l'on ne peut remplacer. Les théâtres de Paris ont pris aussi l'habitude, aujourd'hui que la mise en scène a pris des proportions exagérées, de faire précé- der l'apparition d'une pièce nouvelle de toute une série de relâches pendant lesquels les spec- tacles sont remplacés par des répétitions géné- rales destinées à faire l'essai des décors, des machines, des costumes et des accessoires. Jadis, à l'époque de la royauté absolue, les causes de relâche étaient fréquentes pour les théâtres. Sans parler de la mort du souverain ou d'un personnage de la famille royale, qui occasionnait pour tous les théâtres une ferme- ture de deux ou trois semaines, la maladie d'un prince ou d'une princesse était souvent le signal d'un ou de plusieurs relâches, imposés par l'autorité. Le 15 février 1758, jour des funérailles de la duchesse d'Orléans, tous les théâtres de Paris durent faire relâche. D'autres fois, une simple mesure de police amenait le même résultat. C'est ainsi que, le 19 août 1742, à la Comédie-Italienne, un ordre supérieur étant venu interdire l'apparition de deux dan- seurs qui avaient débuté la veille, et cet ordre étant arrivé si tard qu'on n'eut point le temps de changer le spectacle, le théâtre dut faire relâche. Quelques années auparavant, en 1731, au même théâtre, un ordre de police vint em- pêcher la première représentation, annoncée, du Dissipateur, et il fallut aussi faire relâche. L'un des l'elâches les plus célèbres dans les annales du théâtre moderne est celui que fit rOpéra-Comi(iue à l'occasion de la mort de Boieldieu, en inscrivant sur son affiche ces sim- ples mots : Boieldieu est mort. Relâche. Pour indiquer ce que nous entendons par REMETTRE UN ROLE. - REMPORTER SA VESTE. relâche, les Italiens emploient le mot riposo (repoe), qui pour eux a exactement la même BigniËcation. REMETTRE UN ROLE. — Remettre un rôle, pour un comédien, c'est être appelé à jouer de nouveau un rôle qu'il n'a pas joué de- puis un temps plus ou moins long, ce qui l'o- blige à un certain travail de mémoire, tant en ce qui concerne le texte du rôle que les détails de l'exécution scénique. REMISE. — Voy. Reprise. REMPLACEMENT (Acteurs en). — C'était autrefois, à l'Opéra, les artistes qui étaient chargés de suppléer les chefs d'emploi lorsque ceux-ci se trouvaient dans l'impossibi- lité de chanter. IjC remplacement était bien un double, mais on ne lui en donnait pas la qua- lification, et il avait lui-même un double qui devait toujours se tenir prêt à le remplacer au REMPORTER SA VESTE. — Un débu- tant qui i&\t fiasco remporte sa veste, de même que l'autour dont la pièce est sifflée, ou l'ac- teur à réputation qui ne produit dans nu rôle important qu'uu succès négatif. Eu argot théâtral, « remporter sa veste n signifie échouer piteusement et sans chance de retour. Quelle veste! dîra-t-on d'une pièce qui est tombée sous les sifflets ou qui a succombé sous l'ennui, (Voj-. FoL-R.) 646 RENDRE L'ARGENT. — RÉPERTOIRE. RENDRE L'ARGENT. — Lorsque, sur la foi de l'affiche, le public a pris place dans une salle de spectacle, et qu'un événement subit et impréMi, tel qu'une indisposition d'un acteur qui le met dans l'impossibilité de jouer, vient empêcher la représentation et obliger le théâtre à faire relâche, l'administration fait rendre aux spectateurs l'argent de la place qu'ils ont payée. L'un des premiers exemples d'un fait de ce genre est sans doute celui-ci , qui se pro- duisit en 1688, à la Comédie-Française. On avait repris depuis quelques jours l'une des plus fameuses pièces à machines de Pierre Corneille, la Toison (Tor, et on en donnait la dixième représentiition ; le prologue était à peine terminé, ([ue la nouvelle arriva au théâtre de la mort de la reine ; ou interrompit aussitôt le spectacle, et l'tm fit rendre l'argent aux spectateurs. RENDRE UN ROLE. — A Paris, on dit d'un comédien (ju'il rend un rôle, lorsque, après l'avoir accepté des mains de l'auteur à la suite de la lecture d'une pièce nouvelle, il se ravise et le rend , en déclarant qu'il se refuse décidément à le jouer, pour telle ou telle raison alléguée par lui. RENOUVELER UN ENGAGEMENT. — Dans les théîUres de Paris, lorsqu'un directeur a lieu d'être satisfait des ser^ûces d'un artiste, il n'attend point l'expiration de l'engagement de celui-ci pour s'entendre avec lui sur les con- ditions d'un traité (jui rattachera de nouveau au théâtre ix.*ndantun certain nombre d'années. Lorsqu'ils tomlwnt d'accord, tous deux signent donc un nouveau traité, et c'est alors qu'on dit que tel comédien a renouvelé son engiigement avec tel théâtre, ou que tel directeur a renou- velé l'engagement de tel artiste, RENTREE. — Lorsqu'un acteur aimé du public est resté pendant quelque temps éloigné de la scène, soit pour cause de maladie, soit en vertu d'un congé, soit simplement parce qu'il n'avait point de rôle dans la pièce en cours de représentation, et qu'il reparaît sur le f/héâti-e après un intiTvalle plus ou moins long, on dit qu'il /ai/ sa rentrée, et l'affiche, un i)eu trop prodigue aujourd'hui de prévenances et d'attentions envers les comédiens, ne manque jamais d'annoncer ce fait d'une façon très ap- parente. Autrefois, où une communion bien plus intime que de nos jours existait entre le public et les artistes qui le charmaient quoti- diennement, il arrivait que ceux-ci, à rocc«- sion de leur rentrée, étaient de la part de celui-Ii l'objet de manifestations cordiales et vérita- blement affectueuses. Je n'en citerai que deni exemples, pris dans la carrière de deux artistes justement célèbres, ^l. et M"** Laruette. < Si M"'** Laruette, disait un chroniqueur, avoit pa ignorer combien elle étoit chère au public, elle en auroit eu les plus fortes preuves, lorsqu'à* près une longue maladie qui Ta voit éloignée da théâtre, elle y reparut dans la Servante tnai- tresse et le Tableau parlant. i> Et le même écrivain, parlant ciîtte fois du mari, disait (iuel<|ues années plus tard : « M. Larnette, qu'une longue maladie avoit tenu éloigné da théâtre, y reparut dans le Tableau parlant, et fut si bien accueilli qu'il dut s'apercevoir qu'en lui ce n'étoit pas seulement le talent (ju'on aimoit. » RÉOUVERTURE. — Quand un théâtre a été, pour une raison quelcont^ue, fermé pen- dant un temps plus ou moins long, et qu'il reprend d'une façon régulière le cours de ses représentations, on dit qu'il fait sa réouver- ture. REPASSER UX ROLE. — Lorsqu'il n'a pîis joué un rôle depuis quelque temps, et pour se mettre à l'abri de tout accident de mémoire, le comédien qui est api)elé à rejouer ce rôle prend la précaution de le repasser jwur se le l'émettre dans l'esprit ; c'est-à-dire qu'il en relit soigneusement le texte soit en son entier, soit seulement en ce qui concenie certaines scènes, certains fragments qui lui inspirent quelques cniintos au sujet de sa mémoire. RÉPERTOIRE. — Ce mot, en matière de théâtre, a sinon plusieurs significations diverses, du moins plusieurs applications distinctes qu'il est utile de j^réciser. Le répertoire d'un théâtre se compose de RÉPÉTITEUR. — REPETITIONS. 647 l'ensemble des ouvrages qui lui appartiennent, qui n'ont pas été joués sur un autre théâtre et qu'il peut reprendre à sii volonté. Toutefois, on comprend sous le nom de « répertoire cou- rant y> toutes les pièces qui sont jouées au moins de temps en temps, et d'une pièce qui depuis longtemps n'a pas été représentée et qui n'est plus sue par les artistes, on dit qu' (c elle n'est plus au répertoire. y> — D'autre part, dans certains théâtres, comme les théâtres lyri- ques, par exemple, qui changent chaque jour leur affiche, on appelle « établir le répertoire de la semaine » fixer jour par jour et d'une fa- çon précise la composition de tous les specta- cles de la semaine qui va commencer. — En- fin, le répertoire d'un artiste comprend tous les rôles qu'il a joués dans les divers ouvrages à la représentation desquels il a pris part. En ce qui concerne les théâtres de i)rovince, jamais un directeur n'engage un comédien sans que celui-ci lui communique et lui laisse entre les mains la liste de ces rôles et de ces ouvrages, liste qui constitue précisément son répertoire. Ainsi muni des répertoires de tous ses artistes, le directeur n'a qu'à les consulter pour voir quels ou\Tages peuvent être par lui montés ra- pidement, car, lorscjue tous les rôles principaux sont sus et ne nécessitent point de travail de mémoire, il suffit d'un petit nombre de répéti- tions pour mettre sur pied une pièce même très importante. En ce qui concerne la Comédie-Française, on appelle le (/rand répertoire, et plus brièvement le répertoire y l'ensemble des grandes œuvres classiques, soit dans le genre tragique, soit plutôt peut-être encore dans le genre comique, (jui sont la gloire de ce théâtre et que nous ont léguées les grands poètes qui ont été les maîtres de la scène au dix-septième et au dix-huitième siècle. Avec Corneille et Racine, Molière et Regnard; font partie du répertoire Rotrou, Destouches, Marivaux, Voltaire, Beaumar- chais, etc. RÉPÉTITEUR. — On appelle ainsi, dans les théâtres de vaudeville et même d'opérette, une partition très réduite, qui sert au chef d'orchestre pour la conduite des ouvrages re- présentés et qui ne contient pas tous les élé- ments de la grande partition. Ce genre de par- tition reçoit parfois le nom da violon emiducteiir. — On donnait aussi, autrefois, le nom de ré})é- titeiir à certains professeui-s scéniques que les théâtres s'attachaient pour donner des leçons aux jeunes comédiens et faire leur éducation pratique. RÉPÉTITEUR DE BALLET. — Dans tous les théâtres où la danse est employée, l'un des violonistes de l'orchestre remplit les fonc- tions de répétiteur de ballet, fonctions qui con- sistent à jouer la musique des airs sur lesquels les danseurs apprennent et exécutent leurs pas. Tout d'abord, il faut que le maître de ballet, dont c'est le rôle spécial, imagine et rhgle les pas de chacun des danseurs , aussi bien que les pas d'ensemble. A cet effet, il se fait jouer par le répétiteur chacun des motifs de la musique, les lui faisant i*ecommencer plusieurs fois de suite jusqu'à ce que chacun de ces motifs lui ait inspiré les motifs de la danse. Puis, lorsque chaque pas est réglé, le répétiteur en joue l'air aux danseurs qui sont chargés de l'exécuter, au- tant de fois qu'ils en ont besoin pour l'appren- dre. Et enfin, quand chaque pas est bien su et bien éta])li, on fait les répétitions d'ensemble de toute la danse, toujours avec le secours] de l'indispensable réi^étiteur. RÉPÉTITIONS. — On appelle ainsi la longue série de travaux et d'études préparatoi- res auxquels se livre le personnel d'un théâtre pour apprendre une pièce nouvelle et la met- tre en état d'être offerte au public. Un écrivain peu au courant du sujet qu'il traitait a écrit ingénument ceci : — (c Les premières répéti- tions se font, le manuscrit à la main, devant l'auteur et le metteur en scène. Tandis que l'un et l'autre s'évertuent à faire comprendre Tes- prit de la pièce, à en régler les positions et le mouvement, les acteurs causent de leurs petites affaires, maudissent la critique, cassent du sucre (!), devinent des mots carrés; les dames brodent, tricotent, ourlent des mouchoirs, sans autrement s'occuper de la question théâtmle. Enfin, les rôles sont sus, ça se fond, l'auteur, après ce purgatoire, voit arriver le jour de la première, >; 648 RÉPÉTITIONS. Il faut nVvoir jamais mis le pied dans un théâtre pour se li\Tcr à de tels enfantillages de plume ; il faut ignorer complètement la nature du travail sccnique pour croire que les choses se font ainsi toutes seules et sans que personne y mette du sien ; il faut surtout n'avoir jamais assisté à une de ces grandes répétitions généra- les qui durent parfois de sept heures du soir à trois et quatre heures du matin, où l'on passe trois ou quatre heures entières sur un seul acte, sur un seul tableau, d'où chacun sort rompu, ha- rassé, énervé, n'en pouvant plus, il faut n'a- voir rien vu de tout cela pour écrire sans rire de telles baliveraes et traiter ainsi par-dessous la jambe un travail aussi sérieux, aussi rude, parfois aussi cruel que celui du théâtre. Le si)ectateur, en effet, ne se doute guère, lorsqu'il vient prendre place dans un théâtre pour y voir une pièce importante, des travaux de toute sorte qu'a nécessités la mise en scène de cette pièce, il ne saurait se faire une idée de la somme d'efforts, d'énergie, d'intelligence, de volonté que chacun a dépensée justju'au jour où l'œuvre s'est enfin trouvée sur ses pieds, comme on dit dans l'argot spécial, et en état de lui être offerte. Ce n'est point par jours, ce n'est point par semaines, c'est par mois qu'il faut compter le temps nécessaire à ces études, à ces répétitions, (jui sont la cause de tant de fatigues et qui exigent de la part de tous tant d'att<întiou, de l)onne volonté et d'ef- forts sans cesse renouvclt>s. Il faut procéder ici du particulier au géné- ral, et apporter de l'ordi'c et de la méthode dans un travail aussi compliqué (jue difficile. C'est pourfjuoi les répétitions sont de diveraes sortes : répétitions au foyer ou en scène, réj^étitions par- tielles ou d'ensemble, répétitions de chœurs ou de danse, répartitions de trucs ou de décoi's, ré- pétitions au quatuor ou à l'orchestre, répétitions générales, répétitions devant la censure. Les unes mènent aux autres, et ce sont les répéti- tions générales qui précèdent immédiat^înient la première représentation. En premier lieu, les rôles ayant été distribués, puis collationnés en séance sur le manuscrit pour corriger les fautes de copie, chacun doit apprendre le sien le plus proniptement possible. Ct'pendîint, en attendant qu'ils soient sus, on commence les travaux. Les premières répéti- tions, préparatoires et un peu familières, se font d'ordinaire soit au foyer des artistes, soit au foyer du public, cliaquc artiste tenant son rôle à la main. L'auteur donne ses premières indications, règle , d'accord avec le metteur en scène, la position des personnages, les passa- des à exécuter, la façon dont doivent se faire les entrées et les sorties, etc. On répète ainsi, pour dégrossir le travail, un seul acte d*a1)ord. puis un autre, puis un autre. Quand le tout a été de cette façon un peu débrouillé, que cha- cun sait son rôle et s'en est peu à pea pénétré, que l'ensemble delà pièce est entré dans Tesprit de tous, que le caractère et les détails en oni été saisis, le travail du foyer est abandonné efe r ensal>le8, et n'est éclairée que par trois ou quatre l^cs de gaz. C'est daiis cette quasi-oljscurité, faiblement combat- tue par quelques percées lointaines de jour, mais à laquelle l'œil s'habitue, qu'on procède au premier travail scénique. Sur l'avant-scène, autour et régisseur président à ce travail, pla- cés auprès du souffleur, (jui est assis à une ta- ble, son manuscrit à la main (car celui-ci ne descend dans son trou que lorsque les répéti- tions sont très avancées). Ici, les artistes doi- vent savoir leurs rôles et ne plus les avoir sous les yeux. On i-ègle d'une façon définitive, mais non sans des essais et des tâtonnements pins on moins longs, tous les mouvements scéniques, toaa les détails de l'action et jusqu'.^ ceux qui sont en apjiarence les plus insignifiants, tout devant être établi avec la précision la plus alisolue, de façon à ne laisser place à aucun malentendu, à aucune hésitation. Une fois terminée cette seconde période des tmvaux, on entame les réi>étitions avec déeon et accessoires. Pour chaque acte le décor est ix)sé comme il doit l'être ; les accessoires sont & leur place; le théâtre est meublé, c'est-à-dire que la scène est garnie de tous les objets néccs- RÉPÉTITIONS. 649 saires à l'exécution de la pièce. C'est ici que le travail intellectuel se fond avec la partie maté- rielle, avec les détails pratiques des études, et qu'elle prend toute son importance. L'optique de la scène une fois bien établie, par suite de l'agencement bien entendu de toutes les par- ties, la pièce prenant véritablement corps, l'auteur se rend un compte exact de son œuvre ; ses premières intentions lui réapparaissent clairement, parfois même elles sont complétées par de nouvelles inspirations de détail, qu'il communique soigneusement aux acteurs, afin que ceux-ci puissent s'en pénétrer. Que l'un se méprenne sur la nature d'un geste ou d'une intonation, qu'un autre ne rende pas suffisam- ment la pensée contenue dans un mot, dans une phrase, dans une exclamation, l'auteur intervient pour rectifier l'exécution, et indique à l'artiste l'inflexion à prendre, la nuance à observer, l'attitude à garder. Ces détails sont souvent d'une extrême importance, et il aiTive qu'on passe, selon les difficultés à résoudre, toute une journée sur un acte, sur un tableau, sur une scène, sur un fragment de scène. Enfin, voici la pièce à peu près complètement sue d'un bout à l'autre, et l'on va passer aux der- nières répétitions, à celles qui prennent le nom de répétitions générales et qui sont presque en tout point pareilles à des représentations. Pour celles-ci, on allume le lustre et la rampe, on con- voque l'orchestre, le rideau se baisse à chaque entr'acte, et, pour peu que l'ouvrage ait quel- que importance, les acteurs sont tenus de re- vêtir leurs costumes. Une fois là, l'auteiu* et le metteur en scène n'interrompent plus qu'en cas de nécessité absolue, et l'exécution doit se poursuivre sans désemparer. Quand ces répéti- tions ont eu lieu un certain nombre de fois, les études sont terminées, l'ouvrage est su et prêt à paraître devant le public. On comprend que l'ensemble de ces études, même réduit à ce qui vient d'être exposé, n'est pas une mince besogne. Pourtant, ces répéti- tions ne sont que celles des pièces relativement faciles à monter et sans embarras scénique : comédie, drame intime ou grand vaudeville. Mais c'est bien une autre affaire lorsqu'il s'agit d'un opéra; d'un ballet ou d'une grande pièce à spectacle, drame ou féerie, tels qu'on en re- présente à la Porte-Saint-Martin, au Châtelet ou à la Gaîté. Alors, les détails en tout genre se multiplient, les répétitions prennent une en- vergure immense, et c'est ici qu'il n'est pas rare de voir qu'on soit obligé de les poursuivre pendant un espace de trois, quatre, cinq et même six mois. Comme j'ai donné ailleurs la ^ description de ce travail , je demande la per- mission de me citer moi-même : C'est une grande tache que de conduire des répéti- tions ; aussi le travail doit-il naturellement se scin- der, chaque partie du personnel opérant séparé- ment, avant que toutes se réunissent pour les répétitions d'ensemble. S'il s'agit d'une de ces féeries dans lesquelles le personnel actif est très nombreux et où l'on voit parfois en scène jusqu'à deux ou trois cents comparses, vingt ou trente changements de décors, deux ou trois ballets, la marche de tout ce matériel et les évolutions de ce personnel considérable réclament tous les soins d'un metteur en scène capable et expérimenté. Lorsque les interprètes proprement dits de la pièce ont oc- cupé le théâtre une partie de la journée , celui-ci appartient ensuite aux choristes, aux figurants, aux comparses, qu'on fait répéter séparément et dont on arrête toutes les marches et contremar- ches. S'il y a un ballet, les danseurs ont été les premiers à s'emparer de la scène et, dès huit heu- res du matin , l'ont occupée sans encombre durant deux ou trois heures, en compagnie du violon qui leur sert de répétiteur. De plus, — mais ceci est réservé pour la nuit, après le spectacle , — on fait des répétitions spéciales , sans acteurs , sans choris- tes , sans danseurs , sans comparses , des répétitions uniquement consacrées à la pose rapide des décors, à leur éclairage, au maniement des trucs, partie capitale d'une œuvre de ce genre. Quand tout mar- che assez bien séparément, on commence les répé- titions générales, que Ton renouvelle souvent du- rant un mois avant d'obtenir l'ensemble désiré et qui occasionnent parfois dix ou quinze relâches successifs. S'il s'agit d'une œuvre musicale, la question change encore d'aspect. Pour un opéra-comique, par exemple , on commence par faire aux artistes la double lecture du li>Tet et de la partition ; la lecture de celle-ci consiste en une exécution faite au piano, le plus souvent par le compositeur en personne. En ce qui concerne le poème , les choses vont de la façon que nous avons indiquée plus haut ; mais ici le travail se double des études mu- sicales , qui doivent être menées de front avec les 650 RÉPLIQUE. — REPRÉSENTATION. autres , de telle Borte que les acteurs , en même temps qu^îls répètent le dialogue , prennent des le- çons sur la musique. Chacun reçoit ces leçons d*un accompagnateur, d*abord séparément, jusqu'à ce que chaque rôle musical soit bien su ; puis on pro- cède aux leçons d^ensemble, pour les duos, trios, etc. Les chd'urs travaillent de leur côté et prennent aussi des leçons , sous la direction do leur chef particulier, toujours de la môme manière , c*est-à- diro séparément d^abord : premiers dessus, se- conds dessus , etc., après quoi vient Tensemblc. Le travail préliminaire de la scène est le môme que pour la comédie ou le vaudeville ; les artistes com- mencent par répéter seuls, puis, quand ils savent à peu près la pièce, poème et musique, les chœurs viennent se joindre à eux; enfin, quand un résul- tat satisfaiRant est obteim ù la suite de ces répéti- tions , qui se font au piano , le rôle de Torchestre commence. On convoque d'abord simplement un quatuor de celui-ci , soit un premier et un second violon, un alto et une basse, qui font, sous la di- rection du chef d'orchestre, sans chanteurs, sans chœurs, absolument seuls, une exécution prélimi- naire de leurs parties ; quelquefois , mais très rare- ment, on convoque ensuite les instniments à vent, qui font de môme à leur tour ; puis tout Torchestre est appelé et fait une ou deux répétitions, toujours sans les chanteurs, afin que chaque musicien se familiarise avec sa partie et que les fautes de la copie puissent ôtre découvertes et corrigées. Après ces diverses é[>reuves préparatoires, on répète la musique généralement, rien que la musique, mais cette fois avec Tensemble de Torchestre , des chan- teurs et des chœurs; et enfin, lorsque Tensemblo est bon, on entame les dernières répétitions géné- rales, c'est-à-dire qu'on répète poîîmeet partition, dans Tordre voulu, comme s'il s'agissait de la re- présentation véritable. Telle est la nature, telle est la marche des travaux (lue nécessite la préparation de toute œu\Te tliéâtnile. N'avais-je pas raison de dire (jue le spectateur qui vient prendre place dans sa stalle ne se doute guère des efforts (jue cha- cun a faits, des fatij^ues que chacun a endurties, de rintelligence que chacun a dépensée pour mettre cette œuvi-e au point et la lui présenter dans les conditions les plus favonibles ? RÉPLIQUE. — On appelle réplique la phrase (pii sert de signal à un acteur soit ix)ur entrer en scène, soit pour parler à son tour. Il est donc essentiel que chaque acteur sache. tout aussi bien que son rôle, ces fragments de dialogue dits par un autre acteur et qni appel- lent son intervention immédiate, a Bien donner la réplique, i> c^est dire exactement la phrase (|ui doit amener la réponse de rinterlocnteur; a manquer sa réplique, ]» c'est, pour une raison ou pour une autre, ne pas entrer ou ne pas parler quand le moment est venu de le faire et quand cette réplique a été donnée comme il convient ; ^ n'être pas à sa réplique, >• c'est être inattentif quand cette réplique se produit et agir comme si elle n'avait pas été donnée. En ce qui concerne la musique, et dans lu pièces entremêlées de chant et de dialogue, telles qu'opéras-comiques, opérettes ou vaude- villes, la réplique a la même sig^iifieatioii; aussi, en tête de cluuiue morceau, inscritron sur chacune des parties d'orchestre la phrase qui sert de i*éphque pour l'attaque, afin que les symphonistes sachent quand ils doivent partir. Mais, pour la musique, il y a un antre genre de réplique. Lors^iu'un instrument de l'orchestre a un grand nombre de pauses à compter, et pour éviter toute erreur qui pour- rait se pi-oduire de sa part malgré la plus grande attention, on lui place en petites notes, an- dessus des dernières pauses, le dessin musical important soit du chant, soit d'un antre ins- trument, qui pri'cède immédiatement Tinstant où il doit repixMidre sa partie dans rensemUe. Gnice à ce signal, à cette réplique, l'errenr n'est plus possible, et l'instrumentiste sait d'une façon certaine à quel moment il doit i»r- tir de nouveau. REPORTER THEATRAL. — Ce mot bar- ])are de reporter, qui nous vient d'Angleterre et qui depuis quelcpies années a sottement pris l>lacc dans le langage courant, s'applique, en ce (|ui concerne le théâtre, aux écrivains qui sont charjjcés, ckns les journaux quotidiens, de ré^liger ce (^u'on apixîlle le Courrier des théâ- tres (Voy. ce mot), c'est-à-dire de donner toutes les nouvelles, tous les cancans relatifs aux théâtres, aux (»afés-concert8, aux specta- cles, etc. REPRÉSEXTATIOX. — En ce qui con- REPRÉSENTATION (première). — REPRÉSENTATION (centième). 651 cerne le théâtre, et en de certains cas, ce mot est pris dans un sens de synonymie complète avec celui de spectacle. C'est ainsi qu'on dira que la représentation ou le spectacle a été long, que la représentation ou le spectacle a été bril- lant, que la représentation ou le spectacle a été troublé par un accident. Mais là s'an'ête l'analo- gie, et le mot représentation s'applique surtout aux pièces de théâtre, pour indiquer le nombre de leurs exécutions successives : on dira ainsi la dixième, la vingtième, la cinquantième re- présentation d'une pièce, pour marquer qu'elle a été jouée dix, vingt, cinquante fois. REPRÉSENTATION (Première). — Les coutumes théâtrales sont bien changées depuis un siècle, et surtout depuis vingt-cinq ans. Autrefois on laissait au public, au vrai public, le soin de juger et d'apprécier la valeur d'un ouvrage à sa première représentation , et celui- ci laissait un libre cours à ses impressions, ap- plaudissant lorsqu'il était satisfait, sifflant s'il était mécontent, et du premier coup établissant le succès ou provoquant la chute de l'œuvTC qui lui était offerte. Il n'en est plus de même aujourd'hui, où l'on peut presque dire que les premières représentations ont lieu à huis clos, par ce fait que si la salle est toujours entière- ment garnie, on peut affirmer néanmoins (jue le public véritable, celui qui paie sa place au bureau, en est soigneusement, rigoureusement et absolument exclu. Dans ces jours ce solen- nels,» la salle d'un théâtre est remplie d'une foule particulière, composée d'écrivains, de journalis- tes, d'artistes, de fournisseurs de la maison, de gens de bourse et de finance qui ont des rela- tions avec la direction , de femmes à la mode» plus ou moins légères, qui sont généralement dans le même cas, etc., etc. C'est devant ce public particulier, forcément indulgent parce qu'aucun de ceux qui le composent n'a payé sa place, qu'ont lieu les pi-emières représenta- tions ; c'est à peine si les théâtres consentent à laisser quelques dizaines de places figurer sur la feuille de location, où elles sont encore disputées par des personnages qui, pour les obtenir, ont recours à toutes sortes de patrona- ges et de protections, si bien qu'il n'est pas rare de voir appliquer le soir, sur les bureaux déserts, une pancarte portant cette inscrip- tion : Les bureaux ne seront pas ouverts ce soir. Donc, comme nous le disions, le public est maintenant exclu des premières représenta tiens, et les théîltres en agissent ainsi pour que l'au- ditoire favorisé qu'ils invitent à ces petites so- lennités ne puisse se montrer sévère, et pour que tous les journaux qui' sont à leur dévotion puissent dire dès le lendemain que la pièce nouvelle a obtenu un succès colossal. Mais comme on ne sîiurait tromper longtemps le pu- blic, cette petite malice cousue de fil blanc n'obtient elle-même que le succès qu'elle mé- rite. Quel que soit le résultat de la première représentation, on peut dire maintenant qu'il ne compte plus pour rien aux yeux du gros des spectateurs. Les succès frelatés n'en imposent à jKïrsonne, et malgré les ovations, les rappels, les his et les trépignements intéressés qui peu- vent se produire à une première représentation, on peut tenir pour certain que si une pièce est mauvaise, son existence n'en sem ni plus lon- gue, ni plus brillante. Elle n'est pas sifflée comme elle l'eût été jadis, il est vrai, l'amour- ])roj)re de l'auteur est moins meurtri, mais elle tombe bientôt sous l'ennui et sous l'indifférence générale, et se voit obligée de céder prompte- ment la place à une autre. REPRÉSENTATION (Centième). — Il n'est pas rare aujourd'hui de voir une pièce atteindre sa centième représentation ; il en est même qui vont d'un bond jusqu'à deux, trois et (piatre cents représentations, s'éternistint pendant plus d'une année sur l'aifiche d'un théâtre. Ceci nous semble très fâcheux au dou- ble point de vue de l'art et de la production dra- matique ; mais il n'y a pas à discuter avec des faits de ce genre. Ce que nous avons seulement à constater ici, c'est l'habitude prise, depuis une quinzaine d'années, de célébrer dans les théâtres, par une fête intime et familière, la centième représentation d'une pièce nouvelle et de constater ainsi son succès. C'est sous la forme d'un brillant souper offert par les au- teurs aux interprètes de leur œuvre et aux G52 REPRÉSENTATION EXTRAORDINAIRE. — RETRAITE. principaux employ<»8 du théâtre, cjuc se produit généralement cette petite fête. Ce souper, qui a lieu d^ordinaire au théâtre, à Tissue même de la centième représentation, est sui\i d'une sau- terie à laquelle chacun et chacune prennent part avec ardeur. REPRÉSENTATION EXTRAORDI- NAIRE. — C'est une représentation composée d'une façon toute particulière, avec le concours d'artistes étrangers , à l'aide d'éléments attrac- tifs d'une nature exceptionnelle, et qui est gé- néralement donnée au bénéfice d'un artiste, ou d'une œuvre de bienfaisance, ou des victimes d'une grande calamité publique. (Voy. Béné- fice.) REPRÉSENTATION DE RETRAITE. — Celle-ci est aussi une repn.«entation extra- ordinaire, mais d'un genre particulier. A la Comédie-Française, le seul de nos théâtres qui continue d'être régi en société, tout sociétaire qui termine sa carrière a droit, en se retirant, à une représentation à son bénéfice qui prend le nom de représentation de retraite. C'est une occasion, pour le pu])lic, de lui exprimer, avec toutes ses sympathies, les regrets que lui cause son départ, et souvent ces représentations pren- nent un caractère véritablement touchant. Dans les autres théâtres, la représentation de retraite n'est qu'une faveur gracieusement accor- dée à un vieux comédien blanchi sous le harnais. Elle devient d'ailleurs fort raiv, les artistes, beaucoup plus capricieux qu'autrefois, ne s'at- tachant plus guère à un théâtre, i)assant trop volontiers de l'un à l'autre, et ïi'ayant plus de raison pour solliciter et obtenir une faveur d'une entreprise à laquelle ils n'ont été attachés que d'une façon en quelque sorte accidentelle. REPRISE. — Quand un théâtre remet à la scène une pièce qui, depuis un plus ou moins long temps, a dispani de son répertoire, et (]u'il en donne une nouvelle série de représentations, on dit qu'il en fait la reprise. Certaines pièces h grand sua^s ont eu ainsi des reprises sans nom- bre et ont atteint un chiffre fabuleux de repré- sentations, comme le Pré aux clercs, la Tour de Nesle, la Dame aux camélias, les Pilules du diahU, etc. Autrefois, au dix-huitième âê^ de, on remettait un ouvrage, on en faisait la remise; le mot a changé; aujourd'hui, onrp- prendxxuQ pièce, on en fait la reprise, RÉSILIATION. — Acte par lequel, d'an commun accord et sous certaines conditiom, un directeur de théâtre et un acteur annulent et rendent de nul effet le traité qui les liait l'un à l'autre, et reprennent leur entière liberté l'un vis-à-vis de l'autre. RESTER EN PLAN. — Se dit d'un acteor qui, frappé d'un manque subit de mémoire, et le souffleur ne lui venant pas eu aide, s'arrête en scène au milieu d'une phrase, et se trouTe pendant un instant dans l'impossibilité de coa- tinuer. Se dit aussi de pauvres acteurs de provinoe, qui , engagés par un directeur peu scrupnleax et dont les affaires ont été moins brillantei qu'il ne l'espérait , se voient abandonnés par lui et laissés sans ressources dans une ville quelconque, tandis qu'il s'en fuit soumoisemem en ayant la précaution d'emporter tout son ma- tériel. De ceux-là on dit qu'ils sont restés ai plan , qu'ils ont été laissés en plan par leur di- recteur. RETIRER UNE PIÈCE. — Un auteur a le droit de retirer sa pièce, lorsque celle-ci ert tombée lourdement et que le public lui a faii un fâcheux accueil. Hormis ce cas, il ne peut plus le faire et doit lui laisser poursuivre sa car- rière, à moins qu'il n'ait à se plaindre de pro- cédés qui peuvent lui être préjudiciables, comme celui qui consisterait à lui imposer des coupures qu'il ne voudrait pas accepter, ou à changer contre son gré la distribution des rôles. Cepen- dant, lorsque la nouveauté d'un ouvrage a été épuisée, l'auteur peut encore retirer sa pièce et la porter à un autre théâtre, si , malgré une mise en demeure de sa part, celui qui l'a créée a laissé écouler un an et un jour sans en donner au moins une représentation. RETRAITE. — Jadis, les artistes s'atta- chaient à leur théâtre ; ils y restaient pendant quinze, \îngt, trente ans, et lorsqu'ils aban- donnaient la carrière, lorsqu'ils prenaient leur REVUE. — RIDEAU D'AVANT-SCÈNE. 653 retraite après un si long service, ils étaient l'objet de la part du public, à leur dernière re- présentation, d'une de ces manifestations tou- chantes d'affection et de sympathie qui laissent un profond souvenir dans le cœur de celui qui les reçoit. Aujourd'hui, les comédiens sont de- venus nomades ; ils ne tiennent pas plus à un théâtre qu'à un autre, sont un jour ici, un au- tre là, se déplacent à volonté, abandonnant une scène importante pour une moins honorable qui les paiera un peu plus cher, ne songent qu'à l'argent et ont fort peu de souci du public et de son affection. Il en résulte que la retraite d'un comédien n'est plus qu'un événement par- feitement indifférent à tous, et qui passe com- plètement inaperçu. REVUE. — On donne le nom de revues à un certain genre de pièces à tiroirs dans lesquel- les l'auteur fait défiler sous les yeux du specta- teur tous les événements un peu saillants qui ont marqué l'année qui vient de s'écouler : révolutions , guerres, inventions nouvelles, mo- des, faits artistiques ou littéraires, crimes, mal- heurs publics, etc. Dans les pièces de ce genre, toutes choses, même les plus abstraites, sont personnifiées, de façon à faciliter leur introduc- tion sur la scène. De la légèreté, de la gaîté, beaucoup de mouvement, de l'esprit si Ton peut, quelques couplets plus ou moins grave- leux, tels sont les éléments qui entrent dans la composition de ces sortes de pièces, qui ne tien- nent à la véritable littérature que par un lien singulièrement ténu. Il y a une quarantaine d'années pourtant, deux écrivains dramatiques d'un véritable talent, les frères Cogniard, ont fait jouer plusieurs revues charmantes. RHAPSODE. — Les rhapsodes pourraient passer pour les ménestrels antiques. Ou sait que, d'après les conjectures les plus vraisem- blables, il a pu s'écouler environ un siècle et demi entre l'époque de la composition des poè- mes homériques et celle de l'invention de l'écri- ture (vers l'an 6G0 avant J.-C), qui permit de les vulgariser et de les répandre. Pendant tout ce temps, ces poèmes se répandirent et se conservèrent uniquement par la tradition orale. « Des hommes, a dit un écrivain, appre- naient par cœur la totalité ou une partie de ces poèmes, et ils allaient ensuite de ville en ville les réciter aux auditeurs charmés. Ces hommes, qu'on désignait sous le nom de rhapsodes , étaient tenus en grande estime et même en grande vé- nération ; il n'y avait pas de festin, pas de so- lennité, pas de fête publique où ils ne fussent appelés. En général, dans les assemblées où ils étaient invités, ils récitaient des parties déta- chées des grands poèmes homériques, et chacune de ces parties constituait une rhapsodie. Aux grandes fêtes publiques de la Grèce, plusieurs rhapsodes se relayaient pour réciter des poèmes entiers. Solon rendit même une ordonnance pour obliger les rhapsodes qui récitaient les poèmes homériques aux Panathénées, à suivre l'ordre régulier et à ne rien omettre. » RHAPSODIE. — Comme on vient de le voir dans le mot précédent, la rhapsodie était un fragment de poème récité par un rhapsode. Ce mot se prenait donc en bonne part chez les anciens, tandis que chez nous il est devenu un terme de dénigrement et de dédain. Si l'on parle d'un ramas de mauvais vers et de mau- vaise musique, on dira : duisit tsint d'effet dans la scène du rire, an trn- É^Ë Mm jMi:xjeiC3elxx>x ^^ai ^ 14 %/eifttet t^^o* REBOUTE, ^[^jXHà ta ^aiLcoeâ ^ùytctacut^. Depuis cinq heures jufqu'à dix, On prendra trmte Jols par Perfbnne. l2ilS^ «®i '^^^^^ Billet d'cntK-e à uuc Redoute. (Vuy. RiJoito.) sièmc acte, qu'en sortant de la représentation^ le roi dit à Molière : « Je reçois votre actrice. » Une autre comédienne fameuse, M"* Beaume- nard, femme de l'acteur Bellccour et connue sous le sobriquet singulier de Gogo, fut célèbre par la façon dont elle savait rire en scène. Ses éclats de rire étaient à la fois si véhéments et si naturels, si pleins d'une véritable gaîté, qu'elle cmportîiit tout le public après soi et faisait lit- téralement pimcr les sjKîctateurs. De nos jours, on a cité M'^*" Augustine Brohan comme l'une des femmes qui savaient le mieux rire au théâ- tre*. RITOURNELLE. — On appelle ainsi le court prélude symphonique qui précède et an- nonce un morceau de chant, et qui quelquefois termine aussi ce morceau. Parfois môme une ritournelle se fait entendre au milieu d^an air, si la situation le comporte, soit pour donner une ampleur particulière à l'expression drama- tique et scénique , soit pour laisser au chanteur le temps de respirer et de reprendre haleine. ROCOCO. — Dans tous les arts, et surtout lorsqu'il s'agit de genres ou de taleuts secon- daires, il est certaines façons de sentir et de s'exprimer qui ricillissent vite parce qu'elles manquent de naturel, de franchise et de sim- plicité, parce qu'elles sont ou boursouflées jua- -qu'à l'emphase, on précieuses jusqu'à la préten- tion. Cela frise le ridicule, et cela devient rapi- demeutroMco.L'auteurdramatiquequi voudrait écrire comme Guilbeit de Pîxerécourt, le com- positeur qui voudrait faire de la musique comme M™* Loïsa Puget, l'acteur qui voudrait joaer la comédie comme 31, Maubaut seraient par- faitement rococoa. ROLE. — C'est, à proprement parler, le texte que doit débiter chacun des personnages d'une œuvre dramatique, la partie dont chaque acteur est chargé dans la représentation de cette Camédle-FnnçaLiB. Cfoj. Râlt mtal.) -cenvre. Donc, autant de personnages, autant de râles, petits ou grands. Selon le langage du tbé&tre, les rôles sont carsctériaéa de diverses façons. Il j a de beaux rôles et de mauvais rô- les, de petits rûles et des rôles importante , ce qui se comprend sans qu'il soit besoin de l'ex- pliquer; il j a des rôles brillants, des rôles à effet, des rôles oà il n'y a qu'à ouvrir la bouche ■(BOUB^entendu :pour être applaudi) ; en regard SICTIORSAIBB CD TbEatBE. de ceux-ci, il y a les rôles difficiles, qui exigent an véritable travail de composition de la part du comédien, les rôles ingrats, desquels, malgré tous les efforts possibles, on ne peut guère tirer d'honneur ni de profit, les rôles en mauvaise situation, qui sont dans le même cas, à cause du peu de sympathie que le personnage doit exciter chez le spectateur ; il y a encore les rô- les de tenue, qui demandent des qualités parti- 658 ROLE MUET. — ROLES A MANTEAU. culières de noblesse et de distinction dans le physique et dans le débit. Il y a enfin les pan- nes et les roustissures (Voy. ces mots), qui sont les rôles exécrables, et les accessoires, qui sont ceux dont l'importance est absolument nulle. — Au point de vue matériel, le rôle est repré- senté par une copie du texte qui le compose, copie qui est remise à l'acteur chargé de le jouer et qui lui sert à apprendre ce texte. Ce rôle ne comprend pas seulement le texte en question, mais encore les répliques, c'est-à-dire les phra- ses dites par un autre personnage qui précèdent immédiatement celles que l'acteur a à débiter. Il faut, en effet, que celui-ci apprenne aussi ces phrases par cœur, puisqu'elles lui servent de signal et le préviennent que son tour est venu de parler. Il en est absolument de même poor les rôles de musique. ROLE MUET. — C'est, comme son nom l'indique, un rôle qui n'a pas un mot à dire. Dans la plupart des cas, les rôles de ce genre n'ont aucune importance , et sont remplis par un simple comparse. Parfois cependant, c'est le contraire qui a lieu, et le rôle muet, sur qui roule en grande partie l'intérêt d'un ouvrage, exige la présence d'un artiste de premier ordre, dont la pantomime expressive soit de nature à émouvoir profondément le spectateur. C'est ainsi que dans VAbhé de VÈpée, de Bouilly, le personnage du jeune sourd-muet a été créé par M"*' Talma ; que dans la Muette de Portici, ce- lui de la muette Fenella, l'héroïne de l'ouvrage, a été établi par M"® Noblet. Dans la Servante maitrese, le petit chef-d'œuvre de Pergolèse, le rôle très important de Scapin est aussi un rôle muet. ROLES (Premiers^ seconds, troisièmes). — Voy. Premiers rôles, seconds rôles, troisièmes ROLES. ROLES A BAGUETTE. — C'est ainsi qu'au dix-septième siècle on désignait, soit dans l'opéra, soit dans la tragédie, les rôles qui formaient alors l'emploi des reines, parce que, étant donnés les costumes ridicules qui avaient cours à cette époque, l'artiste qui remplissait ces rôles paraissait toujours en scène avec une longue baguette, signe de la majesté du peiBOD- nage. Les rôles à baguette de Topera seraient qualifiés aujourd'hui du nom de fortes chu- teuses, et ceux de la tragédie da nom de pI^ miers rôles. ROLES DE COMPLAISANCE. — Ceci n'est pas un emploi, et le rôle de oomplaiamoe, au contraire, est ainsi qualifié parce qu'il eâ en dehors de l'emploi de l'artiste qui est appdé à le remplir. Ce n'est qu'en province qu'on le sert de cette expression : là, où parfois les trou- pes sont peu nombreuses, et où les emplois ne sont pas doublés et triplés comme à Paris, il arrive souvent qu'un directeur est embamw pour distribuer les rôles d'une pièce nouvelle, et qu'il est obligé d'avoir recours à la complai- sance d'un acteur pour le prier de représenter un personnage qui ne rentre pas dans son genre, dans ses attributions. Mais pour que cette complaisance ne puisse lui être refusée et de- vienne ohligatoirej chaque directeur inscrit dans ses engagements une clause par laquelle cha- cun de ses artistes est tenu de lui jouer, dans le cours de l'année , tant de » Une des plus admirables romances qui soient au théâtre, et du sentiment le plus péné- trant, est celle d'Isabelle au premier acte du Pré aux Clercs. ROMANTISME (Le) AU THÉÂTRE. — Voy. Querelles littéraires. ROMPRE UN ENGAGEMENT. — C'est annuler, du consentement des denx parties, le contrat qui lie un directeur à un artiste. Dan» ce cas, rupture et résiliation sont synonymes. (Voy. RÉSILIATION.) ROND DE JAMBE. — On appelle ainsi k mouvement de danse qui consiste à faire dé- crire par une jambe, tandis que Tautre reste i terre, un cercle complet, de façon que, rejoi- gnant celle-ci, elle vienne se replacera Pendroît d'où elle est partie. Selon qu'il s'exécute en avant ou en arrière, le rond de jambe est dit en dedans ou en dehors. RONDE. — La ronde est une chanson avec refrain, composée de plusieurs couplets chantés par mie voix seule, et dont le refrain est repris en chœur, tout le monde se tenant par la main et dansant en rond, — ce qui a donné le nom à ce genre de morceaux. Dans le genre de l'o* péra-comique, plusieurs rondes sont restées cé- lèbres, entre autres celles de Ric^tard Cœur-â»- Lion, à! Aline, reine de Gokonde, de Cendrilbn, du Petit Chaperon rouge et du Pré aux Clercs. RONDEAU. — Le rondeau est une sorte de petit récit mélodique, de petit poème chanté, qui n'a point de prétention à la virtuosité, et qui, les paroles y prenant une grande impor- tance, doit être, si l'on peut dire, parlé musica- lement. Les vers y sont d'ordinaire divisés en quatrains exprimant une pensée complète, et chacun de ces quatrains donne lieu à une phrase musicale, complète aussi; mais comme k suc- cession ininterrompue de phrases si courtes et toujours nouvelles serait d'un effet fatigant, le comix)siteur se contente généralement d'en faire alterner deux ou trois, qui reviennent pé- riodiquement. Dans l'opéra-oomique, et surtout dans l'opérette, le rondeau, lorsqu'il est élégant, lestement troussé, d'un rythme poétique et mu- sical aimable^ est d'un effet presque infaillible. ROUGE. — L'éclairage artificiel du théâtrt^ oblige le comédien à user de moyens artificiels aussi, pour que son teint, rendu blafard par la fausse projection de la lumière, reprenne ses couleurs naturelles. C'est dans ce but qu'il étend sur son visage une couche de rouge et de blanc mélangés d'une certaine manière. Le rooge ROULADE. — RUE. 661 dont on se sert ainsi est un rouge végétal, qui s'emploie en poudre. ROULADE. — Dans l'art du chant, on donne le nom de roulade au passage rapide de plusieurs notes sur une même syllabe. La rou- lade est surtout de mise dans le style orné, et, en ce qui concerne le chant scénique, se trouve particulièrement à sa place dans l'opéra bouffe ou de demi-caractère. Il y aurait erreur , pour- tant, à croire que la roulade est incompatible avec le style purement dramatique et les situa- tions fortes ; Bellini, et après lui M. Verdi, ont prouvé victorieusement le contraire, et quelle que soit l'opinion qu'on ait de ces deux grands artistes, on ne siiurait nier leur incontestable sentiment dramatique. Certains airs, écrits en- tièrement dans le style orné, reçoivent le nom d'airs à roulades; tel est celui de la reine : 0 beau pays de la Toiiraine! au second acte des Huguenots, et aussi celui d'Isabelle au second acte du Pré aux Clercs, ROULER LES R. — L'acteur qui grasseyé, c'est-à-dire qui ne sait pas ou ne peut pas pro- noncer les r, est quelquefois désagréable à en- tendre; mais celui qui, ayant le défaut con- traire, articule cette lettre avec excès et, pour employer une expression consacrée, roule les r sans cesse et avec une exagération constante, celui-là est insupportable. Dans le drame et dans le mélodrame surtout, on voit certains comédiens affecter ainsi de rouler les r, croyant sans doute donner plus d'ampleur et de mor- dant à leur diction , sans se douter que par ce procédé ils fatiguent l'auditeur et l'énervent d'une façon toute particulière. — Autrefois, d'un comédien qui roulait les r avec ostentation, on disait qu'il ronjlmt, ou encore qu'il faisait la roue, ROUSTISSURE. — Expression d'argot théâtral, d'un sentiment absolument méprisant, et qui sert à caractériser la valeur d'une pièce ou d'un rôle. Lorsqu'un comédien a dit d'une pièce que c'est une roustissure, c'est qu'elle est à ses yeux indigne du public, et que tout le ta- lent qu'on pourrait apporter dans son interpré- tation ne saurait en faire surgir une seule qua- lité et lui donner une apparence de vie. RUE. — On appelle ainsi l'espace qui sépare chacun des plans qui forment les divisions du plancher de la scène. La rue est donc comprise entre chaque jeu de costières et comprend toute la largeur de la scène. Dans les théâtres ma- chinés, c'est sur la rue que se trouve la trappe de chaque plan, trappe qui se divise en fractions d'un mètre environ, avec deux ou trois fractions plus petites qu'on appelle trappillons. On donne le nom défausse riœ à l'espace qui est compris entre deux costières (Yoy. ce mot). SAINT AUGUSTIN. — C'est le patron qne fêtaient, an dis-hnitième siècle, les maîtres de danse. Par suite de ([nelles singulières cir- constances les membres de cette honorable corporation avaient-ils choisi ponr protectem- le fils de sainte Honiqne ? Je ne sanrais le dire. Tout ce que je puis faire, c'est de repro- duire cette mention que je trouve, à la date du 28 août, dans le Calendrier des Loisirs, ap- prouvé par le censeur Pîdansat de Maîrohert en 1775 : i Saint AngTistin. Fête des maîtres de danse. Ils font chanter à 11 heures une messe solennelle avec symphonie, en leur chapelle de Saint-Jnlien et Saint-Genest. » SAINTE CÉCILE. — Patronne des musi- ciens, sans qn'ellc ait pour cela beaucoup plus de titres que saint Augustin à être le patron des maîtres à danser. Le symbolisme musical do sainte Cécile, en effet, est depuis longtemps battu en brèche; l'histoire, en ce qui le con- cerne, est loin de s'accorder avec la légende, et l'on sait aujourd'hui que la vierge martyre n'a que des titres très problématiques à jouer ce rôle de protectrice de l'art masical dont on l'a chaînée depuis tantôt quinze siècles. La légende, toutefois, n'en reste pas moins poéti- que, et nul n'ignore qu'elle a inspiré à Raphaël l'un de ses plus admirables tableaux, la Sainte Cécile qui fait la gloire et l'oigneil du musée de Bolc^ne. SAINTE PÉLAGIE. — Certains auteurs eu font la patronne des comédiens ; je dois dire SAINTE-TOUCHE. cependant qu'elle est à peu pi'ès généralement inconnuo de ceux-ci, et que la tradition pro- fessionnelle an moins fait défaut. On assure qne cette eainte, d'abord comédienne à An- tiochc, se relira ensuite bot la montagne des Oliviers, où elle mourut, après une longue et sévère pénitence, vers le milieu du cinquième siècle de l'ère chrétienne. SAINTE-TOUCHE. — C'est le nom bur- lesque par lequel certains comédiens de pro- vince désignent un jour plein d'intérêt pour eux : celui où ils ]>a8aent à la caisse du théâtre pour recevoir leurs appointements du mois. SALLE. — La partie d'mi théâtre où pren- nent place les spectateurs. La salle est séparée de la scène par l'orchestre, et elle en est entiè- rement isolée quand le rideau d'avant-scène est baissé. A Paris il y a des salles très vastes, comme celles de l'Opéra, du Châtclet, de la Comédie- Française, de l'Odcon ; il y en a de très petites, de très mignonnes, comme celles des Variétés, du Gymnase, du Palais-Royal, La ulle Vcntadour (Théàtra-llallt des Menus- Plaisirs. En général, il ne faut pas qu'une galle soit trop grande, pour qu'une communication utile, nécessaire, puisse s'éta- blir entre l'acteur et le spectateur, pour que celui-ci ne perde rien du jeu de celui-là, et que le premier se sente bien compris parle second. Souvent, dans le langage du théâtre, on emploie le mot salle en eavisageant le contenu plutôt que le contenant. Si la salle est senle- mont à moitié pleine, on dira qu'il n'y a qu' « une demi-salle; > si, au contraire, le public est nombreux, on dira qu'il y a c une jolie salle, > une c belle salle, > une c salle bien garnie, s D'autre part, le mot salle de- vient synonyme de public, lorsqu'il s'agit de caractériser la disposition de celni-ci, qui, tout comme un individu, a ses caprices, sans qne l'on sache pourquoi. Si le public est ner^'eux, gouailleur, on dira : i La salle est mal dis- posée, ce soir ; » s'il se montre rétif, peu porté à applaudir : i La salle est froide; » si, au contraire, il est de bonne humeur, et encoura- geant pour les acteurs : x La salle est bien montée. » Tout cela forme une série d'expres- sions professionnelles, qui sont généralement peu connues du public. Quant ans mots : 664 SALLE DE CONCEET. — SALTIMBANQUE. « salle comble, salle pleine, d ils s'expliquent suffisamment d'eux-mêmes. SALLE DE CONCERT. — Salle spéciale- ment organisée pour l'exécution et l'audition des concerts. Paris, la grande ville artistique et intelligente, en est complètement dépoumie, car les salles Herz, Érard, Pleyel, ne sont que de vastes salons, et c'est pitié de voir nos grands concerts symphoniques obligés de s'a- briter et de se réfugier dans nos théâtres et jusque dans des manèges. Dans les pays étran- gers, à Vienne, à Londres, à Leipzig, à Cologne, on trouve des salles de concert splen- dides, nombreuses, dignes de l'art et des ar- tistes auxquels elles sont destinées. Ici, rien de pareil, et nous sommes d'une pauvreté absolue sous ce rapport. SALTATION. — La saltation, chez les Grecs, constituait un art plus complet que notre danse moderne, car elle comprenait le mouvement, l'attitude, le geste, c'est-à-dire la pantomime, et jusqu'aux tours d'adresse et d'équilibre, enfin tout ce qui peut s'obtenir au moyen de l'adresse, de la souplesse et de l'agi- lité de tous les membres et du corps. Par la saltation, on trouvait le moyen de représenter tous les objets, d'exprimer toutes les passions, de peindre même les mœurs. C'est pourquoi Simonide la définit une pbésû muette. SALTIMBANQUE. — Elle est nombreuse et variée, la race des saltimbanques, qui com- prend les acrobates, les bateleurs, les baladins de toutes sortes, pauvres hères, pauvres gens, pauvres déclassés, qui s'en vont de ville en ville, de foire en foire, parcourant le monde, vivant au jour le jour, et transportant partout leur baraque, leurs tréteaux, leurs orij^aux et leur misère ! Qui dit saltimbanque entend parler de tout ce qui forme spectacle en plein vent, de tout ce qui se montre au peuple dans les foires, dans les rues, sur les places publiques, de tout ce qui cherche à attirer les badauds et les curieux à l'aide de parades, de boniments, d'annonces plus ou moins emphatiques ou gro- tesques. Sont compris au nombre des saltim- banques les sauteurs et les danseurs de corde, les équilibristes et les faiseurs de trapèze, ks lutteurs à main plate et les Alcides en maillot, les clowns agiles et les Paillasses efElanques, les hommes sauvages et les femmes colosses, les avaleurs de sabres et les pitres à queoe rouge, les joueurs de marionnettes et les mar- chands d'orviétan, les éleveurs de singes et de chiens savants, les montreurs de lanterne magi- que et les diseurs de bonne aventure, les fai- seurs de tours et les hommes-poissons, les Jo- crisses naïfs et les Colombines de rencontre, lei mangeurs de poulets et d'étoupes enflammées, les fabricants de puces travailleuses et les som- nambules oc extra-lucides, » les femmes à barbe et les musiciens de carrefour... Est-ce tout? Non ; nous avons encore les décapités par- lants, les charlatans, les automates, les ventri- loques, les grimaciers, les bâtonnistes, lei hommes-orchestres, les nains sans pareils, les montreurs de veaux à deux têtes et de phéno- mènes de toutes sortes, que sais- je ? La race des saltimbanques est infinie, et Timaginatioa humaine ne sera jamais à court de découvertes pour amuser, étonner, réjouir ou émerveiller la foule. Certains saltimbanques sont d^ailleurs d'une adresse surprenante. On prête même parfois à quelques-uns d'entre eux des talents qui sem- blent tenir du prodige, et je ne sais trop ce qu'il faut croire de ce que raconte Bonnet, dans son Histoire de la danse, au sujet d'une certaine Gertiiide Boon, surnommée 7a belk tourneuse j qui se faisait admirer à la foire Saint-Laurent au commencement du dix-hui- tième siècle : La danseuse qu^on appeloît la helU toumeuâe, dit cet écrivain , a fait trop de bruit sur le théâtre des Danseurs de corde , pour n'en pas faire men- tion; je crois même qu'à moins de l'avoir vue, on aura peine à croire ce que je vais rapporter. Elle paroissoit d'abord sur le théâtre d'un air imposant , et y dansoit seule une sarabande , arec tant de grâce, qu'elle charmoit tous les spectateurs ; ensuite elle demandoit des épées de longueur aux ca- valiers, qui vouloient bien lui en présenter pour faire sa seconde représentation. Ce qu'il y a de surpre- nant, c'est qu'elle s'en pîquoit trois dans chaque coin de l'œil , qui se tenoient aussi droites que si SALUTS AU PUBLIC. 665 elles avoient été piquée» dans un poteau. Elle pre- noit son mouvement de la cadence des vîoIodb , qui jouoient un air qui BembI oit exciter leB vents, et toumoit d'une vitesse si Burprenante, peudaiit un quart d'heure , que touE ceux qiti la regardoient at- tentivement en demeuroient étourdis, ainsi qu'il m'est arrivé. Ensuite elle B'arrêtoit tout court, et retiroitaes épées nues l'une après l'autre du coin de ses yeux, avec autant de tranquillité que si elle les eût tirées du fourreau. Néanmoins, quand elle me rendit la mienne, dont la garde étoit fort pe- sante, je remarquai que la pointe étoit un peu en- sanglantée. Cela n'empéclia pas qu'elle ne dausfit encore d'autres danses, tenant deux épées naes dans Bes mains , dont elle meltoit les pointes tantât sur sa gorge, et tantSt dans sea narines, sans se blesser. Les saltiiubanqneB qui se montrent dans de grandes villes, sur de vrais théâtres, sont les favoris de la fortune et les maîtres du genre. Ceux-là, lorsqu'ils ont la chance de se produire dans des établissemente importants tels que, à Paris, le Cirque d'hiver ou les Folies- Bergère, se voient attribuer parfois des traitements de 1,000 ou 1,500 francs par mois. Mais pour qnelqnea-uns comme ces élus da sort , combien traînent péniblement leur misère dans ces lon- gues et tristes voitures noires, qu'on voit dis- persées sur les champs de foire, et dont Eugène Sue faisait cette description dans son roman de Martin, Venjant trouvé : — « Ils logent tons dans une de ces grandes voitures noma- des, longue d'envm)n quinze pieds, haute de dix, qui se divise en trois compartiments, éclairés au dehors par des chatières et commu- niquant intérieurement par de petites portes. Le compartiment de devant sert de m^asin ; celui du milieu, tantôt de cntsine, tantôt de vestiaire ; le dernier, de logement ( Getbe chambre-ci, la plus spacieuse, est amé- nagée comme la cabine d'un navire : huit lits, en forme de caisses, longs de sept pieds et larges de trois, s'y étagent en deux rangs; le jour vient par une ouverture à grillage, prati- quée dans l'impériale. Trois chevaux, loués de ville en ville pour un ou deus jours, trônent cette sorte de maison roulante, qni, dans le tambour d'nn double plancher, contient les toiles et les tréteaux nécessaires pour l'érection du théâtre forain, > SALUTS AU PUBLIC. — Dans les grands 666 SANS REMISE. — SAUTEUR, SAUTEUSE. théâtres, le régisseur qui vient faire une an- nonce, celui qui "vient faire connaître le nom de l'acteur ou des auteurs d'une pièce nou- velle, se présente au public en faisant trois saints, l'un à droite, l'autre à gauche, le troi- sième en face. On s'est demandé souvent l'ori- gine et la raison de ces trois saints : elles rési- dent dans ce fait qu'autrefois, dans ces théâtres, il y avait deux loges souveraines placées à Ta- vant-scène, sur les côtés du théâtre, l'une à droite, réservée au roi, la seconde, à gauche, à la reine. De là les trois saints d'usage au roi (à droite), à la reine (à gauche), au public (en face). Cet usage s'est conservé. Dans les théâ- tres secondaires, le régisseur ne fait d'ordinaire qu'un salut. SAXS REMISE. — En matière d'annonces théâtrales, les mots : safis remise sont synony- mes à' Irrévocablement (Voy. ce mot), et ont tout juste la même valeur. SARABANDE. — Voy. Airs a danser. SATURNALES. — Le culte de Saturne ne fut jamais très populaire en Grèce. A Rome, au contraire, la vénération était profonde pour ce dieu, et les fêtes qui lui étaient consacrées, les saturnales, se célébraient avec l'éclat le plus brillant. Pendant leur durée, tout respi- rait la joie, le plaisir, l'enivrement ; les tribu- naux chômaient, les écoles étaient fermées, la vie active, en ce qui concerne le travail, était comme suspendue ; il était interdit d'entre- prendre aucune guerre, d'exécuter les crimi- nels, et l'on ne pouvait exercer d'autre art que celui de la cuisine. Les amis s'adressaient des présents, s'offraient des festins; les hommes libres quittaient momentanément la toge pour un vêtement plus négligé, tandis que les escla- ves, prenant leur part de la joie publique, étaient exemptés de leurs travaux ordinaires, revêtaient les costumes de leurs maîtres, avaient la liberté de plaisanter avec eux et même le privilège de se faire ser\nr par eux. Enfin, on voyait des prisonniers recevoir la liberté, et consacrer leurs fers à Saturne. En réalité, les saturnales , fêtes pleines de licence et d'excès , avaient les plus grands rapports avec le carna- val moderne. Elles se célébraient d*abord le U des calendes de janvier, c'est-à-dire le 17 dn mois de décembre, consacre an diea; pins tard elles durèrent trois jours, les 17, 18 et 19 décembre, et plus tard encore elles dorèiem toute une semaine, qui commençait tonjonis le 17 décembre. SAUT DES BANDEROLES, DES ÉCHARPES. — Exercice de manège, qui est surtout exécuté par des femmes. Lorsque k cheval monté par une écuyère est bien lancé dans le cirque, de toute sa vitesse, deux appa- riteurs viennent se placer à un point nonuné avec une écharpe tendue qu'ils tiennent chacun de leur côté, de façon que le cheval puisse passer dessous , mais non l'écuyère ; celle-ci est donc obligée, quand l'obstacle se présente devant elle, de prendre son élan et de sauter vivement par-dessus l'écharpe pour aller re- tomber sur la croupe du cheval qui cent inné sa course. Parfois on lui tend ainsi deux, trois, quatre écharpes sur tout le parcours du manège, et elle fait ainsi plusieurs tours, franchissant toujours l'obstacle de même manière. SAUT DES CERCEAUX. — Exercice dn même genre que le précédent. Mais au lieu d'écharpc, il s'agit ici d'un cercle de bois asseï: semblable à celui d'une grosse caisse, et dont chaque côté est tendu de papier. Ce cercle est présenté à l'écuyère ou à l'écujer monté sur son cheval, et qui doit, lorsqu'il le rencontre, se lancer dedans et le traverser en crevant le papier pour retomber aussitôt sur sa monture. SAUT PÉRILLEUX. — C'est une cabriole, un tour entier (]u'un clown fait sur lui-même, en se lançant en l'air par un effort de reins et en retombant sur ses pieds. SAUTEUR, SAUTEUSE. - Sauteur, voltigeur, danseur de corde, c'était tout un pour le Parisien du dix-huitième siècle , pour l'habitué des foires, pour le flâneur friand de certains spectacles, qui donnait indifTérem- ment ces noms divers à tous les acrobates, si habiles alors, qui se distinguaient dans les exercices de ce genre. Pour ne pi48 nous répéter SAUVER UNE SCÈNE. — SCAPIN. inutilement, noua renvoyoïiB donc le lecteur aux mots Danseur de corde et Voltigeur. SAUVER UNE SCÈNE. — Dana le théâ- tre moderne, surtout depuis l'avènement et la brillante victoire des doctrines romantiques, on rencontre, dans certains ouvrages, des si- tuations très délicates, des acènes d'un sen- timent passionné très audacieux, qni exigent de la part de leurs interprètes, à cdtc d'une grande puissance d'expression, une sorte de réserve relative, beaucoup de tact et de me- BUte, de façon à ne pas effaroucher le specta- teur et à ne pas froisser onvertement des convenances qne le public veut toujours voir reapectcea. C'est cette mesure, ce tact, cette réserve du comédien qui font passer condam- nation aurcertaines audaces excessives du poète, et c'est le talent tout particulier dont il fait preuve en pareil cas qui « sauve la scène » dangereuse, et encit« lea applaudissements au lieu d'appeler les murmures qu'un moins ha- bile eût fait naitre. GlUseE, mortel, n'appujez pas, telle doit être la devise de l'acteur lorsqu'il s'agit pour lui de sauver une scène. Il y a un demi-siècle, Damas, à la Comédie- Française, était renommé sous ce rapport; plus tard, Laferrière jouit de la môme réputation ; Il en est de même aujourd'hui, depuis longtemps déjà, pour M. Delaunay, qui, à l'aide de son incomparable talent, a sauvé bien des scènes scabreuses et conjuré les dangers de situations singulièrement difficiles. SAVOIR. — Soua-entendu : son rôle. Cer- tains comédiens a savent > toujours ; d'autres, soit pareasô, soit défaut de mémoire, ne a sa- vent > jamais. Il est fort agréable de jouer avec les premiers, fort peu de jouer avec les seconda, qui tronquent les phrases, ne vous donnent jamais la réplique exacte, et, tonjonn hésitants et embarrassés, portent tout naturel- lement le trouble et l'indécision dans le jeu de leura camarades. SAYNÈTE. — Petite pièce de peu d'îm- (,j d„, ,„ gérin. portance, à deux on trois personnages, mêlée le tjpe de Scapin. d'un peu de musique. La saynète semble un autif de l'opérette, qui est elle-même un d un peu de musique. La saynète semble un diminutif de l'opérette, qui eat elle-même un diminutif de l'opéra. SCABREUX. — An théâtre, on qualifie de scabreuse une scène, une situation très andaciensea, très osées, et qni, étant donnés les justes scrupules du public, demandent à être sauvées par le jeu des comédiens, à l'aide de beaucoup de tact, d'habileté et de retenue. En de tels cas, en effet, ceux-ci doivent user d'une grande réserve, et glisser discrètement sur certains mots, sur certains jeux de scène, qui, plus accentués, exciteraient les suscepti- bilités des spectateurs et produiraient, un effet tout contraire 4 celui qu'on attend d'eux. SCAPIN. — C'est là un type dont Molière s'est emparé et qu'il a fait sien, mais qu'il a emprunté à la comédie italienne, àlaquelle il ap- partenait en propre, a C'est un intrigant, dit de Léris, nn fourbe, qui entreprend de faire réussir toutes les affaires les pins délabrées de la jeunesse libertine, qui ae pique d'avoir de l'esprit, qui fait le beau parleur et l'homme de conseil. > On sait le parti que Molière a tiré de ce caractère, bien qu'il ne l'ait employé qu'nne fois, dans ce chef-d'œuvre qui a nom ^/'otir&erwsc&iS:a;n'»(l). Parmi les comédiens italiens qui représentèrent à Paris le person- \dt , Eeguard a mis en Kèoe aiuai CGK najrc de Scapin, il fant citer celui qui fut connn soub le seul nom de Brighelle, puis Flantin (dont le véritable nom était Jean Olierardi) et Oradelin, qui ne cessi-rcnt de porter le costume du rôle. Après eux, Scapin fut peiBoniiîiié par AlcsEandro Cîarnrelli et par Camerani. SCARAMOUCHE. — L'un dee types les plus originaux et les plus cnricux de l'ancienne comédie italienne. Scanimonchc était un per- sonnage d'une nature un peu complexe, à la fois vif, gai, amoureux, aimable comme Arle- SCARAMOUCHE. — SCÈNE. (juin, et vaniteux, hâbleur, suffisant comme le Cupitan, tenant le milieu entre les dcnx, et se trouvant tantôt vaimiueur et tantôt berné. D'ailleurs élégant, léger, volage, sans scrupule, et ayaut dans l'esprit des ressources qui lui permettaient toujours de venir k bout des diffi- cultés que pouvaient lui susciter des person- nages tels que le Docteur, Cassandre ou Pan- talon. — Ce type de Scarumouche fut surtout rendu célèbre en France par les talents supé- rieurs qu'y déploya un artiste hors ligne, Tibcrio Fiorilli, que Molière étudia avec ar- deur et qui pendant longtemps fît courir tout Paris. (Voy, Comédië-Italiense.) D'autres comédiens lui succédèrent dans ce personnage. entre autres Giac pour parler des chan- teurs dramatiques les plus accomplis. SCHŒNOBATES. — Les Grecs donnaient ce nom à certains acrobates très agiles qui, montant sur une corde tendue, semblaient vol- tiger autour d'elle avec une rapidité extraordi- naire, s'y suspendant par les pieds, par les bras, par le cou, et se livrant à une foule d'exer- cices difiiciles et périlleux. SGRITTURA. — Mot italien, qui, en ma- tière de théâtre, a la même signification que notre mot engagement (Voy. ce mot). SECONDS ROLES. — Catégorie de rôles féminins, assez mal définis, qui ne forment pas un emploi distinct et détenniné, et qui sem- blent être ceux que l'on qualifie aussi de « rôles de convenance, » faute d'une appellation meil- leure et plus précise. Ce sont généralement des rôles sérieux, qui exigent de la tenue et une certaine autorité, comme, par exemple, celui de la duchesse de Marlborough dans le Verre c^eau, de Scribe. SECRÉTAIRE GÉNÉRAL. — Dans toute administration théâtrale un peu importante on trouve un secrétaire, qui prend d'ordinaire le titre un peu ambitieux de secrétaire généraL C'est le secrétaire général qui est chargé de toute la correspondance administrative, de l'entretien des rapports avec la presse, de la délivrance des billets de faveur, de l'organisa- tion du service des premières représentations, de la rédaction des engagements d'artistes et des traités avec les auteurs, etc., etc. SÉLECTION. — Les Anglais, qui, comme nous, ont le mot sélection, l'ont adapté à la lan- gue artistique. Certains concerts chez eux sont formés d'une sélection^ c'est-à-dire d'un choix de morceaux pris uniquement soit dans l'œuvre 672 SEMAINE SAINTE. — SENTINELLES SUR LE THÉÂTRE. entier d'un maître, soit dans une de ses com- positions particulières. C'est ainsi qu'un pro- gramme annoncera soit une sélection de Mozart, de Beethoven ou de "Weber, soit une sélection du Messie de Haendel, ou de VAÎceste de Gluck, ou de la Tétralogie de Richard Wagner. Le mot sélection tend à passer ainsi, sous cette ac- ception , dans notre langue musicale. SEMAINE SAINTE. — A Paris, la se- maine sainte n'offre qu'une particularité avan- tageuse aux artistes et aux employés de théâ- tre, en leur procurant un congé, les théâtres subventionnés faisant relâche pendant trois jours : le jeudi, le vendredi et le samedi, et tous les autres fermant leurs portes le vendredi saint. En province, où les scrupules des popu- lations en matière religieuse sont plus accusés, et où personne à cette époque de l'année ne voudrait mettre le pied dans une salle de spec- tacle, les directeurs ont trouvé bon de suspen- dre les appointements de leurs artistes pendant la semaine sainte, tout en se réservant la fa- . culte de les faire répéter matin et soir. Il en résulte que la semaine sainte, joie des acteurs parisiens, est l'effroi bien naturel des pauvres comédiens de province. SEMAINIER. — A l'époque où chaque théâ- tre était régi par une société de comédiens s'ad- ministrant eux-mêmes, cette société nommait à l'élection un ou plusieurs semainiera, qui étaient chargés de l'administration intérieure, de l'établissement ou de la vérification de la comp- tabilité, de la garde des papiers et archives de la société, etc., le tout sous la surveillance et avec le contrôle et la coopération du chef de la société et du comité d'administration. Le Reglemejit de la Comédie-Italienne arrêté par .le conseil d'État en 1782 portait ce qui suit, à son article XIII : Il y aura toujours trois semainiers qui serviront suivant Tordre de leur réception, et dont le plus ancien de chaque semaine sortira de fonction et sera remplacé par le plus ancien des deux restans, et ainsi successivement de semaine en semaine. Les fonctions desdits semainiers consisteront dans l'ad- ministration, police intérieure et discipline de la Société , ainsi qu'il est porté à Tarticle III du Rè- glement fait en 1774 pour Tancienne Société par Messieurs les premiers gentilshommes de la cham- ^ bre, lequel Règlement, en attendant qu'il en ait été fait un autre, servira de règle et de loi pour la présente Société. D'après ce règlement, les semainiers étaient chargés de vérifier et signer les livres de caiese, d'arrêter les comptes des dépenses, d'ordon- nancer les paiements , de contrôler, approuver et signer les feuilles d'émargement, d'être gar- diens des registres et de tous les papiers de la Société, de veiller à la bonne marche du réper- toire, etc., etc. La Comédie-Française étant le seul de nos théâtres qui continue encore de se gouverner en société , elle est le seul aussi qui ait conser- vé la tradition et la fonction fort utile de semainiers. Seulement, le rôle de ceux-ci est beaucoup amoindri par le fait de la présence d'un administratem* général, qui centralise en- tre ses mains une bonne partie du travail qui leur incombait naguère. Au dix-septième siècle, à la Comédie- Fran- çaise, les fonctions qui ont donné lieu à la dénomination de semaùiiei'S s'exerçaient de quinzaine eu quinzaine, et ceux qui en étaient chargés étaient désignés sous le nom de quinze- nier s f ainsi qu'on peut le constater dans les règlements de 1697. D'autre part, à l'époque de la Révolution, lorsque le calendrier républicain eut été substi- tué au calendrier grégorien et que les semaines de sept joui-s eurent fait place aux décades, qui en comptaient naturellement dix, les se- mainiers de nos théâtres devinrent des déca- diers, et leurs fonctions s'exercèrent de dix en dix jours. SENTINELLES SUR LE THÉÂTRE. — Parmi les excentricités qui sont à mettre au compte de l'ancien régime, il faufc rappeler celle qui consistait à placer sur chacun des côtés de la scène, dans nos grands théâtres, mie sentinelle armée, le fusil chargé, qui de- vait rester immobile pendant tout le temps que le rideau était levé. Ce singulier usage persista, je crois, jusqu'à la Révolution, et donna lieu plus d'une fois à des scènes burlesques. On a rapporté pourtant à ce sujet un épisode tou- SEPTUOR. — SERVANTE. 673 chant : M"^ Gaussin, actrice de la Comédie- Française, dont le talent était fait de tendresse et de passion, jouait un jour le rôle de Béré- nice dans la tragédie de Racine ; à un certain moment, elle déploya tant de sensibilité, montra tant d'abandon dans la douleur qu'elle devait exprimer, que l'un des soldats placés en senti- nelle sur le théâtre, profondément ému par le jeu de la grande artiste, fondit tout à coup en larmes et laissa tomber bruyamment son fusil sur le plancher. On devine l'effet produit sur le public par cet incident, qui fut célébré par un poète dans une pièce de vers commençant ainsi : Quel spectacle touchant a frappé mes regards . Quand f sous le nom de Bérénice, Gaussin de son amant dcploroit l'injustice! J'ai vu des flots de pleurs couler de toutes parts, Et jusqu'aux fiers soldats en larmes , Oubliant leur emploi , laisser tom^jer leurs armes. SEPTUOR. — Dans un opéra, ou dans un oratorio, un septuor est un morceau à sept voix, parfois renforcé par le chœur, et accompagné par l'orchestre. — Dans un concert, le septuor est une composition concertante pour sept ins- truments, que le compositeur choisit à sa guise et comme il l'entend. SÉRÉXADE. — Au théiltre, la sérénade est une chanson d'un caractère amoureux et tendre, que le premier ténor, — ou parfois le bartyon , — qui est le jeune premier de la pièce, chante sous le balcon de Imprima donna. Il fut un temps où un opéra italien qui se respectait ne pouvait, s'il appartenait au genre bouffe ou di mezzo carat fei^e, se présenter sans la sérénade obligée. Il est vrai que quelques-unes étaient charmantes, entre autres celle du Don Pas- quale de Donizetti. Mais la merveille des séré- nades passées, présentes et à venir sera tou- jours celle du Don Juan de Mozart. SERVANTE. — On donne ce nom à un châssis mobile, muni d'un ou deux becs à gaz, auxquels on fixe à volonté un long tuyau de caoutchouc qui, partant du compteur, permet la transmission du gaz dans ces becs. On pent, selon le besoin, transporter ce châssis sur tel DICTIONNAIBS DU THEATRE. OU tel point de la scène, et c'est ainsi qu'on éclaire le théâtre aux répétitions. SERVICE DE PRESSE. — On api^elle « service de presse » le travail de répartition et de distribution des billets que les administra- tions théâtrales offi'ent aux journaux les jours de premières représentations, de reprises et de débuts importants, pour que ceux-ci puissent rendre compte à leur guise des résultats de la soirée. Ce n'est pas là un travail facile dans une ville comme Paris, où le nombre des journaux de tout genre est si considérable, où quelques- uns se montrent fort exigeants à cet égard, et où môme certains journaux étrangers ont des correspondants qui sont chargés de les informer de ce qui se passe dans nos théâtres. Or, comme les salles de spectacle ne sont pas élastiques, comme leur contenance est limitée, comme, d'autre part, le senice de la presse est énorme, force est bien de le diviser. Aux journaux poli- tiques quotidiens, aux grandes revues, à quel- ques feuilles importantes d'art et de littérature, sont réservées des places pour la première re- présentation ; et quelques-uns en absorbent un grand nombre, si l'on veut bien remarquer qu'il leur faut une loge pour le rédacteur en chef, une loge ou deux fauteuils pour le criti- que spécial, et des places pour le ou les reporters. Il est tel journal, comme le Figaro ^ par exem- ple, qui ne compte pas moins de vingt-deux places à lui seul, régulièrement, dans certains théâtres, aux jours de première représentation. On conçoit donc que ce jour-là tout le monde ne puisse être servi. A la seconde représenta- tion sont remis beaucoup de feuilles hebdoma- daires, de journaux artistiques ou littéraires d'importance secondaire, et enfin on fait parfois encore un envoi pour la troisième représenta- tion à certains petits journaux moins impor- tants encore, d'une utilité problématique en ce qui concerne la publicité, mais envers qui l'on tient malgré tout à être courtois, les théâtres étant naturellement disposés à entretenir de bonnes relations avec toute la presse. Le service est envoyé d'ordinaire, la veille ou l'avant- veille de la représentation, non aux bureaux mêmes de chaque journal, où il iDour^ rait s'égarer dans des mains infidèles, mais au 48 C74 SEXTUOR. — SIFFLET (le) AU THÉÂTRE. domicile personnel de chacun des intéressés. Si SICINNIS, — L'une des trois danses théâ- par hasard un accident se produit le jour fixé traies des Grecs. Elle était caractérisée par sa pour la représentation, qui empêche celle-ci violence grotesque , et réservée aux petites piè- d'avoir lieu , les théâtres prennent générale- ces satiriques dont on faisait suivre les tragé- ment la précaution d'envoyer à chacun, aussi dies. La sicinnis était dansée par les Silènes, à domicile, un contre-ordre par le moyen de les Pans et les Satyres, dépêches télégraphiques. SEXTUOR. — Au théâtre, dans un opéra, le sextuor est un morceau à six voix, qu'on renforce quelquefois par radjpnction du chœur, et qui est accompagné par l'orchestre. Il en est de même dans l'oratorio. — Dans un concert, le sextuor est une composition écrite pour six instruments concertants. SGAXARELLE. — L'un des personnages les plus célèbres de notre théâtre , qui fut créé par Molière, et que les poètes n'ont plus osé mettre en scène après lui. Sganarelle n'est pas un type unique et rigide, et Molière en a varié la nature et le caractère selon les besoins de l'intrigue et du sujet des pièces dans lesquelles il l'a fait intervenir : le Médecin volant, le Ma- riage forcé, le Festin de Pierre, îe Médecin mal- gré lui, r École des Maris, F Amour médecin, enfin Sganarelle ou le Cocu imaginaire. Le Sganarelle auquel on fait le plus souvent allu- sion est celui du Médecin malgré lui, dont les saillies tantôt naïves, tantôt rusées, sont pleines d'un sentiment comique si complet et si \Tai ; c'est à lui que l'on doit certaines locutions de- venues proverbiales en quelque sorte : Il y a fagots et fagots, Vailà pourquoi votre fille est muette, Nous avons changé tout cela, etc., etc. Quant au Sganarelle du Cocu imaginaire, il n'est pas moins comique dans un autre genre , et l'on ne s'est pas fait faute non plus d'y re- courir pour caractériser un époux qui est ou qui se croit trompé. Molière lui avait pourtant fait dire à lui-même, au moment où il se croit certain de son malheur : SganareUe est un nom qu'on ne me dira plus , Et l'on va m'appeler seigneur Cornéliu?*. Mais Cornélius ne s'est point popularisé, et c'est le nom de Sganarelle qui est resté comme tj'pe des.... malheureux imaginaires ou réels. SIFFLET (Le) AU THÉÂTRE. — Il est difficile de mieux caractériser le sifflet et son emploi au théâtre que ne le faisait un cri- tique en disant que c'est « un instrument de mauvaise compagnie que le bon goût appelle quelquefois à son aide. y> On sait que le sif- flet est le moyen le plus expressif qu'un spectateur puisse employer pour exprimer son mécontentement. Or, on aura beau argumenter, il est certain que si l'on m'accorde la faculté d'applaudir lorsque je suis satisfait, on ne sau- rait me contester le droit de siffler lorsque je suis mécontent. Le sifflet est brutal, d'accord, et ceux-là lui ont fait toit qui en ont mésusé ou abusé ; on ne devrait l'employer qu'avec un extrême discernement et une grande discrétion. Mais il est parfois utile, et si tel comédien que je connais s'entendait siffler chaque fois qu'il manque de respect au public par sa nc^ligence ou son laisser-aller, si telle comédienne que je pourrais nommer recevait le même châtiment lorsqu'il lui arrive de s'écarter de la décence et de commettre une faute contre les règles de la bienséance la plus élémentaire, l'un et l'autre, j'en réponds, se tiendraient sur leurs gardes et s'y prendraient à deux fois avant de commettre les incartades qu'on leur peut reprocher chaque jour. Pour moi, je trouve que le sifflet a du bon lorsqu'il résonne avec justice, et je suis de l'avis du grand comédien Préville, qui un soir, en plein foyer de la Comédie-Française, expri- mait ainsi le regret qu'une ordonnance de po- lice eût interdit l'usage du sifflet : — « Je voudrais pour tout au monde qu'on n'eût pas enlevé au public le droit de siffler. Je l'ai vu applaudir au jeu forcé de quelques-uns de mes camarades ; j'ai chargé mes rôles pour recevoir les mêmes applaudissements. Si, la première fois que cela m'arriva, un connaisseur m'eût lâché deux bons coups de sifflet, il m'aurait fait rentrer en moi-môme et je serais meilleur, i» Je sais bien que malheureusement le sifflet SIFFLET (LE) AU THÉÂTRE. 675 était souvent injuste et sans raison, et c'est Tabus qu'on en a fait qui, comme je le disais, lui a porté tort et Ta rendu odieux. On sait l'a- venture qui arriva à Dugazon, à l'époque où il ne faisait encore que doubler Préville. Un soir qu'il jouait Brid'oison dans le Mariage de Fi- garo^ comme il entrait en scène alors qu'on s'attendait à voir son chef d'emploi , on com- mence par siffler mon homme vertement et préventivement, « J'en-en-entends bien, » fait Dugazon sans se déconcerter, et comme s'il était déjà dans son rôle de bègue. Son sang- froid irrite les siffleurs, qui poursuivent de plus belle. continue Dugazon. Cette fois, ce fut une immense bordée de sifflets qui partit de tous côtés. « Eh bien, reprend l'acteur, est- ce que vou-ous croyez que je n'en-en-entends pas ? » Devant cet imperturbable sang-froid, les siffleura finirent par céder. Il faut ajouter qu'ils étaient complètement dans leur tort. Mais ce n'est pas là une raison pour avoir abandonné, comme on l'a fait, l'usage parfois légitime du sifflet. De quelle époque date le sifflet ? on ne sau- rait le dire au juste. Les uns prétendent qu'il se fit entendre pour la première fois, dans l'en- ceinte de la Comédie-Française , à la première représentation d'une comédie de Thomas Cor- neille, le Baron des Fondrières, en 1()86 ; d'au- tres, reportant à 1680 sa première manifesta- tion, le font apparaître à VAspar de Fontenelle, tragédie plus que médiocre et dont le succès fut absolument négatif. Ceux-ci pourraient invo- quer à l'appui de leur assertion le témoignage de Racine, à qui l'on a attribué cette épigramme sur Fontenelle et son Aspar : Ces joars passés, chez nn vieU histrion, Un chroniqueur émut la question Quand dans Paris commença la méthode De ces sifflets qui sont tant à la mode. Ce fut, dit l'un, aux pièces de Bojer; Gens , pour Pradon , voulurent parier. — Non, dit l'acteur ; je sais toute Thistoire, Qu'en peu de mots je vais vous débrouiller. Bo jer apprit au parterre à bâiller ; Quant à Pradon, si j'ai bonne mémoire, Pommes sur lui volèrent largement ; Mais quand sifflets prirent commencement C'est (j'y jouois, j'en suis témoin fidelle), C'est & YAtpar dn sieur de FonteneUe. Si Pradon, dont il est ici question, ne fut pas le premier sifflé, il eut son tour et ne per- dit rien pour attendre. L'abbé de Laporte a ra- conté sur lui une anecdote assez plaisante, qu'on pourrait intituler V Auteur sifflé, sifJianU battu et content; c'est à propos de sa tragédie ai Electre : Pradon, à la premier^ représentation de cette pièce, s'en alla le nez dans son manteau avec un ami se mêler dans la foule du parterre, afin de se dérober à la flatterie et d'apprendre lui-même , sans être connu, ce que le public penseroit de son ou- vrage. Dès le premier acte, la pièce fut sifflée. Pradon, qui ne s'attendoit qu'à des louanges et à des acclamations, perdit d'abord contenance, et frappoit fortement du pied. Son ami, le voyant troublé , le prit par le bras et lui dit : « Monsieur, tenez bon contre les revers de la fortune, et, si vous m'en croyez , sifflez hardiment comme les au- tres. )) Pradon , revenu à lui-même et trouvant ce conseil à son goût , prit son sifflet et siffla des mieux. Un mousquetaire l'ayant poussé rudement , lui dit en colère : w Pourquoi sifflez- vous, Monsieur ? La pièce est belle , son auteur n'est pas un sot , il fait figure et bruit à la cour, w Pradon , un peu trop vif, repoussa le mousquetaire et jura qu'il siffleroit jusqu'au bout. Le mousquetaire prend le chapeau et la perruque de Pradon , et les jette jusques sur le théâtre. Pradon donne un soufflet au mousque- taire, et celui-ci, l'épée à la main, tire deux lignes en croix sur le visage de Pradon et veut le tuer. Enfin Pradon sifflé et battu pour l'amour de lui- même , gagne la porte et va se faire panser. Si cette anecdote est vraie, Pradon aurait été sifflé avant Thomas Corneille et même avant Fontenelle, son Electre remontant à 1677. Mais s'il fallait en croire certaines chro- niques, qui affirment que les deux premières représentations des Plaideurs furent vigoureu- sement sifflées. Racine aurait encore le pas sur Pradon, les Plaideurs étant de 1668. Quoi qu'il en soit de la date de sa naissance, il paraît certain que le sifflet se propagea rapi- dement. Il devint même tellement à la mode que la police, qui se mêlait alors de tout, jugea devoir l'interdire. Cela n'empêchait pas les pièces de tomter, et l'on s'en aperçut à l'Opéra, où, ne pouvant siffler V Orphée de LuUj fils (1690), un spectateur, plus mécontent encore que les autres, s'en vengea par ce rondeau : 676 SINFONIA. — SITUATION. Le sifflet défendu ! quelle horrible injustice ! Quoi donc ! impunément un poète novice , Un musicien fade, un danseur éclopé Attraperont Targent de tout Paris dupé, Et je ne pourrai pas contenter mon caprice ! Ah ! si je siffle à tort, je veux qu'on me punisse ; Hais siffler à propos ne fut jamais un vice. Non , non ! je siffleraL L'on ne m'a pas coupé Le sifflet. Un garde, à mes côtéi planté comme un Jocrisse, M'empêche-t-il de voir ces danses d'écrevisse , D'oiiïr ces sots couplets et ces airs de jubé? Dussé-je être , ma foi , sur le fait attrapé , Je le ferai jouer à la barbe du Suisse, Le sifflet. De la Comédie-Française le sifflet avait passé à rOpéra. Il ne tarda pas beaucoup à avoir ses entrées à la Comédie-Italienne , où , dit-on , il se fit entendre pour la première fois avec vigueur à la représentation d'une mauvaise facétie intitulée Arlequin feint guérido?i, moifie et clmt ou V Apothicaire ignorant (1716). Il fit surtout des siennes, paraît-il, aux représenta- tions d'mie autre pièce, le Persiffletir^ ce qui fit dire à un loustic que toutes les fois qu'on jouait U Père siffletir^ ses enfants prenaient place au parterre. Tantôt autorisé, tantôt interdit, puis rej^er- mis, puis redéfendu, le sifflet venait encore d'ê- tre l'objet d'une mesure restrictive lorsque pa- rut à la Comédie-Fmnçaise une piètre tragédie de Marmontel, Cléopâtre. Défense étant faite de siffler, le public se tenait coi et rongeait son ennui. Mais le théâtre, c^ui avait bien fait les choses, s'était avisé de commander à Vaucanson un aspic mécanique : or, voici qu'au dénoue- ment, Cléopâtre approchant le serpent de son sein, celui-ci se tord en sifflant de la façon la plus stridente. Un spectateur s'écrie alors : Marmontel, dit-on, n'aimait pas qu'on lui rappelât le sort de sa Cléopâtre. Piron, moins sensible, répondit un jour à un ami qui cons- tatait qu'une de ses tragédies avait été écoutée jusqu'au bout sans sifflets ni murmures : — Tous les auteurs n'ont pas le même sang-froid. On cite cet exemple de Koyou, qui, sexagénaire, faisait représenter à rOdéon (1825) une tragédie intitulée la Mort de César; moins heureuse que celle de Voltaire, celle-ci ne trouvait pas grâce devant le parterre, qui en accueillait chaque tirade par des sifflets vigoureux ; après avoir souffert quelque temps en patience, l'auteur, hors de lui, finit par faire irruption sur la scène, descend jusqu'au souf- fleur, lui arrache des mains le manuscrit et l'emporte pour qu'on ne puisse continuer la pièce. J'arrête ici cette série d'anecdotes sur le sif- flet, car un volume ne me suflRrait pas si je voulais épuiser le sujet. SINFONIA, — C'est le nom que les Ita- liens donnent au morceau de musique que nous appelons ouverture (Yoy. ce mot). SITUATION. — On ne doit point confon- dre la situation avec le coup de théâtre, qui est de sa nature brusque, inattendu, parfois vio- lent, et qui constitue presque toujours une sur- prise. Ce qu'on appelle au théâtre une situation doit découler en quelque sorte logiquement, naturellement, des incidents qui naissent au cours de l'action , et doit être amené sans ef- fort apparent, par le seul fait de la succession des événements qui se produisent et de la na- ture diverse des caractères que le poète prête à ses personnages. La situation, en un mot, doit être amenée, préparée, et rendue en quelque sorte inévitable par tout ce qui l'a précédée. C'est là ce qui fait sa force aux yeux du spec- tateur, ce qui lui donne toute sa puissance et toute son énergie. Si, dans Tartuffe ^ Molière a pu employer au dénouement deux coups de théâtre successifs, la menace d'expulsion d'Or- gon par l'huissier Loyal et l'arrestation de Tar- tuffe, c'est qu'il les avait rendus possibles en créant cette situation par laquelle Tartuffe, d'humble et de soumis qu'il se montrait pour arriver à ses fins, se démasquait enfin et deve- nait usurpateur et voleur. Mais encore peut- être faut-il ici distinguer : ceci est une situa- tion dramatique, et dans Tartuffe même nous trouvons une gmnde situation scénique : c'est celle où Orgon, dans l'épisode de la table, voit enfin se dessiller ses yeux, et acquiert la preuve de rhypocrisie et de l'infamie de celui qu'il SOCIÉTAIRE. — SOCIÉTÉ DES CONCERTS. 677 considérait comme un saint et qui, avant de le frustrer de ses biens et de sa fortune, voudrait lui voler sa femme et son honneur. Au reste, comme on l'a dit, un auteur habile fait naître la situation lors même qu'elle est le plus inat- tendue, et Molière, qui possédait et devinait tous les secrets de l'art, savait la faire 8ur<çir de tout ; son génie l'inspirait sans cesse, et un mot, un jeu de scène, un trait comique ou spi- rituel qui semblait n'avoir que la portée d'une plaisanterie, lui suffisaient pour établir, pro- longer ou transformer une situation. On peut presque en dire autant de Beaumarchais, dont l'esprit fertile en ressources de tout genre, dont l'étonnante science du théâtre savaient faire succéder les situations les unes aux autres avec un naturel et une facilité qui tenaient du pro- dige. Je ne parle pas de Corneille , parce qu'il y en aurait trop à dire sur son compte , et que celui-là a trouvé les situations les plus étonnam- ment x)athétiques et dramatiques qui soient au théâtre. SOCIÉTAIRE. — Dans un théiltre régi en société, comme aujourd'hui encore la Comédie- Française, les comédiens se divisent en deux classes : les sociétaires^ qui sont ceux qui font partie de la société, en courent les risques et en partagent les bénéfices, et les pension7iaires, qui reçoivent un traitement fixe et ne subissent aucune chance, bonne ou mauvaise. Les socié- taires se recrutent naturellement parmi les pensionnaires les plus utiles et les plus méri- tants, et chaque année, à la Comédie-Française, ils s'assemblent à une époque déterminée pour décider à la majorité des suffrages l'admission dans la société de ceux des pensionnaires qui leur semblent les plus dignes de cet honneur et de cet avantage. (Voy. Part, Pensionnaire, Prorata, Semainier, Société.) SOCIÉTÉ. — La Comédie -Française est aujourd'hui le seul théâtre, en France, qui continue d'être régi sous la forme d'une société dont chaque membre participe aux charges et aux bénéfices communs. Mais ce qui n'est main- tenant qu'une exception était autrefois la règle générale, et jusqu'à la Révolution, presque tous les théâtres de France étaient constitués en société. Ce n'est pas à dire pour cela que les conditions d'exploitation des entreprises fussent partout les mêmes ; mais le principe était à peu près universel , et en province conmie à Paris la plupart des théâtres se gouvernaient de cette façon. L'ancienne société de la Comédie-Ita- lienne, aussi célèbre que celle de la Comédie- Française, se continua à l'Opéra-Comique lors- que celui-ci succéda à sa devancière, et la société de l'Opéra-Comique dura jusqu'en 1828, épo- que où une gestion maladroite et une série de désastres amenèrent une transformation admi- nistrative et la nomination d'un directeur res- ponsable, agissant à ses risques et périls. De- puis plus d'un demi-siècle le système des socié- tés théâtrales a été complètement abandonné, et la Comédie-Française est, comme nous le disions, la seule qui ait conservé ce mode de gou- vernement intérieur, qu'elle pratique depuis plus de deux cents ans et auquel elle doit une prospérité que rien n'a pu ébranler jusqu'ici. SOCIÉTÉ DES CONCERTS. — La Société des concerts du Conservatoire est une institu- tion musicale dont la supériorité est reconnue de tous, et qui est sans rivale dans le monde en- tier. Fondée en 1828 , à l'instigation et grâce aux efforts d'Habeneck, alors chef d'orchestre de l'Opéra, elle donna son premier concert le 9 mars de cette année, et depuis lors jusqu'à ce jour elle n'a cessé de croître , de prospérer, et ses exécutions merveilleuses lui ont valu un éclat, une renommée, une célébrité que cer- taines sociétés fameuses de l'Allemagne, telles que le Gûrzenich de Cologne et le Oewandhaus de Leipzig , lui envient sans pouvoir parvenir à les atteindre. Le personnel instrumental et vocal de la Société des concerts se recrute uni- quement dans les rangs des anciens élèves du Conservatoire, et les séances ont lieu dans la grande salle de cet établissement. La Société est administrée par un Comité choisi dans son sein , à l'élection ; son président de droit est le directeur du Conservatoire, et elle a pour vice-président le chef d'orchestre qu'elle se choisit elle-même. Gardienne fidèle des gran- des traditions classiques, elle est renommée surtout, dans toute l'Europe, pour la perfec- tion incomparable avec laquelle elle exécute 678 SOLI. — SOLO. les symphonies de Beethoven, perfection qu'on ne saurait retrouver même en Allemagne, pa- trie de ce grand homme. On lui reproche avec quelque raison de se confiner dans un cercle un peu trop restreint, de ne point va- rier assez ses programmes, et de se tenir un peu trop fermée à toute espèce de tentative un peu nouvelle et un peu audacieuse; on pourrait dire aussi qu'elle néglige un peu trop volontiers les œuvres de certains artistes nationaux dont le génie pourtant devrait l'in- téresser et qu'elle laisse vraiment trop tomber dans l'oubli, entre autres Méhul et Cherubini. Mais ces griefs, assurément légitimes, ne doi- vent pas rendre injustes envers la Société des concerts, et ne sauraient faire oublier qu'elle est l'une des gloires artistiques et Tune des institutions les plus précieuses de la France. — Depuis sa fondation, cinq chefs d'orches- tre se sont succédé à la tête de l'illustre société : Habeneck (1828-1848) ; Girard (1849-1860); Tilmant (1861-1808); George Hainl (1869-1871) ; enfin, M. Deldevez, qui occupe ces fonctions depuis 1872. SOLI. — Ce mot italien s'emploie dans la langue française avec l'apparence du barba- risme. Puisqu'on l'a fait français par l'usage sous la forme du singulier : solo^ on eût dû le franciser aussi dans son pluriel et écrire des 8olo8, On ne l'a point fait franchement, et l'on va voir ce qu'il en résulte. Le mot soli ne s'emploie qu'en matière de concert, et lorsqu'il s'agit d'une œuvre vocale et symphonique im- portante, telle qu'oratorio, messe, cantate, scène lyrique ; les soli sont, en ce qui concerne ces œu\Tes, ce que sont les rôles dans un opéra, et l'affiche dira que les soli seront chantés par tel et tel artiste, comme elle dirait pour un opéra que les rôles seront joués par tel ou tel autre. Mais voici où la confusion grammaticale se produit. Tandis qu'on emploie ici ce mot sous la forme du pluriel italien : soli^ parce qu'il se rapporte à plusieurs artistes, on l'emploiera sous la forme d'un pluriel français dans une phrase conçue, par exemple, comme celle-ci : « Les solos de violon seront exécutés par M.***, y> et jamais dans ce cas on n'écrira 8oli^ parce qu'il s'agit d'un seul artiste et d'un seul instrument. Une autre anomalie, plus baroque encore peut-être, est aussi à signaler. Lorsque, dans un morceau d'orchestre, une phrase importante et à découvert est confiée à tout un corps d'instruments semblables, par exemple à tous les altos ou à tous les violoncel- les, on ne dit pas que c'est un solo , le solo dé- signant un instrument unique, mais on dit que c'est un soli, pour faire comprendre que c'est une phrase solo (ou solo) exécutée par plusieurs instruments. On a donc cette étrangeté de voir l'adjectif singulier un qualifier et déterminer un substantif pluriel ! SOLISTE. — Chanteur ou instrumentiste chargé de l'exécution d'un ou de plusieurs aoks dans un concert. Dans un orchestre de théâtre, les solistes sont aussi ceux à qui incombe l'exé- cution des solos. (Voy. Solo.) SOLITAIRE. — On appelle solitaire le spectateur qui, entrant au théâtre par l'entre- mise du chef de claque , afin de payer sa place moins cher qu'au bureau, la paie cependant un prix assez élevé pour se l'éserver le droit de ne pas être confondu avec les claqueurs et de ne pas participer à leur besogne peu n^^ûtante. (Voy. Claqueurs.) SOLO. — Phrase musicale importante con- fiée à un seul instrument, pendant que le reste de l'orchestre accompagne. Dans certains mor- ceaux de chant, on voit ainsi un instrument solo jouer, à côté de la voix, un rôle considéra- ble et prépondérant. Nous citerons pour exem- ples le solo de violon de l'air du second acte du Pré aux Clercs; le solo de flûte des airs de folie de VÉtailc du Nord et de Lucie de La- mermoor; le solo de cor anglais de la romance du troisième acte des Mousqtœtaires de la Reine; le solo de cor de l'air du second acte de la Dame blanche; le solo d'alto de la romance de Latimer au premier acte du Songe d'une nuit d'été, etc. Autrefois, à l'Opéra, les instrumentis- tes qui étaient chargés de jouer les solos ne faisaient point leur partie dans l'orchestre ; de plus, leur nom était inscrit sur l'affiche, ce qui était au moins aussi intéressant que d'y SONNETTE DE L'ENTR'ACTE. — SORTIE (fausse). 679 rencontrer celui d'un mince coryphée chargé de donner une réplique de deux mots ou de deux mesures. On a renoncé à ce double usage, bien que le public attendît avec impatience et applaudît avec transport le solo, quand celui-ci devait être exécuté par l'admirable \ioloni8te Baillot, le grand flûtiste Tulou ou Texcellent corniste Frédéric Duvernoy, et que l'affiche l'avait annoncé en ces termes : Le solo de violon sera exécuté par M. BAILLOT. Aujourd'hui, il semble que le plus piètre chan- teur soit au-dessus du plus admirable virtuose, et celui-ci est condamné à l'anonvmat même quand son talent fait éclater les applaudisse- ments de toute la salle. On donne le nom de solo à l'instrumentiste chargé d'exécuter les solos dans un orchestre. On dit ainsi violon solo, flûte solo, hatdbois solo, etc. SONNETTE DE L'ENTR'ACTE. — A Paris , une sonnette électrique prévient de la fin de Tentr'acte les spectateurs retirés au foyer et ceux qui se sont réfugiés au café du théâtre, et leur annonce que le moment est venu de rejoindre leurs places. En province, un garçon de théâtre fait dans le même but, à la fin de chaque entr'acte, le tour du théâtre en agitant une grosse cloche destinée à avertir les spectateurs que la représentation va repren- dre son cours. SOPRANISTE. — C'est le nom qu'on don- nait jadis à certains chanteurs qui, par le fait d'une opération que nous n'avons pas à décrire ici, avaient conservé la voix de soprano natu- relle aux enfants et que ceux-ci voient se trans- former à Tépoque de la mue. Pendant environ deux siècles, ce fut une mode en Italie de faire subir aux enfants cette mutilation infâme. L'art s'en trouvait bien, à la vérité, car les so- pranistes étaient généralement en possession de voix admirables, et comme ils n'avaient plus d'autre amour que celui de la musique, ils s'y livraient avec ardeur et devenaient de merveilleux chanteurs. Ces artistes, qui ont laissé dans l'histoire de l'art une trace lumi- neuse, remplissaient souvent les rôles de fem- mes dans les opéras , et piirmi les plus fameux d'entre eux on peut surtout citer les noms de Balthazar Ferri, de Farinelli (Carlo Broschi), dont l'existence aventureuse et singulière a fourni à Scribe le sujet d'un de ses plus jolis livrets d'opéra-comique , la Fart dic diable, de Bernacchi, de Velluti et de Crescentini. SOPRANO, — Mot italien passé dans notre langue, et qui caractérise la voix de femme la plus élevée. En France, où l'emploi de la voix de contralto est rare, presque tous les rôles féminins de nos opéi*as sont écrits pour soprano. Il n'en est pas de même en Italie, où, au contmire, la voix de contralto est souvent employée. — Dans les chœurs mixtes à quatre parties, la partie la plus élevée est celle de soprano. SORTIE. — Au théâtre, dans quelque genre que ce soit, les sorties, comme les entrées de chaque i^ersonnage, doivent toujours être mo- tivées par la situation, et se produire de la fa- çon la plus naturelle. Une sortie maladroite- ment amenée par Fauteur est fort difficile à faire pour le comédien. Celui-ci, d'ailleurs, doit toujours apporter beaucoup de soin à la façon dont il efiFectue ses sorties, (c C'est un ta- lent que n'ont pi\s tous les acteurs, disait un critique du temps jadis, que celui de hiaw faire une sortie; peu de tragédiens y réussissent. Fleury y excellait; mesdemoiselles Mars et Jenny Yertpré, Potier, Lepeintre et Tiercelin en ont trouvé le secret. » Rachel faisait des sorties admirables, et Ton en peut dire autant, aujourd'hui, de M"® Krauss à l'Opéra. On donne souvent le nom de sortie à la contremarque que, dans les entr'actes, chaque spectateur qui sort du théâtre i*eçoit au con- trôle, et qu'il doit rendre lorsqu'il rentre pour aller rejoindre sa place ; et cela parce que le mot : sortie est généralement écrit en grosses lettres sur cette contremarque. (Voy. CoXTREilARQUE.) SORTIE (Fausse). — On appelle ainsi le jeu de scène d'un acteur qui , au moment où le public croit le voir disparaître et lorsqu'il se 680 SOTIE. — SOUBRETTES. trouvait déjà presque hors de sa vue, est ramené en scène par l'action et revient sur ses pas pour continuer d'y prendre part. En de certains cas, et dans certaines situations particulièrement dramatiques, ce mouvement acquiert une grande puissance et peut produire un eflPet considérable; mais il est souvent fort difficile à exécuter par l'artiste , et réclame de lui une grande intelligence et le sentiment très vif de la situation. SOTIE. — C'était un genre de pièces comi- ques, de farces satiriques d'un caractère très libre, spéciales à la Confrérie des Sots, et que celle-ci jouait, parfois en compagnie des En- fants sans Souci, pour les opposer aux mystères des Confrères de la Passion, qui commençaient à fatiguer le populaire par leur caractère mys- tique et leur longueur souvent effroyable. La sotie était courte, vive, alerte, licencieuse comme toutes les productions dramatiques de cette épo- que d'enfance de notre théâtre, essentiellement frondeuse, et s'attachant à railler et à ridiculi- ser la sottise humaine sous toutes ses formes et sous tous ses aspects. C'est surtout au quinzième siècle qu'on vit la sotie fleurir et briller de tout son éclat. SOTS (CoNFRfiRiE des). — La confrérie des Sots, qu'on appelait aussi la Sotie et dont le chef prenait le titre de Prince des Sots, fut, avec les Clercs de la basoche et les Enfants sans Souci , une de ces sociétés de jeunes gens épris des jeux scéniques qui se formèrent, vers la fin du quatorzième siècle, pour donner l'essor à leur goût pour le théâtre et lutter, à force de gaîté, de ven^e et de bonne humeur, contre les tendances à l'austérité et le caractère parfois trop sérieux des mystères et des miracles repré- sentés par les Confrères de la Passion. Comme l'histoire des Sots se confond étroitement avec celle des Enfants sans Souci , auxquels ils fini- rent par se mêler, nous renvoyons, pour plus amples renseignements, le lecteur à ce que nous en avons dit au mot : Enfants sans Souci. SOUBRETTES. — L'un des plus beaux emplois et des plus brillants qui soient au théâ- tre. Les soubrettes sont des rôles de femme , jeu- nes, comiques, auxquels ont servi de types les admirables servantes si « fortes en gueule » de Molière, les suivantes délurées de Regnard et les caméristes plus musquées de Marivaux. L'emploi des soubrettes, très varié, comme on voit, dans ses allures, exige tantôt de la rondeur et de l'autorité, comme la Dorine de Tartuffe ou la Marinetle du Bépii amoureux, tantôt de la souplesse et de la coquetterie, comme la Su- zanne du Maria{/e de Figaro, tantôt de la fi- nesse et de l'entrain, comme la Lisette du Lé- gataire universel, tantôt de la grâce et une sorte de rouerie délicate, comme la Marton des Fausses confidences , et toujours de la franchise, du nerf, de la verve et de la gaîté. Douée d'un organe sonore et vibrant, d'une grande viva- cité d'allures, d'un débit net et mordant, la soubrette doit toujours rire à belles dents, avoir le verbe haut, se préparer à toutes les friponneries et être prête à se moquer des au- tres et d'elle-même au besoin. Tous les écrivains qui ont été la gloire ou l'honneur de notre théâtre ont prodigué leurs soins à ce caractère charmant de la soubrette , si preste, si vivant, si original, et nous en ont laissé des types inimitables. Chez les plus grands comme chez les plus modestes on en trouve des modèles accomplis , et l'on épuiserait le ré- pertoire de la Comédie-Française à les vouloir citer tous. Molière nous a donné Dorine {Tar^ tuffe\ Marinette {Jie Dèjnt amoureux), Toinette (le Afaladmniaginaire),C\éSinihis {Amphitryon), Martine (les Femmes savantes)^ Zerbinettc (les Fourberies de Sca pin), Nicole {le Bourgeois gentilhomme) ; à Regnard nous devons Lisette {les Folies amourexcses) , Nérine {le Joueur), Finette {les Ménechmes), Lisette {le Légataire tiniversel); à Quinault, Laurette {la Mère co- quette) ; à Boursault , Doris {Esope à la cour) ; à Hauteroche, la Greffière {les Bourgeoises de qualité); à Brueys, Catau {le Grondeur); i\ Destouches, Finette {U Philosophe marié). Fi- nette {le Dissipateur) ; à d'Allainval, Marton {V École des Bourgeois) ; à Gresset, Lisette {le Méchant) ; à Lesage, Marine {Turc^tret) ; à Pi- ron , Lisette {la Métrmnanie) ; à Boissy, Nérine {le Babillard) ; à La Noue, Rosette {la Coquette corrigée): à Marivaux, Marton {les Fausses Confidences), Lisette {les Jeux de l'amour et du SOUFFLEUR. 681 hasard) ; à Beaumarchais, Suzanne {le Mariage de Figaro),,, Il est, selon quelques-uns, plus difficile au théâtre de faire rire que de faire pleurer. S'il en est ainsi, — ce que tout le monde ]X)urtant n'admettrait pas sans conteste, — on n'eu doit que plus d'admiration aux grandes artistes qui depuis deux cents ans ont rendu célèbre chez nous cet emploi des soubrettes et lui ont tou- jours conservé des titulaires dignes de lui. Cet emploi merveilleux a fait, sur la scène française, la gloire d'un grand nombre de comédiennes, qui s'y sont illustrées, et à qui il a valu une re- nommée que l'histoire de l'art ne saurait se dispenser d'enregistrer. Depuis Madeleine Bé- jart et M*'*" Beauval, qui créèrent dans la troupe de Molière, l'une les rôles de Dorine de Tar- tuffe et de la feinte Gasconne de M, de Pour- ceaugnacy l'autre ceux de Nicole du Bourgeais Geiitilhomim et de Toi nette du Malade ima- ginaire, la Comédie-Française a vu se succéder chez elle toute une dvnastie d'artistes d'un or- dre exceptionnel, d'une valeur inapprécia- ble, qui ont su maintenir avec autorité, de gé- nération en génération, les saines traditions qu'elles tenaient de leurs devancières, et qui ont toujours fait la joie d'un public d'autant plus difficile pourtant qu'il ne cessait d'être accoutumé à la perfection. C'est ainsi que, de- puis le commencement du dix-huitième siècle, la maison de Molière a eu successivement pour soubrettes M'**' Quinault cadette, M'^® Dange- villc jeune. M"'' Bellecour (la fameuse Gogo), M^"'* Fanier, Jolv, Devienne, Louise et Emilie Contât, Desbrosses, Demerson, Dupont et Bro- han. Tous ces noms sont restés célèbres dans les fastes de la Comédie, et rien n'autorise à croire que leur succession soit destinée à tom- ber en déshérence. Dans le répertoire léger et dans le genre du vaudeville, l'emploi des soubrettes avait con- quis aussi jadis une grande importance. Une artiste d'un talent et d'un tempérament ex- ceptionnels, Virginie Déjazet, lui avait donné même une originalité nouvelle en se spécia- lisant en quelque sorte dans les rôles tra- vestis, et les auteurs, la suivant dans cette voie où le succès était certain, s'empressaient de travailler pour elle et de satisfaire ses goûts. Mais si Déjazet a eu des imitatrices (et cert^îs, elles ne lui ont pas manqué!), elle n'a jamais connu de rivale ; aujourd'hui qu'elle a disparu, son emploi, auquel on avait fini par donner son nom, a subi une transformation : maintenant qu'on ne joue plus de vaudeville, on retrouve les Déjazets dans l'opérette, où elles prennent le nom d'une autre actrice célèbre et s'appel- lent, comme dans l'opéra-comique, les Duga- zons. SOUFFLEUR. — Pour modeste qu'il soit, c'est un des emplois les plus utiles et les plus im- portants dans un théâtre bien organisé. Le souf- fleur est celui qui est chargé, en suivant constam- ment des yeux l'original de la pièce que l'on joue, de soutenir la mémoire de l'acteur et de lui envoyer les mots qui pourraient lui échapper. Jadis on appelait cela « tenir la pièce, » et celui qui remplissait cet office, au lieu d'être comme aujourd'hui placé sur le devant de la scène, se tenait sur l'un des côtés du théâtre. Voici comme, en l(î74, en parlait Samuel Chap- puzeau dans son Théâb'e-François : Il est de sa charge de tenir la pièce à une des ailes du théritre, tandis qu'on la représente, et d'avoir toujours les yeux dessus pour relever Fac- teur s'il tombe en quelque défaut de mémoire , ce qui, dans le stile des collèges, s'appelle sovffler. Il faut pour cela qu'il soit prudent , et sçache bien discerner quand l'acteur s'arrête à propos et fait une pause nécessaire , pour ne luy rien suggérer alors, ce qui le troubleroit au lieu de le soulager. J'en ay veu en de pareilles rencontres crier au souf- fleur trop pront de se taire, soit pour n'avoir pas besoin de son secours, soit pour faire voir qu'ils sont seurs de leur mémoire, quoy qu'elle pust leur man- quer. Aussi faut-il que cehiy qui suggère s'y prenne d'une voix qui ne soit, s'il est possible, entendue que du théâtre, et qui ne se puisse porter jusqu'au parterre, pour ne donner pas sujet de rire à de certains auditeurs qui rient de tout, et font des éclats à quelques endroits de comédie où d'autres ne trouveroient pas matière d'entr'ouvrir les lèvres. Aussi ay-je connu des acteurs qui ne s'attendent jamais à aucun secours , qui se fient entièrement à leur mémoire, et qui à tout hazard aiment mieux sauter un vers , ou en faire un sur le champ. Il y a entre eux des mémoires très-heureuses, et il se trouve des acteurs qui sçavent par cœur la pièce SOUFFLEUR DU CHANT. — SOURDINE. entière, pour ne l'avoir ouïe que duos la lecture et dans les repétitions. Si quelqu'un de ceux qui sont avec eus sur le tliéSlre vient à s'égarer, iU le re- mettent dans le chemin , mais adroitement et Eans qu'on s'en apei'çoîve. J'ay remarqué que les femmes ont la mémoire plus ferme que les liommes ; mais je les crois trop modestes pour vouloir soufrir que j'en dise autant de leur jugement. Les remarques et les réflexions de Chappu- zeau n'ont pas cessé d'être exactes, — môme la dernière, bien qu'elle sorte de Bon sujet. Il faut ajouter que la fonction du soufBeur exifje à la fois beaucoup de tact, de discrétion, d'atten- tion et d'adresse. Un comédien sûr de sa mé- moira peut être absolument troublé par une inten-ention inopportune du souffleur ; tel au- tre, au contraire, aura besoin que celui-ci lut envoie son rôle d'un lx>ut à l'auti-e, ligne par ligne, mot par mot yioai ainsi dire ; tel autre encore, bien qu'ayant peu besoin d'être soutenu, pouiTa être très gêné, très mal à l'aise s'il voit le souffleur distrait ou inattentif. Il faut donc que celui-ci se mette bien au courant des ha- bitudes, des besoins de chacun, et qu'il agisse en conséquence. L'emploi de souffleur a été tenu parfois par des artistes et de vrais lettrés ; on peut citer particulièrement Ânseaunie, l'auteur de tant de jolis li\Tet8 d'opéras-comiquea : le Tableau parlanf, VÈcoU dé la Jeunesse, Us Deux Chas- seurs et la Laitière, etc., qui remplit cet office au théâtre de la Comédie-Italienne, de même que Laffichard, un vaudevilliste fécond, qui l'y avait précédé. Ceci, à la vérité, est exception- nel. Assez fréquemment, cet emploi est tenu par un vieux comédien, que l'âge a mis dans l'impossibilité de continuer sa profession ; dans les théâti-es de province, il est parfois exercé par une femme. Celle-ci prend, naturellement, la qualification de souffleuse. Les Italiens, pour désigner le souffleur, em- ploient le terme de suffgerilore. SOUFFLEUR DU CHAXT. — Dans les théâtres lyriques, ou trouve un souffleur du chant, chargé de souffler la musique comme le souffleur ordinaire souffle les paroles. SOUFFLEUR (Trou du). — C'est une Ijetite niche, pratiquée sur le devant et au mi- lien de la scène, entre lesdeux côtés de la rampe, et dans la(|uclle prend place le souffleur ; celui- ci se trouve assis dans cette niche de façon que sa tête seule dépasse le niveau du plancher de la scène, qui supporte le pupitre sur lequel il place le manuscrit ou la brochure qu'il doit tou- jours suivre des yeux ponr être à même de souf- fler l'acteur ou les acteurs en scène. Le souffleur est caché par un capuchon de bois, assez dis- gracieux d'ailleurs, qui le couvre entièrement et le dissimule aux yeux du public ; ce capu- clion, qui est mobile et articulé, se rabat sur le plancher en bouchant l'ouverture nommée u trou du souffleur, » lorsque la représentation est tenninée. SOURDINE. — La sourdine est un petit> instrument de lH)is, de coiue ou de métal, qui se fixe à volonté, par ses trois petites pin- ces, sur le chevalet des instruments à archet et qui, en assourdissant leurs vibrations, di- miime leur sonorité. Lorsque tous les instru- ments à cordes d'un orchestre sont armés de leurs sourdines, la sonorité générale revêt une SOUS-TITRE. — SPECTACLE COUPÉ. 683 teinte mélancolique et douce d'un caractère tout à fait particulier, et qui produit un effet d'un charme pénétrant. Il y a là une précieuse ressource pour le compositeur qui sait l'em- ployer sans en faire abus, et lorsque la situa- tion le comporte. Les mots con sm'dini, inscrits sur les parties d'orchestre , indiquent l'endroit où l'on doit mettre les sourdines; les mots senza sordini, celui où il faut les enlever. SOUS-TITRE. — Ce fut, pendant un demi- siècle, une manie, de la part de nos auteurs dramatiques, d'ajouter un second titre, un « sous-titre, » comme on disait alors, au titre principal de chacune de leurs productions. Au- cune pièce alors ne pouvait décemment se pré- senter devant le public sans une double appel- lation, dont, chose singulière ! la seconde était presque toujours la plus significative et la plus intéressante. C'est ainsi, pour en citer quelques exemples, qu'on eut Gtdistan ou le Huila de Sa- marca7ide, G^ulnare ou F Esclave persane , Tout pour T amour ou Juliette et Roméo , Ossian ou les Bardes, le Trésor supposé ou le Danger d'é- couter aux portes, Joconde ou les Coureurs Sa- vent ares, Victorine ou la Nuit porte conseil, Rodolphe ou Frère et sœur. Toujours ou V Amour dunJilSy Zoé ou V Amant prêté, Marie ou Trois Epoques, Trente ans ou la Vie dun Joueur, Zampa ou la Fiancée de marbre, Fra Diavolo ou V Hôtellerie de Terracine, etc., etc. Certains auteurs en venaient à se moquer de cette ma- nie, inoffensive assurément, mais quelque peu ridicule, et c'est ainsi que Charrin fit représen- ter en 1806 une pièce burlesque qu'il avait in- titulée de cette façon : Titus ou Savonnette et Toupet ou la Mort du peignoir ou le Repentir de Lahuppe ou Us Perruquiers. Cela ne devait pas être sans causer quelque embarras à l'im- primeur de l'affiche ! SPECTACLE. — On confond assez volon- tiers, dans la conversation, deux mots qui sont loin d'être synonymes, le mot spectacle et le mot théâtre. Or, si le théâtre offre toujours un spec- tacle au public, il s'en faut bien que tout spec- tacle ait lieu dans un théâtre. Les baraques de saltimbanques, les bateleurs en plein vent , les faiseurs de tours de gibecière nous offrent un spectacle burlesque ; c'est un spectacle brillant que nous présentent un riche tournoi, un car- rousel élégant, une somptueuse cavalcade ; c'est un spectacle aussi que les illuminations et les feux d'artifice des grandes fêtes populaires. Spectacle encore les dioramas , les panoramas , les tableaux vivants et animés qu'on fait pas- ser sous nos yeux ; spectacle les courses de cher vaux, les combats d'animaux, les jeux du cir- que et de l'hippodrome ; spectacle les cafés- concerts où se débitent des chansons idiotes, les musées de figures de cire , les cabinets de physique et de mécanique ; spectacle les mas- carades de la rue, les joutes sur Teau, les ma- nèges ambulants, les luttes de boxe et de pugi- lat ; spectacle la baraque à Guignol , et les animaux savants, et les automates parlants, et laj)arade de Bobèche, et les danseure de corde, et les équilibristes, et les chanteurs des rues, et l'homme orchestre, et la femme colosse qui ne pèse pas moins de 1,200 kilos, et l'homme sau- vage qui avale des poulets crus sans mâcher les os... que sais-je? Le spectacle est infini; il existe pour tous les goûts, pour toutes les bour- ses, pour toutes les intelligences, mais, encore un coup, qui dit spectacle ne dit pas forcé- ment théâtre, et l'on ne doit pas confondre inconsidérément l'un avec l'autre. Au reste, ce qu'on entend d'une façon pré- cise par spectacle, au théâtre même, c'est le côté extérieur, plastique, pittoresque, de la re- présentation, c'est la richesse, la splendeur, la complication de la mise en scène, c'est la beauté des décors et des costumes , le personnel nom- breux, les danses brillantes, les évolutions har- dies, les marches pompeuses, tout ce qui, enfin, concourt surtout au plaisir des yeux et à l'é- blouissement. C'est en ce sens qu'on dira d'une pièce que c'est une « pièce à spectacle, » et qu'elle offre a un spectacle magnifique. » SPECTACLE DE CAPITATIOX. — Yoy. Capitatiox. SPECTACLE COUPÉ. — On appelle ainsi un spectacle composé de trois ou quatre pièces de courtes dimensions. Tous nos théâtres ont renoncé, depuis tantôt \nngt ans, à la coutume si agréable des spectacles coupés, qui permet- 684 SPECTACLE DEMANDÉ. — SPECTACLES A LA COUR. tait aux gens qu'une longue séance fatigue de ne rester au théâtre que le temps qu'ils vou- laient, et de ne voir qu'un acte ou deux si cela leur plaisait, tout en voyant une ou deux pièces entières. Aujourd'hui , dans les petits comme dans les grands théâtres, et quel que soit le genre de la pièce représentée : comédie, drame, opéra, opérette ou féerie, on a pris l'habitude de ne donner que d'interminables machines qui durent toute une soirée et qu'il faut avaler d'un bout à l'autre. Si la pièce est bonne, le plaisir qu'on y prend est mêlé d'une fatigue réelle; si elle est mauvaise, la fatigue reste seule. Je me trompe : elle est doublée d'un ennui profond et d'un regret cuisant sur le mauvais emploi de toute une soirée. SPECTACLE DEMANDÉ. — Voy. A la DEMANDE GÉNÉRALE. SPECTACLE FORCÉ. — Jadis, et il n'y a pas encore trente ans, nos théîitres avaient l'habitude de donner, les dimanches et certains jours de fêtes , dans le but d'attirer un public plus nombreux, des spectacles interminables, qu'on appelait spectacles forcés, et dans les- quels la qualité, souvent négligée, était avan- tageusement remplacée par la quantité. Voici ce qu'on lisait à ce sujet dans VAlmanach des spectacles de 1826 : — « Les dimanches et jours de fêtes, les grands comme les petits théâtres sont dans l'usage de forcer le spectacle; mais jusqu'alors on s'était borné à donner huit ou neuf actes au plus, et c'était fort raisonnable. L'Odéon a sui-passé tout ce qu'on avait fait en ce genre : le 1-t septembre il a donné Oléopâfre, tragédie en cinq actes, l'Efi- fant trouvé, comédie en trois actes, et Rohin d^s Bois, opéra en trois actes ; en tout onze actes. Cela s'est renouvelé depuis à ce théâtre. » Cela se renouvela par la suite à beaucoup d'autres. On n'a qu'il prendre, par exemple, les programmes de nos théâtres pour l'année 1858, il y a vingt-cinq ans ; on y verra, pour certains dimanches, des spectacles comme ceux-ci : à la Gafté, deux grands drames en cinq actes, Latude et les Chevaux du Cairousel, ou bien k Pont-Rouge et les Chiens du Moiit- Saint' Bernard ; de même à la Porte-Saint- Martin, où Ton jouait dans la même soirée Us Mères repenties et Don César de Baran; au Gymnase, ce sont deux comédies en quatre et cinq actes, l'Héritage de M. Plumet et le Demi-Monde; aux Variétés, U Théâtre des Zouaves, comédie en quatre actes, et trois vaudevilles dont un en trois actes, Vert-Vert, et deux en un acte, VUt dièze et la Dinde truf- fée. Il n'était pas rare de voir commencer ces spectacles à cinq heures et demie, et de les voir se prolonger jusqu'à près d'une heure du matin. — Nos théâtres ont abandonné enfin cette coutume barbare, et le spectacle forcé n'est plus qu'un souvenir. SPECTACLES A LA COUR. — Au dix- septième et au dix-huitième siècle, nos trois grands théâtres, l'Opéra, la Comédie-Française et la Comédie-Italienne, allaient fréquemment donner des représentations à la cour, soit à Paris, soit, lorsque le roi était en villégiature, à Saint-Germain, à Versailles, à Fontainebleau ou ailleurs. Sous Louis XIV, la plupart des opéras de Liilly furent donnés d'abord à la cour, et Paris n'avait qu'exceptionnellement la faveur d'une véritable première représentation. Quant à la Comédie-Française, on sait que Molière préparait souvent ses ouvrages sur l'ordre du roi, et que la plupart d'entre eux ne furent offerts à son public ordinaire qu'après avoir paru à la cour; c'est ainsi que V Impromptu de Versailles, la Princesse d'Élide, F Amour médecin, les trois premiers actes de Tartuffe, George Dandin furent joués d'abord à Ver- sailles, le Mariage forcé au Louvre, Mélicerte, le Sicilien, la Comtesse d" Escarhagnas à Saint- Germain, Monsieur de Pourceaugnac, le Bour^ geois gentilhomme à Chambord, enfin Psyché aux Tuileries. Sous Louis XV, les spectacles de la cour furent organisés avec une sorte de régularité. Un petit ouvrage spécial , TÉtat actuel de la musique du roi et des trais spectacles (1759) publiait à ce sujet la note suivante : — « Les spectacles de la Cour commencent ordinaire- ment à Fontainebleau lorsque Leurs Majestés y font leur résidence pendant l'automne ; mais comme il n'y a eu cette année que quelques voyages interrompus, faits seulement par le SPECTACLES A LA COUR. G85 roi pour prendre le plaisir de la chasse, les comédienB n'ont commencé à jouer que le jeudi 16 novembre à Versaillea. Les Comédiene- Françoia sont oblige d'aller représenter deux fois par semaine à la Cour, sçaroir les mardi et jeudi. IIr sont voilures aux dépens de Sa Majesté, et chaque acteur a ponr droit de présence 6 livres qui leur sont payées par le trésorirr des Me nus- Plaisirs. » Il en était de même des Comédiens- Italien s, qui jouaient généralement à la cour une fois par semaine. Quant à l'Opéra, il montait ordinairement ses grands ouTragea de façon à en donner la pre- mière représentation à Fontainebleau, qui était le quartier général du roi lorsqu'il quittait Paris. Les choses suivirent le même train, sous ce rapport, pendant les premières années du règne de Louis XYI ; mais il va sans dire qne les approches de la Révolution modifièrent ces coutumes, comme bien* d'autres. Le premier empire, qui, en toutes ces matières d'apparat, singeait servilement la royauté, rétablit les spectacles à la cour; enchérissant même sur les Bouyerains qui l'avaient précédé, Napoléon se fit suivre en 1808, à Erfurt et à Weimar, par un détachement de la Comédie- Française qui lui donnait des représentations sous le com- mandement de Dazincourt. Les spectacles de la Cour chômèrent un peu, je pense, sons la Restauration ; mais le gouvernement de Juillet et le second empire en reprirent la tradition ; seulement, ces spectacles, qui étaient donnés alors aux deux châteaux de Saint-Cloud et de (J86 SPECTACLES DE GALA. — SPECTACLES GRATIS. Compiègne, n'a\'aient plus la régularité du temps jadis, on ne leur réservait plus les pre- mières représentations d'ouvrages nouveaux, et les grands théâtres subventionnés n'étaient pas les seuls à y prendre part. SPECTACLES DE GALA. — Représenta- tionsextraordinaires, spectacles somptueux don- nés par Tordre d'un souverain soit pour célébrer sa fête , l'anniversaire de sa naissance ou ceux d'unmembre de sa famille, soit en l'honneurd'un monarque étranger, ou d'un ambassadeur, d'un personnage important dont il a reçu la visite. Un critique d'art, Adrien de la Page, a donné cette description d'un spectacle de gala auquel il avait assisté naguère à Naples, dans la ma- gnifi(iue salle du théâtre San Carlo, l'un des plus justement fameux de l'Italie : 11 y a, dit-il, (/aîa et grati gala. Le jour d'un grau gala, le théâtre de San Carlo, l'un des plus beaux et des plus vastes de l'Europe , est éclairé par des milliers de bougies ; toute la famille royale est présente et occupe une vaste loge qui laisse apercevoir non seulement chacun de ses membres, mais encore tous les grands officiers de la cour, de- bout derrière eux, et se perdant en échelons dans le fond de la loge ; les plus belles toilettes resplen- dissent dans les sept rangs des loges, portés en quelque sorte par l'immense cordon de spectateurs non assis qui ceint le parterre et occupe , en avant du mur circulaire, les places de ce que nous nom- mons les baignoires; les banquettes des files les plus apparentes sont occupées par le corps des offi- ciers de tous les régiments présents à Naples, revê- tus de leur grand uniforme. Vu de la scène , l'aspect de la salle, ainsi ornée de décorations vivantes, a vrai me lit quelque chose de magique. Il faut remar- quer que l'effet des grandes représentations, dans nos tht^Atres, ne saurait en donner une juste idée en raison de la différence de construction. Disposées en amphithéâtres et coupées par des lignes non in- terrompues de galeries , nos salles offrent un coup- d'œil mieux gradué, mieux ménagé, plus nuancé; mais elles n'ont pas cet aspect éblouissant que pré- sente , aux jours de gran gala , le théâtre San Carlo , dont les rangs de loges, disposés perpendiculaire- ment et séparés par une multitude de lustres, res- semblent à une muraille de feu et de pierres pré- cieiiKOK, au milieu de laquelle on aperce\Tait, par place:- et un peu en arrière , d'innombrables vitraux enrichis des peintures les plus variées et les plus magnifiques. SPECTACLES GRATIS. — On sait l'a- mour des Parisiens pour le spectacle. Aussi n'est-ce pas d'aujourd'hui qu'on a pris l'habi- tude de faire intervenir les spectacles gmtis dans toutes les grandes réjouissances publiques destinées à célébrer tel on tel événement mé- morable. Naguère, c'était à Toccasion de la convalescence du souverain ou d'nn membre de la famille royale à la suite d'nne longue maladie, de l'heureux accouchement de la reine ou d'une princesse, d'une grande victoire rem- portée, de la publication d'un traité de paix, de la fête du monarque , etc., etc. Dès 172i, nous voyons les grands théâtres de Paris don- ner ainsi des spectacles gratis, an sujet de l'arrivée en France de l'infante reine, efc le même fait se reproduire ensuite à des époques indéterminées. Pendant la période révolution- naire, la Convention établit dans tons les théâtres la coutume de spectacles gratis don- nés périodiquement avec cette formule : De PAR ET POUR LE PEUPLE (Voy. ce mot), et sous le premier comme sous le second empire, ces spectacles devinrent l'accompagnement obligé des réjouissances offertes à la population le jour de la fête du souverain. La République a conservé cette coutume, et chaque année, au 14 juillet, jour fixé pour la grande fête natio- nale en souvenir de la prise de la Bastille, dont il est l'anniversaire, nos théâtres ouvrent gratuitement leurs portes au public. La coutume est qu'en ces jours de fêtes solen- nelles, les spectacles soient choisis avec le plus grand soin. On offre au public particulier qui envahit alors les théâtres les meilleures pièces du répertoire, et l'on fait en sorte que ces pièces soient jouées par les artistes qui jouis- sent de la plus grande renommée. On a remar- qué d'ailleurs le grand sens dont font preuve les spectateurs qui assistent à ces représenta- tions, et dont les applaudissements enthou- siastes, sans jamais se tromper, ne partent qu'aux bons endroits, soit en ce qui concerne les œuvres offertes à leur appréciation , soit en ce qui touche l'interprétation. — Il va sans dire que si ces &raeux spectacles sont donnés gratis, ce ne sont point pourtant les théâtres qui en font les frais, mais que ceux-ci sont remboursés par l'Etat de la recette qu'ils au- k. SPECTACLES PAR ORDRE. — SPECTATEURS SUR LE THÉÂTRE. 687 raient pu faire en donnant leur représentation ordinaire. SPECTACLES PAR ORDRE. — Dans les grands théâtres, c'est-à-dire dans ceux qui, par le fait de la subvention qu'ils reçoivent de rÉtat, dépendent de lui jusqu'à un certain point, il arrive que le chef du pouvoir exécutif fixe la composition d'un spectacle auquel il désire faire assister un hôte illustre , souverain ou prince étranger, de passage à Paris. L'affiche porte alors en tête ces mots : Par ordre , et le public connaît la valeur de ces mots ainsi employés. Castil-Blaze, dont il ne faut jamais accepter que sous bénéfice d'inventaire les as- sertions historiques, affirme que l'origine et le premier emploi de cette formule doivent être fixés à l'année 17(*)8 : « Cette formule, dit-il, trouvée par le duc de Duras, gentilhomme de la chambre, est inscrite pour la première fois en tête des affiches des spectacles le 28 octobre 1768, pendant le séjour que le roi de Danemark fit à Paris. Christ iera VII voyageait sous le nom de comte de Ti-avendalh, et toutes les fois (fu'il devait se rendre à (|uelque théâtre, ces mots : Far ordre, l'annonçaient (1). » En France aujourd'hui, sous le régime républi- cain, les spectacles par ordre n'ont lieu que dans les conditions que nous avons fait connaî- tre. Naguère , chaque fois que le souverain de- vait assister à une représentation, l'affiche du théâtre où il se rendait portait toujours les mots : Par ordre. SPECTATEUR, SPECTATRICE. — Celui ou celle qui assiste à une représentation théâ- tmle, à un spectacle quelconque, public ou privé, qu'il ait ou non payé sa place. SPECTATEURS SUR LE THÉÂTRE. — On sait que pendant le dix-septième et une l)onne moitié du dix-huitième siècle, la scène de notre Comédie-Française était embarrassée d'une foule de spectateurs : fats, marquis, gens de grand ton et de haut parage, qui venaient non point sans doute voir le spectacle, mais (l) Mémorial du grand Opéi'a, p. 57. se donner eux-mêmes en spectacle à cette place singulière, au grand déplaisir du public de la salle et surtout des comédiens, qui ne sup- portaient cette incommodité que parce qu'elle leur était très productive. Molière, devant qui ne trouvait grâce aucun ridicule, n'eut garde de laisser passer celui-ci sans s'en occuper, et l'on se rappelle comment il le raille, par la bou- che d'Éraste, dans Us Fâcheux : J'étois sur le théâtre en hnmeur d'écouter La pièce, qu'à plusieurs j'avois ouï vanter; Les acteurs commençoient, chacun prêtoit silence, Lorsque , d'un air bruyant et plein d'extravagance , Un homme à grands canons est entré brusquement En criant : Holà ! ho ! un siège promptcment ! Et , de son grand fracas surprenant l'assemblée , Dans le plus bel endroit a la pièce troublée. Tandis que là-dessus je haussois les épaules , Les acteurs ont voulu continuer leurs rôles : Mais l'homme pour s'asseoir a fait nouveau fracas, Et , traversant encor le théâtre à grandie pas , Bien que dans les côtés il pût être à son aise , Au milieu du devant il a planté sa chaise, Et, de son large dos morguant les spectateurs, Aux trois quarts du parterre a caché les acteurs. Il n'v a rien de forcé dans tout ceci. La vérité est que les spectateurs qui venaient se placer sur le théâtre, encombrant sottement la scène et se moc^uant du reste du public, parlaient tout haut, causaient et riaient entre eux, interpellaient les comédiens, gesticulaient et remuaient sans cesse, entraient et sortaienC à tout instant^ et se rendaient enfin iusuppor- tables. On se demande quelle pouvait être, en de telles conditions, l'illusion si nécessaire au théâtre, si Ton réfléchit surtout que par ce fait l'effet de la décoration était rendu impossible, que les acteurs avaient la plus grande peine à fendre cette cohue pour effectuer leurs entrées et leurs sorties , que le bruit fait autour d'eux leur troublait la mémoire, que leurs mouve- ments, leurs passades, ne pouvaient se faire qu'avec une extrême difficulté, et qu'enfin il arrivait souvent que l'on confondait l'entrée d'un spectateur avec celle d'un personnage de la pièce. Sans compter que certains farceurs ne se gênaient point pour se rendre coupables de quelque petite mystification, et que l'un d'eux, un jour, ayant raccolé une centaine d'individus doués d'une qualité physique par- 688 STADE. — STALLE. ticulière et les ayant fait placer sur la scène, obtint un succès de fou rire assez compréhen- sible lorsque le rideau se leva au commence- ment du spectacle : tous ses invités étaient bossus! Les abus les plus fâcheux sont les plus diffi- ciles à déraciner. Tout le monde se plaignait de celui-ci ; mais les comédiens, je l'ai dit, y trouvaient leur compte, et le laissaient subsis- ter. On ne sait jusques à quand il eût pu se perpétuer, si un homme intelligent et libéral ne s'était mis en tête de le détruire. A cet effet, le comte de Lauraguais fit offrir aux comédiens de prendre à sa charge tous les frais de transformation de leur théâtre, s'ils vou- laient consentir à renoncer au profit qu'ils tiraient des banquettes et des chaises si mala- droitement occupées. Ceux-ci finirent par ac- cepter, grâce surtout à l'énergie de Lekain, qui avait pri^ la chose à cœur et qui en avait fait l'objet d'un rapport au ministre. Une fois la décision arrêtée, on attendit la clôture de Pâques pour commencer les travaux, qui furent entamés le 31 mars 1759, et achevés pour la réouverture du 23 avril. Ils ne coûtèrent pas, dit-on, moins de 00,000 livres à M. de Laura- guais, mais l'effet produit fut excellent, et voici comment Barbier le constate dans son Journal : De tout temps , il y a eu sur le théâtre de la Co- .médie, de chaque côté, quatre rangées de bancs un peu en amphithéâtre jusqu'à la hauteur des lo- ges, renfermées dans une balustrade et grille de fer doré, pour placer les spectateurs. Dans les grandes représentations , on ajoutait encore , le long de la balustrade, une rangée de banquettes, et, outre cela , il y avait encore plus de cinquante per- sonnes debout, et sans place , au fond du théâtre , qui formaient un cercle. Le théâtre n'était rempli €t occupé que par des hommes, pour l'ordinaire, en sorte que le théâtre était très rétréci pour l'action des acteurs. Pour entrer un acteur sur la scène , il fallait faire faire place au fond du théâtre , pour son passage. Il n'était pas même vraisemblable qu'un roi parlant à son confident ou tenant un conseil d'État, ou un prince avec sa maîtresse parlant en secret, fussent entourés de plus de deux ■cents personnes. Cela est changé dans la quinzaine de Pâques, qu'il y a relâche au théâtre pour trois semaines. On a travaillé et l'on a supprimé toutes ces places ; on a pris sui* le parterre , pour former un parquet, qui contient plus de cent quatre-vingts personnes ; outre l'orchestre, on a diminué l'amphi- théâtre pour allonger le parterre. Le lundi 23 de ce mois, lendemain de la Quasimodo, on a joué sur ce nouveau théâtre. Tout le monde en a été con- tent, et il n'y a pas de comparaison. Les petit8-maître3 vaniteux et pédants furent désolés de cette réforme ; mais il va sans dire qu'elle fut accueillie avec joie par la masse du public. STADE. — Les Grecs donnaient le nom de stade à l'arène qui servait aux courses à pied, et cela parce que dans la fameuse arène d'Olym- pie, qui sous ce rapport sernt de modèle à toutes les autres, les deux piliers qui marquaient la longueur de la course étaient exactement distants d'un stade ou 600 pieds grecs (environ 185 mètres). Moins vaste que l'hippodrome, le stade, qui servait aussi à toutes les luttes gymnastiques, consistait en une enceinte étroite et oblongue, terminée en demi-cercle à l'une de ses extrémités, à l'autre par une ligne droite, et entourée de sièges pour les spectateurs. Sou- vent le stade formait une dépendance du gym- nase ; souvent aussi il était isolé, comme celui d'Athènes. Ses dimensions étaient variables, tant en longueur qu'en largeur, mais une chose était ûxQ : la distance comprise entre les piliers des deux extrémités, qui était toujours d'un stade olympique. STALLE. — Les stalles sont des places in- termédiaires quant à leur prix, qui prennent rang à la suite de celles qu'on appelle aujoui-- d'hui fauteuils, lesquels fauteuils leur ont été substitués dans nos théâtres depuis une ving- taine d'années. Autrefois, en effet, on ne con- naissait pas les fauteuils, et, en dehors des loges, les meilleures places étaient les stalles, stalles qui garnissaient l'orchestre et les rangs de galerie. Mais les administrations théâtrales, pour augmenter la capacité de leurs salles quant à la recette, ne pouvant l'augmenter quant au nombre de places, ont jugé bon de remplacer les stalles d'orchestre et de galerie ou de balcon par des fauteuils dont elles ont considérablement surélevé les prix, et de sup- primer presque partout le parterre en substi- STENTERELLO. — STYLE THEATRAL. 68i) tuant aux bancs qui le garnissaient des stalles dites d'orchestre (!), dont le prix est triple sans que les places soient meilleures. C'est ainsi que les petites places ont disparu dans les trois quarts de nos théâtres. STENTERELLO. — Un des types les plus curieux du théâtre populaire italien moderne. Stenterello appartient à la Toscane, comme Gianduja au Piémont et Meneghino au Mila- nais. Les Florentins en raffolent, et ils assurent que ce personnage plein de fantaisie fut ima- giné, il y a environ quatre-vingts ans, par un acteur très populaire nommé Del Buono. Son nom vient du verbe stentare, souffrir, parce qu'en effet Stenterello est une sorte de souffre- douleur comique ; c'est un pauvre niais, qui ne vise pas à l'esprit, mais qui pourtant en a parfois, naïvement et sans qu'il s'en doute. A Florence, on le fourre partout et à toutes sau- ces : tantôt maître et valet, on le voit soit personnifier en caricature une passion po- litique, soit parodier un héros de roman, de drame ou même d'opéra ; c'est ainsi que les affiches vous annoncent Roherto il Diavolo, con Stenterello; Don Giovanni, con Stenterello, etc. « Ce qui le caractérise, a dit Maurice Sand , ce qui est le sceau sans lequel Stenterello ne saurait exister, c'est l'absence de la plus belle de ses dents de devant. L'acteur qui va se vouer à la reproduction de cet amusant per- sonnage doit, avant tout, lui offrir ce sacrifice. Plus le trou noir qu'il fait ainsi à sa gencive supérieure est marqué, plus il a de succès. Cette dent du milieu absente aide du reste extrêmement l'acteur à imiter, en charge, le dialecte du peuple toscan. Stenterello n'est pas un type littéraire. M. Fr. Mercey nous apprend même que les lettrés florentins n'éprouvent pour lui qu'un dédain excessif et violent : Ces messieurs de la Crusca, dit M. F. Mercey, et en général les puristes de Florence , sont les enne- mis déclarés du pauvre Stentarello. Ils n'en parlent qu'avec dédain et colère , et c'est moins son incon- duite que l'incorrection de son langage et son fai- ble pour les patois qui motivent leur haine. Sten- tarello, en effet, est plutôt Toscan que Florentin. Vous le rencontrerez à Pérouse, à Arezzo, à Pis- DICTIORRAIBB DU THÉATEE. toie, à Sienne; il s'est même naturalisé chez les Lucquois, les Pisans et les Bolonais, ses voisins, et il parle à merveille la langue accentuée du peu- ple de ces villes, dont on le croirait citoyen. Mais si le langage varie, les actions sont les mêmes. A Bologne, Stentarello a pris, quelque peu, les al- lures de ses compagnons de Venise, de Milan et de Turin, Arlequin, Meneghino et Gerolamo, avec lesquels il a, d'ailleurs, quelques liens de parenté. Ce ne sont, en effet, que les variétés d'un même type , que les diverses faces d'un même caractère , modifié par l'entourage et le climat. Ce ne sont pas des types différents. Cela n'empêche pas Stenterello de rester l'ami le plus cher du peuple de Florence (1). STRAPOXTIX. — Siège mobile, se rele- vant et s'al)aissant à volonté, que les adminis- trations théâtrales font placer dans certains endroits de la salle, dans certains passages où des sièges fixes ne pouiraient être posés. L'abus véritablement scandaleux qu'on avait fait des strapontins pouvait devenir une cause terrible de danger en cas d'incendie, la circulation se trouvant entravée par le nombre toujours crois- sant de ces sièges supplémentaires. Des ordon- nances de police récentes ont mis ordre à cet abus. STYLE THEATRAL. — Ce li\Te n'ayant point l'intention de constituer un Far/ait Ma- nuel de l'auteur dramatique, nous nous abstien- drons de toute espèce de définition, même apparente, de ce que doit être le style d'une œu\Te théâtrale. Ceux qui veulent être édifiés (1) Les journaux italiens ont annoncé, à la fin de 1883, la mort d'un artiste nommé RaffaeUo Landini, qu'ils qualifiaient du titre de roi des Stenterelli. FUs d'un boulanger et d'abord ouvrier typographe , il avait pris le goût du théâtre et était devenu fameux dans la représentation du personnage burlesque si cher aux Florentins. Né à Florence en 1823, il avait commencé sa carrière théâtrale en 1849, pour ne la terminer que la veille même de sa mort. Chose assez singulière, on remarqua qu'à sa dernière représentation il avait joué une comédie intitulée Stenterello et son cadavre , et que la semaine précédente U s'était montré dans deux au- tres pièces dont l'une portait ce titre : le Mort au manteau rouge , avec Stenterello barbier de la mort, et l'autre celui-ci : les Tartuffes avec Stenterello mort à Fiesole et ressuscité à Legnago, 44 690 SUBVENTIONS. — SUCCÈS. à ce sujet n'ont qu'à lire et à relire les grands maîtres, depuis Corneille et Molière jusqu'à Victor Hugo et à M. Emile Augier ; ils y trou- veront tout ensemble plaisir et profit. Mais on a dit que les comédiens, eux aussi, avaient un style, et quoique ceci me semble sujet à discus- sion, il ne me paraît pas inutile de reproduire ce que disait à ce propos un écrivain spécial il y a soixante ans : — « Le style entré dans le talent de l'acteur, comme il entre dans le talent de l'écrivain, du peintre et de l'architecte. On pourrait le définir : l'ensemble des formes di- verses dont se compose l'expression théâtrale. Talma, et après lui mademoiselle Georges, sont les modèles les plus parfaits du style tragique : toutes les nuances les plus opposées du style comique sont familières à mademoiselle Mars. Si le style de Damas était plus élégant et plus con'ect, cet acteur serait sans reproches comme il est sans rivaux dans la comédie; celui de Michelot, qui a de la grâce, déguise souvent ce qui manque à ce comédien du côté de l'in- vention... » En fait, ce qui me paraîtrait constituer le style du comédien, c'est l'expres- sion juste et parfaite, au moyen de la diction, des sentiments exprimés par le poète. SUBVENTIONS. — On donne le nom de subventions à des subsides annuels que l'État, ou les municipalités, accordent à certains grands théâtres pour les encourager dans la voie du « grand art, » les engager à ne pas céder aux suggestions du faux goût de la majorité du public et leur permettre de se maintenir dans un état de supériorité artistique \â8-à-vis de leurs confrères réduits à leurs seules ressources. En France , les subventions des quatre grands théâtres de Paris (Opéra, Comédie-Française, Opéra-Comique, Odéon), inscrites au budget du ministère des Beaux- Ai*t8, sont payées par l'État, qui encourage aussi de la sorte quelques entreprises de concerts symphoniques ; en pro- vince, ce sont les municipalités qui subven- tionnent leurs théâtres. En Prusse, en Autriche, en Russie, dans quelques Etats de l'Allemagne, ce sont les cassettes particulières des souverains qui soutiennent certains théâtres. En Italie, depuis la constitution du nouveau royaume les anciennes subventions {doté) royales ont été supprimées , et ce sont les municipalités seules qui viennent au secours des théâtres auxquels elles s'intéressent. En Angleterre, les subven- tions sont, je crois, inconnues. Voici, en ce qui concerne la capitale, le chiffre des subventions accordées en France par l'État : Opéra Comédie-Française Opéra-Comique Odéon Concerts populaires (Pasdeloup). Association artistique (Colonne). Nouveaux-Concerts (Lamoureux). 800,000 fr. 240,000 300,000 100,000 20,000 10,000 10,000 Total 1,480,000 SUCCÈS. — Il est difficile de dire à quoi tient le succès au théâtre, et les plus experts s'y trompent lourdement. On a vu telle pièce ^ sur laquelle un théâtre fondait les plus grandes espérances , tomber tout à plat devant le public ou se traîner languissamment pendant quelques soirées, tandis que telle autre, montée à contre- cœur et seulement pour obéir à des engagements pris, faisait accourir la foule pendant des mois entiers. Toutefois, on est un peu trop porté à croire aujourd'hui que les grands succès sont de date récente, et que jadis la carrière des ouvrages dramatiques était très limitée. Rien n'est moins exact, et les preuves abondent à ce sujet. Une des premières tragédies de Thomas Corneille, TimocratPy représentée au théâtre du Marais en 1650, fit littéralement courir tout Paris, et son succès fut tel que les comédiens de l'Hôtel de Bourgogne se mirent à la jouer concurremment avec leurs confrères ; et cette concurrence en arrêta si peu la vogue que, au dire d'un chroniqueur, les acteurs du Marais, après avoir joué Timoaate 80 fois, « craignant d'oublier leurs autres rôles, supplièrent le public de leur permettre de le retirer. > Une autre pièce de Thomas Corneille, îa Devine- resse, faite par lui en société avec de Visé, n'eut pas un sort moins heureux. « Cette comé- die, dit de Léris, eut un succès extraordinaire, ayant été jouée pendant cinq mois, ce qui n'é- tait pas encore arrivé à aucune pièce sans ma- chines. Elle fut représentée 47 fois de suite, sans intermission d'aucune autre pièce, et les SUIVANTE. — SURINTENDANTS DES THÉÂTRES. 691 18 premières furent au double. y> On sait qu'en- tre toutes les pièces de Molière, Tartuffe obtint un succès colossal , et l'on en peut dire autant de notre premier opéra français, Pomone (de Perrin et Cambert), qui, représenté pour la première fois en mars 1671, fut joué sans in- terruption pendant huit mois entiers et rap- porta 120,000 li\Te8 de bénéfice. Lorsque parut à la Comédie-Italienne la Servante maîtresse de Pergolèse, elle obtint plus de 200 représen- tations, et il en fut de même, en 17(52, d'un opéra-comique de Sedaine et Monsigny, le Roi et le Fermier, dont Desboulmiers parlait ainsi : « A qui que Ton doive attribuer le succès de cette pièce, ou ne peut disconvenir qu'on n'en a jamais vu de pareil sur aucun théâtre. Elle a eu plus de deux cens représentations, et les comédiens assurent qu'elle a valu plus de vingt mille francs à Messieurs Sedaine et Mon- signy. » Telle pièce aujourd'hui, surtout dans le genre de l'opérette ou de la féerie, chiflFre son succès par un total de quatre, cinq et six cents repré- sentations, comme on l'a vu avec Ut Fille de Madame Angot et les Cloches de Corneville; cela n'est pas plus extraordinaire, avec les deux millions et demi d'habitants que possède au- jourd'hui Paris , que les deux cents soirées du Roi et le Fermier à une époque où il en comptait à peine 600,000 et où les coches tenaient lieu de chemins de fer. Certains succès sont devenus légendaires au théâtre par leur étonnante continuité, et par ce fait que les pièces qui en sont l'objet exer- cent toujours, après trente, quai*ante, cinquante ans même, la même influence et la même at- traction sur le public. Pour quelques-unes, cela semble tenir du prodige. La Dame blanche a atteint le chiffre fantastique de 1,500 représen- tations ; le Pré aux clercs est à 1,300 environ ; la Tour deNesle, les Pilules du diable sont à leur douze centième ; le Domina nair a dépassé 800, les Huguenots sont à plus de 700, et l'on pourrait citer plusieurs autres ou^Tages dans le même cas. SUIVANTE. — C'est le nom qu'on donnait parfois jadis, soit aux confidentes dans la tra- gédie, soit aux soubrettes dans la comédie. SUJET. — Expression qu'on n'emploie guère qu'en l'accompagnant de Tépithète : (c premier » pour caractériser un ou plusieurs artistes d'un talent hors de pair et tenant une place importante dans un théâtre. C'est ainsi qu'on dira, d'une pièce jouée par les comédiens les plus renommés d'un théâtre : « Elle est jouée par les premiers sujets. » Parfois aussi, on dira d'un acteur aimé du public, ou que la souplesse de sou talent permet d'employer dans des genres différents : (c C'est un sujet précieux pour un directeur. » — A rOi)éra, on appelle « sujets de la danse » les danseurs et danseu- ses qui exécutent des pas seuls, qui sont en de- hors des cadres du corps de ballet. SUPPLÉMENT. — Lorsqu'un spectateur ne trouve point de place qui lui convienne dans la catégorie à laquelle appartient celle qu'il a prise au bureau, il peut, en soldant le supplé- ment nécessaire, en prendre une d'un prix plus élevé. A cet effet il y a, dans l'intérieur de cha- que théâtre, un bureau qui porte le nom de (( bureau des suppléments. » SUR SES JAMBES. — On dit d'une pièce qu'elle est « sur ses jambes x) lorsque, après qu'elle a été soigneusement étudiée, que chaque acte a été répété successivement et qu'on en est ar- rivé aux répétitions d'ensemble, les acteurs sa- vent leurs rôles , sont bien au courant de la mise en scène et n'ont plus d'hésitation. On peut alors commencer à juger de l'effet général, rœu\Te est au poifit, comme on dit en termes de sculpture, et il n'y a plus qu'à la polir, à la finir à l'aide des dernières études, pour la naet- tre en état de paraître devant le public. SURINTENDANTS DES THÉÂTRES.— Sous l'ancien régime, et à partir de Louis XIV, les grands théâtres, tout en s'administrant eux- mêmes, étaient placés sous la surveillance et la tutelle très effective de quatre gentilshommes de la chambre du roi (Voy. ce mot), qui exer- çaient par quartier, c'est-à-dire chacun trois mois chaque année. Cette situation disparu^ naturellement à la Révolution ; mais l'empire, dont la manie de réglementation dépassait tout ce qui avait été fait jusqu'à lui, remit en vî- 692 SUSPENDRE UNE PIÈCE. — SUZERAINETÉ DE L'OPÉRA. gueur les anciennes coutumes, et créa bientôt une surintendance générale des quatre grands théâtres ( les théâtres subventionnés : Opéra, Comédie-Française, Opéra-Comique, Théâtre- Italien), dont le titulaire fut le comte de Ré- musat, premier chambellan de Tempire. La Restauration, en reprenant possession du gou- vernement, conserva telle qu'elle était l'orga- nisation des théâtres, mais en partageant les fonctions de surintendant entre plusieurs per- sonnages, qui furent, successivement ou simul- tanément, le marquis de Lauriston^ le duc de Doudeauville, le vicomte de la Rochefoucauld, le duc d'Aumont, le duc de Duras et le baron de la Bouillerie. Tout cela fut emporté de nouveau par la révolution de 1830. SUSPENDRE UNE PIÈCE. — Suspendre une pièce, ou, pour parler correctement, suspen- dre les représentations d'une pièce, c'est inter- rompre le cours de ces représentations pour un motif quelconque, soit par suite d'indisposition ou de maladie d'un des interprètes, soit par suite de difficultés survenues entre l'auteur et la direction, etc. Il arrive aussi parfois que l'autorité supérieure, en présence de tumultes, de scandales causés par l'apparition d'un ou- vrage qui a vivement excité certaines passions dans le public, ordonne de suspendre les repré- sentations de cet ouvrage, soit pour laisser se calmer une effervescence dangereuse, soit pour exiger certains changements, certaines modifi- cations qui donnent satisfaction aux suscepti- bilités des spectateurs. SUZERAINETÉ DE L'OPÉRA. — Les grands théâtres ont toujours été les ennemis des petits. Sous prétexte que ceux-ci leur fai- saient concurrence, ils les ont toujours oppri- més, pressurés de la façon la plus indigne, leur créant les entraves les plus odieuses, levant sur eux les impôts les plus iniques, suçant le meilleur de leur sang, et ne cherchant qu'à les étouffer en abusant de la puissance qu'ils tenaient de leurs privilèges. Dans cet ordre d'idées, l'Opéra s'est toujours montré d'une cruauté, on peut dire d'une férocité sans pa- reille, rançonnant sans merci non seulement tous les théâtres, mais jusqu'aux spectacles les plus infimes, et s'armant de prétendus droits pour enlever aux autres tous les moyens possi- bles de plaire au public et de l'attirer à eux. Il serait long à tracer, le chapitre des indignités ainsi commises, et l'on aurait de la peine à nous croire si nous n'apportions à ce sujet les preuves les plus convaincantes et les moins dis- cutables. Nous emprunterons donc ce récit à un docu- ment dont on ne pourra révoquer en doute l'absolue véracité et la complète exactitude. Ce document est un Rapport fait au comeUconten- tieux de T Académie royale dé musique dans sa séance du 27 novembre 1827^ rapport signé par M. Poncelet, membre de ce conseil, avocat à la cour royale, et aussitôt publié (1). Voici comment s'exprimait le rédacteur de cet écrit, destiné à revendiquer toutes les antiques pré- rogatives du théâtre de l'Opéra ; ce petit cha- pitre d'histoire, aujourd'hui bien oublié, est singulièrement instructif : Il n'entre pas dans notre plan, Messieurs, dit le rapporteur, de tracer ici Thistorique de Tadminis- tration intérieure de TOpéra et des diverses muta- tions qu'elle a subies... Lully, armé de son privi* lège , commença contre les théâtres contemporains une sorte de guerre, dans laquelle il fut constam- ment soutenu par le roi. C'est ainsi que , par ordon- nance du 30 avril 1672, il obtînt défense aux Comcdiens-Françab de se servir dans leurs repré- sentations de plus de deux voix et de six vio- lons. Par une autre ordonnance du 21 mars 1675, il leur fut défendu de se servir d'aucims musiciens externes, ni à leurs gages, voulant que les deux voix qu'il leur était permis de faire entendre fussent d'entre eux. Enfin, par ordonnance du 27 juillet 1682, il leur fut interdit de se servir d'aucuns danseurs, sous quelque prétexte que ce soit. Après avoir ainsi établi, Messieurs, les privilè- ges de l'Académie royale de Musique, il est néces- saire de suivre et d'examiner maintenant les diverses circonstances où elle eut occasion de les faire va- loir. Ce fut sur les Comédiens-Italiens que s'exerça sa première réclamation. Établis en 1659 , sous la protection du cardinal Mazarin , ils n'avaient per- (1) S. 1. D. d. (Paria, impr. Ballard, Décembre 1S27), in-4® de 44 pp. SUZERAINETE DE L'OPÉRA. 693 mission de jouer que des canevas italiens; mais comme ils y introduisaient des macliines , quelques morceaux de chant, quelquefois de la danse, ils furent soumis à une rétribution annuelle en faveur de rOpéra, laquelle fixée par abonnement à 22,000 livres par an , fut portée en 1765 , après leur réu- nion avec rOpéra-Comique , à près du double, et fut définitivement arrêtée en 1767 à la somme de 40,490 li\Te8. Nous avons parlé ailleurs des théâtres forains ; parmi eux , celui qui s'était établi sur les boulevards du nord et à la Foire Saint-Germain éveilla l'at- tention des théâtres royaux. L'Académie royale de Musique obtint en 1709, le 17 avril, un arrêt du conseil qui interdisait aux danseurs de corde et au- tres de faire chanter des pièces entières de musi- que, ni de faire aucun concert pour en tircr rétri- bution. Plus tard, et le 17 mars 1710, elle obtint, d'accord avec les Comédiens-Français , un autre ar- rêt qui interdisait absolument aux acteurs forains l'usage de la parole. On sait quelles ruses ceux-ci imaginèrent pour se soustraire à ces ordres. Nous ne rappellerons pas ces écriteaux qu'ils faisaient descendre du cintre ou qu'ils plaçaient sur le dos des musiciens de leur orchestre, et qui offraient aux yeux des spectateurs les couplets que ceux-ci s'empressaient d'entonner en chœur ; nous ne détaillerons pas d'autres moyens plus ou moins ingénieux qu'ils mirent en usage , et qui déterminèrent enfin l'Opéra à transiger avec eux , et à leur accorder, moyennant la somme de 35,000 livres par an , la permission de donner des spectacles mêlés de chant , de danse et de sympho- nies , sous la condition qu'aucune parole n'y serait proférée qu'en chantant, et sur des airs connus. Mais avant d'arriver à cette concession, l'Opéra fit d'abord reconnaître par un arrêt du conseil, en date du 26 novembre 1716, qu'il avait droit exclusif d'accorder cette permission et de l'adjuger au plus fort enchérisseur, et ce fut en vertu de cet arrêt que , le 28 novembre suivant , il passa avec les ac- teurs forains la transaction ci-dessus , homologuée ensuite par un autre arrêt du conseil, du 15 fé- vrier 1717. Ce fut cette transaction qui donna naissance au théâtre de l'Opéra-Comique , fixé toujours au boule- vard, puis à la Foire de Saint-Germain, et qui tantôt fermé , tantôt rouvert , par suite de diverses difficultés qui s'élevèrent de nouveau entre lui et les Comédiens-Français, prit enfin une consistance définitive par sa réunion avec les Comédiens-Ita- liens dans la salle de la rue Mauconseil, le 19 avril 1762. J'ai parlé tout à l'heure de la sub- vention annuelle que l'Opéra-Comique , réruni aux Italiens , payait à l'Académie royale de Musique ; je dois ajouter qu'à cette charge se joignait en ou- tre l'interdiction de jouer les mardi et les vendredi, joura d'opéra , des pièces en musique. En même temps que l'Académie royale de Musi- que faisait valoir ses droits vis-à-vis des théâtres forains , elle ne négligeait pas de les réclamer aussi vis-à-vis des Comédiens-Français , et nous citerons un arrêt du conseil du 20 juin 1716 , qui condamna ces derniers à deux amendes de 500 livres chacune, au profit de l'hôpital-général , pour avoir, dans une représentation du Malade imaginaire, et en une autre de la Princesse d'ÉUde, « mêlé dans les en- tr' actes de ces pièces des danses et entrées de bal- lets , et s'être servi d'un plus grand nombre de voix et d'insti-umens qu'il ne leur est permis par les or- donnances. » L'aiTêt ajoute expressément : « que, par grâce et sans tirer à conséquence , Sa Majesté décharge lesdits Comédiens- Français de la demande en dommages-intérêts formée par les directeurs et syndics de l'Opéra, w L'établissement du Concert-spirituel donna lien à une nouvelle réclamation de l'Académie royale de Musique. Le roi avait permis à François Phili- dor (1) de l'établir dans la salle des Tuileries; mais, sur les représentations qui lui furent faites, il revint sur cette concession, et par lettres-paten- tes du mois de mars 1725, la permission accordée à Philidor ne lui fut concédée qu'à la charge que ce Concert dépendrait toujours de l'Opéra, et que Philidor lui paierait 6,000 livres par an. Les direc- teurs de l'Opéra reprirent en conséquence ce privi- lège à la fin de 1734 , et l'exercèrent jusqu'en 1 748 ; depuis, tantôt il fut rétrocédé, tantôt repris par eux, mais toujours les concerts spirituels se don- nèrent, jusqu'en 1790, dans la salle des Tuileries. La fin du règne de Louis XV et le commence- ment de celui de Louis XVI virent naître une multitude de petits théâtres , contre l'établissement desquels l'Académie royale de Musique eut à lut- ter, et le fit avec succès. Parmi eux, toutefois, nous ne citerons que les principaux. Le premier en date est celui fondé par un sieur Nicolet , en 1760 , dans les foires de Saint-Germain et de Saint-Laurent. Le fond de ce spectacle se composait de tours de force et de danses sur la corde , et il succédait à deux troupes qui s'étaient bornées à ce genre. Nicolet voulut l'agrandir. Vers 1767 ou 1768 il introduisit des acteurs parlans et (1) Il y a ici une erreur. Ce n'est pas François, mais Anne Philidor, son frère aîné, qui fonda le Concert- spirituel. 694 SUZERAINETÉ DE L'OPERA. chantaiis, et secondé par Taconnet, acteur chéiî du public , il attira bientôt la foule. En 1769 , un arrêt du conseil, rendu sur la demande de l'Opéra, interdit la parole aux acteurs de Nicolet , et les réduisit à jouer des pantomimes. Cet ordre fut levé par transaction avec l'Opéra en 1772, et, sous la condition d'une redevance annuelle de 12,000 li- vres , Nicolet eut la permission de jouer des pièces dialoguées, mais sous la double restriction, d'a- bord de conserver ses danseurs de corde , et ensuite de ne pouvoir pas chanter même des couplets. Quand une chanson était nécessaire , l'acteur la ré- citait, et les violons en jouaient l'air. Ce théâtre prit alors le nom de Grands Danseurs du. Roi ; c'est celui qui porte aujourd'hui le titre de Théâtre de la Gaité. Le second est celui fondé par Audinot, en fé- vrier 1769, à la Foire Saint-Germain, et trans- porté ensuite sur les boulevards. Ses acteurs étaient d'abord des marionnettes, et il fut nommé les Co- médiens de bois / mais bientôt Audinot y fit paraître des acteurs véritables, des danses, des chan- teurs, etc., et lui donna le nom (ï Ambigu- Comique. Sur les réclamations de l'Opéra intervint, à la fin de l'année 1771 , un arrêt du conseil , qui réduisit TAmbigu-Comique à la condition de spectacle de dernière classe : il lui retrancha la plus grande partie de son orchestre , et lui interdit la danse , etc. Peu de temps après , en 1 772 , toutes ces conces- sions furent faites de nouveau par l'Opéra au sieur Audinot , sous la condition de payer une contribu- tion annuelle de 12,000 francs à l'Opéra, et avec les mêmes restrictions, quant au chant, que celles imposées à Nicolet (1). En 1777, sous la protection du lieutenant de po- lice Lenoir, un théâtre nouveau fut fondé sous le nom de Variétés Amusantes, et s'établit sur le bou- levard du Temple; mais, comme l'on n'y représen- tait que des pièces en prose, il fut momentané- ment à l'abri du privilège de l'Opéra. Cet état de choses dura jusques en 1784. A cette époque, de nouveaux théâtres s'étant établis, l'Opéra ob- tint un arrêt du conseil , qui lui accordait le privi- lège de tous les petits spectachs^ pour Its exercer ou Us faire exercer à son gré; droit qui avait déjà été reconnu implicitement à son profit , par l'arrêt du 26 novembre 1716, que nous avons cité plus haut. L'Opéra traita alors à l'amiable avec la plu- pai't des directeurs des théâtres existans. Audinot s'y refusa : forcé, en conséquence, d'abandonner son théâtre , il en dressa un autre au bois de Bou- logne ; et ce ne fut qu'en octobre 1785 que , par la protection d'un nouveau lieutenant de police , ses différends avec l'Opéra furent apaisés, et qu 'Audi- not fut réintégré dans son ancien local. Au nombre de ces petits théâtres, il en était un que nous venons de citer, celui des Variétés Amu- santes, dont les directeurs voulaient étendre le gen- re et qu'ils désiraient transporter dans les bâti- ments du Palais-Royal alors en construction. Cîomme le privilège qui attribuait à l'Opéra la direction de tous les petits spectacles, lui donnait le droit d'en ouvrir de nouveaux sans l'approbation de l'au- torité, il usa de cette concession en faveur des sieurs Gaillard et d'Orfeuille. Par arrêt du conseil du mois de juillet 1784, le privilège d'un nouveau théâtre, sous le titre de Variétés Amusantes, fut concédé à l'Académie royale de Musique, avec fa- culté de l'affermer, et immédiatement après les sieurs Gaillard et d'Orfeuille s'en rendirent adjudi- cataires pour quinze années, et vinrent s'installer au Palais-Royal , dans la salle actuellement occupée par la Comédie-Française. Ainsi donc, Messieurs, il est vrai de dire que les trois théâtres que nous venons d'énumérer, c'est-à- dire celui de la Gaîté , celui de l' Ambigu-Comique et le théâtre des Variétés, n'ont dû leur existence qu'à des concessions (1) de l'Académie royale de Musique , et que le dernier surtout était considéré comme sa propriété particulière ; et l'on peut éta- blir avec non moins de vérité , qu'à l'époque de la Révolution l'omnipotence de l'Académie royale de Musique était reconnue et proclamée par une foule d'ordonnances, de lettres-patentes et d'arrêts du conseil, qui avaient réduit tous les autres specta- cles à n'être pour ainsi dire que les feudataires de V Opéra. On voit quelle était, vis-à-vis de l'Opéra, la situation des théâtres de Paris sous cet ancien régime, qu'on a si justement nommé le régime du bon plaisir. Tous ces théâtres étaient tribu- taires de l'ogre inassouvissable qui s'appelait l'Académie royale de Musique, toVrS, à l'excep- (1) On voit que ces persécutions lâches, ces tracas- series indignes, n'avaient jamais d'autre résultat, et par conséquent d'auti*e bat, que la levée d'un impôt inique et exorbitant au profit de l'Opéra. (I) Ce mot de a concessions » revient à cliaque ins- tant sous la plume du rédacteur; il constitue un euphé- misme plein de candeur, et nul doute que tous les théâ- tres de Paris n'aient été touchés de la grâce charmante avec laquelle l'Opéra leur concédait la faveur de lui payer un tribut formidable. SUZERAINETE DE L'OPERA. tioiide la Comédie- Française, que notre gmude scène lyrique se contentait de tracasser de mille autres manières, comme par exemple en l'em- péchanl d'avoir, à l'occasion et iorequecela lui lK>uvatt être utile, chanteurs, daoacura ou mu- sicienB, ce qui était une source permanente de discu8sionsetdeconflitsentreruueetrautre(l). Quant à l'impôt prélevé sur ses confrères moins puissants, l'Opéra se montrait d'une exi- gence véritablement féroce, et la preuve en est dans les chifTi-es qui vont suivre. Pour Tannée théâtrale 17«y-81, la redevance générale des L ll«H ■ fCtuUtBlrCA 1 théâtres s'élevait à la somme de 43,64C livres ; ce chiffre fut presque quintuplé, c or, dans l'espace des huit années qui suivirent, le voir : (I) Ea voici, entre cent antiei, un exemple rapporté flans les Antcdolti dramalîguei .; — a Le 7 août del'ai)- née 1TS3, Ici Coméilieni (-Français) fermèrent leur thi'Atre jusqu'au IS du même mois, parce qn'on aToit aupprinié lenra ballets. Us dépotèrent & la Cour les de* moiselles Gaussîu, Lavoy, Drouiu, «C les sicuia d Breuïl et le Kain , pour BUpjilier le Roi de vouloir bie les leur rendre. Sa Majesté eut égard i leurs instancei et les ballets recommencèrent le 18 aoflt, après les rt ptétentatiOBi du Cid et du Flortntin. D G96 SUZERAINETÉ DE L'OPÉRA. 1781-82 70,617 liv. 1782-83 77,733 1783-84. 75,336 1784-85 79,650 1785-86 150,993 1786-87..... 163,180 1787-88 160,717 1788-89 190,842 Ainsi, dans le coart espace de neuf années, rOpéra avait extorqué aux autres théâtres une somme qui dépassait un million (1,012,914 li- vres) ! Quant à la dernière année, 1788-89, en voici le détail pour chaque théâtre, qu'il n'est pas sans intérêt de connaître : Comédie-Italienne 20,000 liv. Théâtre de Monsieur 30,000 Concert spirituel 8,000 Variétés Amusantes 50,000 Ambigu -Comique 30,000 Grands Danseurs du Koi 24,000 Wauxhall d^hiver 3,246 Wauxhall d'été 4,050 Théâtre des Beaujolais 16,896 Petits spectacles divers 4,650 190,842 L'Opéra ne rougissait pas d'accepter jusqu'à deux sous par jour de certains pauvres petits bateleurs ambulants î II était vraiment temps que la Révolution vînt mettre un frein à l'ap- pétit toujours croissant de ce glouton, qui ne se trouvait bien qu'à la table des autres. Mais les avantages que l'Opéra avait perdus avec la Révolution, il les retouva avec l'empire, et le Rapport déjà cité nous le rappelle com- plaisamment, après avoir énuméré certains pré- tendus droits dont ce théâtre avait été remis déjà on possession. ... Il résultait de ces divers décrets et arrêtés, dit le rédacteur de ce document, que F Académie royale de Musique ressaisissait en droit ce qu'elle n'avait jamais perdu en fait, le privilège exclusif d'être le premier des théAtres lyriques ; mais il en était un plus important pour elle, celui qui rendait tous les autres théâtres ses tributaires. Celui-là» elle l'avait perdu en 1790, et, depuis lors, elle n'avait osé le réclamer. Il fut rétabli par un dé- cret impérial du 13 août 1811, non comme une concession nouvelle, mais comme un droit acquis dont l'exercice avait été momentanément suspendu , et qu'on rétablissait à son cours ordinaire; les termes de l'article l**" sont formels à cet égard : a L'obligation à laquelle étaient assujettis tous les théâtres du second ordre, les petits théâtres, tous les cabinets de curiosités, machines, figures, animaux , toutes les joutes , les jeux , et en général tous les spectacles de quelque genre qa^ils fussent, ceux qui donnaient des bals masqués ou des con- certs dans notre bonne ville de Paris , de payer une redevance à notre Académie de Musique , est réta- blie à compter du 1^ septembre prochain. Les Pa- noramas , Cosmoramas , Tivoli , et autres établisse- ments nouveaux y sont de même assujettis , ainsi que le Cirque-Olympique comme théâtre où Ton joue des pantomimes. Nos théâtres Français , de rOpéra-Comique et de l'Odéon sont exceptés de la disposition concernant les théâtres. » L'article 3 de ce décret fixait au cinquième brut de la recette (vingt pour cent/), déduction faite du droit des pauvres, la redevance réta- blie en faveur de l'Opéra et que devaient payer les bals, concerts, fêtes champêtres de Tivoli et autres spectacles et établissements da même genre, et au vingtième celle qui était due par les théâtres. L'article 1 1 de ce même décret réta- blissait en faveur de l'Opéra un privilège vrai- ment exorbitant, celui de donner seul des concerts ou de les autoriser, et disposait « qu'aucun concert ne serait donné sans que le jour ait été fixé par le surintendant de nos théâtres, après avoir pris l'avis du directeur de notre Académie de musique. > On va voir quelle était la situation vérita- blement inouïe qu'occupait l'Opéra vis-à-vis de tous les autres théâtres ou établissements de plaisir. C'est encore le fameux Rapport qui nous la détaille en ces termes : Nous avons vu que jadis l'Académie royale de musique jouissait de six privilèges principaux : I. — Jadis elle avait le privilège exclusif de faire chanter des pièces entières en musique et en vers français (Privilège de Lully , de mars 1672). L'Opéra-Comîque tenait d'elle, à titre de conces- sion, la faveur de pouvoir entremêler son dialogue de morceaux de chant (Arrêt du conseil du 28 no- vembre 1716). — Aujourd'hui elle a seule le droit de représenter les pièces qui sont entièrement en mu- sique (Arrêté du 25 avril 1807). SUZERAINETÉ DE L'OPÉRA. 697 II. — Jadis elle seule pouvait faire Jouer des ballets d^action ou introduire de la danse dans les ouvrages qu'elle donnait (Ordonnance du 27 juillet 1682, arrêt du conseil du 20 juin 1716). — Au- jourd'hui elle peut seule faire jouer des ballets dans le genre historique et noble , et elle ne partage les ballets d'autre genre qu'avec le théâtre de la Porte- Saint-Martin (Décret du 8 juin 1806, art. 6, arrêté du 25 avril, art. l**", 2°). III. — Jadis elle forçait les théâtres secondaires à ne jouer que des couplets, sur des airs connus, sans même pouvoir chanter ces airs (Arrêt du con- seil du 15 février 1717, transactions avec Nicolet et Audinot en 1772). — Aujourd'hui, dans toutes les pièces des théâtres secondaires, on ne peut em- ployer pour les morceaux de chant que des airs con- nus (Arrêté du 25 avril 1807, art 3, S**). IV. — Jadis l'Académie royale de musique avait la pei^ission exclusive de donner des bals masqués (Lettres patentes du 30 décembre 1715). — Au- jourd'hui elle est le seul théâtre qui puisse donner des bals masqués (Décret du 8 juin 1806, art. 6). V. — Jadis tous les concerts publics dépendaient de l'Opéra, qui pouvait accorda' ou refuser la per- mission de les donner (Arrêt du conseil du 17 avril 1709; Lettres patentes du mois de mars 1725). — Aujourd'hui aucun concert ne peut être autorisé qu^ après avoir pris F avis du directeur de r Académie royale de musique (Décret du 13août 1811,art. 11). VI. — Jadis enfin , tous les théâtres, sauf la Co- médie-Française, étaient ses tiibutaires^ tous les spectacles quelconques relevaient de l'Académie royale de Musique , de laquelle seule ils tenaient leur privilège; ils lui payaient une somme annuelle ou proportionnelle aux recettes (Arrêts du conseil de 1716 et 1784, etc.). — Aujourd'hui, tous les théâ- tres et tous les spectacles quelconques , sauf la Co- médie-Française, rOpéra-Comique et l'Odéon, lui doivent V abandon cF une portion de leurs recettes ou transiger par abonnement avec elle (Décret du 13 août 1811, art. 1 et 4). Une telle situation, un abus si criant devait tôt ou tard amener des réclamations. Le rap- port très volumineux dont je viens de citer di- vers fragments avait précisément été motivé par le refus formel des théâtres de Paris de payer la redevance à laquelle on voulait les obliger envers TGpéra. Celui-ci maintenait ce qu'il appelait ses droits, et l'affaire fut portée devant les tribunaux, qui lui donnèrent gain de cause : «c L'affaire des théâtres secondaires contre l'Opéra, disait VAlmana^h dês Specta- cles de 1829, a été plaidée le 9 avril au tribu- nal civil de Paris. Les théâtres secondaires ayant refusé de payer à l'Opéra la subvention du vingtième de leur recette brute, aux termes des dispositions d'un décret du 13 avril 1811, l'avocat de l'Académie royale de musique a sou- tenu que la Charte avait reconnu les lois exis- tantes et que les décrets impériaux avaient force de loi. L'avocat des petits théâtres a ré- pondu que les décrets du Corps législatif avaient seuls force de loi et non les décrets de l'empereur. Le tribunal de première instance a condamné les théâtres secondaires, et ces der- niers en ayant appelé , le premier jugement a été confirmé par la cour royale de Paris le 18 août. » Mais le fameux décret de 1811, qui établis- sait ou rétablissait la suzeraineté de l'Opéra sur les théâtres et spectacles de Paris, avait créé une situation analogue en province, en faveur de chaque théâtre. Là, c'était tous les spectacles de curiosité : cirques, ménageries, sauteurs de corde, saltimbanques, etc., qui étaient tributaires, pour un cinquième de leur recette, du théâtre de la ville dans laquelle ils venaient s'installer soit à l'occasion d'une foire, soit en toute autre circonstance. Les disposi- tions du décret de 1811 avaient été confirmées par une ordonnance royale du 8 décembre 1824, dont Tarticle 1 1 était ainsi conçu : Les directeurs continueront à jouir de l'indem- nité qui leur est allouée sur les spectacles de curio- sité, de quelque nature qu^ils soient. Toute excep- tion qui aurait pu être accordée à cet égard est révoquée. En conséquence , aucun spectacle de ce genre ne pourra être autorisé par les maires , qu'avec la ré- serve du prélèvement établi en faveur des direc- teurs privilégiés , qui restera fixé à un cinquième sur la recette brute, défalcation faite du droit des pauvres, ainsi que cela est indiqué par l'article 21 du règlement de 1815, et conformément à l'arti- cle 15 du 8 juin 1806. En ce qui concerne le tribut levé par l'Opéra et les privilèges exorbitants dont jouissait ce théâtre, la révolution de 1830 fit tout disparaî- tre, et une ordonnance royale du 24 août 1831 098 SYMPHONISTE. supprima régolièrement ce tribut. Quant à la redevance à laquelle les petits spectacles, en province, étaient tenus envers les directeurs privilégiés, elle continua d*être payée par eux jusqu'en 1864, époque où ils en furent affran- chis enfin par le décret rétablissant la liberté des théâtres, et qui s'exprimait ainsi dans son article 6 : — « Ces établissements seront dé- sormais affranchis de la redevance établie par l'article 1 1 de l'ordonnance du 8 décembre 1 824, en faveur d^ directeurs des départements, et ils n'auront à supporter aucun prélèvement autre que la redevance au profit des pauvres ou des hospices. » Aujourd'hui, tous les théâtres sont ^nx devant la loi. SYMPHONISTE. — C'est le nom que Ton donnait, au siècle dernier, aux artistes qui composaient l'orchestre d'un théâtre, qui for- maient la partie symphonique. Il est fâcheux que ce mot soit tombé en désuétude, car il était expressif, caractéristique, et ne prêtait à aucune équivoque. T TABLEAU. — En matière théâtrale, ce mot a plusieurs significations. Tout d'abord, le tableau est un petit cadre grillé, placé dans les foyers et dans les couloirs d'un théâtre, et dans lequel chaque soir, vers le milieu du spectacle, on affiche un bulletin portant le service com- plet du lendemain : leçons de chant ou de danse, lecture, répétitions, etc., et spectacle du soir; c'est aussi sur ce tableau qu'on inscrit les amen- des encourues dans la journée par tels ou tels artistes ou employés. C'est au tableau que le personnel doit prendre connaissance de tout ce qui concerne le service. On donne aussi le nom de tahleau à certaines divisions matérielles de certains ouvrages com- pliqués au point de vue de la mise en scène. Tout changement de décor qui se fait dans le cours d'un acte implique un tableau nouveau. Si une pièce en cinq actes, par exemple, com- porte vingt parties dont l'action se passe dans vingt décors différents, on dit qu'elle est en cinq actes et vingt tableaux. Toutes les féeries sont dans ce cas, et aussi un certain nombre de drames. D'habitude, et à très peu d'excep- tions près, le rideau ne baisse qu'après chaque acte ; les autres changements de décor se font à vue. Enfin, on donne encore le nom de tableau à l'effet plastique et pittoresque produit, à la fin d'un acte, par le groupement des personna- ges, actifs ou muets, qui ont pris part à l'ac- tion. « Tableau, disait un critique en 1824, scène muette à effet, pantomime générale, coup de théâtre obligé à la fin de chaque acte de mélodrame. La science des tableaux est très familière à M. Guilbert de Pixérécourt : c'est la partie la plus irréprochable du talent de cet écrivain. » TABLEAU DE TROUPE. — C'est la liste complète des artistes composant une troupe, comique ou lyrique , avec la mention de l'em- ploi occupé par chaque artiste en regard de son nom. Tout théâtre qui se fonde, tout direc- teur nouveau qui arrive dans une \âlle, a pour premier soin de faire connaître au public et de publier, par voie d'affiches spéciales, le tableau de sa troupe. TABLEAUX VIVANTS. — La vogue est depuis longtemps passée des tableaux vivants, qui offraient cependant un spectacle curieux et intéressant. Ce spectacle consistait dans la reproduction exacte, à l'aide d'êtres animés, mais immobiles, de tableaux ou de groupes de sculpture célèbres et connus de tous. Pour les tableaux, les personnages étaient vêtus de cos- tumes dont les détails et les couleurs étaient reproduits avec le plus grand soin ; pour les sculptures, ils étaient tous couverts de mail- lots et de draperies blanches. Les groupements et les poses étaient naturellement observés avec la plus rigoureuse exactitude, et lorsque le ri- deau se levait sur un tableau de ce genre, l'ef- fet était saisissant. Cet effet était surtout re- marquable pour la sculpture, qu'on pouvait envisager sous tous ses aspects, les personnages étant placés sur un plateau à pivot qui tour- nait lentement sous les yeux des spectateurs. TALENT. — Le talent du comédien est chose tellement diverse, qu'il est réellement impossible de l'analyser dans sa générahté. Selon l'âge, selon le sexe, selon l'emploi, selon la nature de tel ou tel rôle, ce talent pouiTa se faire jour ou paraître sommeiller, éclater d'une façon irrésistible aux yeux du public ou se ma- nifester discrètement et avec difficulté. Tel ac- teur a le jeu concentré, tel autre le jeu expansif , celui-ci est doué d'une tendresse touchante^ 700 TAMBOURIN. — TARIF DES PLACES. celai-Ià se répand en clans passionnés, et tandis | par la chalenr, d'antres atteignent le but par qn'on en voit briller par la \etve, par la gaîté, I des qualiU^ de finesse, de grâce et de délicat enjouement. C'est au public de faire la part de chacun, et de mesurer son estime au plaisir que chacun lui fait éprouver. TAMBOURIN. — Toy. Airs a dassee. TAQUETÉ. — Mouvement de danse très rapide et très élégant. TARIF DES PLACES. — Autrefois, an temps du monopole et des privilèges, chaque théâtre, après avoir soumisson tarif à l'approba* tion de l'administration supérieure, n'avait plus le droit de le modifier ni d'y rien changer sans une nouvelle approbation de celle-ci. Lorsque le rcjrime de la liberté théiitrale fut rétabli par le décret de 1864 , les théâtres acquirent naturelle- TAETAGLIA. - TECHNOLOGIE THÉÂTRALE. 701 ment la faculté d'établir à leur guise et de chan- ger aussi souvent qu'ils le voudraient le tarif de leurs places. Pour sauvegarder toutefois les in- térêts du public, l'ordonnance de police du 1^*" juillet 1864, relative aux théâtres, édicta, dans son article 36, les dispositions suivantes : — «Le tarif du prix des places, pour chaque représentation, devra toujours être indiqué très ostensiblement sur les affiches en même temps que la composition des spectacles annoncés. — Un exemplaire sera apposé au bureau du théâ- tre et à tous autres qui pourraient être établis comme succursales. — Ledit tarif devra être inscrit en tête de chaque feuille de location, pour que le public soit toujours utilement averti de ses variations. — Une fois annoncé, le tarif de chaque représentation ne pourra être modifié. y> TAETAGLIA. — L'un des types ridicules de l'ancienne comédie italienne. Son nom lui venait du verbe iartagliare (bégayer, bredouil- ler), parce qu'en effet il bégayait prodigieuse- ment, ce qui était pour lui, comme pour Bri- d'oison, la source de grands effets comiques. Le Tartaglia était généralement un valet bavard, que son infirmité naturelle mettait dans l'im- possibilité d'exprimer nettement et rapidement sa pensée, et qui se mettait alors dans des co- lères burlesques contre les autres et contre lui- même. Ce type fut peu employé en France par les comédiens italiens. Il avait, dit-on, pris naissance à Naples. TAETINE. — Expression très familière par laquelle les comédiens désignent une longue tirade (Voy. ce mot). TAUEOMACHIE. — C'est l'art de com- battre les taureaux dans les courses publiques, art réputé le plus noble de tous en Espagne, et le plus considéré par conséquent, bien qu'on ait pu dire de lui, et non sans raison : c La tau- romachie, c'est le conservatoire de la guerre civile. » Détail curieux, mais invraisemblable quoique parfaitement véridique : en 1828, un dé- cret de Ferdinand VII supprimait toutes les uni- versités du royaume, incluse celle de Salaman- que, et un autre décret du même jour instituait une école royale de tauromachie à Se ville. Il y a aussi une littérature tauromachique , cousine germaine des publications périodiques spéciales et qui ne sont pas les moins suivies. Parmi les derniers ouvrage^ parus sur la ma- tière, nous mentionnerons ici le volume édité à Madrid, en 1883, sous le titre significatif de Cuernos, avec ce sous-titre : Revistas de loros, écrites par don Antonio Pena y Goni, et publiées dans divers journaux de Madrid sous diffé- rents pseudonymes, dont celui de El tis Jilena, justement célèbre dans le monde tauromachi- que et dans la république des lettres castillanes. Il n'existe en France aucun ouvrage simi- laire pour le compte-rendu de nos représenta- tions dramatiques et musicales; c'est assez dire l'importance et la popularité dont jouit chez nos voisins d'au-delà des Pyrénées l'art tauromachique. TECHNOLOGIE THÉATEALE. — La langue spéciale au théâtre est assez étendue, ainsi qu'on peut s'en rendre compte par le pré- sent livre. Cette langue, qui s'applique non seulement au théâtre proprement dit, mais aux arts divers qui concourent à sa richesse et à sa splendeur : littérature , musique, danse, pein- ture, habillement, mécanique scénique, etc., n'u cependant qu'un nombre relativement restreint de mots qui lui soient absolument particuliers ; elle emprunte les autres au riche vocabulaire gé- néral de la langue française, en leur donnant souvent une expression et une signification particulières. Ce qui la rend surtout originale, ce sont certains tours de phrase, certaines locu- tions bizarres qui sont un fruit naturel de son terroir, et que, la plupart du temps, le public lit ou entend sans les comprendre ; le présent Dictionnaire enlèvera à ces expressions singu- lières le caractère mystérieux qu'elles avaient conservé jusqu'ici, et les rendra compréhensi- bles pour tout le monde. Toutefois il faut se garer de la trop grande fantaisie, et c'est ce qui fait que je n'ai pas admis dans ce li\Te certaines locutions d'un tour curieux et ori- ginal, qui n'ont vraiment pas cours dans le langage théâtral, et que pourtant on pourrait rencontrer dans un petit volume d'ailleurs 702 TEMPLE D'EUTEEPE. — TÉNOR (premieb, second). assez amusant, mais plein d'anecdotes apocry- phes, et dans lequel l'auteur s'est laissé un peu trop entraîner par son imagination : je veux parler des Secrets des coulisses des théâtres de Paris, de Joachim Duflot. Je trouve là-dedans quelques expressions, telles que hlésifiarder, envoyer des coups de pied aux mouches, mon- trer la couture de ses las, parler du puits, qui ont pu sans doute être employées acciden- tellement, mais qui, je l'affirme, n'ont pas cours dans la langue habituelle du théâtre. Après tout, cette langue est assez intéressante et assez étoffée pour qu'on ne l'enrichisse pas sans raison et hors de propos. TEMPLE D'EUTERPE. — On sait à quel point la manie de l'antique sévissait, à l'épo- que du Directoire, sur la société parisienne : en littérature, en peinture, en sculpture, en costume, en ameublement même, il fallait que tout fût grec ou romain. C'est à cette époque qu'on vit fleurir le « temple d'Euterpe. d Sous prétexte que cette muse aimable était celle de la musique et de la poésie lyrique, les gens bien nés ou voulant paraître tels se seraient plutôt fait pendre que de désigner l'Opéra sous un autre nom. La littérature du temps témoi- gne de l'abus que l'on fit de cette qualification, qui disparut avec les coutumes auxquelles elle devait sa naissance. TEMPS. — En ce qui concerne le débit et la déclamation, on donne le nom de temps à de courts silences que certains comédiens obser- vent entre les différentes phrases qu'ils ont à prononcer, parfois, "dans la tragédie, entre cha- que vers et même chaque hémistiche, ce qui donne à leur diction ime monotonie désespé- rante. Ceci tient à l'ancien mode de déclama- tion, et tend, fort heureusement, à disparaître de jour en jour. En matière de danse, on appelle temps un mouvement de jambe, quel qu'il soit. TENIR LA PIÈCE. — Au dLx-septième siècle, les mots souffler, souffleur, étaient en- core inconnus dans la langue théâtrale, bien que roffice et la fonction existassent tout comme aujourd'hui. Mais de celui — ou de celle — qui remplissait cette fonction, on di- sait qu'il e: tenait la pièce, "» parce qu'il Im en effet que celui qui est chargé de Boatenirh mémoire des acteurs tienne la pièce entre ses mains pour faire son office. A cette é}x>que, ce- lui qui tenait la pièce n'était pas, comme au- jourd'hui, installé dans ce que nous appelons maintenant le trou du souffleur : il se tenait dans les coulisses, sur l'un des côtés du théâtre, ce qui était beaucoup plus incommode et pour lui et pour l'acteur en scène. (Voy. Souf- fleur.) TÉNOR. — Mot qui nous vient de Tîtalien, et qui sert à désigner la yoix d'homme la plis aiguë, tels sont ceux d'Alphonse dans la Muette, de Rimbaut dans Robert, à^ Léopoid dans la Juive. Les ténors d'opéra-comique constituent aussi deux emplois distincts, les premiers et les se- conds ténors. Pour les premiers ténors on trou- ve, entre autres, les rôles de Joseph, de Georges Brown dans la Dame blanche y de Mergy dans le Pré aux Clercs, de Fra Dia- volo, de Chapelou dans le Postilloîi de Lonju^ meau, d'Olivier dans les Mousquetaires de la TENORINO. — TERRE A TERRE. Reine, de Lorcdan dans Hayâée, de Shakes- peare dans le Songe d'une JV'hiV iTélé, de Lara, etc. Parmi les seconds, on peut clasacr ceux de Daniel dans le Cliaîel, de Tonio dans la Fille du régiment, d'Hector dans les Mousquetaires, de Latimcr dans le Songe, de Panilowitz dans VÈtoik du Nord. Cet emploi est assurément l'un des plus charmante et des plus gracieux du répertoire de Topéra-comique , où il acquiert parfois une «rrande importance. TENORZA 0 — Diminutif italien du mot lenore que 1 usijïc a acclimati. chez nous. C'est par ce nom que 1 on cnmcUrise certaines voix Adolptie Xoiuill. de ténor un peu minces, un peu faibles, nn pen fluettes, aussi bien que les râles peu importants qui leur conviennent. TERFSICHORE. — Une des neuf Muses que les anciens adoraient sur l'Hélicon. Elle présidait à la diinse et au chant du chœur. Ou la voit représentée sous l'aspect d'une jeune fille au visage riant, couronnée soit de guirlan- des, soit d'un diadème, et tenant ii la main une harpe ou une lyre. Les modernes ont continué à son sujet la tradition antique, et les poètes du dix-huitième siècle ne manquaient jamais de symboliser la danse sous la figure de Terpsi- chore. TERRE A TERRE. — Terme de danse, qui s'applique aas juis que le danseur exécute 704 TERZETTO. — THÉÂTRE. sans s'élever de terre. « Dans tous les pas terre à terre, dit Blasis, vous ne sauriez être trop actif du cou de pied ni trop baisser les pointes des pieds ; l'un donnera beaucoup de brillant à votre exécution, et l'autre la rendra légère et gracieuse. » TERZETTO. — Mot italien qui a exacte- ment le même sens que le mot trio (Voy. ce mot), mais qui n'a pas, comme celui-ci, reçu droit de cité dans notre dictionnaire. Terzetto n'est pas, comme quelques-uns l'ont cru, un diminutif de trio, et nous répétons qu'il est exactement synonyme ; mais il a un diminutif : ierzettino, qui veut dire « petit trio. j> TÊTE DE TROUPE. — Voy. Troupe. TÉTRALOGIE. — Les Grecs donnaient ce nom à une série de quatre pièces dramati- ques d'un même auteur, roulant sur un même sujet, dont les trois premières formaient cha- cune une tragédie et dont la dernière était une comédie satyrique ou bouffonne. Les tétralogies donnaient lieu à des concours poétiques très brillants, dans lesquels le vainqueur recevait la couronne de la gloire, et qui devinrent célè- bres vers la soixante-dix-septième olympiade. De nos jours, un musicien de génie, qui n'a- vait point le génie du théâtre, Richard Wagner^ a renouvelé, en l'appliquant au drame lyrique et en la modifiant à sa guise , la forme tétralo- gique des Grecs. Il a qualifié lui-même de té- tralogie une œuvre immense, VAnTieau du Ni- helung, qui comprend quatre opéras séparés, mais écrits sur le même sujet et se faisant suite : V VOr du Rhin, prologue; 2** la WaU kyrie ; 3" Siegfried; 4° U Crépuscule des Dieux, Selon sa coutume, Richard AYagner avait écrit tout à la fois le poème et la musique de ces quatre ouvrages, qui formaient sa tétralogie. THALIE. — L'une des neuf Muses de la mythologie païenne. Elle présidait à la joie, à la comédie, aux épigrammes et aux festins. L'ai*t antique la représente sous les traits d'une jeune fille à la physionomie enjouée, tenant en main le masque ou le pedum, couronnée de lierre et chaussée de brodequins.- Elle symboli- sait pour les anciens la scène comique, comme le prouve le masque qui figure au nombre de ses attributs, et les modernes, continuant cette tradition, ont plus d'une fois mis en jeu er. Lorsqu'il faisait beau, comme à l'époque des Dyanisia- ques, qui se célébraient au printemps, les sj^ec- tateurs se couronnaient de fleurs et s'abritaient du soleil à l'aide de larges chapeaux ; dans cer- tains théâtres, on étendait au-dessus d'eux un voile immense, que les Romains appelèrent velariuiH; (|uant aux acteurs, ils étaient ganin- tis Contre l'ardeur du soleil par les construc- tions eu sailIiL qui couronnaient la scène ; si uu onige ou une pluie subite venait à éclater pen- dant le spectacle, le public se réfugiait sous le jifrand portique circulaire et dans les couloirs pratiques sous les gradins de chaque étage. Eu hiver, aux Lénéennes, qui se célébraient an mois de janvier, les spectateurs s'enveloppaient dans de vastes manteaux. Les représentations durant souvent jusqu'à dix et douze heures , on laissait entre deux pièces un intervalle assez considérable pour <|ne les assistants eussent le temps de manger et de «e rafraichir. Dans les théâtres grecs, les premiers rangs de sièges, c'est-à-dire les plus proches de l'or- uhestre, étaient réservés aux stratèges, aux ar- chontes, aux préti-os, aux ambassadeurs étran- gère et à tous les personnages de marque ; aux n THÉÂTRES ANTIQUES. 709 rangs immédiatement supérieurs se plaçaient les cinq cents sénateurs. On a beaucoup disserté sur la question de savoir si chez les Grecs, et particulièrement à Athènes, les femmes assis- taient aux représentations dramatiques : il semble aujourd'hui prouvé qu'elles étaient ad- mises au théâtre lorsqu'on j jouait la tragédie, mais qu'il leur était interdit d'assister aux co- médies. En tout état de cause, elles occupaient certainement au théâtre des places spéciales, et séparées de celles des hommes. En ce qui concerne la construction, la forme et l'aménagement des théâtres grecs, j'emprunte cette intéressante description à M. Dupiney de Torepierre : Les premiers théâtres grecs furent de simples constructions en charpente que l'on élevait avant les fêtes de Bacchus pour y donner des représen- tations dramatiques (on sait que ces représentations étaient liées au culte de ce dieu) , après quoi on les démolissait. Eschyle n'eut pas d'autre théâtre , lors- que 500 ans environ avant J.-C, il fit jouer sa pre- mière tragédie. Mais l'un de ces théâtres tempo- raires s'étant écroulé, événement qui fut regardé comme im présage de mauvais augure , les Athé- niens commencèrent sur la pente sud-est de l'Acro- pole la construction d'un théâtre en maçonnerie. Toutefois ce monument ne fut terminé que vers l'an 340 avant notre ère. Mais il est probable qu'on s'en servit bien avant son entier achèvement et aussitôt que l'avancement de ses parties principa- les put le permettre. Pendant ce long intervalle, chez tous les peuples de race hellénique, on vit s'élever des édifices de ce genre construits sur le plan de celui d'Athènes, ainsi que le prouvent les ruines qui subsistent encore en Grèce, en Sicile et dans l'Asie Mineure. Plusieurs de ces monuments avaient des dimensions colossales. Nous citerons comme exemples les théâtres d'Argos et d'Éphèse, dont les débris couvrent respectivement un espace de 137 et 182 mètres de diamètre. Le théâtre d'Athènes même pouvait, dit-on, contenir 50,000 spectateurs. Dans tout théâtre grec, on distinguait trois parties principales : l'emplacement destiné aux spectateurs, qui en formait la partie la plus élevée; la scène, avec ses dépendances, qui était opposée à cette première partie ; et l'orchestre, qui se trouvait en- tre les deux. L'emplacement destiné aux spectateurs était dé- couvert et offrait la forme d'un fer à cheval. C'était le théâh'e proprement dit, conformément à l'étymo- logie de ce mot, qui signifie le lieu d'où l'on re- garde. Il était couvert de gradins qui s'élevaient en amphithéâtre les uns au-dessus des autres en formant de grands arcs de cercles concentriques. De distance en distance , deux rangées consécutives étaient séparées par de larges corridors appelés pi'écinctians , où, les jours de grande affluence, beau- coup de personnes pouvaient se placer. Chacun de ces corridors était limité, du côté des gradins su- périeurs ,*par un mur qui, dans certains théâtres, présentait des niches où l'on plaçait des vases de métal destinés a renforcer les sons qui arrivaient de l'orchestre et de la scène. Les gradins étaient coupés de haut en bas par des escaliers qui conver- geaient vers le centre et partageaient le théâtre proprement dit en compartiments cunéiformes. De plus, chaque escalier de l'étage inférieur débou- chait dans la précinction juste au milieu du coin directement supérieur. Comme les théâtres étaient autant qiîe possible adossés à une colline, et qu'ainsi les gradins étaient le plus souvent taillés dans le roc, on donnait encore à leur ensemble le nom de creux. Enfin, cette partie du théâtre était terminée par un portique couvert, plus élevé que le couronne- ment de la scène , afin sans doute d'augmenter les propriétés acoustiques de l'édifice. Les spectateurs se rendaient à leur place au moyen de couloirs , la plupart souterrains , (jui s'ouvraient dans les par- ties basses ou dans les parties hautes du théâtre , suivant les localités, et quelquefois dans les unes et les autres en même temps. h'orchestre correspondait à notre parterre. Il consistait en un espace circulaire qui s'étendait devant les spectateurs, un peu plus bas que le der- nier banc de la précinction inférieure, où il' ne constituait pas un cercle complet, car il se liait à la scène elle-même. L'orchestre était réservé au chœur, qui y exécutait ses danses et ses évolutions : aussi était-il planchéié. Or, comme chez les peuples de race hellénique, le chœur avait été l'élément pri- mordial de l'art dramatique grec , l'origine même des représentations scéniques, c'est autour de l'or- chestre que les autres parties de l'édifice étaient venues se grouper. Au centre du cercle qu'il cons- tituait se trouvait le thymélé, c'est-à-dire l'autel de Bacchus, lequel était ainsi un peu plus rappro- ché de la scène que du banc le plus bas réservé au public. Cet autel était élevé sur une plate-forme entourée de plusieurs marches. Enfin, il était de bois et de forme carrée , et servait à plusieure usa- ges, tantôt d'autel proprement dit, tantôt de monu- ment funéraire, etc., suivant les besoins de la re- présentation. Le chœur entrait dans l'orchestre par deux larges passages, l'un d'un côté, l'autre de l'autre , et allait se ranger dans l'espace compris 710 THEATRES ANTIQUES. i;i:li'e laKcéne et le tliymélé, tandis que son chef, ainsi que le joueur de tiùtc et les lungistrnts char- gés de la police do thcfltre, se tenaient sur la plate- forme entre l'autel et la scène, de manière lin'êlre pn^ apcr^'UE par les spectateurs. La gcène était séparée de l'orchestre par tm mur plus élevé , de chaque c5té duquel se trouvaient quelques marches qui servaient au chœur pour monter sur la scène quand il devait prendre une partdirecteùl'action dramatique. Elle ee (erminait par un mur de fond appelé Kcena, de chaque ei- Irémlté duquel se projetait une aile qu'on nommait La &cène avait peu de profondeur, car elle occupait seulement le segment de cercle enlevé à l'orcliestre. L'espace compris entre ce dernier et le mur de fond était appelé proicenîitm , et consti- tuait ce qu'aujourd'hui nous nommonH proprement la scène. C'était dans la partie de cet espace qi:i était la plus rapprochée de l'orchestre , qne se te- naient les acteurs quand ils parlaient : les anciens l'appelaient /o^Kum, pulpitum. Elle domio&ît l'or- chestre et était prohahlement de niveau avec la plate-fortne du tliymélé. On ne sait pas bien ce que les anciens entendaient par hjpOKmiura. Plusieurs amctirs pensent qu'on nommait ainsi une dépen- dance de la scène où les acteurs allaient se reposer quand ils avaient terminé leur rôle, tandis que d'autres supposent que c'était leur vestiaire. Tou- tefois, comme des textes précis établissent que cetti^ partie de la scène était ornée de statues, il y a lii'u de croire que Vhnjmsceiiiixm était tout siin- plciiient le mur en contre-bas du Intjevm et qui fni- Kiiil fiicc à l'orchestre et nu public. Le mur de fond, la •i-riia, ipii correB[)oniiuit à nutre toile de fond, offrait une grande façade ([lie l'on disposait coii- forniènicnt au genre des pièces et de manière à la mettre en harmonie avec ie lieu de l'action. Avant la représentation , il était couvert par une vaste tenture, que l'on faisait descendre, au moment du spectacle, sous le plancher, où elle s'enroulait snr un cylindre de lioiK. Pour la tragédie, la scène on le niur de fond représentait ordinairement la fa- çade d'un palais avec trois grandes entrées pour les principaux acteurs : la porte du milieu était ap- pelée jiijrlc royale (1), Ce palais présentait de cha- que ci'té une aile en saillie, dont chacune avait une entrée Eé|]aR>e. Dans certaines tragédies , (1) C'est pur (ïettc;m-re M.j/n?« que se présentait tou- joura le personnage prindp.il de la tragédie, auquel el]< était exclusivement léseuée. Pluichx XXXIU. -^ Le qunniec cl« (hMtr«, i. Pompi-L THÉÂTRES DE LA BANLIEUE. — THÉÂTRES D'ÉLÈVES. 713 comme le Prométhée , les Pei'ses , Philoctète, Œdipe à Colone^ ainsi que dans les comédies et les drames satyriques, où le lieu supposé de la pièce était dif- férent, il fallait de toute nécessité que le mur de fond fût caché par des décorations appropriées. En outre, comme les tragédies d'Euripide et d'autres pièces réclamaient plusieurs changements de scène, nous devons en conclure que, du moins à l'époque d'Euripide, l'art de la mise en scène était très avancé. Au reste, la peinture de décors existait, contrairement à l'opinion d' Aristote , bien avant le temps de Sophocle, et ceux qui la cultivaient su- rent, de bonne heure, observer les lois de la pers- pective. On sait, à n'en pouvoir douter, que les Grecs employaient, dans leurs théâtres, des machines fort nombreuses ; mais, pour le plus grand nom- bre des cas, l'absence complète de textes des- criptifs nous met dans l'impossibilité de nous rendre un compte exact de la nature de ces machines et des effets qu'elles pouvaient pro- duire. Des prismes triangulaires et verticaux placés de chaque côté de la scène, dans la po- sition de nos châssis de coulisses, offraient sur chacun de leurs trois côtés un sujet différent , de sorte qu'en les faisant tourner sur un pivot ou en obtenait un changement dans la décora- tion. On cite aussi des espèces d'échelles au moyen desquelles les ombres des morts sem- blaient sortir de terre, et un autre genre de machine, du genre de celle que nous appelons gloire, qui servait à maintenir ou à transporter dans les airs les dieux et les héros. Une autre servait à faire connaître aux spectateurs un événement qui ne pouvait s'accomplir devant leurs yeux, comme, par exemple, un pieurtre ou tout autre crime qui aurait blessé leurs sen- timents religieux ou moraux ; on ignore abso- lument en quoi consistait cette machine, et l'on sait seulement qu'elle était poussée du fond de la scène sur le devant, au moyen de roues ou de rouleaux, de façon à montrer l'objet qu'on voulait exposer. On faisait usage aussi d'un appareil, sans doute assez compliqué, pour fi- gurer rOlympe, quand les grands dieux de- vaient apparaître dans toute leur majesté. En- fin, on cite encore un instrument avec lequel on imitait le bruit du tonnerre, et l'on suppose qu'il consistait dans la réunion de plusieurs grands bassins de bronze installés sous le plan- cher, et dans lesquels on faisait rouler des pierres. En résumé, les théâtres antiques différaient des théâtres modernes par trois points extrê- mement importants : 1'' par la vastitude de leurs proportions, vraiment colossales ; 2** parce qu'ils étaient découverts ; 3** parce que, les re- présentations ayant lieu en plein jour , ils n'é- taient pas éclairés, comme les nôtres, par une lumière artificielle. THÉÂTRES DE LA BANLIEUE. — Les quartiers excentriques du Paris actuel n'en for- maient autrefois (jue la banlieue, et n'ont été réunis à la capitale qu'il y a vingt-cinq ans environ. Les petits théâtres situés dans ces quar- tier : Montmartre, Batignolles, Belleville, Montparnasse, Grenelle, portaient alors le nom de Ihèâtres de la banlieue, et, dirigés tous par deux hommes intelligents et expérimentés, les frères Séveste, qui les avaient fondés aux envi- rons de 1880 et en faisaient une exploitation spéciale, ils servaient en (quelque sorte d'école aux jeunes comédiens, qui y faisaient leurs pre- mières armes, pouvaient s'y faire remarquer, et souvent ne faisaient qu'une enjambée d'un de ces petits théâti^es sur une scène parisienne plus ou moins importante. Plus d'un d'entre ceux-ci parvint plus tard à la Comédie-Fran- çaise, et il suffit de citer parmi eux les noms de Beauvallet, de Maillart, de MM. Régnier et Bressant. Les anciens théâtres de la banlieue ont eu leur moment de vogue, et ils étaient un lieu de recrutement utile et intéressant pour ceux de Paris ; ils sont aujourd'hui déchus de leur fortune relative d'autrefois , et réduits à l'état de théâtres de quartier. THÉÂTRES D'ÉLÈVES. — On appelle ainsi certains petits théâtres qui ne sont pas absolument publics, et dans lesquels des jeunes gens qui se destinent à la carrière dramatique organisent, avec le concours et sous la surveil- lance de leurs professeurs, des représentations qui leur servent à acquérir l'habitude de la scène et l'aplomb nécessaire devant le public. Deux de ces petits théâtres on t été fameux à l'épo- que de la Révolution : celui d'un nommé Doyen, 714 THÉÂTRES (les) EX EUROPE. — THÉÂTRES D'EXFAXTS. qui était situé rue Xotre-Dame de Xazareth, et celui des frères Mareux, dans la rue Saint- Antoine. Le théâtre Doven subsistait encore, je crois, en 1830, et c'est là que nombre d'ar- tistes, entre autres Anial, Grassot, M. Bouffé, ont fait leurs premières armes. A cette épofjue, un autre petit théâtre de ce genre, le théâtre Chantereine, situé rue de la Victoire, était bien connu de tout Paris, et c'est là surtout que les jeunes apprentis comédiens montaient leurs parties ; il a disparu depuis une quinzaine d'an- nées. Le seul théâtre d'élèves qui existe au- jourd'hui est celui de la Tour d'Auvergne, (jui tire son nom de la rue où il est situé. THEATRES (Les) EX EUROPE. — Il est difficile, pour ne pas dire impossible, de connaître exactement le nombre des théâtres qui existent en Europe. Le document le plus récent (jue nous connaissions à ce sujet, et qui remonte à 1872, est celui-ci, qui donne le chiffre des théâtres pour chacun des États de l'Europe à cette éix)que : NOMBRE PAYS. I-O ru LATIOX. DES THÉ,VTnK."». Italie 2G millions 348 France 30 — 348 Espagne 16 — 100 Allemagne 41 — 194 Autriche 30 — 152 Grande-Breta^ie. . . 32 — 150 Russie 80 — 44 Belgique 5 — 34 Hollande 4 — 22 Suisse 2.7 — 20 Portugal 4.0 — 10 Suède 4.2 — 10 Danemark lA) — 10 Norvège 1.7 — 8 Grèce 1.6 — 4 Tur(iuie 23.6 — 4 Roumanie 5.3 — 3 Serbie 1.8 — 1 Mais il n'est ^iii'YH permis de se fier à cette 8tatisti(iue, publiée il y a douze ans par un certain nombre de journaux, et qui paraît quel- (jue peu fantaisiste. A cette époque, les Italiens ont réclamé, et ceux-ci affirment que Tltalie compte actuellement, à elle seule, 1,240 théâ- tres. D'autre part, il est bien certain qu'en France le nombre des théâtres s'élève h beau- coup plus de 348, chiffre cité ci-dessns : tout d'abord, nos 302 chefs-lieux de départeraent ou d'arrondissement sont tous dotés de théâtres, et si l'on n'en doit compter qu'un pour la plus grande partie d'entre eux, il faut remarquer que Paris en possède plus de trente à lai seul , et que bon nombre de grandes villes telles que Lyon, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Rouen. Lille, Saint- Etienne, le Havre, Montpellier, Nice, etc., en ont deux, trois, quatre et jastju'à cinq ; de plus, il est beaucoup de \'illes qui ne sont chef -lieu ni de département ni d'arrondissenient, et qui n'en ont pas moins chacune leur théâ- tre. Je crois qu'on n'exagérerait pas beaucoup en estimant que la France possède environ mille théâtres. Ce qui est certain, c'est que ce sont les deux grandes nations de race latine, l'Italie et la France, chez qui le goût du spec- tacle est le plus répandu. Il faut même remar- quer que les Espagnols, peuple latin aussi, possèdent, étant donné le chiffre de leur popu- lation , le plus grand nombre de théâtres après ces deux premiers pays. THEATRES D'ENFANTS. — Pendant longtemps, et à de nombreuses reprises, on a \Ti à Paris des théâtres dans lesquels la comédie était jouée par des enfants, dont la grâce et la gentillesse attiraient le public. Dès l'année 1662, un organiste de Troyes, nommé Raisin, qui s'était attiré la protection de Louis XIV, obtenait de ce prince la permis- sion d'ouvrir à la Foire Saint-Germain un théâ- tre qui prenait le titre de Troupe des Petite Comédiens Dauphins ; ce théâtre vécut peu, mais assez pourtant pour pouvoir fournir à la Comédie-Française quelques artistes tels que le fameux Baron et les deux Raisin, fils de l'organiste. Vers 1777 on voyait s'ouvrir au Ranelagh , sous le titre de Petits Comédiens du Bois de Boulogne, un établissement du môme genre. En 1771), on inaugurait sur le boulevard du Temple un théâtre somptueux qui prenait le nom de Théâtre pour les élèves de la danse de l'Opéra, et dans lequel on jouait de grands ballets dansés et mimés, en effet, pur les jeunes élèves de l'école de danse de rOpéra. En 1784, on ouvrait au Palais-Royal THÉÂTRES LYRIQUES. — THÉÂTRES (les) A PARIS. 15 le Théâtre des Petits Comédiens de S. A. M5=*'' le comte de Beaujolais, théâtre où des mariomiettes d'abord, des enfanta ensuite, jouèrent des comcHiies et des opéras-comiques qui attiraient la foule. La Révolution vit se nmltipiier les thèitres d'enfants, et nous donna entre autres ceux des Jeunes- Artistes (rue de Bondy), des Jeunes-Élèves (rue de Thionville) et des Jeunes-Comédiens (Jardin des Capuci- nes), où commencèrent leur carrière des ar- tistes tels que Lafont, Firmin, Lepeintre aîné, Monrose père et Virginie Déjazet. Plus tard, sous le gouveniement de Juillet, on eut le théâtre Comte, pour lequel fut construite la salle occupée aujourd'hui par les Bouffes-Pa- risiens, et le Gymnase-Enfantin. A cette épo- que la province elle-même fut sillonnée, pen- dant plusieurs années, par une troupe enfantine sjx'cialement réunie à son intention par une comédienne nommée M"" Castelli, et qui pre- nait le nom de troupe Castelli. Cependant, on finit par s'apercevoir qu'il y avait quelque chose de cruel à faire ainsi tra- vailler d'infortunés enfants, dont quelques-uns n'avaient pas plus de cinq ou six ans, et à abuser de leurs forces physiques et intellec- tuelles dans un âge où elles doivent, au con- traire, se développer en toute liberté. D'autre part, on découvrit aussi que, pour ceux qui étaient plus âgés, la promiscuité des sexes était fort loin d'être un élément d'honnêteté et de moralisation. Aux environs de 1H48, des or- donnances très sévères interdirent formellement les théâtres d'enfants, qui durent disparaître sans retour. Le dernier connu fut le théâtre Comte, qui dut se transformer, et où les enfants firent place à des acteurs plus avancés en âge. THÉÂTRES LYRIQUES. — C'est la qua- lification que l'on donne aux théâtres qui sont exclusivement consacrés au genre musical. THÉÂTRES (Les) A PARIS. — Ce n'est pas chose facile que de dénombrer les théâtres qui ont existé à Paris depuis les premières an- nées du quinzième siècle jusqu'à ce jour, d'au- tant qu'on se heurte, surtout en ce qui concerne les origines matérielles de notre art dramati- que, à certaines obscurités presque impénétra- bles. Je vais tâcher cependant d'établir, aussi exactement que possible, la liste des théâtres qui ont fait, depuis tantôt cinq siècles, la joie des Parisiens. C'est en 1402 que les Confrères de la Pas- sion installèrent à l'Hôpital de la Trinité, près de l'ancienne porte Saint-Denis, leur premier théiitre pour la représentation des mystères; ils l'abandonnèrent en 1540 pour se fixer à l'Hôtel de Flandre, d'où ils passèrent en 1548 à l'Hôtel de Bourgogne; ils vendirent, peu d'années après, leur salle de l'Hôtel de Bour- gogne à une troupe de comédiens qui en pri- rent le nom ; on vit dans ce même théâtre, de 1660 à 1672, une troupe de comédiens espa- gnols, et loreque la Comédie-Italienne reparut en France en 1716, elle prit possession de l'Hô- tel de Bourgogne (rue Mauconseil), où elle resta jusqu'en 1788, époque où elle inaugura son nouveau théâtre du boulevard des Italiens (OlKÎra-Comique actuel). Aux environs de 1550, les acteurs qui firent connaître au public les tragédies de Jodelle donnèrent leurs représenta- tions au collège de Reims, puis au collège de Boncourt. Vers cette époque , plusieurs troupes de comédiens de province essayèrent sans suc- cès de se fixer à Paris , et l'une d'elles occupa pen- dant quelque temps un théâtre qu'elle avait fait dresser dans l'Hôtel de Cluny (1584). En 1600, quelques-uns des acteurs de l'Hôtel de Bourgo- gne, se séparant de leurs camarades, firent élever à l'Hôtel d'Argent, au Marais, un théâ- tre qu'ils abandonnèrent bientôt pour un autre situé rue Yieille-du-Temple. Une autre trouijc établit rue Michel-le-Comte, en 1632, un autre théâtre qui est brûlé peu de temps après. En 1()50, MoHère vient fonder à Paris son premier établissement, et inaugure son Illustre Théâtre au Jeu de paume de la Croix-Blanche, faubourg Saint-Germain. En 1658, après avoir quitté Paris pendant plusieurs années, il y revient définitivement, s'installe d'abord au Petit- Bourbon, concurremment avec les Comédiens- Italiens, et ensuite dans la salle que Richelieu avait fait construire naguère au Palais-Royal. En 1661, on voit une compagnie comique, sous le nom de Troupe de Mademoiselle (M^'^ de Montpensier) , ouvrir un théâtre rue des Quatre- Vents, et l'année suivante l'organiste Raisin 716 fait admirer ses PetiU Comédiens Dauphins dans une salle situiie près de l'Hôtel Guénégaud. L'Académie roj'alc des opéras, fondée par Por- rin et Oamlœrt, ouvre son tliéàtre en 1671, dans le Jeu de paume de la Bouteille, rue Gué- n^ud; Lully, (|ui prend sa succession, inau- gure l'année suivante son Académie royale de Musique dans le Jeu de paume du Bel-Air, rue de Vaugirard, et à la mort de Molière va prendre possession de la salle du Palais-Royal ; c'est alors que les comédiens de Jlolière, se réunissant et se fondant avec ceux du Marais, THEATRES (les) A PARIS. s'en vont occujier la salle construite rue Gué- négaud par Pcrrin et Cambert. En 1677 s'ou- vre au Marais nn petit spectacle qui prend le titre de Théâtre des Bamboches; en 1G80 un ordre du roi réunit en un seul corps de comé- diens les deux troupes de l'Hôtel de Bourgogne et de la rue Guénégaud, qui restent dans ce demierthéâtre tandis que la Comédie-Italienne prend possession de l'Hôtel de Bourgogne; en 1*183 la Comédie- Française (c'est son titre of- ficiel depuis la réunion de 1C8Û) inaugure su nouvelle salle du Jeu de paume de l'Étoile, rue > TliMtre-FTsnçnlii Xcuvc-Saint-Germain-dcs-Prés, et en 1697 l'Hôtel de Bourgogne devient vacant par suite de l'espulsion des Comédiens-Italiens, qui n'y doivent revenir qu'en 1716. Voilà pour ce qui concerne le dix-septième siècle. Jusqu'ici, je n'ai pas parlé des théâtres des Foires Saint-Germain et Saint- Laurent. C'est que l'histoire de l'établissement de ces théiitres est si prodigieusement obscure, si dif- ficile à établir avec quelque apparence d'exac- titude, que je me Iwmerai à signaler tes trois plus importants d'entre eux, ceux avec lesquels il faut compter et pour lesquels on peut trou- ver des renseignements ayant certaines chances de précision : l'Opéra -Comique, les Grands Danseurs du Roi et le théâtre d'Audinot (I). C'est en 1714, dit-on, qu'un théâtre, deux théâtres mcme s'établirent à la Foire sous le titre d'Opcra-Comique (Voy. ce mot). Il n'en resta bientôt plus qu'un, qui subit toutes sortes de vicissitudes jusqu'eu 176i', époque où il fut (l>Toutefoi¥, on tn de comi'diens qui se i siècle au\ Foires Saint-Germain et S-iiat-LaurenC. THEATRES (les) A PARIS. 717 réuni à la Comédie-Italienne. En 1738, Ser- vandoni obtient rautorisation d'ou\Tir aux Tuileries, dans la grande salle des Machines, son fameux et merveilleux Spectacle en décora- tion. En 1760, Nicolet ouvre à la Foire son théâtre des Danseurs et Sauteurs de corde, qui deviendra bientôt le théâtre des Grands Dan- seurs du Roi, pour se transformer ensuite, lors- qu'il se sera établi sur le boulevard du Temple, en théâtre de la Gaîté (1). Quelques années après, en 1767, Audinot fonde , aussi à la Foire, son Ambigu-Comique, qu'il transporte ensuite, comme Nicolet, sur le boulevard, où l'un et l'autre font fortune. Vers 1774 paraît, sur ce même boulevard, le Théâtre des Associés, qui deviendra plus tard le Théâtre -Patriotique, puis le Théâtre- Sans- Prétention. En 1777, c'est le tour des Petits Comédiens du Bois de Boulogne, qui se montrent au Ranelagh , et en 1779 deux nouveaux théâtres s'installent au boulevard, les Variétés- Amusantes (de Lécluse), et les Elèves de la danse pour l'Opéra. L'an- née 1784 voit naître le théâtre des Beaujolais, l'année 1785 les secondes Variétés- Amusantes (dans la salle occupée aujourd'hui par la Comé- die-Française), les Bleuettes comiques et lyri- ques prennent place en 1787, et en 1789 on voit s'ouvrir, en même temps que les Délassements- Comiques du boulevard du Temple , le ThéîUre de Monsieur, entreprise colossale, qui échan- gera bientôt ce titre contre celui de Théâtre- Feydeau et qui, après avoir joué simultanément la comédie, l'opéra français, l'opéra italien et le vaudeville, et s'être ensuite borné au seul opém français, se fondra en 1801 avec le Théâtre Favart (ancienne Comédie- Italienne) sous le titre définitif de Théâtre de l'Opéra-Comique, lequel a subsisté jusqu'à ce jour. Mais voici venir la Révolution, et, avec la liberté des théâtres décrétée par l'Assemblée nationale, une foule d'entreprises nouvelles vont voir le jour. Je vais, par ordre chronolo- gique, en dresser une liste telle qu'elle n'a ja- mais été faite jusqu'à ce jour. 1790. Théâtre Montansier, qui porta successivement (1) Il s'est appelé aussi un Instant, pendant la Uévo- lutioD , théâtre tPÉmulation, les noms de Théâtre du Pérystile du Jardin- Égalité, Théâtre du Palais- Égalité, Théâtre de la Montagne, Théâtre Montansier- Variétés, et enfin Théâtre des Variétés, qu'il a conservé jus- qu'à ce jour. Établi d'abord au Palais-Royal, dans la salle construite pour le théâtre des Beau- jolais et occupée aujourd'hui par celui du Palais- Royal , le théâtre Montansier émigra un instant dans la salle de la Cité , et en 1807 vint s'instal- ler dans celle qu'on lui construisit boulevard Montmartre et quïl occupe encore. Théâtre Français comique et lyrique , situé à l'angle des rues de Bondy et de Lancry. Théâtres de la place Louis XV. C'était deux pe- tites salles en bois , situées de chaque côté de la place actuelle de la Concorde, et dont l'existence fut éphémère. 1791. Théâtre Molière, rue Saint-Martin, à côté du passage des Nounices. Porta successivement les noms de Théâtre des Sans-Culottes, des Amis des Arts, des Variétés Nationales et étrangères et des Variétés Étrangères. La salle de ce théâ- tre, après avoir subi une transformation ad hoCy existait encore il y a peu d'années comme salle de bal et sous le nom de Salle Molière. Théâtre du Marais, rue Culture-Sainte-Catherine. S'appela fiussi Théâtre des Amis des Arts et Théâtre des Etrangers. Théâtre Louvois, rue de Louvois. Prit tour à tour les noms de Tliéatre des Amis de la Patrie, Ihéâtre d'Émulation, Théâtre Français do la rue de Louvois, et devint en 1805 le Théâtre de rimpératrice, transféré plus tard à l'Odéon. Après l'assassinat du duc de Berry, l'Opéra y donna des représentations pendant que l'on cons- truisait la salle de la rue Le Peletier. Théâtre du Cirque, au Cirque du Palais-Royal. Reçut successivement les noms de Lycée des Arts , Veillées de ITialie et Bouffons Français. Théâtre de la Concorde, rue du Renard-Saint- Meni. Théâtre des Élèves de Tiialie, boulevard du Temple. Théâtre des Enfants-Comiques, boulevard du Temple. Théâtre de la Liberté, à la Foire Saint-Germain. Théâtre Lyrique du Faubourg Saint-Germain , à la Foire Saint-Germain. Théâtre du Mont-Parnasse, sur le Boulevard- Neuf. Théâtre des Petits - Comédiens du Palais- Royal. THÉÂTRES (les) A PARIS 718 Théâtre des Muses, ou te l'Ectrapade, près du Pantliéoti. LïCËE-DRAMATtouE, boiilcvard du Temple, dans e salle des Élévea pour la danse del'O- salle construite quelques aunëes auparavant [>our un théâtre de société. TuËATKE DE.S ComAoiens SANS TITRE, fanbourg du Temple, dans le manège d'Astley. Théâtre Doyen, rae Notre- Dame-de -Nazare th , dans une salle coustniite précédemment pour un Théatrr des Petits- Co y édibxs Frasçais, boule- vard du Temple, Théâtre des Variétés comiquks et lyriques, i la Foire Saint-Germain. 1792. Théâtre de la Cité, sur l'emplacement de l'an- cieoue église Saint - Bartliéîe my , occupé aujour- d'hui par le Tribunal de commerce. A porté suc- cessivement les noms de Théâtre du Palais- Va- riétés, Théâtre de la Pantomime-Xationale , Théâtre Moiart , Théâtre de la Ci té -Varié tés. Sa salle servit plus tard à un bal devenu célèbre sous le nom de bal du Prado. Théâtre j>v Vaudeville, établi rue de Chartres, Usé plus tard place de la Bourse , dans la salle construite pour les Nouveautés, et aujourd'hui à l'angle du boulevard et de ta rue de la Chaus- sée d'Antin. Théâtre ud Petit-Vaudeville (?), 1793. Théâtre National, rue de la Loi (Richelieu), le lieuiiéme foiido à Paris par la fameuse comé- dienne MontauËier. De 1794 à 1820 il abrita l'Opéra, et c'est en sortant de ce théâtre que le duc de Berry fut frappé par l'assassin Louvel. Théâtre de Minerve ("?). 1794. Théâtre des Je un es- Artistes, nie de Bondy, dans la salle occupée primitivement par le Théâ- tre Français comique et lyrique. 1796. Théâtre de la Bienfaisance, rue Saint-Denis^ près de la rue des Lombards. 1797. Lvi'ËE dramatique, deuxième du nom, à la Foire Saiot-Germain. 1798. Théâtre des Virro ires -Nationales, rue du Bac, sur l'emplacement d'un couvent do Bécollcttes, THEATRES (les) A PARIS. occupé depuis par une salle de danse connue hous 1q nom de Bal du Tri nus Clercs. Ce théâ- tre s'est appelé tour ù tour Variétés coniiquee et lyriques (deuxicmcH du nom), ihéStro des Élè- ves du Vaudeville et théâtre de la rue du Boe. Théâtre lyrique et dbamatiqde de iji Foire Saist-Germals. 1799. Théâtre Mythologique, rue de l'Échiquier. Théâtre des Troubadours, d'abord dans la salle 719 du TliéiUre Molière, ensuite dans celle du Tliéâ- Théatrk des Jeukes Élèves, rue de Thionville (Dauphine), sur l'emplacement de l'anL-îen Théâtre des Veillées de Momu3 (?). Théâtre du Faubodro [Saint-] Germain-, à la Foire Saint-Germain, dans l'ancienue eallc de Nicolet. Le Cirqag du FaUli-Roiil , Tute «tabllBseme Théâtre des Loubards (?). Théâtre de la Société Olympique , rue de la Vic- toire. La salle de ce théâtre, qui était, dit-on, la plus élégante et la plus belle de tout Paris, servit peu de temps après à la troupe d'opéra italien dirigée par la Montansier. Théâtre LïRI-Comiqde, boulevard du Temple, dans l'ancienne salle des Délassements-Comi- ques. 1802. Théâtre de la l'o rt e-S.m s t- Martin, dans la salle construite précédemment pour l'Opéra et devenue libre par suite du transfert de ce théâ- tre dans la salle du Théâtre -National. 1805. Théâtre des Jecnes-Comédienb, au Jardin des Capucines. Théâtre du Boudoir des Muses, rue Vieille-du- Temple , dans uae salle construite pour un théâ- tre de société. Théâtre des Nouveaux-Troubadours, boulevard du Temple. En IHiiT, un décret impérial vient brutale- ment supprimer la liberté des théàtrea, i-établir le régime des privîlègcà, et réduire k huit le 720 THEATRES (les) A PARIS. nombre dee théâtres devant exister à Paris. Les huit tlioâtres dont le souverain voulait bien conserver la joutEsauce à s& bonne ville de Paris étaient : la Comédie -Française, l'O- péra, l'Opéra- Comique, le Théâtre de l'Impéra- trice (auquel était jointe la troupe d'opéra ita- lien), le Vaudeville, les Variétés, la Gaité et l'Ambigu-Comique, Tous les autres devaient fermer leurs portes dans le délai de huit jours. Cette situation ne se modifia guère tant que dura l'empire; on vit seulement, en 1810, un spectacle d'acrobates s'établir, sons le nom de Jeux Forains, dans la salle uagnère occupée par le théâtre Montansier au Palais-Royal, et un spectacle de pantomime occuper, 8OO8 celai de Jeux Gymniques, la salle de la Porte-Saint- Martiii; au boutde deux années, l'un et l'autre avaient cessé d'exister. Le gouvernement de la Restauration ne tarda pas à autoriser quelques nouvelles entreprises dramatiques, et josqu» l'année 1864, qui nous rendit la liberté des théâtres, le nombre de ceux-ci augmenta gra- diiellumont. Voici la liste de ceux qui furent fondés i»endant cette période d'un demi-siècle : 18 U. TuÉATBR PE LA Porte-Saint-Martik. Un nouveau privilège est accordé pour rcxjiloi talion de cette balle, l'une des jiIun bellcii de Paris. TiiKATRE Comte, d'abord à l'HCtel des Fermes, comme simple spectacle de pbj-sique amusante, et plus tard nii passage Choiseul, comme tlicâtre d'enfants. TiFÉATiiE DEK Acrobates, boulevard du Temple, ijiii prend successivement les nome de TbéStre des Danseurs de corde, Théâtre Saqui, Tliéàiro Dorsay, TbéStre du Temple et Théâtre des Dé- lasse me nts -Com iques . Théâtre des Funamdcles, boulevard du Temple. 1816. Ttii^.vrRE FOitAis i>v Luxembourg, rue de Madame, (baptisé plus tard, par les liabitants du quartier. du sobriquet de Bobino). 1817. CcROUE-OLTMPiguE , faobourg du Temple, puis THEATRES (les) A PARIS boulevard du Temple. Cet établÎBScment existait depuis longtemps comme manège d'écnyere, mais c'est Beulement à partir de 1817 qu'un nouveau privilège en fit un véritable théâtre, en lui per- mettant de jouer le vaudeville et le mélodrame. :- Dramatique, boulevard Bonne -Noi Théâtre des Nouveautés, place de la Bourse, 1831. Théâtre du Palais-Boïal, dans la salle occupée jadis par les Beaujolais, le Théâtre MontaDsier et les JeuX' Forains. Théâtre tes FoLLEs-DRAMATiquES, boulevard du Temple, sur l'emplacement de la première salle de l'Ambigu, incendiée en 1826. Aujourd'hui nie do Bondv. Théâtre du Panthéon. G VHNASE- Enfantin , passage de l'Opéra (1). 1834. Tieéatre-Nautique, dans la salle Ventodour, cons- truite primitivement pour l'Opéra -Comique et qui, après avoir abrité la première Benaiesance et le Théâtre 'Italien, a été détruite il y a qnel- Tbéatke de la Porte-Saint- Antoine, boulevard Beau mardi ois. A pris par la suite le nom de Théâtre Beaumarchais, et un instant celui de Fantaisies-Parisienne)!. .Vers 1838. Théâtre Saixt-Marcel, dans le quartier Moufïc- tard. 1838. Théâtre de la Re.vaissance, salle Ventadour. 184C. (t ) Ponr ce théitre, la data de 1832 n'est qn'approïl- Salle Bonne-Nodvellë (Spcctacles-Concerls) , i loative, mais elle est bien prés de U rériU. Bazar Bonne-Nouvelle. DICnOUKAIBB DU THÉAIBI. 16 THÉÂTRES (les) A PARIS. 1847. Théathe-Histobioue , boulevard du Temple. Op^ba-National, bouIeTard du Temple, dans la Balle du Cirque-Olympique. Prend peu de temps après le titre de Théâtre- Lyrique, et abandonne pour k salle du Théâtre-HiEtorique , dont l'exis- teuce fut conrte, celle du Cirque-Olj'mpique, qui devient le Théâtre-National. En 1862, lors de la destruction des théâtres du boulevard dit Tem- ple, le Théâtre -Lyriqne est transféré dans une salle nouvelle, place du CliAtelet. Les événe- ments de 1870-71 font sombrer cette entreprise, et la salle construite pour le ThéAtre- Lyrique est exploitée par un théâtre de drame sous les titres BUccessifa de Théâtre-Historique , Théâtre Lyri- que-Dramatique et Théâtre des Nations (1). FoLiES-Co.vcEiiTASTES, boulevard du Temple, prts le passage VendSme, sur l'emplacement d'im café -spectacle récemment fondé sous le nom de Foliee-Mayer. Ce théâtre a pris tour à tour les noms de Fol les- Nouvel les , Tbéatre-Déjaïet et Troisième Théâtre-Français. 1855. BofFFES-PARisiESS, établis d'abord eus Champs- Elysées (dans une petite salle connue sous le nom de salle Lacazc, qui servait à des séances de physique amusante) , et plus tard au passage Chdiseul, dans la salle occupée naguère par le Théâtre Comte. Vers 1857. Folies-Mabignï, aux Cliamps-Élyw-es, dans la salle Lacazc, abandonnée ])ar les Bouffes- Pari- siens, et détruite aujourd'hui. Ce Ihiiâtre a iiris successivement les noms de Théâtre-Déburenu et Théâtre des Champs -Elysée s. La destruction du liouievard du Tctn]ik', iiiii firt opérée en 1862, amena une grande [jertur- ut pa (1) Cette salle, construite pour le Théfttrc- bien fâcheusement disparu, sert aujourd'hui à 1' tioQ du Théâtre- Italien récemmcat icconel H. iCiiuret. Par un baaaril singulier, la premier? ti lie lu première j'.ibo i^e ce Dictionnaire constat pnritinn du Théâtre-Italien, et un moment où mirre feuille ttiiit imprîmL.e et tirée On sp] prochaine résurrection de ce théitre, qm est batîon en ce qui concerne tes nombreux théâ- tres qui étaient aituéa sur ce point de Paria. Quatre salles nouvelles furent édifiées pour abriter les quatre plus importants : une na square des Arts et Métiers pour la Gaîttf, une rue de lîondy pour les Folies -Dramatiques, deux an Châtelet pour le Théâtre- Lyrique et pour le Théâtre-National, qui prit le titre de Théâtre du Châtelet. Les Délassements -Comiques s'inatallèrent provisoirement daog un local aménagé pour eux me de Provence, puis disparurent pour reparaître quelques années après. Quant aux Funambules et au Petit-Lazary, ce fut pour enx le coup de la mort. Mais la seconde liberté des théâtres, décrétée en 186i, allait renouveler encore la sitmition et donner naissance à on gi-and nombre d'en- treprises, dont quelques-unes appelaient l'at- tention, dont les autres, — et c'était les plus nombreuses, — n'offraient aucun intérêt artis- ti<]uc. Dès 18(14, 011 voit s'ouvrir le Théâtre Saint- Gennain (boulevard Saint-Germain), qui de- vient bientôt IcB Folies-Saint-Germain, et uii peu plus tard le théâtre Cluny. En 1865 vien- nent les Fantaisies- Pari siennes (bonle^-ard des Itahens), le Grand-Théàtre-Parisien (rue de Lyon), et le Petit-Théâtre (boulevarf Vol- taire), qui s'intitule ensuite Folies- Sai ut- An- toine, puis Doufîes- Saint- Antoine. L'année suivante voit la résurrection des Dé- lassements-Comiques (boulevard du Prince En- gène, dans une salle incendiée en l.'<71 par la Commune) et la crcyition de trois théâtres noa- vcau\ : le Théâtre du Prince- Eugène (me de Malte), qui devient plus tard le Théâtre du Château-d'Eau ; les Me nus- Plaisirs (boulevard de Strasbourg) , t\ui prennent tour à tour les noms de Théâtre des Arts, Opéra-Bonffe et Comédie-Parisienne ; et les Xouveantca, deuxiè- mes du nom (Fiiuboui^ Saint-Martin, (!0), <1U! plus tard ]>rendront le titre de Délasse- ments-Comiques (cette salle est aujourd'hui détruite). Plus féconde encore, l'année 18157 fait éclorc cinq théâti'cs : l'Athénée (rue Scribe); le Théà- trc-Intcrnationai (à l'Exposition univeraelle ) ; le Théàtre-ltossini (à Passy) ; le Théâtre Saint- r cm \\\n Fitiulodc oncflitH pris \le viqgt am , et remplAC^ pu* un iic a i«a ropéra-Comlqoe, pnii Afreot<^ an THEATRES DE GENRE. 725 Pien*e (passage Saint -PieiTC-Amelot); et le Théatre-Lafayette (à l'angle des rues Lafayette et du Faubourg-Saint-Martin). Puis viennent successivement : la Renaissance (boulevard Saint-Martin), troisième du nom (1), en 1872; les Folies-Bergère (rue Riclier), à peu près dans le même temps ; le Théatre-Taitbout (rue Tait- bout), en 1875, qui, avant de mourir, prit le titre de Nouveau-Lyrique ; les Bouffes-du-Nord (boulevard de la Villette) , vers l«7r> ; les Nou- veautés (boulevard des Italiens), troisièmes du nom, sur remplacement des anciennes Fantai- sies-Parisiennes, en 1878 ; le Palace-Théâtre (rue Blanche), en 1881 ; TEden-Théâtre , en 1882. Mais ce n'est pas tout, et il faut mention- ner encore la création de nombreux petits théâtres , qui pour la plupart ne sont — ou n'étciient — que de simples bouisbouis : le Théâtre Oberkampf (rue Oberkampf ), qui se fit connaître aussi sous le nom de Folies d'Athè- nes ; le Théâtre des Familles (Faubourg Sainl- Honoré), qui s'est appelé Théâtre Corneille et Théâtre Saint-Honoré ; le Théâtre Saint -Lau- rent (rue de la Fidélité) ; les Folies du Gros- Caillou (rue Duvivier, 1876); le Théâtre de la Porte -Saint -Denis (boulevard Saint -Denis, 1877); les FoHes-Montholon (rue Rochc- chouart), qui prirent aussi le nom de Tertullia ; le Tlîéîltre Labourdonnaye (au Champ -de- Mars); l'Athaîneum (rue des Martyrs); le Théâtre de la Villette (rue de Flandre); les Folies-Bobino (à Montparnasse); les Fan- taisies-Oller, qui s'établirent un instant (1870) dans le local laissé vacant par les Fantaisies- Parisiennes ; la Gaité- Montparnasse (à Mont- parnasse) ; le Théiitredes GolxîHns (avenue des Golxîlins) ; les Folies-Belleville (rue de Belle- ville).., Est ce-tout ? Je n'en jurerais pas. Je crois cependant que j'en oublie peu. Voici, du reste, la liste complète des thài- tres existant à Paris en l'année 18H;3 : (1) Vers 18G8, M. Carvalho, directeur du ThéAtrc- Lyrique, avait eu la singulière idée de dédoubler sa troupe et de l'envoyer, trois fois par semaine, donner des représentations à la salle Ventadour, occupée par le Tbéâtre-Itiilien , qui jouait les trois autres jours. Pour donner un titre à cette entreprise étrange, il avait choisi celui de Théâtre de la Renaissance. Cinq soirées suffirent pour faire avorter la combinaison. Opéra, Comédie-Française , Opéra-Comique, Odéon , Gymnase, Vaudeville, Variétés , Palais- Royal, Chatelet , Tuéatre des Nations , Porte-Saint-Martin , Gaité , Ambigu, Bouffes-Parisiens, Folies-Dramatiques , Renaissance, Nouveautés, Menus-Plaisirs, Théâtre Cluny, Théâtre Dé.jazkt, Théâtre du Chateau-d'Eau, Théâtre Beaumarchais, Bouffes-du-Nord , Gaité-Montparnassk, gobelins. ^f A cela il faut ajouter les quati*e grands théâ- tres é(iuestres : cirques d'Été iet d'Hiver, Hip- podrome, cirque Fernando ; puis les théâtres dits de Tancienne banlieue : Montmartre, Ba- tignolles, Iklleville, Montparnasse, fondés aux environs de 1880, et Grenelle ; puis encore dif- férents spectacles de curiosité, tels (jue le Mu- sée Grévin, le tliéiitrc Robert -Houd in, divers panoramas ; enfin les innombrables cafés-con- certs qui pullulent dans tous les quartiers de la grande capitale. Selon toute apparence, Paris n'est pas près de s'ennuyer. En tout cas, ce ne sera piis faute de distractions. THÉÂTRES DE GENRE. — C'est une qualification qu'on appHtjue volontiers à cer- tains ^éàtres dont le genre n'est pas nettement défini, et dont le répertoire offre une variété réelle ou relative. Les théâtres hTiques sont consacrés à l'opéra, la Comédie-Française et rOdéon à la tragédie et à la comédie , l'Ambigu au drame, la Porte-Saint-Martin et le Chatelet aux pièces à gi'and spectacle ; mais le Yaude ville, le Gymnase, les Variétés, le Palais-Royal, où l'on joue tout, la comédie, le drame intime, la 4- i\ i C-i» 7^'' THÉÂTRES DE QUARTIER. — THÉÂTRES DE SOCIÉTÉ. boufFonnerie, parfois même le raudeville, sont considéréscommedcs théâtres de genre et reçoi- vent cette qualification élastique et indécise'. THÉÂTRES DE QUARTIER. — C'eat le nom qu'on donne à certains théâtres qui , pla- cés dans certains quartiers excentriques, ne sont pas fréquentés par le gros du public et n ont guère d'autres spectateurs que les habitante de ces quartiers. En ce qui concerne Pans les théîitres de l'ancienne banlieue : Belleville, Montmartre, Batigiiollos, Montparnasse sont des théâtres de quartier, de même que les Rouf fes du Nord, qui sont situés à l'extrémité du faubourg Saint-Denis. Le théâtre Cluny lui même, quoique plus important qne tous ceux ci, peut être considéré comme un théâtre de quartier, car sa situation sur le l>ouIevard Saint-Germain fait qu'il n'est guère fréquente que par les habitants de la rive gauche de k Seine. THEATRES DE SOCIÉTÉ.— Le goût du théâtre a toujours été tel en France, et ai ge néral, que les geus du plus grand monde et de la plus hauteaociété, ne se contentant pas d al 1er an spectacle, s'évertuaient à jouer la corne die entre eux, dans leurs châteaux, dans leurs hôtels, où ils se faisaient construire à cet oifet des théâtres souvent très luxueux et où ils se liiTaient à ce plaisir avec une aorte de fureur Dés le dix-septième siècle on signalait dej i quelques exemples de ce genre ; maïs le goût des théâtres de société se généralisa surtout au dix-hnitièrae , et, poussé jusqu'à la rage ceat hii qui inspirait à Pirou ces (-ers d'un des jiei Bonuugc'S de la Mélromani'e .- CeiiendaQt soyez gai; débutez seuloTiient, De la force du charme enlr J'ni vu ce chacms, en Frant Kos palnis dcTenir ilea EnlleB , opérer des miracks, 'pectncics llepréBïu ter Hector, Stpiiian;!!!; et Crispiu Sous Louis XIV, ce goût du tlicâtre parti- culier ('■t;iit déjà très répandu, le souverain lui- même donnant l'exemple. On dansait des bal- lets et l'on jouait la comédie chez Gaston d'Orléans, oncle du roi, chez Colbert, son premier ministre, chez le grave chancelier Séguier, chez le prince de Condé, chez le maré- chal de t'Hospital, chez le duc de Gramont, chez M et M"" de Guénégaud, aussi bien que dans les hôtels des duchesses d Aiguillon de Monthazon de Rohin de Che^Tensc de Choisy do Chatillou des marquises de Bon nellc de GouMlle etc , aussi bien qn d, Samt Cji , ou M de llamtenon faisait jouer par ses élèves des tragédies qu'elle faisait écrire par Racine. Almndonnée pendant les sombres et derniè- res anue^ dn rè'giie du vieux roi, la comédie de société retrou\"a bien ^■ite tout son lustre sous son suce-esseur. Je ne saurais avoir la prétention d'énumérer ici toits les théâtres de THEOLOGIUM. — TITRES DE PIÈCES. 727 société, tous les théâtres d'araateurs qui se rendirent plus ou moins fameux dans le cours de ce dix-huitième siècle si affolé, si assoiffé de plaisirs. Je me bornerai à en mentionner quel- ques-uns, en rappelant tout d'abord, à titre exceptionnel, les fêtes théâtrales somptueuses de la duchesse du Maine, si connues sous le nom des (( Nuits de Sceaux. » Je signalerai ensuite les théâtres particuliers du duc d'Orléans, du maréchal de Richelieu, du prince de Conti, de la duchesse de Noailles, de M™*' de Monlesson, des demoiselles Verrières, etc. On sait la célé- brité que se sont acquise les spectacles que j^mt- ^Q Pompadour organisait à Versailles, dans le théâtre des Petits- Appartements, et ceux que plus tard la jeune reine Marie- Antoinette don- nait d'une façon si brillante à Trianon. Dans un tout autre genre, il faut citer les deux théâtres que M'*® Guimard, la célèbre dan- seuse, s'était fait construire dans ses deux hôtels de Pantin et de la rue d'Antin, et sur lesquels on jouait des parades et des parodies qui , dit- on, n'étaient pas précisément écrites à l'usage des pensionnats de demoiselles. Enfin , loraque la Révolution éclata, il existait à Paris plus de deux cents théâtres particuliers, dans lesquels des amateurs plus ou moins titrés se donnaient le plaisir de la comédie de société. Dans la première moitié du siècle présent, on vit encore nombre de théâtres d'amateurs , parmi lesquels on doit signaler en première ligne celui de l'hôtel Castellaue , puis ceux du duc de Chimay, du prince Murât, du duc de Maillé, du prince de Marsan à Bernis, de ]y|irc Dupin à Chenonceaux, de M. de Magnan- yille, de M. de Clermont-Tonnerre, etc. Au- jourd'hui, le goût de la comédie de société ne semble pas moins vif qu'autrefois ; mais on la joue volontiers dans un salon, entre deux para- vents, et l'on ne cite plus guère de somptueux théâtres particuliers conmie ceux dont le renom a été si grand au siècle dernier. THEOLOGIUM. — Les anciens donnaient ce nom à certaine partie du théîitre, qui était plus élevée que l'endroit où piiraissaient les personnages ordinaires des pièces représentées. C'était l'endroit d'où parlaient les dieux, et où se trouvaient les machines sur lesquelles ils descendaient. Il fallait, nous dit V Encyclopédie, un Uieologium pour représenter VAjax de So- phocle et VHippolyte d'Euripide. TIMBRE. — C'est la marque par laquelle on reconnaît l'air d'un couplet de vaudeville sans en avoir la musique sous les yeux. La (M du Caveau (Voy. ce mot) a enregistré ainsi plusieurs milliers d'airs connus, en donnant leur timbre, qui est soit le titre d'une chanson, soit celui d'une pièce pour laquelle l'air a été fait, soit le premier vers du couplet original. Dans le premier cas, on met en tête du couplet nouveau cette mention : « Air de Malhrough, ]i ou : enfin, dans le troisième, on met : « Air : J'en guette un petit de mon âge, > ou : « Air : Da/is un grenier qu'on est bieîi à vingt ans! » etc. Cette mention suffit à faire recon- naître aussitôt l'air ou à en faciliter la recherche. TIRADE. — Dans les tragédies et dans les drames, on appelle tirade mi long récit fait par l'un des acteurs en scène. Le fameux récit de Théramène, dans Phèdre, est une tirade. Tirade aussi le long morceau débité par Oreste à la première scène à' Andromaqiie. En argot de théâtre, la tirade devient une tartine. Dans la comédie en vers, où les récits de ce genre sont généralement moins longs, et même encore dans la tragédie , lorsqu'ils sont dans le même cas , on leur donne volontiers le nom de couplets. TIRER LA FICELLE. — D'un chanteur qui, au théâtre, ou parce qu'il commence à perdi'e la voix, ou parce qu'une indisposition passagère lui enlève une partie de ses moyens, éprouve de la difficulté à atteindre les notes élevées d'un morceau et n'y parvient qu'à grand' peine et avec des efforts visibles, on dit qu'il tire la ficelle. L'origine de cette expression se perd dans la nuit des temps. TITRES DE PIÈCES. — De tout temps, certains auteurs se sont ingéniés à donner à leurs pièces des titres étranges, destinés à pi- quer la curiosité du public ; d'autres, de très bonne foi et sans y chercher malice, ont fait 728 TOCCATA. — TORERO ou TORÉADOR. preuve en ce genre d'une excentricité naïve, soit par la nature, soit par la longueur des ti- tres choisis par eux. Nous nous bornerons à citer ici quelques exemples curieux. En 1579, Gabriel Bounin fa.it imprimer à Pans une tragédie ainsi intitu- lée : la Défaite de la piaffe et de la piquorée et le Bannissement de Mars à . Vintrodudion de Paix et de dame Justice; Tannée suivante, Thomas Le Cocq, prieur de la Trinité de Fa- laise et de Notre-Dame de Guibray, donne une autre tragédie dont voici le titre : Uodieux et sanglant meurtre commis par U maudit Cdin à V encontre de son frère Abel, extrait du qua- trième chapitre de la Genèse, tragédie morale à douze personnages, savoir : Adam, Eve, Gain, Abel , Calmana , sœur et femme d' Abel, Debora, sœur et femme de Gain, l'Ange, le Diable, Re- mords de conscience, le Sang d' Abel, le Péché, la Mort. En 1621, un anonyme public à Troyes la pièce suivante : les Amours de Zerhin et d'Isa- belle, princesse fugitive, où il est remarqué les périls et grandes fortunes passées par ledit Zer- hin, recherchant son Isabelle par le monde, et comme il est délivré de la mort par Roland; en 1636, Grandchamp fait représenter à l'Hôtel de Bourgogne une tragi-comédie intitulée les Aventures amoureuses cVOmphale, son combat, sa perte, son retour et son mariage; en 1716, la Comédie-Italienne représente deux canevas dont l'un porte pour titre Arlequin feint guéri- don, momie et chat ou V Apothicaire ignorant, et l'autre Arlequin feint vendeur de chanso)is, caisse d'oranger, lanterne et sage-femme; en 1758, de Hesse donne au même théâtre un ballet intitulé l Amour piqué par une abeille et guéri par un baiser de Vémis,., Nous pour- rions multiplier ces citations ; il nous suffit de ces quelques exemples d'excentricité naïve ou volontaire. (Voy. Sous-titre.) TOCCATA. — Voy. Airs a danser. TOILE (LA). — C'est le rideau d'avant- Kcène, celui qui sépare de la salle le théâtre proprement dit, et qui reste baissé chaque fois (jue l'action dramatique est suspendue. Les let- trés lui donnent généralement le nom de ri- deau; le populaire l'appelle plus familièrement la toile, TOILE DE FOND. — Synonyme de Btdeau de fond (Voy. ce mot). TOMBER. — Au théâtre, comme dans le dictionnaire, tomber signifie faire mie chute, et faire une chute est l'antonyme d'avoir du succès. Il est rare qu'une pièce ou un acteur tombés tout d'abord se relèvent de cet échec ; cela se voit pourtant. Mais quand la chute est telle que ce relèvement est impossible, on dit que la pièce, ou l'acteur, est tombé à plat. Si la chute est caractérisée par de nombreux sifflets, on dit de l'une ou de l'autre qu'il est tombé sous les sifflets, TORERO ou TORÉADOR. — Noms qu'on donne, en Espagne, à ceux qui combattent le taureau dans les courses publiques ; il convient toutefois de distinguer entre le toréador et le torero. Celui-ci est le matador et combat de Fé- pée, à pied, tandis que celui-là, le picador, tou- jours à cheval, ne fait qu'escarmoucher de la lance pour irriter le taureau. Un torero en re- nom peut gagner 5 à 6,000 réaux par course, soit 1,500 francs de notre monnaie, sans comp- ter les petits bénéfices ; mais il est vrai de dire qu'il y a une morte-saison pour la tauromachie, l'hiver. Avant d'entrer dans l'arène, tous vont s'age- nouiller devant une image ou une statue de la Vierge placée dans une petite chapelle , et loi font leurs dévotions ; car ces messieurs sont superstitieux comme des brigands calabrais... ou espagnols. Mais il y a un proverbe qui dit : Fiafe en la Virgen y 7io corras... , dont voici , d'après M. Emile Maison, le sens littéral : « Fie-toi à la Vierge et ne cours pas... puis tu verras ce qui t'arrivera. » Cependant, il leur arrive souvent malheur; témoin El Rato, am- pu té d'une jambe et aussi célèbre que Pelage, le grand massacreur de Maures. Parmi les plus célèbres toreros du temps pré- sent, nous citerons Frascuelo et Lagartijo, qui sont des espadas (épées) sans rivaux dans toute la Péninsule ; nous disons rivaux, et non pas rivales, pour nous conformer à l'usage castillan. TORERO ou TOREADOR. 72» I./!^rtijo et Frascuelo ont leurs partiaanB, comme autrefois Gluck et Piccinni. Bocarcgra (k Sévillan) mérite aussi une place à part daiia le livre d'or de la tauromachie. Parmi les pica- dorea, El Francès vient en première ligne, ayant eu dea centaines et encore des centaines de chevaux éventréa sous lui. Les toreros sont d'ailleurs gens d'assez mau- vaise compagnie, comme f|ui dirait des maqni- gnons, très recherchés cependant par les gêna du bel air. Aucuns sont la coqueluche des plus fières beautés. Un grand d'Espagne a plus de déférence pour un torero que pour un artiste ou un savant, si illastre soit-il. En veut-on une preuve î La date est historique. Le 18 juin 1875 , un vendredi , s'il voua platt ! Torerg et Pli^dur e Frascuelo offrait un dîner de gala chez Fomos, le premier restaurateur de Madrid , aux minis- tres et aux grands du royiinme. Étaient pré- sents : M. le duc de Sesto, chef du palais de S. M. Alphonse XII ; il, Romero Roblcdo, mi- nistre de l'intérieur; M. Orovio, ministre de l'instruction publique, etc., etc. Frascuelo porta la santédn jeune souverain, et le duc de Sesto, an nom du roi, celle de l'amphitryon, « première cspada des Espagnes et des Amériques, y ea- ballere miuj compUdo, et chevalier très accom- pli.. Frascuelo s'est montré aux Parisiens, avec sa ciiadrilla, lors de lit représentation donnée au profit des inondlus souvent lieu ù l'occasion d'un mariage , d'-ùne naissance, d'un traité de paix , etc. Le prince ou le seigneur qui se proposait d'en donner un, le faisait annoncer dons les villes et les chAtenus: par la toix de ses hérauts d'armes. A l'ijpwjue in- diijuée, les chemins se couvraient d'une foule nom- breuse : nobles et non nobles accouraient de toutes parts, aussi avidea de ce genre de s[>ectaele ijue les Romains avaient pu l'être des jeux du cirque et de l 'ampli ithéfitre. Dès leur arrivée au lieu de lu fê- te, les combattants /a 'nZjEnf Je leur blatoii fenêtre, c'est-à-dire arboraient leur bannière à la fenPtrc la ]>Iii9 élevée de leur logis , et plaçaient leur écusson armorié sur un poteau planté devant la porte. Ils envoyaient en même temps leur heaume et leur écu aux seigneurs chargés de la police du tournoi , ou juges du camp, qui les exposaient dans un lieu où les dames allaient les visiter. Quand une dame avait reçu quebjne offense de l'un d'eux, elle le re- commaiidait en touchant son écu. L'accusation étant prouvée, le chevalier était puni et exclu de la fête. Les chevaliers admis à figurer comme ac- teurs dans les exercices, juraient entre les mains de« juges d'observer fidèlement les lois du tournoi. Ils s'engageaient, entre autres choses, à ne se ser- vir que d'arme* gracicuaea ou courUAu», c'est-à-dire de lanceij sans fer et d'épées suna pointe ni tran- chant ; à ne pas blesser le cheval de leur adversaire; ù ne frapper qu'entre les quatre membres; à ne pas 732 TOURS DE GIBECIÈRE. - TRADITION-. se réunir plusieurs contre un seul ; à ne pas atta- quer celui qui aurait levé la visière de son casque on dont le casque serait tombé , etc. Le lieu du tournoi consistait en une enceinte ou lice, formée d'une double barrière à hauteur d'appui, et dont un des côtés au moins était garni d'échafaudages de charpente formant des tribunes où se plaçaient les juges, les dames et les autres spectateurs il- lustres. On distinguait dans les tournois plusieurs sortes d'exercices : le combat à la foule ou ires- pù/7iée entre deux troupes de combattants à cheval; le pas iTarmes, et la castille, où les deux groupes étaient soit à cheval, soit à pied ; le combat à la barrière, où les deux partis étaient toujours à pied ; lo, joute à la lance, qui avait lieu entre deux seuls cavaliers, etc. Bien que dans ces diverses sortes de combats toutes les précautions fussent prises pour éviter au- tant que possible les accidents, ceux-ci pourtant n'étaient pas rares, et ils devinrent nombreux à ce point que l'Église et les princes s'en ému- rent, et qu'à diverses reprises les tournois fu- rent interdits, tantôt par l'autorité civile, tan- tôt par l'autorité religieuse. Mais on sait ce que peuvent les défenses de ce genre, lorsqu'il s'agit d'une coutume passée dans les mœurs, et surtout d'un divertissement en quelque sorte national, auquel chacun prend part soit comme acteur, soit comme spectateur. Pour ralentir la vogue des tournois , il ne fallut rien de moins que la blessure mortelle faite au roi Henri II, dans une joute à la lance, par le comte de Montgomery, son capitaine des gardes. Encore, comme nous le disions, ne fut-elle que ralentie, et vit-on peu d'années après Charles IX blessé à son tour, quoique moins grièvement, par la lance du duc de Guise. A partir de ce moment, les tournois furent définitivement abandonnés, et cédèrent la place aux carrousels. TOURS DE GIBECIÈRE, DE GOBE- LETS, DE PASSE-PASSE.— Ce sont les tours que les escamoteurs de bas étage exécutaient au- trefois sur les places publiques, en présence de la foule étonnée et naïve. Ces tours consistaient pour eux à faire passer et repasser rapidement de menus objets , tels que des muscades, d'un endroit dans un autre par l'effet de l'adresse et de l'agilité des mains. De là le nom de fours de passe-passe. Et comme ils se sellaient pour cela de plusieurs gobelets sous lesquels ils fai- saient passer tour à tour les objets, on disait aussi tours de gobelets. Enfin , comme lem* pe- tit matériel était contenu dans nne gibecière qu'ils portaient sur eux, on disait encore fours de gibecière, a TOUS ! TOUS î >> — C'est le cri par lequel la claque (car aujourd'hui le public véritable n'entre pour rien dans les manifestations de ce genre) rappelle, à la fin d'un acte ou d'une pièce, tous les acteurs qui ont pris part à son interprétation, afin de les « couvrir de bra- vos. y> Jadis, le rappel était un honneur excep- tionnel, accordé seulement, dans certaines cir- constances particuhères, à certains grands artistes, et par un public sincèrement enthou- siaste. Aujourd'hui, on ne se contente plus de rappeler un comédien, on les rappelle et ce soin est laissé à une claque stipendiée à cet effet. Mais la banalité même du fait lui en- lève toute espèce de valeur ; et quand les co- médiens sont revenus, se tenant tous par la main, recevoir les bravos d'une claque eu délire, ils n'ont pas de quoi être plus émus que le public qui a assisté sans j participer à cett^ petite fête de famille. TRADITION, TRADITIONS. — On ne doit point confondre la tradition avec les tra- ditions. La première , spéciale à la Comédie- Française , revêt un caractère de généralité , et se rapporte à la façon de parler, de dire, de comprendre et de jouer un rôle. Les traditions, qui sont de mise dans tous les théâtres, con- cernent certains jeux de scène d'un genre par- ticulier, certains mouvements et même ccrtiiins mots ajoutés à la mise en scène ou au texte primitifs, et qui sont destinés à obtenir un ef- fet soit dramatique, soit le plus souvent comi- que, dont l'auteur n'avait pas conçu la pensée. La tradition est le plus souvent insupporta- ble, en ce sens que, si on l'observait à la lettre, elle pétrirait tous les comédiens dans le même moule et apporterait au théâtre la plus déso- lante uniformité. On voudrait l'imposer à des comédiens du talent le plus opposé , du tempe- TRADUCTION. — TRAGÉDIE. 733 rament le plus divers , sans tenir compte du physique, des facultés, des aptitudes particuliers à chacun d'eux. Certainement Tart du théâtre, comme tous les autres arts, repose sur des lois générales, sur des données premières et raison- nées qui veulent être respectées ; mais il y a loin de là î\ vouloir obliger tous les comédiens à marcher, à parler, à se mouvoir, à rire et à se moucher de la même manière. Les j)rincipes généraux de la diction théâtrale et de l'action scénique doivent assurément être inculqués aux jeunes comédiens ; mais il ne faut pas les asservir à l'observance rigoureuse de détails puérils qui leur enlèverait toute initiative et toute originalité. C'est ce dont on ne se rend pas toujours suffisamment compte sur notre grande scène littéraire, où les nouveaux venus, à qui l'on oppose sans cesse « la tradition , » ont la plus grande peine à faire admettre dans leur jeu quelque nouveauté et quel(|ue pei'son- nalité. TRADUCTION. — On a donné en France, depuis deux siècles, un grand nombre de tra- ductions d'œuvres dramatiques étrangères, soit d'après les auteurs anciens, soit d'après les modernes. Mais les étrangers ont mis bien plus encore à contribution notre théâtre, toujours si riche et si florissant, et, à l'heure actuelle, nos bons écrivains dramatiïjues peuvent dire qu'ils sont jout'S sur toutes les scènes du monde, car il ne se présente pas chez nous une pièce importante qu'elle ne soit traduite aussitôt dans diverses langues. Un exemple curieux de traduction est celui qui nous est offert par VAndromaque de Ra- cine, qui fut jouée en italien à Paris, à la Co- médie-Itahenne, le 15 mars 1725. Voici ce que le Mercure de France disait à ce sujet : — a dit un critique, occupa le théâtre jusqu'en 1632, époque oii Q fut détrôné par un homme qu'on ne détrônera pas, par Corneille. Il faut tenir compte pourtant des efforts de deux écrivains contemporains de Hardy, l'un, Du Ryer, fameux par sa tragédie de Scévole, l'autre, Mairet, par sa Sophonisbe. Tels sont les précurseura de Pierre Corneille. Avec celui-ci, la tragédie française atteint son plus haut point de perfection, et devient l'ad- mirable poème que l'on sait ; Rotrou, sans l'é- galer, marche sur ses traces, et bientôt Racine, avec son vers enchanteur et plein d'harmonie, avec son incomparable sentiment de la scène , sait faire autrement et aussi bien que Corneille. Si Polyeucte, le Ctrl, les Horace» sont de mer- veilleux chefs-d'œuvre, on n'en saurait dire mami di Andromaqm, de Britannicus , d'iphi- génie, de Pltèdre et d'Alkalie. Voltaire viendra ensuite, et luttera parfois avec bonheur contre le souvenir écrasant des deux géants qui l'ont précédé, mais après lui et jusqu'à nos jours la tragédie ne trouvera que de bien paies conti- nuateurs de ceux qui lui ont donné un si ma- gnifitpie éclat. II faut cependant citer honora- (1} Cette intériorité Évidente des I.itina i Greea en ce qui concerne la tr.inréilie ara tatée par Boileau dans son Art /màique (ch La tragédie, informe et grossièro en nai?: K'ttnit qu'un simple rhtuur. oft ehacim Et du dieu ies raisins entonnant les loiin S'efforçait d'attirer de fertiles vcnd.iDgoj lA, le Tin et la joie éveillant les csjirio. Du ]ilii5 Lubile chantre un l'tgant dOB mt IJI) : le Pi il Thespis fut le premier qui, barbouillé de lie, J'romena par les bourgs cette heureuse folie ; Et, d'acteurs mal ornés cha.rgeaat un tombereau. Amusa les passants d'un spectacle nouveau. Eschyle dans le chœur jet.i les personnages , D'un masque plus honnête habilhi les visages , Bur les sis d'un théfttre en public exhaussé , t paraître l'acteur d'un brodequin c Poph. « Béni. Intéressa le chœur dans toute l'action, Des vers trop raboteux polit l'eïpreBsion, Lui donna chei Ita Grecs celte hauteur dîvii Où jamais n'atteignit la faiblesse latine.... blement au moins les noms de Marie-Joseph Gbénier et d'Amault, qui ont su parfois trou- ver de noblee accents tragiques. Au reste, on peut coDHidércr la tragédie comme morte au- jomd'hni ; elle a été détrônée par le drame mo- derne, soit eu prc»e, aoit en vers, tel que l'ont conçu Victor Hugo, Alexandre Dumas et les écri^'ain8 venus à leur suite. 3DIE. 785 Je ne m'occuperai pas des tragiques étran- gers; Shakspeare, Calderon, Lope de Vega, Maffei, Schiller, sont de grands hommes, mais la place me manquerait pour parler d'eus comme il convient. Seulement, puisque je viens de rappeler le drame en prose, je dois mention- ner certains essais singnliem qui ont été faits, au dix-septième siècle, de tragédies en prose. l'HiKel lie Boorgogiia i Les deux premiers de ces casais émanent, à ma connaissance, d'un écrivain fantasque, Pu- get de la Serre, à qui Boileau n'épai^na [tas les lirocards, mais qui, comme on va le voir, se souciait de la critique comme d'un fétu. Ce prétendu auteur dramatique, dont le talentétait absolument nul, fit jouer en n;43 une traj^é- die en prose intitulée Thomas Motus, chan- celier iCAwjklerre ou fo Triomphe de la foi et de ta conelance. Comme quelqu'un entrepre- nait unjourde lui adresser quelques critiques sur son oeuvre, il répondit sans se troubler : — « On Bçait que mon Thomas Morus s'est acquis une réputation que toutes les autres comédies du teras n'avoient jamais eue. M, le cardinal de liichelieu a pleuré dans toutes les repréeeutatiouB i|u'il a vues de cette pièce. H lui a donné des témoignages publics de son ?8C TRAGEDIE. estime, et toute kcourneini a pas été moins favorable que Son Emiuence. Le Palais- Royal étoit trop petit pour contenir ceux que la curio- sité attiroit s cette tragédie. On y anoît au mois de décembre, et, do compte fait, l'on tua «{uatrc portiers la première fois qu'elle fut jouée. Voilà ce qu'on appelle de bonnes pièces. M. Cor- neille n'a point de preuves si puissantes de l'excellence des siennes, et je lai céderai volon- tiers le pas quand il aura fait tuer cinq portiers en un seul jour (1). » Notre homme au reste eut des imitateurs, car l'année 1645 vit éclore conp sur coup deux nouvelles tragédies en prose, l'une, Bérénice, de Du Ryer, l'autre, Zénobie. de l'abbé d'Aubignac, dont l'insuccès fut écla- tant. C'est à propos de celle-ci, où d'Aubignac se vantait d'avoir suivi de point en point les règles d'AristoIe, que le prince de Coudé s'écria qu'il savait bon gré à l'abbé d'avoir si bien oliservé les règles d'Ariatote, mais qu'il ne (1) Cette ane<:âoCe ne conconJe guùre arec celle que j'ai déjà r3]>portée, d'après les chroDiijueurs. au mot Priât, sur Puget de la Serra. Je ferai remarquer qu'ici je n'invente rien ; mais cette secoDile .inecdote n'étant pasmoiD? cnrieuseque la piemiére, je la repiod uis aussi, pardonnait point aux susdites règles de lai avoir fait faire une si méchante tragédie. Au reste, la tragédie en prose ne réussit pas à s'acclimater. Ce qu'on appelle tragédie chré- lienne, ou tragédie sainte, ne fut guère plus heureux, et les exemples n'en sont pas plus TRAGÉDIE LYRIQUE. - TRAGÉDIEX, TRAGÉDIENNE. nombreux. On ne counaît en ce genre (jue VAnliociied'ua re\igieuxnoaiTaé Jenn- Baptiste Lefranc {1025), la Oabinie de l'abbé Briieya (160'J), le Joseph de l'abbé Genest (1710), et YAilrien de Campiatron. Enfin ou eut aussi la tragédie bourgetme avec le Béverley, de Saiirin, ({ni fut joué en 1 768 ; mais ceci se rapprochait beaucoup du drame moderne, tant par le enjet que par la façon dont il était traité. Pour ter- miner, je ferai remarquer qu'une des tniKédicB do Voltaire, et des plus célèbres, Tancrède, est écrite en vers à rimes croisées, TRAGÉDIE LYRIQUE. — C'est laquali- ficatiou qu'on donnait autrefois, en France, aux opéras du genre sérieux. Tous les ouvrages de Lully, la plupart de cens de Rameau, ceux de Gluck, de Salieri, de Sacchini, étaient ainsi désignés. Ce n'est guère que depuis les derniè- res années du dernier siècle qu'on a renoncé li Ingcdieiu UvoiHt. (irîl-l7«l.) cette appellation, qui avait d'ailleurs alors sa raison d'être, certains autres ouvrages du ré- [lertoirc de l'Opéra étant d'un genre non seu- lement tempéré, mais parfois complètement bouffe. TRAGÉDIEN, TRAGÉDIENNE. — Ac- teur ou actrice qui joue particulièrement la tra- gédie. Parmi les plus grands tragédiens qu'ait produits la France, il faut citer Mondory, Sar- razin, Jlontfleury, Baron, Lekaiu, Brizard, DICTIOHHAIBI DD TBËATRI, Monvel, Talma, il"" Clairon, Dnnicsnil, Adrienne Lecouvreur, Raucourt, Georges, I)u- chesnois, etc. PIna près de noua on doit men- tionner les noms de Ligier, de Boauvallet , et surtout de Rachel , dont, il y a quarante ans, l'incomparable talent a eoulevé l'en thons iaeme et l'admiration non seulement de Paris et de la France, mais de l'Europe entière et même du Non veau -Mfinde. Aujourd'hui encore nous ptw- sédons, dans le genre de la tragédie, plusieurs artistes d'une incontestable valeur, entre autres 738 TRAGI-COMEDIE. — TKANSFOEMATION. M""'' Sarah Bernhardt et M. Mounet-Sully. L'Angleterre et l'Italie ont fonrni aussi nom- bre de tragédiens de premier ordre. Shakespeare a eu des interprètes merveilleux dans la per- sonne de Garrick, de Macklin, de Kean, de Kemble, de Macready, pour ne citer que les plus fameux. Quant aux tragédiens italiens, le public français a pu apprécier, dans ces vingt dernières années, deux des plus justement célè- bres, M"® Ristori et M. Rossi. TRAGI-COMÉDIE. — Conune son nom l'indique, la tragi-comédie était une composi- tion dramatique d'un genre mixte, en quelque sorte, écrite en vers, comme la tragédie, mais dont le dénouement n'était pas toujours funeste. « La tragédie, dit Chappuzeau, est une repré- sentation grave et sérieuse d'une action funeste, qui s'est passée entre des personnes que leur grande qualité ou leur grand mérite relèvent au-dessus des personnes communes, et le plus souvent c'est entre des princes et des rois. La tragi-comédie nous met devant les yeux de nobles avantures entre d'illustres personnes menacées de quelque grande infortune, qui se trouve suivie d'un heureux événement, jù La tragi-comédie prit naissance dès le seizième siècle, et fut en honneur jusque vers le milieu du dix-septième. Les premières pièces de ce genre qu'on trouve mentionnées dans le réper- toire de nos théâtres sont le Gouvert d huma- nité ^ de Dabundance (1544), VHamme justifié par la foi, de Baran (1554), les Enfants dans la fournaise, de La Croix (1561), Bradamanie^ de Robert Garnier (1582), Philandre, de Charles Xavières (1584), etEadegonde, de Du Souhait (1500). Parmi les auteurs de tragi-comédies nous trouvons Alexandre Hardy, Balthazar Baro, Mairet, Du Ryer, La Calprenède, Scar- ron, Gilbert, Scudéry, Quiuault, Boyer, Gué- rin de Bouscal, Tristan l'Hermite, Pichon, Benserade, Du Rocher, Montfleury, Maréchal , Bois-Robert, et enfin Pierre Corneille et Ro- trou. Après ces deux deniiera, la tragi-comédie disparaît complètement devant la tragédie pro- l)rcment dite. TRAINEES. — On appelle ainsi de petits appareils mobiles, destinés à éclairer, selon le besoin, telle ou telle partie de la décoration. Lorsque celle-ci est compliquée et accidentée, que plusieurs châssis peu élevés : terrains, pe- tites fermes de paysage, bandes d'eau, etc., oc- cupent la scène, ces divers objets, placés sur des plans différents, poiteraient ombre les uns sur les autres si on ne les éclairait d'une façon par- ticulière, en plaçant entre eux la lumière, pres- que à ras du plancher. On se sert pour c^la des traînées, petites traverses d'une longueur variable auxquelles on adapte un cylindre creux percé de tout petits trous par où le gaz s'échappe en flammes minces et longues comme celles qui servent, dans les jours de grandes fêtes, aux illuminations des édifices publics. On trouve parfois dans l'emploi de ce procédé la source de très grands effets, qui peuvent varier à l'infini. TRAITRES. — Vov. Troisièmes Rôles. TRANSFORMATION. — C'est le nom qu'on donne à certains changements de cos- tume instantanés qui s'effectuent en scène, sous l'œil même du spectateur, sans que celui-ci puisse comprendre la nature du procédé em- ployé à cet effet. Ce procédé, quoique ingé- nieux, est assez simple pourtant. L'acteur qui doit se transformer ainsi est revêtu d'un cos- tume qui, quelle qu'en soit la disposition, n'est formé que de deux pièces , une devant, une der- rière ; ces deux pièces sont réunies sur lui au moyen d'un fil formé d'une corde de boyau, qui» partant du pied et gagnant l'épaule par une série d'œillets,redescend ensuite le long des bras. L'ex- trémité supérieure de ce fil est arrêtée, au-dessous du cou, par un nœud ou une rosette que l'acteur défait lorsque le moment est venu, tandis que l'extrémité inférieure est terminée par un an- neau. Au moment où la transformation doit s'o- pérer, l'acteur vient se placera un endroit déter- miné avec précision et marqué à la craie, un petit trappillon s'ouvre derrière lui, une main pas- sant par ce trappillon saisit l'anneau auquel se relient les fils, et, quand la réplique arrive, l'acteur n'a qu'à dénouer le nœud qui retient par en haut le vêtement qui doit disparaître. Le machiniste placé sous le théâtre tire alors à lui l'anneau qu'il a saisi ; le vêtement disparaît instantanément par le trappillon, et l'acteur TRANSPOSER. — TRAPPE. apparaît sous h costuoie brillant que cachait celui BOUS lequel il s'était montré tout d'abord. TRANSPOSER. •— On appelle transposer le fait d'exécuter un morceau daus un ton dif- férent de celui dans lequel il est écrit. Dana les thcâtres de vaudeville ou d'opcrettc, l'or- chestre est BOUS ce rapport à la discrétion des clianteurs, et parfois la transposition est ius- tantauw. Si un chanteur est enroin!, en effet, ou niiil disposé, il fera dire au chef d'orchcsti-e, au cours du spectacle, de transjMser tel morceau d'un demi-ton ou d'un ton, pour faciliter sa voix. D'autres fois, c'est un artiste qui, repre- nant un râle créé par un autre, mais ayant la voix plus grave ou plus aigui', fcm transposer d'un ton, ou d'un ton et demi, parfois do deux tons, soit an-dessus, soit au-dessous, les mor- ceaux qu'il a à chanter. Comme ou ne saurait indéfiniment faire recopier ces divers nioi'ceaux dans des tons toujoure différents, l'orchestre est obligé de transposer toujours à vue, scion le caprice ou les nécessités de chaque chanteur. TRAPÈZE. — L'exercice du tntpèze est l'un des jeux favoris des gymnastes et des acrobates qui se montrent dans les cirques et dans les spectacles de curiosités. On sait ce qu'est le trapèze ; une machine de gymnase, suspendue en l'air, et formée de deux cordes verticaleBreliées,àleur extrémité inférieure, à mi morceau de bois arrondi qui donne prise à la main du gymnaste et qui doit être saisi par lui. C'est à l'aide de ce seul instrument que certains acrobates exécutent des exercices véri- tablement prodigieux. On a vu des femmes, et même des enfants, montrer dans cet exercice mie agilité, une souplesse et une adresse mer- veilleuses, doublées d'une grâce et d'une élé- gance que les hommes n'atteignent que bien rarement, l^e dessin qui accompagne cet article a justement été pris, surnature, au Cirque Fernaiido,d'apréB une jeune femme qui se dis- tinguait d'une façon toute particulière dans le jeu du trapèze. TRAPPE. — Les trappes sont les endroits du plancher de la scène par lesquels paraissent ou disparaissent instantanément, à la vue da spectateur, soit un personnage, soit un objet plus ou moins volumineux, soit parfois toute une machine décorative portant dix, vingt, trente personnes et plus. Le plancher d'un théâtre, essentiellement mobile, est divisé régulière- ment, à chacun de ses plans, en un certain nombre de trappes et trappillons (Voy, Plan- cher) ; mais comme il arrive souvent que, pour les besoins d'une pièce, on a besoin d'ouvertu- res beaucoup plus grandes que celles des trap- pes régulières, qui ne mesurent guère pins d'un mètre de largeur, on transforme le plancher à l'endroit voulu pour obtenir ces ouvertures, ces trappes d'une dimension exceptionnelle. Le plancher, en effet, doit se prêter et se prête à tout, et sa division sous ce rapport est essen- tiellement variable. Selon le besoin, les trappes sont de forme carrée, oblongue, quelquefois ronde, et l'on a dit arec raison que dans un théâtre bien ma* chiné leur nombre est parfois si grand que le plancher semble découpe a jour. Il va sans dite 740 TRAPPE ANGLAISE. — TRAVESTISSEMENT. que, malgré cela, celui-ci reste toujours par- faitement uni, que les trappes ne s'ouvrent que juste au moment nécessaire, et que, une fois opérée révolution pour laquelle s'est faite cette ouverture, elles se refeiinent aussitôt de la fa- çon la plus exacte et la plus parfaite. Voici d'ailleurs comment on procède : la trappe étant fermée par un coulisseau très solide qui se trouve au niveau du plancher, lorsque le mo- ment est venu où une apparition doit se pro- duire par le dessous du théîitre, le coulisseau glisse rapidement dans une rainure, laisse ou- verte la place qu'il occupait et livre ainsi pas- sage au personnage ou à l'objet qui doit appa- raître ; celui-ci est porté par un plateau de bois qui a la dimension exacte de la trappe et qui est lui-même supporté par un fort châssis mis en mouvement à l'aide d'un jeu de contre- poids ; lorsque le personnage s'est avancé sur la scène ou que l'objet a été enlevé, le plateau redescend vivement, et le coulisseau, reprenant sa place, vient de nouveau boucher la trappe. S'il s'agit, au contraire, d'une disparition, on n'a recours qu'à la seconde partie de l'opéra- tion : c'est-à-dire que la trappe a été préalable- ment bouchée par le plateau mobile, et que, le moment venu de faire disparaître le person- nage ou l'objet qui doit s'enfoncer sous terre, le plateau se baisse, la disparition s'opère, et le coulisseau revient occujxir sa place ordinaire. TRAPPE ANGLAISE. — Ceci est un sys- tème de trappes soit horizontales, soit vertica- les, c'est-à-dire pratiquées dans le sol ou dans un châssis de décora, et qui présente un carac- tère particulier. Ce genre de trappe a été ima- giné en Angleterre, et le succès en a été très grand à Paris quand on l'y a vu fonctionner. Il est ainsi décrit par J. Moynet : — «( Un solide bâti avec deux volets ou une porte à deux battants, voilà toute la machine; mais les détails méritent toute notre attention. Cha- cun des volets est divisé suivant sa largeur en un certain nombre de feuilles reliées ensemble par une toile collée sur la face postérieure ; sur cette toile viennent s'appliquer une série de lames d'acier très flexibles, dont Textrémité est fixée solidement sur le bâti ; les deux volets sont ainsi maintenus dans le plan du châssis; si un corps lourd arrivant avec rapidité, un homme qui court, par exemple, se précipite au milieu, les deux volets céderont facilement, puis ils reprendront rapidement leur place pri- mitive, aussitôt l'homme passé ; les lames d'a- cier, qui auront cédé en se courbant, se redres- seront immédiatement en ramenant les volets de la trappe dans leur position première. Si l'acteur a passé très vite, on ne verra pas l'ou- verture ; c'est ce qui a toujours lieu quand ce passage s'efiPectue au travers du sol, le poids de l'acteur précipitant sa chute. Telles sont les trappes anglaises. On peut obtenir avec leur secours de grands effets : mais la bonne vo- lonté et la prestesse des acteurs sont néces- saires. » TRAPPILLOXS. — Les trappillons sont des trappes très étroites , qui, au nombre de deux ou trois à chaque plan, peuvent s'ouvrir sur toute la largeur de la scène sans laisser de solution de continuité, de façon à livrer passage aux fennes de toutes dimensions, même à celles qui forment fond de décor, fer- mes qui sortent toujours des dessous. TRAVESTIS. — Voy. Rôles travestis. TRAVESTISSEMENT. — Le travestisse- ment est un changement de costume très rapide, mais qu'il ne faut pivs confondre avec la trans- fonnation. Tandis que celle-ci, qui n'est d'u- sage que dans les féeries et les pièces fantasti- ques, s'opère instantanément sous les yeux da pul)lic et par des moyens exceptionnels, le tra- vestissement , qui n'a rien de surnaturel , se fait I)ar des procédés ordinaires et en dehors de la vue du spectateur. Mais comme l'acteur ou l'actrice chargé d'un rôle à travestissements n'aurait pas le temps d'aller rejoindre sa loge pour revêtir un nouveau costume lorsqu'il lai faut , parfois dans le cours d'un seul acte , se montrer sous deux , ou trois , ou quatre aspects différents , on lui construit , dans une des cou- lisses, une sorte de loge provisoire, entourée d'un paravent, qui contient tous les vêtements et les objets dont il a besoin et dans laquelle il se déshabille et se rhabille rapidement, à l'abri des regards indiscrets. (Voy. Rôles a TIKOIRS.) rt.iv.HK XXXV. — Jud fi Il 1 '< U! 1 Ijij TRÉPIGNEMENTS. — TRIALS. 743 TRÉPIGNEMENTS. — Une des manifcs- tstiong caractéristiques de l'enthousiasme des spectateurs. Lorsque la satisfactioa de ceux-ci uc connaît plus de bornes, ils ne se contentent plus d'applandir avec les mains, ils applaudis- sent avec les pieds, afin de témoigner leur con- tentement d'une façon plus bruyante. Pour être sincère cependant, nous devons constater que les trépignements, de même que certains aboiements d'un caractère sauvage, sont uni- quement le fait d'une claque en délire, qui cherche à gagner honnêtement son argent. TRÉTEAUX. — On sait que les saltim- banques des foires ont, sur le devant de leur baraque, une sorte de plate-forme élevée sur des tréteaux et formant une espèce de scène extérieure sur laquelle viennent faire la parade œux (pli sont chaînés d'amorcer le public et d'attirer les badauds. C'est lii ce ipii fait dire de certaines pièces et de certains acteurs, qui pe font remarquer par un comique bas, vul- gaire et grossier, que ce sont des farces et des pitres dignes des tréteaux. TRIALS. — Emploi d'opéra-comique qui tient son nom de celui du premier artiste qui a été appelé à le remplir. Antoine Trial (frère de Jenn-Ckude Trial, qui fut directeur de l'Opéra) entra dans la troupe de la Comédie- Italienne en 17G4, à l'êpoijuc oii ce théâtre transformait son genre et commençait à s*a- . donner à la comédie IjTiquc. « Bon musicien, •44 TRICOTETS. — TRIPOT COMIQUE (le). dit Fêtis, acteur intelligent et plein de finesse, il sut faire oublier les défauts de sa voix grêle et nasillarde, et créa en France, aux applaudis- sements du public, remploi de chanteurs sans voix auquel il a donné son nom dans l'opéra- comique. » En réalité, les trials sont des té- nors comiques, dont les rôles sont plus impor- tants au point de vue du talent scénique que du chant proprement dit. C'est dans cet emploi qu'il faut classer ceux d'André dans V Épreuve villageoise, du Grand Cousin dans le Déserteur, de Bertrand dans les Rendez-vous bourgeois, de Dickson dans la Dame blanche, de Canta- relli dans le Pré aux Clercs, de Dandolo dans Zampa, d'Ali Bajou dans le Caïd, etc., etc. Depuis la disparition de l'excellent 8ainte-Foy, qui avait succédé lui-même à un artiste fort distingué, Féréol, l'emploi des trials n'a pas encore retrouvé, à l'Opéra-Comique, un titu- laire digne de lui. TRICOTETS. — V07. Airs a danser. TRILOGIE. — On appelait ainsi, chez les (irecs, une série de trois tragédies où figuraient les mêmes personnages principaux, qui rappe- laient les exploits et les actions d'un seul héros, de façon que l'ensemble de ces trois pièces for- mât comme un seul grand drame composé de trois actions successives et juxtaposées, représentant différentes phases de la vie de ce héros. C'est à Eschyle, dit-on, qu'on doit l'invention de ce pwme dramatique; tout au moins en a-t-il donné un exemple admirable dans son Oi'eslie, *]ui comprend les tragédies intitulées Agamem- von, les Choé})liores et tes Euménides. Lorsque la trilo«;io était suivie d'un drame satyrique relatif au même sujet, renscmble des (juatre pièces constituait une tétralogie (Voy. ce mot). Victor Hugo a employé pour un de ses dra- mes, les Burgraves, la qualification de trilogie, en en expliquant ainsi l'emploi dans sa pré- face : — <( La division et la forme du drame une fois arrêtées, l'auteur résolut d'écrire sur le frontispice de l'œuvre, quand elle serait ter- minée, le mot trilogie. Ici, comme ailleui*s, tri- logie signifie seulement et essentiellement poème en trois chants, ou drame en trois ac- tes. Seulement, en remployant, Fauteur vou- lait réveiller un grand souvenir, glorifier au- tant qu'il était en lui, par ce tacite honmiage, le vieux poète de VOrestie, qui, méconnu de ses contemporains, disait avec une tristesse fîère : Je consacre mes œuvres au temps; et aussi peutr être indiquer au public, par ce rapprochement bien redoutable d'ailleurs, que ce que le grand Eschyle avait fait pour les titans, il osait, lui, poète malheureusement trop au-dessous decette magnifique tâche, essayer de le faire pour les burgraves. 1» La série des trois pièces justement célèbres de Beaumarchais : le Barbier de Sévit le, le 3fariage de Figaro, ta Mère coupable, peut être considérée comme une trilogie. Enfin, il faut citer aussi la grande trilogie de Schiller, WaU lenstein, composée de trois grands drames et qui a rendu son nom si célèbre. TRIO. — Mot italien qui a passé dans la langue française. Dans le drame lyrique, dans l'opéra-comique ou dans l'oratorio, le trio est un morceau à trois voix soutenues par Tor- chestre. — Dans un concert instrumental, le trio est une composition à trois instruments conçue dans la forme du (juatuor et du quin- tette. TRIPOT COMIQUE (Le). — Ceci est un terme de dédain que certains critiques du dix- huitième siècle, entre autres le trop fameux ba- ron de Grimm et les rédacteurs des Mémoires secrets, appli^juaient, par manière de mépris, à la réunion des acteurs de la Comédie-Fran- çaise. Ces messieurs, qui n'étaient après tout que ce qu'on appellerait aujourd'hui de sim- ples reporters, le prenaient de haut avec des artistes de la taille des Lekain, des Pré ville, des Monvel, des Dazincourt, des Brizard, des Fleury, des Contât, des Raucourt et des La Chassaigne. Pour eux, la réunion 'de tous ces artistes incomparables ne formait autre chose qu' (( un tripot comique. » On peut leur par- donner : le souvenir de ces comédiens illustres reste la gloire du pays qui les a vus naître, tan- dis que la littérature du baron de Grimm et consorts demeure un recueil de cancans artisti- ques sans autre valeur que celle des quelques reuseijj^nements (^u'on y peut puiser. TRITAOONISTE. — TRIVELIN. 745 TRITAOONISTE. — Les Grecs qualifiaient ainsi l'acteur qui se Toyait chaîné «l'un rôle de troisièiae ordre dans l'exécution d'une œuiTe théâtrale. (Voy. PaoTAfioxiSTE et Deutéra- OONISTE.) TRIVELIN. — L'un des types les plus cé- lèbres de l'ancienne comédie italienne, ae rap- prochant tout à la fois d'Ârlcquin, de Scapin, de Brighella, de Mezzetin, et comme eux tons représentant un l'alet astucieux, intrigant, spi- l'itucl et rusé. Ce caractère fut introduit en France par uu acteur de grand talent, Donie- uico Locatclli, qui vînt à Paria voraliUô et y mourut en Iti'l.ct dontlos fri-rea Parfait par- lent eu ces termes (Hwloire de Vancien théâtre ilaîien) : — « Comme on ignore totalement la vie privée de cet acteur, il faut se contenter de savoir par la tradition que Locatclli a été ex- cellent dans le genre qu'il avoit adopté au théâtre, que ce genre étoit celui d'un intri- 746 TROIS (LES) REPRÉSENTATIONS D'AUTEUR. — TROUBADOURS. gant spirituel , tantôt valet et tantôt aventu- rier, qu'il jouoit sous l'habit et le masque d'Ar- lequin, mais qu'il ne portoit point de batte, comme ce dernier. » TROIS ( Les ) REPRÉSENTATIONS D'AUTEUR. — Quelque profonde qu'ait été la chute d'une pièce nouvelle, quelque fâcheuse que puisse être l'impression produite par elle sur les spectateurs, l'auteur a toujours le droit d'exiger qu'on en donne au moins trois représen- tations. Le public, en effet, peut être mal dis- posé à une première audition, une cabale a pu être montée contre l'ouvrage, et, bien que le fait se soit produit rarement, on a vu des exemples d'une pièce se relevant, d'une façon éclatante, de l'échec qu'elle avait subi le premier soir. C'est pourquoi, d'après un usage depuis longtemps établi, tout ouvrage, même tombé, doit être joué trois fois au moins, à moins que l'auteur lui-même ne juge à propos de le retirer. TROISIÈMES ROLES. — Classe de rôles masculins qui forment un emploi difficile, sou- vent ingrat et qui réclame beaucoup d'habi- leté de la part du comédien, celui-ci devant sauver le côté odieux du pei*sounage qu'il est appelé à représenter, et, tout en en accentuant fortement le caractère général, glisser plutôt qu'appuyer sur certains détails qui parfois fe- raient cabrer le spectateur. Ces rôles, en effet, sont caractérisés par la seconde appellation de traîtres j qu'on leur donne souvent, et, dans le drame et dans le mélodrame , où on les nomme aussi tyrans, ils acquièrent une grande impor- tance. L'ancien répertoire classique n'a guère connu ce genre de rôles, bien qu'on y classe parfois celui du comte dans la Fausse Agnes, de Des- touches ; mais il me semble que le premier type du véritable troisième rôle est celui de Bégearss dans la Mère cmipaUe. Dans le répertoire mo- derne, je crois qu'on peut faire rentrer dans cet emploi don Sallust^ de Riiy Blas et le comte de Diane de Lys^ de même que Saltabadil du Roi s'' amuse. Mais au beau temps du drame et du mélodrame, il n'était pas une pièce de ce genre qui ne contînt un troisième rôle ou un traître caractérisé. Au commencement de ce siècle, deux artistes notamment, Stockleit et Defrêne, se rendirent fameux aux boulevards dans cet emploi, et firent la fortune des terri- fiants chefs-d'œuvi'e de Hapdé, de Caigniez et de Guilbei-t de Pixérécourt. Plus près de nous, c'est-à-dire il y a une quarantaine d'années, trois excellents comédiens, Surville à la Gaîté, Raucourt à la Porte-Saint-Martin, Chilly à l'Ambigu, s'étaient fait une spécialité de ces rôles véritablement fort difficiles, qui leur va- laient les injures des spectateurs naïvement passionnés du parterre et du paradis ; ceux-ci ne manquaient jamais de les traiter à haute voix de lâche! de canaille! et de misérable! lorsqu'ils les voyaient sur le point de faire un mauvais coup; et quand, à la fin de la pièce, la morale longtemps outragée retrouvait enfin tout son prestige par le châtiment inattendu du traître , la salle entière poussait un cri de satis- faction, et quelques-uns s'écriaient, eu le voyant tomber sous le poignard vengeur : Ah! le gredin! ne le manquez pas! c^esi bien fait! Tant il est vrai qu'au théâtre pour le moins, le crime doit toujours être puni et la vertu récompensée. TROTTOIR (Le Grand). — D'où vient cette locution bizarre, etcomment peut-elle avoir pris naissance ? J'avoue que je l'ignore alDso- lument. Tout ce que je puis dire, c'est que l'on désignait ainsi naguère, entre comédiens, tout le haut répertoire classique, tragique et comi- que, cette collection de chefs-d'œuvre qui font la gloire de la France et qui pendant si long- temps ont été l'apanage exclusif de la Comédie- Française. Le grand trottoir comprenait les œuvres de Corneille, de Molière, de Racine, de Regnard et de leurs successeurs. TROU DU SOUFFLEUR. — Vov. Souf- FLEUR (Trou du). ■ TROUBADOURS, TROUVÈRES.— Trou- badours et trouvères ont joué le même rôle en France, et dans un livre du genre de celui -c;i il est difficile de les séparer. Les uns et les au- tres doivent être considérés comme les créa- teurs de la poésie française, avec cette diffé- rence que les troubadours, fils du midi, écri- TROUPE. /4 vaient en langue (i'(?c, tandis que les trouvères, enfants du nord, se servaient de la langue à'oiL Leurs noms ont d'ailleurs la même origine, et viennent pour les premiers du languedocien trohar^ et pour les seconds du français trover, trouver, qui ont la même signification. Dans ses Recherches sur la Frame, Estienne Pas- quier dit que « les poètes provençaux étoient appelés troubadoura à cause des inventions qu'ils trouvoient. » Nous n'avons à nous occuper ici que som- mairement des troubadours et des trouvères, et seulement en raison de leura relations avec les jongleurs et ménestrels, par lesquels ils se faisaient suivre parfois, afin de leur faire exécu- ter et réciter ou chanter les poésies dont ils étaient les auteurs. La différence entre les uns et les autres était nettement établie, et un vieux poète la caractérisait en ces termes : Cil chante bien , c'est un Jongleur; eu dit beaux mots, c'est un trouveur. C'est au moyen âge, à partir du onzième siècle, que commença à prendre naissance l'art des troubadours et des trouvères. Leur histoire appartient à celle de notre littérature et de no- tre poésie ; nous n'en retiendrons que ce qui a trait au sujet qui nous occupe, au côté specta- cle^ qui leur était nécessaire pour se faire con- naître et répandre leurs œuvres. « L'art du troubadour, au quatorzième siècle, a dit Kast- ner, devint, sous l'influence des lois académi- ques de l'institution des Jeux floraux, la gaie scieîice ou le gai savoir, attendu qu'on mettait tous ses soins à trouver, c'est-à-dire à imaginer des choses jolies, agréables, récréatives et amoureuses. Ce fut vers le onzième siècle que les trouvères et les troubadours se répandirent dans les châteaux et les principales cours de l'Europe, dont ils firent les délices. Ils pre- naient part surtout à l'exécution des specta- cles accompagnés de danses et de musique qui avaient lieu entre les divers services d'un re- pas, et que, pour cette raison, on appelait en- tremets. Ces espèces d'intermèdes dramatiques étaient surtout en usage dans les grandes fê- tes nonunées tifiel ou cours plénières, qu'on célébrait à l'occasion des mariages des souve- rains ou de leurs enfants, et ils n'étaient même pas bannis de certaines solennités consacrées par la religion ou par la coutume locale. Les trouvères et les troubadours se rendaient de tous côtés à ces fêtes. Ils voyageaient isolément, chacun pour son compte, quand, doués d'une égale habileté dans plusieurs parties de leur art, ils pouvaient se passer de leurs confrères. Quelquefois ils formaient de petites associa- tions dont chaque membre exerçait une indus- trie spéciale. Il arrivait ainsi qu'un troubadour menait avec lui ses ménestrels et ses jongleurs, à peu près comme on a vu dans la suite le maî- tre de danse se faire accompagner par le méné- trier qui joue de la flûte ou racle du violon. >.' Ceci suffit pour faire apprécier la distance qui séparait les troubadours et les trouvères des jongleurs et des ménestrels. TROUPE. — En France, on donne ce nom de troupe à toute compagnie de comédiens réu- nie soit à leurs risques et périls, c'est-à-dire en société (ce qui aujourd'hui est absolument exceptionnel), soit sous la conduite et la res- ponsabilité d'un directeur entrepreneur, pour l'exploitation d'un ou de plusieurs théâti-es. Ce nom de troupe est ainsi appliqué, aussi bien à celle de la Comédie- Française ou de l'Opéra, qu'à celle du théâtre de la plus infime ville de province. Pour ce qui concerne précisément la pro- vince, il y a des troupes sédentaires^ c'est-à- dire celles qui, desservant le théâtre d'une grande ville, telle que Lyon, Bordeaux, Le Havre, Marseille, etc., ne quittent point cette ville et ne font point de voyage, et les troupes dites ambulantes^ parce qu'elles exploitent plu- sieurs villes dans le cours d'une seule saison et sont presque toujours en voyage. C'est ce qu'on appelait, au dix-septième siècle, troupes de cam- pagne. On distingue aussi les troupes de pro- vince d'autre façon, et, selon le genre qu'elles représentent, on désigne les unes sous le nom de troupes d! opéra ^ parce qu'elles ne jouent que l'opéra et l'opéra-comique, et les autres sous le nom de troupes de comédie^ parce qu'elles jouent la comédie, le vaudeville et le drame. A Paris ou en province, on appelle tète de troupe la réimion des premiers emplois , des ar- tistes les plus importants, de ceux qui sont 748 TROUS DU RIDEAU. -- TRUC. aimés du public et qai exercent but Ini uDe m&uence incontestable ; par contre, on englobe dédaigueiisement sons la désignation assez étrange de Iroupe defer-tJane, troupe ih carton, l'ensemble des emplois secondaires, des comé- diens de lœu de valeur ou sans valeur apprécia- ble, avec lesquels pourtant il faut bien remplir les cadres. TROUS DU RIDEAU. — Ce sont deux petite trous qui sont pratiques à droite et à gauche du rideau d'à vaut -scène, à hauteur d'homme, de façon que, lorsque ce rideau est baissé, on puisse voir de la scène, en appliquant l'œil il l'an de ces trous, ce qui se passe dans la suite. TROUVÈRES. " Voy. Thoubadouhs. TRUC. — Il est assez malaisé de définir, même au point de vue général, ce que c'est i|u'nn truc. En fait, le truc est une chose in- saisissable, et le mot qui représente cette chose semble seulement donner l'idée d'un procédé mécanique par lef[uel on o[)ère, au théâtre, l'ap- parition, la disparition, la modification ou la transfoimation d'nn individu ou d'nn objet quelconque, sans que le spectateur, surpris par la rapidité de l'opération.puisse se rendre compte des moyens employés pour l'obtenir. Très varié et presque infini dans ses applica- tions, le truc est simple ou compliqué, bon en- font ou nisé, pres(]ue toujours nij^stériens et inexplicable pour l'otil le plus curieux et le plus attentif. Il s'applique d'ailleuiT, comme je l'ai dit. soit ides objets matériels, soit ii des êtres anirac^. soit à des décors ou fragments de dwors. Dans Ux J'ihiles du Ditble, — il en faut tonjoQi-s revenir ii ce modèle des féeries, — fm trouvait toute une étonnante série de trucs. tous plus curieux les uns que les anti^es. Trac tu tmnsfonniition de Babylas en dindon ; truc l'allougemeut du uu!! de Magloiiv, i]ui s'étirait d'un pied ; tnic la descente du Iwk'on d'Is!il)etle, qui la rappi-ocliiiit de sou amant; truc la mul- tiplication indéfinie des latiternes ; truc la four- che qui, ]x;rçaut le ventre de Magtoire, lui res- sortait par le dos ; trac les chaises ([Ui dis]»!!- raissaient au moment où l'on voulait e^asseoù pour reparaître d'un autre cAté ; truc les dea: boutiques de l'apothicaire et du marchand d vin, qui prenaient la place l'nne de l'autre truc la maison qui se retournait, et qui parais sait reposer sur son toit ; truc l'enflure phé noméoale deSeringuinoset, un peu plue tard le raccommodage du personnage dont on rap portait les membres épars et qui, à mesnr qu'on rassemblait cens-ci, s'animait, reprennii vieetsemettaitàmarcherdevantlepablic. Ton cela, et bien d'autres choses encore, c'est li suc, c'est le fond même de toute féerie, qui comme l'indique cette qualification, repose en: un élément fantastique et merveilleux qo'ï faut faire en sorte de rendre réel xax yeux di public. Il fut un temps où il existait à Paris ce qQ''oi pourrait appeler des fabricants de trucs, c'est à-dire des gens qui passaient une partie d* leur tcm]is k inventer, à imaginer des tmci nouveaux, ingénieux et inconnus, à en con» traire les maquettes, et qui s'en allaient ensuit) chez an producteur, j'allais dire chez un an- tenr en renom, pour lui soumettre et faire fonc- tionner devant lui leurs petits chefs-d'œnvre L'écrivain (?) faisait son choix dans tout cela achetait la propriété de quelques-unes de cei inventions vi'aimeut curieuses, et fabriquait lui-même ensuite une féerie dans laquelle i faisait entrer ces trucs, iiu'on n'avait plus qu'i construire en grand d'après les maquettes. Je ne Siiiirais mieux terminer cet ai'tîch qu'en reproduisant, d'après J. Moynet, l'expli' cation d'un truc très ingénieux qui fit ui grand effet, il y a une trentaine d'années, dam uu joli opéni de Grisar, tes Amours du Biablt repivscnté an Théâtre- Lyrique : L'b6roÏDC de k pièce {larnissait dans un palan quia d'un as]>ect très Icf^'er, construil de façon i ûtor toute iiii'e de doiibb fond, et porté sur lei i-paulcs de ijuatre esclaves; tout ù coup l'nctrîci fermait deux rideaux de îiuic; Ic^ rideaux se rou vraient ]iri;sur leur Bénir de décorationB. Ils joiioieiit depuis une Iieure jusqu'à deux , EUr-Iiiut imiir lee t-coliera , et le jeu recommençoit le soir ; le jirix du sjjcctHclc étoit de deux boIe etx. denier» par tOte. Les comédiens de l'HOtel de Boui^ogne s'é- tant plaints aii cardinal de Richelieu qne trois ba- teleu^^ entreprcnoieut sot leun droits. S. E. vou- lut jii;,'ei' de ce différend pas eos yeux. Ils furent mauduM au Palais- Royal, où ila reçureut ordre de jouer diin^ une iilcjvo. Ih se Hurpasséient dans la ANS. 751 Bcène de Gros-Guillaume en femme, fondante en Inrmes pour appaiser la colère de Turlopin son mari, qui, le sabre h la hmud, inenaçoit k chsque ïnstoot de lui couper la t^te sans vouloir l'écouter ; Bcêno d'une heure entière, dans laquelle cette femme, tantôt debout , tantOt à genoux , lui disoit mille clioEes toucliantes, et tentoit tous les moyens de l'attendrir. Au contraire le mari rcdouhluit ses menaces. — « Vous êtes une maB(]ue, lui disoît-il, je n'ai point de eomjife iï vous rendre, il faut que je vou- tue. — Eh ! mon cher mari , veprit-clle , je ou. n'u e par cette soupe nu.i choux que je 0 h e manger, et que vous frouvfites ti bonn A mot», le mari «e rond, et le sabre lui ba des mains : — u Ah ! la carogne , dit- 1 n a pris par mon foible, la graisse m'en Ëge e e s le creur, » etc. C p e, tel qu'on peut se le figurer, plut au cardinal. Il lit venir les comédiens, et leur repro- chant 'ju'on sortoit toujours triste de la représenta- tion de leurs pièces, il leur ordonna de s'associer ces trois acteurs comiques. Aujounriiiii ûh doiinti k nom de lurhipina- des à certaines charges un peu forcL-ea, à cer- tains kzzia d'un bas comique, auxquels bc 1i- Yxeai des acteurs plus soucieuY d'exciter le rire d'une façon inêuie grossière que de faire preuve de bon goût, et qui rappellent le joa burlesque de Turlupin et de ses compagnons. TYRANS. — Variété du genre Iroisiémea rôles (Voy, ce mot). I UNITÉS (Les Trois). — Unité de temps, anîté de lieu, unité d'action, telles étaient, au gré des ancienB, les règles fondaraentales du théâtre , et Arîstote a disserté sur ce sujet tout il son aise, aussi bien qu'Horace. Boîlcan lui- même n'a pas hésité à construire là-dessus nu de ces brefs aphoriames dont il avait le secret : Qn'en un lieu, qu'en un jour, un seul fait Bccom]ili Tienoe jusqu'à la fin le théâtre rempli. Bien tjue cette théorie classique ait été ob- servée par les pères de notre tliwitre, on doit remarquer que Coniellle eut qHcl(]Ue i>i:inc à s'y soumettre, car un de ses contemporains fait observer à propos de sa troisiC'me pièce, la Veuve, qu' « elle n'est yms plus réi;ulière que ses deux premières pour l'unité de lieu, » et (ju' « à l'égard du temps elle renferme un es- poce de cinq jours, cet illustre auteur no pou- rant encore se soumettre à la règle rigoureuse des vingt-quatre heur&i. ► C'est à Marret, dit- on, et à sa Sophoniabe (1 62'J) qu'on doit la pre- mière observation de cette dernière : « Cette Sophonùbe de Mairct, dit un chroniqueur, fut la première pièce où la règle des vingt-quatre heures fut oliservéo ; et comme il falloit, dit- on, faire agréer ce changement aux comédiens, qui impoaoient alors la loi aux auteurs, le comte de Fiesque se chargea do leur eu parler ; il TOmmuniqua leur consentement fi îlairet qui fitsa tragédie renfermée dans cet espace de tcmE. > Un écrivain théâtral imprimait ceci en lS-24 Notre pottique théAtralc est tant Boit pen bé- gueule; elle prescrit tyran nique ment troU règleR, que BOD intolérauce nous défend de violer, bous les peines portées contre les barbares et les fauteurs ilu marnais gotil. Unité de temps, nnité de lieu, imité d'actiim sont les conditions du beau, condi- tioDS sine qiiâ non au l'amasse d'Âristote. Les partisans exclusifs du genre classique raillent avec supériorité assez plaisante ceux de nos auteurs dramatiques qui , pour élargir les voies où mnrcbenl la Melporaènc et la Thalie françaises, cbercheut il iffranchîr des limites rigotreuses dans lesquelles les unités les ont circonscrita. Cette prétention dea classiques de notre [wiys faitaourire les Allcm-inds, les Italiens, les Espagnols, les Portugais et les Anglais, qui, cédant moins aux règles géoniétri- ques du théâtre des anciens qu'oui inspirations de laturo, composent des ouvrages que chez nous api-elle moin(n«Ki, parce qu'ils sont hors de habitudes. Shakespeare, Scbiller, Go'tbe. Ad- disoD, Ottway, Calderon, Moratio et Lope de Vega sont condamnes par notre orgueil national, qui veut, quand nous sommes les seuls à genoux devant BosMi, Le Batleux et l'abbé d'Aubignae, que nous ayons seuls du bon goût et de la raison. Au mimient où ces lignes étaient écrites, l'école romantique préparait sourdement ses batteries et s'apprêtait à secouer, avec la vi- gueur que l'on sait, la théorie vermoulue «lef trois unitw antiques, qui ne furent pas de foret à résister à cet assaut et passèrent bicutùt è l'état de souvenir. UOMO {Piinif). — a Premier homme. . On appelait ainsi en Italie, an dix-huitièmt siècle et ditns les premières années de celui-ci l'emploi tenu dans les théâtres lyriques p«r le BOpranistes (Voy. ce mot), emploi qui était ei effet le premier emploi masculin, comme celu de prima donna était le premier emploi fémi niii. La coutume barbare qui a\Tiit donne liei k cet emploi n'cvistant plus, fort heureuse' mont, le primo uomo a fait place au prcmiei té'uor. UTILITÉS. — Les rflles rentrant dans li catégorie des utilités formeraient plutôt nui sorte de fonction dramatique qu'ils ne consti UTILITÉS. '53 tuent un emploi véritable. Un emploi, en effet, comprend un ensemble de rôles caractéristiques, tandis que les utilités se composent de rôles de tout genre et de peu d'importance, presque accessoires, qui peuvent être joués par le pre- mier venu ayant seulement une certaine con- naissance de la scène. Quoi qu'il en soit, rem- ploi des utilités, qui revient à un acteur mâle, n'est connu qu'en province ; les troupes lyri- ques ne le connaissent point, ou plutôt ici il prend le nom de cori/phèes. DICTIONNAIRE DU THEATRE. 48 i V VALETS. — L'emploi des valets , qui for- mait une grande partie de celui qu'on appelle aujourd'hui les premiers comiques, comprenait, dans l'ancien répertoire, tous les rôles de la grande livrée. C'est dans les valets que se sont rendus célèbres les Préville, les Dazincourt, les Dugazon, les Monrose et tant d'autres brillants acteurs. (Voy. Livrée.) VAllIATIOX. — En matière de danse, va- riation est synonyme d'écJw (Voy. ce mot). C'est un pas dansé par une danseuse ou un danseur seul. VASES DE THEATRE. — On sait quelles étaient la vastitude et les immenses proportions des théâtres des Grecs. Pour que la voix des acteurs pût être entendue distinctement dans toutes les parties de semblables édifices, on dut employer des moyens particuliers, et Vitruve nous signale spécialement l'usage de certains vases d'airain ou de poterie qu'il appelle ef//m, et qui, placés en des endroits cachés sous les degrés de l'amphithéâtre , servaient à la réper- cussion de la voix. Voici les détails qu'on trouve à ce sujet dans V Encyclopédie : Lorsque les Grecs eurent bAti des théâtres soli- des et d'une vaste étendue , ils s'apperçurent que la voix de leurs acteurs ne pouvoit plus porter jus- qu'au bout ; ils résolurent d'y suppléer par quelque moyen qui en pût augmenter la force et en rendre les articulations plus distinctes. Pour cela, ils s'a- visèrent de placer dans de petites chambres, pra- tiquées sous les degrés du théâtre , des vases d'ai- rain de tous les tons de la voix humaine, et même de toute l'étendue de leurs instrumens, afin que tous les sons qui partoient de la scène pussent ébranler quelqu'un de ces vases , suivant le rapport qui étoit entr'eux et profiter de leur consonance pour frapper roreille d'une manière plus forte et plus distincte. Ces vasea étoîent faits dans des proportions géo- métriques , et leurs dimensions dévoient être telle- ment compassées, qu'ils sonnassent à la quarte , à la quinte les uns des autres , et formassent ainsi tous les autres accords jusqu'à la double octave. Il faut entendre par leurs dimensions leur hauteur, leur largeur, leurs différens degrés et la courbnre de leur évasement. On les arrangeoit ensuite sous les gradins du théâtre dans des proportions har- moniques, et il falloit qu'ils fussent placés dans leurs chambres de manière qu'ils ne touchassent point aux murailles , et qu'ils eussent tout-au-tour, et par dessus , une espèce de vuide. Vitruve ne nous apprend point quelle figure ils avoient ; mais comme il ajoute qu'ils étoîent ren> versés et soutenus du côté de la scène par des coins de demi-pié de haut, il y a bien de l'apparence qu'ils avoient à peu près la forme d'une cloche ou d'un timbre de pendule , car c'est la plus propre au retentissement dont il s'agit. Pour les chambres où ils étoient placés , il y en avoit treize sous chaque étage de degrés , et coname elles dévoient être disposées de manière qu'il y eût entre elles douze espaces égaux , il falloit qu'elles fussent situées dans le milieu de ces étages, et non pas au bas comme le marque M. Perrault , à cause des portes et des eôcaliers qui se trouvoient au-dessous. Aussi Vitruve dit expressément que si le théâtre n'a qu'un étage de degrés , ces chambres doivent être placées dans le milieu de sa hauteur, et qu'il faut les disposer de même dans les autres étages , si le théâtre en a plusieurs ; car il y en avoit jusqu'à trois rangs dans les grands théâtres, dont l'un étoit pour le genre enharmonique, l'autre pour le cromatique , et le troisième pour le diatoni- que , et dont les vases étoîent par conséquent ar- rangés suivant les différentes proportions de ces trois genres de musique. Toutes ces chambres, au reste, dévoient avoir par en bas des ouvertures longues de deux pies et larges d'un demi-pié, pour donner passage à la voix, et il falloit que leure voûtes eussent à peu VAUDEVILLE. — VAUDEVILLISTE. 755 près la mf*rae courbure que les vases, pour n^en point empêcher le retentissement. Par ce moyen , dit Vitruve , la voix s'étendimt du centre à la cir- conférence , ira frapper dans la cavité de ces vases , et les ébranlant suivant leur consonance , en sera non seulement rendue plus forte et ])lu8 claire, mais encore plus douce et plus agréable. VAUDEVILLE. — En même temps qu'il s'altérait dans sa forme, ce mot voyait modifier profondément sa signification première. Le vaudeville, d'abord simple chanson satirique, s'appelait primitivement vau de Vire, du lieu de sa naissance, et c'est par corruption qu'on en a fait vaudeville. « Vers 1520, dit Georges Kastner, dans le vau de Vire, en basse Nor- mandie, un brave ouvrier foulon , nommé Oli- vier Basselin, impatient du joug de l'étranger, composa des chants satiriques contre les An- glais qui voulaient envahir le royaume. Ces chansons, qui respiraient un ardent patriotisme, coururent le val ou vau de Vire, c'est-à-dire la vallée de Vire dans le Bocage nonnand, et se répandirent sur toute l'étendue du territoire français, en conservant le nom qu'elles tenaient du lieu de leur origine. Au lx)ut d'un certain temps, le souvenir de cette source étymologique se perdit, et le nom primitif fut changé en ce- lui de vaudeville, non sans avoir subi des mo- difications qui ont souvent égaré le linguiste. » Il n'est pas un lettré qui ne connaisse les jo- lis vaux-de-vire d'Olivier Basselin et ceux de Jean le Houx, dont on a fait de nombreux re- cueils , et qui donnèrent naissance à la petite chanson, au vaudeville populaire, que Boileau rappelait ainsi eu parlant de la satire, mère de l'un et de l'autre : D'un trait de ce pme en bons mots si. fertile, Le Français, né maUn, forma le vaudevlUe, Agréable indiscret qui , condoit par le chant , Passe de bouche en bouche et s'accroît en marchant : La liberté française en ses vers se déploie ; Cet enfant du plaisir veut naître dans la joie. Satirique avant tout, le vaudeville était sou- vent politique, et plus d'une mazarinade lui emprunta sa forme svelte et légère. Il affolait la ville et déridait la cour, puis bientôt il s'é- lança sur la scène, où il se trouvait dans son véritable élément. Toutes les pièces de l'ancien Opéra-Comique de la Foire , toutes ses fantai- sies, toutes ses parodies étaient cousues de vau- devilles, petites chansons composées d'un ou de plusieurs couplets généralement écrits sur des airs connus. Je dis « généralement, » et non pas toujours, comme l'ont prétendu à tort certains chroniqueurs ; car il arrivait souvent aussi qu'on écrivait pour les vaudevilles de la musique nouvelle, et, au dix-huitième siècle, certains musiciens se sont fait un nom dans ce genre de compositions, entre autres Mouret, Quinault le comédien, Gilliers et Blavet. Un peu plus tard, les pièces de ce genre, qu'on cjualifiait d'abord d' « opéras-comiques, » devinrent des « pièces en vaudevilles, y> puis des « comédies mêlées de vaudevilles, » puis des a comédies-vaudevilles, » et enfin, pour abréger, des « vaudevilles. » C'est ainsi que le contenant finit par se substituer au con- tenu, et qu'on en vint à donner le nom de vaudeville à des pièces qui contenaient des vaudevilles, c'est-à-dire des couplets. Ce genre de pièces, qui, sous des qualifications di- verses, a charmé le public français pendant cent cinquante ans, est dédaigné et délaissé depuis un quart de siècle. Mais rien ne dit que nous ne le reverrons pas, et j'inclinerais même à croire que sa résurrection n'est pas aussi éloignée qu'on le pourrait penser. VAUDEVILLISTE. — C'est le nom qu'on donnait, alore que le vaudeville était floris- sant, aux écrivains dramatiques qui s'adon- naient particulièrement à cette forme théâ- trale. Parmi les vaudevillistes fameux, il faut citer d'abord Scribe, le plus fécond et le plus ingénieux d'entre tous, puis Bayard, Méles- ville, Cogniard frères, Rougemont, Désaugiers, Brazier, Ancelot, Carmouche, Paul Duport, Dupeuty, Lambert Thiboust, Clair^'ille, Lau- rencin, Piis, Barré, Radet, Desfontaines, Henri Dupin, Mazères, Duvert, Lauzanne, Rochefort, Dumersan, F. de Courcy, Théaulon, Vander- burg, Ferdinand Langlé, Armand Dartois, Bouilly, etc. On ne saurait oublier non plus les anciens et gais vaudevillistes du théâtre de la Foire au dix- huitième siècle, qui n'étaient autres que Piron, Collé, Gallet, Lesage, Fuzelier, d'Orneval, Ta- I 756 VEDETTE. — VERS. connet, Vadé, Laffichard, Carolet, Gueullette, Favart, Autreau, Pannard, Fagan , Laujon , et tant d'autres qu'il serait impossible de nommer. VEDETTE. — La vedette est un produit moderae de la vanité des comédiens, et ne date guère de plus de trente ou quarante ans. Elle consiste en ceci que le nom de l'acteur qui en est l'objet est placé en vedette sur l'affiche, en tête de celle-ci, et avant même le titre de l'ou- vrage représenté, de façon qu'il frappe immé- diatement l'œil du lecteur le plus inattentif. Cette particularité est devenue de la part de certains comédiens une des conditions de leur engagement, et elle est même débattue et exigée par eux avec toutes sortes de détails du ridicule le plus achevé. C'est ainsi que quelques-uns veulent non seulement être en vedette, mais y être avant tous ceux de leurs camarades qui doivent partager cet avantage ; que d'autres veulent non seulement être les premiers en ve- dette , mais prétendent que leur nom soit ins- crit sur une ligne séparée, à part et au-dessus de ceux de leurs confrères ; que d'autres enfin veulent que leur nom soit imprimé en caractères différents, plus gros, et vont jusqu'à stipuler rigoureusement et sérieusement, sur leurs trai- tés, la hauteur de ces caractères et la place spé- ciale que leur nom doit occuper sur l'affiche. Il faut bien avouer que chez le comédien qui s'occupe ainsi de tels détails, il y a au moins autant du charlatan que de l'artiste. VENTRILOQUE. — On appelle ainsi cer- tains individus doues de la faculté de changer à volonté le son de leurs voix, et qui, simulant une conversation entre deux personnages, par l'emploi alternatif de leur voix naturelle et de cette voix factice produisent la plus singulière illusion. Un nommé Valentin, qu'on avait sur- nommé V homme à la poupée, obtenait de grands succès à Paris, il y a une quarantaine d'années, en jouant des scènes avec une poupée qu'il tenait sur ses bras comme un petit enfant et avec qui il avait les conversations les plus bur- lesques. Ce nom de ventriloque vient de ce que la voix en question semble, lorsqu'on est auprès de celui qui en fait usage , sortir du ventre ou de l'estomac, et même s'articuler dans ces cavi- tés. En réalité, l'art du ventriloque consiste à savoir modifier sa voix naturelle, de façon à en obtenir des variations dans le ton et dans les inflexions. VERS. — Dans les commeemncents de notre théâtre, le public ne voulait admettre que les pièces en vers, au moins pour les ouvTages im- portants. Molière en fit à ses dépens l'expérience, et il pensa voir sombrer l'un api-ès l'autre Don Juan et T Avare pour les avoir écrits en prose. C'est son exemple qui amena un changement dans les coutumes, et qui fit enfin tolérer la prose (Voy. ce mot). Il n'est pas besoin de dire que le répertoire de notre grande scène littéraire comprend, de- puis deux siècles et demi, c'est-à-dire depuis Corneille et Rotrou, un grand nombre de piè- ces en vers. Pour une immense partie , ces ou- vrages sont écrits en alexandrins, et aujour- d'hui ce vers est le seul qui soit usité au théâtre. Mais au dix-septième et au dix-huitième siècle, la coupe de l'alexandrin n'était pas la seule employée ; certaines pièces étaient en vers de dix syllabes, entre autres VAinour Victorieux, de Hardy (1618), Aristène, de Troterel (1626), Licoris, de Basire (1631), l'Enfant prodigue (1736), Nanine (1749 ) et VÉcueil du sa^e, de Voltaire (1762), les Méprises^ de Palissot (1762), etc. On avait aussi, surtout au seizième et au dix-septième siècle, d'assez nombreuses pièces en vers de huit syllabes, témoin Eugène ou la Rencontre, de Jodelle (1552), îesEsbaîs^ de Jacques GrcWn (1560), le Muet insensé, de Leloyer (1579), les Écoliers, de François Per- ron (1589), la Cluiste Bergère, de La Roque (1609), GUlette, de Troterel (1619), le Sourd, de Desmarets (1639), le Mariage de rien, de Montfleury (1660), le Cartel de Guiïlot ou le Combat ridicule, de Chevalier (1660), Luhin ou le Sot vengé, de Raymond Poisson (1661), les Galans ridicides, de Chevalier (1662), Colin- Maillard, de Chappuzeau (1662), Champagne coiffeur, de Boucher (1662), la Désolation des filous, de Chevalier (1662), le Duel fantasque ou les Valets rivaux, de Rosimond (1668). Puis on avait (et c'étaient les plus nombreuses) les pièces en vers libres, qui se jouaient aussi bien à la Comédie-Italienne qu'à la Comédie-Fmn- VERVE. — VIRTUOSE. iOi çaîse, et parmi lesquelles il faut compter, outre V Amphitryon de Molière, Phaébn^ de Bour- sault, la Métempsycose des amours et CéphaU et Procris^ de Dancourt, le Roi de Cocapie^ de Legrand, Zô Retour de Mars ^ de Lanoue, les MécontenSy de la Bruère, la Critique^ le Badi- 9 îiage, les Elrennes, les Billets doux, U Je ne sçai quoi, Us Talens à la mode, la Fête d^Au- ieuil, la Folie du Jour et la Frivolité, de Boissy , rHyver, de d'Allainval, Amour pour amour, le Rival de lui-même, V École des mères et TA- moiir casfillafi, de La Chaussée, le Billet perdu, de Desmahis, V École amoureuse, de Bret, la Fermière, de Fagan, les Lacéd^mo- niennesy de Mailhol, V Impromptu de Thalie, de Sedaine, l'Orpheline léguée, de Saurin, Dupuis et Desro7iais, de Collé, et bien d'au- tres dont les titres ne sauraient trouver place ici. Quelques-uns des poèmes de nos anciens opéras-comiques étaient écrits aussi en vers libres, et cette forme poétique leste et pim- pante, pleine de grâce surtout lorsqu'elle était traitée par un écrivain tel que Favart, s'a- voisinait merveilleusement avec la musique. De nos jours, un librettiste fort distingué. Th. Sauvage, a fait revi\Te avec bonheur le vere libre dans Topéra-comique, et Ton peut voir avec le Cdid, Gilh ravisseur, le Toréador, s'il a su y réussir. VERVE. — Qualité qu'il est plus facile d'apprécier que de caractériser, de comprendre que d'analyser. Ce qu'on appelle la verve, au théâtre, est un composé de chaleur et de gaîté, de mordant et d'entrain, de vivacité et de légèreté, qui donne du montant au jeu de l'ac- teur, le met en conmiunication directe avec le public et excite la bonne humeur de celui-ci. La verve est indispensable dans les emplois gais, et elle est la première qualité qu'on doit exiger des comiques, des soubrettes et des duè- gnes. VIEUX JEU. — Dans tous les arts, et sur- tout dans les arts d'interprétation, il est, à côté des vérités éternelles et fondamentales, cer- tains détails d'exécution qui sont sujets au ca- price de la mode, qui se renouvellent en quelque sorte périodiquement et qui veulent toujours être mis au goût et au ton du jour. C'est ce dont .certains artistes d'un talent secondaire ne se rendent pas suffisamment compte ; ils ne changent rien à leur jeu tout en \âeillis- sant, ne modifient rien à leur manière d'être, et bientôt se trouvent en complet désaccord avec le ton courant (Je l'art et avec ce qui se fait autour d'eux. C'est de ceux-là qu'on dit qu'ils ont le vieux jeu, VILLES SÉDENTAIRES. — On qualifie de cette façon singulière, grâce à une ellipse (villes à troupes théâtrales sédentaires), les vil- les de départements qui entretiennent des troupes permanentes, troupes qui ne voyagent point et les desservent uniquement. Sous l'em- pire de l'ancien régime théâtral administratif, un petit nombre de villes seulement, parmi les plus peuplées, étaient désignées pour pos- séder des troupes sédentaires. Ce furent d'a- bord Lyon, Bordeaux, Marseille, Rouen, Lille, Strasbourg, Nantes, Toulouse, Montpellier, Brest, Versailles, puis, plus tard, Nîmes, Metz, Nancy, Besançon, Rennes, Amiens, Angers, Caen, Calais, Dijon, Grenoble, Saint-Etienne, Avignon, etc. A cette époque, où tout était réglementé, un très petit nombre de ces villes avaient la faculté de posséder deux théâtres, — jamais plus ! — sur l'un desquels on jouait l'opéra et la comédie, tandis que l'autre était réservé. au drame et au vaudeville. Ces villes étaient Lyon, Bordeaux, Marseille, Rouen et Toulouse. Aujourd'hui, avec le régime de li- berté théâtrale tel qu'il a été rétabli en 1864, chaque ville peut avoir autant de théâtres qu'elle le désire, et ces théâtres peuvent jouer le genre qui leur convient. (Voy. Arrondis- sement THÉÂTRAL.) VIOLON CONDUCTEUR. — Voy. Ré- pétiteur. VIRTUOSE. — C'est ainsi que l'on ap- pelle les musiciens soit chanteurs, soit surtout instrumentistes, qui se font remarquer par leurs grandes qualités de mécanisme et par leur habileté à vaincre toutes les difficultés prati- ques de l'exécution musicale. Il s'ensuit donc qu'un virtuose très habile peut n'être qu'un 758 VIRTUOSITÉ. — VOIR A LA CHANDELLE. médiocre artiste considéré au point de vue du ^oût, du stjle et du vrai sentiment musical. Hâtons-nous de dire qu'il est de grands chan- teurs et de grands instrumentistes qui sont en même temps de fort habiles virtuoses. « C'est Molière, dit Castil-Blaze, qui, le premier, a francisé le mot (italiei^ virtuoso^qae M"*® de Motteville employait ,41 est vrai, mais en ita- lien, en parlant de la célèbre cantatrice Leo- nora Baroni, attachée à la musique du roi Louis XIII. » VIRTUOSITÉ. — Grande habileté à exé- cuter toutes les difficultés possibles, dans la musique vocale ou dans l'instrumentale. VIS COMICA. — Ces deux mots latins, ex- traits incorrectement d'une épigramme de Cé- sar, ont été faussement traduits par la force comique, et on les applique journellement à tout écrivain scénique qui fait preuve d'un grand sentiment comique. Aucun glossateur de Molière n'a manqué de déclarer qu'il était au suprême degré doué du vis comica. Or l'épi- gramme de César, qui s'appliquait à Térence, et dans laquelle il exprimait le regret que le talent comique du poète brillât plus par l'agré- ment que par la force, est ainsi conçue : Lenibus atque utinam sciiptis aàjuncla foret vis, Comica ut opquato virtus polleret honore/ « On parle toujours du vis comica, a dit à ce sujet Sainte-Beuve; l'expression est tirée de cette épigramme latine de César. Mais la phrase, mieux lue et mieux ponctuée, ne laisse pas sub- sister cette association de mots que sépare une virgule ; le cmnica, au lieu d'aller à vis, se rap- porte au substantif qui suit, à virtus^ qui n'a plus le même sens. C'est égal, le vis comica est en circulation et j restera, nonobstant la meil- leure leçon. Ce sont des erreurs qu'il est plus commode de garder que de corriger. Plût à Dieu qu'il n'y en eût pas de plus grosses ! j> Et l'on continuera de dire de M. Labiche, et de M. Augier, et de M. Sardou, qu'ils possèdent un vis comica irrésistible. VISITES. — Au dix-septième siècle, nos comédiens étaient souvent appelés à aller don- ner quelque représentation chez un grand personnage. C'est ce qu'ils appelaient Dans ce but, et afin d'éviter toute fraude de la part des entreprises théâtrales, il prend place le soir, dès l'ouverture des bureaux, auprès des contrôleurs, pour les contrôler eux- mêmes et s'assurer de la régularité du service de la recette. (Voy. Droit des pauvres.) AGRAFER (Se faire). — Se dit de l'ac- teur qui, par son insuffisance, son laisser-aller, ou pour toute autre cause, excite la mauvaise humeur du public, et provoque de sa part des murmures et des marques ouvertes de mécon- tentement. APPRENDRE. — Le premier travail du comédien , lorsqu'il est appelé à prendre part à l'exécution d'un ouvrage nouveau, est d'o^- prendre le rôle dont il est chargé, c'est-à-dire de s'en graver le texte dans la mémoire de fa- çon à pouvoir le réciter par cœur dès les pre- mières répétitions. ATTRAPER (Se faire). — Synonyme de se faire agrafer (Voy. ce mot). BAISSER DE RIDEAU. — A l'époque où l'on avait l'habitude de donner des spectacles coupés, on appliquait la qualification de bais- ser de rideau à la petite pièce qui terminait la soirée et sur laquelle le rideau se baissait pour la dernière fois. On faisait en sorte que cette pièce fût vive, alerte, gaie, afin de laisser le spectateur sur une impression riante et joyeuse. BAS COMIQUE. — Genre de comique tri- vial, \nilgaire, parfois grossier, qui excite le rire de la foule, mais qui n'est pas empreint d'un goût très pur. Quelques acteurs ont brillé pour- tant dans le bas comique et se sont rendus cé- lèbres en ce genre, entre autres Tiercelin, qui fit nasfuère la fortune des Variétés, et la fameuse Flore, qui obtint aussi de grands succès à ce théâtre. BATTE. — La batte est le principal attri- but d'Arlequin, qui ne saurait pas plus s'en passer que Polichinelle ne saurait se passer de sa pratique. C'est une sorte de petite latte très flexible, qui ne quitte jamais sa ceinture, et dont il se sert à l'occasion pour rouer de coups ses éternels ennemis : Cassandre, Léandre, Pierrot, et généralement tous ceux qui cher- chent à le contrecarrer et qui prétendent faire obstacle à ses projets. BÉNÉFICE SIMULÉ. — Lorsque , dans une troupe de province , un artiste a conquis les faveurs du public et s'est fait aimer de lui, il arrive que le directeur exploite cette faveur à son profit en se servant du nom de l'artiste. Il affiche alors une représentation au bénéfice de celui-ci, et les spectateurs accourent enfouie, pensant que le profit doit être pour leur artiste BILLET DE RÉPÉTITION. — ILLUMINATIONS. préféré. Par ce moyen, le directeur encaisse une grosse recette, et il en est quitte pour accorder une modeste gratification au comédien sur le nom duquel il a battu monnaie. C'est ce qu'on appelle un bénéfice simulé. BILLET DE RÉPÉTITION. ~ Dans les petites villes de province, où l'on ne jone pas tous les soirs, le service de chaqne jour est indi- qué sur un billet de répétition que le garçon de théittre est chai^ d'aller communiquer succes- sivement, chaque matin, à tous les artistes de k troujM!. BOULEUR. — D'an comédien qui, sans posséder de qualités particulières et sans avoir d'originalit«, connaît cependiint bien son métier et, sans rien faire ressortir, ne gâte rien et tient convennlilement sa place dans l'ensemble, on dit que c'est (»i hon boiileur. BOUTIQUE. — La grande boite camie et plate dans l«sé. Si la toile de foni tombe au second, au troisième ou au quatrièni' plan, le fond se trouve naturellement à ce se cond, troisième on quatrième plan. Dans ui décor fermé, ce qu'on appelle la porte du font est celle qui fait face au spectateur. ILLUMINATIONS. — Ce spectacle popu laire, accompagnement obligé de toutes le grandes fêtes publiques, est depuis bien long teinje en usage. Il en est parié déjà dans ui fameux roman de la Table ronde, Perceforeat qui date dn dixième on du onzième siècle e INDICATIONS. — PAQUET. 765 dont rauteur est resté inconnu, et J. Chartier le mentionne ainsi dans son Histoire de Charles VII, à Tannée 1458 : -9- X. B. — Quelques mots oubliés ayant fait l'objet d'un Supplément, le lecteur qui, consul- tant cette table, y rencontrerait un mot qu'il ne trouverait pas à sa place dans le corps de l'oii- vrap:e, est prié de se reporter au Supplément, qui lui donnera satisfaction. SYMBOLISME RELATIF AU THEATRE, A LA MUSIQUE ET A LA DANSE. Acedé. — Dionysos. — Erato; Euterpe. — Melpo- mène. — Orphée. — Saint Augustin ; Sainte Cécile ; Sainte Pélagie. — Terpsychore. — Thalic. UART ANTIQUE. Les Jeax da méAtre et da cirque» left divertisse- menis publics cliez les Grecs et chez les Romains. Amphithéâtre ; Archimime ; Arène ; Athlètes. — Bîic- chanales ; BeUuaire ; Bestiaire. — Ceraunoscopion ; Chariot (Le) de Thespis ; Chironomie ; Chœur antique ; Choçagie , Chorégie ; Chorée ; Chorège ; Choreute ; Cho- ristique ; Chorodie ; Cirque ; Commoi ; Cordace ; Coryphée. — Deu8 ex tnackiml; Deutéragoniste ; Dicélie ; Dionysia- ques; Dionysos. — EmméleLa; Exode; Exodiaire. — Funambules. — Gladiateur ; Gy ninxisiarque. — Hilarodie : Hippodrome; Histrion. — Jeux (Les) dans l'anti- quité ; Jeux scéniques. — Naumachie ; Neurobates. — Odéon ; Orchestre. — Palestre ; Pantomime ; Parasec- nium; Planipèdes; Planipédie; Podium; Post-sceninm ; Proscenium; Protagoniste; Pulpitnm. — Rhapsode; Rhapsodie. — Saltation; Saturnales ; Schœnobates ; Sicin- nis ; Stade. — Théfttres antiques ; Theologium ; Trita- goniste. — Vases de théfttre. LES ORIGINES DU THÉÂTRE EN FRANCE. Baladin ; Ballet ; Bateleur. — Clercs de la Basoche ; Comédie; Comédie-Française (La); Comédie-Italienne (La) ; Confrères de la Passion ; Cri. — Echafaud ; EnfantS'Sans-Souci ; Establies. — Farces; Farceurs; Foire (Théâtres de la). — Histrion; Hôtel de Bourgogne. — Jongleurs. — Lettres patentes, — Masque (Le) au théâ- DICTIONNAIRK DU THÊATRIE. tre ; Miracle ; Momerie ; Montre ; Moralité ; Mystere. — Pastorale ; Pois piles. — Sotie ; Sots (Confrérie des). — Théâtres (Les) & Paris ; Turlupinades. HISTOIRE DES THÉÂTRES DE PARIS. Académie nationale de Musique. — Bouffes (Les); Boulevard du crime ; Boulevard du Temple ; Boulevards (Théâtres des). — Comédie-Française (La); Comédie- Italienne (La). — Feu (Le) au théâtre ; Foire (Théâtres (le la). — Hôtel de Bourgogne. — Illustre (L') Théâ- tre. — Jeu de paume. — Liberté des théâtres. — Maison de Molière ; Marais (Théâtre du) ; Musée de l'Opéra. — Odéon (Théâtre de V) ; Opéra (Théâtre de 1') ; Opéra- Comique (Théâtre de 1'). — Suzeraineté de l'Opéra. — Temple (Le) d'Euterpe ; Théâtres de la banlieue ; Théâ- tres d'élèves ; Théâtres d'enfants ; Théâtres (Les) à Paris ; Théâtres de quartier ; Théâtres de société ; Tripot (Le) comique. DÉSIGNATIONS GÉNÉRIQUES DES LIEUX DESTINÉS AUX SPECTACLES. Amphithéâtre. — Baraque; Beuglant; Boui-boui. •— Café-concert ; Café flamenco ; Café-spectacle ; Castelet ; Cirque. — Echafaud ; Establies. — Hippodrome. — Jar- dins publics. — Loge. — Manège ; Ménagerie ; Musicos — Naumachie. — Odéon. — Politéama. — Salle ; SaUe de concert ; Stade. — Théâtre. LA LITTÉRATURE ET LES DOCUMENTS RELA- TIFS AU THÉÂTRE, A LA MUSIQUE ET A LA DANSE. Bibllotliêques spéciales. Almanachs de théâtre; Archives. — Bibliographie théâtrale; Bibliothèque du Conservatoire; Bibliothèque 49 770 TABLE SYSTÉMATIQUE. de l'Opéra. — Clé du Caveau ; Compte-rendu ; Courrier des théâtres ; Critique théâtrale et musicale. — Diction- naire de musique. — Feuilleton dramatique ; Feuil- letoniste. — Journaux de musique; Journaux de théâ- tre. — Mémoires dramatiques; Musée de l'Opéra. — Polémique (La) au théâtre; Propriété littéraire. — Keporter théâtral. — Technologie théâtrsje. ADÎUNISTRATION , EXPLOITATION THÉÂTRALE. Abonnement; Administrateur; Administration ; a A la demande générale ; j> Année théâtrale ; Appointements ; Arrondissement théâtral ; Assemblée ; Autorités théâ- trales administratives. — Brevet; Bulletin de service. — Cahier des charges ; Capitation ; Chef de service; Chef de société ; Clôture ; Commissaire du gouvernement ; Comité; Comité d'administration, de direction; Comité de lecture ; Composition du spectacle ; Concours ; Congé ; Correction (Pièce reçue &). — Décadier ; Décentralisation artistique; Dimanche (Le) au théâtre; Directeur bre- veté ; Directeur de la musique ; Directeur de la scène ; Directeur de théâtre ; Direction ; Doyen de la Comédie- Française. — Engagement. — Faire le service ; Ferme- ture. — Gkntilshommes de la chambre. — Heure (L') du spectacle; Hiérarchie des théâtres. — Imprésario; Inspecteur de l'habillement ; Inspecteur du matériel ; Ins- pecteur de la salle ; Itinéraire. — Jours de jeu. — Let- tres patentes; Location; Location (Feuille de); Loca- tion (Préposée & la). — Manager; Matinées; Monopole. — Orateur ; Ordre de début. — Parler au public ; « Par permission de M. le maire ; » Pension de retraite; Pen- sionnaire ; Personnel ; Police des théâtres ; Préposée à la location ; Privilège ; Prorata. — Quinzenier. — Récep- tion d'une pièce; Réclame; Régie; Régie (Exploita- tion en) ; Régisseur ; Règlement ; Relâche ; Remise ; Renouveler ; un engagement ; Réouverture ; Répertoire ; Répétiteur; Représentation ; Représentation (Première); Représentation (Centième); Représentation extraordi- naire; Représentation de retraite; Reprise; Résiliation ; Retirer un rôle ; Rompre un engagement. — Scrittura ; Secrétaire général; Semainier; Service de presse; Socié- taire ; Société ; Spectacle coupé ; Spectacle demandé ; Spectacle forcé ; Subventions ; Sujet ; Suzeraineté de l'O- péra. — Tableau de troupe ; Tour de faveur; Trois (Les) représentations d'auteur. LA QUESTION FINANCIÈRE AU THÉÂTRE. Économie tliéAtrale. Abonnement ; Agents des auteurs ; Appointements ; Avances. — Bassin ; Bénéfice ; Bénéfice simulé ; Billet à droit ; Billet d'auteur. — Cachet ; Cahier des charges ; Capitation ; Cassette. — Dédit ; Demi-recette ; Dimanche (Le) au théâtre ; Domaine public ; Double (Jouer au) ; Droits d'auteur ; Droit des pauvres. — Faire de l'argent ; Feu ; Frais. — Honoraires. — Ingresso. — Jeton. — Lo- cation; Loges. — Part; Pension de retraite; Primes; Prix des places au théâtre ; Prorata. — Recette ; Régie (Exploitation en) ; Rendre l'argent. — Semaine sainte ; Sociétaire; Société; Spectacle de capitation; Supplé- ment ; Subventions ; Suzeraineté de l'Opéra. — Tarif des places. LE THEATRE ET LE POUVOIR ROYAL, PUBLIC OU MUNICIPAL. Arrondissement théâtral; Autorités théâtrales admi- nistratives. — Brevet. — Cahier des charges; Censure théâtrale ; Clôture ; Commissaire du gouvernement ; Com- mission d'examen. — Débuts ; Décret de Moscou ; a De par et pour le peuple ; D Directeur breveté ; Droit des pau- vres. — Excuses au public. — Faire évacuer la salle ; Foire (Théâtres de la) ; For-l'Évêque (Le) et les comé- diens. — Garde (La) au théâtre ; Gentilshommes de la chambre. — Heure (L') du spectacle; Hiérarchie des théâtres. — Interdiction ; Itinéraire. — - Lettres patentes ; Liberté des théâtres. — Menus -Plaisirs; Monopole. — Ordre de début. — a Par permission de M. le maire ; » Par- terre ; Police des théâtres ; Privilège ; Prix (Le) des places au théâtre. — Régie (Exploitation en). — Se- maine sainte ; Sentinelles sur le théâtre ; Spectacles à la cour ; Spectacles de gala ; Spectacles gratis ; Spectacles par ordre ; Subventions ; Surintendants des théâtres; Sus- pendre une pièce; Suzeraineté de l'Opéra. — Villes sédentaires. LA CENSURE. Censure théâtrale ; Commission d'examen ; Coupures. — Interdiction^ — Liberté des théâtres. — Pièces sans titre. — Suspendre une pièce. LES AUTEURS ET LES PIÈCES. Acteurs-auteurs ; Agents des auteurs ; Anniversaires ; Arrangeur; Associations artistiques; Auteur dramati- que; Auteurs anonymes. — Billet d'auteur, — Chute; Collaborateur; Collaboration (La) au théâtre; Commis- sion des auteurs ; Compositeur ; Correction (Rèce reçue à). — Dramatiste, dramaturge; Droits d'auteurs. — Écrivain dramatique. — Guerres musicales. — « L'au- teur ! l'auteur! » Liberté des théâtres. — Parodiste; Parterre; Pièce; Pièces sans titre; Poète; Polémique (Lii) au théâtre; Primes; Propriété littéraire. — Querel- les littéraires. — Réception d'une pièce; Retirer ime pièce. — Sous-titre. — Titres de pièces ; Tour de faveur; Trois (Les) représentations d'auteur. — Vaudevilliste. POÉTIQUE THÉÂTRALE. Caractère, détail et divisions du poème drama- tique. — Forme» , procédés , produits du travail littéraire appliqué A la scène. Action. — Canevas ; Caractère ; Catastase ; Catastro- phe; Charpente; Comique (Du) au théâtre; Coup de théâtre ; Coupe. — Dénouement ; Dialogue ; Donnée -de pièce; Dramatique. — Entrée ; Exposition. — Filer une scène. — Imprécation ; Incident ; Intrigue ; — Marivau- dage ; Monstre. — Nœud. — Parodier ; Paroles ; Pas- sion ; Pathétique ; Péripétie ; Plan ; Poème ; Poète ; Prose. — Récit dramatique. — Scénario; Situation; Sortie; Sortie (Fausse); Style théâtral. — Unités (Les trois). — Vers; Vis comica» TABLE SYSTÉMATIQUE. 771 LES DIVEBSES PARTIES DU POEME DBAMATIQUE, considérées matéiiellemeat oa littérairement. Acte. — Catastase ; Catastrophe. — Dénonement. — » « f Epilogue ; Episode ; Epitbase ; Exode ; Exposition. — Parties; Péripétie; Prologue; Protase. — Scène. — Tableau. LES DIFFÉRENTES FORMES ET LES DÉNOML NATIONS DIVERSES DU POÈME SCÉNIQUE, DRAMATIQUE ET LYRIQUE. Adaptation ; Ambigu-comique ; A-propos ; Arlequi- nade; Atcllanes. — Ballet; Bergerie ; Bouffonnerie ; Bou- tade ; Burlesque. — Cantate ; Cantatille ; Chansonnette ; Christmas-Pantomimes ; Comédie ; ComécUc-ballet ; Comédie de caractère, de genre, héroïque, d'intrigue, lyrique, de mœurs; Coméd ie- vaudeville ; Compliment. — Dicélie; Divertissement; Drame; Drame de cape et d'épée, fantastique, lyrique. — Entremets; Exode. — Fait historique; Farce; Fana; Féerie; Fragments. — Hilarodie. — Intermède. — Jeu-parti. — Libretio ; Li- vret. — Magodie ; Mascarade ; Masque ; Mélodrame ; Mi- modrame; Miracle; Momcrie; Monologue; Moralité. — Ode-symphonie ; Opéra ; Opéra buffa ; Opéra-comique ; Optra di tnezzo carattere; Opéra séria; Opérette; Ora- torio ; Ouvrage. — Pantomime; Parade ; Parodie ; Pasti- che ; Pastorale ; Pièce ; Pièce à ariettes, en écriteaux, à la muette, à machines ; Planipédie ; Poème ; Poème symp- honique ; Pois piles ; Proverbe. — Saynète ; Scène comi- que; Scène lyrique; Sotie. — Tétr.ilogie; Traduction; Tragédie ; Tragédie lyrique ; Tragi-comédie ; Trilogie ; Turlupinades. — Vaudeville. — Zarzuela. LA SCÈNE , Sa stractore» son aménayement, ses divisions, ses dépendances. Accessoires (Cabinet d') ; Avant-scène. — Bureau de copie. — Cadre de la scène ; Cintre ; Costières ; Côté du roi, côté de la reine; Côté cour, côté jardin; Coulisses. — Dessous ; Dessus. — Entrée des artistes. — Face ; Fond; Foyer. — Gril. — Loges d'artistes; Lointain. — Magasin ; Manteau d'Arlequin. — Parascenium ; Plan- cher de la scène ; Plans de la scène ; Post-scenium ; Pros- cenium; Pulpitum. — Rampe; Régie; Rideau d'avant- scène ; Rideau de fer ; Ridotto ; Rue. — Scène ; Souflleur (Trou du). — Théâtre; ToUe (La) ; Trappes; TrappU- lons ; Trous du rideau. MISE EN SCÈNE. Décor, costame , aménayement scénlqne. Accessoires ; Apothéose ; Appareil scénique ; Appari- tion; Appliques. — Bandes d'air; Bandes de mer. — Chartron; Châssis de décoration; Combats; Cortège; Costume (Le) au théâtre. — Décor ; Décoration ; Décora- teur; Décoration (Atelier de); Décors (Magasin de); Péfilé ( Dessinateur de costumes ; Directeur de la scène. — ÉTolntions. — Figuration ; Fond ; Frises. — Grarde- robe; Gloire. — Herses. — Indications. — Lumière électrique. — Maquette; Masque (Le) au théâtre; Met- teur en scène ; Mettre en scène ; Mise en scène ; Monter une pièce. — Passade; Planter un acte. — Régler la mise en scène ; Répéter ; Répétitions ; Rideau de fond , de gaze, de nuages. — Spectacle. — Tableau; Traînées; Transformations ; Truc. MACHINERIE THEATRALE. (Personnel, matériel, service.) Appuyer. — BâtL — Changement à vue ; Charger ; Chariot; Châssis (Faux); Cheminées des contrepoids; Cintre ; Côté cour, côté jardin ; Côté du roi , côté de la reine. — Dessous ; Dessus. — Equipe ; Équiper un décor. — Ferme ; Fil. — Gloire ; Gril ; Guinder. — Machinerie théâtrale ; Machines ; Machiniste en chef ; Machinistes ; Manœuvre ; Mât. — Plantation ; Planter un décor ; Pont volant ; Portant ; Praticable. — Transformation ; Trappe ; Trappe anglaise ; Trappillon ; Truc. — Vol. LA LUMIÈRE AU THEATRE, sur la scène et dans la salle. Éclairage (L') au théâtre. — Herses. — Illuminateur. — Lampiste en chef ; Lumière électrique ; Luminariste ; Lustre. — Moucheurs de chandelles. — Plafond lumi- neux. — Quinquet. — Rampe. — Servante. — Traînées. — Voir à la chandelle. LES COMÉDIENS. Désignations professionnelles, qaaIUlcatioo» diverses. Acteur; Acteur en représentations; Acteurs forains; Actrice ; Amateur ; Artiste dramatique. — Cabotin ; Can- tatrice ; Chanteur ; Chanteuse ; Comédien , comédienne; Comédiens du roi ; Compagnie. — Danseur, danseuse ; Deutéragoniste. — Étoile. — Farceurs. — Histrion. — Mime. — Pantomime; Protagoniste. — Sujet. — Tra- gédien, tragédienne ; Tritagoniste ; Troupe. ACTION SCÉNIQUE INDIVIDUELLE OU COLLECTIVE. Jeu dn comédien , ses qualités , ses défauts. Acteurs dans la salle; Aisance; Ame; Aparté; Aplomb; Avoir du chien, des entrailles, des planches, le trac, le taff, le taffetas. — Bafouiller; Bas comique ; Bouffon; Bouleur; Bravura; Bredouiller; Brûler les planches. — Cantonade (Parler à la) ; Cascade ; Chaleur; Charge ; Chauffer la scène ; Chercher l'effet ; Coup de fouet; Coups de talon; Créateur; Création; Créer un rôle. — Débit ; Déblayer ; Débuts ; Débutant, débutante; Déclamation; Déclamation musicale; Détailler, dire le couplet ; Diapason (Prendre le) ; Diction. — Ecouter ; Effet; Empoigner le public; Ensemble ; Entrain ; Entrée (Manquer son) ; Être blea, moaohe , toc, en toàne , dans 772 TABLE SYSTÉMATIQUE. la peau du bonhomme ; Expression Faire de l'effet ; Faire de la toile ; Feu (Avoir du) ; Ficelle ; Forcer l'ef- fet ; Four (Faire) ; Fureur (Faire). — Creste (Le) j Gras- seyement. — Hoquet dramatique. — Imitation ; Inter- prétation ; Interpréter ; Interprètes. — Jeu ; Jeu de scène; Jeu muet; Jeu de physionomie; Jouer; Jouer au pied levé ; Jouer les mains dans ses podies. — Lan- cer le mot ; Larmes dans la voix ; Lazzi ; Lire un rôle. — Marcher sur sa longe ; Mémoire (La) ; Mimique ; Mor- dant; Moyens. — Ne pas dépasser la rampe; Naturel. — Organe. — Fantxdonnade ; Parler le couplet ; Pas- quinade ; Passade ; Passion ; Pathétique ; Peur; Phraser; Porter; Porter le costume ; Prendre du souffleur ; Prendre des temps; Prononciation. — Remporter sa veste: Rentrée ; Rester en plan ; Rire (Le) au théâtre ; Rococo ; Rôle muet, de complaisance, à tiroirsj, à travestisse- ments ; Rouler les r. — Savoir ; Sauver une scène ; Sor- tie ; Sortie (Fausse). — Talent; Temps ; Tirer la ficelle ; Tradition, traditions. — Verve; Vieux jeu; Virtuosité. — Zézaiement. LES EMPLOIS AU THÉÂTRE. Dénnltlon » caractéristique. Amoureuses ; Amoureux. — Baillis ; Baryton ; Basse ; Basso contante; Buffo caricato. — Caractères (Les); Casa- que (Grande, petite); Chanteuses (1 *"»=*, 'i"") ; Chef d'emploi; Colins; Comiques (Emploi des); Comprimaria: Confident, confidente ; Coquettes (Grandes). — Danseur (1«", 2«) ; Danseuse (U'«^, 2«) ; Déjazets ; Donna (1*,2*) ; Double (Acteurs en) ; Doublures ; Duègnes ; Du- gazons : Dugazons (Mères). — Emploi des beaux rôles ; Emplois (Les) au théâtre ; Emplois marqués ; En chef et en partage ; En chef et sans partage. — Financiers. — Ganaches; Grimes. — Ingénuités. — Jeunes Pre- miers; Jeunes Premières. — Laruettcs; Livrée (Grande, petite). — Mères nobles. — Niais ; Nourrices. — Pages; Pères dindons; Pères nobles; Premiers Rôles; PHma Donna; Princesses. — Queues-rouges. — Raisonneurs: Reines; Remplacement (Acteurs en); Rôles (1<""«,2'*, 3®") ; Rôles & baguette ; Rôles à corset ; Rôles à man- teau ; Rôles marqués ; Rôles à tablier ; Rôles travestis. — Seconds Rôles; Soubrettes; Suivantes. — Ténor (1«',2«) ; Traîtres ; Travestis ; Trials ; Troisièmes Rôles : Tyrans. — Uomo {Primo) ; Utilités. — Valets. DÉTAILS DU TRAVAIL SCÉNIQUE. Études préparatoire». Apprendre; Audition. — Collation des rôles; Cou- pures. — Descendre en scène ; Distribution. — Entrer en répétitions ; Etude (Pièce h V) ; Etudier. — Leçon ; Lec- ture ; Lignes. — Mémoire (La) ; Metteur en scène ; Met- tre en scène ; Mise à la scène ; Mise en scène ; Monter une pièce. — Planter un acte. — Raccord; Régler la mise en scène ; Remettre un rôle ; Repiisser un rôle ; Répéter ; Réix'titions ; Réplique ; Rôles. PHYSIONOMIE DE L'ACTEUR. MoyeiiH employés. Blanc. — Crêpé. -^ Faire sa figure ; Fard, — Grimer (Se). — Maquillage ; Maquiller (Se) ; Masque (Le) au théâtre. — Rouge. SERVICE INTÉRIEUR DU THÉÂTRE. a A l'orchestre, Messieurs, s'il vous plaît ! j> Amende ; a Au rideau ! d Avertisseur. — Bâton de régisseur ; Bil- let de répétition ; Brochure ; Bulletin de service. — Clo- che (La). — a En scène! » Entr'acte. — Frapper les trois coups. — d Le rideau est levé ! 2> Lever du rideau. — Manuscrit ; Mise en loge. — « On commence î » — Pa- quet ; a Place au théâtre !» — a Quand vous voudrez. » Quart d'heure de grâce. — Règlement. — Tableau. PERSONNEL DU SERVICE DELA SCÈNE NE PRE- NANT PAS PART A L'ACTION SCÉNIQUE. Accessoires (Chef des); Accessoires (Garçons d') ; Ac- compagnateur ; Avertisseur. — Bibliothécaire. — Chef du chant ; Chef de copie ; Coiffeur ; Costumier (Chef) ; Costumière en chef. — Décorateur ; Dessinateur de cos- tumes; Directeur de la musique ; Directeur de la scène. — Gagistes; Garçon d'orchestre; Garçon de théâtre. — Habilleur, habilleuse. — Uluminateur. — Lampiste en chef ; Luminariste. — Machiniste en chef ; Machiniste ; Magasinier, magasinière; Maître de ballet; Metteur en scène ; Moucheur de chandelles, — Régisseur ; Répéti- teur ; Répétiteur de ballet. — Secrétaire général ; Souf- fleur; Souffleur du chant. MUSIQUE. — CHANT. Abonné ; Académie nationale de musique ; Accademûi ; Accompagnateur ; Accompagnateur au clavecin ; Accom- pagnement; Accord (Prendre 1') ; Acoustique; Acteurs- auteurs ; Adaptation ; Aœdé ; Air ; Air (Grand) ; Air de ballet , de bravoure , de danse ; Airs à danser ; a A l'or- chestre. Messieurs, s'il vous plaît! ï> Appointements; Ariette; Ariogo ; Associations artistiques. — Ballet; Bande sur le théâtre; Baryton; Basse; Basto cantante; Bâton de chef d'orchestre ; Batterie ; Batteur de mesure; Beuglant ; Bibliothèque du Conservatoire ; Bibliothèque de l'Opéra; Bouffes (Les); Bravura; Buffo caricato; Bureau de copie. — Cacophonie; Cafés-concerts; Café flamenco ; Canard ; Cantate ; Cantatille ; Cantatrice ; Can- tilène; Cartello {Teatri di); Cavatine; Chansonnette; Chant; Chant dramatique ; Chanter les chœurs; Chan- teur, chanteuse ; Chanteur dramatique ; Chanteuses (1«»,2^«); Chat; Chef d'attaque; Chef du chant; Chef des chœurs ; Chef de copie ; Chef d'orchestre ; Chevroter; Chœur ; Chœur antique ; Chorée ; Choreute ; Choriste ; Choristique ; Chorodie ; Clé du Caveau ; Coin du roi , coin de la reine; Colins; Collaboration (La) au théâtre; Comédie à ariettes ; Comédie-ballet ; Comédie-Italienne ; Comédie lyrique; Comédie- vaudeville ; Comité de lec- ture ; Commissaire du gouvernement; Compositeur; Comprimaria ; Concert ; Concert spirituel : Concert (Le) spirituel ; Concerts populaires ; Concordant ; Concours ; Conduire , diriger l'orchestre ; Conservatoires ; Contralto ; Coryphée ; Couac ; Coupe ; Couplet. — Déclamatiozi musicale; Détailler, dire le couplet; Dessus (Premier ^ TABLE SYSTÉMATIQUE. 773 second) ; Dictionnaire de musique ; Dilettante ; Directeur de la musique ; Diva ; Divertissement ; Drame lyrique ; Droits d'auteurs ; Dwtto ; Dugazons ; Dugazons (Mères) ; Duo. — École de chant de l'Opéra ; Emplois (Les) au thé&tre ; Ensemble (Morceau d') ^ Entr'acte ; Erato ; Être en voix ; Euterpe ; Exécutants ; Exécution. — Fanfare (La); Farsa; Festival; Finale; Fioritures; Flonflon; Fragments. — Galoubet ; Garçon d'orchestre ; GraUlon- ner; Grasseyement; Guerres musicales.— Harmonie (L'); Haute-contre ; Hyporchème. — Instrumentation ; Ins- trumentiste ; Instruments ; Interlude ; Intermède ; In- terprétation ; Interprètes ; Introduction. — Jeu-parti : Jongleurs ; Journaux de musique ; Jours d'Opéra. — Ka- pellmtiMter. — Laruettes; Leçon; Lecture; Lettres pa- tentes; Librettiste ; Libretfb; Livret. — Maestro ; Maestro al cembalo ; Maestro concertatore ; Maître de musique ; Mélodie ; Mélodrame ; Mélopée ; Ménestrel ; Menus-Plai- sirs; MezzO' Soprano; Monodies; Monstre; Morceau; Morceau d'ensemble ; Morceau de facture ; Musée de l'O- péra ; Musiciens ; Musicos ; Musique ; Musique de chambre, dramatique, de scène, sur le théâtre, sym- phonique. — Ode-symphonie; Opéra; Opéra (Théâtre de r); Opéra buffa; Opéra-comique; Opéra-Comique (Théâtre de T); Opéra di mezzo caratterCf Opéra séria; Opérette ; Oratorio ; Orchestration ; Orchestre ; Orphée ; Ouverture. — Parties d'orchestre ; Partition ; Passer un air, un morceau ; Pastiche ; Poème symphonique ; Point d'orgue ; Polonaise ; Pont-neuf ; Pot pourri ; Prélude ; Prendre l'accord ; Prix de Rome. — Quatuor ; Quatuor (Le) ; Quinque ; Quintette. — Becital ; Récitatif ; Réduc- tion ; Répétiteur ; Répétiteur de ballet ; Réplique ; Ri- tournelle ; Romance ; Ronde ; Rondeau ; Roulade. — Salle de concert; Scène (La) lyrique; Sélection; Septuor; Sé- rénade; Sextuor; Sinjhnia; Soli; Soliste; Solo; Sopra- niste ; Soprano ; Souffleur du chant ; Sourdine ; Suzerai- neté de l'Opéra; Symphoniste. — Temple (Le) d'Eu- terpe ; Ténor; Ténor (l«*-,2«) ; Tenorino; Terzetto; Théâ- tre italien (Le) hors de l'Italie ; Théâtres lyriques ; Timbre ; Tirer la ficelle ; Tragédie lyrique ; Transposer ; Trials; Trio; Troubadour; Trouvère. — Uomo {Primo). — Violon conducteur; Virtuose; Virtuosité; Voix. — Zarzuela. LA DANSE ET LES DANSEURS, LA PANTOMIME, LE GESTE. Académie de danse ; Air de ballet; Air de danse ; Airs à danser ; Arabesque ; Archimime ; Assemblé ; Atti- tude.— Ballerine; Ballet; Ballet ambulatoire; Ballon (Avoir du) ; Battement ; Battu ; Bourrée. — Canarie ; Chaconne; Chassé; Chaussons de danse; Chorégraphe; Chorégraphie j Christmas-Pantomimes ; Conservatoire de danse ; Cordaoe ; Corps de ballet ; Coup de fouet ; Coupé. — Danse théâtrale ; Danseur, danseuse ; Danseur (icr^ 2«) ; Danseur jarreté , danseur arqué ; Danseuse (1*^,2»); Divertissement. — Écho; École de danse de l'Opéra; Elévation ; Emboîture ; Emméléia ; Entrechat ; Entrée d6 ballet ; Entremets. — Forlane. — Gavotte ; Geste (Le) ; Gigue; Glissé. — Jeté ; Jeté-battu. — Ma- ^^)die; Mi^ître 4ç ballet ; Marcheuse; Matassin ; Menuet ; Mime; Mimique ; Momerie ; Musette. — Pantomime ; Parcours; Pas; Passacaiile; Passe -pieds; Pavane; Pi- rouette ; Planipèdes ; Plié ; Pointes ; Polonaise; Positions; Prêtresses de Terpsychore. — Quadrille. — Rat d'Opéra ; Régler un pas; Répétiteur de ballet; Rigaudon; Rond de jambe ; Ronde. — Saltation ; Sarabande ; Sicinnis. — Taqueté; Tambourin; Temps; Terpsychore; Terre à terre ; Toccata ; Tricotets. — Variation. ÉCOLES, ÉTABLISSEMENTS D'INSTRUCTION, INSTITUTIONS. Académie de danse. — Conservatoires ; Conservatoire de danse. — École de chant de l'Opéra; École de danse de l'Opéra; École royale dramatique. — Manège. — Palestre. — Théâtres d'élèves. INDUSTRIES NÉES DU THÉÂTRE. Agences des théâtres; Agents dramatiques. — Cor- respondants de théâtre. — a Demandez F Entr'acte! J) — tf Location de lorgnettes ! » — Marchands de billets. — Offices des théâtres; a Orgeat, limonade, la bière! d FORMES PARTICULIÈRES DU LANGAGE THÉÂTRAL. — ARGOT DES COMÉDIENS. Agrafer (Se faire) ; Appeler Azor ; Apporter une lettre; Argot théâtral ; Attraper (Se faire) ; Avoir de l'ag^- ment ; Avoir du chien ; Avoir des côtelettes ; Avoir des entrailles ; Avoir des planches ; Avoir le trac, le tajff, le taffetas. — Bafouiller; Bâiller au tableau; Baisser de rideau; Balayer les planches ; Ballon (Avoir du) j Ban- quiste ; Battre le Job ; Boire du lait ; Bouche-trou ; Boui- boui ; Bouleur ; Bout de rôle ; Brûler les planches; Brûler une ville. — Cabotin ; Cabotinage ; Cabotiner ; Cama- rade ; Cantonade (Parler à la) ; Cascade ; Chauffer la scène ; Chausser le cothurne ; Clou ; Corser ; Couac ; Coup de fouet; Créateur; Création; Créer un rôle. — Dé- blayer ; Demi-recette ; Demi-salle ; Descendre en scène ; Diapason (Prendre le). — Emboîter (Se faire) ; Em- ploi des beaux rôles; Empoigner le public; Enfant de la balle ; Être bleu, mouche, toc ; Être dans la peau du bonhomme; Être égayé, empoigné; Être en scène Être reconduit. — Faire de l'argent ; Faire de l'effet Faire sa figure; Faire une fugue; Faire de la toile Fiasco; Ficelle; Filer une scène; Forcer l'effet; Four (Faire) ; Froid (Un). — Galoubet ; Graillonner; Grimer (Se); Grue. — Hoquet dramatique. — Jeter des pom- mes cuites ; Jouer les mains dans ses poches ; Jouer de- vant les banquettes ; Jouer au pied levé. — La ; Larmes dans la voix ; Lever de rideau ; Lignes ; Loge infernale ; Loup. — Maquillage ; Maquiller (Se) ; Marcher sur sa longe ; Marier Justine. — Ne pas dépasser la rampe ; Ne pas étrenner. — Ours. — Panne ; Passer; Planches (Les); Planter un acte; Porter; Porter le costume; Prendre du souffleur ; Prendre le théâtre. — Bat d'Opéra ; Rem- porter sa veste ; Rester en plan ; Bouler les r ; Boustis- Bure. — Sauver une scène ; Sur ses jambes. — Tartine ; 774 TABLE SYSTÉMATIQUE. Tenir la pièce; Tirer la ficelle; Trottoir (Le grand). — Vieux jeu; Voir à la chandelle. — Zinc (Avoir du). LA SALLE. Stractare, aménasemenC, divUion», dépendances, serviee, personnel. Acoustique; Agent des hospices; Amphithéâtre; Architecture théâtrale ; Avant-scène (Loges d'). — Bai- gnoires; Balcon; Buraliste; Bureaux; Bureau de loca- tion. — Contrôle; Contrôleurs. — Donneur de contre- marques. — Fauteuil ; Foyer. — Galerie. — Inspecteur de la salle. — Location (Préposée à la) ; Loge royale; Loge iulemale ; Loges ; Lustre. — Orchestre ; Orchestre (Stalles d*); Ouvreuse. — Paradis; Parquet; Parterre; Places ; Places (Petites) ; Placeurs ; Plafond lumineux ; Platea; Poulailler; Pourtour. — Ridotto. — Salle; Salle de concert; Stalle; Strapontin; Supplément. — Vases de théâtre. L'AFFICHE, Son nliltté , son langage , ses promesses. j^ffichage; Affiches; Affiche (Bande sur T); ({ A la demande générale. » — Entrées de faveur. — Hiérarchie des théâtres. — Incessamment ; Irrévocablement. — a L'auteur ! l'auteur I d — Orateur; Ordre du spectacle. — ce Par permission de M. le maire ; » Prochainement. — Belâche. — Sans remise. — Vedette. LE PUBLIC AU THÉÂTRE. Composition, particalarités , contâmes. Abonné; Amateur; Annonce ; Assemblée. — Cabale; Chambrée ; Chute. — Débuts ; Demi-salle ; Dilettante. — Empoigner le public ; Excuses au public. — Faire évacuer la salle ; For-l'Évêque (Le) et les comédiens. — Habitués. — Parterre ; Public. — Queue. — Salle ; Saints au public ; Sifflet (Le) au théâtre ; Solitiire ; Spec- tateur, spectatrice ; Spectateurs sur le théâtre. MANIFESTATIONS APPROBATIVES OU IMPRO- BATIVES DU PUBLIC. — FAÇONS DIVERSES DONT ELLES SE PRODUISENT. Acclamations ; Admission ; Appeler Azor ; Applaudis- sements. — Bis; Bravo. — Cabale; Chut,! — Débuts. — Encore! Entrée; Lire égayé, empoigné, reconduit; Etrenner. — Huées. — Jeter des pommes cuites. — ce La toile ! D a L'auteur ! l'auteur ! d Loge infernale. — Par- terre. — Rappel; Rejet. — Sifflet (Le) au théâtre; Succès. — Tomber ; a Tous ! touK ! » Trépignements. LA CLAQUE. Applaudisseurs gagés. — Chevaliers du lustre ; Claque : Claque (Chef de) ; Claqueurs. — a L'auteur ! l'auteur ! » — Rappel ; Romains du parterre. — Solitaire. — a Tous ! tous! j) TYPES CÉLÈBRES AU THÉÂTRE. Agnès; Arlequin. — Brighella. — Cadet Rousselle; Capitan (Le) ; Casperl ; Cassandre ; Colombine ; Coviello ; Crispin. — Docteur (Le). — Figaro; Francatrippa ; Frontin. — Gianduja; G-iangurgolo ; Gigogne (Dame); Gille. — Isabelle. — Janot ; Jeannot ; Jocrisse. — liéan- dre ; Lélio. — Maccus ; Mandncns ; Marinette ; Masca» ille; Matasicte; Meneghino; Merlin; Mezzetin. — Old Vice. — Paillasse ; Pantalon ; Pascariel ; Pasquin ; Pier- rot ; Polichinelle ; Pulcinella ; Punch. — Scapin ; Scara- mouchc ; ganarelle ; St^nterello. — Tartaglia; T r iTelin: Truffaldin. — Zanni. THÉÂTRE EN PROVINCE. Abonné; Abonnement; Admission; Agents dramati- ques ; Année théâtrale ; Arrondissement théâtral ; Avan- ces. — Banquiste ; Bassin ; bénéfice simulé ; Billet de répétition ; Brevet ; Brochure ; Brûler une ville. — Ca- botin; Cabotinage; Cabotiner; Cachet; Chanter les chœurs ; Chef de société ; Congé. — Débuts ; Décentra- lisation artistique ; Directeur breveté ; Droits d'auteur. — Emploi des beaux rôles; Emplois (Les) au théâtre; Engagement; Excursions. — Four (Faire). — Garde- robe. — Honoraires. — Jeton. — Loge infernale. — Maître de musique ; Mémoire; Monter une partie. — Or- dre de début ; Ordre du spectacle. — Paquet ; Paraître ; Parler au public; « Par permisjtion de M. le maire; » Passer un air, un morceau; Programme; Prorata. — Rejet ; Répertoire ; Rôles de complaisance. — Semaine sainte ; Société. — Théâtres d'enfants ; Tournée ; Troupe. — Villes sédentaires. LES MARIONNETTES. Boutique; Burattini. — Castelet; Compliment; Crè- che. — Fantoccini; Foire (Théâtres de la). — Gigogne (Dame) ; Gnafron ; Guignol. — Hanswurst. — Jan Klaassen. — Karagheuz. — Maccus; Marionnettes. — Old Vice. — Polichinelle ; Pratique ; Punch ; Pupazzi , puppi. ACROBATES, SALTIMBANQUES. Personnel et matériel; coûtâmes; exercices. Aboyeur ; Acrobate ; Animaux savants ; Automates. — Baladin; Balancier; Baraque; Bateleur; Bobèche et Galimaf ré ; Boniment ; Boulevard du Temple. — Ca- briole; Charlatan; Clown. — Danseur de corde ; Dislo- qué; Dompteur. — Équilibriste ; Escamoteur. — Foire (Théâtres de la) ; Funambules. — Grimacier ; Gymûasiar- que ; Gymnaste. — Hercule forain ; Histrion. — Mar- chand d'orviétan; Ménagerie ; Montre. — Neurobates. — Opérateur; Oripeaux; Orobates. — Paillasse; Parade; Paradiste ; Perche (La) ; Phénomène ; Pitre ; Pratique ; Pyramide humaine. — Saltimbanque ; Saut périlleux ; Sauteur, sauteuse ; Schœnobates. — Tours de gibecière , de gobelets, de passe-passe ; Trapèze ; Tréteaux. — Veur triloque ; Voltige ; Voltigeur, voltigeuse. AMUSEMENTS PUBLICS, RÉJOUISSANCES POPULAIRES, SPECTACLES DIVERS. Aéronautes. — Bacchanales; Bal de l'Opéra; Bals (Les) au théâtre; Beuglant; Boui-boui. — Cafés-cou» TABLE SYSTÉMATIQUE. 775 certs ; Café flamenco ; Café-spcetacle ; Carnaval ; C<'irron- sel ; Cavalcade; Combats de coqs; Concert ; Concert (Le) spiritael ; Concerts populaires ; Cosmorama ; Courses de chevaux; Courses de taureaux ; Crèche ; Cri. — « De par et pour le peuple; j> Dionysiaques ; Diorama ; Ducasse. — Entrées solennelles. — Fantasmagorie ; Festival ; Feu d'artifice ; Figures de cire ; Fous (Fête des). — Gui- gnol. — Illuminations. — Jardins publics ; Jeu du pendu ; Jeux dans l'antiquité ; Joute. — Kermesse. — Lanterne magique. — Marionnettes; Mascarade; Ma- tinées; Ménagerie; Mi-carême ; Montre ; Musico. — Kau- machie. — Ombres chinoises. — Panorama; Parade; Physicien; Prestidigitateur. — Récital. — Saturnales. — Tableaux vivants ; Tournoi ; Tours de gibecière , de gobelets, de passe-passe. ÉQUITATION, COURSES, JEUX CHEVALERES- QUES DANS L'ANTIQUITÉ ET DANS LES TEMPS MODERNES. Carrousel; Cavalcade; Cerceaux (Saut des); Cham- brière ; Ciniue ; Courses de chevaux. — Echarpes (Saut des); Écuycr, écuyère. — Haute-école; Hippodrome. — Manège. — Piste. — - Quadrille. — Saut des banderoles ; Saut des cerceaux ; Saut des echarpes. — Tournoi. EXPRESSIONS ET LOCUTIONS ETRANGERES. Accademia; A fftigto; Ariogo, — Ba»so caniante : Bravo; Bravura; Buffv cancafo: Bnrattini. — CarteUo {Teatri 0'^rv^C^^^;^v'^^' ''"■■''r^A^ ^**^«*^ '^^^^^^^ : ' ^a^aaa^^*' ^r\r\^r\r' ./.Ma**^ x59^'- :^^M^^^;:c^:aî«ilM*^^^ccS;;^?^^^ ^^A^.^A«;»^A/^/^/ ^a».,^AaA^.îi,- :^ÎAW^^^^ ^'^'^Aa; ''>AiA^A -Ar^ÀAAC'